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L'union pour la méditerranée, quel avenir?

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par Khoudir Leguefche
Université Pierre Mendès-France de Grenoble - Master 2 2009
  

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Chapitre 3 :

L'intégration régionale en Méditerranée

La nouvelle initiative "processus de Barcelone: Union pour la méditerranée" s'inscrit par certains de ses aspects dans la nouvelle tendance au régionalisme dans le monde. En effet, elle est l'une des perspectives ou scénarios possibles pour l'intégration économique des pays du Sud de la Méditerranée et le moyen pour ces derniers de faire partie du paysage économique mondiale. A savoir, ces pays ont la possibilité de choisir de profiter des complémentarités de leurs économies, comme est le cas du marché commun du Sud « MERCOSUR »73, ou d'opter pour un partenariat avec l'Union européenne en vue de s'insérer dans l'économie mondiale. Cela correspond au choix d'une intégration horizontale (Sud- Sud) ou verticale (Nord- Sud). Bien entendu, entre ces deux principaux choix, il y'a une multitude de possibilité. Dans l'Etat actuel, il est évident que la tendance est favorable au rapprochement avec l'économie européenne. D'ailleurs, cela s'inscrit dans la nouvelle tendance de la quatrième vague de régionalisation de l'économie mondiale qui réuni de plus en plus des pays dont le niveau de développement est différent.

En dépit de l'insistance de l'Union européenne sur la nécessité du rapprochement entre les économies du Sud74, dans le cas des pays de la rive méridionale de la méditerranée, les tentatives d'intégration Sud- Sud ont cumulé les échecs ; Parmi les indices de cette échec on cite les échanges intra- régionaux en Afrique du Nord (Graphique n°8) qui sont de 2.7 % de l'ensemble des échanges de la région. L'échec est double, les pays de la Région MENA (Moyen Orient et Afrique du Nord) ont raté leur intégration dans l'économie régionale et mondiale. En dépit de la signature d'accords d'association avec l'Union européenne et de

l' accession de certains à l'organisation mondiale du commerce (OMC), leurs échanges affichent une dépendance à l'extérieur. Cette région se périphérie de plus en plus et reste parmi les régions le s plus déconnectée au monde.

73 Crée en 1991 par le traité d'Asunción signé par le Brésil, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay et entré en vigueur depuis le 01 janvier 1995, il regroupe depuis 2006 le Venezuela.

74 Cela apparaît dans divers documents, notamment, l'Accord d'association entre l'Algérie et l'UE

Graphique n°8 :

Source : Achy L. 75

Pour trois pays (Tunisie, Algérie et Maroc) de la zone Afrique du Nord, << le potentiel des échanges intra- maghrébins semble être partiellement freiné par le caractère similaire de certains pays maghrébins, en l'occurrence le Maroc et la Tunisie. A cet égard, la référence à l'indice Finger-Kreinin3 montre que, sur le marché de l'Union Européenne le degré de similarité des exportations de la Tunisie par rapport aux exportations marocaines dépasse les 70% » 76 Pour l'Algérie, les exportations sont constituées essentiellement d'hydrocarbures. Si

.

certains77 attribuent l'échec de l'intégration maghrébine aux divergences des politiques économiques, à l'insuffisance du cadre institutionnel et légal, à la faiblesse de la structure de transport dans la région et enfin, au manque d'information sur le tarif préférentiel, cette situation nous incite à approfondir notre investigation.

Et pourtant, le débat sur la connexion des économies dans cette zone reste toujours d'actualité. Mais, ce qui importe ici c'est de souligner les possibilités qui s'offrent aux pays méditerranéens et voir laquelle de ces possibilités est la meilleure en terme d'opportunité. Pour cela, il va falloir survoler la littérature pour relever les bases théoriques de l'intégration

régionale (I), Et analyser ensuite l'Etat des lieux en méditerranée (II), pour rép dre à

on la question sur le choix entre intégration horizontale et verticale (III).

essayer de

75 ACHY L., Le commerce intra- régional : l'Afrique du Nord est elle une exception ? 2006, Centre de recherche PS2D, http://www.ps2d.net/fr/conference-proceedings.php

76 Enjeux de l'intégration maghrébine, << Le coût du non Maghreb », Etude du Ministère de l'économie et des finances, Maroc 2008. http://www.finances.gov.ma/depf/depf.htm.

77 Ibid.

I. Les arguments théoriques favorables à l'intégration régionale

Il est établit aujourd'hui qu'aucune économie dans le monde ne peut être complètement épargnée des effets négatifs du dynamisme économique engendré par la globalisation. La meilleure possibilité est celle d'atténuer ces effets par la coordination entre les économies pour contrôler l'ouverture de l'économie qui est devenue un impératif. La célèbre phrase de Brander78, « ce qui bouge dans l'économie mondiale met en concurrence ce qui ne bouge pas », l'impossibilité de revenir sur l'élimination des frontières face au développement de l'échange et la volonté de faire du monde une zone de plus en plus sans frontières pour

l' intérêt général, justifient la dynamique régionale observée.

En prenant en compte la théorie des effets de création et de détournement du commerce relatifs à toute Union douanière (Viner); Les économies de la rive Sud et particulièrement ceux des pays du Maghreb qui sont très proches du marché européen risquent de subir les conséquences négatives du dynamisme européen79, d'où l'importance de gérer cette proximité. Des travaux comme « l'optimum de Pareto », mettent au premier plan la régulation de l'économie comme seul garant d'une meilleure redistribution. Cette ré gulation suit forcément l'expansion économique et dépasse ainsi les frontières traditionnelles.

Sur un autre plan, le rejet de projets d'intégrations est souvent justifié par l'attachement à l'indépendance et la souveraineté. Or, la souveraineté définie comme « la faculté pour un Etat, d'agir à sa guise, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur »80 semble dépassé. Aucun Etat n'est en mesure d'assurer seul sa propre défense, sa sécurité alimentaire et son développement.

Comme l'a souligné Kébabdjian G.81, les approches relatives à l'intégration régionale s'enferment dans la discipline des chercheurs, économies et sciences politiques, de ce point de vue il n'y'a qu'une approche en terme d'économie politique qui est en mesure de rendre compte convenablement de l'intégration régionale puisqu'elle permet de dépasser les

78 Cité in M. Abbas., De Urban I à Urban III, un point de vue économique sur la politique de cohésion en France, cahier de recherche LEPII, 2004.

79 Effet de détournement du commerce, comme exemple ici, on cite l'effet de l'adhésion de l'Espagne sur les exportations de produits agricoles des pays du Maghreb à destination de l'Union européenne.

80 Kleffens V., cité in, Breneteau B., Diversités culturelles européennes, Cours du Master 2 Europe.

81 Kébabdjian G., Economie politique du régionalisme : le cas euro- méditerranéen, Région et Développement, IV° 19- 2004.

frontières traditionnelles entre les disciplines et articuler ainsi les dimensions économiques et politiques.

L'hauteur rassemble les travaux des économistes dans trois ensembles : la théorie des unions douanières (Viner 1955), la théorie des zones monétaires optimales (Mundell 1963) et la théorie du fédéralisme fiscale (Oates 1972). Pour lui, << la faiblesse de cette approche est évidente. En restreignant l'objet d'étude aux marchés constitués, ces analyses négligent de prendre en compte un aspect essentiel de l'intégration régionale, à savoir la production de normes, de règles, de procédures de prise de décision et de mécanismes de régulation communs à une région. C'est pourquoi ces analyses sont mal armées pour traiter de `'l'intégration profonde» >>82.

Qu'en aux travaux dans le domaine des sciences politiques, ils se caractérisent par deux courants, le `'néo-fonctionnalisme» avec des mots clés comme la supranationalité et le bienêtre collectif, et `'l'inter- gouvernementalisme» qui explique l'intégration régionale par une série de compromis entre les Etats pour la production de bien-être collectif. Si la principale faiblesse du néo-fonctionnalisme est systémique ; << en focalisant l'attention sur les aspects inter- étatiques, l'inter- gouvernementalisme néglige les processus économiques, sociaux et institutionnels par lesquels se créent des formes de gouvernement qui dépassent les Etats- nations ou qui conduisent à redéfinir les conditions d'exercices des politiques nationales >>83. Ce qui conduit l'auteur à conclure qu'une approche en terme d'économie politique internationale (EPI) est indispensable pour rendre compte du phénomène régional. Bien qu'il reconnaisse que l'approche ne fournit pas encore une analyse complète de la régionalisation, elle permet tout de même de combiner les enseignements des économistes et des politistes.

Toujours selon Kébabdjian, les applications de l'EPI sur l'intégration régionale permettent de souligner que l'effet de création du commerce développé en premier par Viner n'explique pas toujours le recours aux arrangements régionaux, seuls les outils de l'économie politique du libre échange fournissent les moyens d'explication de la tendance régionale. A cela l'auteur ajoute la << théorie des clubs >>, << son application en EPI met l'accent sur l'existence de biens publics internationaux `'excludables» >>84. La difficulté de produire des biens publics par la voie multilatérale (OMC par exemple) justifie la tendance vers le nouveau régionalisme.

82 Kébabdjian G., Ibid.

83 Kébabdjian G., Ibid

84 Kébabdjian G., Ibid

Par conséquent, les pays hors du club85 qui seront pénalisés par l'effet de détournement du trafic ont intérêt à rejoindre le club pour plus de débouchés à leurs produits. Ce qui permet à Kébabdjian de souligner << qu'un accord régional a tendance à faire boule de neige et à s'étendre sur une base régionale en faisant tomber un à un les dominos >>86 comme l'a expliqué Baldwin dans sa théories des dominos. Pour ce dernier, << (1) Les pays dont les marchés sont déjà largement ouverts et qui disposent de systèmes de protection des droits étendus ne peuvent que souhaiter l'ouverture de leurs partenaires ; (2) à défaut de pouvoir obtenir satisfaction dans le cadre du SCM, ceux-ci auront tendance à s'adresser à des pays -- en général des PED, en principe réfractaires -- et leur proposer des arrangements institutionnels sur une base bilatérale ; (3) l'offre est d'autant plus alléchante qu'elle présente de nombreux avantages, dont celui d'un accès préférentiel ; (4) si de tels arrangements sont mutuellement avantageux, ils ont aussi pour effet d'inciter les pays laissés de côté à obtenir les mêmes avantages ; (5) ainsi, par « effet de domino », c'est la cause du libre-échange qui sort gagnante >>87. La volonté de ne pas rester en dehors du club s'alimente par la montée du coût de la non participation, le cas britannique est un bon exemple.

Certains chercheurs88 plaident en faveur de l'intégration régionale en mettant en avant les arguments suivants; Le fait que l'intégration régionale offre la possibilité d'élargir le marché justifie la monté en puissance du régionalisme. Comme l'a souligné T. Haroun, la grandeur du marché définit le niveau de productivité. << L'application d'innovations technologiques à une échelle plus grande, conduira à une rentabilisation plus rapide des investissements par l'intermédiaire d'une baisse rapide et substantielle des coûts de production »89. Mais dans le cas des pays du Sud et Est méditerranéens (PSEM), plusieurs études concluent que l'impacte du libre échange en terme de bien-être est négatif ou négligeable. Ce qui explique le ralliement de ces pays au libre échange par << les gains escomptés pour les agents bénéficiaires du détournement de trafic >>90.

D'un coté, l'intégration régionale en réalisant des économies d'échelles se justifie par
l'augmentation de la production qui conduit à des coûts décroissants, et de cela à la baisse des

85 Les << outsiders >> selon l'expression de Kébabdjian

86 Kébabdjian G., Op. Cite.

87 Cité in, Deblock C., Régionalisation économique et mondialisation : que nous apprennent les théories, Cahiers de recherche CEIM, 2005.

88 Haroun T., Les opportunités d'intégration économique au Maghreb : approche théorique et perspectives concrètes, Thèse de Doctorat, Université de Nice- Sophia Antipolis 1998.

89 Haroun T., Ibid. p. 96

90 Kébabdjian G., Op. Cite.

prix à la consommation qui se traduit à son tour en termes de bien être. De l'autre coté, en intensifiant le flux d'échange, << l'intégration apporte des effets bénéfiques en matières d'amélioration des termes de l'échange »91. A cela, il faut ajouter que l'intégration est un bon moyen pour attirer les IDE (Investissements Directs Etrangers) qui ont un rôle crucial sur la croissance et qui fournissent à l'économie une source supplémentaire de financement et favorisent le transfert de technologie.

Dans le cas de la méditerranée, l'intégration des pays du Sud s'impose pour diverses raisons ; Sur le plan stratégique, en plus qu'elle est souhaitable voir nécessaire à cette région pour tirer le meilleur de ses relations avec le reste du monde, elle est primordiale pour les autres économies et notamment, l'économie européenne qui s'intéresse de plus en plus à d'autres espaces économiques pour son expansion. Mais, de l'avis de Kébabdjian, la dimension commerciale passe au second plan et l'intégration en cours reste superficielle.

Pour ne citer que les pays du Maghreb, mais en prenant en compte que cela est valable pour la majorité des pays hors Union européenne, << l'intérêt d'une intégration économique, apparaît de lui-même. En effet, ces pays doivent prendre cette dynamique de la mondialisation régionalisation, comme une dimension importante pour redynamiser leur processus d'intégration. Ces pays sont obligés de relever leurs taux de croissance; celui-ci exige un grand effort en terme d'investissement qui, à son tour, devrait se faire dans un environnement modifié, que se soit pour les sources de financement, ou bien, pour ce qui est du nouveau rôle de l'état, et du degré de l'ouverture de l'économie, donc, une plus grande insertion à l'économie mondiale. Tout ce processus exige l'appartenance ou l'insertion dans un accord régionale qui faciliterait la réalisation de ces objectifs »92.

Si le dynamisme régional est théoriquement justifié, dans le cas du projet de régionalisation euro- méditerranéen, comme le montre le tableau n°2, les motivations restent limitées. Sur les six points du système de motivation tel que définit par l'EPI, trois sont positifs pour l'Union européenne. Tandis que deux seulement sont positifs pour les PSEM.

91 Haroun T., Op. Cite. P. 105

92 Haroun T., Ibid P 186

Tableau n°2 : Intérêts en présence dans le projet de régionalisation Euro- méditerranéen

Intérêt

Europe

PSEM

Gains commerciaux

+

-

Soutien et renforcement des politiques de réformes internes des PSEM

+

+

Augmentation du pouvoir de négociation multilatéral

-

-

Construction d'un système de garanties visant la sécurité économique dans les PSEM

+

+

Possibilité de renforcer la paix et sécurité collectives

-

-

Augmentation du champ de manoeuvre stratégique entre les niveaux régionaux et multilatéraux

-

-

Source : Kébabdjian G., Op. Cite.

Comme nous l'avons souligné, deux principales opportunités sont envisageables pour les pays de la rive Sud, l'intégration verticale et celle horizontale. Dans le premier cas, prenant en compte que la démarche européenne s'inscrit dans l'effort global d'aide au développement et que c'est la situation au Sud qui est plus problématique, d'où l'intérêt de faire la lumière sur la situation économique dans les PSEM. Dans le deuxième cas, la recherche des complémentarités passe par l'analyse de la situation économique. Par conséquent, tout projet d'intégration est sensée concerner les piliers de l'économie, à savoir, l'industrie mais aussi le commerce et l'investissement. D'où l'intérêt d'analyser ces dimensions dans certains pays du Sud de la méditerranée pour évaluer leurs besoin et attente. Et de cela se prononcer sur l'approche la plus opportune.

II. Le contexte économique de la région méditerranéenne

La faiblesse des échanges intra- régionaux entre les pays de la rive Sud et Est de la Méditerranée est une évidence, avec moins de 12 %, les échanges sont les plus faibles du monde93. Pour les pays de l'Afrique du Nord, « la part du commerce intra- régional se situe aux alentours de 3% de leur commerce total »94. Bien que cette réalité est un argument en défaveur de l'intégration économique dans cette région, la réflexion sur cette question garde

93 Bichara Khader., L'Union méditerranéenne : une union de projets ou un projet d'Union, http://www.confluences-mediterranee.com/v2/spip.php?article1704, consulté le 16 Juillet 2009.

94 ACHY L., Le commerce intra- régional : l'Afrique du Nord est elle une exception ? 2006, Centre de recherche PS2D, http://www.ps2d.net/fr/conference-proceedings.php.

toute sa pertinence95. Justement, le contexte économique de la région se définit à travers la situation de l'Agriculture et l'industrie et aussi les flux commerciaux en marchandises et capital.

a) L'agriculture

Hormis la place de l'agriculture dans les économies de certains pays où elle représente presque de 20 % du PIB, l'agriculture représente aujourd'hui un enjeu géopolitique. En effet, « l'observation des enjeux qui ont trait à l'agriculture permet, en effet, de déceler tout à la fois les stratégies de puissances, les rivalités d'acteurs, les tensions environnementales et socioéconomiques, et les défis qui se poseront à l'avenir »96.

Dans sa thèse, T. Haroun97 a souligné que l'agriculture dans l'ensemble des pays du Maghreb souffre d'un déséquilibre structurel. En effet, les terres agricoles sont rares et grignotées par l'urbanisation et l'industrialisation. En dépit de l'irrégularité de la pluviométrie, l'irrigation est insuffisante. Cela fait que la région est loin de couvrir ses besoins alimentaires à moyen terme. En effet, l'auteur souligne le fait que le peu de terres agricoles, dont la région dispose, reste sous- exploité, la faiblesse de la part de l'agriculture dans le PIB et la tendance à la baisse de la population rurale par rapport à la population totale98. A ce propos, Jean Jacques Pérennes s'est demandé, « si ces médiocres performances de l'agriculture ne tiendraient pas non plus à un manque de traditions paysannes ? »99.

Mis à part les émeutes du pain qui ont éclaté au Maroc et en Égypte au printemps 2008100, aucun des pays méditerranéens n'a été touché par la famine, l'importance du secteur agricole est due à ce que l'importation des produits alimentaires est la principale cause du déficit budgétaire de certains pays. Deux tiers des approvisionnements des pays méditerranéens en matières agricoles proviennent d'Etats extra- méditerranéens101.

95 ACHY L., Ibid.

96 Abis S., Blanc P. et Mikaïl B., Le malheur est-il dans le pré ? Pour une lecture géopolitique de l'agriculture, Revue internationale et stratégique 2009/1, N° 73, p. 22-30.

97 Haroun T., Ibid, p. 192 et suivantes

98 Haroun T., P. 195

99 Cité in Haroun T., p. 193.

100 Abis S., Blanc P. et Mikaïl B., Op. Cite.

101 Abis S., Blanc P. et Mikaïl B., Ibid.

Selon un rapport de la banque mondiale102, l'agriculture est un instrument unique de développement, elle est le secteur qui préserve le mieux l'environnement en ayant la possibilité de travailler de concert avec les autres secteurs pour accélérer la croissance et de cela réduire la pauvreté. Si le nombre de pauvres aux pays du Moyen orient et de l'Afrique du Nord n'est pas alarmiste, la hausse du prix des matières alimentaires dans les marchés mondiaux du fait de la hausse des prix des hydrocarbures et la conversion de certains producteurs traditionnels de céréales à la production de biocarburants, ce qui a influencé en hausse la demande globale sur les produits céréaliers et de cela leur prix. Ce qui a rendu la sécurité alimentaire dans le monde incertaine. Selon le même rapport103, << Pour satisfaire à la demande projetée, la production céréalière devra croître de 85 % entre 2000 et 2030 >> dans le monde. << Selon certaines estimations104, il faudrait que l'Afrique quintuple sa production de biens alimentaires d'ici à 2050 pour combler son déficit nutritionnel et faire face à la croissance de sa population >>. Ce qui veut dire que pour les pays de la rive Sud de la méditerranée, vu le statut d'importateur de premier plan des produits alimentaires de la majorité des Etats, l'insécurité alimentaire apparaît évidente.

Selon la FAO (Food and agriculture organisation) (Graphique 9), entre 1961 et 1997, l'indice de la production agricole par habitant dans le monde a évolué moins que l'indice de production agricole et celui de la population105. Ce qui fait que, à moins d'une répartition égalitaire par tête de la production mondiale, la part des pays en question semble mince. Au Maghreb, comme exemple, << La production agricole reste fort limitée, et ne permet pas à l'ensemble de la région d'envisager à moyen terme, une couverture alimentaire de ces besoins »106,

102 Rapport sur le développement dans le monde, L'agriculture au service du développement, Banque mondiale, 2008.

103 Rapport sur le développement dans le monde, Ibid, p. 8.

104 Griffon M., Cité in, Gaymard H., L'agriculture au coeur de l'avenir de l'Afrique, politique étrangère 2009/02-2009/2, Eté, p. 265-276.

105 Information recueillie sur le site officiel de la FAO, consulté le 13 Juillet 2009.

106 Haroun T., p. 193.

Graphique N° 9 :

Source : FAO107.

Si le pourcentage de la population sous alimentée reste le moins important par rapport au reste des pays en développement, comme déjà souligné, les pays POAN (Proche Orient et Afrique du Nord) sont des pays nettement importateurs de produits céréaliers, leurs productions est la moins importante. Parmi les pays membres de l'Union pour la méditerranée mis à part les Etats membres de l'UE, Seule la Turquie figure sur la liste des leaders mondiaux exportateurs de produits agro-alimentaires108. Ce qui exclut de facto la possibilité d'une complémentarité économique dans la perspective de la sécurité alimentaire.

Selon les prévisions de l'OCDE, bien que les prix de certains produits comme le blé, le Mais ou le riz restent en dessous du pic atteint en 2007, seront sensiblement élevés par rapport à ceux des années 90 et de la première moitié de la décade suivante. En dépit d'un développement modéré de la culture du riz et de la baisse de sa consommation en Asie, l'organisation (OCDE) souligne que la consommation par habitant de ce dernier a tendance à augmenter sur la période 1995-2016 dans d'autres régions du monde et notamment en Afrique109.

107 Disponible sur : http://www.fao.org/docrep/meeting/X2996F.htm

108 OECD-FAO Agricultural Outlook 2007-2016, OCDE 2007 Page 43.

109 OCDE-FAO (2007), Ibid Page 61.

Si ce qui vient d'être évoqué renvoi l'agriculture au premier plan parmi les solutions à la problématique du développement et de la sécurité alimentaire, certains mettent en cause la théorie même des avantages comparatifs. Pour Gaymard110, il est impossible de << transposer le raisonnement qui a prévalu pour le décollage économique de l'Occident à l'Afrique contemporaine ». Cet auteur récuse la hiérarchisation des activités économiques qui met en avant l'industrie et rejette au dernier plan l'agriculture. Il stipule que << Pour que l'Afrique puisse développer son agriculture et nourrir sa population, elle doit durablement protéger ses marchés de la concurrence des pays plus compétitifs, au premier rang desquels les grands pays émergents »111. Bien qu'il insiste que, << l'approche régionale,..., est la solution qui permet de disposer d'un périmètre d'action pertinent pour concevoir et mettre en oeuvre les politiques agricoles et commerciales », il souligne que c'est les Etats concernés qui doivent présenter des initiatives alternatives et coordonnées, sous une aide internationale massive, pour éviter la prédation de leurs ressources.

Le fait que le monde a besoin d'augmenter de 50 % la production agricole pour nourrir la population mondiale et que l'Afrique a besoin de multiplier par 5 sa production pour assurer l'alimentation au continent, que l'orientation des Chinois à consommer plus de produits carnés et laitiers se répercute sur le prix des céréales et que la sécurité alimentaire des plus pauvres se trouve conditionner à la sécurité énergétique des plus riches révèle que la réponse à la sécurité alimentaire se situe sur le plan global.

b) L'industrie

Dans sa thèse, Haroun T. souligne les déséquilibres dans la structure industrielle des pays du Maghreb. En se basant sur des données économiques couvrant la période 1970-1994 et concernant les trois pays du Maghreb- Algérie, Maroc et Tunisie- l'auteur souligne qu'au << Maroc, c'est toujours l'industrie agro-alimentaire qui détient la première place, suivies des textiles. En Tunisie, c'est l'industrie textile qui est la plus importante puisqu'elle représente 32.8% de la valeur ajoutée manufacturière. En Algérie, si on n'introduit pas les industries non manufacturières, transformation des ressources naturelles ou le pays détient un avantage, on constate que toutes les autres industries accusent un net retard »112.

110 Gaymard H., L'agriculture au coeur de l'avenir de l'Afrique, politique étrangère 2009/02-2009/2, Eté, p. 265- 276.

111 Gaymard H., Ibid.

112 Haroun T., Ibid, p.253.

La part de l'industrie dans le PIB (Tableau N° 3) gravite autour de 30 % pour les trois pays de la sous- région, (Egypte, Maroc et Tunisie). Pour l'Algérie, comme déjà souligné, la hausse de la part de l'industrie dans le PIB est due principalement à l'industrie de transformation des hydrocarbures. Ce qui nous conduit à conclure que l'industrie dans ces pays offre la possibilité de complémentarité des économies. Comme le souligne certains, la structure économique en méditerranée converge en règle générale ; « En 2000, la part de l'agriculture dans la valeur ajoutée est plus élevée dans les PPM (comprise entre 9 et 17 %), et dans les PECO les moins avancés (Bulgarie, Roumanie). Elle se situe entre 4 et 8 % dans les nouveaux pays adhérents, comme dans les pays du Sud de l'Europe. Ce changement structurel est également palpable dans l'industrie dont la part dans la valeur ajoutée est comprise entre 21 et 30 % dans les pays du Sud de l'Europe et s'élève à 30 % dans les PECO (sauf en République Tchèque où le chiffre est proche de 40 %). On retrouve la même proportion dans les pays méditerranéens (à l'exception de l'Algérie). Dans les PECO, la contribution de l'industrie à la valeur ajoutée a diminué au profit des services. Ces derniers progressent également dans deux pays méditerranéens (Maroc, Tunisie) mais restent stables dans les autres pays de la zone. En Turquie, au Maroc et en Tunisie, la part des services dans la valeur ajoutée est relativement proche (de 55 à 60 %). L'Égypte et surtout l'Algérie restent à des niveaux inférieurs113.

Tableau N° 3 : Répartition sectorielle de la valeur ajoutée En %

 

Agriculture

Industrie

Services

1985

1995

2000

1985

1995

2000

1985

1995

2000

Algérie

9

11.3

9

53.6

50.7

60

37.4

38

31

Egypte

20

16.2

17

28.6

33.8

33

51.5

49.9

50

Maroc

16.6

11.5

14

33.4

34

32

50

54.5

54

Tunisie

17.3

13.5

12

34.1

32.6

29

48.6

53.9

59

Source : Dupuch S., Mouhoud E., Talahite F., (2004)

Mais ce qui fait la différence réellement dans la zone euro- méditerranéenne c'est la différence du niveau de développement et l'écart en matière de prospérité. A titre d'exemple, pour quatre pays de la région (Egypte, Tunisie, Algérie et Maroc), en 2003, comme le

113 Dupuch S., Mouhoud E. & Talahite F., L'Union européenne élargie et ses voisins méditerranéens : les perspectives d'intégration, Economie internationale, 97 (2004), p. 105-127.

114 Dupuch S., Mouhoud E. & Talahite F., Ibid.

démontre le graphique n°10, le PIB par habitant n'atteint que 30% du PIB/ habitant en France dans les meilleures cas. Pour l'Egypte et le Maroc, il descend à 15%.

Graphique 10 : PIB/habitant par rapport au PIB de la France = 1

Source : Dupuch S., Mouhoud E. & Talahite F., Op. Cite

Pour mémoire, parlant du secteur industriel, les deux opportunités possibles à la zone correspondent à une complémentarité des industries de la partie méridionale, ou à un rattrapage des économies de la partie Nord, ce qui correspond dans le deuxième cas à un transfert de technologie. Avant de se prononcer sur la voie la plus pertinente, il faudrait exploiter les données sur la structure des échanges dans la région.

c) Les flux intra- régionaux

La structure du commerce de cinq pays de la région (Tableau N°4) permet de remarquer qu'il est possible d'envisager une certaine complémentarité entre ces pays. A titre d'exemple, l'Algérie peut fournir les combustibles et importer du Maroc, de la Tunisie et de l'Egypte des produits manufacturés, et aussi des minéraux et métaux de la Mauritanie. « Or la réalité qui a été décrite dans une certaine mesure, prouve cependant que les choses ne sont pas faciles. En effet, de toutes les industries deux seulement ont été trouvées avancées en Tunisie et au Maroc et retardataires ailleurs. Tout cela pose le problème de la spécialisation industrielle complémentaire au Maghreb »115.

115 Haroun T., Op. Cite

Tableau 4 : Structure par groupe de produits exportés et importés des pays de la sous-

Région (1990 et 2004)

 

Algérie

Egypte

Mauritanie

Maroc

Tunisie

1990

2004

1990

2004

1990

2004

1990

2004

1990

2004

Exportations

Combustibles

96

98

29

37

1

 

4

5

17

10

Matières Premières

D'origine agricole

0

1

10

8

0

 

3

2

1

1

Produits alimentaires

0

0

10

9

56

 

26

17

11

11

Minéraux et Métaux

0

0

9

4

40

 

15

9

2

 

Produits manufacturés

3

1

41

37

0

 

52

67

68

78

Non distribués

0

0

0

4

3

 

0

0

1

0

Total

100

100

100

100

100

 

100

100

100

100

Importations

Combustibles

1

1

3

 

22

 

17

17

9

10

Matières Premières

D'origine agricole

5

0

7

 

1

 

6

3

4

3

Produits alimentaires

24

22

32

 

24

 

10

11

11

9

Minéraux et Métaux

2

3

2

 

0

 

6

3

5

3

Produits manufacturés

68

74

56

 

53

 

61

66

71

75

Total

100

100

100

 

100

 

100

100

100

100

Source : Achy L., Op. Cite.

A cela, il faut ajouter que nombre de chercheurs affirment que si l'Union européenne est le principal partenaire commercial des pays du Sud de la Méditerranée, ces derniers sont des partenaires marginaux de l'économie européenne. Ce qui ne leur donne pas une marge de manoeuvre pour apporter une influence quelconque.

Si la situation financière de certains pays comme l'Algérie n'a suscité guerre d'inquiétude concernant le niveau de vie de la population depuis la hausse des prix des hydrocarbures, il faut souligner que le financement d'activités économiques porteuses reste défectueux. Ce qui pose un problème de gouvernance. Par contre, d'autres pays peinent à honorer leurs engagements financiers. En dépit du fait que le rétablissement de la situation économique des pays partenaires méditerranéens dépend « soit d'un afflux massif d'aide extérieure et un

règlement du problème de la dette, soit d'un afflux d'Investissement Direct Etranger (IDE) >>116, la part de la région en matière d'IDE reste faible comme est le cas en matière d'APD. A noter, qu'en 2006 la part de la région MEDA117 dans les d'IDE mondiaux a atteint les 4.5 % avec une légère consolidation 2007 ce qui permet de dire que la région avec 4 % de la population mondiale a enfin capté une part normale des IDE mondiaux118. Mais entre 2002 et 2005, la part des pays MEDA dans les IDE européens (Tableau n°5) n'a pas dépassé les 3 %, et reste donc la plus faible par rapport aux autres zones destinataires. Ce qui nous permet de dire que la position de l'UE devient de plus en plus contestable. En effet, << Golfe et Europe (UE- 27 + AELE) semblent constituer désormais les 2 piliers de l'investissement étranger en Méditerranée, représentant respectivement 35 et 40 % des montants annoncés en 2007 (18 % des projets 2007 pour le Golfe et 47 % pour l'Europe) >>119.

Tableau 5 : Distribution des IDE européen hors- UE, par ensemble de destination (en %)

Source : Henri P. 2008120

Si << La qualité d'un IED se mesure, entres autres, selon l'importance des retombées locales, directes et indirectes, et en particulier selon le multiplicateur (effet de levier) de l'investissement, c'est à dire l'insertion du projet dans la chaîne locale de valeur (clients, fournisseurs, sous-traitants) », les investissements des pays du Golfe dans la région MEDA reflètent le modèle de développement déséquilibré des économies du Golfe, dans lesquelles industries de biens de consommation et industries légères sont peu présentes »121. En ce qui concerne les IDE en provenance de l'Union européenne, << quand il y en a, ils se limitent au

116 Haroun T., Op. Cite. p. 330.

117 Pays méditerranéens partenaires de l'Union européenne : Algérie, Tunisie, Maroc, Égypte, Jordanie, Liban, Palestine, Syrie, Turquie, Israël et Libye comme observateur.

118 Henri P., Nouveaux acteurs économiques en méditerranée, les investissements directs étrangers dans la région MEDA en 2007, intégration Euro- Med ou triangle Euro- Med- Golfe ? Anima Investment Network, 2008.

119 Henri P., Ibid.

120 Henri P., Nouveaux acteurs économiques en méditerranée, les investissements directs étrangers dans la région MEDA en 2007, intégration Euro- Med ou triangle Euro- Med- Golfe ? Anima Investment Network, 2008.

121 Henri P., Ibid.

secteur traditionnel des rentes (pétrole, immobilier, tourisme) ou aux opérations de privatisation et de concession de services publics ; ils ne touchent donc pas vraiment le secteur industriel dans son ensemble, et ne participent ni à sa modernisation ni à son internationalisation (Ould Aoudia, 2006)» 122 .

Comme le montre le graphique n°11, parmi les secteurs qui ont attirés les IDE, l'agro- alimentaire n'a occupé que la 10ème position par rapport au nombre de projets. Par rapport au volume le secteur a occupé la 12ème position. Or, la problématique alimentaire garde toute sa pertinence pour les pays MEDA. Deux autres secteurs susceptibles d'assurer le transfert de technologie auquel les pays en développement aspirent ; les médicaments et l'automobile n'ont pas suscité l'intérêt convoité. Ce qui met en cause le fait de compter sur les IDE comme moyen de financement du développement.

Graphique 11 : Nombre de projets et flux d'IDE par secteur en 2007 dans les pays MEDA
(EN millions d'euros)

Source : Henri P., Op. Cite.

122 Cité in, BECKOUCHE P. & GUIGOU J-L., Méditerranée : d'un Euromed en panne à une région industrielle Nord-Sud, Horizons stratégiques n°3, 2007. http://www.strategie.gouv.fr/revue/article.php3?id_article=256.

Si Henri P. estime qu'il y'a complémentarité des principaux flux d'investissement vers la région vu que «l'Europe investit surtout en Turquie, au Maghreb et en Égypte, le Golfe principalement au Mashreq, les États-Unis se concentrent sur Israël, et le Canada sur le Maghreb et l'Égypte, les investisseurs d'Asie et d'autres économies émergentes (Russie, Afrique du Sud, etc.) poussent leurs pions au Mashreq (Égypte et Syrie), en Turquie, et au Maroc »123, il est plus raisonnable de parler d'un partage d'intérêt dans la région. En effet, comme l'a souligné l'hauteur, la proximité géographique et les affinités culturelles et historiques influencent les décisions d'investissement. Mais ce qui serait porteur c'est que les IDE s'orientent vers d'autres secteur autres que ceux de rente et de privatisation.

Mais ce qui est frappant c'est la faiblesse des investissements européens dans le sud de la Méditerranée. A titre de comparaison « les Etats-Unis investissent environ 20 % de leurs investissements directs étrangers (IDE) dans leur Sud, au Mexique et en Amérique du Sud. Le Japon, quant à lui, investit environ 25 % de ses IDE chez ses voisins méridionaux, notamment la Chine, la Thaïlande et l'Indonésie. Parallèlement, l'Europe investit actuellement moins de 2 % dans la zone méditerranéenne »124. Lorsqu'on sait que derrière toute décision d'investissement à l'étranger le rôle de l'acteur public (l'Etat) est limité, l'économie de marché oblige, on comprend que le problème du sous développement est compliqué et demande toute une série d'action de part et d'autre.

III. Entre intégration verticale et intégration horizontale

Selon un document de la banque mondiale125, quatre scénarios sont possibles en terme d'intégration pour la zone maghrébine ; le premier correspond au maintien du statu quo, c'està-dire que les pays ne feront aucun effort pour intégrer leurs économies, le deuxième correspond à l'établissement d'un accord commercial régional, le troisième correspond à un accord commercial régional entre chacun des pays du Maghreb et l'Union européenne126, le quatrième correspond à la situation dans laquelle les pays maghrébins forment un bloc et conclurent ensuite un accord commerciale régional avec l'Union européenne.

123 Henri P., Op. Cite.

124 Le Roy A., L'Union pour la Méditerranée, une opportunité pour renforcer la coopération entre les rives de la Méditerranée. Entretien, Revue internationale et stratégique 2008/2, N° 70, p. 13-20.

125 Une nouvelle vision pour l'intégration économique du Maghreb, Banque mondiale, 2006.

126 Ce qui est le cas maintenant avec les accords d'association signés entre l'Union européenne et la majorité des pays partenaires méditerranéens.

Toujours selon les estimations du même document, en cas de situation de statu quo, entre 2005-2015, le PIB réel par habitant augmentera de 30 % pour l'Algérie, 41 % pour la Tunisie et 27 % pour le Maroc. Dans le cas du deuxième scénario, Le PIB ne changera que de 0.01 % par rapport à la situation de statu quo. En cas du troisième scénario, une hausse de 15 % en plus en moyenne pour les trois pays par rapport à la situation du statu quo est envisageable. Et enfin, si le quatrième scénario se réalise, le gain sera de 22 %. Ce qui permet de conclure que, en se basant sur ces informations qui ne concerne pas toute la région euro- méditerranéenne, mais trois pays qui ont un grand poids dans la région que ça soit du point de vue démographique, politique ou géostratégique, et en prenant la précaution de la crédibilité d'un tel échantillon pour l'ensemble de la région, le meilleure destin pour la zone serait la formation d'un bloc au Sud de la méditerranée et faire ensuite une intégration avec l'Union européenne.

Ce qui est marquant dans le cas des pays du Maghreb, c'est qu' au moment ou << les
expériences d'intégration suivies au Maghreb ont enregistré des résultats très faibles, ce quitraduit parfaitement l'écart considérable entre le discours, les intentions et les réalisations.

En effet, il apparaît jusqu'à ce jour que les progrès accomplis sont essentiellement de nature institutionnelle, alors que peu de projets concrets ont vu le jour >>127, et au moment ou les échanges intra- maghrébines ne dépassent pas les 3 %, << il apparaît clairement que les échanges informels sont particulièrement dynamiques au Maghreb, et montre l'existence d'éléments de complémentarité entre les économies de ces pays. Il est donc important pour ces pays de mettre en place les instruments et les mécanismes capables de redynamiser et d'augmenter les échanges à l'échelle de la région >>128. Ce qui veut dire que les pays du Maghreb sont incapables de réguler leurs économies même si la zone offre une vraie possibilité.

Selon une enquête de l'<<Euro-Mediterranean Study Commission >> EuroMeSCo 129, en dépit de la présence de facteurs (sécurité & énergie) qui oeuvrent traditionnellement pour l'intégration régionale, les pays de l'Afrique du Nord sont restés déconnectés économiquement. Ni le dialogue OTAN- Méditerranée qui offre une architecture régionale de défense, ni l'anneau gazier euro- méditerranéen qui contraint les pays de la région à un

127 Haroun T., Op. Cite p.296.

128 Haroun T., Ibid. p. 277.

129 Luis Martinez, L'Algérie, l'Union du Maghreb Arabe et l'intégration régionale, EuroMeSCo, Octobre 2006.

minimum d'entente, n'offrent la possibilité d'une intégration régionale. Le même document souligne que le déficit démocratique est à l'origine de la faiblesse de l'intégration régionale, que les régimes en place ont élaboré << un dispositif de relations bilatérales qui privilégie des partenaires non régionaux >>130 et que << les facteurs qui expliquent le blocage de l'intégration régionale sont d'ordre politique, car ils démontrent que les problèmes économiques n'ont pas la préoccupation majeure des Etats au cours de ces deux dernières décennies >>131. En gros, les principaux pays de la région ont été incapables d'édifier une stratégie commune. Ce qui a permit aux enquêteurs de conclure que << l'intégration économique du Maghreb passe par le contournement d'une organisation considéré comme un obstacle à l'intégration »132.

Si la préférence des pays du Sud de la Méditerranée reste incertaine, vu les diverses relations qu'elles établissent, certains soulignent que << la préférence de l'Europe pour une intégration des pays de l'Est, repousse une intégration Nord- Sud qui serait un levier de transformation des sociétés du Sud trop longtemps figées dans des idéologies passéistes >>133.

Apparemment, les affinités culturelles et historiques qui existent entre les deux sous- régions (Nord et Sud) ne se sont pas traduites en un partenariat hors commun. Au contraire, en dehors des flux commerciaux favorables aux pays développés, tous les indices indiquent qu'on est en présence d'un ensemble développé et solidaire au Nord, et d'un ensemble sous développé, déchiré et éparpillé au Sud qui entretiennent des relations qui ne dépassent pas le stricte nécessaire. La question méditerranéenne bien qu'elle soit présente dans les discours politiques, elle ne s'est pas concrétisée sur le terrain.

Le constat incontestable de l'échec des tentatives d'intégration en méditerranée a permis l'identification des raisons de cet échec. Bien qu'elles soient multiples et interconnectées, les fondements même de l'intégration économique et ses principaux aspects, le libre échange par exemple, posent problème sur le plan théorique134. Néanmoins, un certain nombre de solutions a été développé. Pour Beckouche P., << il faut une démarche paritaire : à court terme, c'est un pacte industriel, fondé sur des financements croisés, des réseaux d'entreprises Nord-

130 Luis Martinez, Ibid, Sont cités comme exemples, l'accord de libre échange entre le Maroc et les USA (2003), le partenariat stratégique Algérie - Russie (2003) et le partenariat entre l'Italie et la Libye (1998).

131 Luis Martinez, Ibid.

132 Luis Martinez, Ibid.

133 BECKOUCHE P. & GUIGOU J-L., Op. Cite.

134 Pour le prix Nobel de l'économie, Joseph E. Stiglitz,( Pour un commerce mondial plus juste, Fayard, 2007), empiriquement,les preuves concrètes sur la relation entre le libre échange et la croissance économique sont fragiles (p 67). A cela il faut ajouter la problématique relation entre ouverture et développement.

Sud et un partage de la chaîne de valeur équilibrée entre les deux rives - le contraire d'un néocolonialisme, car le Sud a besoin de ses champions économiques. A long terme, c'est un pacte politique pour une Communauté du Monde Méditerranéen, distincte et complémentaire de l'Union européenne ».

Puisque les pays du Maghreb représentent des Marchés relativement petits, Certains135 concluent que la meilleure chance de développement pour ces pays se situe dans l'ouverture et l'intégration d'où l'intérêt de s'engager dans une intégration effective. En dépit de l'existence de facteurs intégrateurs au Maghreb qui est une sous région méditerranéenne signifiante de la méditerranée, les perspectives d'intégration qui semblaient prometteuses au départ n'ont pas aboutit. Dans ces conditions, << Le projet d'intégration maghrébine doit se faire sur la base d'une logique économique différente. Au lieu que ce processus se décide en haut, il devrait se construire sur le terrain et d'une façon pragmatique. La volonté politique est une condition indispensable de sa réussite, mais celle-ci doit se situer au sommet et ne doit pas se traduire par la prolifération d'institutions restant sans réels pouvoirs »136. Pour que ce projet ait un sens et pour qu'il soit à la hauteur des espoirs, il faudrait qu'il prenne en considération les deux dimensions, verticale et horizontale.

En conclusion, l'espace méditerranéen bien qu'il s'est identifié à travers l'histoire lointaine, s'est fait marqué par une profonde fracture que les uns et les autres continuent d'exploiter pour diverses raisons. La querelle religieuse et culturelle entre les deux rives, mais aussi les différents entre les peuples et les institutions des pays de la rive Sud ont trop duré. Ce qui permet de dire que la voie du dialogue est le seul moyen d'aplanir ces divergences, et que cela n'est possible que si toutes les forces y participent. Ce qui suppose une démocratisation de la région pour la délivrer des calculs des élites dirigeantes et du jeu d'intérêts qui se sont établi dans la région. Cela permettra à la région de profiter véritablement des programmes d'aide, de se réconcilier avec le reste du monde pour rendre la région inter- pénétrable et attirer ainsi les flux.

Si Guyomard H. estime qu'il est possible de nourrir toute la planète dans le futur, il
recommande de décider aujourd'hui des << trajectoires qui permettront de garantir les
approvisionnements alimentaires et énergétiques à plus long terme, et d'endiguer la

135 EuroMeSCo

136 Haroun T. Op. Cite. P.308

dégradation des biens environnementaux et la montée des inégalités. En d'autres termes, le facteur le plus rare est sans doute le facteur temps »137.

Ce qui vient d'être évoqué met en avant la problématique de la gouvernance des problèmes du monde qui se situe à un niveau qui dépassent les capacités d'un seul Etat. Dans cette perspective, il est opportun de voir de prêt ce que propose la nouvelle initiative « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » qui vient enrichir le paysage euro- méditerranéen et voir son intérêt et les réponses qu'elle apporte.

137 Guyomard H., Nourrir la planète de façon durable est possible, à condition que.., politique étrangère 2009/02, Eté, p. 291-303.

Deuxième partie :

A l'Union pour la méditerranée

Comme son nom l'indique, l'UPM n'est pas un projet alternatif au processus de Barcelone qui constitue le cadre unique des relations en Méditerranée. L'initiateur du projet, le président français Nicolas Sarkozy a souligné dés le début, que son initiative s'inscrit dans la continuité et respecte l'esprit et les fondements de Barcelone. Mais ce projet qui vient s'ajouter aux nombreuses tentatives de rapprochements dans la région a suscité l'intérêt des riverains de la méditerranée et aussi celui d'autres pays. Ce qui attire l'attention de plus c'est la curieuse transformation d'une union méditerranéenne à une union pour la Méditerranée. Simple jeu de mots ou reflet d'une nouvelle vision, seul un suivi du parcours de cette initiative et de son contenu nous permettra de le découvrir (I).

Logiquement, le processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée est une réponse aux carences de ses prédécesseurs. Or, on a reproché aux cadres de partenariat euro- méditerranéen leurs échec qu'en à la réparation de la fracture religieuse, culturelle et idéologique entre le Nord et le Sud de la Méditerranée. On a reproché à l'Europe la faiblesse de son action envers une zone qui pourtant a un enjeu stratégique au moment ou les USA et le Japon font plus envers leur entourage immédiat. D'ailleurs, le plan Marshall qui était à l'origine du soulèvement de l'Europe et qui normalement incite cette dernière à renvoyer la Bal comme le souhaite les sudistes, reste unique. La plus grande partie de l'aide européenne s'inscrit dans le cadre bilatéral et de ce point de vue, il est contestable de dire qu'elle sert les objectifs du partenariat euro- méditerranéen. A la lumière des points évoqués, il est intéressant de voir les réponses qu'apporte la nouvelle initiative à ces préoccupations en procédant à son l'évaluation (II).

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