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Etude lexico-semantique des noms des journaux au Rwanda

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par Pierre Canisius MUTSINZI
Université Nationale du Rwanda (UNR) - Licence en Langue et Littérature Française, Option Science du Langage 2007
  

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1.1.2.2. La presse rwandaise après la colonisation

a) Sous la première république

Kayibanda, ancien journaliste du Kinyamateka, prit le pouvoir et devint le premier Président de la République du Rwanda. Il avait lutté à cor et à cri pour la création d'une presse indigène, capable de constituer un pont entre les élites et les masses. Il avait donc les atouts pour développer la presse rwandaise. Néanmoins, on a perdu tout l'espoir qu'on avait en lui, car, arrivés au pouvoir, les premiers dirigeants se sont contentés de multiplier uniquement les textes officiels dans le souci de contrecarrer le pouvoir royal d'hier. Quant au domaine de la presse, on n'a rien changé.

En effet, comme le croit Bart, (1982 :161) «il semble donc que le Président, qui était arrivé au pouvoir grâce à la presse et qui, de ce fait, en connaissait la puissance, ne voulait pas qu'elle joue le même rôle, à ses dépends cette fois-là. (...) Mais il ne voulait pas se dédire et multiplia- ou laissa se multiplier- les grandes déclarations tout en veillant à ce qu'une presse étroitement contrôlée par le gouvernement occupe le devant de la scène et que la presse catholique, ne soit plus un foyer de contestation .»

On se rend compte que parfois le président avait peu de confiance aux moyens de communication privée. Dans sa lettre aux responsables du pays datée du 12 octobre 1968, le président Kayibanda affirmait : «l'information des masses sur le programme national est une nécessité. Presse écrite, radios, cinémas, photos, réunions et meetings des populations qui n'insisteraient que sur le coté négatif de la vie au lieu de montrer l'objectif et d'indiquer les moyens, même modestes d'y arriver, seraient des saboteurs pour le développement de la Nation. Tous ceux, dans le pays, qui disposent de ce genre de moyens de communication (d'information et de formation) sont responsables de la stagnation du progrès du peuple. » (Bart, 1982 :162)

De tout cela, on peut conclure que pendant la première République, l'autorité a su imposer son ton, la doctrine prêchée par le pouvoir était de mise. A part les journaux catholiques dont Kinyamateka, Dialogue et la revue des jeunes, Hobe, aucune autre entreprise de presse privée n'a vu le jour.

b) Sous la deuxième république

Depuis le début de la deuxième république jusqu'en 1990, il n'y a pas eu de grands changements en matière de presse et particulièrement de presse privée. Les conceptions souvent implicites chez Kayibanda ont été explicitées chez son successeur.

On se rend compte même que parfois le Président voulait se servir de la presse comme auxiliaire du gouvernement et, dans ce cas, elle était destinée à conscientiser les masses à bien accueillir les décisions prises. Le même auteur le souligne quand il cite l'extrait de déclaration du Président Habyarimana du 9 août 1974 qui développe d'ailleurs celle du 1er août 1973. « ...on ne peut pas se passer de la presse puisque c'est un intermédiaire entre le chef et ceux qui doivent exécuter les décisions qui ont été prises... le chef connaît les desseins de ses subordonnés par la presse et il communique sa pensée profonde par ce canal » (Bart, 1982 :163).

De même, le Président Habyarimana avait déclaré : « j'ai dit ailleurs que l'information servira de trait d'union entre les gouvernants et les gouvernés. C'est-à-dire que les gouvernants ont aussi un grand besoin d'être éclairés et positivement critiqués. Mais cette critique ne doit pas se faire dans notre pays, synonyme d'irrespect et d'offense voulus. » (Dialogue N°79 1980 :2.)

En réalité, à travers ses différents messages, le Président voulait montrer à l'opinion publique son attachement à la déclaration universelle des droits de l'homme tout en les limitant par des termes obscurs ou mal définis. Cette pensée est accentuée un peu plus loin quand il ajoute « c'est pourquoi, dans notre pays, mon gouvernement s'attelle, autant que ses moyens le lui permettent, à développer une information saine, répondant aux objectifs et à l'esprit de notre programme d'action, louant, sans chauvinisme, mais fièrement, l'âme de notre peuple... » (J. Habyarimana, Message à Dialogue N°79, 1980 :2.)

Il est regrettable cependant, que toutes les initiatives qui avaient été prises dans le cadre de la presse, ont été freinées, à partir de l'Indépendance, conséquence d'un régime dictatorial qui a marqué les deux Républiques. La preuve en est que seuls trois journaux ont vu le jour durant plus de 30 ans. Il s'agit de :

§ « Urumuri rwa Demokarasi », journal du Parti MDR Parmehutu né en 1963 ; il s'arrêta en 1973 pour réapparaître en 1991, avec la renaissance du Parti en question.

§ « Le coopérateur - Umunyamuryango » créé en 1965 par la coopérative TRAFIPRO et fermé en 1985.

§ En 1963, apparaît le journal « Rwanda carrefour de l'Afrique » écrit en trois langues : français, anglais, swahili. Il fut remplacé par « Le Relève » en 1973, connu aujourd'hui sous le nom de « La Nouvelle Relève ».

On remarque alors que de 1973 à 1989, aucun journal n'a été créé. Au contraire, les journaux ont été découragés, ceux qui existaient déjà ont été arrêtés, sans oublier la persécution des journalistes d'alors. A partir des années 90, on assiste à une prolifération des journaux de telle sorte qu'en 1993, on dénombre plus de 80 journaux. En plus, des radios furent créées : « Radio Télévision des Milles Collines (RTLM), et « radio Muhabura », propriété du FPR-INKOTANYI dans le temps.

c) La naissance de la presse contestataire

Depuis l'avènement de la deuxième république, la presse rwandaise a été représentée, à part la presse publique, surtout par les titres catholiques dont Kinyamateka, tenu par la conférence Episcopale, la revue Dialogue, un mensuel fondé par l'abbé Massion en 1967 et dirigé, depuis lors par les Pères Blancs, et Hobe, journal destiné à la jeunesse. A côté de cette presse catholique, évoluait Umunyamuryaango Trafipro, mensuel de la coopérative- Trafipro, qui fut obligé d'arrêter ses parutions en 1985 à cause de multiples pressions qu'il subissait de la part du régime.

Le déclic se produisit en 1987 avec le lancement du journal Kanguka (Réveille- toi), un nouveau mensuel indépendant. Son initiateur est Vincent Rwabukwisi, très opposé au régime. « Rompant avec le ton compassé de Kinyamateka et le discours ennuyeux des médias officiels, Kanguka et le tout premier journal à faire connaître au Rwanda les Øfaits diversØ, en dénonçant de moins en moins timidement les abus du régime et les affaires de corruption. » (Chrétien, 1995 :21)

Après Kanguka, d'autres nouveaux journaux inondent la capitale en 1990, année que l'on considère comme Øle printemps de la presse au RwandaØ. Cette prolifération aurait aussi un rapport avec la politique générale du Rwanda caractérisée par les violences dont Guichaoua nous donne les explications suivantes : « parmi les explications de ces excès de violence, on indiquera bien entendu, sur le plan historique, les effets de mémoire, peurs et fantasmes légués par l'histoire contemporaine, la ségrégation ethnique diffusée et officialisée, sur le plan socio- économique, la violence quotidienne des rapports sociaux dans un contexte de lutte pour la survie(...). Sur le plan idéologique ensuite, peuvent être invoqués la crise de la transmission des valeurs des aînés sur les collines qui ne sont plus en mesure de proposer à leurs descendants, l'enfermement culturel, la modification du ` Père de la Nation'. Au niveau politique enfin, on insistera sur la cristallisation des appartenances partisanes. » (Guichaoua, 1995 :36). Tous ces journaux adoptent un ton nouveau, une liberté d'expression sans précédent. Ils provoquent ainsi une grande panique chez certains Rwandais comme l'écrit toujours Chrétien, et la réaction répressive du pouvoir est alors considérée comme légitime.

« Pour contrecarrer l'audace et quelques débordements de la presse privée, l'autorité essaie d'utiliser la presse officielle qui Ø pèche par trop de sympathie aux pouvoirs établis Ø » (Nubahumpatse, 1991 :6). Chrétien (1995 :44) ajoute à ceci : « Et comme cette officielle n'a plus de crédit aux yeux de tous, le régime se cherche d'autres porte- voix ».

Le Président Habyarimana encouragea la création de journaux concurrents, fortement engagés dans l'ethnisme et dans la lutte contre l'ØennemiØ, aussi bien intérieur qu'extérieur. A ce propos, Vidal (1995 :22) dit que « l'état- major de l'armée rwandaise définissait ainsi les ennemis et les complices : l'ennemi principal est le Tutsi de l'intérieur et de l'extérieur extrémiste et nostalgique du pouvoir, qui n'a jamais reconnu et ne reconnaît pas encore les réalités de la révolution sociale de 1959. Quant à ses complices, ils se recruteraient dans divers groupes sociaux parmi lesquels figurent notamment les réfugiés tutsis, les tutsis de l'intérieur, les hutus mécontents du régime en place, les sans- emploi de l'intérieur et de l'extérieur du Rwanda, les étrangers mariés aux femmes tutsi ». L'objectif du Président Habyarimana est « de parler plus haut et plus fort que les autres médias, d'où l'apparition des journaux extrémistes qui vont relayer et amplifier cette définition de l' Ø ennemiØ » (Rutembesa, 1999 : 6-7). C'est enfin ce que justifie Chrétien (1995 :45) quand il précise que : « parmi les 41 titres nouveaux qui voient le jour en 1991, le régime suscite la création d'au moins 11 journaux à la dévotion du régime »

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault