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L'union pour la méditerranée, quel avenir?

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par Khoudir Leguefche
Université Pierre Mendès-France de Grenoble - Master 2 2009
  

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Conclusion

Après plus d'une année du lancement officiel de l'Union pour la méditerranée et après l'adoption d'un programme de travail riche en rencontres interministérielles185, ce qui est frappant, c'est que cette activité dense ne bénéficie pas d'une grande médiatisation, on n'en parle presque pas. Pourtant l'ambition de l'Union pour la Méditerranée est de donner plus de visibilité au partenariat.

Comme nous l'avons vu, les problèmes à l'origine des controverses qui continuent de freiner le partenariat euro- méditerranéen sont multiples ; la fracture religieuse et culturelle demeure entière, mis à part la promotion de l'association Anna Lindth pour le dialogue, cette question n'a pas bénéficié d'un nouveau souffle. Comme nous l'avons soutenu, cette question devrait faire partie d'un discours politique de haut niveau qui permet aux populations de dépasser certaines représentations négatives et anciennes et aussi les stéréotypes développés récemment. Dans la mesure ou ni d'un coté de la Méditerranée ni de l'autre le discours politique n'a pas tendance à apaiser les tensions, l'espoir est de voir la communauté scientifique des deux rives participer à un débat médiatisé qui sera en mesure de dépasser les calculs politiques des uns et des autres.

Si l'action de l'Union européenne envers la rive méridionale de la Méditerranée reste contestable du point de vue des résultats, elle a le mérite d'être unique. L'approche de l'Union européenne respecte les valeurs humaines et démocratiques et vise leur promotion faisant la différence avec l'approche américaine basée sur l'emploi de la force militaire effectif ou seulement dissuasif. On se souvient encore de la tragédie humaine causée par l'invasion de l'Iraq qui n'a rien réglé jusqu'à présent. Au contraire, certains spécialistes soulignent qu'elle a contribué à la montée en puissance du terrorisme et à l'élargissement de la radicalisation des populations. Dans ces conditions, l'approche basée sur la conditionnalité politique pratiquée par l'Union européenne reste la mieux adaptée en terme de respect des acquis humains. Elle favorise le changement doux le moins coûteux en terme de sacrifice des droits fondamentaux et du respect du droit international construit sur une langue expérience humaine qu'il serait un gâchis de la mettre en cause.

185 15 rencontres ont été programmées pour l'année 2009 lors de la rencontre des ministres des affaires étrangères à Marseille en novembre 2008.

Le fait que l'approche européenne ne contient pas les éléments du plan Marshall qui pourtant a fait ces preuves marque le partenariat euro- méditerranéen. Mais, si l'Europe aujourd'hui est comparable aux Etats-Unis d'Amérique d'hier, comme le soulève certains, il est vrai que les pays tiers méditerranéens sont loin de la situation des Etats européens dans la fin des années quarante. Aujourd'hui, il n'est pas évident que les pays de la rive Sud de la Méditerranée sont en mesure de faire un plan de leur développement, et si ils arrivent à la faire, beaucoup de suspens demeure en ce qui concerne son exécution. Les structures, les institutions et leur mode de fonctionnement de ces pays ne sont pas convainquant, elles n'offrent pas assez de transparence et sont marquées par les phénomènes négatifs comme la corruption, le populisme et le clientélisme. En gros, elles sont accusées d'être au service de pouvoirs déjà en mal de légitimité. Dans cet état de fait, bien que certains régimes en place ne doivent leur existence qu'au parapluie de puissances étrangères et notamment européennes, la responsabilité est partagée. En d'autres mots, il revient aux pays du Sud de la Méditerranée de réagir à l'offre européenne, d'y adhérer, ou de proposer des voies alternatives le cas échéant. Les changements porteuses doivent venir des concernés eux même, l'action de l'Union européenne doit arriver par la suite. Car si l'immobilisme règne d'un coté, le dynamisme de l'autre risque d'être contrarié. Mais pour conclure sur cet aspect, si le volume d'aide est grandissant, les partenaires doivent fixer la construction d'un plan comparable au plan Marshall comme objectif servant de fil conducteur de leur action.

En dépit d'une conscience grandissante de l'importance de la Méditerranée pour l'Europe et du fait que l'Union européenne est le premier donateur dans le monde, la rive Sud de la Méditerranée reste une destination défavorisée des fonds communautaires. Cette situation a dépourvu la région d'un financement nécessaire aux ambitions du processus de Barcelone. A cet égard, il est opportun de souligner le faible taux d'absorption par les pays destinataires. Ce qui rend la réalisation des objectifs de Barcelone improbable. L'inscription des financements européens dans l'effort universel de l'aide publique au développement a rendu les critiques et discussions au sujet de cette dernière valables aussi pour l'action de l'Union européenne. D'où la nécessité de prendre en compte les enseignements issus de l'exécution des programmes de développement. A cet égard, il est utile de rappeler que les principaux bayeurs de fonds européens sont membres du CAD et de l'OCDE, reste le problème de l'inscription effective des financements bilatéraux européens dans les objectifs de l'aide publique au développement laissée à la discrétion des donateurs. En l'absence d'une institution comparable à la Commission européenne pour gérer l'aide publique au développement sur le

plan mondial, la meilleure solution se situe en une gestion multilatérale de celle-ci ; la Commission semble la mieux placée pour assurer cette fonction.

L'échec de l'intégration régionale en Méditerranée a remis en question toutes les politiques suivies dans ce domaine ; l'offre européenne de partenariat est accusée de n'avoir pas permis à la partie méridionale de la Méditerranée de se connecter économiquement. S'il est vrai que la démarche européenne est marquée par le volontarisme est l'ambition de favoriser la création d'une zone intégrée au Sud qui sera en mesure de se lancer graduellement dans une intégration avec l'Union européenne, la signature d'accords d'associations avec les pays partenaires méditerranéens a limité cette ambition. Aucun des trois volets du processus de Barcelone n'a bénéficié de moyens de réalisations ; la volonté c'est arrêtée à l'étape voeux sauf pour le domaine commercial qui a enregistré une avancée majeure vers la libéralisation commerciale à l'horizon 2017. A nouveau, il faut mentionner la responsabilité partagée car l'Union européenne s'est engagée sur les trois volets en laissant la voie ouverte aux parties concernées pour déterminer les actions concrètes à entreprendre, chose qui n'a pas été faite. D'ailleurs, lors du sommet des chefs d'Etats dans le cadre du 10ème anniversaire du processus de Barcelone, beaucoup de présidents du Sud se sont absentés, affichant leur indifférence. Ce sommet a été considéré par certains observateurs de coût mortel au processus. Hormis ces difficultés, l'instrument financier de la communauté européenne, MEDA et l'instrument européen de partenariat et de voisinage par la suite, a permis de réaliser certaines actions en faveur de l'intégration de la région. Acteurs publics et privés des deux niveaux, national et régional ont bénéficié de financements communautaires de partenariat assurant par cela une réponse régionale aux problèmes qui dépassent le cadre national.

C'est dans ce contexte que l'Union pour la Méditerranée intervienne ; les promoteurs du projet ont mis en avant la volonté de donner un élan politique au Processus de Barcelone, d'offrir une meilleure visibilité au partenariat euro- méditerranéen et de réunir les partenaires autour de projets concrets. En bref, la nouvelle initiative compte contourner les blocages dont a souffert le partenariat euro- méditerranéen. Parmi les moyens mobilisés à la réalisation de cet objectif on a dénombré le rehaussement du niveau de représentation politique, l'instauration d'un partage de responsabilité entre l'Union européenne et ses partenaires par l'institutionnalisation d'une coprésidence à tous les niveaux, l'établissement d'une solidarité de fait autour de projets concrets et enfin offrir au partenariat un certain degré d'élasticité par

la technique de géométrie variable qui a fait ses preuves dans le cas de l'intégration européenne.

Sans aucun doute le rehaussement du niveau politique de la représentation des partenaires a ses avantages ; les impulsions nécessaires au processus de Barcelone ne parvient que du sommet des Etats, l'inter- gouvernementalisme prime dans les relations extérieures des Etats membres de l'Union et le caractère unitaire et le mode de gouvernance des Etats partenaires y obligent. Mais le discours qui a accompagné l'initiative dénonçant le caractère bureaucratique de la gestion du partenariat est préoccupant. On craint qu'on vise la remise en cause du caractère supranational du travail de la Commission, l'unique organe susceptible de doter le partenariat du professionnalisme nécessaire à son succès. Dans ces conditions une représentation politique de haut niveau pour le partenariat ne peut être prometteuse que si son rôle s'arrête au niveau des orientations et des impulsions.

La coprésidence offre un partage de responsabilité entre les deux rives de la méditerranée, elle vise une meilleure appropriation du partenariat notamment par les pays du Sud. En prenant en compte que la coprésidence n'est qu'à ses débuts, deux réserves peuvent émises à son encontre ; du fait du blocage politique entre certains pays de la rive Sud, on se demande si ces derniers arriverons à dépasser leurs querelles pour trouver un consensus sur le coprésident du Sud et réunir tous les partenaires lors des sommets qui seront abrités par le pays assurant la coprésidence. Dans la perspective que l'Union pour la méditerranée est en quête d'un moteur comparable au moteur franco-allemand, on se demande si cette première coprésidence francoégyptienne peut servir de moteur ? Selon cet esprit de comparaison, le couple franco-algérien semble le mieux placé pour servir de moteur. Mais comme le notait La Roche foucauld : « Le bon naturel qui se vante d'être si sensible est souvent étouffé par le moindre intérêt »186.

L'idée d'une solidarité de fait autour de projets concrets s'est concrétisée par la définition de domaine de partenariats jugés prioritaires. Bien que les domaines cités reflètent les préoccupations des riverains de la Méditerranée, lorsqu'on sait que le problème des financements n'est pas résolu, l'espoir est de voir tous les projets avancés et non pas seulement ceux qui réussissent à trouver des bayeurs de fonds. Certes, l'idée de projets à

186 Etienne De Montety, L'Europe doit privilégier ses relations avec les pays du Maghreb, Le Figaro du 10/07/2008

géométrie variable est novatrice. Mais on espère qu'elle ne servira pas à réaliser des projets suivants les affinités politiques aux dépens des intérêts des riverains de la Méditerranée.

Enfin, et pour conclure, l'Union pour la Méditerranée est certainement arrivée dans un contexte difficile, elle n'offre pas de réelles pistes pour contourner les blocages dont souffre le partenariat euro- méditerranéen ; en dépit du délai fixé pour la nomination de secrétaires, rien n'a encore aboutit. Mais elle a le mérite d'avoir relancer le débat sur la Méditerranée. L'essence de cette initiative et d'offrir à tous les partenaires la possibilité de contribuer à la détermination de la forme que prendra le projet finale.

Avec ses avantages et ses limites l'initiative enrichie la région avec une expérience de plus. Mais tout porte à croire que la question du comment demeure entière, le défi est d'offrir aux deux rives la possibilité de s'ériger face à face en dialogue sans se tourner les dos ni faire la guerre, pour choisir le chemin à emprunter ensemble et qui les mènera vers la paix, la prospérité et la solidarité, seules conditions pouvant aider la région à retrouver son rayonnement.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault