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Les institutions financières internationales dans la transition des PECO

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par Francois Hurstel
Université Paris IV La Sorbonne - Master 2 - DEA 2007
  

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A/ Une adaptabilité aux besoins de chaque pays?

Afin de mieux cerner la part de responsabilité imputable aux PECO, il est nécessaire d'étudier la manière dont les IFI ont géré deux facteurs : d'une part les différences entre PECO ; d'autre part les gouvernements nationaux. En d'autres termes, les IFI se sont-elles adaptées aux spécificités propres à chaque pays et à leurs besoins et dans quelle mesure le facteur politique a-t-il joué et influencé leur action ?

Nous avons vu que parmi les nombreuses critiques énoncées, l'une d'elle déplorait l'influence de l'Ouest dans les positions défendues par les IFI, et en particulier par la Banque Mondiale. C'est dans cette optique que la question du jeu d'influence se pose.

La BERD offre des renseignements précis sur l'affectation de ses fonds pays par pays. L'étude comparée (nous comparerons ici la République Tchèque et la Hongrie) montre que l'institution financière européenne s'adapte aux besoins propres à chacun de ces deux pays. Comme nous l'avons vu au moment d'analyser l'impact des IFI sur la transition, la BERD par exemple, si elle a ciblé les mêmes secteurs dans les deux pays, ne l'a pas fait de la même manière systématiquement. Jusqu'au 30 septembre 2005, la BERD a financé 56 projets en Hongrie pour un total de 800 millions d'Euros et en a financé 62 en République tchèque pour un total de 488 millions. A la vue des répartitions, nous apercevons des similitudes qui sont dues à la proximité des besoins entre les deux pays. Le secteur ayant reçu le plus de fonds est le même pour les deux pays : le secteur financier avec respectivement 30% (Hongrie) et 39% (République Tchèque) du total. Il est aussi intéressant de noter qu'au sein de ce secteur, ce sont les fonds d'investissements qui ont reçu le plus d'aide (16% du total pour la Hongrie et 22% pour la République Tchèque). Les différences de répartition se font ensuite. Les infrastructures ont reçu le plus de fonds après le secteur financier en Hongrie (13%, soit 389 millions d'euros) alors qu'en République Tchèque, c'est le secteur industriel qui tient cette deuxième place (15%, soit 96,6 millions d'Euros). Quel constat faire de ces chiffres ? Les aides vont en premier lieu au secteur bancaire et financier, précisément celui susceptible de générer le plus d'argent, notamment pour l'Ouest. Pouvons-nous pour autant avancer que la BERD finance ce secteur sous l'influence de la communauté internationale avide de gains ? Non, car l'étude des situations initiales de la Hongrie et de la République Tchèque montre bien les besoins des deux pays dans ce domaine précis. Ensuite, il est clair que la Hongrie ne possédait pas le même niveau d'infrastructures que la République Tchèque et cela explique la répartition. Ainsi, dans ce cas précis de l'implication de la BERD dans deux importants PECO, tout porte à croire que l'IFI s'est parfaitement adaptée aux besoins (notamment structurels) des pays récipiendaires. Dans son autocritique, la BERD déclare même que ses apports ont reflété les besoins changeants de l'économie tchèque et ont su « relativement » bien y répondre. La question qui se pose maintenant dans un cas comme celui-ci, où les aides semblent avoir répondu aux besoins, est l'impact du/des gouvernement(s) en place. En République Tchèque, la Banque semble avoir traité avec le Ministère des Finances et celui de la Justice principalement. Les deux ministères semblent avoir mis des freins à l'instauration de réformes proposées par la BERD en raison d'un manque de consensus politique. En Hongrie, la BERD ne semble pas avoir rencontré de problèmes avec les gouvernements successifs, au contraire, elle insiste sur la bonne coopération entretenue avec les autorités locales en place.

Un autre exemple allant dans le sens du désintérêt de l'aide et de la prise en compte exclusive des besoins nationaux est la lutte contre la corruption menée particulièrement activement par la Banque Mondiale. Le gouvernement polonais a commandé un rapport à la Banque Mondiale en 1999 sur l'état général de la corruption dans le service public (le rapport exclut la corruption dans le secteur privé) et sur les moyens de la combattre. Cet exemple témoigne de la bonne volonté régnant des deux côtés. Après avoir rappelé les objectifs de la Banque en matière de corruption (minimiser son existence et ses effets afin qu'elle devienne une exception et non plus la règle, et inverser son équilibre : d'une activité à bas risque et hauts revenus à une activité hautement risquée et à bas revenus potentiels), évalué ses effets sur l'économie nationale (macroéconomique, réduction de la productivité et de la croissance, coûts pour la population et les pauvres en particulier et perte de confiance dans les institutions publiques), la Banque Mondiale présente le contexte polonais. La corruption y est décrit comme un « phénomène général »22(*), présent partout et en tout temps. Selon de nombreuses études internationales, la corruption dans les PECO est plus répandue que dans n'importe quel autre endroit au monde, et peut-être la pire, car impliquant souvent des violences physiques en plus des effets économiques23(*). Parmi les domaines publics où la corruption est la plus forte en Pologne (et sans doute plus importante que dans nombreux autres PECO), la haute administration semble la plus touchée. Le type de corruption le plus répandu dans la haute administration polonaise est le versement d'argent en échange de contrats publics ou de faveurs de toutes sortes ; défense / promotion / vote ou au contraire blocage d'une loi ou d'un amendement ; contrats publics accordés contre versement d'une somme d'argent ; manipulation d'une privatisation ; intervention dans l'affectation de concessions publiques, licences ou exemption de taxes ; conflit d'intérêt dans les nominations de dirigeants d'entreprises publiques ; renforcement illégitimes de droits de douanes à l'importation. Tous ces instruments de la corruption vont à l'encontre de la transition promue par les IFI mais en sont aussi la conséquence directe. En effet, alors que la Pologne était sous contrôle de l'URSS, la corruption n'existait presque pas. Dès lors que les soviétiques ont quitté le pouvoir, le pays, comme tous les autres PECO, s'est retrouvé sans aucune institution suffisamment solide pour contrôler et éviter de tels agissements. Par ailleurs, les privatisation en pagaille ont aiguisé les appétits de nombreux « jeunes loups » dans la région (comme nous l'avons vu dans le secteur de l'éducation), prêts à tout pour obtenir des concessions, des contrats ou encore d'anciennes entreprises publics à bas prix. Le rapport de la Banque Mondiale insiste également sur la corruption régnant dans le système judiciaire. Les sentences peuvent être achetées par l'intermédiaire de professionnels de la justice ou d'avocats. Après avoir identifié ces problèmes, la Banque Mondiale propose un programme de lutte contre la corruption. Elle recommande la création d'un petit groupe de personnalités hors de tout soupçon et influentes dans différents domaines qui pourraient ensemble répondre au défi de la corruption. La Banque propose que l'un de ses membres en fasse partie. Selon elle, certaines sources de la corruption pourraient être vaincues en améliorant l'aspect technique de différents mécanismes judiciaires, administratifs et financiers. Par exemple, la Banque propose une loi sur le financement des partis politiques et sur l'activité de lobbying. Enfin, la Banque insiste sur l'engagement de la société civile sans qui rien ne peut se faire dans la matière. C'est pourquoi elle propose une conférence publique réunissant différents représentants de la société civile (représentants du monde des affaires, des cultes, des ONG, du monde associatif, des médias et de l'éducation) afin de communiquer sur le problème, notamment d'informer sur les coûts exacts et les conséquences de la corruption au niveau national et international. En conclusion du rapport, la Banque Mondiale propose son aide au gouvernement polonais. Elle pourrait faire bénéficier le pays de son expérience dans le domaine, apporter une formation technique utile pour les réformes nécessaires. Cet exemple, sur lequel il nous a paru utile de s'attarder, illustre bien un aspect des rapports entre IFI et gouvernements. Ici, le travail est une nouvelle fois désintéressé et nul ne peut y voir la défense ou la promotion des intérêts de l'Ouest. Par ailleurs, la Banque répond, par définition puisque le rapport provient d'une commande du gouvernement, à un besoin crucial du pays : la lutte contre la corruption. Nous pourrions prendre de nombreux autres exemples témoignant d'un certain dévouement des IFI aux PECO qui en avaient besoin. Cependant, les nombreuses critiques émises par des observateurs avisés de la transition et du rôle des IFI nous ont également montré qu'il a pu exister des dérives et des insuffisances. Toujours est-il qu'au-delà de ces adaptations ciblées à des besoins souvent temporelles et structurelles, les IFI ont également suivi de grandes évolutions sur la durée qui ont également illustré une certaine adaptabilité.

* 22 World Bank, « Corruption in Poland : Review of Priority Areas and Proposals for Action », Warsaw, 1999

* 23 BRUNETTI, KISUNKO, WEDER, « World development Report : The State in a Changing World », chapter 1, p. 35, World Bank, Oxford University Press, 1997

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon