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La dignité de l'enfant

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par Pierre Leon André DIENG
Université Cheikh Anta DIOP de Dakar - Maà®trise en Droit 2003
  

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INTRODUCTION

De nos jours, les Droits de l'Homme sont sur toutes les lèvres et habitent tous les discours juridiques et politiques.

Les Droits de l'Homme sont devenus une des composantes importantes des relations internationales contemporaines.

L'histoire de l'humanité est indissociable du combat des individus et des peuples contre l'injustice, l'exploitation et le mépris. La reconnaissance, sur le plan national puis sur le plan international, des droits et des libertés fondamentaux de l'homme est l'une des expressions les plus prestigieuses de ce combat.

Aux droits de l'homme, terme générique regroupant toute l'humanité, le monde tend à consacrer les droits de l'individu en ce qu'ils ont de spécifique qu'ils visent à prendre en considération que les intérêts particuliers des personnes.

Et précisément, on invoque volontiers ces mêmes droits et libertés pour légitimer certaines formes de revendications toujours conformes aux idéaux et aux principes formulés par ces droits. Notre époque ne croit plus à une politique des droits de l'homme qui aurait pour cible l'humanité envisagée de façon abstraite et indifférenciée. Plus exactement, elle l'estime insuffisante : l'idée d'un individu moyen titulaire de droits a cédé le pas devant la constatation des revendications de groupes. Chacun demande à ce que lui soit garanti une dignité qui suppose des mesures correctives. C'est justement dans ce cadre que l'on conçoit, de plus en plus aujourd'hui, des applications particulières des droits de l'homme qui développent des particularités positionnelles de droits : femmes, handicapés, étrangers, réfugiés, détenus politiques, etc. Ces personnes ont réclamé et continuent à exiger des garanties, une égalité, une dignité. Ce qui appellerait à des relectures des bases textuelles telles la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen des 24 et 26 août 1789, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine signée à Addis-Abeba en mai 1963 abrogée et remplacée dans les années 2000 par l'actuelle Charte de l'Union Africaine, la Déclaration Universelle des Droits des Peuples (Alger 1976), la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples du 28 juin 1981 (entrée en vigueur le 21 octobre 1986), la Déclaration Islamique Universelle des Droits de l'Homme du 19 septembre 1981 (Palais UNESCO), etc. qui toutes n'ont pas pris en compte de telles revendications.

En fait, ces particularismes se sentent marginalisés, affaiblis et ne demandent pas moins qu'une législation spécifique à leur profit car le propre de tout mouvement naturel, de toute société est, par essence, d'écraser les couches les plus faibles.

Or, précisément, l'enfant est, par définition, un acteur fragile, vulnérable et le plus faible parmi les faibles puisqu'il ne survivre puis se développer qu'avec l'aide et l'assistance d'autrui.

L'enfant est l'innocence même. La femme nous l'offre dans sa douleur pour qu'il vienne illuminer de sa gaieté notre vie. A ce propos, Victor HUGO (1802-1885) résume de fort belle manière notre pensée dans une originalité bien fouillée en clamant dans un vers tiré de · Lorsque l'enfant paraît · :

« Quand l'enfant paraît, le cercle de famille,

Applaudit à grands cris. Son doux regard qui brille

Fait briller tous les yeux,

Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être,

Se dérident soudain à voir l'enfant paraître,

Innocent et joyeux... »

Cette représentation de la vulnérabilité de l'enfant est une perception sous forme de prescriptions des règles traditionnelles et / ou formelles voulues par les adultes.

Ce faisant, l'acte de prendre l'enfant, de le guider vers un but n'est jamais, somme toute, innocent mais intéressé. Cet intérêt est apprécié à l'aune de la moralité. En effet, la protection des droits de l'enfant, en général, et de sa dignité, en particulier, doit faire l'objet d'une politique permanente suivie par les Etats, la famille, la doctrine, les organismes nationaux et internationaux et la justice.

L'enfant a donc une créance de laquelle sont débiteurs les acteurs précités. Les Romains de l'Antiquité l'ont si bien compris qu'ils n'ont pas manqué de magnifier cette vérité « in puero homo », dans chaque enfant réside un homme.

Pour avoir compris cette pensée, la Société Des Nations (SDN) adopta en 1924 la Déclaration de Genève qui posait, pour la première fois, les premiers indicateurs relatifs à la protection de l'enfance. La communauté internationale prend déjà conscience de l'importance accrue de l'image, du respect et de la considération qu'il faut accorder à l'enfant.

Cette année fut charnière et prépondérante vers les futures luttes pour l'avancée de l'affirmation de la personnalité de l'enfant.

Ce même souci anima les Nations-Unies ( N-U), qui succédèrent à la SDN, à prévoir les droits de l'enfant dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948.

Plus que la Déclaration des Droits de l'Enfant de 1959 passée largement inaperçue, l'évènement fut créé par l'adoption le 20 novembre 1989, au sein de l'Assemblée Générale des N-U dans un bel élan d'unanimité, d'un traité : la Déclaration en dix points des droits de l'enfant dite Convention Internationale des Droits de l'Enfant (CIDE) ou Convention de New-York. L'étape de 1979 vit l'institution de l'Année Internationale de l'Enfant. C'est à partir de cette étape que fut entamé le processus de préparation, d'élaboration et d'adoption de la CIDE. L'adoption fut ouverte à la signature et à la ratification des Etats dès le 26 janvier 1990 et pour son entrée en vigueur le 2 septembre 1990.

Le Sénégal, avant même le délai imparti pour l'entrée en vigueur, avait procédé à la ratification le 31 juillet 1990. Depuis cette date, il a accru son dispositif de protection de la dignité de l'enfant par des structures autonomes et spécialisées rattachées à plusieurs ministères dont le principal reste celui de la Petite Enfance qui est rattachée dans le sillage du ministère de la Famille, de la Femme et de la Solidarité. De plus, plusieurs directions (de la Petite Enfance, de l'éducation surveillée, etc.), centres spécialisés de rééducation ou de détention (l'AEMO), une législation spécifique et la récente politique de la case des Tout-Petits participent à cette dynamique, en plus d'une justice spéciale dévolue à l'enfant.

La dignité de l'enfant est la thématique sur laquelle tournera nos constructions.

Dignité et enfant, deux mots clés qui nous accompagneront durant toute notre réflexion.

Par dignité, il faut entendre le respect que mérite quelqu'un. C'est un principe selon lequel un être humain ne doit jamais être traité comme un moyen mais comme une fin en soi, l'estime que l'on doit vouer à son amour-propre et à son honneur.

La définition de l'enfant, par contre, pose problème. L'infans latin, c'était l'enfant en bas âge.

A notre époque, même avant, chaque société a sa conception de l'enfant et tente de la traduire en règles de droit telles l'âge de la majorité civile ou celle pénale ou encore celle de travail.

Notre droit interne sénégalais n'est donc pas le seul à s'intéresser à l'enfant.

L'art. 276 alinéa 1er CF, depuis la réforme apportée par la loi n° 99-82 du 3 septembre 1999, modifiant la majorité civile (uniformisée à la majorité pénale), prévoit que l'enfant mineur est celui âgé de moins de 18 ans de l'un ou de l'autre sexe.

La constitution du 7 janvier 2001 en son art. 3 alinéa 3 épouse la même démarche.

Dans ce même ensemble d'idées, la plupart des textes internationaux précités et relatifs aux droits de l'enfant considèrent également que l'enfant est tout humain de moins de 18 ans sauf si la loi nationale accorde la majorité plus tôt (art.1er de la CIDE du 20 novembre 1989).

Cette lecture laisserait croire que la dignité de l'enfant doit être comprise dans cette fourchette.

Or, selon le fameux adage « infans conceptur pro nato habetur quotis de commedis ejur agitur », l'enfant est tout être humain conçu et considéré comme né toutes les fois que cela peut lui apporter des avantages.

C'est dans ce sens qu'il faut lire l'alinéa 2ème de l'art. 1er du code de la famille du Sénégal :

« L'enfant peut acquérir des droits au jour de sa conception s'il naît vivant ».

Ainsi, la protection de la dignité de l'enfant peut remonter plus loin, au jour de sa conception même.

Néanmoins pour des soucis de commodité, nous savons que cette qualité d'être humain se prolonge au moment de la naissance. Ainsi de la personnalité conditionnelle, il accède à la personnalité juridique effective de laquelle procède une rétroactivité de la jouissance de tous les droits et de la qualité de sujet de droit et d'un statut d'enfant.

La naissance semble donc être un tournant dans la vie, même si elle ne marque pas le début de la vie et celui de la protection de sa dignité.

Par conséquent, notre démarche qui suivra se limitera à l'enfant, sujet naissant de droit. Un tel choix arbitraire nous amène déjà à élaguer des pans intéressants d'atteinte à la dignité, à la vie de l'enfant conçu que dont l'avortement, l'infanticide, l'insémination artificielle, le sort des embryons non utilisés et le clonage. Avec tout ce que ces pratiques ont de bouleversant et de désastreux dans la dignité de l'enfance lorsqu'elles sont utilisées à des fins détournées, immorales, commerciales et industrielles.

Il est, certes, vrai que leurs conséquences postérieures entrent dans notre champ d'étude car concernant l'enfant vivant et existant, fruit de telles pratiques.

Ceci dit, la réflexion sur la dignité de l'enfant, qui est la protection même de son existence dès le début de sa vie jusqu'au moment où on estime qu'il a acquis une maturité d'adulte, suscite moûltes interrogations que l'on peut quantifier de la sorte :

Qu'est-ce la dignité de l'enfant et pourquoi une dignité de l'enfant ?

Quel est le domaine de cette dignité, le champ des atteintes de celle-ci et

de sa protection ?

Quelles sanctions sont apportées à sa violation ?

Comment préserver et protéger cette dignité de l'enfant ?

C'est autour de ces considérations que se greffera notre problématique. En effet, l'objet de notre étude consiste, pour l'essentiel, à évaluer le sens, la portée juridiques de la notion de dignité de l'enfant et son rôle protecteur. Nonobstant la nature juridique de ce thème, il faudra également nous interroger sur sa valeur. La problématique consiste aussi à noter que toute nation équilibrée ne peut se réaliser qu'en accordant une activité participative à l'enfance.

Une prospection des bases textuelles (nationales et internationales) montre que le Sénégal est en phase dans sa mission protectrice de la dignité de l'enfant.

Cependant, les applications pratiques de cette protection restent à parfaire du fait de différences culturelles et civilisationnelles. Ce décalage entre les textes et la réalité a pour causes et facteurs endogènes et exogènes le comportement des acteurs protecteurs face à des manquements constatés, voire même souvent du caractère récalcitrant de la cible protégée.

Par suite, de façon complémentaire, des solutions et perspectives seront proposées sans pour autant dans la routine des formules répétitives, des redondances singulières.

Le sujet revêt un cachet toujours pratique sous le feu de la rampe des intérêts qu'il ne manque pas de susciter. On peut ainsi relever les difficultés posées à l'applicabilité des textes au Sénégal. Il s'agit d'accompagner l'enfant dans sa marche progressive vers la maturité.

Ce qui est une exception dans la mentalité sénégalaise d'accaparement de la personnalité de l'enfant. En outre, le sujet pose, lui-même, sa limite. En effet, un effet de balancier, de flexibilité est opéré suivant les intérêts du moment à sauvegarder. L'Etat vise à réaliser l'équilibre entre la dignité de l'enfant et l'obéissance due aux valeurs traditionnelles et formelles qui sont des nécessités d'ordre public.

L'intérêt théorique est que les acteurs (Etats, familles, organismes...) n'ont pas souvent la même perception de la notion de dignité de l'enfant, encore moins de sa protection. Cela se comprend et s'explique par les différences de civilisations à l'échelle internationale et culturelle et à l'échelle nationale. On craint ici de faire de l'enfant non plus un sujet de droit mais un roi-enfant, un prince qui, croirait-on, est insoumis au droit à l'instar de l'impétueux monarque français le Roi-Soleil Louis XIV qui disait : « l'Etat, c'est moi ! ».

Ainsi la notion de dignité de l'enfant ne rencontre pas l'égale adhésion au sein de la communauté internationale et fait l'objet d'une difficile appréhension.

Il sied, maintenant, de poser les balises sur lesquelles va se fonder notre travail.

Parler de la dignité de l'enfant dans le monde n'est donc pas notre objectif. Au Sénégal, c'est déjà un large océan que soulèvent des vagues de passions.

Au Sénégal, l'enfant se meut dans une ambiance de plusieurs règles. Nous nous proposons de scinder notre étude en deux parties. Nous concentrerons l'essentiel de nos efforts sur l'examen du contenu législatif relatif à la protection de la dignité de l'enfant qui naît dans un environnement protecteur de sa dignité (TITRE I). Toutefois, ce n'est qu'en examinant le degré de protection et de clarté des règles énoncées que l'on pourra évaluer la pertinence de la prise en considération de la dignité de l'enfant quant à ses mécanismes de contrôle, de son degré de viabilité et de l'appréciation de son efficacité. Le constat que l'on en tirera est qu'il se pose un problème d'applicabilité, une pratique limitée de la préservation de la dignité de l'enfant (TITRE II).

L'environnement protecteur à la dignité de l'enfant s'explique par cette dynamique du législateur sénégalais d'introduire tout un ensemble de règles favorables qui suivent le chemin de l'enfant depuis sa naissance, son éclosion dans un cercle familial et des privilèges dans le statut personnel.

En outre, l'activité sociale de l'enfant bénéficie d'un régime aménagé, qui illustre le renforcement adopté pour le préserver contre toutes formes d'atteintes économiques et pénales et même celles qu'il peut causer à autrui.

Cependant cet environnement, pour euphorique qu'il soit, subit les contrariétés d'une pratique difficile qui sont autant d'obstacles à la promotion de cette dignité. Cette inefficience résulte de raisons que renforcent la précarité des garanties internes du fait des failles dans la volonté politique de l'Etat mais également des blocages intrinsèquement posés par les populations elles-mêmes et même par la cible protégée. Pareillement, les garanties internationales ont une portée réduite du fait des intérêts divergents en présence et de l'absence d'instruments performants de contrainte.

Mais l'image de l'enfant n'est pas désespérante et des perspectives d'amélioration pourraient être prises par un renforcement des mesures existantes, une application effective des décisions consacrées et par des voies nouvelles allant dans le sens de la création d'un médiateur chargé de l'enfant et un code de l'enfant.

TITRE I - UN ENVIRONNEMENT PROTECTEUR A LA DIGNITE DE L'ENFANT

Le législateur sénégalais a posé le socle sur lequel il a eu à asseoir toute une protection de la dignité de l'enfant.

Celle-ci commence, dès la naissance de l'enfant, par son identification civile comme sujet de droit (CHAPITRE I). La société est un milieu inconnu à l'évolution et au progrès de l'enfant.

C'est dire qu'il peut être pour l'enfant un cadre de périls dans sa croissance vers la maturité. En vue de le prémunir contre les risques auxquels il peut être confronté, l'Etat a également prévu des mesures de sauvegarde sociale pour l'enfant vu sous l'angle d'un acteur dans la cité (CHAPITRE II).

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius