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Déterminants socioéconomiques et culturels du recours à  la contraception avant le mariage: cas de la Côte d'Ivoire

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par MM. KOUADIO Yao Mathias et KOUAME Haccandy Yves
Ecole nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée de la Côte d'Ivoire - Ingénieur statisticien économiste 2003
  

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I.2- Quelques résultats empiriques

Les analyses du recours a la contraception avant le mariage et celles des phenomenes socio-demographiques qui lui sont directement rapproches telles qu'abordees par les auteurs susmentionnes ont conduit a des resultats edifiants qu'il convient d'exposer dans un esprit de revue de la litterature empirique.

DELAUNAY Valerie et BECKER Charles (2000) dans leur analyse, sont arrives A trois types de conclusions. Ils ont observe premierement une deterioration des systemes d'information traditionnels ; deuxiemement ils remarquent un interet suivant le sexe de la pratique de la contraception moderne et troisiemement, ils font ressortir un nouveau modele d'adoption de la contraception. Ceux-ci aboutissent dans leur etude a d'importants resultats relatifs a la contraception.

Selon les resultats de ces auteurs, il semble que l'on assiste a une modification du systeme de transmission du savoir traditionnel en matiere de contraception, qui se traduit par une information plus diversifiee, empruntant de moins en moins ses canaux traditionnels qu'etaient l'initiation et le mariage.

Mais les nouveaux canaux d'information echappent au controle social traditionnel et touchent des groupes qui autrefois ne l'etaient pas. Ce sont en effet les jeunes, plus scolarises et ayant frequente la ville, qui paraissent les mieux informes. L'information, plus disponible en ville, semble se diffuser rapidement aupres des jeunes femmes restees au village par l'intermediaire des jeunes migrantes.

Par contre, la motivation pour une utilisation future ne serait pas systematiquement transmise. Les auteurs trouvent que ce sont aussi les groupes les plus instruits qui ont la plus grande experience de la contraception moderne. La contraception apparait pour les femmes comme un enjeu de plus grande importance et de nature differente.

Elles ont en effet une meilleure connaissance de la contraception traditionnelle et moderne, une plus grande pratique et un plus grand desir de contraception future. Les auteurs ont egalement pu constater que la contraception concerne plutot les femmes dans le mariage. Leur objectif serait surtout d'espacer les naissances, pour limiter la fatigue liee a la maternite, mais elles souhaitent aussi une contraception d'arret, pour eviter

les grossesses tardives. Dans cette meme enquete, 30 % des femmes ont declare une descendance ideale de 6 enfants. Les femmes, qui, dans la plupart des societes africaines, subissent le coUt physique et economique des enfants, mais ne prennent pas les decisions en matiere de reproduction semblent dans l'etude afficher un plus grand role de decideurs, du moins dans les intentions declarees.

Les hommes, quanta eux, paraissent plus concernes par les problemes de contraception avant le maria ge, leur objectif etant surtout d'eviter les grossesses hors mariage ; ils semblent peu se preoccuper des difficultes rencontrees par les femmes.

Dans l'article publie par Perspectives Internationales sur le Planning Familial en 1999, l'auteur fait etat de ce que les facteurs socioeconomiques n'etaient pas uniformement associes aux differences observees dans les connaissances feminines de la contraception.

Au Bangladesh, en Egypte, en Jordanie, au Maroc et en Turquie, par exemple, ces connaissances ne variaient guere suivant le lieu de residence, le niveau d'instruction ou l'exposition a la television. Au Niger et au Senegal, par contre, la residence en milieu rural, le faible niveau d'instruction et l'exposition peu frequente a la television etaient autant de facteurs associes a une faible connaissance generale de la contraception, et a une familiarite moindre encore a l'egard des methodes modernes.

L'auteur souligne que malgre la population principalement musulmane des pays soumis a son etude, le developpement socioeconomique, la prevalence contraceptive et l'effort du programme de planning familial de chacun varient largement. Il en resulte une variation considerable, d'un pays a l'autre, quant au succes de la transition de fecondite. L'auteur conclut que la pratique de l'islam ne represente, au niveau mondial, ni un obstacle, ni un facteur de stimulation du declin de la fecondite.

L'etude enrichissante de Michel GARENNE et Juliette HALIFAX (2000), rappelle d'abord l'historique de l'evolution de la nuptialite en Afrique avant de cerner par la suite certaines variables qui expliquent la fecondite premaritale. Pour ces derniers, la nuptialite des femmes africaines etait, a l'epoque, precoce et quasi universelle : presque toutes les femmes se mariaient. Une proportion importante de celles-ci se mariait avant l'age de 20 ans (HERTRICH Veronique et PILON Marc, 1997). Cette forte intensite de la nuptialite etait souvent renforcee par les regimes de polygamie, frequents en Afrique, qui permettaient a toutes les femmes d'etre mariees meme si tous les hommes ne l'etaient pas ou ne l'etaient que plus tardivement.

Certes, la definition du mariage n'est pas imposee par un acte legal comme dans les pays europeens, mais dans pratiquement toutes les societes africaines il existe une forme de mariage reconnue socialement, associee a une ceremonie et a un echange de biens, ce qui permet d'utiliser ce concept dans les enquetes demographiques.

Jusque vers 1960, continuent les auteurs, periode a laquelle la plupart des pays africains ont accede a l'independance, la limitation des naissances etait peu pratiquee, la fecondite des jeunes femmes etait tres valorisee et l'essentiel de la fecondite se produisait apres le premier mariage. Certes on notait des exceptions et dans certains groupes ethniques le premier mariage n'etait celebre qu'apres que la jeune femme ait prouve sa fecondite, mais ces cas restaient dans l'ensemble assez rares et cette fecondite avant le premier mariage (fecondite premaritale) etait valorisee, souhaitee par la femme et prise en charge par le groupe familial.

Leur analyse aboutit aux conclusions selon lesquelles le premier mariage est retarde pour un ensemble de raisons : urbanisation rapide et emploi des femmes (la demande pour le travail feminin augmente en milieu urbain), scolarisation de plus en plus tardive des jeunes filles (bien au-dela des ages traditionnels au mariage) et nouveaux modeles de vie souvent imites des pays developpes grace a la diffusion des medias. Les jeunes femmes expriment de nouvelles preferences pour l'activite economique moderne, l'independance financiere, un mariage plus tardif et un choix personnel du partenaire au lieu des mariages arranges par les familles. D'autre part, la fecondite commence a etre mieux maitrisee, surtout en milieu urbain, grace a la contraception moderne et au recours plus frequent a l'avortement. Cependant ce contrOle de la fecondite touche peu les adolescentes : il est surtout le fait des femmes plus agees, souvent mariees, ayant deja eu un ou plusieurs enfants ou ayant atteint la descendance souhaitee.

Par ailleurs, les auteurs trouvent que la fecondite avant le premier mariage n'est en general pas desiree, surtout chez les adolescentes et les jeunes femmes scolarisees. Pour ces dernieres, la fecondite avant le mariage signifie l'arr0t des etudes et de serieuses difficultes financieres. Mime s'ils resistent a l'urbanisation et a la montee de l'individualisme, les reseaux de solidarite familiale ne sont plus aussi structures et puissants qu'autrefois et une naissance hors mariage exige de plus en plus que la mere dispose d'un revenu independant pour subvenir aux besoins de l'enfant.

Apres avoir reconnu que la fecondite premaritale n'est pas un phenomene propre . l'Afrique et qu'on le trouve dans certains pays europeens, ainsi qu'aux Etats-Unis, surtout dans la population afro-americaine, les auteurs exposent une serie de conclusions concernant l'Afrique.

Ils decouvrent que dans les pays pour lesquels les donnees sont disponibles, la fecondite premaritale en Afrique est peu liee (au sens statistique) aux principaux facteurs socio-demographiques : elle est cependant positivement correlee au niveau d'instruction des femmes (r = 0,27) et a la prevalence de la contraception (r = 0,47) ; elle est negativement correlee a l'urbanisation (r = -0,13) et a l'islamisation (r = -0, 51).

Elle n'a pas de correlation significative avec la prevalence du VIH/sida dans la population generale. Ce phenomene de forte fecondite premaritale semble assez recent, datant d'une quinzaine d'annees en Afrique du Sud en milieu rural par exemple. De ce fait les auteurs suggerent que l'expansion geographique, la dynamique recente et les determinants de la fecondite premaritale doivent faire l'objet d'etudes plus approfondies.

La rigoureuse analyse de Raimi FASSASSI (2001) aboutit sur des conclusions tres enrichissantes que l'auteur expose comme suit. Les pratiques contraceptives en Cote d'Ivoire sont encore faibles au regard des succes qui ont pu etre atteints dans certains pays leaders d'Afrique subsaharienne moins avances economiquement.

Alors qu'au Kenya, au Zimbabwe, au Botswana et en Afrique du Sud, les progres de la contraception sont remarquables, en 1994, la contraception totale n'etait en Cote d'Ivoire que de 16, 5% pour l'ensemble de la population feminine en age de procreer ; la prevalence des methodes modernes ne s'elevant qu'a 5,7% (N'Cho et al., 199 5).

Lorsque, de la population totale des femmes en age de procreer, on retranche les femmes enceintes et celles qui sont en menopause, on obtient la population designee ici comme potentiellement feconde. Pour celles-ci, l'emploi de la contraception au moment de l'enquete se justifie davantage. La prevalence contraceptive totale est alors de 19% tandis

que celle des methodes modernes remonte a 6,3%. Ces taux restent insuffisants meme si l'environnement tres longtemps pronataliste et la deficience de l'offre de moyens efficaces ont pu jouer un role important dans le peu d'interet que la population a manifeste jusque la a la contraception notamment moderne.

En Cote d'Ivoire, la contraception emergente peut encore etre qualifiee de contraception d'elites meme si les besoins emanent de differentes categories socioeconomiques. Les differentes variables retenues comme facteurs explicatifs de la pratique contraceptive moderne rendent compte de niveaux divers d'insertion des femmes dans la logique contraceptive.

En tout etat de cause, l'instruction de la femme, son milieu de vie et son lieu de socialisation mais aussi l'a ge et l'activite sexuelle sont des variables cles dont les combinaisons rendent le plus compte de la pratique contraceptive. La femme utilisatrice des methodes modernes de planification familiale appartient a la frange superieure de la classe plus large des utilisatrices d'une methode non populaire de contraception.

L'utilisatrice d'une methode de contraception est une femme plutOt jeune et instruite, socialisee et residant a Abidjan ou dans une grande ville de Cote d'Ivoire. Elle vit dans un logement de bon standing avec un conjoint egalement instruit et favorable a la planification familiale qui est d'ailleurs souvent leur sujet de conversation. Elle retire une remuneration monetaire d'une occupation qu'elle exerce dans son milieu de vie, le milieu urbain, et elle est ouverte a l'ensemble des medias. Elle est dans la phase de sa vie feconde oil les risques de grossesse sont importants. La contraception lui sert d'ailleurs a espacer ses naissances qu'elle souhaite assez limitees.

La femme non utilisatrice est quant a elle issue du milieu rural. Elle est agricultrice tout comme son conjoint et n'a pas ete scolarisee. Si elle regarde parfois la television ou ecoute la radio, la presse ecrite lui est interdite du fait de son eloignement de la ville et de sa meconnaissance de la langue frangaise. Elle n'a aucune envie de limiter sa descendance car elle considere que cela relive de Dieu seul. Elle est issue d'un milieu pauvre et habite un logement de bas standing.

Lorsque l'on prend l'odds ratio comme critere de classification, la conjonction de la situation matrimoniale et de l'activite sexuelle met en exergue le groupe des femmes non mariees mais sexuellement actives pour qui la pratique contraceptive est tres elevee. Les variables qui sont liees a l'accumulation du capital social emergent egalement. C'est le cas des femmes qui ont acces a la presse ecrite ou qui s'informe aux travers des emissions de television. C'est aussi le cas des femmes instruites dont le statut social autorise une ouverture plus large sur le monde exterieur, le monde occidental en particulier qui est la reference pour cette categorie de femmes.

Lorsque par contre le pourcentage d'inhibition de la fecondite cumulee sert de base a la classification des femmes, le niveau d'instruction eleve de la femme, celui de son conjoint, l'insertion de l'homme ou de la femme dans la sphere moderne de l'economie et le recours a la presse ecrite, sont les principaux facteurs contributifs a l'adhesion de la femme a la planification familiale.

Par ailleurs, AMEGEE Lambert (2001) a trouve que les jeunes en Afrique sont plus exposes au risque d'accouchement en dehors du mariage et au risque de contracter une IST/VIH/SIDA a cause du recul de l'age au mariage et surtout a cause de la precocite des rapports sexuels.

En effet, les relations sexuelles se passaient jadis, generalement dans le mariage surtout chez les femmes et la survenue d'une grossesse entraine souvent l'entree en mariage. Dans son etude, l'auteur releve que 44% des adolescents celibataires ages de 1 5-19 ans et 48% des adolescentes celibataires de meme age sont sexuellement actifs. Les resultats de l'EDS Togo-1998, revelent quanta eux que 20% des femmes de 1 5-19 ans ont eu leur premier rapport sexuel a 1 5 ans exactement, alors que seulement 1 5% des femmes ages au moment de l'enquete de 4 5-49 ans l'ont eu a ce meme age. L'auteur note qu'au fil des generations, des changements sont intervenus dans les comportements des hommes et des femmes.

En outre, les perceptions des individus sur la possibilite ou non d'avoir des relations sexuelles avant le mariage et sur l'utilisation de la contraception different d'une generation a l'autre, les programmes visant les adolescents risquent ainsi de ne pas atteindre leurs objectifs si les parents se constituent en barrieres pour l'adoption des pratiques sexuelles saines par les jeunes. Jusqu'. nos jours, l'auteur fait remarquer qu'on connait tres peu sur les perceptions parentales des comportements sexuels des adolescents. Alors que ces informations sont tres importantes dans la conception meme des programmes en Sante Reproductive en direction des jeunes.

Dans cette perspective, l'etude originale de cet auteur s'avere interessante puisqu'elle prouve que les perceptions des parents sur les comportements sexuels des adolescents different selon le genre. En outre, elle montre que les declarations des enfants en matiere de communication avec leurs parents au sein du menage different, selon le sexe de l'enfant par rapport au pere ou a la mere, des declarations des parents sur le meme sujet.

Dans une certaine mesure l'article publie par KOUWONOU Kodjovi (1996) fait ressortir d'importants resultats relatifs a la pratique de la contraception. Celui-ci releve que la constitution des couples se fait selon des regles tenant compte surtout des conditions sociales de chacun des conjoints.

Le "marche matrimonial" est ainsi regi par des "lois" qu'il faut bien comprendre pour mieux expliquer les differentes strategies individuelles et collectives en matiere de procreation. C'est ainsi qu'en combinant le milieu de socialisation et le niveau de scolarisation des conjoints, son analyse a permis de degager quatre grands groupes d'unites familiales. Chaque groupe d'unites familiales elabore des strategies specifiques de reproduction.

Les conjoints (tous deux) instruits sont les plus enclins a conclure leurs unions par une ceremonie coutumiere, une ceremonie civile et une ceremonie religieuse. Par contre, dans les groupes de familles oil seul le mari a ete a l'ecole et a passe au moins ses douze premieres annees de vie en ville, les unions dites consensuelles representent une proportion relativement importante. En outre, ces formes d'alliance sont doublees de la non co-residence des conjoints.

Mieux l'etude montre que malgre les efforts consentis ici et lA par les institutions de planification familiale, l'utilisation des methodes modernes de contraception ne mobilise qu'une petite frange de la population, meme dans les agglomerations urbaines. Il a ete observe que le niveau d'instruction des parents joue un role important dans l'utilisation des contraceptifs modernes.

Au sein des differentes unites familiales, il apparait clairement que le niveau de la prevalence contraceptive est de loin plus important dans les couches sociales oil les deux

conjoints ont ete scolarises. En fait, la scolarisation influence beaucoup les comportements individuels. Ainsi, ce sont les femmes non scolarisees qui sont davantage soumises aux traditions.

La litterature relative a la contraception avant le mariage et les phenomenes sociodemographiques sous-jacents abondent aussi bien en approches theoriques qu'en resultats empiriques. La principale remarque qui peut se degager de prime abord de ces resultats signifies supra, est leur diversite et/ou leur pluralite. Les auteurs semblent tout de mime s'accorder sur l'influence sans faille de l'instruction et des facteurs de socialisation dans l'etude des determinants des phenomenes de la contraception.

Les voies d'analyses, hormis celles empruntees dans quelques etudes, explorent generalement les methodes statistiques les plus rigoureuses et les mieux adaptees. Il convient toutefois de mener une reflexion approfondie sur les phenomenes sociodemographiques et singulierement sur le phenomene de la contraception pre-maritale, comme l'ont si bien signifie Michel GARENNE et Juliette HALIFAX.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984