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Corrélation genre et participation politique: une analyse des causes et impacts de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques de la RDC, avec un regard particulier sur Kindu dans la province du Maniema (1960-2011)

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par Kalonge GASTON
Université de Kindu - Diplôme d'études supérieures en sciences politiques et administratives 2011
  

Disponible en mode multipage

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DEDICACE

A la mémoire de mon père, KALONGE Delphin, qui j'ai souhaité voire vivre très longtemps sur cette terre des Hommes, parce qu'il est le seul qui m'a indiqué la bonne voie en me rappelant que la volonté fait toujours les Grands hommes.

A celle qui m'a transmis la vie, l'amour, le courage ; à toi chère maman SAKINA Honorine, toutes mes joies, mon amour et ma reconnaissance.

A ma famille, mon épouse, mes enfants, mes frères et soeurs qui attendent avec patience les fruits de cette oeuvre.


REMERCIEMENTS

Mes remerciements les plus sincères s'adressent en premier lieu à mon Promoteur, Monsieur le Professeur Ordinaire Docteur Fréderic ESISO ASIA AMANI qui a crédité de sa confiance cette recherche et pour la somme de ses conseils et recommandations.

Mes remerciements s'étendent également au Co-promoteur de ce travail, Monsieur le Professeur Associé Docteur Casimir NGUMBI KITETE WA YUMA, pour ses conseils et encouragements.

Mes vifs remerciements s'adressent enfin, à mes amis et mes collègues enseignants pour leur soutien moral et économique.

Gaston LUKONGO KALONGE

SIGLES ET ABREVIATIONS

ACL - PT : Assemblée Constituante Législative Parlement de Transition

AFECOSKI : Association des Femmes Commerçantes du Sud - Kivu

AFEJUCO : Association des Femmes Juristes du Congo

AFEM - SK : Association des Femmes de Média du Sud-Kivu

AFEMD : Association des Femmes Musulmanes pour le Développement

AMP : Alliance de la Majorité Présidentielle

Art. Article

CAFCO : Conseil des Associations Féminines du Congo

CAP : Comité d'Alerte pour la Paix

CDFE : Comité Diocésain des Femmes

CEDEF : Convention sur l'Elimination de toute forme de discrimination à l'égard des femmes

CEI : Commission Electorale Indépendante

CENI : Commission Electorale Nationale Indépendante

CEP : Centre d'Etude Politique

CNPD : Campagne Nationale pour une Paix durable

CNS : Conférence Nationale Souveraine

COCAFEM/GL : Collectif des Associations des Femmes dans la sous région de Grands Lacs

COFAS : Caucus des Femmes du Sud - Kivu

COLO : Congrès LOKOLE

CONAFED : Conseil National des Femmes pour le Développement

DAWN: Development Alternatives for Women's in a New Era

DDN : Dynamique pour le Développement National

DIC : Dialogue Inter Congolais

DSCRP : Document Stratégique de Croissance pour la Réduction de la Pauvreté

DYNAFEP : Dynamique des Femmes Politiques

EDS : Enquête Démographique et de Santé

FABAKO : Femmes de l'Alliance de Bas Congo

FCN : Front Commun de Nationalistes

FED : Femme et Développement

GED : Genre et Développement

GEFA : Groupe pour l'Emancipation de la Femme Africaine

HCCI : Haut Conseil de la Coopération Internationale

HCR - PT : Haut Conseil de la République Parlement de Transition

IFD : Intégration des Femmes dans le Développement

INS : Institut National des Statistiques

MD : Mouvement des Démocrates

MFN : Mouvement des Femmes Nationalistes

MLC : Mouvement de Libération du Congo

MMF : Marche Mondiale des Femmes

MONUC : Mission d'observation des Nations Unies au Congo

MPR : Mouvement Populaire de la Révolution

NCE : Noyaux Clubs d'Ecoute des Femmes Rurales

ONGD : Organisation Non Gouvernementale du Développement

OPEKA : Organisation Politique de Kasavubistes

PALU : Parti Lumumbiste unifié

PLDC : Parti Libéral Démocrate Chrétien

PMI : Protection Maternelle et Infantile

PNG : Politique Nationale de Genre

PNPFC : Programme National pour la Promotion de la Femme Congolaise

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

PPRD : Parti du Peuple pour la Reconstruction et le Développement

Pr. Professeur

PUF : Presse Universitaire de France

RADECO : Rassemblement de Démocrates Conciliants

RAF : Réseau Action Femme

RCD : Rassemblement Congolais pour la Démocratie

RDC : République Démocratique du Congo

RFDP : Réseau des Femmes pour la Défense de Droit et de la Paix

RPC : Rassemblement du Peuple Congolais

RUCG : Réseau Universitaire des Chercheurs en Genre

UNAF : Union Nationale des Femmes

UNESCO: United Nations Educational, Scientific and Cultural Organisation

UNFC : Union Nationale des Femmes Congolaises

UNICEF: United Nations International Children's Emergency Found

UNIKI : Université de Kindu

UNIKIN : Université de Kinshasa

UPFC : Union Progressiste Féminine Congolaise

VIH : Virus de l'Immunodéficience Humaine

LISTE DES TABLEAUX

Tableau n°01 : Répartition des femmes enquêtées par structures

Tableau n°02 : Distinction entre l'approche de l'IFD et de GED

Tableau n°03 : Incidence de la pauvreté en province selon les milieux de résidence et

les caractéristiques socio - démographiques du chef de ménage.

Tableau n°04 : Occupations des femmes en RDC

Tableau n°05 : Effectif des ONGD en RDC de 1990 à 2003

Tableau n°06 : Représentation des femmes au Dialogue Inter Congolais

Tableau n°07 : Initiatives des femmes politiques dans le processus électoral

Tableau n°08 : Les effectifs des électeurs par Genre

Tableau n°09 : Electeurs par Genre et par Provinces

Tableau n°10 : Candidats par Genre et par Provinces

Tableau n°11 : Candidatures aux législatives nationales

Tableau n°12 : Genre et élus par Provinces

Tableau n°13 : La représentation des femmes dans les différentes législatives de 1970 à 2006

Tableau n°14 : Les femmes dans les législatures de la RDC

Tableau n°15 : Candidatures à la Présidentielle de 2006

Tableau n°16 : Niveau d'instruction des femmes à Kindu

Tableau n°17 : Genre, élus et appartenance politique lors des élections législatives Nationales de 2006.

LISTE DES FIGURES ET GRAPHIQUES

Figure n°01 : Schéma des théories sur le Genre et le Développement

Graphique n°01 : Visualisation des effectifs des ONG en RDC de 1990 à 2003

Graphique n°02 : Visualisation de la représentation des femmes participantes au Dialogue Inter Congolais

Graphique n°03 : Visualisation des initiatives des femmes politiques dans le processus électoral

Graphique n°04 : Visualisation des électeurs par Genre

Graphique n° 05 : Visualisation des candidats aux élections législatives nationales.

Graphique n°06 : Visualisation des candidatures à la présidentielle de 2006.

INTRODUCTION

1. ÉTAT DE LA QUESTION

La logique féministe pour les études de genre est partie d'un constat : les situations défavorables des femmes par rapport aux hommes, dictées par le patriarcat. Cela s'est institutionnalisé dans les normes et pratiques étatiques, qui puisent leurs fondements des normes et pratiques sociales.

Ces situations ont été observées dans différents contextes nationaux et locaux, sans être abordées de manière uniforme partout par les chercheurs, malgré les similitudes qui apparaissent dans la sphère de Genre à travers le monde ; de manière générale, les femmes ont un statut défavorable par rapport aux hommes dans plusieurs secteurs de la vie sociale.

Là où des méthodologies ont été appliquées aux recherches sur le Genre, les réflexions des féministes ont produit des théories et des approches, qui sont à fixer sur des situations observées dans un espace bien déterminé, en un moment précis, dans un environnement politique, économique, socio culturel bien identifiable.

Ainsi, d'après Julienne NZUGU FEZA (1(*)) : « la transposition de ces réflexions sur la République Démocratique du Congo n'est pas de manière absolue applicable aux situations des femmes congolaises. Les réalités qui ont produit les études de Genre dans le monde anglo-saxon, en Europe ou dans tout autre continent, ne sont pas nécessairement identiques aux nôtres ».

Cela suppose donc un questionnement qui nous permette de savoir ou de connaitre les situations réelles des femmes congolaises et une approche à appliquer à leurs conditions d'existence, pour susciter un changement socio politique et économique en faveur de l'égalité des sexes.

Par ailleurs, selon Marie ZAMUDA RAMAZANI, « la transposition d'approche ne peut dans ces conditions se faire de manière mécanique. Il faut une méthodologie spécifique au contexte congolais » (2(*)).

Plusieurs courants ont traversé le féminisme, mais ont tous été sujet à requestionnement quand ceux-ci ne répondaient pas des faits sur terrain ou encore ne pouvaient engendrer les changements souhaités par les acteurs de promotion de Genre, notamment les chercheurs, dans plusieurs pays du monde contemporain. Nous faisons ici allusion aux différents débats scientifiques, colloques, ateliers et conférences autour du concept de Genre en France, en Afrique et aux Etats Unis par les chercheurs sur les situations des femmes.

A cet effet, Marie-Ange LUKIANA * déclare dans sa communication : «  Que dire du Genre dans un contexte multiculturel comme celui de la République Démocratique du Congo, où la trajectoire historique, n'est pas commune à tous les groupes sociaux, où les mutations sociales ont émaillé « les histoires des femmes », produisant des régimes de genre ponctuels, un peu permanents, imbriqués, etc. »(3(*)) 

Cette communication va dans la même conception ou dans le même sens avec celle de Catherine ODIMBA (4(*)), la Représentante Africaine du Réseau Universitaire de Chercheurs en Genre, RUCG en sigle, lorsqu'elle affirme avec consistance que : « la République Démocratique du Congo a à la fois, une politique, une économie, une culture et par sa particularité, ses espaces de vie multiples. Elle a des histoires, des politiques, des économies, tous conceptualisables. Il faut donc des réflexions qui produisent des approches pour l'égalité des sexes qui tiennent compte de tous ces paramètres ».

Par la même occasion, un Sociologue Congolais, LONGANDJO OKITA KEKUMBA (5(*)) de l'Université de Kinshasa, s'est posé les questions de savoir : Qu'est-ce que le Genre en République Démocratique du Congo et Quelles problématiques de Genre pour la République Démocratique du Congo ? Existe-il un Genre ou des Genres (une construction sociale des sexes ou des constructions sociales des sexes ?) Ce qui implique un questionnement sur les régimes de Genre, leur temporalité, leur fonctionnement et leur prise en Genre ainsi que le système de Genre qu'ils mettent en place au niveau macro sociétal ». Malheureusement, conclut LONGANDJO OKITA KEKUMBA, la question ne semble pas être suffisamment prise en charge par plusieurs chercheurs congolais.

La majorité de chercheurs congolais, membres du RUCG, estiment qu'il existe une multitude de régimes de Genre en République Démocratique du Congo, nous voulons dire plusieurs espaces où le Genre fonctionne selon les normes de l'espace, modelés par les cultures, les économies, les politiques et les Administrations qui s'entrecroisent, se repoussent, se coalisent sur les femmes et les hommes pour produire une configuration de Genre propre à la République Démocratique du Congo.

Dans ces conditions, il est indispensable pour nous, de critiquer rationnellement le questionnement des auteurs et chercheurs congolais sur le Genre car, quels seraient les points de convergence et de divergence entre la sphère globale, et les sphères sectorielles où se dévoile le Genre, mais aussi entre la sphère publique et les sphères privées?

Quand le public et le privé ; le local et le global de Genre s'affrontent dans les espaces de vie, il en résulte souvent de disfonctionnement de l'un ou de l'autre. Les logiques de Genre du niveau global et national ne sont toujours pas les logiques du niveau local, ou celles de la sphère publique consacrée dans les sphères privées. Evoluer dans plusieurs sphères à la fois suppose des paradoxes dans le chef des femmes. Quelle est la sphère dominante de genre chez la femme congolaise ? Quelle est celle qui façonne son identité. Bref, quelle est l'identité réelle de la femme congolaise face à cette diversité de Genre qu'elle affronte au même moment, dans sa vie de tous les jours ?

Pour Simone de BEAUVOIR (6(*)) citée par Marie-Claire YANDJU, la Représentante du Ministre de Genre, Famille et Enfant de la RDC : « la femme vit des « Genres » dans différents espaces, mais un reste dominant, pour chaque femme et pour chaque groupe social féminin congolais. La même qui donne des ordres à ses enfants à la maison, ne peut pas prendre la parole devant les hommes dans une église, son fils y compris; le religieux et le familial s'affrontent, celle qui donne des ordres au service ne peut que soumission à son mari ; le public et le privé s'affrontent, celle qui doit préparer pour son mari a un cuisinier ; que devient la femme du cuisinier et le cuisinier qui prépare chez une autre femme ne peut pas le faire chez lui ! ». Ce sont des réalités que toute femme connait, y compris la femme congolaise.

Les situations réelles des femmes congolaises ne sont pas prises en compte et les politiques en direction des femmes ne sont pas souvent accompagnées de mesure expresse de mise en oeuvre. C'est ainsi que dans l'élan national de la lutte pour le repositionnement des femmes, la situation semble stagnante.

Pour mieux baigner notre discours dans un courant d'idées spécifique et expliquer la démarcation de notre objet d'étude par rapport aux thèses antérieures explicitées sur la situation de la femme dans le monde, nous avons fait aussi une revue critique des divers courants d'idées existant sur le Genre.

Le premier courant d'idées sur le Genre s'est développé en 1972 à partir des impulsions du sociologue britannique Ann OAKLEY (7(*)). Ce dernier a élaboré, dans sa production scientifique, une distinction entre le Sexe et le Genre. Ce courant prouve que la masculinité et la féminité ne sont pas des substances « naturelles » inhérentes à l'individu, mais des attributs psychologiques et culturels, fruits d'un processus social au cours duquel l'individu acquiert les caractéristiques du masculin ou (et) du féminin. Le Genre est ici considéré comme le « sexe social ».

Par la suite, de nombreux auteurs ont proposé un renversement de la relation de cause à effet Sexe/Genre. Ces auteurs du deuxième courant d'idées sur le Genre vont considérer que le sexe, au même titre que le Genre, est une construction sociale. Parmi ces auteurs, les plus célèbres sont : Eve KOSOFSKY SEDGWICK(8(*)),Michel FOUCAULT (9(*)),Nicole ALBERT(10(*)), Marie -Hélène BOURCIER (11(*)), Leslie FEINBERG(12(*)), Kate BORNSTEIN(13(*)), Patrick CALIFIA-RICE(14(*)), Lee EDELMAN(15(*)) et Judith BUTLER(16(*))

Contrairement aux auteurs du deuxième courant d'idées, Ann OAKLEY confirme : « Le genre précède le sexe ; dans cette hypothèse le sexe est simplement un marqueur de la division sociale ». Penser le sexe en termes de donnée biologique est une impasse : pour elle le sexe est avant tout une représentation de ce que la société se fait de ce qui est « biologique ».

Selon Judith BUTLER, « Le Genre, c'est la stylisation répétée des corps, une série d'actes répétés à l'intérieur d'un cadre régulateur plus rigide, des actes qui se figent avec le temps de telle sorte qu'ils finissent par produire l'apparence de la substance, un Genre naturel de l'être. ».(17(*))

Certes, à partir des explications développées par les chercheurs et auteurs du deuxième courant d'idées, nous retrouvons comme mérite le fait de partager le même paradigme sur la notion et les considérations du concept Genre, car les actes et les discours relatifs au Genre sont performatifs. Cela signifie que non seulement ces derniers décrivent ce qu'est le Genre (performance) et par là même ont la capacité de produire ce qu'ils décrivent. Mais pour Judith BUTLER, « il faut aussi que le Genre désigne l'appareil de production et d'institution des sexes eux-mêmes [...] c'est aussi l'ensemble des moyens discursifs/culturels par quoi la « nature sexuée » ou un « sexe naturel » est produit et établi dans un domaine « pré discursif », qui précède la culture, telle une surface politiquement neutre sur laquelle intervient la culture après coup. »

La troisième thèse ou le troisième courant d'idées est tellement proche de notre objet d'étude, c'est le courant dénommé « l'Approche Genre et Développement ». Cette approche est soutenue par plusieurs auteurs et chercheurs sur le Genre à l'heure actuelle. Les plus célèbres sont : Laure BERENI et al (18(*)), Elsa DORLIN (19(*)), Guy HOCQUENGHEM (20(*)), Didier ERIBON (21(*)), Christine DELPHY (22(*)), Leo BERSANI (23(*)), Louis GEORGES (24(*)), Ronald LAING (25(*)), Thomas LAQUEUR (26(*)), Nicole-Claude MATHIEU (27(*)), Laure MURAT (28(*)) Nicole SAUDA (29(*)), Catherine ODIMBA (30(*)).

Cette approche repose sur l'analyse et la remise en cause des processus qui différencient et hiérarchisent les individus en fonction de leur sexe. Les conceptions du rôle des femmes dans le développement ont évolué progressivement pour cesser de considérer celles-ci comme des victimes et des objets passifs et en faire des acteurs autonomes.

Elle compare la situation des femmes et des hommes grâce à des outils d'analyse qui permettent de diagnostiquer les relations de Genre dans une société donnée sous plusieurs aspects : sociaux, économiques, culturels, environnementaux, politiques, etc. Une fois les inégalités éventuelles identifiées, elles seront prises en compte dans des programmes ou des projets de développement.

L'approche Genre et développement va ainsi contribuer à promouvoir l'égalité des droits et le partage équitable des ressources et des responsabilités entre femmes et hommes grâce à la prise en compte de leurs rôles et de leurs besoins.

Pour ces auteurs, pendant la « Décennie des femmes » (1975-1985) l'approche « Genre et développement » est apparue dans les projets de développement. Elle visait à réduire les inégalités en plaçant les femmes comme principales bénéficiaires (vision économiste) mais sans s'attaquer aux fondements des inégalités entre les hommes et les femmes (Par exemple : inutile de donner accès au crédit ou à la formation à des femmes qui n'ont ni accès à la terre, ni liberté de mouvement). Celles-ci étaient cantonnées dans leur rôle traditionnel (maternité, éducation des enfants, santé) sans effet sur les rôles socialement construits, d'où l'échec de cette approche.

D'après nous, les auteurs de cette approche devraient savoir qu'elle a été adoptée à la conférence de PÉKIN (1995) exclusivement par des « savants-profanes », c'est-à-dire, par les activistes de la promotion des Droits de la femme évoluant dans les ONGD et autres Associations féministes.

Ainsi, les chercheurs et autres experts en l'occurrence les « savants-scientifiques », hommes comme femmes, devraient normalement être associés dans la construction de ce courant afin que la majorité de ces défenseurs partagent le même paradigme. Pour les auteurs cités ci-hauts, l'approche Genre et Développement consiste à prendre en compte la répartition des rôles et des activités des femmes et des hommes dans chaque contexte et dans chaque société pour tendre vers un équilibre des rapports de pouvoir entre les sexes.

Le programme d'action de PÉKIN contient douze objectifs stratégiques concernant l'égalité de Genre. Depuis 2000, les Objectifs du Millénaire sont les principaux cadres de référence internationale en matière de développement, l'objectif troisième se propose de « promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes ».

En France par exemple, c'est en 2000 que le HCCI (Haut Conseil de la Coopération Internationale) a mis en évidence dans une étude intitulée «  L'intégration du Genre dans la politique française de coopération : bilans et perspectives »31(*) le retard de la France par rapport aux autres pays européens sur la prise en compte des rapports sociaux entre femmes et hommes dans la politique mise en oeuvre. Ce sont les secteurs de l'éducation et de la santé qui ont été privilégiés dans les programmes et les projets de développement soutenus par la Coopération française alors que les secteurs politiques et économiques n'ont pas reçu la même impulsion.

En 2004, le ministère des Affaires étrangères de la France a lancé le Réseau Genre en Action, en sigle RGA, afin de faciliter l'information, la formation et les échanges sur le « Genre et développement » grâce à ce portail d'informations et de ressources. D'autres actions ont été soutenues (recherches, formations universitaires, obligation de critères du Genre dans les appels d'offre, etc.) pour favoriser l'intégration du Genre dans la politique de coopération française. (32(*))

Nous citons enfin, le mémoire de MONDOLE Esso LIBANZA EBEYOGO (33(*)). Ce dernier s'est fixé comme objet d'étude dans son travail, le fait d'analyser la relation entre le financement des activités de lutte contre la pauvreté et l'amélioration des conditions socio-économiques des femmes de Kindele dans la ville de Kinshasa. Son étude a illuminé à travers la stratégie de financement des activités économiques des femmes, les voies par lesquelles les relations du Genre affectent le développement et la transformation de la communauté Kindele.

L'auteur s'est interrogé ainsi sur les rationalités contingentes des financements destinés aux activités des femmes de Kindele ainsi que l'impact de ceux-ci sur l'amélioration de leur pouvoir économique dans une ville atypique comme Kinshasa où la précarité caractérise le mode de vie des communautés et des individus.

Ainsi, pour orienter rationnellement son travail, MONDOLE Esso LIBANZA EBEYOGO a posé deux questions principales. La première est celle de savoir si l'intégration de la stratégie du Genre dans le système d'action des microcrédits productifs peut-elle contribuer à l'amélioration de la perception du rôle des femmes dans le milieu urbain de Kindele ?, la deuxième question consiste à savoir pourquoi ces microcrédits productifs qui servent pourtant de substituts fonctionnels à l'emploi chez les femmes ne transforment-ils pas le milieu urbain de Kindele. Si non, à quoi servent alors ces micro-prêt.

Au terme de son investigation, l'auteur est arrivé aux résultats selon lesquels : l'intégration des stratégies du Genre dans l'approche microcrédits productifs a non seulement eu comme effet de mobiliser les femmes de Kindele dans l'entrepreneuriat économique par l'impulsion et l'émergence des activités marchandes, mais aussi contribué à l'amélioration des conditions des femmes et de leurs ménages respectifs par la résolution des certains problèmes ; car, bien qu'il n'apparait pas utile en terme de stratégie économique de prêter de l'argent aux indigents dont les besoins sont nombreux et la survie précaire, certaines femmes ont dû profiter de la situation et intégrer les règles du jeu.

Le mérite de travail de MONDOLE Esso LIBANZA EBEYOGO résulte au niveau où il a explicité le rôle agissant et dynamique des microcrédits productifs sur la situation socio-économique des femmes de Kindele, car ces microcrédits productifs n'agissent pas comme des solutions miracles, mais comme des simples stratégies de substitution qui assure à la fois l'équilibre social et le dynamisme dans le système de production.

Par contre, la plus grande faiblesse de ce travail résulte au niveau où l'auteur a négligé d'expliciter les manifestations de la conscience négative des microcrédits productifs au sein des maisons financières, bancaires et des coopératives des crédits. Ces dernières imposent aux femmes bénéficiaires des microcrédits les taux de remboursement très élevés et une durée trop réduite. Ce qui fait qu'en cas d'accumulation de retard de remboursement, ces maisons imposent des pénalités en gradation ou des saisies des biens sans tenir compte des imprévues ou de la précarité des conditions économiques des femmes dans les pays sous développés.

Sans toutefois négliger les aspects pertinents développés par les prédécesseurs regroupés dans les divers courants scientifiques sur la notion du Genre, ce travail cible un seul domaine de la vie dans la société moderne. C'est la connexion explicative de la notion du Genre face à la participation politique, dans un espace bien connu, précisément la République Démocratique du Congo en général, mais dans la ville de Kindu en particulier en tant que Chef-lieu de la province du Maniema. C'est dans la ville de Kindu que l'étude s'est effectuée au moyen de l'enquête.

Le choix de la ville de Kindu parmi d'autres se justifie par le fait que celle-ci est le Chef-lieu de la Province du Maniema et elle rassemble en son sein les caractéristiques essentielles de la dite province. L'histoire de la RDC montre clairement que les Arabo-musulmans ont exploré cette province avant même l'arrivée des colonisateurs belges. Ainsi, avec les effets d'acculturation, ces opérateurs économiques Arabes ont réussi à imposer une culture de la discrimination des femmes dans nos sociétés. Les effets de cette discrimination sont visibles dans la Province du Maniema et c'est pour nous une occasion de les expliciter dans cette étude.

Kindu est également un des milieux où les femmes ne se retrouvent pas dans les institutions politiques et elles sont moins représentées dans les divers services publics.

Quant au choix de la période, il est à noter que 1960 a été pour la RDC l'année de l'accession à l'indépendance nationale du pays. Les colonisateurs sont partis, mais lors des négociations de la table ronde de Bruxelles, les premières institutions politiques ressorties à l'issue de cette table ronde n'ont pas tenu compte de la représentativité féminine. Néanmoins, il sied de retenir que le Congo était organisé politiquement et administrativement en empires, royaumes, chefferies, clans,...avant la création de l'Etat Indépendant du Congo par le Roi Léopold II en 1885.

Certes, pendant cette période les femmes étaient toujours défavorisées par rapport aux avantages qu'avaient les hommes dans les espaces de prise des décisions politiques, mais les discriminations atroces sont apparues avec la pénétration des Commerçants Arabo-musulmans. Au lieu que l'élite politique congolaise corrige cette situation, elle l'a entérinée en 1960. C'est pourquoi nous avons choisi le terminus de 1960. La seconde extrémité temporelle va jusqu'en 2011. Cette année est caractérisée par l'organisation des cycles électoraux en RDC.

L'intérêt porté sur cette question en ce moment où l'approche « égalité du Genre » est au centre du débat sur la participation politique des femmes dans la gestion des affaires publiques, se justifie non seulement par les pressions de l'actualité sur l'histoire, mais aussi par la dynamique des rapports sociaux et des pratiques sociales stéréotypées.

Le passage de cette revue critique sur les courants de pensées autour de concept « Genre » nous amène automatiquement à cerner le problème spécifique ayant nécessité la présente étude.

2. PROBLÉMATIQUE

Au début du 20ième siècle, plusieurs chercheurs en sciences sociales ou humaines ont entrepris de s'intéresser de plus près à l'impact des mutabilités des regroupements sociaux sur les femmes. En 1970, on a parlé de la participation des femmes au développement non seulement politique mais intégral. Ces approches partaient des conceptions selon lesquelles les femmes accusaient un retard dans les sociétés sub-sahariennes ainsi que dans les pays où l'islam est une religion d'Etat embrassée par la majorité de la population globale.

Cette conception était répandue de même dans la société congolaise vers l'année 1994 et qu'il était possible, selon les chercheurs, de combler l'écart entre les femmes et les hommes en adoptant des mesures correctives dans le cadre des structures politiques, administratives et juridiques existantes d'une part et d'autre part, dans le cadre des politiques publiques.

Le lancement de la décennie « Femme, égalité et paix » avec la conférence de Mexico en 1975, a marqué le début officiel de la prise de conscience collective et a permis de faire sortir les femmes en général de leur invisibilité, dans le but de cesser le développement exclusivement au masculin et de mobiliser les forces visant à s'imposer dans les structures politico-administratives des Etats modernes.

Cette conférence fut organisée à la demande de l'Assemblée générale des Nations Unies pour attirer l'attention de la Communauté Internationale sur le besoin de développer des objectifs futurs précis, des stratégies efficaces et des plans d'action en faveur de la promotion intégrale et surtout politique des femmes. Trois objectifs clés furent identifiées pour servir de base à cette assise des Nations Unies relative aux femmes, il s'agit de :

? L'égalité complète hommes-femmes et l'élimination de toutes sortes des discriminations fondées sur le sexe ou autres considérations des divers ordres;

? Le favoritisme de toutes les actions orientées vers l'intégration et la pleine participation des femmes au développement intégral; et

? L'adoption des apports de plus en plus importants des femmes au processus de renforcement de la paix internationale.

Par ailleurs, plusieurs conférences internationales et régionales ont été organisées dans la plupart des Etats du monde, avec comme objectif de remodeler la vision sur les conditions vitales des femmes, ainsi que de définir les relations de pouvoir politique- femmes.

Ces assises ont permis à tous les niveaux de reconnaître la place et le rôle crucial des femmes dans la mobilisation des ressources orientées vers le développement politique et la nécessité de leur participation équitable à la prise de décision pour asseoir un développement durable. En somme, les contextes mondial et régional devraient offrir aussi à la République Démocratique du Congo de réelles opportunités pour réaliser l'équité et l'égalité de Genre. Fort malheureusement en RD Congo, l'équité et l'égalité de Genre sont des nouvelles notions réfutées non seulement par les dirigeants politiques, mais aussi par les diverses couches sociales qui trouvent dans ces notions une nouvelle forme de la remise en cause des moeurs et traditions congolaises. Les femmes ne sont pas visibles au sein des diverses institutions publiques. Bien qu'il existe tout un arsenal des textes juridiques en faveur de la promotion des femmes, mais dans la pratique ces textes ne sont pas pris en considération.

La question de corrélation Genre et développement politique est une problématique qui s'impose ce dernier temps en RDC, comme thématique importante tant au niveau de tout le pays en général que dans toutes les provinces de la République Démocratique du Congo en particulier. Si la question des inégalités de Genre dans le processus de développement intégral a été abordée avant cette décennie, il s'avère qu'elle se pose de façon accrue en cette période de la reconstruction nationale et de la démocratisation de la République Démocratique du Congo qui nécessite l'implication non seulement des hommes, mais aussi de toutes les forces vives de la nation où l'on retrouve les hommes et les femmes.

Le programme d'action adopté à la quatrième conférence mondiale des Nations Unies sur les femmes, tenue à BEIJING en 1995, a fait de l'intégration de la problématique hommes-femmes dans la société, une stratégie mondiale en vue de la promotion de l'égalité des sexes. Cette conférence a souligné la nécessité de faire en sorte d'assurer un rang de priorité élevé à l'égalité des sexes dans tous les domaines du développement sociétal.

La situation d'inégalité des sexes en République Démocratique du Congo pourrait tirer son fondement de l'environnement socio culturel et de son histoire fluctuante qui est producteur de contextes diversifiés, de l'exclusion naturelle et réfléchie de la femme dans l'exercice du pouvoir politique et dans l'acquisition des dividendes de l' environnement économique, géographique, socioculturel, etc.

Il est à noter cependant que ces inégalités ne se vivent pas de la même façon par l'ensemble de la population féminine congolaise. Dans un contexte multiculturel et à réalités locales diverses, on note une superposition de facteurs qui militent pour des statuts différenciés des femmes.

Scruter le fonctionnement de Genre dans différents contextes s'affiche comme une nécessité pour les acteurs de développement afin que soient pris en compte de manière intégrale, les faits générateurs du positionnement défavorable des femmes dans leurs espaces de vie en République Démocratique du Congo. La non prise en compte de réalités auxquelles font face les femmes, de leurs besoins spécifiques et stratégiques semble induire le renforcement de leur situation défavorable, et cela par les politiques et stratégies de développement non sexuées.

D'où, la visée de cette analyse qui, au-delà des inégalités sexuelles constatées dans la communauté politique congolaise, met en corrélation explicative les variables Genre et la participation politique afin d'atteindre une explication objective sur les spécificités féminines qui influent sur la vie politique et vice versa. Au-delà de cette conception, s'accole également l'étude systématique de causes et effets de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques congolaises, ainsi que l'analyse des préalables relatifs à l'intégration des femmes au processus de la participation politique, l'appartenance sociale, le milieu de résidence, l'âge et la trajectoire historique des femmes congolaises.

Sans toutefois se plonger dans les conceptions idéalistes ou Platoniciennes relatives aux explications de notre objet d'étude, ce travail part de l'analyse de faits existants dans la société congolaise, précisément dans l'ordre des problèmes sectoriels du Genre appliqué dans un cadre limité : la participation politique.

Ainsi, il est question de privilégier le courant d'idées de matérialismes dialectiques ; l'unique courant capable de produire un schéma explicatif approprié afin d'atteindre l'explication de la causalité de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques de la République Démocratique du Congo d'une part, et de produire des explications relatives à la nature de combat politique opposant les hommes et les femmes ; les armes et stratégies utilisées par chaque camp dans ce combat pour le pouvoir politique.

Les opinions sont de nos jours controversées et divisent non seulement les individus en terme des sexes, mais aussi les catégories sociales ; d'abord en ce qui concerne l'égalité Homme-femme, ensuite la nécessité de la participation politique des femmes dans l'exercice du pouvoir politique et enfin, le rôle et l'influence des actions des femmes dans le processus de la participation politique. Les groupes féminins orientés vers la promotion de la femme devraient être visibles dans l'univers politique congolais.

En outre, ils devraient jouer le rôle des « fonctions tribunitiennes », c'est-à-dire, ces groupes devraient lutter à travers le schéma qui va de la récupération des revendications des femmes congolaises au niveau de la base, les catégorisent en fonction des réclamations prioritaires et les canalisent enfin, vers les instances du pouvoir pour que ces dernières prennent des décisions en faveur des femmes.

Le combat politique est inévitable et manifeste en RDC. Ce combat oppose les hommes contre les femmes, il peut être aussi conçu comme celui explicité dans les littératures marxistes. Car, il se manifeste sous la forme des rapports de domiciliations et d'exploitations qui, traditionnellement présentent les Hommes comme une classe d'Aristocratie dominante et les Femmes comme celle des serfs dominés. D'où, l'usage du raisonnement dialectique matérialiste dans l'explication scientifique de notre objet d'étude.

Les déterminants et les manifestations du Genre face au développement politique subissent les mutations incessantes, car les textes juridiques garantissant les droits des femmes subissent aussi des mutations en fonction de l'évolution de la société elle-même. Ce type de changement incessant veut qu'on s'attache au courant matérialiste dialectique dans l'explication du phénomène « Genre et politique ».

La République Démocratique du Congo, en tant qu'un univers politique, ne devrait pas continuer à fonctionner au masculin. Il fallait, à l'heure actuelle procéder à la valorisation, à la capitalisation et à la maximisation des ressources ; prendre en compte les femmes comme ressources humaines potentielles et importantes dans une logique de mixité sociale, socle de tout développement durable.

Paradoxalement, au-delà de la volonté affichée par les Nations Unies concernant la place et le rôle d'une femme dans toute société moderne ainsi que les impulsions des Associations Féminines, l'évolution de la situation de la femme en République Démocratique du Congo reste presque statutaire et dans l'immobilisme à quelques exceptions près. Les statistiques fiables nous montrent qu'à l'échelle nationale, les indicateurs du Genre révèlent:

- Du point de vue social : 70% des personnes vulnérables et assujetties sont des femmes. Le nombre des femmes analphabètes s'élève à 60% par rapport aux femmes instruites, une femme sur 3 au moins reçoit des coups ou subit des relations sexuelles imposées. (Voir le rapport annuel de l'UNESCO(34(*))), environ 200 fillettes par an sont utilisées pour devenir esclaves de sexe ou prostituées en République Démocratique du Congo ;

- Du point de vue de la santé : En République Démocratique du Congo, 75% des jeunes infectés par le VIH sont des filles âgées de 15 à 24 ans ;

- Du point de vue de la politique : les femmes élues dans tout le pays ne représentent que moins de 15% de parlementaires ;

- Du point du vue de l'économique : les femmes ne possèdent qu'un 1% des richesses du pays.

Dans le cadre de ce mémoire, l'aspect politique nous préoccupe le plus, car c'est dans la politique que se définissent les destinées des gens et se prennent les grandes décisions orientant les activités des autres domaines de la vie, or la femme y est presque absente. Sa visibilité dans la sphère publique est très faible. En tant que chercheur en sciences politiques, précisément dans le domaine de GENRE, nous ne pouvons en aucun cas nous passer des enjeux de cette nouvelle donne afin de comprendre la nature de ce phénomène politique, l'analyser et l'expliquer de façon rationnelle et scientifique pour dégager le sens réel de la corrélation Genre et la participation politique.

Comme on peut le remarquer, l'univers d'étude étant vaste, nous avons ciblé, observé et orienté notre analyse dans la Province du Maniema. A partir de la réalité du Maniema, nous avons globalisé la situation de la femme congolaise en général grâce à l'usage de raisonnement inductif. Temporellement, cette étude couvre la période allant de 1960 à 2011, du fait que c'est à partir de cette période que l'élite politique congolaise exerce de façon indépendante, ses activités politiques vis-à-vis des autres pays dits « anciennes colonies ».

A cet effet, cette étude permettra, du point de vue théorique, d'ouvrir une brèche des nouvelles discussions scientifiques sur le rapport Genre-participation politique dans les pays dits du tiers monde. En outre, c'est aussi un cadre de référence pouvant aider tout opérateur politique afin qu'il saisisse l'importance de promouvoir ou de favoriser la participation des Femmes dans le processus de la démocratisation du pays. Car, les femmes constituent une force sociopolitique capable d'influer sur l'organisation et le fonctionnement harmonieux des structures politiques de chaque Etat.

De ce qui précède, il y a lieu de poser des questions ci-après afin de situer notre objet d'étude par rapport au problème explicité ci-haut : Existe-il, en RDC des facteurs explicatifs du Genre. Une fois mis en application, pourraient-ils contribuer à la participation politique inclusive ? Si non, que faire pour que la matérialisation de l'approche Genre suscite la visibilité des femmes dans l'exercice du pouvoir politique au Congo? Quels sont, enfin, les indicateurs manifestes des inégalités Hommes-Femmes prouvant que l'invisibilité des femmes au sein des institutions politiques de la RDC est une réalité?

Dans un travail scientifique, il ne peut-être question de collectionner et d'accumuler des données au hasard, sans respecter les canons de la recherche scientifique, car les phénomènes socio politiques qui font l'objet de notre analyse sont complexes et menacent constamment d'égarer le chercheur de la voie tracée par les spécialistes. Une idée anticipée doit être le point focal de tout raisonnement expérimental.

3. HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS DE TRAVAIL

Partant de nos préoccupations nous avons pu dégager trois hypothèses explicatives suivantes :

Primo, nous estimons qu'il existerait en République Démocratique du Congo des conceptions explicatives sur le Genre, issues des connaissances empiriques et réflexives qui bloqueraient le processus de la participation politique inclusive.

Secundo, ces conceptions péjoratives et subjectives de la notion de Genre, la déconsidération des potentialités féminines, la primauté des pratiques traditionnelles face aux textes juridiques modernes sur la position de la femme, l'abandon forcé de scolarité des jeunes filles en faveur des enfants du sexe masculin seraient des faits générateurs de l'invisibilité des femmes dans l'espace où les décisions politiques sont prises en RDC.

Tercio, nous estimons que le nombre des femmes parlementaires congolaises par rapport à celui des hommes parlementaires, le nombre des femmes responsables des partis politiques, le nombre des femmes ministres tant au sein de gouvernement central que dans les gouvernements provinciaux, l'inexistence de leadership politique féminin dans les diverses structures politiques et sociales, seraient des indicateurs manifestes de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques de la République Démocratique du Congo.

La présente étude poursuit quatre objectifs pratiques ci-après:

1. Répondre à la question de savoir si dans notre pays en général et dans la ville de Kindu en particulier, existe-t-il des facteurs explicatifs du Genre qui, une fois mis en application, pourront contribuer à la participation politique inclusive de la RDC;

2. Comprendre pourquoi l'exclusion et la discrimination des femmes sont des réalités sociales dans notre société ;

3.  Présenter et analyser, les indicateurs manifestes des inégalités Hommes-Femmes prouvant que l'invisibilité des femmes au sein des institutions politiques de la RDC est une réalité sociale;

4. Proposer les alternatives des solutions pouvant permettre aux responsables des divers services publics et privés, aux gouvernants, à toute la population congolaise en général et aux femmes engagées dans les formations politiques, de pouvoir intégrer dans leurs activités spécifiques, l'approche Genre afin de lutter contre toutes sortes des discriminations des femmes dans notre société.

4. MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE

4.1. LA METHODE.

Malgré la présence des textes anciens comme la Bible ou le Coran sur les considérations de Genre, les recherches féministes entant qu'ensemble d'énoncés cohérents et falsifiables sont récentes.

Des années 1970 au cours desquelles les mouvements féministes inspirés des courants marxistes connurent un essor considérable à nos jours, elles se sont imposées à d'autres champs épistémologiques sans pour autant s'imposer comme discipline autonome avec ses théories, ses paradigmes et ses méthodes.

Dans ce contexte, les démarches interdisciplinaires apportent un secours à toute personne engageant des études sur le Genre. Compte tenu de l'objectif poursuivi qui est de déterminer les défis cognitifs et méthodologiques susceptibles de conduire à une révision des « stéréotypes Genres » en relation avec la participation politique, il est apparu indispensable de rechercher les facteurs de cette corrélation dans les réflexions menées jusqu'ici sur le sujet.

La revue de littérature s'est donc imposée comme la seule démarche pouvant remplir ce rôle. En outre, le schéma Marxiste est aussi favorable dans la confrontation des opinions sur le rôle et la place de la Femme dans la communauté politique congolaise.

Si l'implication et la participation active des femmes dans l'exercice du pouvoir politique est une thèse pour certains congolais, d'autres combattent par contre cette vision et vont jusqu'à la qualifier ou à l'assimiler à la déculturation et dépravation des moeurs congolaises (c'est une antithèse). Pour nous, il est question de mettre en connexion ces variables pour tirer enfin une synthèse. Cette démarche nous plonge dans le courant marxiste classique afin d'atteindre l'explication de notre objet d'étude.

Notre choix sur la démarche (méthode) dialectique matérialiste est fondé sur l'obligation de procéder par l'analyse et l'explication de l'origine de phénomène « invisibilité des femmes au sein des institutions politiques tant au niveau national que provincial », explorer enfin la nature et le développement de cette invisibilité.

Dans ce travail, le Genre est une réalité sociale considérée dans sa totalité. Ainsi, il exige un examen ou un inventaire dans sa globalité qui n'est ni mécaniquement déterminée, ni complètement donnée au hasard. Plusieurs faits déterminent et enveloppent ce que l'on a considéré au passé et ce qu'on peut considérer actuellement comme phénomène « Genre ». Parmi ces déterminants, nous avons considéré dans cette étude : les faibles taux de la représentativité des femmes dans les institutions politiques, les préalables coutumiers et traditionnels, la culture des habitants du Maniema dictée par les influences de la civilisation des Arabes-musulmans, l'exigence de l'autorisation maritale comme préalable relatif à l'embauchage des femmes au sein des diverses institutions, les dispositions juridiques promulguées en faveur de la promotion des femmes, l'abandon de la scolarité des jeunes filles en faveur des jeunes garçons, etc.

Considérant que notre travail doit se situer par rapport au courant d'idées matérialiste historique, nous devons mettre le critère de la pratique à la base de la connaissance. A cet effet, le Genre est un phénomène issu des faits manifestes et réels qui se déroulent dans la société congolaise et partout ailleurs. C'est pourquoi l'explication rationnelle de ce phénomène nous plonge dans l'univers social où d'autres faits concrets sont tirés en vue de nous permettre de faire une corrélation explicative logique. Toutes les considérations théoriques secrétées dans le cadre du Genre sont corroborées avec les pratiques quotidiennes des congolais afin de dégager des explications objectives qui s'opposent aux explications intentionnelles des faits.

En outre, le phénomène Genre et la participation politique, thème qui nous a poussé à étudier les motivations à la base de l'invisibilité des femmes au sein des institutions politiques, est un ensemble ou un globalisme. Ce globalisme loin de subir des explications visant à lui demander comment est-ce qu'il explique la partie ou les parties, mais nous exigeons dans ce travail que ce globalisme nous explique pourquoi il existe, ou comment. D'où il est venu, qu'est-ce qui lui arrive, bien sûr avec l'évolution de la société.

Le globalisme (phénomène Genre et invisibilité des femmes dans les institutions politiques) est en mouvement, lequel prend ici, deux formes : la forme évolutive et la forme révolutionnaire. Il est évolutif ici, quand dans certaines institutions publiques, on exige que les femmes soient représentées.

A cet effet, les statistiques des femmes se trouvant dans les institutions où les grandes décisions politiques sont prises varient de manière continuelle ou progressiste et cela de façon spontanée et quotidienne, ce qui apporte dans le vieil ordre des choses de menus changements « quantitatifs ». Certains tableaux visualisés dans cette étude, montrent la manière selon laquelle les statistiques progressives des femmes parlementaires ont subi un mouvement évolutif en RDC depuis l'an 1960.

Le mouvement est aussi révolutionnaire, quand lorsque les éléments déterminants le phénomène qui fait l'objet de notre étude s'unissent, se pénètrent d'une idée commune et s'élancent contre la camp ennemi pour anéantir jusqu'à la racine le vieil ordre de choses. Ils apportent dans la vie des changements « qualitatifs », en vue d'instituer enfin un nouvel ordre de choses.

Il arrive parfois que la présence des femmes est incontournable lorsqu'on veut mettre sur pied les bureaux permanents des institutions politiques et ceux des institutions d'appui à la démocratie. De même, au moment de la formation de tout gouvernement, le Chef du gouvernement (Premier Ministre dans le régime parlementaire classique ou Chef de l'Etat dans le régime présidentiel) a de nos jours l'obligation de mettre un nombre de femmes afin de prouver que ces dernières ne sont pas discriminées. Ces récentes pratiques prouvent que le mouvement révolutionnaire que subi le phénomène qui fait l'objet de notre étude, est une réalité.

Le schéma POLITZERIEN et VERHAEGENIEN de la dialectique matérialiste demeure au centre de l'explication causale de notre objet d'étude. C'est pourquoi certains principes sont, ici, considérés comme des lois que nous avions manipulées pour rendre opérationnelle notre méthode. Il s'agit des lois ci-après :

- La loi de la connexion universelle ;

Dans l'explication de la considération de l'approche Genre face aux enjeux du développement intégral ou politique dans un espace limité comme la RDC, nous l'avons considéré comme un « tout » qui se tient et qui influe sur les restes d'activités de la société, à savoir : l'économie, la politique, le social, la diplomatie, l'histoire, etc.

Prenons le cas d'histoire, la RDC a connu une histoire qui a motivé les citoyens de sexe masculin à considérer les femmes comme des êtres de seconde nature. Il s'agit plus particulièrement des citoyens vivant à l'Est du pays où les Arabes musulmans extrémistes ont imposé l'islam comme l'unique religion d'Etat.

Quant à l'économie, le système de la division naturelle de travail, précisément en fonction des sexes, a fait que dans les entités primitives congolaises, certains travaux soient exclusivement de la compétence des Hommes (la chasse, la pêche, la fabrication des outils en métal, etc....) et d'autres pour les Femmes (la cueillette, le ramassage et les travaux des ménages). Cette situation prouve une discrimination délibérée mais subjective. De nos jours, la question sur l'autorisation maritale avant d'exécuter un contrat du travail est un phénomène qui prouve que la discrimination est encore à sa phase active.

Pour ce qui est de la politique, bien que la constitution du 18 février 2006 exige que les femmes soient représentées dans toutes les institutions publiques à cinquante pour cent, mais dans la pratique les statistiques prouvent que cette représentation n'atteint même pas le 5% sur tous les domaines professionnels. Il en est de même pour les femmes diplomates par rapport aux hommes.

Le social est encore pire que les autres domaines, car les femmes subissent les violences de tout genre. A la maison, au service, à l'école, à l'église,.... Dans les ménages, les femmes exécutent les tâches plus vastes que les hommes.

Tous ces faits influent sur le Genre et vice versa. C'est pourquoi ces différentes matières interagissent entre-elles. Tout dans ce monde agit sut tout. La formation scolaire des filles agit sur la considération de Genre, le système éducatif dans les foyers agit sur la considération de Genre, la politique agit sur la considération du Genre, l'Administration publique de même, etc. ce qui justifie notre position de ne pas isoler une matière ou de la soumettre à des explications isolées.

- La loi du développement incessant ;

Toutes les matières qui s'entrechoquent ou qui sont en action réciproque sur la problématique du Genre ne restent jamais où elles sont. Elles sont dans la mobilité et elles subissent des mutations perpétuelles. C'est-ce qui nous a poussé dans ce travail de te compte des explications diachroniques, du fait que dans ce mouvement évolutif, nous avons constitué ou regroupé des informations chronologiques sur l'évolution de la considération du phénomène Genre dans le monde en général et en RDC en particulier.

- La loi de la lutte des contraires ;

Le Genre en tant qu'un objet doté de la réalité sociale n'a pas commencé exactement comme il se présente actuellement. Ainsi, il faut retenir que ce phénomène renferme toujours un élément contradictoire. Dans le cas d'espèce, il sied de l'opposer ici à la variable « Sexe ». Ces deux variables sont en contradiction permanente, mais inséparables entre elles.

Ainsi, la construction biologique du sexe est en contradiction permanente avec la construction sociale du sexe. L'unité de cette contradiction fait en sorte qu'il y a dans la communauté congolaise des sujets disposant des sexes biologiques féminins, mais ils agissent comme des hommes, ils parlent comme des hommes et luttent pour la conquête du pouvoir politique de la même façon que les individus disposant des sexes biologiques masculins. A ce niveau, nous confirmons à la lumière de notre travail qu'ils sont des « Hommes », une construction sociale du sexe.

Le Genre est perçu donc comme l'unité des contraires entre la construction sociale du sexe et la construction biologique du sexe, dans le sens où les deux variables ont inséparables, bien qu'elles soient en contradiction permanente. Nous ne pouvons en aucun cas parlé du Genre sans parler effectivement des personnes de sexe féminin ou de sexe masculin.

- La loi du changement qualitatif.

L'éradication des usages coutumiers qui, au paravent obligeaient, en RDC, les femmes de s'occuper exclusivement des travaux des ménages et l'adoption des instruments juridiques portant sur la promotion et la considération de Genre dans toutes ses dimensions, constituent un avènement d'une révolution mentale sur la question de Genre. A cet effet, l'ordre social établi est remplacé par un nouvel ordre social, que tout congolais en général ou tout habitant de la ville de Kindu en particulier a l'obligation d'intérioriser et d'appliquer. C'est un changement qualitatif qui apparait dans notre univers social et qui s'impose à tous.

Cette voie méthodologique à la fois simple et complexe a été utilisée ensemble avec quelques instruments techniques d'approche pour la collecte et l'analyse des données. Il s'agit de la recherche documentaire, de l'observation directe désengagée et de l'enquête par des interviews.

4.2. LES TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNEES.

Pour collecter les données, les traiter et/ou les analyser, nous nous sommes servis des techniques suivantes : la recherche documentaire, l'observation directe et l'enquête par des interviews.

a) La recherche documentaire.

La recherche documentaire a été privilégiée pour faire un état des lieux de la situation des femmes, et mettre en lumière les disparités de Genre qui existent en RDC.

Elle nous a permis ensuite de présenter les concepts théoriques sur la question et de passer en revue une étude approfondie de la littérature existante : les ouvrages, les périodiques, les archives, les rapports, les articles des revues, les publications à l'internet, les diverses communications sur le Genre et tant d'autres documents qui ont contribué à la compréhension du sujet.

L'abondance de la moisson issue de ce vas et viens documentaire est certes perceptible à travers d'innombrables recours aux citations et références aux écrits d'autres chercheurs.

Ainsi, nous avons fait aussi recours à notre expérience personnelle sur la notion de Genre, car nous avons eu l'occasion de participer à des nombreux colloques scientifiques sur le Genre et autres notions similaires tant au niveau local, national qu'international en synergie avec les autres chercheurs sur le Genre. Les données ventilées par sexes des provinces ont alimenté cette étude pour l'analyse de la situation des femmes en RDC.

b) L'observation directe désengagée.

La technique documentaire est soutenue par une observation systématique, mais désengagée. Cette dernière nous permet de voir et de décrire sans tenir compte des considérations subjectives de la situation de la femme congolaise dans la vie politique. Notre curiosité était aussi portée sur les diverses activités réalisées par les femmes, la manière dont celles-ci s'engagent à lutter pour la promotion de Genre.

A Kindu par exemple, nous avons été curieux d'observer l'engouement des femmes dans les diverses activités telles que : les défilés organisés le 18 mars de chaque année (journée internationale des femmes), la tenue des ateliers et séminaires sur la question de la femme, etc.

Nous avons été émerveillés par la particularité de Kindu où juste pour la période allant de janvier à septembre 2010, les femmes réunies au sein de l'ONG MWANGA ont organisé 24 ateliers de formation afin que lors des échéances électorales de 2011 les femmes candidates soient représentées.

L'émergence de ces Associations féminines à Kindu est une occasion de confirmer la volonté manifeste des femmes congolaises dans le combat de leur considération. Ce regard intéressé et curieux nous a servi de première moisson d'informations brutes mais incomplètes qu'il s'avérait nécessaire de compléter par d'autres sources articulées, structurées dont l'interview.

c) L'enquête par des interviews.

Ainsi, à l'occasion de pré enquête et l'enquête sur le terrain à Kindu chef-lieu de la province du Maniema, plusieurs entretiens ont été réalisés à l'aide de l'interview structurée et directive sur les femmes rencontrées dans les différents colloques, ateliers, séminaires et meetings à l'intention des femmes. Le choix de la ville de Kindu se justifie par le fait que Kindu est le chef-lieu de la Province du Maniema. Cette dernière est l'une des entités de la RDC qui ont connu la pénétration des Arabo-musulmans avant l'arrivée des colonisateurs Belges. Ces Arabes ont laissé une civilisation qui fait de la femme un être de seconde nature.

Ces entretiens visaient plus d'accéder au vécu quotidien des femmes, leur situation au sein des ménages et dans les espaces où les décisions politiques sont prises, les contraintes sous-jacentes et la marge des libertés que leur offrent les textes juridiques de la RDC.

Les entretiens ont été également réalisés auprès des responsables des Associations Féminines de la ville de Kindu, les Organisations Non-gouvernementales et autres qui s'intéressent à la promotion et à l'encadrement des femmes.

Au total 12 Associations Féminines, 4 confessions religieuses disposant des structures d'encadrement des femmes, 5 partis politiques et 12 ONG ont été sélectionnées à partir de la méthode de sondage par choix raisonné ou la méthode non probabiliste. Retenons que nous nous sommes intéressés plus à la pré enquête qu'à l'enquête proprement dite, car c'est la technique documentaire qui nous a servi davantage et qui nous a permis de procéder par l'analyse documentaire.

Les entretiens ont porté sur 50 femmes considérées comme leaders féminins dans la ville de Kindu. A cet effet, la technique d'échantillonnage non probabiliste en boule de neige a été utilisée pour constituer l'échantillon. Le choix de cette technique se justifie par l'absence d'une liste exhaustive des femmes engagées dans les Associations Féminines et les ONG.

Ainsi, pour constituer notre échantillon, nous sommes partis d'un petit groupe de femmes engagées dans les partis politiques. Précisément celles du PPRD et MSR. C'est à partir de ces deux groupes que nous avons pu atteindre les autres femmes qui évoluent dans les structures féminines des confessions religieuses et celles qui sont actives dans les ONG et ASBL.

Certes, cette technique nous a permis d'atteindre d'autres femmes à interroger, grâce aux renseignements fournis par les premières. C'est pour dire que les unités enquêtées nous ont servi comme sources d'identification d'unités d'échantillonnage additionnelles pour constituer notre échantillon définitif.

La répartition par activité des femmes de Kindu sélectionnées pour la constitution de notre échantillon se présente comme suit :

Tableau N°1 répartition des femmes enquêtées par structures

Structures

Score

%

01

PARTIS POLITIQUES

20

40

02

CONFESSIONS RELIGIEUSES

15

30

02

ONG ET Asbl

15

30

 

TOTAL

50

100

Il ressort de cette représentation que 30 % ayant fait partie de notre échantillon proviennent et évoluent dans les partis politiques ; contre 15% des femmes qui sont très engagées dans les structures des confessions religieuses et 15% enfin, ce sont des femmes activistes des ONG et des Asbl féminines. Cette situation peut s'expliquer non seulement par le sondage à choix raisonné pour lequel nous avions opté, mais aussi par le fait que la majorité des femmes ce dernier temps évoluent plus dans les formations politiques.

La détermination de notre échantillon s'est faite en respectant le « principe de zonage » en deux temps. Au premier temps, il était question de choisir les sites où les femmes se rencontrent pour débattre les problèmes pouvant leur permettre d'exercer le pouvoir politique. Il s'agit des secteurs ou unités d'analyses sur lesquelles porteraient l'étude au moyen de l'enquête. C'est-à-dire le Zonage. Au second temps, il était question de choisir les femmes à interroger. Pour avoir ces femmes-enquêtées, nous avons fait deux tâches successives : premièrement, il fallait faire une pré-enquête sur la conception de phénomène Genre par les femmes du Maniema dans les sites ciblés, se rendre aussi compte du niveau d'organisation des femmes au sein de chaque site ainsi que le choix des effectifs à interroger. Ici, nous avons interrogé un nombre réduit de femmes, soit 5 pour les partis politiques et 2 pour les structures des confessions religieuses et 3 pour les ONG et Asbl. C'est à partir de 10 femmes que nous avons pu atteindre les autres qui ont constituées un échantillon de 50 personnes enquêtées oralement.

Les sujets enquêtés nous ont permis d'avoir non seulement les informations sur le vécu et les causes de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques, mais également d'entrer en possession des données statistiques et administratives sur la question et d'explorer le champ conceptuel de cette étude.

5. SUBDIVISION DU TRAVAIL

Hormis cette introduction qui, présente l'état de la question, pose la problématique, définit les hypothèses, les objectifs du travail et présente brièvement les procédés méthodologiques de la recherche et d'explication, toile de fond ayant servi à la collecte, au traitement et à l'analyse des données et à l'explication, ce travail comprend quatre chapitres.

Le chapitre premier définit et présente le cadrage théorique. Concrètement, il définit la notion du problème « Genre » et va jusqu'à toucher la question du développement politique. Ce chapitre présente également les diverses théories développées sur la problématiques du Genre;

Le deuxième chapitre présente les mécanismes de la promotion de Genre en République Démocratique du Congo ;

Le troisième chapitre porte sur l'instauration d'un nouvel ordre en RDC : femmes et processus électoral de l'an 2006 ;

Le quatrième chapitre enfin, aborde les différents mécanismes de la pérennisation de la participation politique des femmes congolaises.

Une conclusion coiffe l'ensemble de la dissertation, l'embellit et jette un pont pour des nouvelles perspectives, avant que la bibliographie et la table des matières ne bouclent définitivement la rédaction de l'ensemble du présent mémoire.

CHAPITRE I. CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL

Le premier chapitre de ce travail se propose de décrire à la première section : les généralités sur la notion du Genre. La deuxième section porte sur le fondement des disparités de Genre en RDC et la question de l'hétérogénéité des femmes congolaises. La troisième enfin, présente l'évolution des approches du développement et du Genre.

I.1. LA DESCRIPTION DE LA NOTION DU GENRE

I.1.1. Théorie Genre et Sexe.

Indissociables des mouvements de libération des femmes des années 1960-1970, les études consacrées aux femmes, « études féministes » ou encore women studies, sortes d'« effets théoriques de la colère des opprimées », selon la formule de Colette Guillaumin, se sont développées dans les pays anglo-saxons et en Europe occidentale afin de dénoncer les inégalités de traitement dont celles-ci étaient victimes dans la plupart des domaines de la vie sociale (accès aux études et au travail, maîtrise de son corps, charges parentales et domestiques, etc.). 35(*)

Il s'agissait avant tout de compenser une vision scientifique jusqu'alors « androcentrée », c'est-à-dire essentiellement fondée sur le rôle des hommes dans l'histoire et l'organisation des sociétés, de remédier aux Silences de l'histoire soulignés par l'historienne Michelle PERROT.36(*)

I.1.1. 1.  Le Genre comme construit social

Réaliser des études sur les femmes s'avère rapidement insuffisant. Cela permet tout au plus de lutter pour une amélioration de leurs conditions de vie, sans pour autant souligner le caractère contingent, historiquement construit - et donc relatif - de la répartition des tâches entre sexes dans les différentes sociétés.

Pour souligner combien les « rôles sexuels » analysés par l'anthropologue Margaret MEAD37(*) dès 1928 n'ont rien de naturel ni d'immuable mais constituent dans chaque société l'aboutissement d'une construction historique et culturelle, et pour prolonger la distinction établie en 1949 par Simone de BEAUVOIR entre sexe biologique inné et sexe social acquis, une nouvelle notion devait être utilisée. 38(*)

Dès 1972, dans son essai Sex, Gender and Society, la sociologue féministe britannique Ann OAKLEY, s'inspirant notamment du psychanalyste Robert STOLLER, proposa le terme Gender afin de distinguer le sexe, donné biologique, et le Genre, construit social variable et évolutif. Là où les différences biologiques seraient données et naturelles, les identités de genre seraient liées à la transmission, à travers divers dispositifs de socialisation (famille, école, médias, culture, amitiés, etc.), de manières d'être, de penser et d'agir orientant chaque individu vers des modèles de la masculinité et de la féminité, vers des identités et des rôles sociaux historiquement attribués à chaque sexe à partir d'une naturalisation des différences sexuelles et de l'idée d'un profond déterminisme biologique.39(*)

Quelques années plus tard, en 1988, l'historienne américaine Joan SCOTT contribua à ajouter à la dimension constructiviste l'idée de relations de pouvoir entre sexes aboutissant en général à une domination masculine dans les sphères privées et publiques. Elle soulignait ainsi que « le Genre est un élément constitutif de rapports sociaux fondés sur des différences perçues entre les sexes, et le Genre est une façon première de signifier des rapports de pouvoir », c'est-à-dire « un champ premier au sein duquel ou par le moyen duquel le pouvoir est articulé ».40(*)Les hommes se seraient appuyés sur les différences biologiques, sexuelles, présentées comme naturelles pour justifier une répartition des tâches à leur avantage.

Les anthropologues Françoise Héritier et Paola TABET41(*) ont ainsi montré comment ceux-ci ont, dès la protohistoire, monopolisé la fabrication et l'utilisation des outils en se réservant des domaines de compétence privilégiés (chasse, guerre, etc.). Cette ségrégation des domaines d'activité imposée par les hommes au nom d'une force masculine supérieure, destinée en réalité à compenser leur incapacité à enfanter, eut pour conséquence de renvoyer les femmes à des tâches présentées comme mieux adaptées à leur nature spécifique (constitution physique plus faible et maternité censées justifier leur maintien dans des activités de maternage et de petite récolte, par exemple).

Indissociable d'une hiérarchisation entre tâches nobles et communes, la division des rôles sociaux masculins et féminins, fidèle au mythe grec d'Hestia et Hermès (la femme à l'intérieur/l'homme à l'extérieur du foyer), conduisit à une « valence différentielle » des sexes universellement établie.

I.1.1.2. Déconstruire les stéréotypes quotidiens

Les utilisations des notions de Gender ou de Genre furent variables et donnèrent lieu à de nombreux débats. Certaines féministes sont allées jusqu'à estimer que le terme était trop usité pour conserver sa capacité critique, et lui ont préféré les notions de « rapports sociaux de sexe », ou encore de « sexe social ».

Traduire le concept anglais n'était guère évident, notamment en français, le terme « Genre » étant polysémique. En outre, comme l'a rappelé Éric FASSIN, la traduction tendait à gommer l'histoire spécifique du féminisme anglo-saxon, associé au puritanisme et à la guerre des sexes, là où le féminisme français semblait plus pacifique.42(*)

Mais au-delà de la diversité de ses usages, d'après nous, le concept de « Genre » comporte un intérêt remarquable, en ce qu'il permet de déconstruire et de questionner des réalités sociales souvent hâtivement décrites comme naturellement imposées et irrémédiables, dans de très nombreux domaines sociaux.

Plus personne n'oserait aujourd'hui écrire, tel Gustave LEBON à la fin du XIXe siècle, que « le volume du crâne de l'homme et de la femme, même quand on compare des sujets d'âge égal, de taille égale, et de poids égal, présente des différences considérables en faveur de l'homme, et cette inégalité va également en s'accroissant avec la civilisation, en sorte qu'au point de vue de la masse du cerveau et, par suite, de l'intelligence, la femme tend à se différencier de plus en plus de l'homme ». 43(*)

Mais les stéréotypes demeurent nombreux, quant à des prédispositions féminines ou masculines supposées naturelles : ainsi des talents innés de la femme pour le maternage et le soin à autrui, des compétences plutôt masculines pour les domaines scientifiques et techniques et de l'appétence féminine corollaire pour les matières littéraires et les métiers relationnels, ou encore des approches différentes de la politique qui distingueraient hommes et femmes, etc.

Raisonner en termes de Genre permet d'interroger ces types de présupposés communs, en soulignant combien la réalité est souvent plus complexe, liée à des représentations sociales parfois tellement intériorisées que les individus n'en ont plus conscience et peuvent avoir le sentiment d'agir par simple goût ou choix personnels. Il devient dès lors souvent difficile de déterminer si un comportement est lié à des injonctions et des normes sociales, à un choix individuel, ou bien à un « faux » choix consistant en réalité à « faire de nécessité vertu », comme le note Pierre BOURDIEU dans La Condition masculine (ainsi les filles choisissant les sections littéraires en étant persuadées qu'elles sont plus douées pour les lettres).44(*)

Travailler sur les identités hommes/femmes et leurs relations impose de renoncer à des schémas simplistes et catégoriques, pour souligner au contraire la complexité de la « fabrique » du Genre. Il est tout d'abord nécessaire de ne pas présupposer l'existence de deux groupes homogènes, « les hommes » et « les femmes ». Il faut ensuite tenir compte de la multiplicité et de l'ambivalence des processus de socialisation, par exemple les modèles différents et les injonctions contradictoires présents dans la publicité, qui contribuent à fixer ou à faire évoluer - souvent très lentement -, certains stéréotypes, certaines identités et relations sociales.

Il faut aussi être attentif à la coexistence d'identités de Genre historiquement construites et fortement contraignantes avec la participation de chaque individu, au quotidien, à la construction des représentations du masculin et du féminin : le Genre est une donnée objectivable, mais également un rapport interindividuel en construction permanente.

Il est d'ailleurs impossible d'isoler le Genre d'autres données telles que le milieu socioprofessionnel, l'origine nationale ou religieuse, la génération, etc., qui peuvent venir modifier ou amplifier les effets imputables aux identités ou rapports de Genre (cumul des handicaps dans le domaine professionnel pour les jeunes femmes peu diplômées et d'origine étrangère, par exemple).

Il est enfin indispensable de dissocier ce qui relève de données objectivables (comparaison statistique de la situation des hommes et des femmes sur le marché du travail, en politique, etc.) et les discours ou présentations de soi - identités dites stratégiques -, d'acteurs mobilisant parfois la rhétorique du Genre soit comme ressource soit comme variable stigmatisante. Il en va ainsi par exemple de l'utilisation par certaines élues de l'idée d'un « art féminin de la politique », destinée à légitimer leur présence lors des discussions sur la parité en politique.

I.1.1.3. « Trouble dans le Genre »

Le sexe précède-t-il le genre, ou est-ce l'inverse ? Certains auteurs, dits « essentialistes », estiment qu'existent en premier lieu des natures féminine et masculine irréductibles, biologiquement données, à partir desquelles se sont édifiées les relations de Genre. À l'inverse, les « anti-essentialistes », s'inspirant notamment des travaux de Michel FOUCAULT sur la sexualité, proposent de renverser le lien entre Sexe et Genre, et considèrent que ce sont avant tout les rapports de forces inégaux entre hommes et femmes, les relations de Genre, qui ont conduit à mettre en avant une bipolarisation sexuelle susceptible de naturaliser et de justifier la répartition des rôles sociaux selon les sexes. 45(*)

Ainsi, pour Christine DELPHY, « si le Genre n'existait pas, ce qu'on appelle le Sexe serait dénué de signification, et ne serait pas perçu comme important : ce ne serait qu'une différence physique parmi d'autres ». Les différences de sexe, supposées naturelles, sont donc elles aussi culturellement construites. Avec la multiplication de mouvements et théories Queer (mot anglais signifiant littéralement « bizarre », « étrange », voire « déviant », et de plus en plus associé aux homosexuels), le débat s'oriente, au tournant du XXe siècle, sur l'articulation entre Genre et sexualité.46(*)

Certains auteurs, telle que Judith BUTLER, invitent à poursuivre l'effort intellectuel de dénaturalisation ayant permis de conceptualiser la notion de Gender. Il s'agit, selon eux, de renoncer à raisonner à travers l'association des binômes sexe/genre et nature/culture, et de dissocier l'idée de Genre de l'opposition nécessairement binaire entre féminin et masculin. 47(*)

De notre part, nous disons que l'injonction à se conformer nécessairement à la norme du féminin ou à celle du masculin révèle une erreur essentielle, consistant à oublier que les identités sexuelles sont elles-mêmes des construits culturels et que le binôme féminin/masculin ne vient pas « épuiser le champ sémantique du Genre ».

Le classement hétérosexuel/homosexuel s'avère tout aussi normatif et lié au désir de classifier et de masquer des orientations sexuelles initialement multiples, des identités personnelles bi- ou trans-genre, marquées par des traits et des désirs à la fois féminins et masculins, et non réductibles à l'un ou l'autre.

Judith BUTLER Invite à reconnaître le « trouble » qui existe dans le genre et les identités sexuelles et à subvertir les injonctions normatives en matière de sexualité. Il faut cesser de naturaliser et classifier sexes, corps et désirs sexuels, et laisser s'épanouir la multitude de configurations identitaires possibles en matière de sexualité et de genre.

I.1.2. La Théorie du Féminisme.

Ce qu'on désigne sous le terme « féminisme » est un mouvement complexe à la fois politique, social, culturel et intellectuel, qui s'est affirmé dans le dernier tiers du XXe siècle au sein de la culture occidentale (États-Unis et Europe) pour s'étendre ensuite, sous des formes diverses, à toutes les régions du monde. Il met théoriquement et politiquement en question la relation entre les sexes qui a assuré séculairement « la domination masculine ».

En effet si, à travers toute l'histoire humaine, la différence des sexes s'est traduite dans des formes sociales et culturelles multiples et a fait l'objet de conceptions religieuses et philosophiques diverses, c'est cependant toujours sur la base d'une structure duelle, hiérarchique et inégalitaire, diversement modulée, constituant un « invariant » dont Françoise Héritier48(*)a relayé par la démocratie elle-même : celle-ci dans sa version grecque, comme dans sa version moderne, se contente de substituer au patriarcat un fratriarcat selon C. Pateman.49(*)

C'est par son caractère global que le féminisme contemporain se distingue des manifestations sporadiques qu'il avait connues au cours des siècles antérieurs, manifestations qui étaient généralement liées à un objectif sectoriel et/ou concernaient un groupe déterminé. Ce mouvement conteste désormais structurellement les formes tant économiques que sociales, politiques, culturelles, privées ou sexuelles, du rapport entre les sexes.

Il faut porter au crédit de Simone de BEAUVOIR 50(*) d'avoir, en 1946, su repérer et articuler pour la première fois dans une réflexion générale les manifestations les plus diverses de la dualisation hiérarchique des sexes, et les formes variées sous lesquelles celle-ci se décline à travers les périodes de l'histoire et les cultures : formes sexuelles, reproductives, intellectuelles, culturelles, politiques, économiques, etc., qui font qu'« on ne naît pas femme, on le devient ».

Même si les analyses sont d'inégales valeurs, et si le modèle humain proposé semble celui qu'incarne la masculinité, des phénomènes abordés jusque-là en ordre dispersé sont désormais structurellement problématisés. Une problématique qui ne cessera de se développer, suivant des chemins divers dans la pensée et la pratique.

Trente ans plus tard, le livre de Simone de BEAUVOIR fit scandale lors de sa parution, il aura sa traduction dans le réel à travers le surgissement du « mouvement de libération des femmes », sans qu'il faille y voir un lien de cause à effet : les premières théoriciennes et activistes du féminisme des années 1970, tant américaines que françaises, ont pour la plupart lu l'ouvrage de Simone de BEAUVOIR (Le Deuxième Sexe) et s'y réfèrent, mais sans adopter nécessairement sa perspective théorique ou partager ses analyses.

I.1.2.1. La Spécificité du féminisme

Phénomène complexe, irréductible aux autres phénomènes socio -politiques connus, tout comme à ses manifestations sporadiques antérieures, le mouvement féministe de la fin du XXe siècle manifeste son originalité tant dans son organisation et ses modes de développement, que dans son rapport à la théorie.

En effet ce mouvement ne comporte pas de doctrine référentielle, pas plus qu'il ne s'organise en parti politique - et les rares tentatives faites en ce sens échouent. Il ne comporte pas de leader authentifié, même si des personnalités s'y manifestent, inaugurant divers courants de pensée et d'action. Et il n'a pas la représentation, fût-elle utopique, de sa fin : il ne définit pas les formes de la société idéale à atteindre. Il s'agit donc, dans la pensée comme dans la pratique, d'un mouvement acentrique dont les modes opératoires sont originaux : ce qui le rend inidentifiable sur la scène des objets politico-sociaux répertoriés jusque-là.

Le motif de la critique et de la contestation féministe, à savoir la structure duelle et inégalitaire qui régit le rapport entre les sexes, est en revanche clairement identifié comme un « invariant » de Françoise HERITIER qui a traversé sous des formes différentes tous les groupes sociaux, toutes les cultures et toutes les périodes de l'histoire. Il s'agit donc de contester l'invariant.51(*)

Si ce mouvement s'affirme sous le terme « féminisme » alors qu'il met en question non pas un des sexes mais bien le rapport entre les sexes et leurs définitions respectives, c'est que, d'une part, il est mis en oeuvre par les femmes et les concerne au premier chef, et que, d'autre part, à la différence d'autres courants philosophiques ou politiques, il n'est pas identifiable à une doctrine fondatrice déterminée : il possède des acteur(e)s mais pas d'auteur(e)s.

D'après nous, le Deuxième Sexe de Simone de BEAUVOIR n'y occupe pas la place dogmatique référentielle qu'occupe par exemple Le Capital dans le marxisme et cette différence entre la nomination de la « paternité » et l'anonymat de la « maternité » d'un courant est sans doute significative. Mais l'originalité déterminante de cet ouvrage, au-delà de ses analyses sectorielles inégales, est de faire apercevoir le caractère structurel des différents aspects qui régissent les rapports entre les sexes, que ce soit sur le plan politique, économique, social, culturel, générationnel ou désirant.

Si l'identification et la contestation de la structure ayant conditionné les rapports de sexes au cours de l'histoire sont propres à l'ensemble du mouvement féministe, la lecture interprétative de ces rapports et l'énoncé des modalités de leur dépassement prennent des formes théoriques et politiques, différentes et parfois antagonistes.

I.1.2.2. Le devenir homme des femmes ou l'« universalisme »

Pour le courant dit « universaliste », qui se revendique de Simone de BEAUVOIR, il s'agit pour les femmes d'accéder à la position de sujet ou d'individu neutre, position que les seuls hommes s'étaient séculairement appropriée. En effet, la célèbre formule beauvoirienne : « On ne naît pas femme, on le devient », souligne le caractère socialement construit et contraint de la position féminine. Mais, dès lors qu'elle n'est pas accompagnée de la formule parallèle : « On ne naît pas homme, on le devient », elle laisse supposer que la masculinité incarnerait l'humanité dans son essence.

La thèse qui sous-tend Le Deuxième Sexe va rallier et inspirer un courant important du féminisme français, qui rejette l'argument de la nature duelle des sexes (« nature-elle-ment ») au nom d'une unicité de la raison. La définition des sexes et la forme hiérarchique de leur rapport sont arrachées à leur fausse évidence naturelle pour apparaître comme une construction, un « être-devenu » historico-social. C'est ainsi qu'à la formule « différence des sexes » est peu à peu substituée celle de « construction sociale de sexes », celle de « rapports sociaux de sexes », ou plus tard celle de « genre », traduction approximative du Gender anglais.

Ce paradigme inspire non seulement les pratiques revendicatrices d'ordre politique et économique, mais contraint également à revisiter les différents savoirs et les systèmes de représentation.

I.1.2.3. Le différencialisme

Un autre courant, issu de sa confrontation avec la psychanalyse, adopte quant à lui une position différente et affirme - non sans référence à Mélanie KLEIN - qu'il existe deux sexes, deux modalités différentes d'incarnation de l'humanité, générant deux manières d'être au monde dont l'une a été bridée et asservie à l'autre. Si le rapport au monde masculin de type phallique a dominé l'histoire - parce qu'il inclut la modalité relationnelle de la domination - le rapport au monde féminin, jusqu'ici occulté - et lié à la modalité maternelle de l'accueil - offre une alternative bénéfique.52(*)

Soutenu initialement par l'oeuvre de Luce IRIGARAY, ce courant conteste l'affirmation lacanienne d'un signifiant commun aux deux sexes, et corrélativement la référence de l'humanité aux insignes phalliques. Au trait unaire qui caractérise ce signifiant, IRIGARAY oppose le signifiant féminin de « l'incontournable volume » ou des « lèvres qui se touchent », c'est-à-dire du non-un. Ainsi est reprise et traduite positivement la formule lacanienne selon laquelle la femme est « pas toute ».53(*)

Marginalisée dans l'espace français dont la tradition politique est dominée par la conception de « l'individu » neutre, cette interprétation a parfois été qualifiée péjorativement d'« essentialiste » parce qu'elle semble figer chacun des deux sexes dans une essence immuable.

Mais elle a inspiré d'importants courants du mouvement des femmes, en particulier en Italie ou aux États-Unis où elle a même parfois été qualifiée à tort de french feminism. On peut y rattacher indirectement la pensée américaine de Carroll GILLIGAN qui affirme la nécessité d'un surplus de souci de l'autre ou de la sollicitude sur la justice. Dans cet éclairage, l'émancipation des femmes modifierait la conception même du monde commun.54(*)

I.1.2.4. Le postmodernisme ou l'indécidabilité

C'est sous l'influence du courant philosophique français dit post métaphysique que se dessine une troisième position touchant à la définition théorique et pratique des sexes. On peut y relever des références à Michel FOUCAULT ou à Gilles DELEUZE, mais c'est Jacques DERRIDA   qui, dans son enseignement régulier et très médiatisé aux États-Unis, en sera le principal porte-drapeau.

Jacques DERRIDA récuse le caractère unaire du signifiant phallique. Il associe à la critique du logocentrisme déployée par HEIDEGGER - critique du rapport au monde fondé sur la maîtrise et sur l'un - la critique du phallocentrisme, et forge ainsi le terme de « phallogocentrisme » pour caractériser et dénoncer la tradition métaphysique occidentale à la fois logocentrique et phallocentrique. 55(*)

Sous sa plume et dans sa perspective, la différence des sexes, sans être niée, ne peut être pensée sous une forme duelle : c'est une différance, c'est-à-dire un mouvement de perpétuel différer, rendant inidentifiables ses pôles. S'il qualifie de « féminine » cette position d'indécidabilité des frontières sexuées, c'est en un sens métaphorique.

Le féminin est en effet une forme d'être au monde et de penser à laquelle il s'identifie lui-même. Ainsi n'hésite-t-il pas à affirmer - reprenant une citation de Maurice BLANCHOT : « Je suis une femme », la position spéculative tenant lieu, à moindres frais, de la révolution socio - politique qui, selon lui, ne fait que conforter par le régime de l'opposition le dualisme sexué. La chance du nouveau réside non dans la lutte mais dans le jeu, ainsi que Derrida l'exprime au cours d'un dialogue avec une féministe américaine. Cette position, qui inspirera un courant important du féminisme universitaire américain, aura peu d'impact sur le féminisme français.56(*)

C'est beaucoup plus tard qu'elle atteindra indirectement celui-ci par le détour de la Queer theory, qui tente d'affirmer l'indécidabilité des sexes à travers celle des sexualités, thèse soutenue en France par certains leaders intellectuels du mouvement homosexuel qui se revendiquent de l'oeuvre de Judith BUTLER. Le « nomadisme », soutenu antérieurement comme féminin Rosi BRAIDOTTI, se traduit désormais en « transgenre ». 57(*) La réalité de celui-ci est toutefois contestée par certains penseurs de l'homosexualité comme Leo BERSANI.58(*)

I.1.2.5. Des sexes aux sexualités

À partir des années 2000, certains courants dérivés de la pensée derridienne mais davantage encore de la problématique des homosexualités greffée ainsi sur celle des sexes vont, en partant des États-Unis pour gagner la scène française, faire de l'indécidabilité non plus un différer, une différance, mais un état, une « indifférence » non seulement des sexes mais des orientations sexuelles. Pour récuser la hiérarchie des sexes - et des sexualités - contestent jusqu'à leurs différences, tenant pour négligeable la morphologie.

Certaines recherches scientifiques comme celles de H. ROUCHE tendent d'ailleurs à montrer la similitude même biologique des sexes sous leur apparente dissymétrie.59(*)

Alors que chez DERRIDA la différance est un mouvement, chez les théoriciennes ou théoriciens postérieurs du Gender trouble (Judith Butler), réinterprété par la Queer theory, l'indécidabilité devient un statut. L'affirmation de la « différance » se transforme en affirmation de l'« indifférence » des sexes.

À la limite de cette perspective, la réversibilité des sexes et des sexualités est donc potentiellement radicale. La différence morphologique devient insignifiante, ainsi que l'indiquait d'ailleurs déjà Gilles DELEUZE en revendiquant un « corps sans organes ». L'inégalité est surmontée par l'identité - une identité mouvante - au moins potentielle qu'il s'agit d'exercer.

Paradoxalement, les théories de l'indifférence des sexes et des sexualités viennent ainsi rejoindre par une voie détournée les théories classiques du sujet neutre et souverain, voire tout- puissant - l'individu -, qui serait à la fois homme et femme, homo- et hétérosexuel. Se heurtant toutefois à la dissymétrie flagrante des sexes dans le processus générationnel, dissymétrie qu'avait à sa manière déjà rencontrée et recouverte Le Deuxième Sexe, elles en minimisent la portée ou soutiennent le projet des technologies de la reproduction.

I.1.2.6. Les Enjeux politiques du féminisme

Malgré leur diversité et leurs oppositions, ces théories, qui donnent lieu à des pratiques diverses, ont en commun la mise en cause de la domination historico-sociale des hommes sur les femmes, qui se manifeste dans les différentes modalités de la vie politique, sociale, économique, érotique, générationnelle ou symbolique. Elles entraînent des stratégies diverses concernant le devenir des rapports entre hommes et femmes, enjeu central du féminisme ou des féminismes dans leur ambition émancipatrice.

Ce qui caractérise le féminisme, au-delà des positions philosophiques et politiques diverses touchant aux rapports entre les sexes et à leurs statuts respectifs, c'est qu'il en conçoit la transformation non comme un tournant spéculatif, mais comme une pratique politique aventureuse, conjoignant réflexion et action. Il constitue à ce titre une praxis au sens aristotélicien : praxis déployée dans la durée, sans représentation a priori de son modèle, mais qui vise à surmonter l'inégalité séculaire se matérialise dans la « domination masculine ».

La question des rapports de sexes, élevée au rang de paradigme politique et théorique par le féminisme, reste toujours retraversée par celle des classes, des races, des orientations sexuelles, des cultures et des conjonctures historiques, qui imposent une pluralité d'analyses sectorielles et d'actions transformatrices. Elle constitue un angle d'approche théorique et pratique universel, mais non exclusif du réel.

La domination d'un sexe sur l'autre concerne en effet toutes les périodes de l'histoire et toutes les cultures : mais, en la prenant en charge théoriquement et politiquement, le mouvement féministe ne prétend pas, comme le mouvement marxiste avec la lutte des classes, en faire la « cause » déterminante de toutes les autres formes de domination et d'exploitation. La validité du féminisme est universelle mais non exhaustive.

I.1.3. Le « néo- Beauvoirisme »

Dans la construction socio-psychologique des images de la femme et de l'homme, on peut distinguer ici le sexe biologique du genre. « On ne nait pas femme, on le devient », écrivait en 1949 Simone de BEAUVOIR. C'est cette construction socio psychologique qui est rendue par ce concept de genre.

Le terme réfère au groupe femmes et au groupe hommes dans une société donnée, à un moment donné. Il implique un savoir sur la différence sexuelle mais aussi sur le pouvoir qui organise et hiérarchise les groupes. Renvoie à l'expression anglo-saxonne Gender.

La société veille dès la naissance-voir les bracelets bleus pour les garçons et roses pour les filles dans les maternités- à une éducation différenciée selon les sexes. De nombreuses études montrent que de manière consciente et inconsciente les filles ne sont pas traitées comme les garçons et ce, même avant la naissance. L'UNICEF, dans sa publication Naitre femme, rappelle qu'en Inde 31 % des filles et 51 % des garçons sont nourris au sein. Vêtements, jouets, lectures mais aussi lois, langues et règles de comportement vont chercher à différencier les conduites selon le sexe biologique.

Pourtant, si on nait, à quelques exceptions, avec un sexe féminin ou un sexe masculin, on voit que la construction de l'identité féminine et masculine dépend de nombreux facteurs, qu'elle est variable et multiple. Dans la société inuit, chaque naissance marque la réincarnation d'un ou d'une ancêtre, c'est celle-ci ou celui-ci qui fera que l'enfant est éduqué comme une fille ou un garçon et non le sexe biologique de la nouvelle-née ou du nouveau-né, et ce jusqu'au mariage, moment où elle ou il reprendra son sexe de naissance. C'est ainsi, par exemple, que, pendant tout le XXe siècle, on a dit aux petits garçons européens que les hommes ne pleuraient pas, oubliant qu'au siècle précédent le mouvement romantique et Les Souffrances du jeune Werther (1774) avaient mis à la mode les pleurs masculins et leurs manifestations bruyantes de douleur.

Ce ne sont ni le tissage, ni le travail des champs, ni la poterie qui ont de la valeur, c'est le genre qui leur en confère. C'est ce que l'on voit systématiquement avec la division sexuelle du travail.

On parlera donc d'études selon les genres pour souligner que celles-ci prennent en compte la différence sociale des sexes. Pourtant, ce terme est parfois utilisé en lieu et place de femme ou de féministe, dans de nombreuses organisations internationales, où on parle désormais de genre et maternité, de Genre et périnatalité, de politique selon les Genres afin de ne pas évoquer la discrimination envers les femmes, les politiques d'égalité.

C'est affadir un concept fort et dynamique puisque c'est replacer dans le biologique ce qui est un processus, un système de rapports sociaux entre femmes et hommes. Quelques personnes, surtout en France, s'opposent à l'emploi du concept de Genre pour dire catégorie sociale, arguant que Genre fait référence au genre grammatical. On peut penser, au contraire, que cela enrichit les connotations verbales.

On connait les expressions : avoir mauvais Genre, être bon chic, bon Genre, de quel Genre est-il ? Le genre grammatical est lui aussi socialement construit, car les représentations associées aux genres grammaticaux sont parfois hiérarchisées selon les sexes biologiques féminins et masculins, ainsi que l'ont démontré les grammairiens

Pour D'amourette PICHON (60(*)), la prise en compte du Genre est nécessaire dans tous les domaines, y compris celui des lois. C'est ainsi qu'en Luxembourg les nouvelles lois (dont celle sur le changement du régime d'assurance pension, entrée en vigueur le 1er janvier 1999, ou celle du 8 septembre 1999 réglant les relations entre l'État et les organismes oeuvrant dans les domaines social, familial ou thérapeutique) ont pris en compte le Genre dès leur conception

I.1.3. 1. Origine et émergence du terme Genre

C'est une féministe américaine Ann OAKLEY (61(*)) qui a inventé le terme « Genre ». Elle distingue, à cet effet, trois éléments ci-dessous pour le définir :

? Le Genre est un contenu social et arbitraire. Il n'y a rien dans la nature qui justifie l'ordre social. (Mais bien sur toute la société dit le contraire).

? Le Genre est ce qui permet d'établir une division sociale entre les sexes. (Cette division est présentée dans toutes les sociétés du monde).

? Le Genre va permettre d'établir une hiérarchie entre les sexes. On a inventé des systèmes pour légitimer cette hiérarchisation : masculisme et féminisme. (Il n'y a en réalité aucune légitimité à cela).

Ainsi, en quoi un homme serait plus apte à élever et éduquer un enfant qu'une femme dont l'instinct maternel n'existe pas. Donc ; les gents ont préféré seulement créer une différence entre l'homme et la femme.

Pour maintenir cette différence, on a inventé trois choses :

? Des normes et des valeurs. (Exemple : La femme s'épanouit au foyer, l'homme s'épanouit au travail).

? Des institutions : (Exemple : la famille, l'école, les salaires, le mariage,...).

? Les processus de socialisation au sein de la famille : (Exemple : les écoles, les diplômes, accès a l'éducation,...).

I.1.3. 2. La division sociale des tâches en fonction du sexe

D'après Ann OAKLEY (62(*)), les statistiques sur six tâches ménagères (faire à manger, faire la vaisselle, laver les linges, s'occuper des enfants, torchonner la maison et s'occuper de l'époux) montrent que les hommes participent au maximum à 35% aux tâches ménagères.

Ainsi, Il y a véritablement une division sociale des tâches qui se fait par sexe. Ce qui est intéressant est la perception qu'a la femme sur l'homme qui l'aide : les femmes disent que les hommes les aident à 18% alors que les hommes soutiennent que c'est 35% !

Donc, même si on partage les tâches, il y aura encore des écarts perceptifs. Il y aura donc toujours des différences de catégories de perception. Cette question de la perception est appelée perception naturalisée. La société nous a construits à travers cette perception.

Exemple : les jouets... qu'offre-t-on aux garçons et aux filles pendant la fête de noël. On va avoir des oppositions verticales pour assurer les systèmes de domination (sec/humide, haut/bas, droite/gauche, masculin/féminin).

Les femmes sont construites sur les activités d'intérieur (s'occupe de l'habitation) alors que l'homme s'occupe de l'extérieur (politique, chasse)... La femme s'occupe des cycles de vie : mariage, gestation, naissance, éducation des enfants, deuil...

Evidemment la domination masculine va exploiter le corps de la femme, dans une référence sexuelle. On instrumentalise la femme à travers la violence symbolique. On a construit de corps de la femme à travers des stéréotypes. Les hommes veulent que les femmes soient dans un certain standard.

I.1.3.3. Les raisons de la domination des femmes.

La question qui vient à l'esprit est celle de savoir les motivations à la base de la domination des femmes par les hommes. Ce qu'avancent les sociologues est que « les schèmes de perception, d'appréciation, d'action sont incorporés. La personne les subit car elle ne fait que reproduire l'ordre social. C'est donc très difficile pour la femme de « déconstruire l'étendue sociale ».

Pour les hommes c'est pareil. Si la femme est construite dans le désir, l'homme est construit dans la virilité. BOURDIEU dit : « que la virilité est non seulement une capacité sexuelle mais c'est aussi une capacité sociale. »(63(*))

Il n'y a pas de femme hooligan car le hooliganisme est considéré comme une forme virile d'extrémisme sportif. Il n'y a aucune société où les femmes font la guerre, on a besoin de femmes pour se reproduire. On a souvent accusé certaines sociétés où les femmes seraient plus dominées que d'autres, comme par exemple l'Islam. Le voile est la différence entre l'espace public et l'espace privé.

Nous serions plus libéré car les femmes seraient soit disant l'égal des hommes. En réalité les femmes mènent une double vie (travail le jour et s'occupent de la maison quand elles rentrent). On a fini par faire croire aux femmes qu'elles seraient heureuses dans l'esclavage. La femme doit tout accepter sexuellement et corporellement de l'homme.

I.1.3. 4. Que recherchent précisément les hommes lorsqu'ils dominent les femmes ?

Selon BOURDIEU : « les hommes recherchent comment reproduire, faire reconnaitre de manière universelle leur mode de vie particulier » (64(*)). Ce sont essentiellement les hommes qui vont dominer tous les pôles d'activité et vont avoir le sentiment qu'ils vont pouvoir ordonner aux femmes toutes les positions sociales.

Les adolescents sont construits à travers cet imaginaire : pour être un homme il faut être violent... les adolescents se forment dans les modèles sociaux et donc tout ceci est un cycle qui se reproduit continuellement. On nous présente des standards que les adolescents reproduisent.

Dans une certaine mesure, il y a un échec du féminisme. Les mentalités et pratiques n'ont pas fondamentalement changé. Les structures cognitives de domination des hommes se poursuivent.

I.1.3.5. Le terme « identité sexuelle »

Le terme « identité sexuelle » est celui qui a été adopté en français pour traduire le terme anglais "gender identity". Si l'anglais fait référence aux comportements (le genre), le français fait référence au corps (le sexe).

En anglais, le terme "gender identity" a été adopté, car l'autre expression ("sexual identity") était déjà utilisée pour décrire l'orientation sexuelle.

Pour certains, cet usage peut porter à la confusion entre l'identité reliée au « sexe » dans le sens homme/femme (ce qu'on entend par le mot genre dans l'usage décrit dans cet article) et l'identité reliée à la sexualité et la vie sexuelle. On pourrait ainsi se questionner au sujet de son identité sexuelle (par exemple, « suis-je bisexuel ? » « Quelles sortes de relations sexuelles préféré-je ? ») Sans pour autant questionner son genre (« suis-je un homme ou une femme ? »).

L'expression identité sexuelle est également problématique en ce sens qu'elle renvoie implicitement à une métaphysique des sexes distinguant strictement des sexualités comme des essences différentes au sein de l' être humain.

Dans ce cas, ou bien ces identités définissent véritablement un genre, et il faut admettre que l'humanité se divise en plusieurs espèces dont les rapports sont difficiles à déterminer ; ou bien l'identité sexuelle est inessentielle, c'est-à-dire contingente, et ne regarde pas les déterminations essentielles d'un être vivant en tant que personne humaine.

Pour d'autres, elle est au contraire très judicieuse. L'expression "identité sexuelle" fait référence à la question "qui suis-je en tant qu'être corporé et sexué?". Et c'est bien à cette question que sont confrontées les personnes transsexuelles, transgenres et intersexuées.

C'est la réponse à cette question qui amène les personnes transsexuelles à modifier définitivement leur corps par voie chirurgicale. Cette question amène les personnes intersexuées qui ont été assignées arbitrairement à leur naissance à devoir faire corriger cette assignation arbitraire. Sentir qui on est constitue une autre question que de savoir comment on s'assume et on s'exprime en tant qu'homme, que femme, que homme et femme, que pas homme, que pas femme, etc.

I.1.3.6. Le Genre et le sexe dans le langage

Le Genre grammatical (masculin/féminin) ne doit pas être confondu avec le sexe (mâle/femelle). Des mots masculins peuvent désigner des femmes, de même que des mots féminins peuvent désigner des hommes (par exemple dans la phrase « Pierre est une personne sympathique »). En français, pour désigner des groupes comprenant aussi bien des hommes que des femmes, on utilise le Genre masculin, qui sert donc également de Genre neutre. Il s'agit d'une règle de grammaire appliquée (en France) dans la quasi-totalité des publications imprimées (presse, édition, etc.).

Cette règle est néanmoins contestée par de nombreuses personnes : se fondant sur la correspondance partielle qui existe entre le genre et le sexe, elles estiment que l'emploi générique du Genre masculin révèle un caractère sexiste de la grammaire française.

Il est de plus en plus fréquent d'utiliser rigoureusement des mots féminins pour désigner des femmes, surtout en milieu professionnel (un auteur, une auteure), et de construire des tournures dédoublées pour inclure explicitement les femmes (gays et lesbiennes, toutes et tous), ce qui, somme toute, est une manière de généraliser les formules de politesse en évitant les exclusions (« Françaises, Français », « Mesdames, Messieurs »).

I.2. LES FONDEMENTS DES DISPARITES DE GENRE EN RDC

I.2.1. Les faits de l'histoire

Le fonctionnement de genre en RDC est épisodique et peut être classé en rapport avec l'histoire en trois étapes : la période précoloniale, la période coloniale et post coloniale.

Avant la colonisation, période de l'inexistence de la structure étatique, les relations de genre sont à considérer comme ayant été directement liées aux différentes aires culturelles que compte la RDC. A chaque groupe social correspondait un fonctionnement de genre. Il a existé des rapports sociaux des sexes tissés sur le matriarcat ou sur le patriarcat. Au Bandundu et au Bas Congo par exemple, le système matrilinéaire a marqué les relations hommes - femmes. En outre, le type d'organisation sociale fondée sur la royauté a eu des implications dans la sphère de pouvoir et les femmes. Dans ces systèmes, les femmes n'étaient pas exclues de manière absolue de la sphère de pouvoir. Souvent elles étaient gardiennes du sacré.

Sur le plan économique, l'économie de ménage fut au centre des activités économiques et la grille d'activités de survie tournait autour de l'agriculture familiale, de l'élevage, de la pêche et de la cueillette. Les femmes y jouaient encore une fois un rôle important, mais la différenciation sexuelle mettait toutefois la femme sous la tutelle de l'homme.

Cette grille d'activité a subi des modifications substantielles avec la colonisation, qui a introduit une organisation étatique, mettant en parallèle les sphères publiques et privées modelées sur le patriarcat. Hommes et femmes n'ont pas été assujettis de la même façon. Les hommes ont été cooptés en premier dans l'administration coloniale où ils ont exercé les fonctions de greffiers, de plantons, de commis de bureau, tandis que les femmes qui étaient préparées à être de bonnes ménagères étaient orientées vers l'école de monitrice, d'infirmière et d'accoucheuse ; rôle reconnu aux femmes en tant qu'actrices principales de la reproduction sociale.

Ceci a eu des implications sérieuses sur le positionnement des femmes dans la sphère publique et dans les espaces partagés hommes-femmes. Ces espaces étant dominés par le modèle du « capital occidental ».

Après l'indépendance, la grille d'activités économiques, politiques et sociales n'est pas restée la même. Aux activités économiques de subsistance pratiquées avant la colonisation se sont ajoutées les fonctions administratives, économiques et politiques à large spectre auxquelles les femmes ont eu un accès très limité et pour lesquelles elles ont une faible expérience. Ce qui donne lieu jusqu'à ce jour à une productivité différenciée et à la domination masculine dans divers domaines de la vie sociale.

Cette différence de rentabilité se manifeste aussi entre différents groupes sociaux que compte la RDC. La culture étatique de développement ou encore celle de différents acteurs de développement affrontent les réalités locales de différents groupes sociaux, en provoquant parfois des perturbations sociales qui influent sur leur participation au développement ou encore sur la jouissance effective des bénéfices qui peuvent en découler.

Avec la modernisation, un nouveau modèle du travail productif apparaît. Dans l'entre-temps, les femmes sont dépossédées de leurs fonctions productrices originelles et de ce fait, tout le processus de développement en sera retardé. Ce retard s'observe à des degrés différents dans les groupes sociaux féminins et dépend des coutumes dont la variété est large et d'autres conditions préexistantes dans différentes communautés congolaises. A l'aube de l'indépendance, le statut de la femme est resté presque identique à celui d'avant 1960.

C'était la pérennisation d'une société patriarcale, dans laquelle la gestion de la chose publique et des structures sociales était dans la plupart des cas assurée par l'homme.

I.2.2. Les déterminants culturels

En effet, le processus de construction, de destruction et de reconstruction des rapports selon les sexes est fonction du système des valeurs culturelles de chaque société. La culture met en place un système normatif qui régit le système social en ce qui concerne le féminin et le masculin. L'espace politique, social, ou économique n'est qu'un lieu du dévoilement de genre. Selon la manière dont le genre est conçu en RDC, il apparaît un système relationnel type, entre homme et femme qui détermine la configuration sexuée de chaque espace partagé. Ce qui nécessite un travail profond par divers acteurs impliqués dans la promotion du genre : l'Etat, les acteurs sociaux nationaux et internationaux, car les pratiques sociales perpétuent jusqu'à ce jour les germes de la marginalisation et de la domination des femmes.

De manière générale, l'assignation des rôles dans la société congolaise ou encore à travers différents groupes sociaux passe par la socialisation, dont le processus commence dès la naissance. Les hommes et les femmes s'adaptent à des conduites sociales préexistantes véhiculées principalement par la famille et relayées par l'école, l'Eglise, les médias, etc.

Par certains comportements on peut noter le reflet de la différenciation sexuelle dans le chef des femmes et des hommes. Le genre conditionne dans une large mesure la participation effective des femmes au développement. Le comportement social féminin répond parfois aux exigences de genre pour lesquelles elles cherchent une harmonie avec la société, en compromettant de fois leur capacité à agir comme actrices de développement.

Les rôles à forte valeur sociale sont de manière générale reconnus comme étant l'apanage des hommes. Les femmes l'ont longtemps légitimé dans différents groupes sociaux dans lesquels elles évoluent. De ce fait, elles sont impliquées dans la construction et la sauvegarde des normes qui les renvoient au destin de la féminité, et aux rôles secondaires.

Au niveau culturel, il est à noter que l'instruction des femmes est un des facteurs qui conditionnent leur statut défavorable dans la vie sociale.

L'éducation maternelle restant plus déterminante dans la construction de l'identité féminine, on assiste aujourd'hui à la réutilisation des préjugés sociaux tirés de la culture, par les femmes elles-mêmes, et les familles congolaises. Les discours maternels maintiennent encore la femme dans un assujettissement perpétuel à la culture du couple, de la famille, et du groupe social d'origine. Pour la plupart des femmes interrogées, la femme n'est pas faite pour la politique.

Le poids de la culture freine la mise en oeuvre de nouvelles stratégies matrimoniales pour une éducation qui favoriserait la reproduction d'une main d'oeuvre et d'une force de travail répondant à un développement équilibré : hommes - femmes.

Au lieu de s'inspirer des capacités individuelles, le système éducatif traditionnel s'inspire des rôles assignés à chacun selon le sexe, par la société, pour asseoir l'éducation des enfants.

La neutralité dans l'éducation n'est pas encore acquise. Elle affecte même l'orientation scolaire, alors que la contribution au développement dans le contexte de la modernité est tributaire du niveau d'instruction et de la compétence. Les sections qui requièrent un peu plus d'effort physique et mental sont considérées comme réservées aux hommes. Or, il faut autant de femmes techniciennes, ingénieures, économistes, politologues, etc. que d'hommes pour le décollage effectif du genre comme approche de développement.

La majorité des femmes subissent de façon profonde l'influence du système éducatif basé sur la culture. Par des moyens de persuasion psychologique, la jeune génération se soumet à des valeurs établies par la société. La non conformité de la femme aux modèles établis entraîne souvent des sanctions sociales à impact psychologique.

I.2.3. Les déterminants économiques

Par les rôles de genre, les femmes sont dans le contexte congolais et de manière générale affectées aux rôles à faible valeur économique, politique et sociale. Les espaces générateurs de capitaux sont dominés par les hommes. Depuis la période coloniale, on constate que les hommes sont majoritaires à occuper les fonctions politiques ou économiques qui leur ont facilité le cumul des capitaux économiques favorable à l'acquisition des moyens.

L'entreprenariat féminin reste dominant dans le secteur informel, dans l'agriculture, dans les travaux domestiques et ne suffit pas à les libérer de manière significative de la pauvreté. Le document des stratégies d'intégration du genre dans les politiques et programmes de développement élaborés en novembre 2003 indique que 8 % seulement des femmes sont dans l'entreprenariat généralement informel (ateliers de couture, salons de coiffure, savonneries, salaisons de poisson, restauration). Actuellement, seulement 5 % d'entreprises de type formel sont gérées par les femmes, contre 95 % par les hommes.

En plus, comme faits cumulateurs des défaveurs, elles sont généralement moins instruites et moins qualifiées, accèdent moins aux stages de formation professionnelle, au crédit, à la terre voire aux postes de décision. Aussi, elles ne bénéficient pas d'une politique étatique favorable à l'émergence d'une classe de femmes réellement détentrice de capitaux. Dans la plupart des cas, leur champ social et économique est circonscrit par la cellule familiale ou le ménage. Dans la sphère publique, la tutelle des hommes reste encore très palpable.

L'enquête démographique et de santé a présenté de données sur les types de revenus des femmes. Il en existe en argent ou par nature. L'utilisation des revenus est un des indicateurs de statut de la femme. La proportion des femmes qui décident principalement de l'utilisation de leur revenu est plus élevée en milieu urbain (40%) qu'en milieu rural (15%). Le niveau d'instruction influence aussi l'autonomie des femmes dans l'utilisation des revenus. Il s'ensuit que de manière générale, les femmes en milieu urbain et instruites ont plus de chance de décider sur leur revenu et les femmes rurales et moins instruites sont par ce fait défavorisées.

On constate aussi un écart dans la décision des femmes sur le revenu selon les quintiles de bien-être économique, plus les femmes sont riches, plus elles ont la possibilité de décider sur leur revenu. La pauvreté est un des facteurs qui limitent les femmes dans la prise des décisions en ce qui concerne les revenus du ménage. Si on met en corrélation cette dimension et celle de la législation congolaise, il se dégage que la femme mariée a une marge de manoeuvre très réduite en ce qui concerne les décisions sur les revenus sans que des contraintes d'ordre patriarcal ne la poursuivent.

Il est aussi important de s'appesantir sur les enjeux et défis que pose l'adoption de projets à visée économique tel que le Document de la Stratégie de Réduction de la pauvreté. Quand bien même on y fait référence à la féminisation de la pauvreté, il sied cependant de soulever que ce document pose encore problème en ce qui concerne la résorption effective de la pauvreté et sa révision est en cours. La volonté de l'Etat bien que manifeste, n'est toutefois pas de nature à rassurer sur sa capacité à accroitre le pouvoir économique des femmes et même de l'ensemble de la population, à travers la politique adoptée dans le DSCRP.

En matière d'accès aux crédits dans les banques et autres institutions, la femme connaît des difficultés majeures pour accéder aux crédits. Les causes suivantes justifient cet état de chose: le manque de garantie matérielle : le manque d'aval d'une tierce personne ; le taux d'intérêt excessif, c'est - à dire supérieur a un taux de rendement des activités généralement exploitées par la femme (petit commerce, agriculture traditionnelle, petit élevage, etc.)

Etant donné que le crédit est un multiplicateur des richesses, celui qui ne peut y accéder est d'office condamné à la pauvreté. Dans le domaine de propriété foncière, les femmes éprouvent de nombreuses difficultés pour leur épanouissement, et ceci, à cause du manque des facteurs de production tel que l'accès à la terre.

I.2.4. Les déterminants politiques

De manière générale, les politiques de genre en République Démocratique du Congo initiées depuis 1967 sous le règne du président Mobutu, s'inscrivent dans un processus de déconstruction de l'ordre ancien des rapports sociaux des sexes tissés sur le système des valeurs traditionnelles pour un autre, plus juste et plus équitable inspiré du besoin de développement, dans le sens d'une redéfinition des rôles qui ont longtemps consacré l'invisibilité de la femme et limité son accès au contrôle de tout un éventail de ressources. Ces politiques inscrites dans la logique du rôle régulateur de l'Etat des tensions sociales restent cependant partielles dans leur effectivité.

On note que ces politiques sont elles mêmes sources des inégalités de genre car leur mise en pratique n'est pas effective. Quand bien même ces politiques sont considérées comme promouvant l'égalité des sexes, des dispositions discriminatoires y subsistent encore et rendent la question de révisitation des rôles des femmes complexe. C'est le cas avec le code de la famille, la loi électorale, la mise en oeuvre du principe de parité consacré dans la constitution, etc.

Ces textes ou mesures sont soit, non conformes à la volonté de promotion de genre affichée par les décideurs, soit non accompagnés de mesures expresses pour leur effectivité.

En outre, les politiques élaborées au niveau national ne tiennent parfois pas compte des contextes et paraissent souvent comme des modèles importés qui dans leur mise en oeuvre posent un réel problème d'appropriation. Les femmes à la base n'y comprennent presque rien et ne s'identifient pas à ces politiques.

L'approche participative dans l'élaboration des politiques en direction des femmes n'est pas privilégiée. Si quelques leaders de la société civile sont de temps en temps impliqués dans les processus d'élaboration des politiques et stratégies incitatives de la participation des femmes au développement, le reste de la population féminine n'est suffisamment pas souvent consultée à cette fin. Ce qui pose un réel problème d'appropriation des politiques de genre par l'ensemble de la population féminine.

I.2.5. L'appartenance sociale : L'hétérogénéité des femmes congolaises

La population féminine congolaise n'est pas un ensemble homogène auquel s'appliqueraient les interventions de développement de manière uniforme. Au-delà du contexte multiculturel, il s'affiche une différenciation des groupes sociaux par le fait de l'appartenance sociale, des conditions physiques, de l'âge, du milieu de résidence, de l'environnement géographique, etc.

Les femmes instruites et celles qui sont analphabètes n'ont pas les mêmes chances de s'approprier des politiques de genre, celles qui vivent en milieu urbain ont plus d'avantage que celles qui évoluent en milieu rural. L'accès à l'information, à l'éducation et aux ressources est beaucoup plus facilité pour les femmes urbaines que pour les femmes rurales.

Des nuances apparaissent dans chaque groupe de population du fait de l'histoire et des facteurs susmentionnés, créateurs de différences. Ainsi en termes de genre, plusieurs configurations de la situation des femmes apparaissent et méritent bien d'être prises en compte.

L'accommodation au changement que le contexte actuel impose aux femmes entre en contradiction avec leur enracinement à la culture d'origine. Tout leur comportement politique, économique ou social en dépend. Ainsi, le contexte congolais multiculturel mérite d'être pris en compte pour un meilleur éclairage dans la problématique de la participation politique. Une appréhension de la réalité féminine dans le genre passe par le repérage de la culture partagée, du contexte et des conditions d'accès à diverses responsabilités et ressources. Ce qui dans la plupart des cas manque dans les politiques élaborées en direction des femmes dans la sphère nationale congolaise.

Cet élément est non négligeable, dans la mesure où il apparaît des asymétries entre femmes et de façon particulière, une inadéquation des politiques de genre élaborées à l'échelon national à la réalité de certains groupes sociaux, réalité dont le fondement est à la fois historique et culturelle.

L'identification et la saisie du milieu sont indispensables, car d'elles dépend la compréhension des comportements féminins (65(*)).

Le genre public, qui reprend le langage officiel reconstructeur des rapports sociaux selon le sexe, ne semble pas être intégrateur des diversités géographiques, culturelles, économiques de différents groupes sociaux féminins.

Ainsi, en République Démocratique du Congo, la situation d'invisibilité est doublement vécue par certaines catégories féminines du fait de leur appartenance sociale et sexuelle. A une domination initiale issue des rapports sociaux des sexes, s'accolent d'autres, liées à la hiérarchisation culturelle et à des facteurs aggravants de marginalité tels : l'âge, les conditions physiques, le milieu géographique, l'histoire, l'âge, etc. Les schémas sociaux de différents groupes sociaux ne sont pas les mêmes ; c'est le cas par exemple avec les pygmées. Par ce fait, il se crée une déconnexion de certaines catégories féminines. Des facteurs endogènes et exogènes ont contribué à cette situation.

Il s'avère donc impérieux de partir de l'environnement culturel d'origine de différentes catégories sociales de femmes car celui-ci est très déterminant dans la construction identitaire de celles-ci, partout où elles se trouvent.

I.3. Évolution des approches du développement et de Genre.

La notion de développement faisant appel à la participation des femmes est relativement récente. Elle s'est construite graduellement au fil des trente dernières années. Au cours des années cinquante, suite à la Deuxième Guerre mondiale, la reconstruction représente l'une des principales préoccupations en matière de développement.

Les grandes agences de développement et la Banque mondiale adoptent la théorie de la modernisation, présentée par le professeur américain W.W. Rostow, comme stratégie d'action. À ce moment, les objectifs du développement visent la croissance économique. On priorise la construction des infrastructures (électricité, système d'irrigation, hôpitaux, écoles) qui permettront d'assurer une prospérité économique. Ce développement a été vécu différemment par les pays du Nord et du Sud.

À cette époque, les organismes non gouvernementaux (ONG) qui travaillent au développement ne sont pas encore vraiment actifs. Ceux qui le sont travaillent auprès de la population européenne afin d'alléger la pauvreté. Toutefois, ces ONG ne s'attaquent pas aux causes de la pauvreté vécue par des milliers de gens.

Au cours de cette période, les femmes du Nord ayant contribué à l'effort de guerre par l'occupation des nombreux postes délaissés par les hommes partis au front, retournent à la maison pour reprendre leur rôle traditionnel lié à la reproduction. Les femmes du Sud appuient activement les mouvements d'indépendance des hommes pour mettre fin au colonialisme. Elles s'engagent dans des activités de subsistances et cherchent à faire valoir leurs droits et libertés traditionnelles, bafouées par le système colonialiste.

Les populations du Sud croient en l'établissement d'une démocratie ainsi qu'à l'indépendance comme conditions favorables au développement. Pendant cette période, la plupart des anciennes colonies acquièrent leur indépendance. Des années cinquante jusqu'aux années soixante dix, l'approche du développement concernant les femmes est « une approche assistantielle » ou dite de « bien-être social », qui vise l'allègement de la souffrance. Cette approche met l'emphase sur le rôle de mère pour les femmes. Des programmes visant l'allègement de la famine, la nutrition, la santé, le planning familial et la Protection Maternelle et Infantile (PMI) sont mis de l'avant pour répondre aux besoins pratiques des femmes.

La décennie 1960 est consacrée au développement par les Nations Unies. Les grandes agences de développement croient toujours fermement au modèle de la modernisation comme outil de développement. Les populations du Sud demandent la restructuration du commerce international (66(*)), pour avoir accès au marché. Elles manifestent le besoin d'investissements dans les secteurs secondaires et tertiaires. Au coeur de leur programme de développement, les ONG, elles, visent à aider les collectivités à se prendre en main par l'apport d'un support technique aux communautés et par la création de coopératives.

Les hommes sont toujours la cible principale de ces programmes, puisqu'ils sont considérés comme chefs de famille et seuls responsables du travail productif. L'intervention auprès des femmes est surtout concentrée dans le secteur de la reproduction, par l'entremise de projets portant sur l'hygiène, la nutrition et l'économie familiale. On transpose par ces projets d'intervention l'image de la femme véhiculée au Nord, celle de la bonne mère et épouse, reine du foyer.

Dans les pays du Nord, la fin des années soixante voit naître le mouvement actuel des femmes. De nombreux penseurs féministes s'entendent pour dire que c'est à cette époque que naît la deuxième vague du féminisme moderne, la première étant la lutte pour le droit de vote, au début du XXe siècle. Les femmes du Nord commencent à se battre pour des droits juridiques, contre la discrimination au travail et les obstacles à l'éducation. Elles font leur entrée sur le marché du travail. Devant les rapports d'inégalités entre hommes et femmes auxquels elles sont confrontées, les femmes nord-américaines ont cherché à comprendre les raisons de leur exclusion sociale.

L'héritage laissé par le mouvement des suffragettes et l'idéologie libérale dominante a poussé les femmes à vouloir obtenir l'égalité juridique. À cette époque, les femmes travaillant dans le domaine du développement prennent conscience que le développement tel qu'entrepris au cours de cette période n'est pas profitable pour les femmes du Sud. La fin de cette décennie voit le début de la vague actuelle du mouvement des femmes qui réclame un changement des rapports de pouvoir, à la racine de la subordination des femmes.

Le développement commence à être envisagé sous un angle féminin lorsque les grandes agences de développement s'inquiètent des impacts de l'importante croissance démographique.

En 1970, Esther BOSERUP publie un ouvrage marquant, qui démontre que les femmes sont les grandes perdantes du modèle de développement lié à la théorie de la modernisation (67(*)). Cet ouvrage et d'autres qui ont suivi révèlent les nombreux désavantages subis par les femmes, résultant des projets de développement, et critiquent l'absence des femmes dans la planification des projets et des programmes de développement.

Durant les années soixante-dix, la théorie et la pratique du développement commencent à changer. On s'aperçoit que la plupart des projets de développement ne profitent qu'aux riches investisseurs du Nord. La redistribution des profits du développement entre le Nord et le Sud se fait de façon inégale. L'écart entre les riches et les pauvres ne fait que s'élargir continuellement. Et les femmes sont surreprésentées parmi les pauvres. La nouvelle approche du développement mise en pratique par la Banque mondiale s'oriente davantage vers la satisfaction des besoins essentiels des individus.

La décennie 1970 a été importante pour les femmes. C'est pendant cette période que les femmes s'organisent en mouvement, partout à travers le monde. Le milieu du développement international n'échappe pas à l'influence croissante du mouvement féministe. La préoccupation des femmes dans le développement apparaît pour une première fois comme une préoccupation mondiale avec la proclamation en 1975, de l'Année internationale des femmes, et du déroulement de la première Conférence internationale des femmes à Mexico. Celle-ci a été suivie de la proclamation de la Décennie internationale des femmes (1976-1985). Il y aura ensuite d'autres conférences internationales des femmes, notamment à Copenhague en 1980, à Nairobi en 1985 et à Beijing en 1995.

Au cours des années soixante-dix, les Nations Unies abandonnent leurs stratégies basées sur la modernisation des économies du tiers-monde. Ils réalisent que « l'oubli » des femmes pourrait être à l'origine de leur échec. Ils voient dans l'engagement des femmes une façon de mettre en oeuvre de nouvelles stratégies de développement.

L'amélioration de la productivité des femmes devient alors un des buts du développement traditionnel. En 1976, les Nations Unies créent un Fonds de développement réservé aux femmes (UNIFEM), afin de permettre aux femmes l'accès aux grandes conventions et conférences internationales. C'est à partir de cette période que le féminisme au Sud a pris son envol.

Depuis la Décennie internationale des femmes, on considère, face à la pauvreté des femmes, que l'exclusion de celles-ci du processus de développement constitue un véritable problème. Diverses approches sont alors apparues pour tenter de remédier au problème.

L'approche de « l'Intégration des Femmes dans le Développement » (IFD), comme son nom l'indique, vise à intégrer les femmes au processus de développement, sans pour autant remettre en question le modèle de développement dans lequel on voulait les intégrer. Cette approche est liée à « l'approche anti-pauvreté » qui, reconnaissant le rôle de production des femmes, vise à améliorer leurs conditions de vie à travers de petits projets générateurs de revenus, en lien avec leur rôle traditionnel.

Les années quatre-vingt ont été pour plusieurs acteurs dans le domaine du développement une période de réflexion et de remise en question. Face à la crise de la dette cumulée par plusieurs pays en développement, ainsi qu'à la dégradation de l'environnement à l'échelle planétaire, on commence à considérer qu'il serait important d'envisager le développement d'une toute autre manière.

On assiste alors à l'intégration du terme développement durable, mais aussi, de manière contradictoire, à l'ouverture des marchés, à l'augmentation des exportations, à l'application des programmes d'ajustements structurels, etc. Au niveau du mouvement féministe du Sud, on s'allie autour de problèmes sociaux et politiques (accès à la terre, eau, défense des droits humains). Les femmes du monde réclament de plus en plus de ressources et de bénéfices puisque les coupures dans les services offerts par les États affectent durement leurs conditions de vie et celles de leur famille. Elles poursuivent leur lutte pour l'obtention de plus d'équité et d'égalité. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ratifiée par plusieurs pays à travers le monde, entre en vigueur en 1981.

En 1985 se tient la troisième Conférence internationale des femmes à Nairobi, suivie de la quatrième Conférence à Beijing, en 1995. Une plate forme d'action est adoptée. Au cours de l'an 2000, se tient à New York une rencontre internationale (Beijing +5) pour l'évaluation de cette plate forme.

À partir des années quatre-vingt, le mouvement féministe s'affirme au Nord et au Sud. Au sein de ce mouvement, différents courants idéologiques s'intéressent aux causes de la subordination des femmes. Dans le contexte de l'érosion des services sociaux et du rôle de l'État, certaines personnes préconisent « une approche axée sur l'efficacité », visant à améliorer la productivité des femmes, notamment à travers le crédit, la technologie et la formation. Cette approche s'appuie sur les trois rôles des femmes au niveau de la production, de la reproduction et de l'engagement communautaire.

D'autres préconisent « une approche axée sur l'équité », qui vise à donner des chances égales aux femmes dans tous les domaines. Cette dernière approche, promue surtout pendant la Décennie des femmes, implique un changement structurel visant à s'attaquer aux inégalités entre les sexes.

Durant la même période, toute une génération de féministes du Sud critique le modèle de développement dans lequel on voudrait intégrer les femmes. Les critiques du groupe DAWN (Development Alternatives for Women in a New Era) de New Delhi sont importantes et marquent le début d'une véritable approche féministe du développement. De ces critiques émerge parallèlement une approche qui se préoccupe des relations entre les genres et non seulement des femmes. Cette approche, dite genre et développement, privilégie une perspective holistique, c'est-à-dire tenant compte de l'articulation entre la famille et les diverses activités sociales, économiques et politiques.

Les tenants de cette nouvelle approche soulèvent des questions fortes pertinentes face à toute initiative de développement : À qui elle profite ? Qui y perd ? Quels compromis ont été faits ? Quels sont les résultats en terme d'équilibre des droits et des privilèges, et en terme de partage du pouvoir entre les hommes et les femmes et entre les divers groupes sociaux ? L'analyse GED cherche donc à comprendre les facteurs qui favorisent le maintien de la subordination des femmes et à développer des stratégies de développement permettant d'appuyer le changement des rapports sociaux dans un sens plus égalitaire.

I.3.1. LES DIFFERENTES APPROCHES CONCERNANT LES FEMMES

Finalement, on peut identifier trois grandes approches concernant les femmes au sein du développement.

La première : l'intégration des femmes au développement (IFD) ; la seconde : les femmes et le développement (FED) ; et la troisième : l'approche genre et développement (GED). Ces approches se chevauchent dans le temps jusqu'aujourd'hui.

I.3.1.1. INTÉGRATION DES FEMMES AU DÉVELOPPEMENT (IFD)

L'approche de l'intégration des femmes au développement (IFD) est issue du courant féministe libéral et de la théorie de la modernisation (68(*)). Elle a fait son apparition en 1973. A cette époque on croyait que la modernisation, habituellement synonyme d'industrialisation, améliorerait le niveau de vie dans les pays en voie de développement et qu'avec la croissance de l'économie de ces pays, les bénéfices de la modernisation, étant féministe explique la subordination des femmes par leur exclusion de la sphère publique, due à la division sexuelle du travail.

Les féministes libérales cherchent à promouvoir l'accès des femmes à différents domaines de travail mais également à des postes où les décisions prises peuvent avoir un impact sur la condition des femmes. Le courant féministe prône des changements juridiques et administratifs en vue d'assurer une meilleure intégration des femmes dans le système économique. Au sein de ce courant féministe, on réclame l'égalité pour vaincre la discrimination envers les femmes.

L'approche IFD a mis beaucoup d'emphase sur la capacité individuelle des femmes à s'outiller pour s'intégrer aux structures déjà existantes du développement. Cette approche a donc misé sur la promotion de l'accès aux nouvelles technologies et à l'éducation, afin d'assurer la pleine participation sociale des femmes.

I.3.1.2. L'APPROCHE FEMMES ET DÉVELOPPEMENT (FED)

Face aux limites de la théorie de la modernisation et de l'approche de l'IFD, une seconde approche est apparue au cours des années 70 : l'approche Femmes et développement, fondée sur la théorie de la dépendance et de la modernisation. Selon les auteures DAGENAIS et PICHE, cette approche féministe-marxiste (69(*)) se fonde essentiellement sur le postulat que les femmes ont toujours fait partie des processus de développement et qu'elles n'y sont pas soudainement apparues au début des années 1970.

Les auteures ajoutent que la perspective Femmes et développement met l'accent sur la relation entre les femmes et les processus de développement plutôt que seulement sur les stratégies d'intégration des femmes au développement; que cette même perspective part du fait que les femmes ont toujours joué un rôle économique important au sein de leurs sociétés ; que leur travail, à l'intérieur comme à l'extérieur du foyer, est essentiel à la survie de ces sociétés ; que cette intégration sert surtout au maintien des structures internationales d'inégalité.

I.3.1.3. L'APPROCHE GENRE ET DÉVELOPPEMENT (GED)

L'approche genre et développement résulte en fait de nombreuses critiques formulées par des femmes chercheures du Nord et du Sud, insatisfaites des approches précédentes. Ces approches avaient ignoré l'apport des femmes et leur contribution à la production de biens et de services dans leur communauté.

Les femmes étaient toujours confinées dans leur rôle traditionnel familial. L'approche genre et développement a vu le jour à la fin des années quatre-vingt, afin de travailler à la reconnaissance de la contribution des femmes à la société et à l' « empowerment » de celles-ci à tous les niveaux.

Cette approche holistique, qui s'inspire du courant féministe socialiste (70(*)) ; comble l'écart laissé par les théoriciens de la modernisation en liant les rapports de production aux rapports de reproduction et en tenant compte de tous les aspects de la vie des femmes. L'approche GED se combine au concept de développement durable et équitable.

L'approche Genre et Développement, en plus de chercher à intégrer les femmes au développement, explore le potentiel des initiatives de développement à transformer les relations sociales et de genre et à donner plus de pouvoir aux femmes. L'approche GED vise, à long terme, un partenariat égal entre les femmes et les hommes dans la définition et l'orientation de leur avenir collectif.

Contrairement aux approches précédentes, l'approche genre et développement explique l'oppression des femmes par la division du travail et donc par la subordination de la sphère de reproduction à celle de la production. Les inégalités entre les rapports femmes et hommes s'expliqueraient entre autres, par la non reconnaissance de la contribution sociale des femmes par leur travail domestique au détriment de la valorisation du travail salarié des hommes.

Cette approche féministe tente de tenir compte, dans ses stratégies d'intervention de l'ensemble de l'organisation sociale, de la vie politique et économique, des différents rapports sociaux entre les classes, ethnies etc.

L'approche GED va plus loin que l'approche IFD et Femmes et développement dans la remise en question des postulats sous-jacents aux structures sociales, économiques et politiques actuelles. La perspective genre et développement conduit non seulement à l'élaboration de stratégies d'intervention et d'actions positives assurant une meilleure intégration des femmes aux initiatives de développement en cours, mais elle entraîne inévitablement un réexamen fondamental des structures et institutions sociales et, en fin de compte, la perte de pouvoir des élites séculaires produisant ainsi différents impacts sur la vie des femmes et des hommes.

L'application de l'approche genre et développement doit permettre aux programmes et projets de développement de répondre aux besoins pratiques des femmes et aux intérêts stratégiques de celles-ci. Les besoins pratiques sont liés aux conditions de vie des femmes et les intérêts stratégiques doivent correspondre aux intérêts à long terme pouvant permettre l'amélioration de leur condition de vie.

L'approche GED vise l'autonomie des femmes pour éviter leur récupération comme dispositif du développement. Obtenir plus de pouvoir signifie aller au-delà de l'autonomie financière vers l'autonomie politique. L'approche GED considère les femmes comme agentes de changement plutôt que comme bénéficiaires passives de l'aide au développement. Elle affirme que les femmes doivent s'organiser afin d'augmenter leur pouvoir politique.

C'est la raison pour laquelle nous nous proposons de faire un aperçu synthétique des différences fondamentales entre l'approche IFD et l'approche GED qui sont à la fois interchangeables

Tableau 2 : Distinction entre l'approche de l'IFD et l'approche GED

INTEGRATION DES FEMMES AU DEVELOPPEMENT (IFD)

GENRE ET DEVELOPPEMENT (GED)

1. l'approche

1. l'approche

Une approche qui considère les femmes comme étant un problème

Une approche du développement

2. le centre d'intérêt

2. le centre d'intérêt

Les femmes

Les rapports femmes - hommes

3. le problème

3. le problème

L'exclusion des femmes (qui représentent la moitié des ressources potentielles de production) du processus de développement.

Les relations de pouvoir inégales (riches et pauvres, femmes et hommes) qui empêchent un développement équitable ainsi que la pleine participation des femmes.

4. l'objectif

4. l'objectif

Un développement plus efficient, plus efficace.

Un développement équitable et durable, où les femmes et les hommes prennent les décisions.

5. la solution

5. la solution

Intégrer les femmes au processus de développement existant.

Accroître le pouvoir des plus démunis et des femmes.

Transformer les relations non égalitaires.

6. les stratégies

6. les stratégies

Projets pour femmes.

Volets femmes.

Projets intégrés.

Accroître la productivité des femmes.

Accroître le revenu des femmes d'effectuer les tâches traditionnellement liées à leur rôle.

Identifier/considérer les besoins pratiques déterminés par les femmes et les hommes en vue d'améliorer leur condition.

Traiter en même temps des intérêts stratégiques des femmes.

Faire face aux intérêts stratégiques des pauvres par un développement axé sur les gens.

Source : tableau conçu par nous même à partir de l'analyse documentaire.

Il ressort de ce tableau que les approches de définition nous renseignent peu sur l'évolution du concept de développement voire sur la genèse du concept Genre et son lien avec la politique. Pour ce faire, le présent cadre conceptuel met en exergue les différentes théories de développement élaborées depuis 1960 jusqu'à nos jours.

Certes, les notions de Genre et de Développement intégral remontent de très lointaines et sont fonctions de la division historique des universitaires. Il existe des tendances diverses qui font que les gents cherchent à se positionner afin de prendre telle ou telle autre position. De notre part, ces approches sont très pertinentes dans la mesure où elles permettent de situer le Genre par rapport à d'autres notions comme Parité, émancipation, etc.

Pour ce faire, nous proposons de présenter un schéma explicatif de toutes ces approches de 1960 à nos jours. Cette étude permettra à tout chercheur de cibler le sens visible et invisible de la notion de Genre par rapport à d'autres concepts similaires.

Toutes ces théories ont subi et subissent des mutations jusqu'à nos jours, car le Genre est phénomène en mutation permanente. Plus la société évolue, plus la conception que les gens se font sur la notion de Genre se transforme.

Il est vrai que ce schéma peut connaitre de modification dans les jours à venir, car la faiblesse ou les désavantages d'une théorie donnent automatiquement naissance à une nouvelle théorie. Les théories sur la notion de Genre varient en fonction de temps et des auteurs. Mais, selon nous les déterminants géographiques, historiques, culturels, anthropologiques, économiques et politiques influent sur la considération de phénomène « Genre ».

Figure N°1 : Schéma des théories sur le Genre et le Développement

Théorie de la modernisation

Idées- forces : le développement passe par la croissance économique

Pionnier : ww.Rostow(1960)

Théorie de la dépendance

Idées-forces : transfère de modèle de développement du Nord vers le sud

Pionniers : Sarnir AMIN et A. Gunder FRANCK (1960-1970)

Approche « intégration des femmes au développement » (IFD) Approche « équipe » « anti-pauvreté », « efficacité »

Idées-forces : Perspectives d'intégration des femmes au développement

Pionniers : les femmes et les féministes (1970-1980)

Approche « femme et développement (FED)

Idées-forces : Participation des femmes au processus de développement

Pionniers : les femmes et les féministes (1970-1980)

APPROCHE ; « Genre et développement » (GED)

Idées-forces : le développement passe par la synergie des relations homme-femme.

Pionnier : les acteurs de développement : chercheurs, ONG, Institutions Partenaires...

(à partir des années 80 jusqu'à nos jours)

Prise en compte des rapports sociaux de genre

- Dans les plans de développement ;

- Dans la perspective ESPECT ;

- Dans le projet de développement ;

- Au sein de la famille ;

- Par les partenaires au développement

Caractéristiques des relations homme-femme selon le genre :

- Profit d'activité et la division sexuelle du travail

- Accès aux ressources, bénéfices et contrôles.

- Besoins pratiques et intérêts stratégiques des couches sociales

- Participation des femmes et des hommes à la gestion de la communauté

- Possibilité des transformations économiques

Principes de GED

- Durabilité

- Participatif

- Equité/égalité

- empowerment

Approche «  genre et projet de développement »

- Contribution des activités du projet et à l'amélioration des conditions de acteurs sociaux pour réduire la pauvreté

- Besoins pratiques et intérêts stratégiques ;

Niveau de participation des acteurs sociaux

- Contribution du projet à la transformation des rapports de genre pour un DHD

Instruments d'étude

- MARP

- IPF

(Les plus utilisés au Bénin)

 

Source : Schéma explicatif des théories de Genre et Développement conçu par Gaston KALONGE grâce à l'analyse documentaire.

Ce cadre conceptuel présente le mérite de distinguer les approches de Genre et de développement se rapportant à différents niveaux (individuel, familial, communautaire, national.....) de la réalité sociale (le bien être).

Il permet aussi d'identifier les modes de relations entre les approches et les niveaux. Son intérêt réside dans son adaptabilité à tous les pays en développement.

CHAPITRE II. ANALYSE DES MECANISMES DE LA PROMOTION DU GENRE EN RDC

Dans l'élan global du repositionnement des femmes à des fins de développement, il s'avère que la RDC est partie prenante à plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme garantissant également les droits des femmes, notamment, la Convention des nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination, le Protocole de la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples sur les droits des femmes en Afrique, la Résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies d'octobre 2000, la Résolution 1820 du Conseil de sécurité des Nations Unies de juin 2008, le Pacte sur la paix, la sécurité, le développement et la démocratie dans la région des Grands Lacs, etc.

Ce qui au niveau national a eu des implications et a abouti à des politiques nationales et à l'élaboration des textes qui favorisent l'implication des femmes dans la vie nationale. Seulement comme mentionné ci-haut, ces dispositions restent encore lacunaires tant dans leur contenu que dans les faits.

Il existe certes une manifestation de volonté des acteurs sociaux et étatiques à changer la situation des femmes de manière durable. La traduction de ce fait est perçue en RDC, à travers l'élaboration d'instruments nationaux en faveur de la promotion des femmes et de Genre et l'implication accrue des organisations féminines dans ces processus.

Sur le plan formel, quelques repères mettent en exergue cette volonté, du moins manifeste :

? 2002 : l'élaboration du Programme National pour la Promotion de la Femme Congolaise (PNPFC), adopté par le Gouvernement en Septembre 1999 et mise en oeuvre en 2002;

? 2004 : l'élaboration du Document des stratégies d'intégration du Genre dans les Politiques et programmes de Développement en RDC

? 2005 : la mise en place des Bureaux de réseautage des points focaux à Kinshasa et en provinces, suivi des sessions de formation de ces derniers en approche Genre. A Kindu, ce bureau existe également ;

? 2006 : la promulgation de la loi sur les violences sexuelles;

? 2009 : l'élaboration de la Politique Nationale de Genre.

II.1. LE STATUT DE LA FEMME EN RDC : UN REFLET DES INEGALITES DE GENRE

II.1.1. Sur le plan politique

La participation de la femme dans le gouvernement ou dans les organes locaux reste toujours faible. Les statistiques existantes de 1980 - 1995, indiquent que le nombre de femmes ayant occupé de postes ministériels était de 16. Celui des hommes et femmes ayant participé dans les organes locaux: s'élevait à 771 hommes contre 22 femmes en 1980 et 5 ans après il est passé à 790 hommes contre 24 femmes (1995). A la période de transition, le nombre des femmes et des hommes au parlement de transition et Haut Conseil de la République parlement de transition est passé à 824 hommes contre 20 femmes (1990 - 1993).

Pour la Province du Maniema, les statistiques existantes de 1980 à 2011, indiquent que le nombre de femmes ayant occupé de postes des Gouverneurs ou Vice-gouverneurs était de deux seulement. Avant la période de la transition, il y avait une femme qui a occupé le poste du Gouverneur (Gertrude KITEMBO) et pendant la transition, une autre a occupé le poste du Vice-gouverneur de la Province (Madame Catherine AZIZA SADIKI)

Aux élections de 2006, la représentation des femmes tant au niveau national que provincial est restée encore très faible. Nous confirmons que cette faible représentation des femmes est la résultante de contraintes de divers ordres qui pèsent sur elles. Il s'agit à titre illustratif, des contraintes ci-après : le manque des moyens financiers pouvant couvrir les besoins de la campagne. À Kindu par exemple, certaines femmes étaient menacées par leurs époux à cause de leur engagement au sein des formations politiques, la tradition les empêche de prendre la parole devant les hommes ou de les réunir pour des fins politiques, etc.

En ce qui concerne les opérations électorales de l'an 2006 en RDC, au niveau du pouvoir législatif, sur 9709 candidatures enregistrées au niveau de la Commission Electorale Indépendante (CEI), il n'y a eu que 1320 candidatures féminines (13,6 %) dont seulement 42 furent élues (3,2 %). Ainsi, les femmes ne représentent que 8,4 % de 500 députés siégeant à l'Assemblée nationale. Aucune femme n'a été présente dans l'Espace Présidentiel, 8 femmes seulement (soit 7,6%) ont siégé dans le gouvernement de transition contre 53 hommes sur un total de 61 ministres et vice-ministres.

Au sénat de la transition, plus masculinisé encore que l'assemblée nationale, il n'y avait que 3 femmes (2,5%) contre 117 hommes alors que 120 sièges étaient à répartir. 

Les Assemblées provinciales quant à elles présentent un pourcentage assez faible allant de 0% (Maniema) à 18,7% (Kinshasa), et entre les deux d'autres pourcentages très faibles, dont : 2,3% (Nord Kivu) et 2,7% (Equateur).

Les femmes ont participé à titre d'électrice à 55,07% contre les hommes dont le taux de participation s'élevait à 44, 92%. Alors que les femmes sont numériquement majoritaires au sein de la population globale et constituent des forces actives et dynamiques pendant les campagnes électorales, les échecs des femmes aux élections ont été très criants et ont ainsi causé leur sous représentation dans les institutions démocratiques issues des élections libres, démocratiques, transparentes et indépendantes.

Notre enquête dans la ville de Kindu relève les réalités selon lesquelles, deux facteurs majeurs participent au statut défavorable des femmes congolaises dans le domaine politique. Il s'agit d'abord de la problématique du faible niveau d'instruction pour la majorité des femmes et enfin, de l'absence de culture politique chez la plupart des femmes ; fruit de la trajectoire historique, de Genre, de la socialisation politique penchée beaucoup plus vers les hommes

En rapport avec les exigences de la dialectique matérialiste, l'interconnexion des faits exige à ce que d'autres facteurs empiriques soient annexés à côté de deux facteurs énumérés par nos enquêtés. Il s'agit des facteurs ci-après:

- L'impréparation des femmes

- La confrontation à de nouvelles expériences produites pas les mutations sociales

- Le patriarcat politique

- La faiblesse des actions des agents de développement politique en direction des femmes

- Etc.

II.1.2.Sur le plan de l'éducation

La proportion de femmes de 15-49 ans sans instruction est quatre fois plus élevée que celle des hommes (21 % contre 5 %) et les hommes sont proportionnellement deux fois plus nombreux que les femmes à avoir achevé les niveaux secondaires ou supérieurs (65 % contre 41 %). La proportion des personnes de 15-49 ans qui ne savent ni lire ni écrire (analphabètes) atteint 41 % parmi les femmes.

Cette situation n'est pas actuelle, car depuis l'enquête organisée par le Bureau de l'UNICEF en 2001, la situation des femmes est la même. Le taux de scolarisation des filles s'élevait à 75,7 % contre 76,8 % pour les garçons. Le taux d'analphabétisme des femmes est de 14,5 % contre 6 % pour les hommes

Les résultats de notre étude effectuée par le moyen d'une enquête à Kindu montrent les réalités selon lesquelles, plusieurs causes expliquent cette différence en matière d'éducation notamment, les difficultés d'accès, l'abandon du aux grossesses, aux mariages précoces, au manque de revenu, à la tradition qui poussent les parents à déconsidérer la scolarité des filles etc.

Quelques exemples au niveau de la ville de Kindu insistent sur le statut inférieur des femmes dans le domaine de l'éducation par rapport aux hommes.

A Kindu, l'accès à l'école semble plus difficile pour les filles que les garçons à partir du niveau secondaire. En effet, si le rapport filles / garçons dans le primaire est de 91,5% et donc proche de 100% (c'est-à-dire qu'il y a 9 filles pour 10 garçons dans ce cycle), ce ratio descend à 55,5% (un peu moins de 6 filles pour 10 garçons) au secondaire pour atteindre 8,6% pour l'enseignement universitaire (1 fille pour 9 garçons).

Cette situation se traduit par un niveau moyen d'éducation des femmes (5,7 années) inférieur à celui des hommes (7,1 années) et un taux d'alphabétisation des femmes (36,2%) plus faible que celui des hommes (48,2%).

Comme dit ci-haut, la pauvreté mais aussi la grossesse ou le mariage précoce à Kindu sont les principales causes de l'abandon de la scolarisation des jeunes filles. En effet, si 74,2% des garçons ont arrêté leurs études pour des raisons financières, 61,7% des filles de Kindu évoquent ce problème financier tandis que 22,3% ont arrêté leurs études à cause d'une grossesse ou un mariage.

D'ailleurs, selon l'EDS, la proportion de jeunes filles de 15-19 ans qui ont déjà commencé leur vie féconde s'élève à 26,9% dans la Province du Maniema. En résumé, des programmes ciblés sont nécessaires pour que les filles de Kindu puissent poursuivre leur scolarité autant que les garçons. Ceci est d'autant plus nécessaire que les enquêtes montrent l'influence positive de l'éducation des mères sur la santé des enfants.

La situation socio politique qu'a traversée la province du Maniema ces dernières décennies a eu un impact négatif sur le Genre. Elle est à la base de la dislocation des familles, suivie d'une situation de précarité que vit la femme Congolaise à tous les niveaux. On observe une permutation drastique du rôle de la femme : chef de famille nombreuse dû au décès du conjoint suite aux conflits armées et/ou au VIH / SIDA, enrôlement forcé dans les milices combattantes, divorcée par suite des violences sexuelles, femmes de compagnie pour les soldats, prostitution. On constate également, en exploitant le rapport annuel (exercice 2008) de la Division Provinciale de l'Agriculture du Maniema, l'existence d'une déperdition au niveau de la productivité agricole où les femmes occupent 52 % des forces de travail et assure 75 % de la production alimentaire.

Aujourd'hui en RDC en général et dans le milieu où nous avons fait notre enquête en particulier ( la ville de Kindu), l'emploi non structuré occupe une grande majorité des femmes qui s'adonnent à des activités de survie afin de lutter contre la montée de la pauvreté du fait de la modicité des salaires payés dans l'emploi formel dominé par les hommes et le manque des ressources monétaires en général.

Les conclusions des consultations participatives indiquent également que les droits des femmes sont violés ; des discriminations sont constatées dans tous les domaines de vie : droits, éducation, santé, accès aux ressources etc. En ce qui concerne l'inégalité de l'accès à l'éducation homme/femme, on constate un abandon précoce des filles dû aux grossesses, aux mariages précoces et à certaines traditions qui poussent les parents à déconsidérer la scolarité des filles.

La situation de dépendance économique de la femme vis-à-vis du revenu du mari est à la base de la violence dont elle est victime. Les violences et sévices sexuels sont monnaie courante. Les violences sexuelles ont entraîné la propagation de la pandémie du VIH / SIDA dans les zones à conflits. Ces violences continuent même en période post conflit sur l'ensemble de la province.

Les femmes sont encore en minorité au sein des institutions et structures de l'Etat notamment au niveau du gouvernement, du parlement, de l'administration publique, du secteur privé, des syndicats, des coopératives, des organisations professionnelles ainsi qu'au niveau des organisations communautaires de base. En effet, le guide biographique des femmes cadres et leaders, réalisé par le M.S.AF et UNICEF, montre que le taux de représentativité des femmes aux postes de pouvoir politique estimé à 10 % pour l'ensemble de la République et dans la province du Maniema, le taux n'est que de 1 % par rapport aux hommes.

II.1.3. Statut des femmes congolaises dans le domaine de la santé

Il est à noter que le statut défavorable des femmes congolaise dans le domaine de la santé a un lien avec l'instruction, le pouvoir économique, la prise de décision, voire les rapports sociaux des sexes et les politiques publiques dans ce domaine. Tous ces aspects ont des effets sur le comportement des femmes dans le domaine sanitaire. Ils contribuent ou non à modifier les tendances des femmes dans leurs accès aux soins de santé, à l'information ou encore dans leur appropriation des mesures sanitaires bénéfiques à leur vie.

Le rapport du Bureau de l'OMS en RDC pour l'année 2010 prouve que la mortalité maternelle est très élevée en RDC. Pour la période de 0-4 ans, le taux de mortalité maternelle est estimé à 549 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes. Le risque de mortalité maternelle sur la durée de vie, calculé à partir du taux de mortalité maternelle est de l'ordre de 0,034, ce qui signifie en d'autres termes, qu'en RDC une femme court un risque d'environ 1 sur 29 de décéder pour une cause maternelle durant les âges de procréation. Seulement, les mesures en termes de prise en charge des femmes, d'information, de sensibilisation, de renforcement des capacités du personnel, pour réduire cet état de chose semblent faibles. Ce qui demande l'implication de tous les acteurs qui militent pour la question de Genre ; en fait le domaine de la santé par rapport à la question de Genre, devraient tenir compte des besoins spécifiques et stratégiques des femmes dans le domaine de la santé pour l'élaboration des politiques appropriées.

Dans la ville de Kindu par exemple, en ce qui concerne les attitudes et comportements en rapport avec le VIH/SIDA, le manque d'éducation, l'accès réduit aux médias et au centre de formation en la matière par les femmes, les rendent moins accessibles aux informations sur le SIDA. Aussi, les stéréotypes collés aux malades de SIDA produisent chez les femmes des attitudes négatives tant pour les tests volontaires que pour la recherche de l'information. La société est plus dure envers les femmes porteuses de SIDA, ou encore envers celles qui ont un intérêt particulier de la question, qu'envers les hommes. Ainsi, malgré la connaissance du SIDA, des réticences persistent à plusieurs niveaux en ce qui concerne l'appropriation d'approches de prévention et de prise en charge du SIDA. Ce qui empiète sur la connaissance complète de la question.

Selon le Ministère National de la santé en RDC, la quasi-totalité des congolais ont entendu parler du VIH/sida (92 % des femmes et 97 % des hommes) ; cependant, seulement 15 % des femmes et 22 % des hommes de 15-49 ans peuvent être considérés comme ayant une connaissance « complète » du sida. La possibilité de transmission du VIH de la mère à l'enfant par l'allaitement est connue par 55 % des femmes et 53 % des hommes ; mais seulement 14 % des femmes et 15 % des hommes savent que le risque de transmission du VIH de la mère à l'enfant peut être réduit par la prise de médicaments spéciaux pendant la grossesse. Le niveau global de tolérance envers les personnes vivant avec le VIH est faible : seulement 6 % des femmes et 11 % des hommes feraient preuve de tolérance.

L'usage des préservatifs à Kindu est en grande partie décidé par l'homme. Les femmes ont une faible marge de décision sur l'usage de préservatif. La supériorité de l'homme dans la prise de décisions rentre même dans la sphère des préventions, qui met par ce fait la vie des femmes en danger ; elles ne sont pas toujours responsables même dans la sexualité.

Au cours des 12 derniers mois ayant précédé l'EDS, 19 % des femmes et 44 % des hommes de 15-49 ans ont eu des rapports sexuels à hauts risques (rapports sexuels avec un partenaire extraconjugal et non cohabitant). Parmi eux, 17 % des femmes et 27 % des hommes ont déclaré avoir utilisé un condom au cours des derniers rapports sexuels à hauts risques. Lors des derniers rapports sexuels prénuptiaux, 16 % des jeunes femmes et 26 % des jeunes hommes ont utilisé le condom.

Le constat est que les femmes utilisent moins les préservatifs que les hommes. Question de soumission aveugle à l'homme quel qu'en soit le risque. Ce qui a un lien avec la violence domestique. Près de deux femmes sur trois (64 %) ont déclaré avoir subi des violences physiques à un moment quelconque de leur vie depuis l'âge de 15 ans et près de la moitié (49 %) au cours des douze mois ayant précédé l'enquête. Toutes les catégories de femmes sont touchées par les violences domestiques. Dans 74 % des cas, l'auteur des actes de violences est le conjoint actuel ou précédant ; fait de la domination masculine.

En ce qui concerne l'accès aux soins de santé on constate par exemple à Kindu que l'incapacité de consulter un médecin ou autre personnel qualifié ainsi que l'inaccessibilité aux soins existe soit parce que le prix est élevé, soit les produits sont rares ou que la distance qui sépare les malades d'une structure de santé sont grandes. Ce sont autant des facteurs de la pauvreté.

Les femmes sont dans la plupart des cas les plus concernées, pourtant, en cas de grossesse par exemple, les consultations prénatales de qualité sont indispensables pour assurer la vaccination des mères contre le tétanos et pour détecter précocement et prendre en charge les complications potentielles et les facteurs de risques pendant la grossesse et l'accouchement notamment la pré éclampsie, l'anémie, les maladies sexuellement transmissibles et la transmission du VIH/SIDA de la mère à l'enfant. Elles permettent ainsi de prévenir les décès maternels.

Le taux des femmes âgées de 15 - 49 ans qui ont consulté le personnel qualifié est de 73,0 %. Des études ponctuelles réalisées dans les milieux ruraux ont montré que des coûts des services de santé ont un effet appauvrissant sur les populations. En effet, 24,0 % des patients ont vendu leurs biens et 18,0 % se sont endettés pour faire face aux coûts de soins de santé. Une étude menée par une ONG a déterminé que 30,0 % des patients ont vendu leurs biens et 15 % se sont endettés pour faire face aux coûts de soins de santé. Quand on met ceci avec la féminisation de la pauvreté on peut bien voir à quel niveau les femmes sont les plus exposées dans ces conditions.

Bien que le taux de la couverture des soins prénatals soit de 73 ,3 %, des disparités persistent entre les milieux ruraux et urbains, aussi entre les femmes qui ont étudié et celle dont le niveau d'instruction est faible.

Le rapport annuel de la Division Provinciale de la Santé au Maniema (exercice 2010), montre la réalité selon laquelle, malgré la proximité géographique des services de santé, 9 femmes de Kindu sur 10 âgées de 15 à 49 ans déclarent avoir rencontré des problèmes pour accéder aux soins, et en particulier des problèmes financiers (78,1%). La pauvreté limite donc l'accès des femmes aux services de santé. Il n'existe pas de mutuelles de santé et le personnel médical exige d'être payé, même dans les centres de santé publics, avant toute consultation des patients. On souligne également que les produits pharmaceutiques ne sont pas donnés dans ces centres qui se contentent de délivrer des ordonnances pour leur achat auprès des pharmacies.

Il faut noter par ailleurs que 43,2% des femmes évoquent le problème de transport qui les a empêchées de se soigner et 22,1% se sont vu refuser la permission d'y aller par leurs conjoints. Une des conséquences de cette situation est que seulement 39,1% des femmes ont effectué des soins prénatals chez un médecin ou une sage-femme au cours de leur dernière grossesse.

En outre dans toute la province du Maniema, un tiers des accouchements (33%) se font en dehors des établissements sanitaires. Par ailleurs, près de la moitié des accouchements ne sont pas assistés par un personnel de santé. Ce qui explique probablement le niveau élevé du taux de mortalité maternelle en RDC en général et au Maniema en particulier.

L'inégalité dans le domaine de l'éducation et du travail rend déjà les femmes vulnérables (faiblesse du capital humain et financier). Un accès limité au service de santé ne fait qu'accroître cette vulnérabilité. L'Etat devrait consentir un effort plus important pour améliorer l'accès physique et financier de tous, et particulièrement des pauvres et des femmes, aux services de santé.

Tableau 3. Incidence de la pauvreté en province selon le milieu de résidence et les caractéristiques socio démographiques du chef de ménage

 

Kinshasa

Sud Kivu

Maniema

Equateur

RDC

Milieu de résidence

Urbain

-

84.6

76.1

83.5

61.5

Rural

-

84.7

52.8

95.3

75.7

Sexe

Hommes

40.7

86,7

55.3

94.2

71,6

Femmes

45.7

65,6

60.8

87.7

69,9

Niveau d'instruction

Sans instruction

68.9

86,5

68.3

93.8

77,0

Primaire

57.0

84,9

54.3

96.9

76,3

Secondaire

45.5

83,6

55.6

92.7

71,9

Programme non formel

32.4

100,0

46.9

53.7

56,3

Universitaire

14.3

77,5

45.6

75.9

34,1

Secteur institutionnel

Administration publique

26.7

70,6

49.0

93.4

65,0

Entreprises publiques

16.2

86,0

22.0

87.0

59,1

Privés formels

31.3

48,8

53.6

92.2

49,6

Informel agricole

40.1

86,6

59.3

95.1

77,1

Informel non agricole

47.2

83,6

47.5

90.6

64,5

Associations

33.4

85,3

54.9

78.1

60,1

Source : Tableau élaboré sur base des profils des provinces (PNUD ; Rapport annuel, exercice 2009)

Le milieu de résidence, le sexe, le niveau d'instruction et le secteur d'activité restent déterminants sur l'incidence de pauvreté. Ces facteurs associés au niveau d'instruction et au milieu de résidence aggravent la situation de pauvreté des femmes résidant en milieu rural et n'ayant pas un niveau élevé d'instruction.

L'accès des femmes aux services de santé n'est pas évident dans la ville de Kindu. En effet, outre l'insuffisance des infrastructures de santé, 85% des femmes enquêtées dans la ville de Kindu, représentant 85 sur 100 sujets enquêtés déclarent avoir rencontré des problèmes pour accéder aux soins. Il s'agit principalement des problèmes financiers (72%) et des problèmes de transport (44%). L'inégalité selon le Genre sur le marché du travail et dans le domaine de l'éducation rend déjà les femmes vulnérables.

L'accès limité au service de santé ne fait qu'accroître cette vulnérabilité dans la ville de Kindu. Par ailleurs, d'autres facteurs viennent aggraver les barrières financières et géographiques que subissent les femmes pour accéder aux services de santé. En effet, 25 sur 100 femmes enquêtées soit 25% de la totalité des sujets enquêtés dans la ville de Kindu déclarent s'être vu refuser la permission d'aller se soigner.

Malgré cela, les conditions d'accouchements semblent bien meilleures au Chef lieu de Province par rapport aux autres territoires formant la province du Maniema. Le même rapport du Ministère National de la santé indique que les accouchements ont été assistés dans une proportion élevée (73,5% au Maniema contre 64,4% en RDC) par un personnel de santé (médecin, infirmier ou sage femme).

II.1.4. Dans le domaine de l'emploi

Le Capital humain ne peut constituer un moteur de modernisation que si on accorde une importance à l'éducation ; car, le niveau de progrès d'un pays est fonction du degré d'instruction de sa population. Ainsi, assurer à tous, dans une société, des chances équitables, d'accès à des moyens appropriés de s'instruire et de se qualifier garanti le développement des populations. Or en R.D.C., il existe encore des inégalités criantes entre d'une part, hommes et femmes et d'autre part garçons et filles.

En matière d'emploi, les femmes sont très peu représentées. Les données de l'INS (Rapport annuel de l'an 1991) indiquent qu'il y a 11% des femmes salariées dans le secteur non agricole. En effet l'analphabétisme des femmes, la confusion consacrée dans les dispositifs juridiques consacrant l'incapacité de la femme mariée en exigeant l'autorisation maritale, la coutume etc., sont des facteurs explicatifs de la sous représentativité des femmes dans ces domaines.

Dans le Rapport cité ci-haut, les données de la Province du Maniema révèlent que l'inégalité dans le domaine de l'éducation se répercute sur le marché du travail. En effet, le taux d'activité des femmes de 10 ans et plus (50,6%) est légèrement plus faible que celui des hommes (54,3%). En revanche, leur taux de chômage est plus faible (2,3% pour les femmes et 3,6% pour les hommes).

L'analyse par secteur institutionnel montre que les femmes sont quasiment absentes dans le secteur organisé (secteur public et privé formel). En effet, 97% des femmes du Maniema travaillent dans le secteur informel (contre 85% des hommes). Par ailleurs, 4% des hommes occupent des emplois de cadres contre seulement 0,1% des femmes.

Les femmes occupent surtout des emplois précaires avec de faible rémunération. En effet, 44% des femmes sont des aides familiales contre 10% des hommes dans cette catégorie. Le taux de salarisation des femmes est très faible car seulement 2,4% des femmes de la province sont salariées alors que ces proportions montent à 18,4% pour les hommes. Enfin, le revenu d'activité moyen mensuel des femmes (15 dollars) est également nettement plus faible que celui des hommes (20 dollars). Face à cette précarité des emplois des femmes, des appuis spécifiques doivent leur être accordés comme par exemple l'accès facile au crédit.

A Kindu Chef-lieu de la Province du Maniema, cette inégalité dans le domaine de l'éducation se répercute sur le marché du travail. Les femmes ont un taux d'activité (62,8%) plus élevé que celui des hommes (60,2%). En revanche, leurs conditions d'activité sont plus précaires : un revenu mensuel moyen d'un peu plus de la moitié de celui des hommes (19$ pour les femmes contre 32$ pour les hommes), un faible taux de salarisation (4,9% pour les femmes et 21,4% pour les hommes). Il en est de même du taux de chômage qui est un peu plus élevé chez les femmes par rapport aux hommes. Par ailleurs, 56,3% des emplois du secteur informel sont occupés par des femmes, que l'on trouve concentrées dans les emplois les plus vulnérables, notamment parmi les travailleurs à leur compte et spécialement les commerçants.

Face à cette précarité des emplois des femmes, des appuis spécifiques devraient leur être accordés comme par exemple des facilités d'accès au crédit pour celles qui envisagent de développer des activités génératrices de revenus.

Il se dégage que de manière générale la situation des femmes dans le domaine de l'emploi est différente de celle des hommes, mais aussi, elle se différencie entre les femmes elles-mêmes en raison de plusieurs facteurs. Le tableau ci-dessous le confirme en tenant compte des caractéristiques socio démographiques.

Tableau 4. Occupations des femmes en RDC

Caractéristique socio- démographique

Employée

Ventes et services

Cadre/technicienne/direction

Agriculture

Groupe d'âge

15-19

20-24

25-29

30-34

35-39

40-44

45-49

0.4

0.8

0.9

1.0

0.3

0.5

00

24.9

27.6

25.0

30.6

26.4

19.1

19.6

0.5

2.0

3.6

3.4

4.7

5.6

4.4

63.1

65.1

64.0

58.8

63.4

70.1

73.5

Etat matrimonial

Célibataire

En union

Divorcée/séparée/veuve

2.5

0.3

0.6

32.9

23.0

33.2

4.1

3.2

3.1

47.3

69.0

57.0

Milieu de résidence

Urbain

Rural

1.6

0.1

52.0

10.4

6.7

1.4

28.8

85.1

Province

Kinshasa

Bandundu

Equateur

Sud Kivu

Maniema

2.4

0.4

0.1

0.3

0.1

73.0

7.5

11.8

34.8

19.5

6.3

3.0

1.4

4.2

3.7

5.4

88.4

82.6

53.8

69.6

Niveau d'instruction

Aucune instruction

Primaire

Secondaire

Supérieur

0.0

0.0

1.4

12.7

10.3

9.3

20.1

44.9

36.0

24.2

0.5

0.3

7.7

38.6

27.5

88.3

74.8

15.9

4.6

31.2

Quintile de bien être économique

Le plus pauvre

Second

Moyen

Quatrième

Le plus riche

0.0

0.2

0.1

0.9

2.0

8.5

7.7

15.6

42.9

69.8

0.5

1.1

2.2

5.1

9.8

87.9

87.8

78.3

42.9

3.6

Source : Tableau dressé à partir des données tirées dans le rapport annuel de l'EDS-RDC 2007.

Au regard de tout ce qui précède, il est à noter que si la question de Genre est au coeur des débats politiques, il n'en reste pas moins qu'elle soit prise en compte par tous les agents de développement. Ainsi, il est impérieux de tenir compte de tous les facteurs qui engendrent le déséquilibre de Genre, ou mieux de la situation défavorable des femmes congolaises dans tout programme, politique ou projet de développement.

II.2. POLITIQUES ET PROGRAMMES DE DEVELOPPEMENT FONDES SUR LE GENRE EN RDC.

Conscients des différences existant entre les hommes et les femmes, les politiques et programmes de développement congolais devraient s'efforcer de répondre aux besoins pratiques propres aux uns et aux autres, dans le cadre de la répartition actuelle des ressources et des responsabilités politiques à tous les niveaux et de la reconstruction nationale.

II.2.1. La formation des acteurs de développement sur le Genre.

Le contexte post conflit et de reconstruction nationale offre de nouvelles opportunités de la révisitation de Genre en RDC. Cette activité de formation s'avère être une activité de renforcement des capacités qui vise à accroître la prise de conscience, les connaissances et les compétences pratiques autour des questions de Genre en partageant des informations, des expériences et des techniques et en promouvant la réflexion et le débat.

Le but de la formation en matière de Genre est de permettre aux participants de comprendre les différents rôles et besoins des femmes et des hommes dans la société, de mettre à mal les comportements et structures sexuellement stéréotypés et discriminatoires, ainsi que les inégalités socialement construites, et de mettre en pratique ces connaissances nouvellement acquises dans leur travail au jour le jour.

Grâce à la formation, l'acteur de développement devrait pouvoir :

? Comprendre les différents rôles joués par les hommes et les femmes ;

? Saisir la façon dont la perception de l'égalité des sexes a évolué au fil des ans ;

? Reconnaître que les interventions gagnent en efficacité en intégrant un souci d'équité entre les sexes ;

? Déterminer les principes, avec les instruments internationaux et nationaux correspondants, qui étayent les droits fondamentaux des personnes se trouvant dans des situations d'après conflit, et être particulièrement attentif aux questions qui concernent directement les droits des femmes ;

? Faire en sorte que les droits juridiques des femmes soient compris et que des mesures adéquates soient prises pour les garantir ;

? Recenser les éléments particuliers qui caractérisent une démarche axée sur l'égalité des sexes à tous les niveaux ;

? Utiliser des instruments et cadres spécialement conçus pour réaliser une analyse par sexe et collecter des données pour avoir une idée plus précise du cadre dans lequel les femmes et les hommes se meuvent ;

? Mettre au point des mécanismes garantissant la prise en compte des ressources et des besoins des femmes et des hommes à tous les stades de la planification et de la gestion des programmes et au niveau des systèmes d'évaluation ;

? Concevoir des stratégies pour soutenir les femmes confrontées à des situations nouvelles (familles monoparentales, mères célibataires, veuves) ;

? Intégrer dans toutes les phases de la programmation, une démarche axée sur l'égalité des sexes ;

? Améliorer l'efficacité des programmes de relèvement et développement grâce à une prise en compte adéquate des besoins et des ressources de tous les membres de la population ciblée ;

? Encourager chaque membre de chaque équipe à faire en sorte d'intégrer dans son domaine de compétence les préoccupations des femmes et des hommes.

II.2.2. La prospective du développement sur le Genre en RDC.

Il s'agit ici de s'orienter intellectuellement et politiquement, au sujet de la différence homme/femme, dans les conceptions culturelles, dans le poids historique du retard imposé à la femme et dans les conditions de fonctionnement de la femme (tâches maternelles, domestiques, etc.,) qui l'empêchent de fonctionner dans les affaires publiques comme l'homme, ainsi que dans les politiques et stratégies de développement.

Comment faire de sorte que la maxime de promotion de genre soit praticable dans les créations et les consommations culturelles ? Comment faire pour que le retard historique soit éradiqué. Comment faire pour que les tâches maternelles et domestiques cessent de garder la femme en situation d'inégalité par rapport à la participation dans les affaires publiques ?

La structuration du champ social de Kindu et sa configuration en termes d'accès des femmes ou de certains groupes sociaux spécifiques aux différentes ressources et aux espaces de prise des décisions, est la résultante du jeu d'intérêts et des normes sociales dont la trajectoire va de l'époque traditionnelle à l'époque moderne, en passant par la colonisation

II.3. REGARD SUR LES MOUVEMENTS FEMININS CONGOLAIS

Les mouvements féminins congolais, en raison de leur proximité avec les populations, jouent un rôle fondamental et déterminant dans la lutte pour la promotion féminine et du Genre. Ils permettent d'intensifier le dialogue entre l'Etat et les populations à travers le plaidoyer et la sensibilisation, la vulgarisation et le suivi de l'application effective des textes juridiques nationaux et des traités internationaux sur les droits des femmes, ainsi que l'identification des obstacles qui entravent la pleine jouissance de ces droits.

Cette indentification des obstacles qui entravent la jouissance de droits des femmes a progressivement pris conscience de son rôle au fil du temps et ses actions évoluent avec le contexte politique, économique et socio politique de la RDC. Ses configurations ne sont pas restées les mêmes, et elle peut être identifiée à travers plusieurs formes dans la trajectoire historique de la RDC.

Avant 1960, en la période coloniale, émergent les mouvements syncrétiques et messianiques en opposition à la politique coloniale. Ceux-ci seront relayés par la jeune élite congolaise à la veille de l'indépendance. Outre ces mouvements, il est à noter qu'il a aussi existé des associations civiles non-revendicatives à caractère culturel et tribal. Celles-ci subsistèrent jusqu'après l'indépendance, entre 1960 et 1965 et se transformèrent, surtout en ce qui concerne les associations tribales, en partis politiques.

Sous le régime dictatorial de Mobutu, entre 1965 et 1990, l'instauration du Mouvement Populaire de la Révolution comme parti unique conduit à l'hibernation et à l'inféodation des associations, encore subsistantes après l'indépendance. Tout congolais était membre du MPR et devait par ce fait obéir à l'idéologie unique du Parti-Etat. Il se développa un militantisme de soutien en cette période.

La succession des régimes répressifs et de conflits armés où les injustices historiques et violations systématiques des droits humains ont prévalu, l'incapacité de l'Etat à les résorber et à assurer aux populations avec qui il forme système. La jouissance substantielle de la citoyenneté, enclenche l'alternative non étatique de gestion de la vie sociale.

II.3.1. Les mouvements des femmes pendant la période coloniale jusqu'en 1965.

Une périodisation de l'évolution des mouvements des femmes en RDC depuis l'époque coloniale sera l'occasion de mettre en relief les moments déterminants de leur participation politique et certains enjeux auxquels elles font face aujourd'hui.

Les femmes ont exploité le changement de contexte politique post conflit pour promouvoir leurs droits et se rendre plus visible dans les espaces de prise de pouvoir, mais sans pour autant être arrivées à des résultats satisfaisants.

Les dynamiques sociales, économiques et politiques tant au niveau national qu'international ont contribué à mettre en exergue ou encore à constater le déséquilibre de genre, dans la mesure où les logiques de développement insistaient déjà sur le rôle potentiel de la femme comme actrice, instrument et moteur du développement au même titre que l'homme.

L'inadaptation à l'évolution globale, les repères de développements extravertis, l'internationalisation du féminisme, etc. ont suscité une prise de conscience des acteurs sociaux et politiques au niveau national pour un processus d'intégration de la femme dans plusieurs sphères de la vie nationale.

La prise de conscience d'une oppression spécifique est au coeur de la lutte que les femmes à travers le monde mènent. Cette prise de conscience a permis un début de repositionnement de la femme dans les rapports selon le genre.

Avec l'évolution des contextes, les femmes prennent conscience de leurs conditions, et par le biais des associations, vont tenter de lutter pour leurs droits en tant que « citoyens » et de les conquérir. Elles se considèrent dans ces conditions comme « premiers forgerons » de leur propre statut et de leur dignité dans la société.

Les actions collectives, menées souvent du dehors, ne suffisent pas pour assurer pleinement la promotion des femmes. Elles sont ainsi de plus en plus conscientes que la véritable émancipation vient, avant tout, de dedans, des femmes elles-mêmes.

A l'aube de l'indépendance, le statut de la femme est resté presque identique à celui d'avant 1960. C'était la pérennisation d'une société patriarcale, dans laquelle la gestion de la chose publique et des structures sociales était dans la plupart des cas assurée par l'homme.

Les initiatives prises par les femmes ont permis à certains moments la connexion des femmes pour un idéal commun qu'est la promotion de genre. Seulement des défis majeurs ont émaillé la lutte des femmes avec comme conséquences, l'effondrement de certains piliers pour plus d'efficacité dans l'action. L'auto - prise en charge des femmes dans ce processus est manifeste car par leur prise de conscience, elles se sont pensées autrement, ont participé à côté de l'Etat et des organisations internationales à refaire le genre et ont activé des stratégies pour que soient prises en compte leurs revendications.

Il sied donc de souligner qu'en RDC, certaines initiatives étaient entreprises par les femmes pour leur participation politique dès l'époque coloniale. Les femmes ont fourni un effort pour revendiquer leurs droits, mais ne se sont pas vues représentées lors de grands événements de 1960.

Quelques Associations (71(*)) féminines ont marqué de leurs empreintes la trajectoire historique des mouvements féminins en RDC.

- Femmes ABAKO (FABAKO) : c'était une section féminine de l'ABAKO. Celle-ci fut fondée par Madame Julienne MBENGI en 1958. Le but proposé restait l'émancipation de la femme.

- l'Union Nationale des femmes Congolaises : fondée en  février 1960 par Madame DJAMBO et présidée par Madame Joséphine SOLDE. Ses objectifs étaient : promouvoir l'entente et l'unité entre les femmes congolaises, mobiliser l'opinion, développer le sentiment de communauté parmi les femmes congolaises, la formation civique, patriotique, sociale et politique.

- Le Groupement pour l'Emancipation de la Femme Africaine (GEFA). Créée en 1958 après la tenue du congrès de la femme africaine à Lomé du 15 au 18 juillet 1958, cette association fut dirigée par Pauline LISANGA. Les buts poursuivis étaient l'encadrement des jeunes délinquants, l'aide aux vieillards et aux orphelins, la formation des femmes pour l'action politique.

- Le Mouvement des Femmes Nationalistes : c'est une section du Mouvement National Congolais fondé en Février 1960 par Mademoiselle Sonise KAPAMBA. Il prônait l'émancipation de la femme congolaise. En 1964, les femmes nationalistes réclamèrent la participation de la femme aux élections.

- L'Union Progressiste Féminine Congolaise créée à Léopoldville en Mars 1960 par Mademoiselle Francine TSIMBA.

- En 1965, différentes associations féminines se sont regroupées pour former l'Union Révolutionnaire des femmes du Congo. Elle ne fit pas long feu à cause des divergences qui surgirent entre leaders de différentes associations. Madame Sophie KANZA fût sollicitée pour régler les conflits de leadership et proposa une base de l'unification qui fût nommée l'Union Nationale des Femmes Congolaises avec comme activité : l'éducation civique, la couture et l'alphabétisation (72(*)).

La particularité de ces mouvements réside dans le fait que les femmes congolaises étaient en contact avec les femmes d'autres pays africains qui étaient en avance par rapport à elles, notamment les femmes Togolaises, Nigérianes et Ghanéennes. Ils ont servi de cadres d'apprentissage politique pour certaines femmes qui exercèrent des postes de responsabilité pendant la deuxième République.

II.3.2. Les mouvements des femmes sous le régime de Mobutu.

Le Mouvement Populaire de la Révolution, né le 20 mail 1967, incorpora en son sein toutes les présidentes des associations féminines. Ces dernières en furent les premières propagandistes.

De 1991 à 1993, les associations féminines étaient beaucoup plus orientées vers la lutte pour la survie. A cause de la crise économique grandissante, les femmes ont réagi en exerçant des métiers de survie, et se regroupaient généralement pour des raisons de production : la recherche du capital. C'est le cas des mamans  libangamoziki 100 Kilo, à Kindu, nous pouvons citer le cas des mamans de « tout puissant Mazembe », etc.

A partir de 1994, les associations se regroupaient selon les catégories socioprofessionnelles pour la défense des intérêts non seulement liés à la survie, mais aussi d'ordre professionnel. Des revendications pour plus de justice entre hommes et femmes étaient formulées de temps en temps.

Par la suite, les femmes se sont montrées de plus en plus combatives à travers des réseaux et cartels pour un militantisme de responsabilité dans la sphère publique et la reconnaissance de leurs droits en tant que citoyennes de la RDC, au même titre que les hommes. C'est dans ce cadre qu'est né(e) :

- Le Conseil National des femmes pour le Développement (CONAFED) crée au lendemain de la Conférence Nationale Souveraine qui s'est fixé comme objectifs d'encadrer ses membres au travers des séminaires et des campagnes d'éducation, de conscientisation et de responsabilisation sur le développement ; de lutter pour la reconnaissance et la défense des droits reconnus à la femme en veillant à l'application des textes légaux ou statutaires y relatifs.

- L'Union Nationale des Femmes (UNAF). Créée le 07 Juillet 1993 à l'initiative des femmes déléguées de toutes les provinces aux assises de la Conférence Nationale Souveraine, avec comme objectif : la défense des droits et intérêts de la femme, la promotion socioculturelle de la femme, la participation qualitative et quantitative de la femme à tous les niveaux du développement harmonieux. Elle regroupait plus de 250 associations.

- Le Réseau Action Femme (RAF). Créé en 1994 dont l'objectif était l'épanouissement total de la femme et de la jeune fille, ce réseau a dans son actif remis un mémorandum au gouvernement de transition pour que soient révisés certains articles du code de la famille relatifs à la succession, à l'incapacité juridique de la femme, etc.

Il faut noter cependant que toutes ces structures n'ont jamais installé à Kindu leurs bureaux ou antennes de la représentation.

II.3.3. Les mouvements des femmes pendant la période de 1997 à 2011.

A noter que la recrudescence des mouvements féminins, aussi bien que de la société civile dans son ensemble correspond à l'annonce de la libéralisation du champ associatif et par la suite à la période de conflit et post conflit qui en ont été favorables. 90% d'organisations non gouvernementales des femmes et de leurs plateformes ont été créés entre l'intervalle de temps allant de 1998 à 2004. Ce lien entre la période de crise et l'émergence des associations des femmes, traduit beaucoup plus le besoin et le souci partagés par les femmes de construire la paix.

II.4. L'IMPLICATION DES FEMMES CONGOLAISES DANS LE COMBAT POLITIQUE DE 1990 A 2011.

La période post conflit a été un moment de participation accrue, tant de la société civile dans son ensemble, que des organisations féminines au processus électoral et à celui de restauration de la paix. Les faits catalyseurs de cette prise de conscience collective selon les propos de 78 sur 100 personnes enquêtées soit 78% sont entre autres :

- Le déclenchement du processus démocratique annoncé le 24 avril 1990 par le président Mobutu, avec la libéralisation de la vie associative et des partis politiques

- La reprise de la coopération structurelle vers les années 2000

- Les effets des guerres entre les combattants « Mai Mai » et les troupes du RCD ;

- Le processus de paix

- L'instauration d'un nouvel ordre politique : le processus électoral

II.4.1. Le processus démocratique

L'émergence structurée de la société civile en RDC est en relation avec la crise de l'Etat et les revendications démocratiques. La démocratisation annoncée par le régime Mobutu a permis avec la tenue de la Conférence Nationale souveraine en août 1991, la structuration de la société civile congolaise. L'idée de celle-ci se popularise et se consolide. Ce moment a été une opportunité pour plus d'implication de la société civile dans la vie politique nationale.

Concrètement, cette société civile regroupa les églises, les syndicats, les corporations socioprofessionnelles, les associations féminines, les associations sportives et culturelles, les mouvements des jeunesses, les sociétés savantes, les mutuelles super tribalistes, les sociétés patronales, et surtout les ONG de développement.

Les associations congolaises sont relativement jeunes. La loi N°004/2001 du 20 juillet 2001 libéralise complètement le champ des associations sans but lucratif et consacre la nécessité de faire participer ses institutions à la conception ainsi qu'à l'exécution des politiques publiques.

Le nombre de syndicats des travailleurs passe de 1 en 1990 à 112 en 1991et à près de 1300 en 2003. Il n'y avait qu'un syndicat patronal avant 1990 ; en 2003 on en comptait au moins trois. Les O.N.G. effectivement recensées étaient de 450 en 1990, de 1.322 en 1996 et de 2.500 à 4.700 en 2003, soit 80 % des composantes de la société civile créées après 1990(73(*)).

Tableau 5: Effectifs des ONG en RDC de 1990 à 2003

ANNEE

NOMBRES DES ONGS

MILLE NEUF CENT NONANTE

450

MILLE NEUF CENT NONANTE SIX

2500

DEUX MILLE TROIS

4700

Source : Élaboré sur base du répertoire des ONG dans CNONG/UNICEF (Rapport de l'an 1990)

Graphique N°1: Visualisation des effectifs des ONG en RDC de 1990 à 2003.

Après le discours de Mobutu d'avril 1990, plusieurs associations de droits de l'homme ont été créées avec comme finalité d'aider la population à s'impliquer dans le processus de démocratisation et à défendre les droits civiques et politiques. Dans ce même élan, on a senti à partir de la période post conflit, la volonté plus manifeste des femmes de la ville de Kindu à lutter pour un Etat de droit, pour la paix et pour l'égalité des chances hommes- femmes.

II.4.2. La reprise de la coopération structurelle

Des forces exogènes ont aussi marqué de leur influence les interactions politiques, économiques et sociales entre divers acteurs pendant la période post conflit. L'influence des institutions financières internationales, et des grandes puissances, en direction des États et particulièrement ceux de pays sous-développés au Sud a permis une recomposition des rapports sociopolitiques et ont contribué à l'émergence et à la prise en compte de la société civile comme nouvel acteur dans la gestion de la vie nationale.

La société civile apparait comme un nouvel espace social où se construisent des nouvelles dynamiques pour la résorption de la crise sociale, et donc le lieu de construction des nouvelles ressources, stratégies et formes politiques de régulation, mais aussi comme le lieu où se construisent les dynamiques en vue de l'émergence de la démocratie, qui est l'une des conditions évoquées par les institutions internationales pour garantir les bonnes relations de partenariat.

La reprise de la coopération structurelle avait comme entre autres exigences, l'implication de la société civile dans le processus de négociation, de la mise en oeuvre et d'évaluation des politiques de coopération.

L'accord de Cotonou le consacre et donne davantage de possibilité de représentation de la société civile dans les sphères où se gèrent les questions de développement national. Cet accord qui fut signé en juin 2000 pour les relations entre l'Union européenne et les pays ACP avait comme principes fondamentaux :

- L'égalité des partenaires

- La participation de nouveaux partenaires (acteurs non étatiques, organisations de la société civile et secteur privé)

- Le dialogue et l'engagement mutuel

- La différenciation et la négociation

Ainsi, la société civile est introduite comme une des composantes de la politique de coopération internationale, mais qui n'était pas vraiment organisée au début. L'impact de la participation de la société civile se fait aussitôt ressentir car en 1990, les organisations de la société civile étaient représentées à 21%, mais en 2003, elles ont été représentées à 72% des projets financés par la Banque Mondiale.

II.4.3. Les faits de guerres : atrocités et violences dans la ville de Kindu

En dépit de l'ouverture politique, la déliquescence effrénée de l'Etat va jusqu'aux guerres d' « agression » de 1996 et 1998. Cette vague de guerres aura causé la mort d'environ 4,7 millions de personnes, des problèmes nutritionnels de plus de 16 millions de personnes, les conditions d'hébergement difficiles, les épidémies de diverses natures ainsi que d'autres circonstances particulières telles que des viols massifs sur les femmes et les filles. 

La société civile non seulement témoignera et informera l'extérieur sur la détresse des populations, mais entreprendra aussi des actions assez visibles pour la fin des hostilités. Le peuple s'octroie ainsi la tutelle d'un pouvoir de conjoncture des églises, des ONG de défense des droits de l'homme, des associations féminines, et autres acquises à leur cause.

La portée de ses interventions était liée à la situation désastreuse de la période de guerre que traversait la population de la ville de Kindu, à savoir le pillage des ressources naturelles, les massacres des populations, la répression militaire, les viols, etc.

Compte tenu de l'Etat de guerre dans lequel se trouvait la République Démocratique du Congo, la coordination de la société civile du Maniema avait mis un accent particulier sur la résolution pacifique et la prévention des conflits, sur la promotion de la paix et sur le processus de normalisation de la vie publique par les élections libres et transparentes.

Toutefois, des déterminants à la fois sociaux, économiques et politiques influent de temps en temps sur la configuration de cette société civile qui reste souvent hybride.

Ainsi, les déterminants sociaux ont dans la plupart des cas rapproché la population de la société civile, et ce, essentiellement pendant la guerre, et ceux économiques, et politique sont généralement les sources de l'inféodation, de l'instrumentalisation et de la lutte pour le positionnement de certains acteurs de la société civile dans l'après-guerre.

Les négociations initiées dans une conjoncture politique et économique polluée ont déterminé la société civile dans des proportions considérables. Supposée avoir une meilleure connaissance de la situation des populations, elle a contribué tout de même à la production d'argumentaires qui ont servi à la prise de certaines mesures bénéfiques à la République Démocratique du Congo. Seulement, ce souci de l'intérêt collectif s'est vu masqué par la quête du pouvoir qui a plongé les acteurs sociaux dans une compromission et qui les a dépouillés dans une certaine mesure de leur crédibilité au niveau de la population.

La société civile du Maniema est entrée ainsi dans une logique à double facette : à la fois elle luttait pour la défense des droits des citoyens, mais aussi luttait pour une représentation politique des femmes. Certains responsables de la société civile du Maniema ont passé à la politique active et participent aussi à l'instabilité sociopolitique.

II.4.4. Le processus de paix

Les affres de la guerre n'ont pas laissé la société civile de la RDC en général et celle de la Province du Maniema en particulier, indifférente. Les lourdes conséquences d'ordre social, politique économique et humain engendrées par les conflits, ont suscité une ouverture pour des négociations dès 1998. La société civile s'est engagée, tout comme les autres acteurs impliqués ou non dans la guerre, à trouver des voies de sortie pour une paix durable. Toutes les forces vives se sont mobilisées pour les négociations de paix. Certaines personnes physiques se sont engagées activement pour que le Maniema retrouve aussi la paix, on peut citer les figures les plus célèbres comme : les acteurs politiques de la transition, originaires du Maniema et anciens animateurs de la Société civile du Maniema. Il s'agit de : TABEZI PENE MAGU, CHOMA NYEMBO, Catherine AZIZA, Monseigneur Paul MAMBE MUKANGA, Emile DIMOKE, ZAKUANI MAKU, BITINGO, etc.

Un grand travail de plaidoyer fut alors entrepris par la société civile du Maniema au niveau local, national et international pour l'avènement de la paix non seulement au Maniema, mais sur toute l'étendue de la République. En 2000 la société civile, notamment celle de la zone sous occupation des Mai Mai avait suffisamment documenté les mécanismes et les réseaux de pillages internationaux nés de la guerre. Elle sollicitait la communauté internationale d'y mettre fin.

Déjà depuis septembre-octobre 1998, la Société Civile du Congo se réunit et élabora ``l'Agenda pour la paix''. Certaines Associations féminines du Maniema ont participé à l'élaboration de cet Agenda. Ce document préconisait la voie des négociations pour régler les problèmes de fond du Congo par la voie politique plutôt que par la voie des armes. Par la suite, la Campagne Nationale pour une Paix Durable (CNPD) fut lancée.

La CNPD mit sur pied un Conseil d'Orientation de 18 personnes représentant un large éventail des composantes de la Société Civile.

Il convient de souligner qu'en ces temps troublés de guerre et de partition de fait du pays, la Société Civile avec l'appui de partenaires extérieurs a pu maintenir une activité à caractère national. Plusieurs rencontres furent, en effet, organisées avec la participation de toutes les Provinces, y compris les Provinces occupées et ce malgré les détours et les tracasseries auxquels furent soumis les animateurs de la Société Civile. Son Comité de suivi est resté en contact avec toutes les coordinations provinciales.

La CNPD a mené des actions sur l'ensemble du territoire national, des réseaux des droits de l'homme purent organiser des rencontres nationales, le CNONGD a tenu son Assemblée générale avec la participation de tous les CRONGD ; WOPPA, un réseau de femmes congolaises pour la paix, a réuni des délégations de femmes venues de toutes les Provinces.

Dans cet élan d'initiatives de la société civile, une nouvelle dynamique a vu le jour tant à Kinshasa qu'à Kindu avec comme mission,  la défense et la promotion des droits des populations congolaises et la paix. Dans ce contexte avaient été signé les accords de Lusaka, dont la suite a donné lieu au Dialogue Inter Congolais de Sun City, l'Accord Global et Inclusif à Pretoria.

En ce qui concerne les femmes, le souci de la paix a été l'un des déterminants de leur implication massive dans le processus électoral. Sur 100 femmes interrogées à Kindu par exemple, 72 disent avoir voté pour mettre fin à la guerre et arriver à un changement. La paix fut ainsi un des enjeux de la participation politique des femmes.

II.4.4.1. Participation des femmes aux négociations de paix.

Pour sortir de cette guerre, les femmes ont décidé de s'impliquer fortement dans la résolution du conflit, en participant activement aux diverses négociations pour l'instauration de la paix dans le pays. Pour faire entendre leurs voix, elles ont formé un front commun pour dire non à la guerre, non à l'agression du Congo par les pays voisins, non au pillage systématique des ressources naturelles et minières du pays, et oui à la cessation des hostilités, oui à la protection des vies humaines, au dialogue entre forces politiques et sociales congolaises et à la paix.

Sur toute l'étendue de la RDC, la participation des femmes aux négociations était faible : 9% à Gaborone, 16% à Sun City, 30% aux négociations informelles de Pretoria et 13% (voir liste définitive) au Dialogue inter-congolais de Pretoria qui a conduit à la signature, le 17 décembre 2002, de l'Accord Global et Inclusif. Malgré cette faible représentativité, les femmes se sont solidarisées pour mener une action commune et faire du lobbying afin de faire aboutir les objectifs du Dialogue et surtout de prendre position au moment du blocage des négociations. Du 23 au 25 septembre 2004, les femmes congolaises ont pris part, à Kigali, à la réunion des femmes des Grands Lacs pour parler de la marginalisation des femmes. En ce qui concerne la vile de Kindu, deux femmes seulement ont participé à ces négociations, dont une du RCD et l'autre de la Société Civile du Maniema. Elles y ont surtout insisté sur le fait que les femmes sont des actrices de la paix, pas seulement des victimes, et qu'elles sont un facteur de stabilisation.

Elles ont élaboré une déclaration qui servit de document préparatoire à la Conférence sur la paix, la sécurité et le développement dans la Région des Grands Lacs. Ces femmes ont joué un rôle important dans les processus de paix, notamment dans le Dialogue Inter Congolais.

Une grande mobilisation et structuration de la société civile s'est faite en amont du DIC, contrairement aux autres cadres de négociation de la paix. Une des femmes enquêtée répond : « nous avons fait notre Dialogue Inter Congolais au féminin, avant le Dialogue Inter Congolais proprement dit, mais en dépit de tous nos efforts, les femmes sont souvent reléguées au second plan ».

Cela se justifie par le fait que, dans certains cas, les femmes n'ont joué qu'un rôle secondaire sans participer aux négociations de paix proprement dites. Cela fut vécu avec les accords de Lusaka où aucune femme n'avait participé, mais pour lesquelles deux femmes ont apposé les signatures sur l'accord pour la partie Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD). Elles étaient donc complètement écartées des négociations.

Un regard sur le processus du Dialogue Inter Congolais permet de cerner le rôle effectivement joué par les femmes dans le processus de paix.

II.4.4.2. Les efforts des femmes en amont du Dialogue Inter congolais

Dans le processus du DIC, la dynamique des femmes a impulsé un plus grand engagement des femmes. Leur représentation ainsi que leur participation ont été beaucoup plus visibles à cet effet. L'objectif principal du D.I.C a été l'établissement d'un nouvel ordre politique et la réconciliation nationale. Pour ce faire, il a fallu une mobilisation au profit de la construction d'une culture de la démocratie et de la paix.

Conscientes des atrocités subies pendant la guerre, les femmes congolaises, principales victimes, se sont organisées à s'impliquer de façon effective dans le processus de paix.

Par l'esprit même du D.I.C, hommes et femmes devaient être représentés, car l'exclusion des femmes, comme par exemple, leur absence de la table des négociations, a souvent occasionné des conséquences regrettables dans le domaine de la justice sociale, du développement, de la réconciliation et du redressement économique.

Pour marquer leur implication dans le D.I.C., les femmes se sont mobilisées en vue de faire entendre leur voix sur la situation préoccupante du pays en rapport avec l'instauration d'une paix durable, la reconstruction de l'Etat et l'accès des femmes à la gestion de la chose publique, pour leur représentation significative.

Leur pression a réussi à faire entendre leur voix au cours des séances plénières et permis d'insérer notamment ce qui suit dans l'Accord Global et Inclusif :

Pour garantir une transition pacifique, les parties participent à la gestion politique durant la transition. Les institutions qu'elles mettront en place durant la transition doivent assurer une représentativité appropriée des onze provinces du pays, des différentes sensibilités au sein des forces politiques et sociales en présence. En plus, il faudrait prévoir une représentativité des femmes à tous les niveaux de responsabilité.

La constitution sur laquelle l'Accord Global et Inclusif a débouché stipule dans le préambule :

? Nous, les délégués des composantes et entités au dialogue inter congolais ; réunis en plénière...Déterminés à garantir les libertés et les droits fondamentaux du citoyen et, en particulier, à défendre ceux de la femme et de l'enfant...

? Le point III.39 de cette constitution stipule ce qui suit : le travail est un droit...Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de son sexe, de ses opinions ou de ses croyances... »

a. Les femmes congolaises au Dialogue Inter Congolais

Tableau N° 6: Représentation des femmes au Dialogue Inter Congolais

Composante.

Total

Femme

% Femme

Gouvernement.

67

12

7

RCD

57

9

13

MLC

67

6

8,9

Mai- Mai

8

0

0

RCD- K/ML

11

1

6

Forces vives

65

13

18

Opposition Politique.

68

2

2,8

Total

333

43

11

Source : La toute première liste de participants élaborée par composante

Il ressort de ce tableau les réalités selon lesquelles, 43 femmes ont représentées toutes les congolaises au DIC contre un effectif de 333 hommes, soit 11% seulement. Face à ce résultat, nous nous attachons aux propos de nos enquêtées qui ont déclarées que les textes garantissant les droits des femmes existent en RDC, mais ils ne sont pas appliqués dans la vie pratique. En outre, sur les 43 femmes présentes à ces assises, le Maniema était représenté seulement par 2 femmes soit 0,53% par rapport à tous les participants.

Graphique N° 2: Visualisation de la représentation des femmes participantes au Dialogue Inter Congolais

Cette liste est indicative de la dose de volonté affichée par différents acteurs pour une implication des femmes aux assises de Sun City. Cette volonté a été très faible et a poussé les femmes à mettre en place une stratégie alternative, qui consistait en la cooptation de 37 femmes expertes aux côtés des femmes participantes.

b. Stratégies féminines dans les processus de paix

b.1. Au niveau national

Plusieurs ateliers et manifestations ont ainsi été organisés à cette fin. Nous ne saurons les énumérer tous, mais à titre illustratif, il est nécessaire d'en épingler quelques-uns.

· Atelier du 06 au 09 février 2002

Avec l'appui des différentes organisations non gouvernementales et celles des organisations internationales telles que l'UNIFEM, les femmes de la zone ouest dont les zones étaient sous contrôle gouvernemental avaient tenu à uniformiser leurs points de vue pour se constituer un cahier de charge, car chaque province en avait un.

A l'occasion, plusieurs recommandations avaient été faites aux parties en guerre, à la facilitation du D.I.C., et aux femmes elles-mêmes. Ces dernières devraient sous l'égide de leurs leaders, apporter leurs contribution afin d'arriver au consensus et à la réconciliation nationale lors du D.I.C.

· Atelier du 15 au 18 février 2002

Pour pallier l'absence des femmes se trouvant sur la partie sous occupation, il a été impérieux de convoquer une réunion pour l'harmonisation des cahiers de charges. De ce fait, les femmes congolaises représentant toutes les provinces au D.I.C se sont fixées comme objectifs à Nairobi :

? D'harmoniser leurs cahiers de charge ; ce qui déboucha sur la déclaration et plan d'action de Nairobi » ;

? De renforcer les capacités en négociation et résolution pacifique des conflits.

Elles ont aussi organisé des activités telles que :

? La mission de solidarité pour la paix. Plusieurs ONG y avaient pris part, pour le cas de la ville de Kindu, l'ONG MWANGA et AFILMA ont participé également, mais une seule femme a pu représenter toutes les femmes du Maniema contre 8 hommes qui avaient aussi représenté le Maniema.

? La conférence sur les enjeux politiques et le rôle de la femme dans la consolidation de la paix. Le WOPPA introduit en 1998, le plaidoyer pour la paix.

? Le lobbying : déplacement de certaines femmes à l'étranger pour expliquer la situation de guerre en R.D.Congo, etc.

· La création du Caucus des femmes

Les femmes ont développé plusieurs stratégies qui pouvaient leur permettre de s'octroyer les droits dont elles se réclamaient. L'aboutissement en a été la création du Caucus des femmes. La capitalisation des relations interpersonnelles et l'expertise féminine avaient été mises à profit. L'un des aspects positifs que l'on peut reconnaître au caucus est qu'il est resté le seul cadre, à travers lequel, toutes les composantes se retrouvaient à travers les femmes et pouvaient encore échanger.

On convient de retenir à ce propos que deux défis majeurs étaient à relever :

? Le caucus devait rester neutre et apolitique. Il devait éviter de soutenir l'une ou l'autre tendance, tout en continuant à dénoncer d'éventuelles exactions commises par différentes parties en conflit contre les femmes et la population.

? Il devait maintenir sa cohésion interne et éviter des luttes intestines de leadership qui pouvaient le mettre en danger en tant que mouvement de paix et de changement social.

Ainsi, chaque femme avait à opérer un choix raisonné en cas de divergence entre la conscience collective et son appartenance politique. Bien que numériquement la représentation ait été faible par rapport à celle des hommes, les femmes congolaises y ont joué un rôle très important. Une forte synergie des femmes déléguées des composantes et expertes s'était mise en place autour d'un objectif commun : le succès des assises.

La première manifestation du Caucus à Sun City fut la célébration de la Journée Internationale de la femme. Les femmes sont entrées dans la plénière, vêtues des pagnes offerts par le gouvernement et le RCD, indifféremment portés par les unes et les autres et rassemblées derrière un calicot déclarant : « Les femmes congolaises unies pour la restauration de la paix au Congo ». Cinq autres banderoles suspendues sur les murs dans la salle arboraient des messages d'unité et des revendications des femmes sur la concrétisation de leur quota de 30% dans les instances décisionnelles.

La déclaration de Nairobi et le plan d'Actions des femmes étaient mis devant chaque participant à la plénière. Les femmes se sont avancées, portant de petits fanions bifaces (en français et en anglais) arborant les messages de paix et scandant le chant de paix : « Notre Congo sera toujours uni ». Leur champ fut peu à peu repris par l'assemblée qui s'est levée pour accueillir la procession des femmes. Suite à cette action du 08 Mars, un souffle de modération a persisté tout au long des travaux de cette journée où devaient être lues les politiques générales des délégations.

Les premières informations émanant de la plénière ont révélé que toute l'assemblée était profondément marquée par la teneur du message des femmes. Selon un leader d'une des parties belligérantes rapporté par la presse, « Tout extrémisme et toute virulence et même l'indifférence étaient inconcevables, déplacés et irresponsables après l'action des femmes en plénière ».

Après cette première manifestation le 8 Mars, le Caucus des femmes s'est employé à organiser des rencontres et des entretiens aussi bien formels qu'informels avec les leaders ou les délégués de différentes composantes au Dialogue à savoir : le M.L.C., le MPR, le Gouvernement, l'UDPS, le RCD/GOMA, l'Opposition non armée et les commissions du DIC. Un seul point au centre des entretiens : montrer à chaque composante sa responsabilité dans la crise en R.D.Congo et demander son engagement personnel et de sa famille politique pour sortir de la crise. Tout au long des travaux, le Caucus des femmes a fait le lobby auprès des composantes impliquées à travers des entretiens exclusifs tout le temps qu'il s'observait un blocage du processus. Cela a permis de lever chaque fois le blocage.

Les femmes déléguées des partis politiques avaient des difficultés à défendre à la fois les intérêts du parti et ceux du caucus. Elles avaient à prendre en compte les projets de société de leurs partis respectifs et le plan d'action de Nairobi. Ce qui ne leur rendait pas la tâche facile.

Après le DIC, le Caucus des femmes devait faire face aux défis de sa pérennisation. La lutte de leadership et l'influence des tendances politiques ont vite rattrapé cette structure qui s'est éclatée avant le moment stratégique électoral.

En ces débuts, le Caucus des femmes était considéré comme structure ponctuelle d'action en des moments importants de la vie nationale. Par la suite, la volonté d'institutionnalisation et de restructuration du Caucus par une frange des femmes a conduit à des malentendus. Pour ces femmes, une structuration du caucus à des fins de continuité de l'action féminine s'avérait indispensable, ce qui ne fut pas l'entendement d'autres femmes qui voyaient en cela un détournement de l'objectif du « Caucus des femmes originel ».

Une crise de légitimité du « Caucus, nouvelle formule » s'installe. Ce fut le début de l'éclatement du Caucus des femmes. Il est à noter que ces tendances à des crises de légitimité sont l'une des causes de l'inefficacité des actions féminines. Ainsi, en dépits d'expériences louables des femmes, celles-ci restent difficilement capitalisables car des ruptures d'actions interviennent par désengagement de certaines en plein parcours stratégique.

Pour pallier le manque de consensus autour du Caucus des femmes institutionnalisé, d'autres femmes ont pris l'initiative de créer le Cadre permanent de concertation des femmes : CAFCO. Là encore, le consensus des femmes autour de sa légitimité reste toujours mitigé. Ce qui crée problème sur l'émergence d'une solidarité féminine pour une lutte commune.

b.2. Au niveau des provinces

Dans la province du Maniema, précisément dans la ville de Kindu, le souci de contribuer à la défense des droits des femmes et d'apporter un plus à la construction de la paix, a fait que les femmes se regroupent selon la profession comme les femmes journalistes et les femmes juristes respectivement en Association des Femmes des Médias du Maniema, « AFEM-MA » et en Association des Femmes Juristes du Congo « AFEJUCO » ; et, selon les confessions religieuses comme la Fédération des Femmes Protestantes « FFP », l'Association des Femmes Musulmanes pour le Développement « AFEMD », le Comité Diocésain des Femmes « CDFE » pour les femmes catholiques. Toutes ces dynamiques ont eu comme dénominateur commun la recherche de la paix et la promotion du genre.

Pour être plus fortes et agissantes, ces organisations de femmes de différentes idéologies et de différentes tendances se sont regroupées en des plateformes comme le Collectif des Femmes Agissant en synergie. Ces organisations et plateformes des femmes se sont progressivement érigées en des cadres de renforcement des capacités, d'échange d'expérience et d'expression politique pour les femmes au Maniema.

Outillées, les femmes se sont impliquées dans la recherche acharnée de la paix à travers les dénonciations des violations des droits humains, l'organisation des marches pacifiques, l'élaboration des pétitions, mémorandums et des lettres ouvertes visant les décideurs locaux, nationaux et internationaux, ont offert, à l'échelle provinciale et internationale, l'exemple d'un nouvel élan et d'une nouvelle approche de lutte pour la paix.

Les organisations locales des femmes à la base, ont mis en oeuvre des stratégies de consolidation de la paix à travers leurs plates-formes et associations. Il s'agit notamment de la réconciliation intercommunautaire et intracommunautaire et du maintien du dialogue avec les différents représentants locaux des composantes signataires de l'Accord Global et Inclusif de Sun City.

Cela a favorisé la cohabitation pacifique des groupes antagonistes aussi bien intra qu'intercommunautaires dont les conflits sont survenus du fait des guerres à répétition. Pour ce faire, à KASONGO et à KABAMBARE, les femmes émanant de différents groupements, ethnies, couches sociales, tendances et idéologies ont mis en oeuvre des plateformes hétérogènes au travers desquelles elles ont opéré pour consolider la paix.

Ces plateformes des femmes qui étaient opérationnelles en milieux aussi bien urbains ( telles que le Caucus des femmes du Maniema pour la paix) que ruraux (à titre illustratif, les comités d'alerte pour la paix, les clubs d'écoute des femmes) se sont révélées également des cadres de revendication et de plaidoyer où les femmes ont proposé des édits, signé des pétitions et mémorandums adressées aux différentes composantes au DIC et d'autres acteurs politiques locaux, nationaux et internationaux aux fins de les interpeler et de les influencer à respecter leurs engagements à reconstruire le pays et à promouvoir une paix durable. « La paix n'a pas de prix, c'est la devise que nous avions pendant la transition.

Nous devrions user de tout moyen loyal pour la construire et la consolider. Nous quittions parfois nos familles pendant des jours et nous faisions de longues distances à pied pour faire la médiation et la réconciliation interpersonnelles et intercommunautaires. Nous nous réjouissions du fait que nous étions parvenues à faire adhérer nos maris  à notre lutte pour la paix. Leur soutien et encouragement renforçaient notre engagement », propos partagés par les femmes à la base de KASONGO et de KABAMBARE lors des focus groupes organisés distinctement dans leurs contrées respectives.

Cette implication des femmes du Maniema dans la recherche de la paix ne s'est pas limitée à la sphère locale, elle s'est étendue également à la sphère sous régionale. Pendant que la crise politique paralysait les relations diplomatiques entre le Rwanda et la R.D.Congo, les femmes de Kindu ont participé à des ateliers d'échange sur la paix au Rwanda et au Burundi avec la facilitation des organisations internationales.

Cet échange d'information et d'expérience avec les femmes de la sous-région a permis la mise sur pied d'une Concertation des Collectifs des Associations des Femmes dans la sous-région des Grands Lacs « COCAFEM/GL ». Cependant, au lieu de servir de balise pour la paix dans la sous-région, cette dynamique sous régionale a généré des frictions au sein de la société civile car perçue comme une émanation de l'extérieur et support des guerres d'agression en R.D.Congo.

Elle n'a donc pas été exploitée et capitalisée à sa juste valeur au Maniema du fait du contexte qui n'a pas été approprié. Les tensions entre les peuples de la sous-région étaient encore à leur paroxysme de telle sorte que toute synergie formelle était inopportune.

Force est de signaler cependant que, COCAFEM/GL s'est progressivement érigé en un instrument de rapprochement des peuples de la sous-région duquel d'autres dynamiques sous régionales de construction de la paix se sont inspirées. Alors qu'à ses débuts la COCAFEM/GL impliquait aussi le Collectif des femmes du Maniema, en 2004, elle impliquait déjà 4 collectifs des autres provinces de la R.D.Congo notamment 2 collectifs de Kinshasa, 1 collectif du Nord-Kivu et un autre de Kisangani.

A l'échelle mondiale, les femmes du Maniema ont intégré la Marche Mondiale des Femmes « MMF » et leur participation aux Actions globales de 2000 et 2005 organisées respectivement à New York et au Brésil a été capitalisée en opportunité de plaidoyer et de lobby en faveur de la paix à l'Est de la R.D.Congo en synergie avec les femmes de Bukavu et de Goma. Elles ont, à cette double occasion, témoigné devant les femmes et hommes politiques de par le Monde, sur les guerres à l'Est de la R.D.Congo et des violations massives et systématiques aux atrocités dépassant tout entendement dont les populations civiles et particulièrement les femmes sont victimes.

Le message fort des témoignages des femmes de Kindu, Goma et Bukavu a profondément touché la Marche Mondiale des Femmes qui a pris la résolution d'organiser l'Action globale de 2010 à Bukavu, Chef-lieu de l'ex Province du Kivu, autour de quatre thèmes : - les violences envers les femmes - biens communs et services publics - autonomie économique des femmes - paix et démilitarisation.

La contribution des femmes journalistes dont les jeunes filles reporters dans la recherche de la paix a été également pertinente. Alors que les médias locaux se refusaient toute descente dans les zones rouges de peur d`être pris pour cible par les rebelles, les femmes journalistes, membres de l'AFEM-MA ainsi que les jeunes filles reporters encadrées par la Section Droits Humains de la Mission d'Observation des Nations Unies au Congo, MONUC en sigle, se sont montrées extraordinaires en effectuant des descentes dans des villages occupés par les rebelles et/ou les Mai Mai notamment les villages de LOKALA, MISENGE, KATAKO, KAMPENE, PEMBERIBA, LOKANDO, KAYUYU et BIKENGE où elles ont réalisé des reportages et des interviews avec des seigneurs des guerres en l'occurrence KIWIS, KABAMBE, KESENDE et SHETANI.

Ces interviews et reportages ont permis aux communautés de s'imprégner des motivations de différents groupes rebelles et cela a ouvert des pistes à des négociations et des échanges entre belligérants et gouvernement d'une part, et, entre belligérants et société civile, d'autre part. Cela a permis aux médias locaux de briser le silence d'être proactifs dans le traitement de l'information liée aux conflits armés dans la région.

L'Association des Femmes des Médias a, en outre, mobilisé les médias étrangers sur la question de la paix en R.D.Congo ; elle a, également, organisé des ateliers d'échange entre d'une part, les femmes des médias de la R.D.Congo, et, d'autre part, les femmes des médias du Rwanda, du Burundi et de la R.D.Congo.

Ces ateliers d'échange d'expérience ont permis la mise en oeuvre des stratégies comme la réalisation des reportages conjoints par les femmes des médias du Rwanda, du Burundi et de la R.D.Congo sur les conflits armés à l'Est de la R.D.Congo. Cette synergie des femmes journalistes de la sous-région a offert un modèle des efforts conjugués pour une paix durable dans la sous-région des Grands Lacs.

Fort malheureusement cette dynamique n'a pas été capitalisée par les femmes journalistes de la sous-région parce qu'aucun cadre durable de concertation n'a été mis sur pied pour la pérenniser. Aussi, cette synergie qui est restée informelle et circonstancielle n'a-t-il pas favorisé la responsabilisation et l'engagement individuels et collectifs des femmes journalistes.

Au niveau international, l'Association des Femmes des Médias ont fait un plaidoyer à la Cour Pénale Internationale en 2007 et un témoignage devant le Sénat américain en 2010 sur les questions sécuritaires et la lutte contre les violences sexuelles faites aux femmes à l'Est de la RDC. En couronnement de leurs efforts dont les échos et les effets touchent les instances aussi bien locales qu'internationales, les femmes journalistes ont raflé des prix internationaux ces deux dernières années.

Les femmes ont aussi joué le rôle de « voix de sans voix » notamment au parlement où celles émanant de Kindu et des autres villes de l'Est de la RDC, ont accompagné et porté le plaidoyer des organisations des femmes à la base. Elles ont même réussi à faire adhérer une bonne partie de leurs collègues hommes à ces plaidoyers.

L'un des effets marquant fut la promulgation des Lois n°06/018 et n°06/019 du 20 Juillet 2006 portant répression de viol et violence sexuelle modifiant et complétant respectivement le Décret du 30 Janvier 1940 portant Code Pénal Congolais et le Décret du 06 Août 1959 portant Code de Procédure Pénale Congolais.

En prélude du dialogue, les organisations et les collectifs des femmes de Kindu ont organisé, aussi bien en milieux urbains que ruraux des fora, des ateliers d'échanges et des séminaires de formation sur les enjeux du Dialogue Inter Congolais. Cela a permis l'élaboration concertée d'un cahier des charges des femmes concernant leur vision pour sortir de la crise.

En Juin-Juillet 2001, les élections ont commencé au sein de la société civile pour désigner les représentants au DIC. Ce moment a été caractérisé par des tensions entre les femmes leaders de Kindu en entraînant entre elles une guerre de chacune contre toutes et de toutes contre chacune. Chacune voulait aller à Sun City pendant que seule une place était donnée aux femmes contre trois places données aux hommes.

Les femmes ont difficilement trouvé un compromis sur leur représentante aux assises de Sun City. Ce conflit de leadership a fait basculer l'engagement des femmes et fragilisé leur dynamisme en ce moment crucial de la recherche de la paix.

L'atelier de Nairobi auquel les femmes du Maniema ont pris part et qui a réuni les femmes congolaises de toutes les tendances et idéologies confondues en Février 2002 a été un cadre de concertation et d'échange qui a permis aux femmes congolaises de partager une vision commune fondée sur l'engagement personnel et collectif à faire émerger une paix durable au pays.

Les femmes de Kindu, ont organisé des marches pacifiques pour soutenir les assises de Sun City, elles ont également rédigé des memos et organisé des rencontres avec différents groupes politiques pour les amener à y adhérer. Une seule préoccupation était au centre des actions des femmes : « La réunification du pays et la restauration de la Paix durable ».

Un comité des femmes a été institué à Kindu pour faire le suivi à partir de la province. Il fonctionnait en système d'alerte et de lobby auprès de la communauté internationale et de différentes composantes aux assises. Avec ce comité des femmes, les différentes bases des composantes aux assises de Sun City faisaient pression sur leurs déléguées à partir de la province pour les influencer à trouver un compromis.

Tout au long des assises, les femmes du Caucus des femmes de Sun City ont maintenu le contact avec leurs bases respectives afin que les unes et les autres agissent dans une seule vision. Ainsi, pendant que le Caucus des femmes agissait sur les déléguées des composantes au Dialogue à Sun City, leurs bases agissaient en province dans une même vision et dans le même angle sur les bases des composantes au dialogue.

Il y a lieu de penser que l'aboutissement du DIC avec la signature de l'accord global et inclusif par les composantes a été influencé à bien des égards par les actions des femmes congolaises à Sun City.

A l'issue de Sun City, il fut créé le Caucus des femmes du Maniema pour la paix pour immortaliser et pérenniser l'esprit du Caucus des femmes et consolider la paix. Ce cadre a permis aux femmes du Maniema de mettre en oeuvre des stratégies diverse pour la consolidation de la paix, ainsi que la promotion du Genre et de la parité dans les instances de prise des décisions.

Seulement, le Caucus Kindu Chef-lieu de la Province du Maniema s'est vu fragmenté par la suite en faveur de la création d'un autre cadre : le CAFCO. Les deux structures, loin d'être des cadres complémentaires d'actions pour les femmes du Maniema, fonctionnent plutôt comme des structures rivales. Les frictions et polémiques au sein des organisations et plateformes des femmes semblent largement reposer sur le conflit d'intérêts et de leadership plutôt que sur le souci de faire émerger un mouvement des femmes fortement engagé pour la cause des femmes et la paix.

CHAPITRE III. L'INSTAURATION D'UN NOUVEL ORDRE POLITIQUE EN RDC : FEMMES ET LE PROCESSUS ÉLECTORAL DE L'AN 2006

A travers les engagements pris pour la gestion de la transition, des dispositions expresses avaient été prises pour confier certaines responsabilités à la société civile, dans le cadre du contrôle de la transition. Elle se voit confier un certain nombre d'institutions citoyennes à cet effet, à l'issue du Dialogue Inter Congolais.

Aussi, comme susmentionné, des acteurs de la société civile se sont impliqués dans la vie politique active et ont de manière assez remarquable participé aux élections de 2006. Plusieurs candidats de la formation politique MSR ont été membres de la société civile.

Il est important de souligner que pendant la période post conflit, les élections et la désignation des responsables des institutions étatiques ont été des moments qui ont suscité un certain élan d'éveil de conscience féminine pour plus de représentions, seulement sur terrain les choses ne se sont pas passées comme souhaité.

III.1. Les femmes congolaises dans le processus électoral

Les femmes congolaises ont joué un rôle significatif dans le processus électoral soit comme électrices, candidates et même superviseuses et conseillères des électeurs. Nos investigations montrent que les femmes ont développé des stratégies électorales en sensibilisant les électeurs sur le bien fondé du vote et sur la décision responsable à prendre.

Tableau N°7: Initiatives des femmes politiques dans le processus électoral

ACTIVITES

FEMME POLITIQUE(%)

EDUCATION CIVIQUE

60

PLAIDOYER

20

PARTICIPATION A LA CAMPAGNE ELECTORALE

66

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 20 novembre 2010

Notons que les femmes ont plus participé à la campagne électorale en vue de soutenir les candidatures des hommes au lieu d'être elles-mêmes candidates. Par ailleurs, dans la ville de Kindu, certaines femmes ont organisé les activités de l'éducation civique et politique en rapport avec le processus électoral. La graphique ci-dessous visualise le niveau d'évolution de ces activités.

Graphique N°3: initiatives des femmes politiques dans le processus électoral

Les activités d'éducation civique ont beaucoup plus été faites par les femmes actrices politiques. Au niveau de la société civile, les femmes candidates indépendantes ont été plus nombreuses à s'engager dans cette dynamique. Les partis politiques n'ayant pas été très ouverts aux candidatures féminines. D'où la plus grande implication des femmes dans les plaidoyers en faveur de la prise en compte du Genre dans la loi électorale, de plus de représentation de femmes aux postes qui ont nécessité une nomination et dans d'autres instances de prise des décisions au niveau des partis politiques en dehors de ceux qui ont nécessité le vote.

En ce qui concerne la campagne électorale, les femmes candidates déclarent ne pas avoir senti de manière significative l'accompagnement des femmes de la société civile sur leur terrain de campagne. Le « collectif » se limitait au niveau de la sensibilisation de l'électorat pour susciter une opinion en faveur des candidatures féminines, sans pour autant mobiliser des électeurs en faveur des candidatures féminines de manière individuelle. Il fallait compter sur ces capacités personnelles pour affronter l'électorat.

A Kindu, les femmes déclarent que cette démission de la société civile a favorisé le clientélisme politique ; la représentation des femmes a été « objet de campagne » plutôt que manifestation de volonté d'un changement de la situation des femmes par rapport à leur représentation dans les instances de pouvoir.

Si les partis politiques se sont lancés dans la cooptation des femmes pour leurs listes électorales, c'est juste pour des raisons de forme et non pour des motivations profondes de promotion de Genre.

L'objectivation des femmes pendant le processus électoral a dans une large mesure été faite avec le concours d'un engagement aveugle des femmes elles-mêmes. Un régime d' « élection-passerelle » s'est érigé, et avait comme fondement la quête du bien être par cooptation. Le paternalisme politique a fait ainsi résurgence dans ce contexte, et fut dans une large mesure exercé par les responsables des partis politiques, essentiellement composés d'hommes.

La question d'une solidarité permanente des femmes de la société civile et actrices politiques nécessite dans ces conditions une attention particulière. Quelques cas rares de soutien aux candidatures féminines par les femmes existent tout de même.

Ainsi par exemple, les femmes musulmanes de Kindu affiliées à l'ONG Fondation TAMBWE MWAMBA, ont entrepris des sensibilisations dans les mosquées. Au lieu d'encourager les femmes à être candidates et à voter car elles en sont capables au même titre que les hommes, elles ont sollicité le vote des femmes en faveur uniquement du candidat Alexis TAMBWE MWAMBA.

D'autres organisations féminines et mixtes contactées ont joué le rôle contraire aux femmes musulmanes. Il s'agissait de sensibiliser les femmes à ne pas voter pour le sel et autres biens matériels, mais de porter le choix sur les femmes et hommes capables de favoriser le droit et le développement.

Certaines organisations féminines ont encouragé et porté leur soutien à une candidature féminine. Ainsi, par exemple la candidate députée nationale NASIFA BINTI a eu le soutien des organisations féminines de Kindu et des mutuelles regroupant les tribus du territoire de Kasongo, mais qui n'ont pas réussi à faire d'elle une députée en 2011.

D'autres structures féminines de la ville de Kindu ont, à travers les organisations à la base et leurs plateformes, organisé des ateliers d'échange, des séances d'animation de proximité à l'intention des femmes de différentes couches sociales, des hommes et des femmes confondues et des leaders locaux (chefs coutumiers, chefs religieux, enseignants et autres leaders d'opinion) aux fins de les sensibiliser et de les mobiliser pour qu'ils s'impliquent dans les différents scrutins : Référendum, présidentiels, législatifs nationaux et provinciaux.

Les organisations féminines de Kindu, par exemple, se sont employées à vulgariser dans les limites de leurs moyens la loi électorale et à entretenir les différentes parties prenantes aux élections sur le profil de bons candidats. Ils se sont également investis à encourager les femmes à postuler et à être proactives au cours du processus. Ils ont, à cet effet, formé des femmes candidates et d'autres ayant des ambitions sur des échéances futures (élections locales notamment) sur les enjeux des élections tout en militant pour l'intégration qualitative et quantitative des femmes parmi les ressources humaines locales de la CEI à différents titres : chefs de bureau, observatrices, assesseures, témoins et agents de saisie.

Pour ce faire, les plateformes des femmes à l'échelle aussi bien locale qu'urbaine ont initié des pourparlers, des séances de dialogue avec les acteurs politiques locaux et les responsables locaux de la CEI, elles ont également couché leurs revendications sous forme des mémorandums qu'ils ont adressés aux acteurs suscités.

Les femmes journalistes de Kindu pour leur part, ont oeuvré à travers la synergie des médias pour les élections où elles ont joué le rôle des productrices et techniciennes en sillonnant les coins et les recoins de la province pour faciliter à toutes les couches sociales l'accès à l'information disponible aussi bien qualitative que quantitative sur le processus électoral.

Grâce à ce militantisme et plaidoyer des femmes, les femmes et les filles majeures émanant des organisations des femmes ont été accréditées comme observatrices et assesseures dans des bureaux de vote où elles ont respectivement été témoins du déroulement des élections et assisté ou remplacé momentanément les chefs des bureaux de vote en cas d'empêchement. La CEI a également pris en compte la représentation équitable des femmes et filles majeures dans le recrutement de son personnel à différents postes.

Même si les résultats atteints n'ont pas été à la taille des ambitions féminines, les élections ont eu comme effet positif de décomplexer les femmes dans cette sphère électorale de compétition.

Cette école électorale pour les femmes a mis en exergue la nécessité pour elles, d'affiner mieux leurs stratégies pour les prochaines échéances. On assiste à un accroissement du pouvoir de négociation des femmes. Des avancées ont été observées en même temps que des défis à relever.

III.1.1. Les résultats de vote

III.1.1.1. L'enrôlement

Tableau N°8: Les effectifs des électeurs par Genre

Genre

Electeurs

Pourcentage (%)

Féminin

12 562 989

52,6

Masculin

11 510 188

47,4

Total Est

24 073 177

100

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 4 novembre 2007

Le tableau ci-haut montre que les effectifs des femmes enrôlées dépassent ceux des hommes. L'écart de ce dépassement est de 5.2%. Cette logique mathématique prouve que les candidatures féminines devraient remporter face à celles des hommes. Paradoxalement, dans une ville comme Kindu, aucune femme n'a réussi à toutes les échéances électorales de 2006 et lors des élections de la députation nationale de 2011, aucune femme n'a remporté sur toute l'étendue de la province du Maniema.

Graphique N°4: Visualisation des électeurs par Genre

Tableau N°9: Électeurs par Genre et par provinces

Province

Genre

Pourcentage (%)

Bandundu

Féminin

53,7

Bandundu

Masculin

46,3

Total Bandundu

 

100

Bas Congo

Féminin

51,8

Bas Congo

Masculin

48,2

Total Bas Congo

 

100

Equateur

Féminin

52,6

Equateur

Masculin

47,4

Total Equateur

 

100

Kasaï-Occ.

Féminin

50,4

Kasaï-Occ.

Masculin

49,6

Total Kasaï-Occ.

 

100

Kasai-Or.

Féminin

51,8

Kasai-Or.

Masculin

48,2

Total Kasai-Or.

 

100

Katanga

Féminin

51,8

Katanga

Masculin

48,2

Total Katanga

 

100

Kinshasa

Féminin

50,6

Kinshasa

Masculin

49,4

Total Kinshasa

 

100

Maniema

Féminin

52,6

Maniema

Masculin

47,4

Total Maniema

 

100

Nord Kivu

Féminin

52,9

Nord Kivu

Masculin

47,1

Total Nord-Kivu

 

100

Orientale

Féminin

52,1

Orientale

Masculin

47,9

Total Orientale

 

100

Sud Kivu

Féminin

54,5

Sud Kivu

Masculin

45,5

Total Sud-Kivu

 

100

Source : Rapport d'évaluation des opérations électorales/CEI-RDC, Août 2006, p. 23

Les femmes ont le plus participé aux élections par rapport aux hommes. Seulement les résultats n'ont pas suivi cette participation majoritaire des femmes.

La mobilisation et la sensibilisation des femmes en milieux urbains et ruraux comme électrices et candidates a produit des effets beaucoup plus quantitatifs que qualitatifs. Ces chiffres d'enrôlement n'ont malheureusement pas favorisé un vote des femmes pour les femmes. Le fait de la marchandisation des élections a profité aux hommes qui sont les détenteurs privilégiés des ressources financières. A cela s'ajoute le détournement des voix des femmes et l'annulation des bulletins de vote dus à l'analphabétisme féminin prononcé.

« Nous ne savions ni lire le nom de nos candidats, ni les reconnaître sur les bulletins de vote, nous avions également difficile à cocher dans la case indiquée comme il le fallait. De ce fait, ceux qui nous guidaient pouvaient nous duper sans que nous ne nous en rendions compte », ont déclaré les femmes de TOKOLOTE dans la commune de MIKELENGE dans le focus groupe des femmes y organisé lors de nos enquêtes.

III.1.2. Les élections provinciales Genre et élus

Les résultats au niveau national montrent que 6,8% des élus sont des femmes ; elles ont représenté 11,4% des candidats par rapport aux hommes dont on trouve 93.2% des élus sur 88.6% des candidats. Un tel score prouve l'échec des candidatures féminines en RDC.

Tableau N°10: Candidats par Genre et par provinces

Genre

Candidats

Pourcentage

Elus

Pourcentage

Féminin

1 531

11,4

43

6,8

Masculin

11 943

88,6

589

93,2

Total

13 474

100,0

632

100,0

Source : CEI 2006, http//www.ceirdc.org

III.1.2.1. Genre et élus par province

Le nombre de femmes élues était plus important dans la province du Katanga soit 13 élues qui représentent 14% des élus de la province et à Kinshasa soit 9 élues (20,5%). Dans les autres provinces, la répartition est la suivante : 7 élues en Province Orientale (8%), 4 au Kasaï-Occidental (8,2%), 3 au Bandundu (3,9%), 2 au Kasaï-Oriental et au Sud Kivu, 1 dans chacune des provinces du Bas Congo, Equateur et Nord Kivu et aucune femme au Maniema.

Par rapport à l'appartenance politique, on note que 65,1% des femmes élues étaient membres de l'Alliance pour la Majorité Présidentielle, 18,6% de l'Union pour la Nation pour Jean Pierre Bemba qui était candidat à la présidentielle, et 16,3% des autres Partis politiques non alignés aux alliances et indépendants. En termes d'importance de femmes élues par parti politique, le PPRD et le MLC auxquels appartiennent les candidats présidentiels du deuxième tour viennent en tête : 46,5% des femmes élues appartiennent au PPRD et 17,5% des femmes élues appartiennent au MLC.

III.1.3.Les élections législatives

Tableau N° 11: Candidatures aux législatives nationales

GENRE

CANDIDATURE

%

MASCULIN

8389

86.4

FEMININ

1320

13.6

TOTAL CANDIDATURE

9709

100

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 4 novembre 2007

Le tableau ci-haut montre qu'il y a eu en 2006 plus d'hommes candidats à la députation nationale par rapport aux femmes. Sur un total de 9 709 candidats que la CEI avait enregistré, il y avait 8 389 candidatures des hommes contre 1 320 candidatures des femmes, ce qui représente respectivement 86.4% et 13.6%

Graphique N°5: Visualisation des Candidatures aux législatives Nationales

Les candidatures féminines s'évaluent à 0,1 %. Ce qui a eu des répercussions sur le vote pour femmes. Le nombre de femmes élues est le plus important dans la province de Kinshasa soit 10 élues qui représentent 17,2% des élus de la province et au Katanga soit 9 élues (13%). Dans les autres provinces, la répartition est la suivante : 4 élues au Nord Kivu (8,3%), 2 au Bas Congo 2 (8,3%), 5 en Province Orientale (7,9%), 3 au Kasaï-Occidental (7,5%), 3 au Bandundu (5,3%), 3 à l'Equateur (5,2%), 2 au Kasaï-Oriental (5,1%), 1 au Sud Kivu (3,1%), et 0 au Maniema (0,0%).

Kinshasa est la capitale de la RDC où les efforts en termes de promotion de genre sont plus avancés qu'en province. La scolarisation des femmes y est aussi plus importante et les pratiques sociales ont subi des influences externes plus visibles. A cela s'ajoute la facilité de l'accès aux médias qui a contribué dans une large mesure à la visibilité d'un certain nombre de candidatures féminines.

Elle est suivie par la province du Nord-Kivu où la ville de Goma a été facilement accessible dans la zone en conflit. Plusieurs activités de campagne et de sensibilisation y ont eu lieu.

Tableau N°12: Genre et élus par province

Province

Féminin

%

Masculin

%

Total

Bandundu

3

5,3

54

94,7

57

Bas Congo

2

8,3

22

91,7

24

Equateur

3

5,2

55

94,8

58

Kasaï-Occidental

3

7,5

37

92,5

40

Kasaï-Oriental

2

5,1

37

94,9

39

Katanga

9

13

60

87

69

Kinshasa

10

17,2

48

82,8

58

Maniema

0

0

12

100

12

Nord Kivu

4

8,3

44

91,7

48

Province Orientale

5

7,9

58

92,1

63

Sud Kivu

1

3,1

31

96,9

32

Total

42

8,4

458

91,6

500

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 4 novembre 2007

Cette situation de sous représentation a été remarquable à travers presque toutes les législatures que la RDC a connues.

Le tableau suivant montre la représentation des femmes dans les différentes législatures de 1970 jusqu'avant les élections de 2006.

Tableau N°13: la représentation des femmes dans les différentes législatures de 1970 jusqu'avant les élections de 2006

République

Dénomination de la législature

Mode d'accession

Sexe

 

 

 

Effectifs

 

 

 

H

%

F

%

 

2ième République

1ière législature (1970-1975)

Elections

409

97,2

12

2,8

421

 

2ième législature (1975-1977)

Elections

235

96

10

4

245

 

3ième législature (1977-1982)

Elections

235

91,7

7

2,3

242

 

4ième législature (1982-1987)

Elections

319

97,6

8

2,4

327

 

5ième législature (1987-1994

Elections

206

93,3

15

6,7

221

Transition sous Mobutu

Haut Conseil de la République (HCR)

Désignation par la CNS

438

97,4

12

2,6

450

 

Haut Conseil de la République Parlement de Transition (HCR-PT)

Fusion des députés de la 5ième législature et du HCR

740

94,9

40

5,1

780

 

1994-1997

 

 

 

 

 

 

Transition sous Laurent Désiré Kabila

Assemblée Constituante et Législative Parlement de Transition (ACL-PT)

Nomination par décret-loi

270

90

30

10

300

 

(2000-2003)

 

 

 

 

 

 

Transition sous Joseph Kabila

Parlement de Transition (issu de l'Accord Global et Inclusif)

Désignation par les composantes et entités au Dialogue Inter Congolais

430

86

70

12

500

Source : tableau élaboré sur base des données tirées à l'internet. Site http//www.wikipediat.org. Consulté le 22 Mars 2010.

III.1.4. Les élections sénatoriales de l'an 2006

Tableau N°14: Les femmes dans les législatures de la RDC

 

Féminin

%

Masculin

%

Total

Candidats

104

9.2

1023

90.8

1127

Elus

5

4.6

103

95.4

108

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 4 novembre 2007

L'analyse des résultats de la CEI fait ressortir le fait que, 4,6% des élus sont des femmes ; elles ont représenté 9,2% des candidats, les sénatrices femmes ont été élues deux à Kinshasa et deux au Katanga et une seule au Sud Kivu. Deux sénatrices femmes sont membres de l'Union des Nations, deux indépendantes et une de l'Alliance de la Majorité Présidentielle. Deux sénatrices femmes sont membres de MLC, deux indépendantes et une de PPRD.

Le PPRD et le MLC viennent toujours en tête par rapport aux femmes alignées et élues. Pour les femmes membres des partis politiques, le vote des femmes dépendait dans ces conditions de l'importance de leur parti d'appartenance.

En ce qui concerne les femmes indépendantes, le leadership, le pouvoir économique, le marketing politique étaient nécessaires pour un poids sur l'électorat

III.1.5. Les élections présidentielles

Tableau N°15: Candidatures à la présidentielle de 2006

GENRE

CANDIDATURE

MASCULIN

29

FEMININ

4

TOTAL CANDIDATURE

33

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 4 novembre 2007

Graphique N°6 : Candidatures à la présidentielle de 2006

III.2. causes de la sous représentation des femmes dans la sphère politique

Les contraintes qui agissent sur les femmes pour leur représentation dans les instances de prise du pouvoir sont de deux ordres :

III.2.1. Les contraintes directement liées à la situation des femmes

A la question de savoir les différentes contraintes à la base de la sous représentation des femmes, 89 sur 100 sujets enquêtés, soit 89% disent que c'est le faible accès à l'information, l'analphabétisme élevé et le poids de la pauvreté. Par ailleurs, 11 sur 100 femmes enquêtées, soit 11%, estiment que c'est le statut socio culturel des femmes et la méconnaissance de leurs droits fondamentaux

Certes, la fréquence élevée ne prouve en quoi les 11 autres femmes n'ont pas raison. Car, plus la majorité des femmes congolaises sont analphabètes, moins elles seront informées sur leurs droits. A cela s'ajoute aussi l'invisibilité des femmes au sein des institutions politiques, car les femmes instruites ne sont pas nombreuses.

La culture du Maniema aussi ne permet pas aux femmes d'exercer le pouvoir politique, car elles n'ont pas droit de s'élever ni de parler debout lorsque les hommes sont assis. Elles sont d'après les coutumes de diverses tribus, subordonnées aux hommes.

III.2.2. Les contraintes indirectes, d'ordre institutionnel et juridique 

Le 82% de nos enquêtées disent qu'il existe en RDC et au Maniema en particulier les Faibles capacités des institutions en termes de coordination, de mise en oeuvre et de suivi, faibles capacités de la société civile, effets environnementaux sur les femmes, insuffisance et manque d'application de la législation et culture politique discriminatoire.

D'après nous, il faut dire que la lutte et les efforts des femmes du Maniema pendant le processus électoral sont restés parsemés d'embuches d'ordre socioculturel, économique, politique et légal auxquels elles ont dû faire face. Sur le plan socioculturel, il s'agit du mythe, des préjugés et des stéréotypes autour de l'activisme des femmes dans la vie politique, de l'analphabétisme et de la sous-instruction des femmes et d'autres limites culturelles qui confinent le rôle des femmes dans les travaux champêtres en tant que nourricière et productrice et ceux ménagers en tant qu'épouse.

Sur le plan économique, il s'agit de la pauvreté des femmes liées à la perception des rapports de Genre (au Maniema seuls les hommes sont propriétaires et détenteurs des moyens de production dont la terre et le bétail dont ils sont gestionnaires et contrôleurs au détriment des femmes qui constituent la classe laborieuse en tant que productrices et main d'oeuvre pour leurs familles et leurs communautés). Sur le plan politique, il faut noter également l'immaturité et l'inexpérience politique des femmes qui ont défavorisé amplement leur positionnement politique, car le premier Gouverneur élu démocratiquement au Maniema (Dr Didi MANARA LINGA) avait nommé dans son gouvernement deux femmes parmi les dix postes ministériels de la province, mais toutes ces femmes ont été révoquées dans quelques mois pour des raisons liées à l'incompétence.

L'enquête de terrain a révélé un certain nombre de problèmes auxquels les femmes ont été confrontées pendant le processus électoral. Les plus remarquables sont les suivants :

III.2.3. Le fait d'une « campagne électorale transactionnelle »

La campagne électorale a été un moment pour la formation de l'opinion publique et de constitution d'un électorat. Beaucoup de facteurs ont cependant enfreint la capacité des femmes à se constituer une base électorale sûre et importante. L'absence de ce pouvoir mobilisateur a un fondement à la fois culturel et économique, mais aussi a des liens avec le niveau d'expérience des femmes dans le jeu électoral.

Au regard du décor planté par la campagne électorale, ce moment n'a pas été l'occasion de défendre des projets de société mais plutôt un moment des dons. Ce qui dès le départ a fait naître un modèle de « campagne électorale transactionnelle » où les électeurs se sont lancé à la recherche d'un bien-être de campagne.

Ce fût un moment d'ambiance exceptionnelle, de créativité tournée beaucoup plus vers la manipulation des consciences, plutôt que vers la défense des projets de société. Quand bien même une portion de la population constituée essentiellement d'intellectuels pouvait encore faire attention au discours idéologique, la majorité a plutôt mordu aux discours ethnicisés, mais surtout prometteurs de bonheurs même sans support de politique.

La constance et la promotion des valeurs qu'incarnaient les femmes dans leur majorité ne savaient répondre à la quête des « biens de campagne » dont la population était à la recherche. Cette population en quête de survie au jour le jour s'est vu ouvrir un marché circonstanciel. C'est à elle que devaient s'affronter des femmes sans suffisamment de moyens et novices dans leur majorité dans le champ de la compétition politique.

III.2.4. La faiblesse du marketing politique et d'accès aux médias

Les femmes n'ont aussi apparemment pas eu assez de temps pour l'accoutumance au marketing politique qui implique la connaissance des électeurs, le soin à apporter à son image, la particularité du thème central de sa campagne, l'entretien de bonnes relations avec les médias, le rôle de la publicité : arme essentielle utilisant des canaux tels que les imprimés, des messages bien conçus, les médias (radio, télévision, etc.), les affiches.

Face aux médias à la fois les femmes candidates et électrices n'y ont pas accédé facilement. En ce qui concerne les femmes dans leur ensemble, l'enquête démographique et de santé de 2007 démontre que : 31% de femmes déclare suivre la radio au moins une fois par semaine, 20% de femmes regardent la télévision au moins une fois par semaine, 9% de femmes lisent un journal au moins une fois par semaine et en somme, 3% de femmes seulement sont à la fois exposées à la radio, à la télévision et lisent les journaux. Or ces canaux ont été fortement sollicité pendant la campagne électorale, sans que les femmes électrices ou candidates n'y aient suffisamment accès.

L'étendue de la RDC, l'enclavement de certaines entités en sont des facteurs aggravants. La campagne devait être basée sur une connaissance relativement exacte des situations de différentes couches de populations rencontrées. Ce qui n'a pas été facile pour les candidates féminines souvent déconnectées de la base.

Les femmes ont cependant reçu un appui technique de certains partenaires pour développer des stratégies de campagne tel que le « porte à porte », la sensibilisation des femmes à la base, mais cela n'a pas porté le résultat escompté.

La multitude d'actions menées sur terrain par les femmes et les organisations féminines n'ont pas été suffisantes pour la formation d'une opinion publique et de l'électorat féminin. Le déficit d'appropriation du discours féminin pour le changement a milité pour un déficit dans la formation d'une opinion publique en faveur des femmes.

III.2.5. Faible représentation des femmes dans les partis politiques

Le nombre des femmes dans les instances supérieures de prise des décisions au niveau des partis politiques a été un frein à l'émergence d'une classe politique féminine. 9 femmes seulement étaient dirigeantes de partis sur les 267 autorisés à fonctionner en 2006, avant les élections.

- Le Congrès LOKOLE (COLO) : AKERE LYOMBE BOTUMBE

- La Dynamique pour le Développement national (DDN): NGOY KILUMBA

- Le Front Commun des Nationalistes (FCN) : NTUMBA BIJIKA

- Le Mouvement des Démocrates (MD) : Justine MPOYO KASA-VUBU

- Le Mouvement Populaire de la Révolution Fait Privé  (MPR Fait Privé) : NZUZI WA MBOMBO

- L'organisation Politique des Kasavubistes (OPKA) : Marie Rose KASA-VUBU

- Le Parti Libéral Démocrate Chrétien  (PLDC) : Anne KANKOLONGO

- Le Rassemblement des Démocrates Conciliants (RADECO) : Tacher LUSAMBA

- Le Rassemblement du Peuple Congolais (RPC) : LINGBANGI Sylvie

Au regard de ce qui précède, les résultats de notre enquête sur terrain à Kindu prouvent qu'il existe au Congo des facteurs ayant enfreint la capacité des femmes à mobiliser l'opinion publique ou mieux un grand nombre d'électeurs en leur faveur. Il s'agit des facteurs ci-dessous :

- Les contraintes géographiques : l'étendue de la RDC et l'enclavement de certaines circonscriptions électorales

- L'accès limité des femmes aux médias

- La pauvreté financière et de temps

- La perception populaire généralement négative du leadership féminin

- L'ethnicité et la tribalité

- La qualité du message de campagne

- Le clivage entre les animateurs des organisations féminines de la ville de Kindu et celles des territoires (milieux ruraux).

- Le conflit d'intérêts dans le chef des femmes dans leurs stratégies collectives

- L'existence des structures peu inclusives

- Etc.

III.2.6. L'absence d'une culture politique chez la plupart de femmes congolaises

La pratique politique exige une certaine expérience, mais aussi une manifestation d'intérêt pour les activités politiques. Ce qui n'a pas été perceptible chez une grande partie de femmes enquêtées à la base. « La politique est bonne pour les hommes, une femme impliquée dans la politique n'est pas un modèle et s'expose à beaucoup d'anti valeurs, notamment : la prostitution, la corruption, la trahison, le divorce, etc. ».

L'enquête de terrain révèle le fait que l'environnement direct, le niveau d'instruction influent sur la participation politique des femmes. Les milieux urbains sont plus favorables à la participation politique des femmes par rapport aux milieux ruraux et semi ruraux notamment les quartiers périphériques de Kindu. Sur 100 femmes interrogées à la base, 10 ont un niveau universitaire, 35 ont fait le secondaire et 55 le primaire ou n'ont pas étudié.

De ces femmes, 73 n'ont pas manifesté de l'intérêt pour les activités politiques, dont 50 parmi les analphabètes et ayant un faible niveau d'instruction, contre 20 de celles qui ont étudié. Par rapport au milieu, 27 femmes sur 35 des Quartiers périphériques ne s'intéressent pas à la politique et dans la commune d'ALUNGULI un peu plus hétérogène, 19 femmes sur 35 ne sont pas intéressées par la politique.

La commune MIKELENGE est majoritairement habitée par les originaires des territoires de KIBOMBO et de KAILO. Dans cette commune, où l'on note un pourcentage assez élevé de femmes instruites, 10 femmes seulement sur 30 n'ont pas manifesté de l'intérêt pour les activités politiques.

Tableau N°16: Niveau d'instruction des femmes de Kindu

Commune

Primaire 

%

Secondaire

%

supérieur

%

MIKELENGE/35

23

53.4

9

24.6

3

16.66

KASUKU/30

8

18.6

15

44.11

7

38.88

ALUNGULI /30

12

27.9

10

29.41

8

44.44

TOTAL

43

100%

34

100%

18

100%

Source : Rapport annuel de l'Antenne de l'UNICEF à Kindu, année 2010

A noter que par rapport au site de KASUKU et MIKELENGE, les femmes d'ALUNGULI se sont montrées plus hostiles à l'implication des femmes dans le champ politique. Cela pour des raisons qui touchent à la fois au milieu, au niveau d'instruction et aux références/modèles de l'environnement direct. Ces femmes sont rarement en contact avec des femmes évoluant dans la sphère politique. Le niveau d'instruction des femmes y est faible et elles côtoient difficilement des femmes qui s'adonnent à des activités politiques. Les germes de la construction sociale des sexes, qui mettent les femmes en dehors du champ politique y persistent encore de manière sensible.

Un des paradoxes relevés dans le chef des femmes est que, quand bien même elles reconnaissent que les femmes peuvent participer à la vie politique, mais c'est « l'autre » qui peut le faire et non pas «moi». Une des enquêtées dit : « les femmes peuvent bien participer à la vie politique et changer bien des choses car elles cautionnent moins les antivaleurs ». Mais à la question de savoir si elle peut faire la politique, la réponse était nette : « moi je ne peux pas car cela risque de mettre mon foyer en danger ».

Cette reconnaissance de participation politique des femmes pour les autres met en évidence le fait que les femmes demeurent encore sous tutelle de leurs époux, du moins pour celles qui sont mariées, et suscite la question de la capacité réelle des femmes dans les options d'engagement politique.

III.2.7. L'augmentation de la charge horaire et de travail pendant le processus électoral

Une des questions capitales qui s'est posée selon les femmes, est la conciliation des rôles. Etre à la fois mère, épouse, travailleuse, candidate ou militante a posé un sérieux problème de disponibilité et de temps. Il fallait en ce moment électoral, concilier l'activité politique à celle de survie ou encore de maintenance financière dans la course électorale.

Les rôles économiques, sociaux et politiques se chevauchent et font naître un conflit d'intérêt dans le chef des femmes dans leur majorité. La quête de survie l'a emporté sur les activités politiques jugées secondaires. Ceci met en exergue la relation qui a existé entre le niveau de pauvreté et l'implication des femmes dans le processus électoral.

A titre illustratif, lors de nos interviews individuelles avec les femmes leaders des Associations et ONG féminines de la ville de Kindu, elles ont avoué à 100% que les contraintes de temps et des moyens logistiques ne leur ont pas permis de préparer suffisamment les femmes à la base à affronter les élections.

III.2.8. La persistance des problèmes structurels dans les organisations féminines

Il a été constaté une absence de coordination au niveau des actions féminines qui ont été faites généralement de manière disparate. Ce qui débouche sur l'absence d'une vision commune relative à la participation politique des femmes. Les divergences d'intérêts, ont envahi l'espace des leaders féminins et ont eu des répercussions sur leur solidarité. Aussi la synergie d'action entre différentes structures féminines, entre les leaders féminins tant de la société civile que de la sphère politique et l'électorat féminin était faible.

III.3. Les femmes congolaises au sein des partis politiques

L'aube des années 1990 aura été caractérisée par le triomphe de l'idée démocratique. La plupart des pays africains, qui étaient régis par un système de Parti-Etat ou de monopartisme, ont été secoués par les exigences du multipartisme et des droits de l'homme et du citoyen.

Les partis politiques assument une fonction représentative dans les institutions démocratiques. Le rôle des partis politiques consiste pour ce faire à rassembler et à représenter les intérêts sociaux et ils servent de structure pour la participation politique. En outre ce sont les partis politiques qui participent aux élections dans le but de remporter afin de gérer les institutions gouvernementales.

Au niveau juridique, il est à noter que des manifestations de volonté politique pour une promotion des femmes sont observables. Cela ne suffit cependant pas à améliorer les conditions d'épanouissement des femmes dans le cercle des partis politiques.

La loi 001/2001 du 17 mai 2001 stipule que dans leur création, organisation et fonctionnement, les partis politiques doivent veiller à ne pas instituer de discrimination basée sur l'ethnie, la religion, le sexe, la langue.

Dans le contexte de la République Démocratique du Congo, les partis politiques demeurent faibles et sont influencés par la personnalité de leurs dirigeants qui de plus en plus semblent détachés de leur base.

Les enquêtes de terrain font ressortir qu'il se pose un problème réel d'organisation des partis politiques. L'enquête de terrain a révélé ce qui suit :

- Le manque de maitrise du nombre des membres effectifs

- Le manque d'identification de personnes aux postes prévus dans le fonctionnement du parti (cumul des fonctions)

- La rupture d'action et l'absence d'éducation politique de la base. Les partis apparaissent comme des appareils électoraux et fonctionnent avec des ruptures entre le moment de vote et les prochaines échéances

Tableau N°17: Genre, élus et appartenance politique lors des élections législatives nationales

Appartenance politique

Femmes élues

%

PPRD

13

31,0

MLC

6

14,3

ANCC

2

4,8

CDC

2

4,8

CODECO

2

4,8

Indépendant

2

4,8

Le Renouveau

2

4,8

MSR

2

4,8

PALU

2

4,8

ABAKO

1

2,4

ADECO

1

2,4

DCF-COFEDEC

1

2,4

FSIR

1

2,4

MMM

1

2,4

RCDN

1

2,4

UNADEF

1

2,4

UNAFEC

1

2,4

UPRDI

1

2,4

Total

42

100,0

Source : http//www.cei-rdc.org. Consulté le 4 novembre 2007

Sur l'ensemble des partis politiques que compte la RDC, 2 seulement viennent en tête avec 31% des femmes élues pour le PPRD et 14,3% pour le MLC.

Au regard de cette situation, quelques associations féminines telles que : La Dynamique des femmes politiques (DYNAFEP), le Carrefour des Femmes Politiques et la Ligue des femmes Congolaises pour les Elections, ont mené une action de lobbying auprès des leaders des partis politiques, pour obtenir d'eux une déclaration en vue de leur engagement à mettre en oeuvre tous les mécanismes relatifs à la paix, la sécurité, l'ordre public et l'unité nationale pendant le processus électoral ; mais aussi à renforcer la participation et le leadership de la femme et de la jeunesse à tous les niveaux de prise de décision, dans tous les secteurs de la vie nationale en général, et au niveau des formations politiques en particulier.

« Les partis politiques dans leur majorité n'ont nullement favorisé la promotion des femmes et de leurs candidatures. Les femmes visionnaires et exprimant des ambitions politiques étaient toujours bloquées et reléguées au second plan tandis que celles influentes en l'occurrence les femmes commerçantes dont la plupart n'exprimaient aucune ambition politique ont été apprivoisées et sollicitées par les partis afin qu'elles soient instrumentalisées pour le succès aux élections des leaders des partis politiques notamment les hommes », s'est exprimée une femme de Kindu qui a été directrice de la campagne électorale d'une autre femme de Kindu qui fût candidate aux législatives nationales.

Ces comportements observés dans le chef des acteurs politiques ont démotivé une bonne partie des femmes aux ambitions politiques à adhérer dans les partis politiques et à poser leurs candidatures comme indépendantes. Là encore le problème des moyens logistiques pour battre campagne s'est posé avec acuité.

III.4. La place de la femme dans l'organisation de l'Etat congolais

Influencé par l'élan de la communauté internationale, la République Démocratique du Congo n'est pas restée en marge du processus global de lutte pour le repositionnement des femmes.

Dès le lendemain de son accession au pouvoir, le président Mobutu lançait le slogan homme nouveau, femme nouvelle qui se contenait dans un programme d'action. C'est ainsi que par exemple dès 1966, Madame Sophie KANZA fut nommée au gouvernement en qualité de Ministre des affaires sociales et que le droit de vote fut accordé aux femmes en 1967.

Le besoin d'intégrer la femme à la vie nationale se fait sentir de plus en plus et implique plusieurs acteurs dans cette lutte. Ici, contrairement à la société traditionnelle où les structures sociales étaient principalement initiatrices des relations selon le genre, on note dans la reconstruction sociale des sexes l'implication de l'Etat, des acteurs sociaux mais aussi, des femmes elles-mêmes.

Dans le manifeste de la N'Sele, publié le 20 Mai 1967, il est stipulé que " la femme n'a pas la place qui lui revient dans la société, qu'elle porte en elle les espoirs de toute la nation, que son rôle dans l'éducation des enfants est irremplaçable. Le M.P.R. entendait ainsi mener une politique d'émancipation de la femme.

Certaines politiques ont été menées au niveau de l'Etat pour mettre fin à la marginalisation constatée des femmes et permettre ainsi leur participation à la vie nationale. A l'issue du Dialogue Inter Congolais, l'Accord global inclusif, le décret portant attribution des ministères et la Constitution de transition ont à travers les textes qui régissent la transition, consacré cette volonté de l'Etat à promouvoir la lutte contre les inégalités de genre.

III.5. Place de la femme au sein des communautés locales congolaises

Les communautés locales restent les véhicules culturels auxquels les femmes elles-mêmes participent à la base. Dans celles-ci chevauchent normes coutumières et étatiques. Si au niveau national, la culture étatique connait des influences exogènes de manière significative, il n'en est pas le cas pour les communautés locales qui parfois résistent aux dispositifs étatiques de promotion de la condition féminine.

Les schémas sociaux au niveau local entrent souvent en contradiction avec ceux du niveau national. La culture de l'Etat qui milite pour la promotion de genre est parfois différente des valeurs sociales véhiculées dans la plupart de groupes sociaux congolais. Les femmes ont des rôles que leur reconnaissent ces groupes sociaux et qui ne correspondent pas souvent à ceux qui sont dictés par les politiques étatiques de Genre. Le consensus social ne se dégage pas facilement, dans ces conditions, et cela va en défaveur des femmes.

Toutefois, le contexte et les besoins spécifiques des femmes peuvent contribuer à une révisitation de leurs rôles. Des stratégies ont été mises sur pieds, surtout dans les zones sortant des conflits pour impliquer davantage de femmes dans le processus de paix par rapport aux besoins qui s'affichaient. Ce qui a permis une facilité d'appropriation des initiatives féminines par les femmes des communautés locales.

Les femmes rurales comme victimes directes des conflits armés se sont impliquées dans les initiatives féminines comme bases (noyaux) de différentes associations des femmes. Elles ont, pour leur part, formé des cadres d'action dont les Comités d'Alerte pour la Paix (CAP) et les Noyaux Clubs d'Ecoute des femmes rurales (NCE) sous les impulsions respectives du Réseau des Femmes pour la défense des Droits et la Paix « RFDP » et de l'AFEM-SK. Ces cadres créés par les femmes rurales se sont développées progressivement en de systèmes « d'alerte », de « médiation » et de « lobby » au sein des communautés.

Dans la commune d'Alunguli, les CAP et les NCE ont dénoncé les violations et engagé des dialogues avec les politiques locaux, les groupes armés locaux et les combattants individuellement. Ces dialogues ont débouché sur le désengagement de certains combattants qui se sont retirés des groupes armés. Les CAP d'Alunguli ont également fait des SIT-IN à la MONUC et aux bureaux des responsables locaux dont l'administrateur du territoire et les chefs coutumiers pour demander l'implication effective de la communauté internationale et des institutions politiques dans la recherche de la paix.

Au sein des communautés locales, il s'est observé un engagement des femmes à titre individuel et collectif pour la recherche d'une paix durable.

A la cité Kalima dans le territoire de Pangi et à Elila dans le territoire de Kailo, les femmes se sont décidées de briser les clivages ethniques et ont mis sur pied des plates-formes de paix. Les unes et les autres ont engagé des dialogues avec leurs maris sur les enjeux de la cohabitation pacifique et elles ont réussi à convaincre leurs maris à se désengager des bandes armées. Ces hommes désengagés sont devenus des promoteurs de la paix au sein de leurs communautés et se sont associés aux activités de médiation de leurs femmes. Cela a permis la réouverture du marché et des écoles dans ces entités qui étaient occupées par les combattants Mai Mai.

Au village de Makola à 38 Km de la ville de Kindu, au sein du territoire de Kailo les femmes ont initié des comités locaux pour la paix avec la mission de réconcilier les différents milieux divisés par les conflits fonciers ayant entrainé la mort des personnes innocentes. Ces comités locaux ont joué le rôle de médiateurs dans les milieux divisés par les conflits. Cela a permis la réunification communautaire.

Le niveau de connaissance des instruments juridiques internes et internationaux est encore très bas. Nos enquêtes ont révélé que les femmes paysannes n'ont pas la maîtrise des instruments juridiques internes et internationaux qui consacrent leurs droits de participer au même titre que les hommes à la gestion de la cité et au processus de paix.

A la limite, elles connaissent les grands titres de ces instruments mais le contenu leur échappe. C'est le cas également d'autres couches sociales des femmes comme les femmes porte-faix. Bien qu'elles soient en milieux urbains et groupées en Association, elles ont peu de connaissances sur les différents textes protégeant les droits des femmes.

Les dispositions légales sur la parité contenues dans la Constitution de la R.D.Congo, la Convention sur l'Elimination de toute forme de discrimination à l'égard des femmes « CEDEF », la Résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies, restent méconnus de toutes ces forces vives au Maniema. Seules les femmes élites au sein de la société civile en ont la connaissance. « ...Ces différents textes juridiques devaient pourtant être la bible des femmes pour un activisme balisé et bien argumenté », s'est exprimée une enquêtée en réagissant à la question relative au niveau d'appropriation des instruments juridiques par les différentes couches sociales des femmes au Maniema.

On serait tenté de lier cet écart de niveau des connaissances entre les femmes leaders et les femmes à la base à la différence du niveau d'instruction entre ces deux groupes des femmes mais cette raison ne semble pas évidente.

L'analogie faite aux institutions coutumières où les membres des communautés dont la plupart n'a jamais été à l'école. Ils maîtrisent tout le contenu culturel et le transmettent des générations en générations. Ceci montre que l'acquisition des connaissances sur les droits et les devoirs par un peuple est une question d'éducation et de sensibilisation plutôt qu'une question d'instruction.

Il sied également de mentionner que cet activisme dont font montre les femmes au sein de la société civile, se trouve menacé par la discontinuité et le manque d'identité observé dans le chef de ces dernières. Il ne s'observe pas encore, à Kindu, une démarcation nette entre les femmes politiques et les femmes leaders de la société civile. Tantôt femmes politiques, tantôt femmes de la société civile, l'engagement des femmes leaders de la société civile reste perplexe et conditionné par les enjeux du moment.

Etant donné que les résultats des élections de 2006 n'ont pas permis une représentation équitable des femmes dans les instances de prise des décisions, les politiques puisent les femmes dans la société civile pour remédier à l'exigence de la parité. Du fait qu'il existe un écart d'atouts entre les femmes au sommet généralement instruites et assez visionnaires et les femmes à la base généralement sous instruites, le fait pour les femmes leaders de la société civile de quitter leurs structures pour des postes politiques crée un vide et affecte sensiblement la structure.

Nos enquêtes ont attesté qu'une fois dans la politique, au lieu d'accompagner et de porter les sensibilités et la vision de la société civile dont elles sont l'émanation, ces femmes qui jadis étaient leaders de la société civile se désolidarisent quasi totalement d'avec leurs bases. Il suffit cependant que, leur mandat politique arrive à terme pour qu'elles reviennent à leur base en se réclamant de la société civile. Cela frise un certain opportunisme et ce basculage des femmes entre le politique et la société civile prouve à suffisance que malgré les exploits dont elles font montre, le leadership des femmes au Maniema se recherche encore.

Le manque de l'union et de l'unité au sein des mouvements des femmes au Maniema se veut aussi une sérieuse menace quant à leur avenir. Le conflit de leadership y entraîne la fragmentation des organisations et des collectifs et cela fragilise sensiblement la lutte des femmes pour la paix. Au lieu que les femmes conjuguent des efforts pour renforcer les cadres déjà existants, il s'observe une multiplication des associations et des collectifs avec comme conséquence la dispersion des efforts.

Aussi, les clivages ethniques et idéologiques prennent-ils au piège les femmes du Maniema. Du fait de cela, leur participation est dérisoire parce que le subjectif l'emporte sur l'objectif. Quand il s'agit par exemple de désigner une déléguée pour représenter l'organisation ou le collectif à telle ou telle autre assise, il s'en suit presque toujours une polémique.

Les femmes enquêtées ont déclaré qu'au sein de leurs structures, le choix des déléguées se fonde souvent sur les affinités et les considérations ethniques plutôt que sur le mérite et la compétence.

La conséquence de cela est que les femmes perdent parfois certains enjeux parce qu'elles n'ont pas été judicieusement représentées.

La protection des intérêts individuels au détriment des intérêts collectifs est également une grande menace à l'émergence des organisations des femmes parce qu'elle est souvent à la base de trahison quand il s'agit de certains enjeux.

Faut-il dire aussi qu'il ne s'observe pas, dans la ville de Kindu, de collaboration entre les organisations des femmes impliquées dans la défense de droits et la paix et d'autres structures des femmes comme l'Association des Femmes commerçantes du Congo « l'AFECCO ». Or, cette complémentarité devrait être capitalisée par les unes et les autres comme une ressource pour le succès des femmes et leur développement harmonieux.

CHAPITRE IV. MECANISMES DE PERENNISATION DE LA PARTICIPATION POLITIQUE DES FEMMES CONGOLAISES

Les efforts pour la pérennisation de la participation politique des femmes congolaises doivent être opérationnels tant au niveau institutionnel qu'au niveau des acteurs sociaux, notamment les organisations féminines. Ainsi, notre enquête sur terrain a relevé certains mécanismes de la pérennisation de la participation politique des femmes congolaises. Il s'agit des mécanismes ci-après :

- Enclencher un rapport de pouvoir égalitaire entre femmes et hommes dans la participation politique

- Appliquer la loi sur la décentralisation pour offrir aux femmes congolaises plus de chance d'accès à la gouvernance

- Pistes d'action en rapport avec la bonne Gouvernance et le Genre

- la révision du code de la famille et autres textes juridiques sur les droits des femmes

IV.1. Enclencher un rapport de pouvoir égalitaire entre femmes et hommes dans la participation politique

Pour parler de « participation politique », le concept de participation même doit d'abord être clarifié. Actuellement, le mot « participation » est utilisé comme condition de réussite du développement et de la bonne gouvernance. Or, cette participation peut n'être qu'une illusion démocratique et demeurer passive, réduite à l'échelle de l'information ou de la consultation.

Elle peut relever de l'utopie ou d'une dynamique de technocrates et d'expert(e)s, mettent en garde Marie Lise SEMBLAT et Marie RANDRIAMAMONJY. Ces dernières précisent que « parler de la participation politique des femmes dans le contexte du Genre et de la gouvernance », c'est dépasser le stade de la consultation symbolique des femmes. C'est aussi aller au-delà de l'étape qui consiste à les informer des actions à mener pour elles et pour la collectivité. (74(*))

Il s'agit plutôt de mettre sur un pied d'égalité les femmes et les hommes dans la prise de décision politique et dans le contrôle de pouvoir dans tous les domaines. Mais qu'est-ce qui est « politique », et qu'est-ce qui ne l'est pas ? La « participation politique » ne concerne pas seulement les partis. Toute décision affectant la vie des autres, qu'elle soit privée ou publique, est « Politique ». Ce sont les « décisions politiques » qui apportent les transformations dans la société. Les femmes congolaises doivent donc s'investir dans la politique, s'engager et militer pour transformer les relations inégalitaires femmes-hommes en relations égalitaires.

Ainsi, comment faire pour que cette participation soit effective en RDC ?. Au Madagascar par exemple, REJO FIENENA a présenté le cas ou le modèle spécifique des Associations des femmes en politique à Madagascar. Ces associations ont initié un mouvement de ralliement des femmes qui se fixe comme objectif l'obtention de 30-50% des sièges de 2010 à 2015. (75(*))

En RDC, la stratégie selon nos enquêtées doit consister à sensibiliser et identifier les femmes ayant une vocation politique, à les encourager à se porter candidates, à renforcer leurs capacités, à inciter l'électorat potentiel à les élire et à les accompagner dans le processus électoral. Une telle démarche a fait ses preuves dans la mise en oeuvre d'un programme d'appui à la gestion communale au Burkina Faso, d'après Paule Elise Henry (76(*)).

Dans cette expérience, le renforcement des capacités au niveau local a engendré un déclic pour encourager les femmes de Burkina Faso à entrer dans les conseils municipaux ou à siéger au sein des conseils d'administration des infrastructures marchandes (les marchés par exemple).

En RDC, les acquis de cette démarche sont fragiles, marginaux et réversibles. Les effets obtenus risquent donc de ne pas redresser de manière durable la situation actuelle du « déficit démocratique dans les pays dits du tiers monde» marqué par l'absence des femmes dans les sphères politiques.

Les résultats des entretiens menés par Irène STOJCIC et Sophie ELIZEON à l'île de la Réunion d'une part, et par Lala RAHARINJANAHARY à Madagascar d'autre part, attestent que certaines femmes élues n'ont plus l'intention de se représenter sur des listes électorales (77(*)).

Joséphine YAZALI a formulé un même constat parlant du cas des Communautés locales en Inde où « prenant conscience de leur rôle passif, les dix femmes élues au sein des panchâyat ne sont plus disposées à être députées» (78(*)).

Charles MAPHASI KUMBU a fait remarquer que les acquis ne suivent pas une croissance linéaire. En RDC, la réorganisation du pouvoir politique à l'issue du Dialogue Inter Congolais en application de la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations Unies n'a pas tenu compte de la représentation féminine, même en ce qui concerne les élections territoriales où des avancées notables étaient enregistrées avec le respect du quota de 30% en faveur de la femme (79(*)).

Et si un autre obstacle à la participation des femmes en politique étaient les femmes elles-mêmes ? Les femmes se cantonnent dans certains stéréotypes, a rappelé Joëlle PALMIERI (80(*)) en référence à une étude sur les nouvelles technologies de l'information (TIC) menée au Sénégal et en Afrique du Sud : au lieu de démystifier le stéréotype selon lequel « les femmes n'étaient pas portées sur les sciences mais sur la gestion de la vie quotidienne », elles perpétuent l'image de la femme soumise et subordonnée. Elles ne saisissent pas l'opportunité qui s'offre à elles d'utiliser les TIC afin de renverser le pouvoir en leur faveur.

Dans le même sens, l'étude relatée par Lily RAHAINGO-RAZAFI MBELO à Madagascar illustre que : « les femmes se tiennent à distance du « politique » parce que, selon les opinions recueillies, les femmes au pouvoir reproduiraient les pratiques machistes des hommes » (81(*)).

Des points de vigilance ont aussi été soulevés. D'abord, il est plus que nécessaire de remettre en cause les préjugés conformistes et essentialistes qui consistent à dire que « les femmes sont naturellement porteuses de bonne gouvernance », et à démystifier l'hypothèse selon laquelle « les femmes sont par essence de bonnes politiciennes, altruistes et non corrompues». Si ces arguments font carrière, ils risquent de bloquer les accompagnements indispensables tels le renforcement de capacités des candidates potentielles et des élues.

Ensuite, il faut aussi veiller à ce que la participation politique des femmes congolaises ne se réduise pas à un slogan qui instrumentaliserait la participation des femmes pour en faire des alliées-alibi en les maintenant dans un état de subordination.

Pour ce qui est de la réalité de la Ville de Kindu, cadre physique de notre recherche, le constat général est que les conditions ne sont pas encore réunies pour que les femmes et les hommes soient égaux en gouvernance. Le chemin est encore long. Comment faire évoluer la situation ? Les mouvements féminins qui ont accompagné le processus de démocratisation dans cette province qui a connu la civilisation arabo-musulmane permettront de parvenir progressivement à un changement. L'activité et l'engagement des femmes au sein des partis politiques sont essentiels mais ils ne doivent pas entraver la mobilisation et la solidarité des femmes autour des enjeux communs.

D'où, la nécessité de trouver des synergies et de s'appuyer sur le réseautage (nord/sud/sud) dans une optique de changement global et durable.

Autre enjeu : quel est le rôle des « femmes élites » ou les « épouses de » dans l'accompagnement des mouvements féminins ? Certes, ces élites devraient jouer des rôles importants dans l'appropriation des modes de gouvernance.

Elles peuvent apporter leur perception et analyser des rapports de pouvoir. Elles sont légitimes à parler des femmes de la base et peuvent jouer le rôle de leaders pour favoriser la participation politique des femmes. Mais elles ne représentent pas nécessairement un modèle pour les femmes de classes non privilégiées (d'un point de vue économique, social, ethnique, de caste, etc.).

Les besoins et intérêts qu'elles défendent ne sont pas forcément, ceux des femmes des autres classes. Dans tous les cas, la question n'est pas d'examiner les questions féminines en marge de la société. Il s'agit bel et bien de lutter contre la pérennisation des inégalités véhiculées dans le cadre patriarcal. Dans cette optique, la vigilance est de mise pour éviter une instrumentalisation des mouvements féministes qui immobiliserait la lutte contre la subordination afin de solder l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques congolaises.

Il existe certes une manifestation de volonté des acteurs sociaux et étatiques à changer la situation des femmes de manière durable. La traduction de ce fait est perçue en RDC, à travers l'élaboration d'instruments nationaux en faveur de la promotion des femmes et de Genre et l'implication accrue des organisations féminines dans ces processus.

Sur le plan formel, quelques repères mettent en exergue cette volonté, du moins manifeste :

? 2002 : l'élaboration du Programme National pour la Promotion de la Femme Congolaise (PNPFC), adopté par le Gouvernement en Septembre 1999 et mise en oeuvre en 2002;

? 2004 : l'élaboration du Document des stratégies d'intégration du Genre dans les Politiques et programmes de Développement en RDC ;

? 2005 : la mise en place des Bureaux de réseautage des points focaux à Kinshasa et en provinces, suivi des sessions de formation de ces derniers en approche Genre ;

? 2006 : la promulgation de la loi sur les violences sexuelles;

? 2009 : l'élaboration de la Politique Nationale de Genre ;

IV.1.1. Appliquer la loi sur la décentralisation pour offrir aux femmes congolaises plus de chance d'accès à la gouvernance

Dans le contexte de la décentralisation, l'augmentation de la représentativité des femmes au sein des institutions démocratiquement établies aux niveaux local, provincial et national est un thème d'actualité.

D'un point de vue politique, selon Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN (82(*)), la décentralisation est une politique de gouvernance caractérisée par le rapprochement de l'Etat des citoyen(e)s.

Se référant à la Commission Européenne, elles expliquent que la décentralisation se fonde entre autres, sur la démocratie et la gouvernance locales. Dans cette optique, la décentralisation en RDC devrait instaurer l'égalité entre les hommes et les femmes dans la représentation politique, améliorer l'accès des femmes aux services et parvenir à une affectation des ressources locales de manière plus équilibrée entre les femmes et les hommes.

Pour Awa GUEYE (83(*)), la décentralisation est un contexte qui favorise la participation citoyenne, l'éclosion des initiatives individuelles et communautaires. A priori, le niveau local ouvrirait donc une importante porte d'entrée pour les femmes dans l'exercice de la gouvernance dans la sphère publique. La décentralisation proposerait un cadre adéquat de participation politique pour toutes les couches sociales et particulièrement les femmes, favorisant a priori la participation des organisations de la société civile, dont les organisations féminines, aux affaires publiques.

En institutionnalisant la participation, la décentralisation devrait encourager l'insertion des acteurs locaux, femmes et hommes, dans les espaces décisionnels congolais et rendre possible, voire faciliter, la mixité des candidatures et la participation inclusive aux élections.

Cependant, cette opportunité n'est ni automatique ni une fin en soi, et l'engagement politique ne suffit pas. Souvent, les hommes politiques et les élus locaux se déclarent favorables à une gouvernance décentralisée et à plus d'égalité entre les femmes et les hommes.

Mais la réalité est plus nuancée. Les mesures prises sont souvent superficielles. Malgré les lois et décrets promulgués, les difficultés de leur application sont nombreuses. Les faits et expériences présentés par nous même lors du colloque sur le Genre et Université en RDC attestent qu'en réalité « on fait plus de bruit que d'actions concrètes». Nous avons analysé le cas de l'île de la RDC où la législation impose l'égal accès des hommes et des femmes à toutes les institutions publiques. (84(*))

Dans notre communication intitulée « Vite, une femme sur ma liste : comment faire ? », nous avons décrit les difficultés pour « trouver des femmes » puisque les listes présentées lors des opérations électorales de 2006 en RDC devraient comporter autant de candidates que de candidats.

Le recrutement s'est ainsi fait parmi les membres actifs du monde associatif qui se déclarent généralement « apolitiques ». Pour la RDC, les données montrent que les statistiques au niveau des assemblées provinciales sont encore désespérantes : les femmes demeurent sous représentées tant au niveau provincial que national.

Les lois existent mais la volonté de l'application laisse à désirer, voire fait défaut, dans la majorité des cas. La faible volonté politique d'agir pour l'égalité femmes-hommes au niveau décentralisé, nourrie par l'insuffisance de conviction de la part des décideurs quant à la nécessité d'un changement en faveur des femmes, est le principal frein à l'accès des femmes à la gouvernance. Ceci se manifeste par exemple, par le nombre relativement faible de signataires de la Charte pour l'égalité des femmes et des hommes dans la vie locale du CCRE d'après Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN (85(*)). Un autre exemple est fourni par Charles MAPHASI KUMBU, par rapport à l'application de la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations Unies en RDC. Malgré les dispositions favorables à la participation au niveau local « les femmes n'ont pu obtenir que 8% sur l'ensemble des sièges à pourvoir aux législatives ». (86(*))

Au niveau des provinces, les femmes sont écartées des processus et des instances de décisions importantes et ignorent certaines opportunités qui s'offrent à elles. Diverses raisons ont été avancées pour expliquer ce constat.

D'après Joséphine YAZALI (87(*)), les citoyennes au niveau local en Inde ne connaissent pas toujours leurs droits et leurs obligations. Le pourcentage de femmes analphabètes y est élevé et le pouvoir est confisqué par une minorité qui n'est pas représentative. Cette situation, selon nous, est similaire à celle de la RDC.

La participation aux élections est souvent liée plus aux habitudes qu'aux principes démocratiques. Selon Sheila SANOUDI, au Burkina Faso, « les femmes qui s'engagent en politique sont celles qui sont instruites, actives dans les structures associatives. Elles ont des ressources financières ». (88(*))

Ces femmes sont rares dans les zones rurales. Par ailleurs, les formations politiques ou coalitions de partis sont les seules autorisées à présenter des candidat(e)s aux élections, or au Burkina Faso en 2005, environ 9% des membres de bureaux exécutifs des partis politiques sont des femmes et elles y occupent des postes de subalternes. La chance pour une femme d'être proposée par les partis est ainsi infime.

De plus, une femme qui réussit en politique est mal vue, notamment au niveau local. Cette observation de Sheila SANOUDI est partagée par BENAOUDA LEBDAI qui souligne « la facilité avec laquelle les femmes sont rapidement qualifiées de prostituées, de légères, de faciles, dès qu'elles essaient de s'affirmer sur le plan politique ou économique, dès qu'elles tentent de prendre le pouvoir pour faire avancer la société ». (89(*))

A Madagascar, les enquêtes réalisées par Lala RAHARINJANAHARY ont révélé que même si les femmes maires sont appréciées, aussi bien par leurs supérieurs hiérarchiques (au niveau des régions, ministères, etc.) que par leurs subordonnés, « elles n'ont pas droit à l'erreur et sont plus exposées aux critiques que les hommes ». (90(*))

Même si la décentralisation rime avec la stratégie de gouvernance rapprochant l'Etat des citoyens, les inégalités de genre accompagneront la décentralisation politique si des efforts spécifiques ne poussent pas dans l'autre sens. La mise en place des conseils municipaux en Iran, que cite Lucia DIRENBERGER (91(*)), en est un exemple.

En effet, le contexte de transformation socioculturelle de la société Iranienne est propice à l'entrée des femmes dans la sphère publique et politique locale. L'absence d'organisation politique dans les villes moyennes et les villages laisse aux candidat(e)s indépendant(e)s, parmi lesquels les femmes sont nombreuses, une réelle chance dans la compétition locale. Mais l'application de l'approche genre dans cette politique de décentralisation est située dans un contexte dualiste : un système électoral fondé sur le suffrage universel d'une part, et une constitution conçue sur la base de l'Islam, d'autre part.

Dans un tel contexte, l'Iran a institutionnalisé les discriminations de Genre et la décentralisation des inégalités de représentation politique.

IV.1.2. Genre et Gouvernance en RDC : Quelles pistes d'actions ?

Des avancées sont observées dans le pays actuellement : lois favorables à la participation politique des femmes ; présence des femmes en politique de plus en plus acceptée ; quoique lente, augmentation des candidatures féminines aux élections. Un travail individuel pour renforcer l'assurance et l'affirmation de soi des femmes est nécessaire et mérite d'être accompagné par la famille, par les associations et organisations travaillant au niveau décentralisé.

Le rôle des médias pour véhiculer une image positive des femmes congolaises dans la politique a été spécifiquement soulevé. Néanmoins, cette participation politique des femmes, notamment au niveau des Provinces, continue à représenter un chemin semé d'embûches dans la grande majorité des situations. Pour passer du discours à la pratique, il faut une stratégie permanente et sensible au genre qui interroge, entre autres, les systèmes d'institutionnalisation.

- Réviser les textes juridiques

L'égalité des femmes et des hommes est un droit fondamental spécifié dans l'article 1er de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Partout, que de chemin parcouru en termes de droit pour trouver un statut plus mérité à la femme !

Pourtant, Awa GUEYE constate qu'il y a de nombreuses confusions sur la nécessité d'une égale participation des femmes et des hommes aux pouvoirs de décision dans la pratique. Des confusions, dont entre autres, celle de « voir la participation des femmes comme un privilège à accorder éventuellement aux femmes par magnanimité ou condescendance ».

En fait, l'égalité femmes-hommes dans la participation à la gouvernance n'est pas considérée comme un droit. Si elle l'était, la question de savoir ce que la participation des femmes à la gestion des affaires publiques apporte comme valeur ajoutée, n'aurait pas sa raison d'être. Le simple fait que cette question ait été évoquée lors de plusieurs communications atteste qu'au sein de la communauté politique congolaise, l'égalité femmes-hommes dans la gouvernance n'est toujours pas comprise comme un droit.

Pourquoi cet aspect « droit à la gouvernance » est-il négligé ? Claudy VOUHE et Vanessa GAUTIER ont apporté trois réponses : « à cause de la faiblesse des processus officiels qui permettent de revendiquer les droits et de demander des comptes aux Etats sur les conventions internationales ; parce qu'il n'y a pas de consensus quant à ce que ces droits signifient en pratique ; et du fait de l'insuffisance des moyens et capacités des organisations de la société civile à porter les revendications liées aux droits et au genre ». (92(*))

Le monde a beaucoup changé depuis les débuts du militantisme pour les droits des femmes. Plusieurs communications ont rappelé les acquis en matière de législation relative à l'égalité de traitement, à l'intégration de la dimension de Genre, et à l'adoption de mesures spécifiques en faveur de l'émancipation des femmes. Si les cadres international et régional sont d'une utilité certaine, ils sont insuffisants en eux-mêmes.

Au niveau national, certains pays bénéficient d'une Constitution qui garantit les droits fondamentaux dont le suffrage universel et le principe du non discrimination à tous les niveaux. C'est le cas par exemple de l'île Maurice, de la RDC, du Cameroun, ou du Sénégal. Tout le monde s'accorde à dire qu'une Constitution n'est pas neutre par rapport à l'égalité des sexes. La formulation des textes affiche parfois une neutralité laissant supposer, sans la nommer, une égalité parfaite entre femmes et hommes. Il y a lieu cependant de revendiquer que les deux sexes soient explicitement stipulés dans le texte constitutionnel.

Les participant(e)s sont unanimes : la vigilance est de mise s'agissant de la formulation des droits et des lois et des structures et modalités de leur mise en oeuvre. A titre d'exemple, Awa GUEYE a souligné que la Constitution du Sénégal précise que « tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Les hommes et les femmes sont égaux en droit ».

Le code des collectivités locales utilise les expressions « Conseillers » et « conseillères ». Il précise dans les articles sur la communauté rurale, sur la commune, et sur la région, que « les listes de candidatures sont représentées pour le scrutin proportionnel et pour le scrutin majoritaire, en tenant compte de la dimension genre dans les investitures ».

En France, Sophie ELIZEON et Irène STOJCIC rappellent que la lutte menée par les féministes depuis les années soixante a abouti à l'adoption en 2000 de la loi sur la parité. Celle-ci « favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives, rendant obligatoire la candidature d'autant de femmes que d'hommes pour les scrutins de liste ».

Les recommandations rendant obligatoires la parité dans certains scrutins, la répartition égalitaire des sièges et délégations ou encore l'augmentation des pénalités en cas de non respect des obligations en la matière, sont reprises par les évolutions récentes de la loi sur la parité.

Des effets directs sont observés sur les listes présentées aux élections municipales, régionales, sénatoriales et européennes et sur les résultats des élections. Les résultats positifs enregistrés ne sont pas seulement quantitatifs mais aussi qualitatifs. On constate, d'une part un « changement de regard que porte la société sur les femmes en politique, changeant la vision de normalité favorisant la présence de candidats aux scrutins », et d'autre part que «les femmes sollicitées ont la possibilité de négocier leur position dans la liste ».

Pour nous, l'inscription de l'égalité femmes- hommes dans la Constitution n'est pas une fin en soi mais une étape à franchir. Elle accompagne la démocratie et la pleine participation des citoyen(e)s en politique. Les réalisations concernant l'explicitation de l'égalité des sexes dans la Constitution et les lois au niveau national pourraient servir d'exemples à d'autres pays. Ce point de vue intéresse particulièrement la RDC où la révision de la Constitution est d'actualité.

A ce sujet, nous disons énergiquement qu'il n'y a pas de recette ni de formulation « prête à l'emploi » pour réviser une Constitution afin d'insérer la dimension Genre. Elle propose une approche participative consistant à travailler ensemble à partir d'un texte de Constitution, faire une analyse commune du contexte pour trouver les formulations appropriées au contexte spécifique de la RDC. La mise en réseau des juristes, politologues et sociologues engagé(e)s dans la promotion du genre est recommandée pour cette concrétisation.

En dépit des lois et décrets adoptés en faveur de l'égale participation des femmes et des hommes à la gouvernance, des contraintes ont été relevées, mises en exergue par deux cas précis. D'abord, Charles MAPHASI KUMBU constate qu'un grand travail reste à mener en RDC, notamment pour traduire dans les faits les prescrits de la Résolution 1325. Selon lui, les difficultés proviennent en partie du caractère non contraignant du texte compte tenu de la terminologie utilisée et notamment l'usage des verbes « demander, prier, engager, souligner, et déclarer ».

Ces termes n'impliquent pas un engagement mais une invitation pour sa mise en oeuvre. Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN (93(*)) ont évoqué l'application de l'article 30 de la Charte pour l'égalité des femmes et des hommes dans la vie locale du CCRE : bien que le texte précise que « la collectivité territoriale signataire s'engage d'impliquer de façon égalitaire les femmes et les hommes, ....à utiliser les relations de jumelage comme plateforme d'échange sur les questions d'égalité des femmes et des hommes..., à intégrer la dimension de l'égalité des sexes dans ses actions de coopération décentralisée », la réalité est à mille lieues des engagements pris par les signataires de la charte. Malgré la loi, des facteurs structuraux bloquent aussi la participation des femmes. Patricia Day HOOKOOMSING, restituant les témoignages de femmes ayant une expérience dans la politique à Maurice, a fait savoir que « la puissance des lobbies liés au grand capital, donc sous le contrôle des hommes, et ceux liés aux regroupements communaux et religieux, qui sont également contrôlés par les hommes font que les femmes ont peu ou aucune chance de se faire une place en politique ». (94(*))

De plus, le manque de financement est un autre frein auquel les femmes désireuses d'entrer en politique doivent faire face. Au Maniema, une femme parmi nos enquêtées a témoigné que « sa demande d'être candidate était écartée par le parti parce qu'elle ne disposait pas de la somme nécessaire pour contribuer à la campagne électorale ».

Ainsi, les autres enquêtées ont retenu que pour ne pas rester lettre morte, un dispositif juridique, doit être appuyé par une volonté politique. Des mécanismes concrets d'application et de suivi devraient accompagner ces textes.

Dans le domaine juridique, il y a des leviers « incontournables » pour favoriser la participation politique des femmes. Par exemple, fixer un quota et le rendre obligatoire sur certains scrutins ; favoriser une répartition égalitaire des sièges ; réclamer des listes paritaires (zébrées, alternance hommes - femmes) ; instaurer l'égalité comme condition de recevabilité des listes et veiller à la refonte et au réexamen des codes électoraux en appui à la Constitution.

Il est important aussi d'analyser les systèmes électoraux selon le Genre : à titre d'exemple, en règle générale, le système de candidats multiples par circonscription, assorti du système majoritaire à un tour (« first passed the post ») ne sert pas la cause des femmes. Globalement, une veille permanente doit être menée car le processus de gouvernance incluant l'égalité femmes-hommes ne suit pas de manière linéaire la lutte pour la démocratie.

En plus des textes et lois adoptés, une volonté politique doit être affichée avec des mesures adéquates luttant contre le manque d'instruction et la pauvreté, et permettant de prendre en compte les rapports de violence dans la ré-conceptualisation de la gouvernance.

Car « les violences, dont les violences sexuelles, représentent une expression non seulement des rapports de force entre hommes et femmes mais aussi entre citoyens et pouvoir public ».

Le niveau de compétence des élues et l'insuffisance d'outils à leur disposition constituent un point critique. C'est pourquoi les activités de renforcement de capacités et des mesures d'accompagnement sont nécessaires pour soutenir la participation des femmes en politique. Il faut des budgets appropriés et explicites pour faciliter la mise en oeuvre et pour obliger les bénéficiaires de rendre des comptes.

L'indicateur de quantité relatif à la présence féminine est une chose, nécessaire certainement, mais insuffisante en soi. Car avoir des données quantitatives ne résout pas tout. Comment, par exemple, mesurer le rapport de subordination entre femmes et hommes à partir des données, dans des contextes particuliers ?

Des informations à caractère plus qualitatif ont aussi été suggérées dans les communications de plusieurs chercheurs congolais sur le Genre, qui méritent d'être recueillies et publiées, systématiquement. Elles portent par exemple sur les changements de comportement, d'attitude, de mentalité, de perception, du public par rapport aux femmes dans la politique.

- Les indicateurs nécessaires pour mesurer la « bonne gouvernance » dans toute sa complexité

Quelques paradigmes présentés par Vanessa GAUTIER et Claudy VOUHE donnent une vision globale et bornent quelques pistes d'évaluation : liberté de choix et d'actions, respects des droits, prises en compte des différents besoins, intérêts, contraintes et priorités des hommes et des femmes, etc.

D'après nous, des indicateurs demandent encore à être créés, expérimentés et affinés, tout comme les systèmes pour les formuler, les suivre et les vulgariser. Il est nécessaire de définir ensemble les données pertinentes qui peuvent rendre compte de cette pluri dimensionnalité de la réalité dans laquelle le Genre est considéré en RDC et s'articule avec la gouvernance.

IV.2. Les repères de la pérennisation au niveau institutionnel

On note à ce niveau, des avancées dans les instruments nationaux, dont la pulsion vient à la fois du contexte international de la lutte pour la promotion de genre et des efforts des organisations ayant le genre comme champ d'action.

A cet effet, depuis la transition, une lecture des textes qui normalisent la vie nationale reflète la volonté étatique de promotion de genre.

a) L'Accord Global et Inclusif.

L'Accord Global et Inclusif met en évidence ce qui suit : pour garantir une transition pacifique, les institutions de la transition doivent assurer une représentation appropriée des femmes à tous les niveaux des responsabilités.

b) La Constitution de transition.

Cette constitution a mis en exergue la volonté de promouvoir et de « garantir les libertés et les droits fondamentaux du citoyen congolais, et à défendre ceux de la femme et de l'enfant ».

- Dans l'article 17, il est clairement dit que tous les congolais sont égaux devant la loi et ont une égale protection des lois. Aucun congolais ne peut, en matière d'éducation et d'accès aux fonctions publiques ni en aucune matière faire l'objet d'une mesure discriminatoire, qu'elle résulte de la loi ou d'un acte de l'exécutif, en raison de sa religion, de son sexe, de son origine familiale, de sa condition sociale, de sa résidence, de ses opinions ou de ses convictions politiques, de son appartenance à une race, à une ethnie, à une tribu, à une minorité culturelle ou linguistique.

- L'article 51 de la Constitution de la transition stipule ceci : « l'Etat a le devoir de veiller à l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard de la femmes et d'assurer le respect et la promotion de ses droits. L'Etat doit prendre dans tous les domaines, notamment dans les domaines économique, social, et culturel, toutes les mesures appropriées pour assurer la pleine participation de la femme au développement de la nation. L'Etat prend des mesures pour lutter contre toutes les formes de violence faite à la femme dans la vie privée. La femme a droit à une représentation significative au sein des institutions nationales, provinciales et locales ».

c) Le décret 03/027 du 16 Septembre 2003 fixant les attributions du Ministère de condition féminine.

Déjà depuis 1980, le domaine d'intervention de la politique en faveur des femmes fera l'objet d'une nouvelle réglementation avec l'avènement du Ministère de la condition féminine comme nouveau mécanisme pertinent des actions relatives à la situation des femmes. C'est la reconnaissance gouvernementale d'un champ d'action correspondant aux politiques publiques menées en direction des femmes.

Le discours gouvernant sur la promotion féminine va se structurer autour des idées concernant l'émergence du concept d'intégration de la femme au développement, et va être inscrit dans la politique gouvernementale.

En 2003, ce ministère s'est vu attribué comme missions 

- La protection et la promotion du statut de la femme ;

- L'étude et la mise en oeuvre de toutes mesures visant à mettre fin à la discrimination contre la femme en vue d'assurer l'égalité en droit avec l'homme ;

- L'aménagement du cadre légal et institutionnel pour assurer la participation de la femme au développement de la nation et une représentation significative au sein des institutions nationales, provinciales et locales ;

- La collaboration avec les ministères des Droits humains, de l'Enseignement, de la Famille, la femme et l'enfant ;

- L'intégration effective de la femme dans les politiques et programmes divers en RDC.

L'une des difficultés à l'institutionnalisation du genre est que, les différentes structures créées au niveau du gouvernement pour la question de promotion des femmes sont instables.

c) La Constitution de la 3ième République.

Concernant la condition féminine, l'article 14 de la Constitution de la Troisième République, promulguée le 18 février 2006, dispose que :

Les pouvoirs publics veillent à l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard de la femme et assurent la protection et la promotion de ses droits.

Ils prennent, dans tous les domaines, notamment dans les domaines civil, politique, économique, social et culturel, toutes les mesures appropriées pour assurer le total épanouissement et la pleine participation de la femme au développement de la nation.

Ils prennent des mesures pour lutter contre toute forme de violences faites à la femme dans la vie publique et dans la vie privée.

La femme a droit à une représentation équitable au sein des institutions nationales, provinciales et locales. L'Etat garantit la mise en oeuvre de la parité homme-femme dans lesdites institutions. La loi fixe les modalités d'application de ces droits.

Toutefois, la route qui conduit à la parité des sexes est encore longue à parcourir ; mais il reste que l'observation dévoile des tendances de modification des valeurs et des pratiques contribuant dans une certaine mesure à moins infirmer les femmes et à légitimer en partie la civilisation phallocratique des moeurs de genre. Ces tendances ont été beaucoup plus observables dans la participation de la femme à la gestion de la chose publique. L'Etat et les acteurs sociaux y ont contribué sensiblement.

III.3. regard sur le processus de la révision du code de la famille

Des motivations profondes ont milité pour la réforme du code de la famille qui renfermait en lui des dispositions en défaveur des femmes. Dans la loi n° 87-010 du 1er août 1987 portant sur le Code de la famille figurent plusieurs dispositions discriminatoires à l'égard de la femme(55), et ce alors que le Code est censé protéger les droits de tous les membres composant une famille. De nombreuses dispositions sont donc en contradiction avec la Convention sur toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes comme le souligne le rapport CEDAW/C/COD/4-5. Par ailleurs, l'aspect discriminant de plusieurs articles du Code de la Famille avait déjà été souligné par le CEDEF lors de sa 22ème session.

L'article 330 du Code de la famille relatif au contrat de mariage, pose le principe de l'égalité entre époux. Cette loi impose aux époux des droits et obligations réciproques : obligations mutuelles de vie commune, obligations quant aux soins et assistance mutuels, obligation à la fidélité, respect et affection mutuels, etc. Cependant, il existe de nombreux paradoxes qui violent ce principe d'égalité entre époux alors que l'article 16.1.c de la CEDEF affirme que les deux époux ont les mêmes droits et responsabilités pendant le mariage.

Le Code de la famille limite dans son article 215, la capacité de la femme mariée, ce qui est contraire à l'article 15.1 de la CEDEF qui demande aux Etats de reconnaître à la femme l'égalité avec l'homme devant la loi.

En effet, les articles 444 à 448 de ce Code placent la femme mariée dans une position de dépendance et d'obéissance telle qu'elle ne peut poser aucun acte juridique sans le consentement de son mari.

Ces articles font ainsi passer la femme mariée de la tutelle parentale à la tutelle maritale, et consacrent un écart considérable entre les époux. L'article 448 dispose ainsi que : « La femme doit obtenir l'autorisation de son mari pour tous les actes juridiques dans lesquels elle s'oblige à une prestation qu'elle doit effectuer en personne ».

Violant les principes de l'égalité en droit et du respect de la dignité humaine, ces dispositions entravent la participation des femmes à la vie sociale, économique et politique.

A cet effet, l'initiative de la révision du Code de la famille pour le changement du statut juridique de la femme a connu récemment d'importantes avancées. Un mémorandum a été présenté en 2002 au législateur congolais, puis défendu en 2004 auprès de la Commission de la réforme du droit congolais par les organisations féminines.

Ainsi, la loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant sur le Code du travail a apporté des réponses en vue du renforcement des mesures antidiscriminatoires à l'égard des femmes travailleuses. L'article 1 a ainsi supprimé l'opposition expresse du mari à l'engagement d'une femme mariée.

Pourtant, cette même loi entretient une certaine confusion dans son article 6 relatif « à la capacité de contracter », qui prévoit que « la capacité d'une personne d'engager ses services est régie par la loi du pays auquel elle appartient, ou à défaut de nationalité connue, par la loi congolaise ». En renvoyant la capacité de contracter au droit commun congolais, c'est le Code de la famille qui s'applique. Or, le Code de la famille dans son article 215 limite la capacité de la femme mariée à imposer son choix d'effectuer un travail salarié, ainsi que dans son article 448 disposant que la femme doit obtenir l'autorisation de son mari pour tous les actes juridiques.

La nouvelle proposition révisant le Code de la famille, élaborée avec le Ministère de la justice, prévoit de supprimer ces dispositions discriminatoires. Aussi, la question de la représentation féminine dans les instances politiques ne peut être analysé que par rapport à la question de démocratie, en mettent en rapport l'ensemble du système constitutionnel congolais, les ordonnancements juridiques et les exigences démocratiques.

La réforme du droit congolais s'avère nécessaire, elle implique l'harmonisation des lois nationales avec les instruments juridiques internationaux, l'abrogation de certaines lois discriminatoires à l'égard des femmes et l'élaboration de nouvelles lois intégrant la dimension « Genre ».

IV.4. les repères de la pérennisation au niveau des Organisations Féminines.

Des défis majeurs persistent en ce qui concerne la mise en oeuvre des dispositions législatives, mais aussi, la révision des dispositions discriminatoires qui persistent dans ces textes. Le CEDEF avait déjà souligné cet état de fait lors de son rapport conclusif de la Vingt-deuxième session du Comité (17 janvier- 4 février 2000). Le Comité s'était montré préoccupé du fait qu'en dépit de certains acquis législatifs, le Code de la famille, le Code pénal et le Code du travail continuent de contenir des dispositions discriminatoires.

Le Comité avait alors recommandé au Gouvernement de donner la priorité la plus élevée à l'adoption d'une législation visant à garantir l'égalité de jure et de facto des femmes, et d'en assurer l'application. Très peu de mesures ont jusqu'à présent été adoptées pour abolir les dispositions discriminatoires de l'ensemble de textes qui régissent la RDC et permettre l'application effective de ceux qui promeuvent la participation politique des femmes.

Pour ce faire, les organisations féminines ont mené certaines actions pour que change cet état de chose.

IV.5. Le plaidoyer pour la révision de la loi électorale.

Depuis la fin des élections de 2006, des femmes ou associations de femmes se sont réunies pour évaluer les élections mais plus encore pour stigmatiser le faible taux de femmes élues. Parmi les causes de cette faiblesse, l'on a souligné la loi électorale qui, en son article 13, a vidé de son sens l'article 14 de la Constitution promulguée le 18 février 2006.

L'article 13 de la loi électorale qui parle de la composition des listes stipule à l'alinéa 3 : « Chaque liste est établie en tenant compte, s'il échait, de la représentation paritaire homme-femme et de la promotion de la personne vivant avec handicap ». Et souligne à l'alinéa 4 : « Toutefois, la non réalisation de la parité homme-femme au cours des prochaines échéances électorales n'est pas un motif d'irrecevabilité d'une liste ».

Les analyses féministes et progressistes ont considéré l'article 13 comme une régression par rapport à l'avancée démocratique contenue dans l'article 14 de la Constitution. C'est aussi cet article 14 de la Constitution qui avait suscité beaucoup d'espoir, d'audace lorsqu'on a proposé les fameuses « listes bloquées et zébrées » que le législateur d'alors n'avait pas retenues.

Les femmes politiques ont fait un plaidoyer parlementaire et attendent la révision de la loi électorale en tenant compte de la parité homme-femme pour toutes les listes déposées par les partis politiques. En ce qui concerne la CENI, elles demandent aux partis politiques de désigner des femmes au bureau de la CENI et aux organes de décision de mettre fin à toute forme de violence faite à la femme au sein des partis politiques, etc.

IV.6. Le plaidoyer pour la révision du code de la famille.

En mars 2006, le Réseau Action Femme (RAF) a pris part à l'atelier de révision des propositions d'amendement du Code de la famille pour garantir les droits des femmes et des enfants, organisé par le service d'études et de recherche du Ministère de la justice. Actuellement il existe un document qui porte la proposition d'amendement du Code de la famille en vue de garantir les droits des femmes et des enfants.

IV.7. Le plaidoyer pour la loi de mise en oeuvre de la parité.

Il est à noter que jusqu'à ce jour, il n'existe pas encore de mécanismes qui permettent l'effectivité de ces dispositions constitutionnelles en faveur de la représentation paritaire des femmes et des hommes dans les institutions de la RDC. Quand bien même le principe d'égalité est consacré dans la Constitution, un silence demeure quant aux conditions de rendre concret ce principe ; les dispositifs institutionnels pour rendre effectif ce principe n'apparaissent pas de manière expresse dans ces textes et les mécanismes contraignants qui permettent l'effectivité de cette disposition dans la pratique n'existent pas encore.

Les organisations féminines ont ainsi multiplié des actions pour que soit adoptée la loi de mise en oeuvre de la parité en RDC.

IV.8. Le plaidoyer auprès des responsables des partis politiques.

Les organisations féminines ont entrepris un plaidoyer pour l'inclusion paritaire du genre dans le projet de loi instituant la CENI, appuyé par le programme Gouvernance politique du PNUD à l'initiative de la cellule Genre et Elections de la Division électorale de la MONUC. Ce plaidoyer a malheureusement échoué au niveau du Parlement, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat.

Il existe à cet effet, un écart entre les textes et les pratiques institutionnelles en ce qui concerne l'effectivité des politiques élaborées en direction des femmes. La réticence des acteurs politiques à la promotion de genre reste manifeste. Il faut donc susciter une conscience étatique pour la promotion de genre.

Pour le moment, CAFCO, encouragé par les deux partenaires précédemment cités, tourne son plaidoyer vers les partis politiques, qui seront appelés à désigner en leur sein les futurs membres du bureau de la CENI. Cet état de chose constitue déjà un problème par rapport aux élections futures.

CONCLUSION

La question de corrélation Genre et participation politique est une problématique qui préoccupe toutes les couches sociales ce dernier temps en RDC, comme thématique importante tant au niveau de tout le pays en général que dans toutes les provinces de la République Démocratique du Congo en particulier.

La visée de cette analyse qui, au-delà des inégalités sexuelles constatées dans la communauté politique congolaise, était de mettre en corrélation explicative les variables Genre et participation politique afin d'atteindre une explication sur les spécificités féminines qui influent sur la vie politique et vice versa. Au-delà de cette conception, s'accole également l'analyse systématique de causes et effets de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques congolaises.

Ce problème a soulevé en nous quelques questions notamment: Existe-il, en RDC des facteurs explicatifs du Genre, une fois mis en application, pourraient-ils contribuer à la participation politique inclusive ? Sinon, que faire pour que la matérialisation de l'approche Genre suscite la visibilité des femmes dans l'exercice du pouvoir politique au Congo? Quels sont, enfin, les indicateurs manifestes des inégalités Hommes-Femmes prouvant que l'invisibilité des femmes au sein des institutions politiques de la RDC est une réalité?

Trois hypothèses ont été ensuite avancées à cet effet à savoir:

Primo, nous avons estimé qu'il existerait en République Démocratique du Congo des conceptions explicatives sur le Genre, issu des connaissances empiriques et réflexives qui bloqueraient le processus de la participation politique inclusive.

Secundo, ces conceptions péjoratives et subjectives de la notion de Genre, la déconsidération des potentialités féminines, la primauté des pratiques traditionnelles face aux textes juridiques modernes sur la position de la femme, l'abandon forcé de scolarité des jeunes filles en faveur des enfants du sexe masculin seraient des faits générateurs de l'invisibilité des femmes dans l'espace où les décisions politiques sont prises en RDC.

Tercio, nous avons estimé que le nombre des femmes parlementaires congolaises par rapport à celui des hommes parlementaires, le nombre des femmes responsables des partis politiques, le nombre des femmes ministres tant au sein de gouvernement central que dans les gouvernements provinciaux, l'inexistence de leadership politique féminin dans les diverses structures politiques et sociales, seraient des indicateurs manifestes de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques de la République Démocratique du Congo.

La vérification de ces trois hypothèses a été rendue possible grâce à la méthode dialectique matérialiste.

Ainsi, il était question de privilégier le courant d'idées de matérialisme historique ; l'unique courant qui nous a permis de produire un schéma explicatif approprié afin d'atteindre l'explication de la causalité de l'invisibilité des femmes dans les institutions politiques de la République Démocratique du Congo d'une part, et de produire des explications relatives à la nature de combat politique opposant les hommes et les femmes ; les armes et stratégies utilisées par chaque camp dans ce combat pour le pouvoir politique.

Grâce à cette méthode, nous avons compris que les déterminants et les manifestations du Genre face à la participation politique subissent des mutations incessantes, car les textes juridiques garantissant les droits des femmes subissent aussi des mutations en fonction de l'évolution de la société congolaise elle-même.

Le choix de la démarche (méthode) dialectique matérialiste est fondé sur l'obligation de procéder par l'analyse et l'explication causale de phénomène « invisibilité des femmes au sein des institutions politiques tant au niveau national que provincial.

Pour collecter les données, les traiter et/ou les analyser, nous nous sommes servis des techniques suivantes : la recherche documentaire, l'observation directe et l'enquête par des interviews.

Ainsi, au terme de cette étude , il convient de relever que la question de l'invisibilité des femmes au sein des institutions politiques de la RDC a toujours été et demeure préoccupante, surtout dans les milieux où la majorité de la population est influencée par la culture arabo-musulmane, sans exclure d'autres faits corollaires tels que : la pauvreté, la crise de revenu et de l'emploi, l'insuffisance et la docilité des salaires ainsi que l'exode rural qui pèsent sur les conditions de vie des femmes congolaises en général et celles du Maniema en particulier.

En République Démocratique du Congo les conceptions explicatives sur le Genre sont issues des connaissances empiriques et réflexives, par conséquent elles bloquent le processus du développement politique inclusif. En outre, les facteurs à la base de la déconsidération du Genre selon la majorité de nos enquêtées sont : la déconsidération des potentialités féminines, la primauté des pratiques traditionnelles face aux textes juridiques modernes sur la position de la femme, l'abandon forcé de scolarité des jeunes filles en faveur des enfants du sexe masculin seraient des faits générateurs de l'invisibilité des femmes dans l'espace où les décisions politiques sont prises en RDC. Ces résultats justifient la confirmation de la première et la deuxième hypothèse de cette étude.

La question de participation politique des femmes en RDC, reste au centre des débats ayant trait au développement durable. Les femmes sont dans leur ensemble une ressource humaine potentielle et importante dans le contexte actuel de reconstruction nationale, de consolidation de la paix et de réformes dans plusieurs secteurs de la vie nationale.

Il sied toutefois de noter que les situations des femmes en RDC sont multiformes et contextuelles. Les femmes ne constituent pas un ensemble homogène dans un contexte multiculturel, et les politiques en direction d'elles devraient tenir compte de toutes les réalités auxquelles les femmes font face.

Il s'avère donc important de tenir compte du fonctionnement du Genre dans toutes les sphères de vie où se retrouvent les femmes et de mettre sur pied des stratégies adaptées à chaque situation des femmes pour que soient effectivement embarquées toutes les femmes vers un changement en ce qui concerne leur participation politique. Les facteurs économiques, socioculturels, politiques devront être identifiés, revisités par rapport à chaque contexte pour susciter le repositionnement des femmes.

A cet effet, les statistiques des femmes se trouvant dans les institutions où les grandes décisions politiques sont prises varient de manière continuelle ou progressiste et cela de façon spontanée et quotidienne, ce qui apporte dans le vieil ordre des choses dans de menus changements « quantitatifs ». Les divers tableaux visualisés dans cette étude, montrent que les femmes sont invisibles au sein des institutions politiques de la RDC depuis l'an 1960 jusqu'à 2011. A cet effet, notre troisième hypothèse est également confirmée.

Les enquêtes sur terrain relèvent les réalités selon lesquelles « l'empowerment », c'est-à-dire « attribution du pouvoir » doit briser les mythes de la condition féminine homogène et reconnaitre l'existence des différences de statuts, des rapports de force et même de la domination. L'empowerment doit correspondre, selon nos enquêtées, à un droit à la parole et à la reconnaissance sociale en ce sens qu'il peut être considéré comme un processus vers l'égalité entre l'homme et les femmes, et doit être défini dans chaque contexte culturel spécifique (social, économique et politique).

Les conclusions de nos enquêtes prouvent qu'il existe en République Démocratique du Congo en général et au Maniema en particulier les incompatibilités, les contradictions et les inégalités du Genre. L'égalité dont réclame la majorité de nos enquêtées ne signifie pas seulement l'inclusion des femmes dans les institutions politiques, mais le processus visant à faire participer les femmes comme les hommes à la préparation et à l'adoption des mécanismes de la pérennisation de la participation des femmes au sein des institutions politiques de la RDC.

Le processus d'inclusion et d'élargissement est la condition déterminante pour atteindre les objectifs du millénaire pour le développement politique au Congo - Kinshasa. L'égalité de Genre consiste à oeuvrer pour que les femmes aient un accès équitable aux responsabilités politiques du pays.

La visibilité politique des femmes au sein des institutions politiques congolaises a nécessité pour nous le concours de la théorie et de l'empirie, c'est que la théorie de GENDER couvre bien le débat et que l'empirie démontrée à partir de la réalité de la ville de Kindu donne les précisions de l'exploitation de l'analyse dialectique matérialiste. La réalité de Kindu nous permet de généraliser le phénomène de l'invisibilité des femmes dans toutes les institutions politiques du pays, même au niveau national.

Enfin, le résultat de ce travail, une fois exploité par le pouvoir, peut - on s'attendre incontestablement et inconditionnellement à un changement socio - politique et économique en faveur de l'égalité de sexe. Le quatrième chapitre a explicité certains mécanismes de la pérennisation de la participation politique des femmes au sein des institutions politiques congolaises. Non seulement il y aura un accroissement des effectifs des femmes exerçant le pouvoir politique mais aussi l'exécution de l'arsenal juridique qui existe sur les droits des femmes. Ce changement qui prend la forme révolutionnaire et la forme évolutive se confirme dans ce travail, à partir non seulement de la présentation des statistiques des femmes politiques d'une manière chronologique mais aussi de l'inverse des valeurs et des conceptions du Genre en RDC, d'autant plus que les femmes dans certaines entités commencent à exercer le pouvoir politique.

Au regard de cette conclusion, nous recommandons à tous les acteurs les dispositions ci-après :

- Une socialisation politique en direction des femmes

La famille, l'école, l'église, les médias, les milieux de travail et de vie, sont des espaces appropriés d'injections de nouvelles normes et conduites de genre. Ces canaux de socialisation devraient être exploités pour une redéfinition des rapports de genre, dans le sens d'une amélioration de la perception du rôle politique des femmes. Une redistribution des rôles politiques conforme au contexte actuel s'impose, pour réduire la passivité des femmes en rapport avec les activités politiques.

La cellule familiale est la base de l'action de révisitation des rapports de genre. L'école qui participe à la socialisation de la jeune fille, devra revoir son programme scolaire afin d'intégrer la dimension genre propice à l'émergence d'une génération des femmes prêtes à participer au même titre que les hommes aux activités politiques et aux sphères de prise des décisions.

Par leur diversité et leur importance au niveau de la communication de masse et de la rentabilité économique, les médias constituent un levier de la vie politique et de la démocratie participative. Or, le champ médiatique se caractérise par une double carence : l'image de la femme y est souvent négative et la présence des femmes dans les débats politiques est marginale, y compris quand ces débats sont animés par des femmes journalistes.

Pour remédier à cette double carence, il importe de réformer le système d'information de sorte à assurer une visibilité publique aux femmes pour qu'elles puissent s'exprimer autant que les hommes et diffuser une image active en rupture avec les stéréotypes véhiculés par la publicité et les feuilletons télévisés.

- Les structures politiques représentatives

La présence des femmes dans les structures politiques est à renforcer, car leur représentation reste très faible tant dans les partis politiques que dans les structures étatiques de prise des décisions. Ce qui constitue un frein à l'émergence d'une conscience collective de promotion de genre. Les acteurs politiques doivent travailler à une dynamique favorisant la présence des femmes dans différentes structures de représentation politique qui constituent, à vrai dire, une véritable « école de la citoyenneté ».

- L'action des organisations féminines et de la société civile

Ces organisations doivent revoir leurs approches en ce qui concerne la participation politique des femmes. Il s'avère important de se rapprocher davantage de la base pour impulser des changements significatifs en faveur de la participation politique des femmes. Tout au long de l'enquête, il a été constaté une déconnexion assez prononcée de la base féminine aux leaders de la société civile, surtout en milieu rural et semi rural. Un effort de rapprochement est indispensable.

- La connexion entre le local et le global

Aussi bien pour la société civile que pour les acteurs étatiques, il est important d'établir une interaction entre le local et le global. Ce qui implique une connaissance suffisante des réalités locales auxquelles les femmes font face et qui ont des implications sur leur participation politique.

1. Nécessité des palliatifs d'ordre institutionnel, législatif et associatif pour combler les retards des femmes.

2. Nécessité d'une synergie d'action entre l'Etat, la société civile, les femmes et les communautés locales.

BIBLIOGRAPHIE

I. OUVRAGES

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· Marie ZAMUDA RAMAZANI, (2009), Le Genre et la parité en RDC, Kinshasa, CAFCO.

II. MEMOIRES DES DEA/DES.

· Hygin KAKAÏ, (2003), Approche Genre et projets de développement au Bénin : Cas du PADEL à Nikki et du PNDC à Djidja (mémoire de maîtrise en Sociologie Anthropologie), UAC, FLASH, DPSA,

· Léon MONDOLE Esso LIBANZA EBEYOGO, (2010), Le financement pour l'égalité du Genre et le renforcement du pouvoir économique des Femmes entrepreneurs de Kindele dans la ville de Kinshasa (de 2004 à 2010).

III. ARTICLES ET COMMUNICATIONS SCIENTIFIQUES

· Eric  FASSIN, (1999), « The Purloined Gender : American Feminism in a French Mirror », in French Historical Studies, New York, LDS,N°22,

· Gaston KALONGE, « Vite, une femme sur ma liste : comment faire ? », dans la communication sur le Genre et les conflits en Afrique, Kinshasa, salle promo de l'UNIKIN du 12 au 15 mars 2009.

· LONGANDJO OKITAKEKUMBA, « Le Genre en RDC : Point de vue d'un sociologue », In Rapport final de colloque sur le genre et université en RDC, tenu à Kinshasa du 12 au 15 Décembre 2010.

· Marie-Ange LUKIANA, « Problématique de genre en RDC », In Rapport final de colloque sur le Genre et université en RDC, tenu à Kinshasa du 12 au 15 Décembre 2010.

· Charles MAPHASI KUMBU, (2000), « La dynamique du concept « genre » dans les politiques du développement en Afrique » in Afrique Contemporaine, n°196 octobre-décembre

· Catherine ODIMBA, « Pourquoi les études sur le Genre en RDC ? », In Rapport final de colloque sur le Genre et université en RDC, tenu à Kinshasa du 12 au 15 Décembre 2010.

· Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN, Intégrer le « Genre » dans l'approche-projet : entre l'engouement dans les discours et la surcharge dans les pratiques, Communication à l'occasion de 25 ans du Master/DESS : Analyse de projets Agricoles, industriels, sociaux et de l'environnement, université de Rennes 1, 28 octobre 2006

· Sheila SANOUDI, (Mars 1975), « Machismo ou la suprématie du mâle », in Le Courrier-UNESCO, Paris

· Joan SCOTT, (1998), « Genre : une catégorie utile d'analyse historique », in Les Cahiers du G.R.I.F., 37-38, 1988_/ P._Tabet, La Construction sociale de l'inégalité des sexes. Des outils et des corps, L'Harmattan, Paris,

· Marie-Claire YANDU, « La problématique de la participation des femmes congolaises au processus électoral » communication faite à l'occasion de la clôture de l'atelier national de validation des consultations nationales et provinciales sur la représentativité de la femme congolaise dans le processus électoral, le 30 Mai 2007, dans la salle de conférence de FNUAP.

IV. AUTRES PUBLICATIONS OFFICIELLES

· Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 Février 2006.

· Rapport annuel de CRONG/Maniema, 1996.

· Rapport annuel de l'OMS, Kinshasa, 2010

· Rapport annuel de l'UNESCO, Kinshasa, 2009.

· Rapport annuel de l'UNICEF, Kinshasa, 2010

· Rapport annuel de la Division Provinciale de Plan Maniema, 2010

· UNESCO, Rapport annuel des activités du Bureau de l'UNESCO, Kinshasa.

V. SOURCES ELECTRONIQUES

· CEI-RDC, « Rapport final des opérations électorales », in http//www.cei-rdc.org, 20.11.O7. 9h12

· Judith BUTLER, «  Défaire le genre » in http://www.wikipedia.org. 03.08.10. 8h23.

· UNIFEM, « A propos de l'émancipation de la femme » in http ://viventlesfemmes.typepad.fr/vivent-les-femmes/le-micro-crédit.html,13.6.09.3h20

* 1 Julienne NZUGU FEZA, (2008), La politique en RDC : quelle place pour les femmes, Paris, PUF, p. 47

* 2 Marie ZAMUDA RAMAZANI, (2009), le Genre et la parité en République Démocratique du Congo, Kinshasa, CAFCO, p. 70

* 3 Marie-Ange LUKIANA, (2010), « problématique de Genre en RDC » in Rapport final de colloque sur le Genre et Université en RDC , tenu à Kinshasa du 12 au 15 décembre 2010, inédit.

* Ministre Congolais de Genre, Famille et Enfant au sein du Gouvernement de Adolph MUZITO

* 4 Catherine ODIMBA, (2010), « Pourquoi les études sur le Genre en RDC ? » in Rapport final de colloque sur le Genre et Université en RDC, tenu à Kinshasa du 12 au 15 décembre 2010, inédit.

* 5 LONGANDJO OKITA KEKUMBA, (2010), «  le Genre en RDC: point de vue d'un sociologue », in Rapport final de colloque sur le Genre et Université en RDC tenu à Kinshasa du 12 au 15 décembre 2010, inédit.

* 6 Simon de BEAUVOIR cité par Madame le Professeur Marie-Claire YANDU, (2007), « la problématique de la participation des femmes congolaises au processus électoral » communication faite à l'occasion de la clôture de l'Atelier National de validation des consultations nationales et provinciales sur la représentation de la femme congolaise dans le processus électoral, le 30 Mai 2007, salle de la conférence du FNUAP/UNFP, Kinshasa, inédit.

* 7 Ann OAKLEY, (1972) Sex, Gender and society, New York, Temple Smith, p. 76

* 8 Eve KOSOFSKY, (2008) Epistémologie du Placard, Trad. De Maxime Cervulle, Paris, Editions Amsterdam, p. 231

* 9 Michel FOUCAULT, (1984), Histoire de la sexualité I, II et III, Paris, Gallimard, p. 56

* 10Nicole ALBERT, (2004), Dossier mythes et genre, Paris, PUF, p. 142

* 11 Marie-Hélène BOURCIER, (2005), sexpolitique. Queer zones 2, New York, Rutledge, p. 243

* 12 Leslie FEINBERG, (1993), stone butch blues, Ann Arbor, Firebrand, p. 67

* 13 Kate BORNSTEIN, (1994), Gender outlaw: On men, women and the rest of us, New York, Rutledge, p. 98

* 14 Patrick CALIFIA-RICE, (2003), le mouvement transgenre. Changer de sexe, Paris, EPEL, p. 254

* 15 Lee EDELMAN, (2004), No future : Queer theory and the death drive, Durham, Duke UP, p. 200

* 16 Judith BUTLER, (2006), Défaire le genre, Editions Amsterdam, Paris, p. 165

* 17 Judith BUTLER, (2006), Trouble dans le Genre. Le féminisme et la subversion de l'identité, Paris, La découverte, p. 85

* 18 Laure BERENI et al, (2008), introduction aux Genres studies, Bruxelles-paris, éditions de Bouk, p. 265

* 19 Elsa DORLIN, (2008), Sexe, Genre et sexualité, Paris, PUF, p. 74

* 20 Guy HOCQUENGHEM, (2000), le désir homosexuel, Paris, 1ère édition Fayard, p. 95

* 21 Didier ERIBON, (2003), Hérésies. Essais sur la théorie de la sexualité, Paris, éd. Fayard, p. 425

* 22 Christine DELPHY, (2001), l'ennemie principale 2, penser le Genre, Paris, Syllepse, p. 176

* 23 Leo BERSANI, (1998), le rectum est-il une tombe ?, Paris, EPEL, p. 278

* 24 Louis GEORGES, (2008), l'invention de la culture hétérosexuelle, Paris, PUF, p. 94

* 25 Ronald LAING, (1979), la politique de la famille, Paris, éditions Stock, p. 42

* 26Thomas LAQUEUR, (1992), La fabrique du sexe. Essai sur le Genre en occident, Paris, éditions Gallimard, p. 214

* 27 Nicole-Claude MATHIEU, (1991), L'anatomie politique. Catégorisation et idéologie de sexe, Paris, éditions côté-femme, p. 97

* 28Laure MURAT, (2006), La loi du Genre, une histoire culturelle du 3ième sexe, Paris, Fayard, p. 97

* 29 Nicole SAUDA, (2010), le Genre et les divers projets de l'UNESCO, Kinshasa, CEP, p. 34

* 30 Catherine ODIMBA, (2010), la position de l'ONU face à l'émergence du Genre, Kinshasa, CEP, p. 26

* 31 HCCI, (2000), L'intégration du Genre dans la politique française de coopération : bilans et perspectives, Paris, LJDG, p. 54 

* 32 MONUSCO, Bureau Genre, (2009), Le Genre et le processus électoral : étude comparative de la France et de la RDC, Kinshasa, CAFCO, p. 142

* 33 Léon MONDOLE Esso LIBANZA EBEYOGO, Le financement pour l'égalité du Genre et le renforcement du pouvoir économique des femmes entrepreneurs de Kindele dans la ville de Kinshasa (de 2004 à 2010), Mémoire de DEA en Sociologie, FSSAP, UNIKIS, 2009-2010, inédit.

* 34 UNESCO, Rapport annuel des activités du Bureau de l'UNESCO en RDC, Novembre 2009, p. 54

* 35 Colette GUILLAUMIN, (1992), Sexe, race et pratique du pouvoir. L'idée de nature, Côté-femmes, p.34

* 36 Michel PERROT, (1998), Les Femmes ou les silences de l'histoire, Paris, Champs Flammarion, p.53

* 37 Margaret  MEAD, (1963), Moeurs et sexualité en Océanie, trad. de l'angl., Plon, Paris, p.90

* 38 Simone de BEAUVOIR, (1976), Le Deuxième Sexe, Paris, Gallimard, Folio, p.32

* 39 Ann OAKLEY, (1972),Sex, Gender and Society, Maurice Temple Smith, Londres, p.41.

* 40 Joan SCOTT, (1998), « Genre : une catégorie utile d'analyse historique », in Les Cahiers du G.R.I.F., 37-38, 1988_/ P._Tabet, La Construction sociale de l'inégalité des sexes. Des outils et des corps, L'Harmattan, Paris, p.67

* 41 Françoise HERITIER, (2002), La Pensée de la différence, Odile Jacob, Paris, p.83

* 42 Eric  FASSIN, (1999), « The Purloined Gender : American Feminism in a French Mirror », in French Historical Studies, New

York, LDS,N°22, p. 354

* 43 Gustave LEBON cité par T. LAQUEUR, (1992), La Fabrique du sexe, Paris, Gallimard, p.124

* 44 Pierre  BOURDIEU, (1998), La Domination masculine, Paris, Seuil, p. 36

* 45 Michel FOUCAUL cité par C. ACHIN et al. (2007), Sexes, genre et politique, Paris, Economica, p.56

* 46 Christine DELPHY, L'Économie politique du patriarcat, Paris, Syllepse, 2000, p.243

* 47 Judith BUTLER, (2006), trouble dans le Genre. Le féminisme et la subversion de l'identité, Paris, La Découverte, p.109.

* 48 Françoise HERITIER, op. cit. p.233

* 49 C. PATEMAN, (1989), the Disorder of Women: Democracy, Feminism and Political Theory, Stanford University Press., p.78

* 50 Simone de BEAUVOIR, op. cit , p.13

* 51 Françoise  HERITIER, op.cit., p.56

* 52 Mélanie KLEIN cité par N. LORAUX, (1985), Façons tragiques de tuer une femme, Paris, Gallimard, p. 64

* 53 L. IRIGARAY, (1974), Speculum, de l'autre femme, Paris, Minuit, p. 137

* 54 Carroll GILLIGAN, (2004), Le Siècle des féminismes, Paris, ouvrage. collectif., éd. de l'Atelier, p. 46.

* 55 Jacques DERRIDA, (1992), Points de suspension, Paris, Galilée, p.73

* 56 Maurice BLANCHOT, (1995), La Place des femmes : les enjeux de l'identité et de l'égalité au regard des sciences sociales, Paris, La Découverte, p.361

* 57 Rosi BRAIDOTTI, (1991), Patterns of Dissonance. A Study of Woman in Contemporary Philosophy, Polity Press, p.63

* 58 Leo  BERSANI, (1998), Homos : repenser l'identité, Paris, Odile Jacob, p. 139

* 59 H. ROUCHE cité par C. GUILLAUMIN, (1992), Sexe, race et pratique du pouvoir. L'idée de nature, Paris, Côté-femmes, p.642

* 60 D'Amourette PICHON, (2007), le Genre et le sexe, Paris, PUF, p. 241

* 61 Ann OAKLEY, op. cit., p. 76

* 62 Ann OAKLEY, op. cit., p. 82

* 63 BOURDIEU cité par AMUNDALA KANZA, (2009), la perception du Genre dans les sociétés primitives Africaines, Kinshasa, LGDJ, p. 87

* 64 BOURDIEU cité par AMUNDALA KANZA, op. cit., p. 96

* 65 Belinda NTUMBA, (2010), la parité en RDC : mythe ou réalité ?, Kinshasa, Épiphanie, p. 74

* 66 W.W. Rostow, cité par Odilon KAZADI, (2009), le Genre: état de lieu et perspective, Paris, PUF, p. 45

* 67 Esther BOSERUP, (1970), le Genre et les théories du développement, Paris, 2iéme éd. Dalloz, p. 243

* 68 Henri BROUF, (2008), les approches liées au développement de Genre, Paris, Seuil, p. 76

* 69 DAGENAIS et PICHE, (1994), la modernisation et les approches d'IFD, Paris, PUF, p. 98

* 70 DAGENAIS et PICHE, op. cit., p. 98

* 71 Catherine ODIMBA, (2009), l'histoire des Associations féminines congolaises, Kinshasa, CEP-UNIKIN, p. 23

* 72 Catherine ODIMBA, op.cit, p. 43

* 73 Rapport annuel de CRONG/UNICEF, 1996, p. 7

* 74 Hygin KAKAÏ, (2003), Approche genre et projets de développement au Bénin : Cas du PADEL à

Nikki et du PNDC à Djidja (mémoire de maîtrise en Sociologie Anthropologie), UAC,FLASH, DPSA, p. 23

* 75 Félicitée REJO FIENENA, cité par idem, p. 31

* 76 Paule Elise Henry, (1997), Vivre et savoir en Afrique, Paris, GREC, p. 142

* 77 Irène STOJCIC et Sophie ELIZEON, (1975), Religions Africaines comme effet et source de la civilisation de l'oralité, colloque de Cotonou, p.75

* 78 Joséphine YAZALI, (1998), Les pouvoirs au village, Paris, Karthala, p.96

* 79 Charles MAPHASI KUMBU, (2000), La dynamique du concept « genre » dans les politiques du développement en Afrique in Afrique Contemporaine, n°196 octobre-décembre, p. 76

* 80 Joëlle PALMIERI, (1994), Les africaines, histoire des femmes d'Afrique Noire au XIXè et XXè siècle, Paris, Ed. desjonquères, p. 54

* 81 Lily RAHAINGO-RAZAFI MBELO, (1998), Les forces d'inertie à la promotion féminine (Etude réalisée pour le compte du PNUD), p. 99

* 82 Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN, Intégrer le « genre » dans l'approche-projet : entre l'engouement dans les discours et la surcharge dans les pratiques, Communication à l'occasion de 25 ans du Master/DESS : Analyse de projets Agricoles, industriels, sociaux et de l'environnement, université de Rennes 1, 28 octobre 2006

* 83 Awa GUEYE, (1989), Les structures élémentaires de la parenté, Mouton, Paris, p.132

* 84 Gaston KALONGE, « Vite, une femme sur ma liste : comment faire ? », dans la communication sur le Genre et les conflits en Afrique, Kinshasa, salle promo de l'UNIKIN du 12 au 15 mars 2009.

* 85 Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN, op.cit., p. 98

* 86 Charles MAPHASI KUMBU, op.cit., p. 112

* 87 Joséphine YAZALI, op.cit., p. 143

* 88 Sheila SANOUDI, (Mars 1975), « Machismo ou la suprématie du mâle », in Le Courrier-UNESCO, Paris, p. 56

* 89 BENAOUDA LEBDAI, (1996), Relations sociales de genre, l'approche de la DDC, Bernès, Paris, p. 78

* 90 Lala RAHARINJANAHARY, (1994), Sexes et pouvoir, La construction sociale des corps et des émotions, Presses de l'Université de Montréal, Montréal, p. 76

* 91 Lucia DIRENBERGER, (1999), Population, développement et approche genre au monde, URD, Lomé, p. 77

* 92 Claudy VOUHE et Vanessa GAUTIER, (2008), femmes et processus électoral, Paris, Dalloz, p. 86

* 93 Jeannine RAMAROKOTO et Elisabeth HOFMANN, op. cit., p. 134

* 94 Patricia Day HOOKOOMSING, op cit






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