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Christologie contemporaine: le défi du pluralisme religieux

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par Clément TCHUISSEU NGONGANG
Grand séminaire Notre Dame de l'Espérance de Bertoua - Baccalauréat canonique en théologie 2011
  

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3- La théorie de l'accomplissement

La théorie de l'accomplissement, de notre point de vue, constitue la seconde forme de l'exclusivisme christologique traditionnel. Jean Daniélou et Henri de Lubac en sont les principaux chantres.

Pour Daniélou, il existe une progression dans l'automanifestation de Dieu qui intègre les formes limitées de la révélation depuis Abraham jusqu'à la forme parfaite en Jésus Christ. Ne sont concernées par le caractère progressif de la révélation divine que les manifestions divines au sein de l'unique histoire de salut qu'inaugure l'alliance de Dieu avec Abraham et son peuple. En dehors de cette expérience, les autres traditions religieuses constituent une sorte de « pré-histoire » du salut. Ces religions « non-chrétiennes » sont de l'ordre de la raison naturelle, tandis que la révélation judéo-chrétienne appartient à l'ordre de la foi surnaturelle. Les premières sont sous-tendues par une « alliance cosmique », c'est-à-dire de la manifestation de Dieu par la nature. Toutefois, elles sont déjà orientées et ordonnées vers la manifestation personnelle de Dieu dans l'histoire.

Le caractère « cosmique » de ces religions explique la cohabitation en elles tout autant de vérité que de mensonge, de lumière que d'obscurité. N'empêche qu' « il existe une certaine continuité entre l'alliance cosmique et l'alliance historique en ce sens que la première sert de fondement nécessaire à l'autre, mais l'intervention gratuite de Dieu dans l'histoire inaugure un ordre nouveau qui détermine une discontinuité entre plus grande que la continuité. »33(*) Jean Daniélou exprime le caractère unique du christianisme en ces termes :

« Le christianisme n'est pas un effort de l'homme vers Dieu. Il est une présence divine accomplissant dans l'homme ce qui est au-delà de l'homme et à quoi l'homme sera seulement une réponse, c'est le second trait de sa transcendance [...] Ici, vraiment, nous touchons ce qui fait la différence essentielle : ce qui constitue le contenu propre du christianisme, ce qui fait en définitive sa transcendance, c'est Jésus-Christ, Fils de Dieu, qui nous donne le salut. Les religions naturelles et - et c'est ce qui en elles est valable - attestent le mouvement de l'homme vers Dieu ; le christianisme est le mouvement de Dieu vers l'homme qui en Jésus-Christ vient le saisir, pour le conduire à Lui. »34(*)

Henri de Lubac, pour sa part, déclare : « Le christianisme ne vient pas ajouter quelque chose aux religions humaines, comme on ajoute la solution au problème...Il vient redresser [l'effort religieux de l'homme], le purifier, le transformer pour le faire aboutir : en sorte qu'il est la religion ; celle qui effectivement relie l'homme à Dieu. »35(*)

Comme Daniélou, de Lubac perçoit dans les religions du monde le dévoilement de l'effort et du désir de l'homme vers Dieu, mêlés encore de « semences du Verbe », des contrefaçons et du péché. « Selon « la théorie de l'accomplissement », que Henri de Lubac fait sienne, le mystère du Christ atteint les membres d'autres traditions religieuses comme réponse divine à l'aspiration humaine à s'unir au Divin, mais les traditions religieuses elles-mêmes ne jouent aucun rôle dans ce mystère du salut. »36(*) Il emprunte à la christologie de Teilhard de Chardin sa dimension axée. En effet, pour Teilhard, la réalisation eschatologique du règne de Dieu est la christification universelle car « Le Christ (...) est l'Alpha et l'Oméga, le principe et la fin, la Pierre de fondement et la Clé de voûte, la Plénitude et le Plénifiant. Il est celui qui consomme et Celui qui donne à tout sa consistance. Vers lui et par lui, Vie et Lumière intérieures du Monde, se fait, dans la plainte et l'effort, Universelle Convergence de tout l'esprit Créé. »37(*)

Afin de récuser toute tentative de constituer des traditions religieuses en voies parallèles du salut face au christianisme, Henri de Lubac s'appropriant cette vision de l'univers axé vers le Christ, écrit :

« S'il existe objectivement plusieurs voies de salut, parallèles en quelque sorte, nous voici en face d'éparpillement, non d'une convergence spirituelle, et ce qu'on appelle alors indûment « plan de Dieu » est sans unité. Il doit y avoir un axe[...] Si conformément au dessein de Dieu, nous nous soucions du salut du genre humain, si nous croyons que notre histoire est chose réelle et si nous aspirons à l'unité, nous ne pouvons échapper à cette recherche d'un axe et d'une force drainante et unifiante, laquelle est l'Esprit du Seigneur animant l'Eglise. »38(*)

Pour clore cette brève présentation de la théorie de l'accomplissement, notons que cette dernière situe les religions du monde dans un rapport de préparation, d'ordonnancement au christianisme.

D'autres modèles à côté de la théorie de l'accomplissement ont préparé les affirmations de Vatican II au sujet des religions non-chrétiennes, comme la théorie des chrétiens anonymes de Karl Rahner. Nous nous y attarderons de façon systématique dans le prochain chapitre pour présenter le fond christologique sous-jacent.

* 33 DUPUIS Jacques, La rencontre du christianisme et des religions. De l'affrontement au dialogue, Cerf, Paris, 2002, p. 83.

* 34 DANIELOU Jean, Essai sur le mystère de l'histoire, Seuil, Paris, 1953, p. 113, 116, cité par DUPUIS Jacques, La rencontre du christianisme et des religions, Op.Cit., p. 84.

* 35 DE LUBAC Henri, Fondement théologique des missions, Seuil, Paris, 1946, p. 72.

* 36 DUPUIS Jacques, La rencontre du christianisme et des religions, Op.Cit., p. 86.

* 37 DE CHARDIN Teilhard, Science et Christ, Seuil, Paris, 1965, pp. 60-61.

* 38 DE LUBAC Henri, Paradoxe et mystère de l'Eglise, Aubier-Montaigne, Paris, 1967, pp. 148-149.

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