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Mutations financieres et financement de l'économie au Cameroun

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par Dieudonne Desire ELANGA
Universite de Douala Cameroun - DEA 2004
  

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Le système financier Camerounais dont les défaillances ont été observées au milieu des années quatre-vingt est sujet à de nombreuses mutations. Ces mutations désignent les changements observables sur la sphère financière, et se sont traduites par une émergence de nouveaux établissements financiers, un essor remarquable de la micro-finance, un passage de l'illiquidité à la surliquidité des banques et la mise en place des mesures d'ajustement financier. L'explication de ces changements réside dans un certain nombre de faits criants, dont deux paraissent pertinents pour être évoqués pour notre propos. Il s'agit d'abord de la crise économique qui a profondément affecté les banques, limitant ainsi leur rôle d'intermédiation financière. Ensuite le rétablissement des équilibres macroéconomiques, et enfin, l'apparition des besoins de plus en plus importants des ressources pour le financement des activités de production. Contrairement aux évolutions observées dans les systèmes financiers anglo-saxons, pour lesquelles l'initiative relevait du secteur privé, celles du système financier Camerounais se sont réalisées par l'initiative des pouvoirs publics, qui étaient soucieux de rétablir l'équilibre financier détérioré par la crise. Ils ont ainsi mis en place d'importantes réformes. L'objectif de ces réformes était de donner au système bancaire une solidité financière et une capacité à mobiliser les ressources financières, et à les affecter dans les secteurs productifs de l'économie.

A cet effet, à partir de la fin des années 1980 et le début des années 1990, les pouvoirs publics camerounais, avec l'appui des bailleurs de fonds internationaux : Banque Mondial, Fonds Monétaire International et Banque des Etats de l'Afrique Centrale ; vont dans le cadre des plans d'ajustement structurel enrichir leur thérapie habituelle par des restructurations bancaires. Ainsi, une nouvelle organisation va être donnée au système bancaire sur le plan technique se traduisant par le désengagement de l'Etat du capital des banques au profit des intérêts privés.

L'objet de ce chapitre est double. Il apporte une explication aux origines internes des mutations financières via d'une part, la crise de l'intermédiation financière et, d'autre part, les mesures d'ajustement financier. Il importe dès lors de revenir sur la crise de l'intermédiation financière (section1), avant d'aborder les mesures d'ajustement financier au Cameroun (section2).

SECTION I : LA CRISE DE L'INTERMEDIATION

FINANCIERE

La crise économique du milieu des années quatre-vingt a révélé les difficultés de l'intermédiation financière au Cameroun. Ces difficultés étaient liées aux causes multiples : notamment l'omniprésence de l'Etat qui permit aux entreprises publiques de bénéficier des concours bancaires pour assurer leurs équilibres (Pelletier, 1993), les erreurs de gestion (Mathis, 1992), les difficultés conjoncturelles, le faible degré d'approfondissement financier, l'inadéquation des structures bancaires aux habitudes des populations, et à l'orientation des financements vers les secteurs d'exploitation. Il s'agit d'une  carence quasi congénitale que l'évolution n'a pu malheureusement lever (Bekolo-Ebe, 1996)

Dans cette situation asphyxiante, les banques ne pouvaient plus assurer leur rôle d'intermédiation financière, compromettant ainsi le processus de croissance et développement économique. L'objet de cette section est de montrer en quoi est-ce que la crise de l'intermédiation a contribué aux mutations financières. Pour cela, il sera présenté dans un premier temps les explications théoriques des causes de la crise (I), et dans un second temps ,les caractéristiques de la crise de l'intermédiation financière (II).

I. LES EXPLICATIONS THEORIQUES DES CAUSES DE LA CRISE DE L'INTERMEDIATION FINANCIERE

Les causes12(*) de la crise de l'intermédiation financière peuvent être distinguées en deux catégories : les causes nées de l'absence de relations structurelles entre la banque et l'économie et, des causes introduites par les politiques économiques. Ces causes seront successivement présentées à la suite de ce travail.

I-1 LA FAIBLESSE DES RELATIONS STRUCTURELLES ENTRE LA BANQUE ET L'ECONOMIE.

La faiblesse des relations structurelles entre la banque et l'économie peut s'apprécier à travers deux critères principaux. Il y a d'une part, la logique de l'implantation bancaire au Cameroun et, d'autre part, l'existence d'asymétries d'information.

I-1-1)-La logique de l'implantation bancaire au Cameroun

L'appréciation de l'influence des intermédiaires bancaires sur l'évolution de l'économie camerounaise, ne peut se faire sans une analyse historique des origines et des motivations qui ont sous-tendu leur mise en place.

L'installation des banques au Cameroun est très ancienne et, obéit à une logique coloniale. Toutes les relations seront dès l'origine dominées par la prééminence de la métropole sur les colonies. Ainsi, les banques sont apparues largement tributaires de celles de la métropole qui avaient déjà des structures bien organisées. Ces institutions apparaissent en conséquence en avance par rapport aux structures économiques et, ont été imposées sans tenir compte des réalités économiques culturelles et sociales. Leur rôle était de prendre en main le développement des échanges commerciaux au profit de la métropole. Et c'est du développement de ces échanges que dépendra le rythme d'installation des guichets de banque.

Au moment où le Cameroun accède à la reconnaissance internationale, on s'attendait à ce que cette logique soit infléchie ou alors totalement inversée. Mais il n'en ait rien été parce que, la structure de l'économie des colonies n'avait pas elle même fondamentalement changé. Elle est restée pour l'essentielle basée sur la production et l'exportation des matières premières.

Dans la période d'euphorie qui a suivie les indépendances, les banques se sont développées de façon désordonnée et imprudente avec l'aide des banques étrangères dont elles étaient généralement des filiales. N'ayant pas l'expertise nécessaire et n'ayant pas été incitées à l'acquérir, les banques ont préféré prospérer dans les activités peu risquées de financement de l'import-export, et des entreprises publiques détenant les monopoles dans l'exploitation des produits primaires.

L `environnement a continué à être caractérisé par de fortes asymétries d'information.

I-1-2) Les asymétries d'information et l'environnement juridico- institutionnel

Les développements de la théorie de l'intermédiation financière appuyés par ceux de la théorie des contrats et de la théorie de l'agence, ont montré l'importance de la maîtrise de l'information par les banques.

En effet, Gurley et Shaw (1960), définissent les intermédiaires financiers comme des agents transmettant les excédents des agents à capacité de financement vers les agents à déficit de financement. Ceci serait vrai si l'information était disponible pour tous dans la réalité. Or, sur les marchés en général (Akerlof, 1970), et sur le marché du crédit en particulier, les emprunteurs ont une meilleure appréciation de leur capacité de risque que les prêteurs. D'où deux types d'asymétries d'information. La sélection adverse ou type caché, lorsque le marché pur aboutit à consentir des prêts aux mauvais emprunteurs et, le hasard moral ou comportement caché lorsqu'il est impossible pour le prêteur de vérifier les conditions d'utilisation du crédit.

Ainsi, (Leland et Pyle, 1987) aboutissent à la conclusion que, la banque comme intermédiaire financier, gère mieux les asymétries d'information en réduisant de façon institutionnelle les coûts d'acquisition et de gestion de l'information. Dans le même sens, Diamond et Dybvig (1983) perçoivent la banque comme « l'institution déléguée » qui gère les risques liés aux relations de crédit avec l'entreprise.

Cependant, après l'indépendance, l'Etat a participé au capital des principales banques, et a cherché à orienter les ressources vers les activités qu'il jugeait prioritaires, tout en rendant le crédit bon marché par un contrôle administratif des taux d'intérêt. Dans un environnement juridique peu porteur et un contrôle bancaire peu strict, les crédits improductifs aux secteurs désignés par le gouvernement étaient reconduits puisqu'en cas de défaut, les banques avaient en principe le recours de la garantie de l'Etat. Garantie dont, la couverture n'était d'ailleurs pas clairement définie. Cette situation a contribué à dégager les banques de toute préoccupation quant au contrôle de la bonne utilisation des crédits et à la bonne connaissance de leurs contreparties dans la relation de crédit.

De la même manière, fournies en abondance de l'épargne publique, les banques ne se sont pas préoccupées de la collecte de l'épargne et notamment de l'épargne longue. Ces erreurs de gestion ont rendu les banques incapables de faire face au retournement de tendance qui a entraîné les retraits massifs des dépôts étatiques.

Après les indépendances, la gestion des banques qui avait été pour la plupart nationalisées, a éloigné les banques plutôt que de les rapprocher des structures économiques nationales.

En définitive, les relations entre les banques et l'économie sont restées très superficielles ; les banques se contentant de fournir les financements sans se soucier de leur utilisation et, ne s'intéressant pas aux informations comptables et financières sur l'activité passée et future de l'entreprise.

Cette habitude a entraîné la défaillance dans la mesure du risque du côté de la banque, tandis que du côté des emprunteurs, s'est installé une habitude de falsification des documents comptables favorisée par la faiblesse de l'appareil judiciaire.

La politique monétaire pour sa part, a introduit d'autres distorsions.

I-2) LES DISTORSIONS INTRODUITES PAR LA POLITIQUE GOUVERNEMENTALE.

Selon cette catégorie de justification, la politique gouvernementale a un effet sur le comportement bancaire, dans la fonction d'intermédiation financière. Cette politique, bien que menant pour des raisons politiques à une gestion hasardeuse des établissements bancaires, peut aussi introduire une répression financière, ou introduire un dualisme financier.

I-2-1) -La théorie de la répression financière

La répression financière désigne les obstructions réglementaires de toute nature qui contrarient les activités des intermédiaires financiers et entravent le développement de l'épargne (Mc Kinnon, 1970 ; Shaw, 1973). Elle consiste à fixer des taux d'intérêt en dessous de leur valeur d'équilibre, à orienter administrativement le crédit, à fixer les réserves obligatoires à un niveau élevé, et à limiter la concurrence au sein du système bancaire.

Cette théorie découle de l'approche néo-classique du financement du développement qui suppose l'épargne préalable à l'investissement. Celle-ci est une fonction croissante au taux d'intérêt réel. Selon les conclusions de Mc Kinnon, la répression financière empêche l'économie d'atteindre son taux de croissance optimal.

A la suite de Mc Kinnon, des travaux plus récents, réalisés par Eboué C (1990) intègrent le taux d'intérêt informel comme variable déterminante de la répartition du portefeuille des agents économiques en économie réprimée. Dans un tel contexte, la politique monétaire a un effet sur le comportement des banques en les obligeant à revoir leur fonction d'intermédiation financière.

Ainsi, pour stimuler l'investissement, il faut décourager la détention de la monnaie. De cette mécanique, découle une politique monétaire qui conduit à un certain nombre de restrictions que Mc Kinnon (1991)13(*) appelle « instruments de répression financière ».Ces instruments sont :

- La rétention importante des réserves obligatoire sur les dépôts pour lutter contre l'inflation.

- Les restrictions sur les taux d'intérêt : administration des taux (plafonnement, pratique des taux préférentiels ou de faveur pour certains secteurs).

Pour des taux fixés à des niveaux faibles, le plafonnement a conduit à des taux d'intérêts réels négatifs sur les dépôts, si l'on tient compte du niveau du taux d'inflation et des taux d'intérêt rémunérateurs sur les crédits14(*).

En définitive, l'utilisation des instruments de la répression financière conduit à réduire l'attraction de détenir des créances sur le système bancaire.

Par ailleurs, les institutions financières sont obligées de pratiquer une politique de rationnement de crédit, ce qui prive l'accès d'une bonne partie de la population au marché des fonds prêtables et se traduit par la segmentation des marchés des capitaux domestiques. Ainsi, il résulte de la répression financière, une réduction du flux des fonds prêtables dans le système financier, obligeant d'une part, les banques à rationner le crédit et d'autre part, !les emprunteurs potentiels à s'appuyer davantage sur l'autofinancement ou sur les circuits financiers parallèles.

En cela la répression financière génère un dualisme financier dans l'économie.

* 12 Les analyses sur les causes de la crise financière recensent trois séries de causes explicatives de l'occurrence des crises : l'absence d'information pertinente ainsi que le caractère asymétrique de leur répartition entre les différents acteurs ;L'existence d'influences extérieures pouvant entraîner des conséquences indésirables et involontaires sur les marchés. La difficulté de trouver une infrastructure appropriée. D'autres analyses distinguent : Les causes macroéconomiques, les causes sectorielles, et les causes institutionnelles.

* 13 Mc Kinnon(1991) cité par Isaac Tamba et al(1994).

* 14 Déjà en 1985,(BEAC, Etudes et statistiques n° 122 Avril 1985 p122) Andely relève parmi les contraintes s'opposant à l'exercice de l'activité bancaire, le bas niveau des taux d'intérêt servis aux banques à la souscription des bons d'équipement(4.5%) alors que le coût moyen des ressources des banques était de 9.5%.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery