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La Coopération Multilatérale et la Question de l'Eau au Bassin du Nil

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par Christine A. ISKANDAR BOCTOR
Institut d'Etudes Politiques de Paris (IEP) - DEA (Master) en Relations internationales 2002
  

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DEUXIEME PARTIE : Les stratégies des pays riverains envers les défis internes et externes

Le rôle croissant de l'eau dans les politiques internationales contemporaines remonte à un ensemble de considérations96(*) à savoir :

· Le phénomène de la sécheresse qui a envahi plusieurs Etats durant les deux dernières décennies, et surtout le continent africain ;

· L'aggravation du problème de la nourriture dans nombre d'Etats de la moitié sud du globe terrestre imposant en conséquences l'extension agricole, horizontale et verticale pour faire face à ce problème ;

· La croissance continue de l'usage des eaux dans les objectifs industriels en plus des besoins croissants en eaux pour les usages domestiques, en conséquence de l'évolution des habitudes sociales en général ;

· Le phénomène de l'explosion démographique dans nombre de pays, surtout dans le monde en développement, explosion qui a rendu favorable la nécessité de l'expansion des projets du développement économique pour absorber la croissance démographique et assurer des sources d'alimentation et des chances d'emploi convenables.

La conception de « sécurité des eaux » a acquis de nouvelles dimensions : elle concerne le domaine économique : la sécurité de l'eau et de la nourriture. De nombreux facteurs confirment l'importance du problème de l'eau dans le monde arabe :

- Les principaux fleuves (bassins97(*)) du monde arabe ont tous leur source à l'extérieur. Elles sont donc contrôlées par des puissances étrangères. C'est un point faible de la sécurité arabe ;

- Toutes les études confirment l'existence d'une crise réelle d'eau dans le monde arabe. La plupart des territoires arabes souffrent de sécheresse et de désertification. Avec la croissance démographique et l'évolution économique et sociale, le problème se fait sentir encore davantage ;

- Le projet sioniste menace les eaux arabes. Israël octroie son aide à la construction de barrages aux sources du Nil, ce qui constitue une carte de pression sur le Soudan et l'Egypte. Et ce conformément à un plan mis au point il y a des dizaines d'années, lorsque l'ancienne Premier ministre israélienne, Golda MEIR, a dit : « L'alliance avec la Turquie et l'Ethiopie signifie que les deux plus grands fleuves de la région, le Nil et l'Euphrate, seront entre nos mains98(*) » ;

- Sachant que la sécurité des eaux arabes fait partie intégrante de la sécurité nationale arabe. C'est pourquoi la cause de l'eau est toujours inscrite à l'ordre du jour des gouvernements arabes.

Cette deuxième partie du mémoire démontre comment les pays riverains du bassin du Nil, ainsi les pays arabes, envisagent des défis hydrauliques, internes et externes. Ils les poussent vers des stratégies préventives, luttant contre le stress hydrique, et encourageant vers une diplomatie hydropolitique.

A. Les défis internes

Tout au long de cette partie traitant la question des défis internes, ces derniers se décomposent en trois grands thèmes à savoir : l'instabilité politique, ainsi la politisation de l'eau et l'explosion démographique. Et nous les considérons comme des raisons déclencheurs pour le troisième, celui de la guerre de l'eau.

Selon le Centre arabe des études des zones arides et désertiques99(*) (CAEZAD), « le déficit en eau dans le monde arabe, ressenti déjà actuellement, devrait se situer entre 160 et 260 milliards de mètres cubes en l'an 2030 », et rappelle que « les ressources du monde arabe oscillent entre 300 et 350 milliards de mètres cubes par an ». Et dans son rapport, le Conseil Economique et Social des Nations Unies, janvier 1992100(*) soulignait les dangers de l'évolution démographique : « Le fossé entre des ressources aquifères limitées et la rapide augmentation de la population (...) s'élargit de façon inquiétude et pourrait mettre en danger la sécurité en matière d'eau dans la région du Proche-Orient », atteint le seuil de pénurie hydraulique, selon les chiffres de la Banque mondiale. Le quota d'eau par individu et par an a enregistré une chute radicale de 150 m3 en 1986 à 665 m3 en 1998.

La population mondiale a doublé de 1950 à 1997, passant de 2.5 à 5.7 milliards d'habitants, mais la consommation d'eau globale a quadruplé sur la même période, pour s'élever à environ 761 mètres cubes par an et par personne. Les experts de l'Organisation des Nations Unies pour l'Agriculture et l'Alimentation (OAA / FAO) évaluent à 2000 mètres cubes d'eau par an et par personne le seuil au-delà duquel l'eau est considérée comme abondante, et à 1000 mètres cubes le seuil critique en deçà duquel l'approvisionnement est remis en cause. Ce souci est désormais celui des Nations Unies, selon M. Wally N'DOW, Secrétaire général de la seconde Conférence des Nations Unies sur les villes, tenue en 1996, à Istanbul pour qui l'eau « pourrait être un facteur de déclenchement de conflit, comme le pétrole l'était dans le passé101(*) ».

Donc, les défis internes envisagés par les pays nilotiques, voire arabes, tournent autour deux grands volets : d'une part, un aspect politico-militaire comme l'instabilité politique, la politisation de l'eau et la guerre de l'eau. D'autre part, un aspect socio-économique, il évoque le phénomène de l'explosion démographique.

a) L'instabilité politique (Ex : le Canal de Jonglei au Soudan) et la politisation de l'eau (Ex : la Nouvelle Vallée en Egypte « Tochka »)

a. Le Canal de Jonglei102(*)

L'idée originale revient aux Britanniques, ancienne puissance coloniale occupante du Soudan, qui, dès 1904, étudiaient un projet visant à détourner le cours du Nil afin d'éviter que d'importantes quantités d'eau ne se perdent dans les zones marécageuses de Sudd et afin d'améliorer la navigation fluviale. Ce canal est apparu à l'époque d'une nouvelle coopération égypto-soudanaise en 1974, entre les présidents, Sadate et Nemeyri. L'Egypte et le Soudan se sont mis d'accord sur le projet du canal de Jonglei, dans la région de Sudd du Bahr El Gabal. C'est alors que Jonglei I (première phase) est formellement approuvé par les deux Gouvernements, et puis Jonglei II (période 1985-1990).

Son but est de construire un canal de diversion autour des marécages pour activer le débit du Nil à cet endroit et donc éviter ou réduire énergiquement la perte d'eau par évaporation. Le canal doit suivre une ligne droite de Jonglei au sud jusqu'à un point de la Sobat au nord, juste avant qu'elle n'entre dans le Nil blanc, en amont de Malakal. Ainsi, le canal capterait les eaux d'inondation qui sont normalement perdues dans les marécages et s'évaporent progressivement. Il délivrerait les eaux au Nil blanc, leur permettant de couler librement vers l'Egypte. Au bout du compte, le canal permettrait de « sauver » 7 milliards de mètres cubes par an103(*). L'Egypte apparaît comme la principale bénéficiaire directe de Jonglei, car c'est elle qui absorberait la quasi-totalité de l'accroissement net du débit du Nil blanc. Mais le Soudan serait indirectement bénéficiaire dans la mesure où de cette façon l'Egypte diminuerait ses exigences sur le débit du Nil / Atbara et donc permettrait au Soudan d'augmenter l'utilisation de ces sources d'eau.

Après l'approbation du projet en 1974, et sa mise en forme définitive en 1979, l'Egypte et le Soudan ont signé en 1980 un contrat avec un Consortium français (GTM : Grands Travaux de Marseille) pour le creusement du canal. Mis en chantier sans consultation des peuples nilotiques de la région (Dinka et Nuers), considéré comme un nouveau symbole de l'exploitation des richesses du Sud-Soudan par les dirigeants nordistes et par l'Egypte, accusé de conduire à la destruction de l'écosystème et d'un mode de vie ancestral, le canal était critiqué par l'opinion sudiste et les milieux écologistes occidentaux. Les travaux avancent rapidement, jusqu'au 15 mai 1983, le Soudan est dévasté par une guerre civile qui oppose le Nord du pays, musulmans et arabophone, au Sud, majoritairement chrétien et noir. La proclamation de la Charia, la loi islamique, sur l'ensemble du territoire soudanais, en septembre 1983, met le feu aux poudres.

Une mutinerie éclate à la garnison de Bor et dans d'autres garnisons de l'armée soudanaise : 2.000 à 3.000 hommes armés et à leur tête le Colonel John GARANG forment l'Armée Populaire de Libération du Soudan (APLS ou mouvement du sud). Ils reprochent au gouvernement l'absence de concentration réelle avec le Sud à propos des grands projets de développement économique, dont le creusement du canal de Jonglei. Une série d'attaques était couronnée le 15 novembre 1983 par l'enlèvement de 9 employés de la compagnie des Grands Travaux de Marseille par l'APLS. Financés par l'Egypte, le Soudan, les Etats-Unis et la Communauté européenne, sur les 360 km prévus, 280 sont creusés, et le reste est en suspend, attendant la fin de la guerre civile. Ils ne pourront être repris qu'après la signature d'un accord de paix durable au Sud, et lorsque les préoccupations à son sujet auront été entendues à Khartoum.

La guerre civile a débuté en 1983. Il en existe trois104(*) raisons principales :

- Dans le Sud, du pétrole avait été découvert. Or, au lieu de l'exploiter sur place pour lancer l'industrialisation au Sud, Nemeyri, le président soudanais décide d'abord de le faire raffiner dans le nord, puis même de faire transporter le brut par Oléoduc jusqu'à la Mer rouge pour l'exporter. Cette décision ne peut que faire enrager les sudistes qui se sentaient frustrés et maintenus en situation d'infériorité.

- Sous la pression des nordistes, le Sud avait été divisé en trois provinces administrées par Khartoum. En faisant cela, Nemeyri violait l'accord d'Addis-Abeba de 1972 qui avait permis une trêve avec les autonomistes du Sud. Parmi les plus importants sujets d'opposition figurait l'aide constante que Khartoum apportait à la guérilla érythréenne et celle qu'Addis-Abeba fournissait aux rebelles du Sud du pays, rebelles des régions noires chrétiennes ou animistes du Sud Soudan. En ce sens, depuis cette époque, la question du Nil n'a cessé à fonctionner comme un facteur aggravant d'antagonismes géopolitiques profonds qui opposent le Soudan et l'Ethiopie.

- En 1983, la loi islamique (la Charia) est introduite par le gouvernement central qui cédait ainsi aux pressions des intégristes musulmans (Front National Islamique et Frères Musulmans). De cette façon, il obtenait un soutien intérieur (les Frères Musulmans) et extérieur (l'Arabie Saoudite), et aussi détournait l'attention de la désagrégation des conditions de vie. Or, comme le Sud était profondément chrétien ou animiste, c'était une mesure de trop qui déclenchait la guerre civile.

Tout au long de cette histoire, les intérêts hydrauliques des pays nilotiques en aval, Egypte et Soudan, étaient un facteur dépendant de l'instabilité politique. Nous ne pouvons pas nier l'existence des raisons provocantes externes, celle du rôle éthiopien, mais l'instabilité politique et la guerre civile au Sud du Soudan demeurent une carte bien jouée. Tous ces projets étaient captés par l'instabilité politique au Sud du Soudan. La guerre civile était la barrière contre la mise en oeuvre de tous ces travaux. C'est vrai que la guerre civile est un défi interne, et la politique du gouvernement soudanais aidait à l'aggraver mais il y avait des éléments catalyseurs externes : le soutien éthiopien et britannique au Sud, le rôle passif de l'Egypte. Addis-Abeba veut « partitionner » le Soudan, en favorisant la sécession du sud animiste et chrétien. L'Ethiopie de son côté voyait dans la mise en échec du projet de Jonglei un moyen de contrer l'éternelle poussée égyptienne vers les hauts plateaux éthiopiens et les rivages érythréens de la Mer rouge. Si, selon les chiffres, ce canal Jonglei I seulement, sauve 7 milliards de mètres cubes par an, les quantités emmagasinées seront, en l'an 2002, [ 7 milliards de mètres cubes par an x (2002 - 1985 « fin de Jonglei I » = 17 ans) = 119 milliards de mètres cubes ].

b. La Nouvelle Vallée105(*) « Tochka106(*) »

Si le canal de Jonglei incarne l'instabilité politique comme défi interne, la Nouvelle Vallée « Tochka » présentera le défi de la politisation de l'eau comme carte de jeu bien jouée par les différents acteurs. Un nouveau chantier gigantesque vient de s'ouvrir en Egypte : le creusement d'un canal de près de 800 km de long, joignant le Nil à la « Nouvelle Vallée », inaugurée le 9 janvier 1997, vers le nord-ouest. Parallèlement, le canal de Tochka vient d'être mis en oeuvre, il relie le canal Nasser à un déversoir de 6000 km2, pouvant être transformé en lac artificiel d'une contenance de 120 milliards de mètres cubes d'eau. Ce canal était un ancien affluent du Nil. Ce sera la plus forte augmentation des terres agricoles depuis Mohamed ALI (1807-1849), le fondateur de l'Egypte moderne107(*).

Reflétant l'ambition hydro-stratégique de l'Egypte moderne, ce projet de conquête du désert consiste à construire un canal pour détourner l'eau du Nil dans le désert occidental égyptien. Alors que l'Egypte cherche encore les financements nécessaires, l'Ethiopie affiche sa volonté de nuire à ce projet de main basse sur l'eau du Nil. Le bassin du Nil est donc un « terrain miné », où les perturbations entre les armes des pays riverains menacent à longueur d'année de s'aggraver. Le gouvernement égyptien se lance dans le projet de Tochka : déplacer 5 millions de personnes sur vingt ans dans le Désert occidental. De fait, la bande de la terre cultivable (4% du pays) est à son maximum d'exploitation et sa concentration démographique à un seuil critique avec, plus de, 65 millions de personnes actuellement, et 85 millions dans vingt ans108(*). Le projet consiste à détourner 5 milliards de mètres cubes d'eau par an à partir du lac Nasser, par un canal à creuser (Canal Cheikh Zayed), vers les oasis situées dans le désert occidental (oasis de Kahrga, Dakhla et finalement Farafra)109(*).

Le projet Tochka exprime le chemin parcouru entre le socialisme populiste de Nasser et le libéralisme économique inauguré par Sadate au lendemain de la guerre de 1973 et continué sous l'égide du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale par le président Moubarak110(*). Son but est de pomper les eaux du Nil avant qu'elles n'atteignent Assouan, et les acheminer dans une région désertique à l'ouest du Nil. Le but avoué de cette nouvelle vallée est d'irriguer de 1.5 à 2 millions de feddans, conçu à la fin des années 70 pour absorber le surplus des eaux du Nil emmagasiner dans le lac Nasser. L'Egypte a décidé d'augmenter les terres cultivées dans le désert de l'ouest. Pour économiser l'eau, ce nouveau programme de culture sera fondé sur une nouvelle technologie moderne : au lieu d'arroser la terre par immersion, il utilisera les nouvelles méthodes de goutte à goutte de l'arrosage dirigé.

Par ailleurs, Mahmoud ABU ZEID, dans son étude intitulée l'eau ; source de tensions au XXIème siècle, assure que la consommation en eau par individu atteindra une moyenne de 630 mètres cubes en 2025, alors que le minimum vital est de 1300 mètres cubes. Semblable à un serpent géant gisant sur le sable à 800 km au sud-ouest d'Assouan, c'est l'ébauche du canal artificiel de Tochka. Au creux d'un bassin de 48 mètres de profondeur, en 2002, cet endroit sera complètement rempli d'eau.

Deux axes majeurs composent ce projet : le canal Cheikh Zayed et la station de pompage. Le président des Emirats arabes Unis, Cheikh Zayed, a offert 1.3 milliards de Livres égyptiennes pour ce canal et qui porte son nom. Le trajet principal du canal, lui, il est totalement creusé, à 50% doublé par l'entreprise publique Al-Béheira. Il se divise ensuite en deux branches dont une est elle-même prolongée en deux sections de 24 km. Les travaux de creusement et de terrassement de la première section ont été réalisés pour 350 millions de Livres égyptiennes par la société Holding du développement agraire, qui dépend du ministère de l'agriculture et possède elle-même 150.000 feddans autour de cette section.

La compagnie publique, elle aussi, creuse la deuxième pour un coût d'environ 215 millions de Livres égyptiennes. Les 120.000 feddans qui l'entourent seront cultivés par la société saoudienne (KKADCO), dont l'actionnaire majoritaire est le prince Walid BEN TALAL. Les coûts de la deuxième branche sont estimés à 270 millions de Livres. La station de pompage amènera l'eau au niveau du canal à partir d'août 2002. Prévu sur quatre ans, ce projet induit un investissement de 1.48 milliards de Livres égyptiennes. « Depuis mi-1998, date du début des travaux, nous avons dépensé 251 millions de Livres pour le creusement et 66 millions de dollars (environ 220 millions de Livres égyptiennes) pour payer les trois premières pompes spécialement fabriquées au Japon111(*) », explique Sayed ABD EL SALAM, responsable local du projet. Trois cents millions seront également investis pour la construction de la station de générateurs électriques.

Dès le lancement de ce projet, des menaces répétées en provenance de l'Ethiopie112(*) ont provoqué des craintes et constitué un casse-tête permanent pour les autorités égyptiennes. L'Ethiopie réouverte la construction de 36 ouvrages sur les affluents du Nil au Plateau éthiopien, dans le cadre d'un programme visant à passer de l'irrigation agricole à partir de l'eau des puits à l'irrigation par immersion. Le Premier ministre éthiopien, Meles ZENAWI, a reproché en Egypte de ne pas avoir consulté les autres pays du bassin du Nil avant d'engager dans ce grand travail « Tochka », alors que « C'est une question qui concerne toutes les nations riveraines du Nil, puisqu'il s'agit de retirer l'eau du fleuve113(*) ». Addis-Abeba a même exigé que soit réduite la part de l'Egypte en eau du Nil après ce projet.

Le Président114(*) du Centre national égyptien de recherches hydrauliques (NWRC) a affirmé que la consommation d'eau de ces projets ne dépasse pas les quotas d'eau fixés par l'accord égypto-soudanais de 1959. De cette façon, l'Egypte souligne que son projet n'exige pas un surplus d'eau, mais vise plutôt à tirer partie de l'eau qui se perd. Le projet est envisagé dans le cadre de la part de l'Egypte et n'affecte pas celles des autres. Aussi, Addis-Abeba accusait l'Egypte d'avoir un quota très élevé comparé à celui des autres pays du bassin du Nil. Le volume total des eaux du Nil est de 1680 milliards de mètres cubes, ce qui prouve que l'Egypte ne reçoit, effectivement, qu'environ 3% de ce total. Donc, le quota est fixe, selon l'accord signé avec le Soudan en 1959. Il s'agit de 55.5 milliards de mètres cubes.

De plus, le droit international fait la distinction entre les territoires situés à l'intérieur du bassin, qui sont prioritaires, et les territoires extérieurs à ce bassin des Etats riverains. Les limites extérieures du bassin fluvial sont tracées par des chaînes de montagnes constituant une « ligne de partage des eaux ». Néanmoins, le règlement n'exclut pas le droit d'un Etat riverain à détourner une partie de sa part d'eau vers ses propres territoires situés hors du bassin115(*), comme le cas de Tochka..

Ces accusations éthiopiennes reflètent le recours à la politisation de l'eau comme carte de jeu. A chaque perturbation dans les relations entre les deux pays, Egypte et Ethiopie, le second réouvre le sujet de la construction des barrages sur le Nil bleu, sachant que ça bouleverse le premier. Tout ça montre qu'avec les relations du bon voisinage, entre les deux, la question du quota reste calme, mais avec quelques perturbations dans les relations, l'eau est une arme de pression sur l'Egypte. L'Ethiopie a eu recours à cette arme pendant le lancement du projet du Haut Barrage, pendant la période sadatienne et le rapprochement avec les Etats-Unis ainsi que l'Ethiopie était d'un côté soviétique, et finalement, pendant le lancement du projet de Tochka. Mais il ne faut pas oublier que cette attitude éthiopienne est considérée ancienne, par rapport à son nouveau comportement après le lancement de l'Initiative du Bassin du Nil en 1999, c'est-à-dire dès le recours à la coopération multilatérale entre les dix pays nilotiques.

* 96
Ahmed EL RASHIDI, op. cit., p. 3



* 97
La Vallée : Ne couvre pas la partie de l'amont où la pente est trop forte. Par contre, la Vallée Politique (le Bassin) désigne l'ensemble des Etats riverains situés le long de la vallée hydrologique définie ci-dessus.



* 98
Al-Ahram Hebdo 3 janvier 2000



* 99
Christian CHESNOT, La bataille de l'eau au Proche-Orient, op. cit., p. 25



* 100
Christian CHESNOT, La bataille de l'eau au Proche-Orient, op. cit., p. 49



* 101
Joyce R. STARR, Water Wars, Foreign Policy, 1991, n° 82, p. 17



* 102
Mohamed Abd El Ghany SEOUDY, Canal de Jonglei : pourquoi ? et où ?, El Siyassa El Dawlya « la Politique internationale », janvier 2001, n° 143, p. 66-85 (en arabe)



* 103
Nathania BERNSTEIN, op. cit., p. 47-51



* 104
Nathania BERNSTEIN, op. cit., p. 8-9



* 105
Cf. annexe VII : La Nouvelle Vallée « Tochka »



* 106
Cf. annexe VIII : Tochka en Chiffres



* 107
Le Monde 5 novembre 1996



* 108
Ahmed El Sayed EL NAGGAR, Du barrage à Tochka : le Nil et le peuple en Egypte entre la légende et la réalité. Le Caire : Centre d'Etudes Politiques et Stratégiques Al-Ahram, 1999, p. 145-156 (en arabe)



* 109
Agence d'Europe, L'eau au Moyen-Orient : enjeux et stratégies, avril 1999, http://www.medea.be/fr/index138.htm (3 décembre 2001)



* 110
Habib AYEB, L'eau au Moyen-Orient, http://medintelligence.free.fr/NdLEauMM.htm (26 novembre 2001)



* 111
Al-Ahram Hebdo 16 décembre 1999



* 112
Al-Ahrar 24 novembre 1996 (en arabe)



* 113
Al-Ahram Hebdo 2 septembre 1998



* 114
Lammii GUDDAA, op. cit., p. 4



* 115
Alaa El Dine SHAHINE, Le Nil : un instrument de coopération internationale africaine, Lettre mensuelle, Zaïre : Université de Kinshasa, octobre 1984, n° 9, p. 10-11



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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore