WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les ONG et la protection des enfants soldats

( Télécharger le fichier original )
par N'taho Désirée Florine Roxann Victoire ODOUKPE
Université Catholique d'Afrique de l'Ouest - Maitrise en droit, otion relations diplomatiques et consulaires 2006
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CONCLUSION GENERALE..........................................................71

INTRODUCTION GENERALE

En vue d'assurer la protection des biens, des personnes et des choses, l'Etat s'est muni d'appareils répressifs au nombre desquels l'on compte l'armée. Elle a pour vocation première la défense de l'intégrité territoriale, la protection des populations par le maintien de l'ordre et de la sécurité. Cet important rôle exige de la part des troupes certaines aptitudes physiques, morales et intellectuelles. C'est pourquoi, seuls les adultes, matures et endurants, sont enrôlés dans l'armée.

Cependant, la montée des mouvements nationalistes, les situations de guerres civiles qui résultent de la remise en cause constante de l'autorité et de la légitimité du pouvoir central dans les pays africains depuis la fin de la guerre froide renversent l'état de fait où seuls les adultes participent à la guerre. Ces conflits qui opposent souvent sur le territoire d'un même Etat, des forces armées régulières aux rebelles, entraînent de plus en plus, l'enrôlement de civils parmi lesquels les enfants figurent en bon nombre. Selon le Fonds des Nations Unies de Secours à l'Enfance (UNICEF), «plus de 300 000 enfants, dont certains n'ont pas plus de 8 ans, dans 44 pays de la planète participent directement aux conflits»1(*). Ces enfants, recrutés dans les armées sont privés de  leurs droits fondamentaux notamment le droit à la santé, le droit à l'éducation tout comme le droit à l'unité familiale.2(*)

Pratiquement mis en veilleuse en temps de paix, le phénomène d'enfants participant aux hostilités ou enfants soldats prend des proportions plutôt inquiétantes dans les zones de conflits comme en témoigne une avalanche d'images plus horribles les unes que les autres diffusées par les médias. La violence et les atrocités perpétrées par ces enfants laissent perplexe le commun des mortels: l'idée de la mort est banalisée. L'horreur de la situation décrite plus haut soulève la question des mesures prises par les gouvernements, en vue de respecter les droits des populations civiles en général et des enfants impliqués dans des hostilités en particulier. En général, ces enfants, filles comme garçons, sont enrôlés de force. Ils sont de plus en plus utilisés comme « instruments de guerre » ou comme "armes" à traumatiser les populations civiles parfois sous les regards attentifs de leurs dirigeants.

Mais, en dehors des rebelles et des Forces de Défense et de Sécurité (FDS), il existe aussi un autre type de combattants qui n'appartiennent ni aux FDS ni aux rebelles. On les trouve dans la zone gouvernementale. Ils combattent de leur propre chef pour protéger leurs villages, leurs tribus et leurs biens : ce sont des milices. Ces groupes sont disséminés dans plusieurs villes sous contrôle gouvernemental. On rencontre en leur sein aussi des enfants. C'est cette présence des enfants de part et d'autre des forces irrégulières qui constitue le problème qui nous interpelle et inspire cette étude.

Au demeurant, l'originalité de ce thème se justifie par la tendance à l'extension de la participation des enfants aux conflits armés dans toutes les régions africaines, d'où la nécessité de la protection contre leur implication dans les conflits armés qu'ils soient internationaux ou non. Les guerres les plus récentes en Ouganda, en Angola, au Soudan, au Libéria, en Sierra Léone, au Burundi, en République Démocratique du Congo (RDC) et en République de Côte-d'Ivoire (RCI) où la présence de cette catégorie de combattants est signalée ont remis en évidence la recrudescence de la pratique. Les organisateurs de ces recrutements éprouvent de plus en plus des difficultés à recruter les adultes qui ne sont souvent pas prêts à mourir pour une cause.

L'analyse du contexte actuel de l'ordre international qui est la multiplication des conflits en Afrique, un ordre (pour ne pas dire un "désordre") dans lequel les conflits armés sont devenus monnaie courante et dans lequel la violence s'est en quelque sorte banalisée malgré l'interdiction générale de la menace ou du recours à la force posée par l'acte créateur de l'ONU, constitue aujourd'hui l'un des principaux défis auxquels doit faire face la communauté internationale au premier rang de laquelle se trouve l'ONU.

Son rôle principal est de maintenir la paix et la sécurité internationales. Après l'immobilisme de la période de la guerre froide, l'ONU a sensiblement accru ses activités dans ce domaine.

De nombreuses opérations de maintien de la paix (OMP) ont été projetées dans le monde et surtout en Afrique pour faire face à toutes ces séries de guerres qui y éclatent.

La mise en place de ces opérations a permis d'atténuer, dans bien de cas, les tensions et d'éviter des escalades violentes. A l'inverse, elles ont également révélé leurs limites. Les difficultés et échecs enregistrés dans le maintien et la défense de la paix ont mis en évidence cette vieille leçon de sagesse selon laquelle «il vaut mieux prévenir que guérir». La communauté internationale et les organisations non gouvernementales (ONG), prennent timidement conscience de cette affligeante leçon et de la nécessité d'agir dans ce sens. Aujourd'hui plus que jamais, ces dernières apparaissent en Afrique comme un impératif catégorique au regard des conséquences désastreuses des conflits pour ce continent, conflits que les Etats seuls n'arrivent plus à gérer. Toute cette situation réduit à néant les règles sociales de fonctionnement des sociétés traditionnelles africaines. La nécessité de faire intervenir les ONG s'impose puisqu'elles sont aujourd'hui indéniablement devenues des acteurs incontournables dans la résolution des conflits et de situation de crises. Pour la plupart des ONG, la neutralité de leur intervention, affichée depuis la création de la Croix-Rouge en 1864, leur confère un pouvoir de médiateur unique.

Mais, qui sont-elles? Quelles sont les raisons qui les incitent à intervenir dans les situations de crises pour remédier au phénomène d'enfants soldats? Comment le font-elles ? En d'autres termes, quel a été le leitmotiv de cette attention particulière accordée aux enfants se trouvant dans le cadre d'un conflit armé et sous quelle forme s'est-elle traduite?

Ces interrogations commandent à ce que nous nous arrêtions un instant pour clarifier quelques notions fondamentales sous-jacentes à savoir les notions clés d'enfant, de soldat, d'enfant soldat, d'ONG, de protection et enfin de conflit.

La définition du terme enfant s'analysera au triple niveau dictionnairique, doctrinal et conventionnel.

Etymologiquement, et selon le dictionnaire Larousse, le terme enfant vient du latin «infans», «infantem» de «infantis» formé de in, préfixe négatif et de fan qui signifie parler. Le mot infans veut alors dire ici «qui ne parle pas». Le mot infans désigna d'abord le bébé, le petit enfant qui ne parle pas encore, puis le jeune enfant âgé de moins de 7 ans. C'est donc l'être humain dans la période de l'enfance.

Pour le Dictionnaire Universel, l'enfant est l'être humain dont l'âge est compris entre le moment de la naissance et celui de la puberté3(*). Cet âge de la puberté varie cependant d'une région à une autre et, selon le sexe de l'enfant. Cette définition nous parait insuffisante pour l'objet de notre étude en ce qu'elle ne nous situe pas sur la limite d'âge de l'enfance.

Plus intéressantes alors paraissent les définitions de François Mauriac qui estime qu'«être un enfant c'est donner la main» et de Torelli qui affirme que l'enfant résulte «d'une situation de faiblesse particulière, tant physique qu'intellectuelle ou morale, en raison de son âge, qui le fait bénéficier du droit à une protection spéciale mais qui, en même temps, lui interdit d'accéder à tous les droits de l'homme. L'enfant est d'abord un enfant situé et cette situation fait naître des droits spécifiques4(*) Ces définitions montrent clairement que l'enfant est un être qui n'a pas atteint une maturité intellectuelle, psychologique, morale et donc qui est incapable de faire preuve d'analyse et d'apprécier les choses à leur juste valeur. Dans ces conditions, l'enfant se trouve dans une situation de dépendance vis-à-vis de l'adulte.

En clair, l'enfant se distingue de l'adulte par le fait qu'il lui est nécessaire d'être protégé, d'être canalisé, d'être orienté de part sa situation de vulnérabilité.

Quant aux définitions données par l'arsenal juridique, elles diffèrent quelque peu des deux précédentes. En effet, la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE) du 20 Novembre 1989 spécifie en son article premier que l'enfant s'entend comme étant «tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable». La distinction opérée ici réside dans la limite d'âge dont fait référence ladite Convention. L'enfant est un individu âgé de dix-huit ans au moins. Autrement dit, tout être humain dont l'existence est située entre la période allant de la naissance jusqu'à dix-sept ans révolus est juridiquement considéré comme un enfant. La définition que la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant donne à celui-ci en son article 2, s'inscrit dans le même registre.

Cependant, l'article susmentionné de la CDE ajoute une réserve: «...sauf si la majorité est atteinte plutôt en vertu de la législation qui lui est applicable». Cette réserve indique que l'âge de la majorité qui varie selon la législation des Etats parties à ladite Convention, influence la limite d'âge de l'enfance.

En ce qui concerne la Côte d'Ivoire qui est partie à la CDE depuis le 04 février 1991, sa loi n° 70-483 du 03 août 1970 sur la minorité fixe, en son article 1er, l'âge de la majorité à vingt et un ans (21 ans) révolus, et ne fait aucune distinction de sexe. C'est dire que tous ceux qui n'ont pas 21 ans accomplis sont des mineurs. Cette loi nous permet de conclure que la RCI adhère pleinement à la définition conventionnelle de l'enfant en ce qu'elle ne la modifie en rien.

En droit international humanitaire (DIH), la IVème Convention de Genève de 1949 fixe, dans la plupart des dispositions concernant l'enfant, la limite d'âge à «moins de 15 ans».5(*) Cette limite d'âge suppose l'exclusion d'autres enfants âgés de plus de 15 ans car il existe en effet d'autres dispositions visant les enfants sans référence à l'âge6(*), ou qui emploient d'autres désignations telles que « mineurs », « personnes de moins de 18 ans » ou « adolescents ».

En somme, de toute ces définitions, nous pouvons retenir que l'enfant est l'être humain de sa naissance jusqu'à dix sept ans révolus.

La notion de soldat, elle, renferme étymologiquement la réalité d'un homme équipé et instruit pour la défense du pays. Il désigne un homme de troupe de l'armée de terre ou de l'air. C'est donc celui qui sert dans une armée.

La définition de l'enfant soldat est essentiellement conventionnelle. La CDE définit l'enfant soldat comme un individu de moins de 15 ans membre d'une armée. Autrement, le soldat n'est plus considéré comme un enfant à partir de 15 ans en vertu de son article 38, qui prohibe la participation directe aux hostilités et le recrutement dans les forces armées des enfants de moins de 15 ans. Elle exclut les enfants des collèges militaires qui reçoivent une formation académique ponctuée de quelques règles de la discipline militaire7(*). De même, un rapport du Conseil de Sécurité des Nations Unies définit l'enfant soldat comme «toute personne âgé de moins de dix-huit ans qui appartient à une force armée, quelle que soit sa fonction, ainsi que toutes les personnes accompagnant ce groupe, autres que les membres de la famille, comme les filles enrôlées à des fins sexuelles et de mariage forcé8(*)»

Dans le même sens, les Principes et meilleures pratiques de Cape Town9(*), désignent l'enfant soldat comme « Toute personne sous l'âge de dix-huit ans faisant partie d'une force armée, régulière ou irrégulière quelle qu'elle soit et dans n'importe quelle capacité. Ceci inclut, mais ne se limite pas à tout cuisinier, porteur, messager et tous ceux qui accompagnent ces groupes, en tout rôle autre que celui purement de membre de famille. La définition comprend les filles recrutées pour des fins sexuelles et de mariage forcé. Elle ne décrit donc pas simplement un enfant qui porte ou qui a porté des armes10(*) ».

En termes clairs, par enfant soldat on entend toute personne de moins de dix-huit ans qui fait partie d'une force ou d'un groupe armé, régulier ou irrégulier, à n'importe quel titre, y compris, mais pas exclusivement, en tant que cuisinier, porteur, messager ou accompagnateur, à titre autre que purement familial.

Ainsi, dans l'espace géographique ivoirien, l'enfant soldat peut se définir comme tout individu n'ayant pas atteint vingt et un an révolus recruté et ayant participé aux hostilités, peu importe si celui-ci a été recruté par les « Forces Nouvelles » ou par L'Etat de Côte d'Ivoire.

La notion d'ONG quant à elle recouvre différentes réalités. En dehors des organisations internationales, dont la plus célèbre est l'ONU, vont naître d'autres acteurs essentiels issus d'un phénomène associatif spécifique.

Elles sont selon Marcel Merle: «Tout groupement, association ou mouvement constitué de façon durable par des particuliers appartenant à différents pays en vue de la poursuite d'objectif non lucratif »11(*). Cette définition considère le but non lucratif des ONG comme le critère distinctif. En effet, les ONG ne constituent pas, loin s'en faut, des entreprises commerciales en quête de bénéfices. Elles poursuivent des intérêts sociaux tels l'assistance, le secours, le développement sans attendre une contribution financière des bénéficiaires12(*). Un tel point de vue est réitéré par le doyen MELEDJE Djédjro en ces termes: «Ainsi que le présume sa dénomination, l'organisation dite non gouvernementale se définit d'abord par opposition à ce qui a un caractère gouvernemental ou intergouvernemental ; et aussi par la nature non lucrative de l'activité menée, ce qui distingue les ONG des sociétés commerciales et des firmes multinationales13(*)

De ce qui précède, le but non lucratif constitue la raison d'être de l'ONG. Ce but est repris par l'article 1er de la loi ivoirienne n° 60-315 du 21 septembre 1960 relative aux associations, dont la teneur suit : «L'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d'une façon permanente leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que lucratif ».

Par ailleurs, il faut souligner qu'il serait maladroit d'aborder la notion d'ONG sans s'appesantir un instant sur les multiples notions voisines qu'elle engendre ou dont elle émane. Surtout celle de la société civile, sève nourricière du mouvement associatif longtemps demeuré comme l'expression de la liberté collective.

En effet, la complexité de la notion de société civile, la nature souvent floue et vague de ses composantes sémantiques la rendent rebelle à toute conceptualisation. Néanmoins elle peut se définir selon Larry DIAMOND comme «le domaine de la vie sociale organisée qui est volontaire, largement autosuffisante, autonome de l'État, et régie par un ordre légal ou un ensemble de règles partagées. Cette vie sociale est distincte de la société en général parce qu'il s'agit de citoyens agissant collectivement dans le secteur public pour exprimer leurs intérêts, passions et idées, pour échanger de l'information, pour atteindre des buts mutuels, pour faire des demandes à l'État et pour exiger des comptes de la part des dirigeants de l'État; elle ne reconnaît pas les efforts politiques pour prendre le contrôle de l'État »14(*).

Dans le schéma hégélien : «La société civile se situe à un niveau supérieur à celui du monde de l'individu et de la famille, mais nettement au-dessous du monde plus achevé et parfait de l'Etat»15(*).

La société civile englobe une panoplie d'acteurs à divers visages dont les plus connus sont les syndicats, les organisations communautaires de base, les mutuelles, les fondations, le tiers secteur et tout récemment les OSI16(*). Dans le cadre juridique ivoirien, toutes les associations sont identiques suite à la persistance de la seule et laconique loi n° 60-315 portant régime des associations citées ci-dessus. Cette confusion inopportune des ONG avec toute sorte d'association est politiquement et juridiquement justifiée par l'inexistence d'un cadre légal spécifique aux ONG qui même si elles sont des associations ne peuvent être assimilées aux autres composantes de la société civile.

En somme, si les ONG sont des associations, toutes les associations ne sont pas des ONG. De surcroît, toutes les ONG soumises au droit ivoirien ne jouissent pas du même régime associatif. Dès lors, le concept d'ONG ivoirienne doit être clarifié selon la définition négative prévue par l'article 28 de la loi n° 60-315 relatives aux associations :

«Sont réputés associations étrangères, quelle que soit la forme sous laquelle ils peuvent éventuellement se dissimuler, les groupements présentant les caractéristiques d'une association, qui ont leur siège à l'étranger ou qui, ayant leur siège en Côte d'Ivoire, sont dirigés en fait par les étrangers ou bien ont, soit des administrateurs étrangers, soit un quart au moins de membres étrangers17(*)

De ce qui précède, nous pouvons soutenir que la notion d'ONG évoque une association de solidarité internationale (ASI)18(*), à but non lucratif, apolitique, pétrie de valeurs humanistes et indépendante des Etats. Cette association est créée par l'initiative privée et regroupe des personnes physiques ou morales en vue d'exercer une activité d'intérêt général, de solidarité ou de coopération bénévole pour le développement économique, social, culturel, environnemental et humanitaire.

La notion de protection provient étymologiquement du latin protegere qui signifie «accorder son soutien, son aide matérielle à quelqu'un 19(*)».

Aujourd'hui, il prend le sens de « action de protéger », « dispositif, institution qui protège »20(*). Dans notre contexte, la protection dont il est question ici concerne l'enfant. En effet, la protection de l'enfant comprend l'ensemble des mesures qui sont destinées à promouvoir le développement optimal des enfants et des adolescents, à protéger ceux-ci contre les dangers et à atténuer et réparer les séquelles d'atteintes à leur sécurité21(*). Font notamment partie de ces instruments les connaissances éducatives et pédagogiques, les mesures officielles relevant du domaine social et de la politique de la famille ainsi qu'un certain nombre de mesures facultatives (service de conseil et services spécialisés), des moyens relevant du droit public (autorité tutélaire) et d'autres qui sont contenus dans le droit international tels que la Convention de la Haye sur la protection des mineurs ; convention concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs. Tous ces instruments sont au service du bien-être de l'enfant. La protection de l'enfant comprend la prévention et l'intervention.

Quant à la notion de guerre ou de conflit, il est assurément le phénomène social le plus constant que l'humanité ait connu. Sur près de 3500 ans d'histoire connue, les historiens ont seulement compté 250 ans de paix générale. L'histoire de l'humanité est émaillée en effet de guerres qui ont revêtu diverses formes. La typologie des guerres a certes évolué mais l'atroce réalité de la guerre est restée la même; elle est allée d'ailleurs de cruauté en cruauté: génocides, razzias, pillages, massacres de populations civiles, destruction massive des biens, viols, ruines, désolations, etc.

Ces nombreux abus pourraient faire penser, comme Cicéron, que «dans le fracas des armes, les lois sont muettes22(*)».

Tantôt qualifié de conflit, on assiste de nos jours à l'apparition de nouvelles formes de guerre qui mettent en lice des armées régulières, des mouvements de guérilla avec souvent l'intervention des puissances étrangères.

En somme, la distinction classique opérée par le DIH entre conflits internationaux et conflits non internationaux semble plier l'échine. Elle tombe en obsolescence dans un contexte animé par des nouveaux conflits ou même des conflits déstructurés. De tels conflits se caractérisent par l'absence totale ou partielle de l'Etat. La guerre ne semble plus être «la continuation de la politique par d'autres moyens»23(*). Elle est interne.

Au vu de toutes ces définitions, se pose la question de la protection des enfants en temps de paix ou en temps de guerre. Cette dernière hypothèse qui renvoie au cas des enfants soldats constitue l'objet de la présente étude. L'utilisation d'enfants à des fins militaires est devenue un phénomène préoccupant. Les images d'enfants maniant des armes, semant la désolation, infligeant des atrocités animent constamment, hélas, le théâtre des conflits armés. Entraînés à la culture de la violence, drogués, les enfants sont devenus les plus cruels des combattants, des tueurs sans merci. La notion d'enfant soldat est donc intimement liée à celle de conflit armé.

En principe, la protection de ces enfants relève de l'Etat, c'est ce dernier qui doit assurer les droits de ses ressortissants. Cependant, le phénomène a pris une telle ampleur qu'il a fallu associer à l'Etat, l'aide d'autres partenaires, notamment les ONG.

Dès lors, le présent travail se propose d'apporter une modeste contribution à l'éradication du phénomène d'enfants soldats en mettant un accent particulier sur l'apport des ONG en la matière.

Mais, en quoi consiste la protection des ONG ? Est-elle efficace? Quel est le leitmotiv de cette attention particulière accordée aux enfants se trouvant dans le cadre d'un conflit armé?

Dans le développement qui va suivre, nous tenterons d'apporter des réponses aux différentes interrogations sus-sucitées. Mais auparavant, nous montrerons les fondements de l'action des ONG, notamment les difficultés liées à la prévention du phénomène des enfants soldats (Première partie). L'examen de cette première partie répond au souci de démontrer les problèmes et insuffisances rencontrés par l'Etat dans la mise en oeuvre efficiente des mesures pour éradiquer, du moins réduire le phénomène d'enfants soldats: d'où la nécessité de faire intervenir les ONG. Il sera ensuite question de montrer l'intervention des ONG dans la résolution des crises, intervention qui participe effectivement à la protection tant préventive que curative du phénomène d'enfants soldats (Deuxième partie).

PREMIERE PARTIE

LES DIFFICULTES LIEES A LA PREVENTION

DU PHENOMENE DES ENFANTS SOLDATS :

UN FONDEMENT DE L'ACTION DES ONG

LES FONDEMENTS DE L'ACTION DES ONG :

LES DIFFICULTES LIEES A LA PREVENTION

DU PHENOMENE DES ENFANTS SOLDATS

La guerre a de tout temps été la rupture d'avec les normes sociales préétablies. En temps de guerre, les écoles et les marchés ferment, les familles sont séparées et tiraillées de part et d'autres; les biens de premières nécessités se font rares et les épidémies sévissent. C'est souvent dans ce contexte que l'armée, institution mise à la disposition du gouvernement en vue d'assurer une des missions régaliennes de l'Etat24(*) qui est la défense nationale25(*), se trouve confrontée à de multiples difficultés. Difficultés qui empêchent l'Etat de protéger sa population en général et les enfants en particulier. Mais ces difficultés, loin d'être uniquement militaire, se rencontrent également aux niveaux juridique, politique, idéologique, socio-économique et technique (Chapitre I) et même dans la mise en oeuvre du DIH et du DDR (Chapitre II), d'où l'intervention des ONG.

* 1 Rapport du cinquantième anniversaire consacré aux enfants dans la guerre, « La situation des enfants dans le monde », UNICEF, New York, NY 10017, USA, 1996, p.13.

* 2 Dans un entretien avec le personnel de l'ONU en Cote-d'Ivoire, Hamed, un garçon de 13 ans a admis qu'il savait bien ne pas pouvoir rentré dans sa famille, car son père était furieux qu'il ait amené jusqu'au village les hommes qui ont violé et tué sa mère devant toute la famille. Selon ses dires, s'il conduit ces hommes jusqu'au village, c'est parce que le commandant lui avait dit qu'il serait rendu à sa famille- « après ça, les rebelles sont devenus ma famille et j'ai tout fait pour faire plaisir à mon père [le commandant]».

* 3 Dictionnaire Universel, Paris, Hachette/Edicef, 1995, p.419. En effet, la puberté est un ensemble de modifications physiologiques, morphologiques et psychologiques qui se produisent chez l'être humain au moment de son passage de l'enfance à l'adolescence; elle dépend de l'alimentation, de l'éducation et de la culture.

* 4 Maurice TORELLI, Introduction à la protection internationale des droits de l'enfant, travaux CERDIRI, p.9.

* 5 Les articles 14, 23, 24, 38 §5, 98

* 6 PICHET (J), Commentaire de la IVème Convention de Genève du 12 août 1949, Développement et principes du droit humanitaire, Genève, CICR, 1967, p. 442.

* 7 Voir le collège militaire de TCHITCHAO au Togo, le collège militaire des enfants de troupes au Burkina ou l'école miliaire préparatoire et technique d'Abidjan (EMPT).

* 8 Secrétaire Général des Nations Unies, Rapport au Conseil de sécurité, S/2000/101 du 11 février 2000.

* 9 Adoption des « principes du Cap » par UNICEF et plusieurs ONG à l'issu de la Conférence tenue en Afrique du Sud le 30 Avril 1997.

* 10 Citée par C. CLARK, « La justice pour les enfants soldats: Développements, défis, dilemmes », in www.childsoldiers.org/cs/childsoldiers.nsf/CSCJJpaperFR.pdf. (site visité le samedi 16 juin 2007)

* 11 Marcel Merle cité par Philippe Ryfman, La question humanitaire: histoire, problématique, acteurs et enjeux de l'aide humanitaire internationale, Paris, Ellipses, 1999, p.23.

* 12 A ce sujet il faut noter qu'avec la méthode participative, certains projets exigent une participation financière modeste du bénéficiaire. C'est le cas du projet pilote alphabétisation en Côte d'Ivoire exigeant la participation financière minimum de 500 Frs Cfa en zone urbaine pour les apprenants et 200 Frs Cfa en zone rurale.

* 13 Cf. Meledje Djedjro, la contribution des ONG à la sauvegarde des droits de l'homme, Thèse pour le Doctorat en Droit Public, soutenue le 23 octobre 1987 à l'Université d'Amiens, p.8.

* 14 Larry Diamond, Towards Democratic Consolidation, Journal of Democracy 3 (July 1994), p.5.

* 15 E.J Dionne, La vie associative, ça marche! Renouveau de la société civile aux USA, Paris, Nouveaux Horizons, 1998, p.27.

* 16 Cette notion est employée par Bioforce internationale, une structure française de formation des humanitaires.

* 17 L'analyse de cet article démontre que les critères fondamentaux pour distinguer une ONG ivoirienne d'une ONG étrangère demeurent la localisation du siège, la nationalité des membres dirigeants et le nombre de membres étrangers.

* 18 Synonyme d'organisation de la solidarité internationale, les ASI dénotent la volonté de voir un monde solidaire. Toutes les ONG se doivent d'avoir des attaches au plan international même si elles n'ont pas un champ d'intervention dépassant les limites d'un seul Etat. Cette définition a le mérite d'atténuer la condition du caractère international imposé par l'ONU.

* 19 Dictionnaire encyclopédique, Paris, Hachette, 1980, p. 1038.

* 20 Ibid, p.1037.

* 21 Häfeli C., « Wegleitung für vormundschaftliche Organe », 3e édition, Wädenswil 1998, p.102

* 22 Homme politique et orateur latin, Marcus Tulius Cicero, dit Ciceron (-100 - †-43) considère que la loi, en période de guerre, n'a plus lieu d'être citée. Cf. www.evene.fr

* 23 KARL Clausewitz, cours du professeur Niamkey KOFFI, p.16.

* 24 Encore appelée mission de souveraineté de l'Etat. Il s'agit de la sécurité, la justice, la diplomatie, les finances, la défense

* 25 Loi N° 60 209 du 27 juillet 1960 portant création des forces armées nationales en RCI article 1er : « Il est institué des forces armées nationales (FANCI) pour assurer la défense nationale, le maintien de l'ordre et l'exécution des lois » JOCI du 30juillet 1960.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore