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Mise en oeuvre du changement organisationnel: enjeux et défis de la transformation d'une organisation à  but non lucratif

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par Zakaria Traoré
Université Aube Nouvelle - Master Recherche 2013
  

Disponible en mode multipage

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MEMOIRE POUR L'OBTENTION DU DIPLOME DE MASTER RECHERCHE EN
SCIENCES DE GESTION

THEME :

MISE EN OEUVRE DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL : ENJEUX ET DEFIS DE LA TRANSFORMATION D'UNE ORGANISATION A BUT NON LUCRATIF

Présenté et soutenu publiquement le 24 janvier 2013 à Ouagadougou par :
Zakaria TRAORE

JURY

Président de jury : Pr Marc BIDAN, Université de Nantes

Rapporteur : Dr Gwénaëlle ORUEZABALA, Université de Poitiers

Directeur de mémoire : Pr Alidou OUEDRAOGO, Université de Moncton

Co-directeur de mémoire : Pr Yves-Frédéric LIVIAN, IAE-Université Jean Moulin Lyon 3

JANVIER 2013

Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

REMERCIEMENTS

La réalisation de cette oeuvre a été possible grâce à l'apport inestimable de plusieurs personnes.

Pour tout le temps qu'ils ont consacré à l'encadrement de ce mémoire et aux multiples conseils, encouragements qu'ils n'ont eu de cesser de me prodiguer, je remercie mes deux directeurs de mémoire, professeurs invités à l'ISIG International :

- M. Alidou OUEDRAOGO, Professeur à l'Université de Moncton au Canada ;

- M. Yves-Frédérick LIVIAN, Professeur à IAE-Université Jean Moulin Lyon 3 en France.

Je remercie le président de jury, Pr Marc BIDAN, de l'université de Nantes et le rapporteur Dr Gwénaëlle ORUEZABALA, de l'université de Poitiers, pour les observations et suggestions faites lors de la soutenance du mémoire.

Je remercie M. Saïdou OUEDRAOGO, Directeur Général de l'Agence Faso Baara S.A dont la structure a servi de terrain à ce travail. Mes remerciements s'adressent également à tout le personnel de l'Agence Faso Baara S.A et particulièrement à ceux qui se sont prêtés volontiers aux différents entretiens et M. Elie Rodrigue KABRE pour la relecture, les amendements du document et le soutien moral.

Je remercie tous mes promotionnaires du Master Recherche, tous les enseignants du master Recherche et le corps administratif de l'ISIG International, devenu Université Aube Nouvelle.

Ma dernière adresse va à l'endroit de ma femme Habi et de mes enfants Farida, Cheick et Rachida qui ont dû supporter mes nombreuses absences.

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TRAORE Zakaria, Master Recherche en Sciences de gestion (2ème promotion), ISIG International

Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

DEDICACE

A la mémoire de mon père disparu quand je n'étais qu'un adolescent et dont le 30ème anniversaire de la disparition a eu lieu le 30 janvier 2013. Qu'il repose en paix et continue de veiller sur nous.

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

LISTE DES SIGLES ET ABBREVIATIONS

AFRICATIP : Association Africaine des Agences d'exécution des Travaux d'intérêt public

AG : Assemblée Générale

AGETIP : Agence d'exécution des Travaux d'intérêt public

AMBF : Association des Municipalités du Burkina Faso

ARMP : Autorité de Régulation des Marchés Publics

ASCE : Autorité Supérieure de Contrôle de l'Etat

BTP : Bâtiment et Travaux Publics

CA : Conseil d'Administration

CCI-BF : Chambre de Commerce et d'Industrie du Burkina Faso

CD : Comité de Direction

CNSS : Caisse Nationale de Sécurité Sociale

CRD : Comité de Règlement des Différends

DF : Directeur (Direction) Financier (ère)

DG : Directeur (Direction) Général (e)

DT : Directeur (Direction) Technique

IDA : Association Internationale de Développement

ISIG : Institut Supérieur d'Informatique et de Gestion

MOD : Maitre (Maîtrise) d'Ouvrage Délégué (e)

MPAFC : Manuel de procédures administratives, financières et comptables

OBNL : Organisation à but non lucratif

ONG : Organisation non gouvernementale

SCEO : Sous Commission d'Evaluation des Offres

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

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TRAORE Zakaria, Master Recherche en Sciences de gestion (2ème promotion), ISIG International

Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

LISTE DES TABLEAUX ET SCHEMAS

Tableau n°1 : Auteurs et courants clés sur la dialectique

changement/continuité p7-8

Tableau n°2 : Typologie des changements selon Johnson et Scholes p13

Tableau n°3 : Cadre d'analyse des enjeux du changement proposé par

Rondeau et Bareil p18

Tableau n°4 : Sept phases de préoccupations selon Bareil et Savoie p20

Tableau n°5 : Stratégies pour briser la résistance selon Robins et DeCenzo p22

Tableau n°6 : Grille d'analyse p28

Tableau n°7 : Rôles, pouvoirs et composition des organes p38

Schéma n°1 : Dimensions du changement p14

Schéma n°2 : Phases et étapes du changement p16

Schéma n°3 : Modèle de Rondeau p24

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

SOMMAIRE

REMERCIEMENTS i

DEDICACE iii

LISTE DES SIGLES ET ABBREVIATIONS iv

LISTE DES TABLEAUX ET SCHEMAS v

SOMMAIRE vi

INTRODUCTION 1

I/ REVUE DE LITTERATURE 4

I.1/ Définition des concepts 4

I.2/ Modèles explicatifs et compréhensifs du changement organisationnel 10

I.3/ Les enjeux et conditions du changement 18

I.4/ Modèle d'analyse 23

II/ METHODOLOGIE 29

II.1/ Démarche méthodologique 29

II.2/ Technique d'échantillonnage et de collecte de données 30

II.3/ Techniques de traitement et d'analyse des données 31

III/ CADRE PRATIQUE 32

III.1/ Le contexte institutionnel du changement 32

III.2/ Présentation du cas 37

IV/ RESULTATS 41

IV.1/ Le contexte du changement : identifier les conditions déterminantes 41

IV.2/ Les acteurs du changement : enjeux et rôles déterminants 49

IV.3/ Les effets du changement 60

V/ DISCUSSION 63

CONCLUSION 67

BIBLIOGRAPHIE 71

TABLE DES MATIERES 75

ANNEXES 78

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TRAORE Zakaria, Master Recherche en Sciences de gestion (2ème promotion), ISIG International

Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

INTRODUCTION

Il n'est guère contestable (Baudry et Dubrion, 2009)1 que les entreprises connaissent, depuis le début des années 1980, des transformations organisationnelles profondes.

Ces transformations revêtent des formes diversifiées telles les fusions, les acquisitions, les absorptions, les privatisations, le réseautage, la disparition des frontières, les réorganisations. Ce sont des phénomènes économiques, juridiques et sociaux qui marquent le cycle de vie des organisations entraînant d'importants bouleversements menés à travers un processus de changement.

Plusieurs variables (Crifo, 2003 ; Robbins et DeCenzo, 2008) motivent le changement organisationnel. Il peut résulter de la volonté d'une ou de plusieurs parties en raison de l'évolution de l'environnement qui se complexifie ou aux fins de recherche de gains croissants de productivité.

De nombreuses études (Perret, 1996 ; Crifo, 2003) ont souvent présenté le changement organisationnel comme une évolution souhaitée, formulée et pilotée par la direction.

Cependant, le changement organisationnel peut être rendu nécessaire par des facteurs externes ou contingents (Crozier et Friedberg, 1977). C'est par exemple dans le cadre de l'application de nouveaux textes règlementaires amenant les organisations à entamer une mutation profonde afin de faire face aux éventuelles contraintes introduites ou de tirer les opportunités résultant de ce nouveau cadre règlementaire.

Quels que soient les motifs des changements dans l'organisation, ils sont souvent le terreau de crise sociale, d'incompréhensions ou de difficultés diverses (Meier, 2007 ; Chavel, 2000 ; Kotter, 1995) entre les différentes parties prenantes à cette organisation qui sont essentiellement les actionnaires, les dirigeants, le personnel, les fournisseurs et les clients.

Cela pourrait être plus marqué lorsqu'il s'agit d'une structure associative appartenant donc à la catégorie des organisations à but non lucratif (OBNL), historiquement monopolistique et leader dans son domaine d'activités, contrainte de faire face à de nouvelles règles de marché, déterminées par les pouvoirs publics.

Aussi, la nécessité d'une transformation juridique et la mise en oeuvre d'un changement organisationnel vont faire apparaître non seulement de nombreux enjeux et défis, mais aussi des risques internes et externes et qui peuvent aboutir à l'extrême à un échec, risques qu'il faille par conséquent maîtriser ou éviter.

1 Baudry Bernard et Benjamin Dubrion, (Dir) Analyses et transformations de la firme. Une approche pluridisciplinaire, Paris : Editions La Découverte, 2009.

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

Quels sont les enjeux qui peuvent découler ou se présenter dans le cadre de l'institution d'une règlementation dans un domaine spécifique? Quelles sont les conséquences pour les organisations évoluant dans ce secteur? Comment une organisation à but non lucratif, initialement leader dans ce domaine d'activité, peut-elle au regard de ces nouvelles règles introduire le changement en son sein et le conduire efficacement afin de s'adapter à ce nouveau contexte?

Tels sont les principaux questionnements liés à la présente étude dont l'objectif est de chercher à appréhender les principaux enjeux et défis liés au processus de changement juridique et organisationnel entamé au sein d'une organisation.

Il s'agira de façon précise de s'interroger sur la manière dont cette organisation à but non lucratif se positionne ou s'adapte à son environnement qui a connu un fort engouement de diverses parties intéressées ces dernières années, entraînant la création de structures aussi bien publiques que privées et qui a fait l'objet d'une récente réglementation.

L'intérêt de cette étude est d'envisager le changement motivé par des facteurs externes et particulièrement dans une perspective règlementaire touchant un type spécifique d'organisation qu'est l'association à but non lucratif. En effet, peu de travaux ont porté sur le cas des organisations à but non lucratif (OBNL) engagés dans un processus de changement. Il ressort également que le cas traité porte sur un domaine d'activité, certes suffisamment bien connu en Europe, mais relativement nouveau en Afrique où les premières expériences de cette activité qu'est la maîtrise d'ouvrage déléguée, remontent à l'année 1989, avec la création de l'Agence d'exécution des travaux d'intérêt public (AGETIP) du Sénégal.

Aussi, nous assistons ces dernières années à des restructurations de beaucoup d'entreprises, que ce soit celles du secteur public comme du secteur privé, permettant d'alimenter le débat théorique bien que déjà riche mais encore fertile sur le changement organisationnel. Nous avons saisi l'opportunité du changement qui a affecté l'organisation dans laquelle nous évoluons, cela avec l'accord du Directeur général, pour porter un regard sur ce phénomène et apporter notre contribution au débat scientifique et aux acteurs dans la mise en oeuvre du changement dans cette organisation.

Ainsi, au regard de ce qui précède, la méthodologie de recherche sera qualitative et consistera en une étude de cas portant sur cette organisation durant son processus de changement organisationnel entamé en fin 2010.

Nous nous baserons sur un modèle d'analyse élaboré par Rondeau (1999) afin de concevoir une grille d'analyse à même de comprendre les facettes du changement dans cette organisation. Le point de vue des acteurs a été mis en évidence comme recommandé par certains auteurs dont Bareil et Savoie (1999)2 pour qui, il est nécessaire de « comprendre la

2 Bareil, C. & Savoie, A. (1999). Comprendre et mieux gérer les individus en situation de changement. Gestion. Ecole des HEC de Montréal. Vol 24 (3), p86-95

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TRAORE Zakaria, Master Recherche en Sciences de gestion (2ème promotion), ISIG International

Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

question de la mise en oeuvre du changement depuis le point de vue de ceux qui le vivent, c'est-à-dire les salariés qui y sont confrontés dans leurs activités quotidiennes, afin de faire progresser la connaissance ». Ainsi, nous avons réalisé des entretiens sur la base d'un guide portant sur les dimensions essentielles d'analyse du changement retenues dans notre grille. Ces entretiens ont été effectués auprès de treize (13) cadres de l'entreprise et aussi auprès deux (2) cadres externes évoluant dans des sociétés d'Etat. En plus de réunions, un diner-débat organisé par la Mutuelle a servi de cadre à la collecte de données. Une exploitation des principaux documents internes, des textes juridiques réglementant l'activité de maîtrise d'ouvrage déléguée dans laquelle opère l'organisation a été effectuée. La particularité du phénomène socio-organisationnel a aussi commandé de faire des observations directes durant l'étude.

Ce mémoire est structuré comme suit : une revue de littérature (I) est effectuée permettant de déboucher sur le modèle d'analyse et la méthodologie (II). Une brève présentation de l'entité et de son environnement permettent de définir le cadre pratique (III). Les résultats (IV) issus des données collectées sont exposés et analysés. En définitive, ces résultats font l'objet d'une discussion (V).

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

I/ REVUE DE LITTERATURE

Après une définition des principaux concepts de notre sujet, nous présenterons les principales réflexions théoriques sur le changement, mais aussi son application dans un cadre spécifique qu'est une organisation à but non lucratif. Ceci nous permettra de dégager un modèle d'analyse pour le cadre pratique.

I.1/ Définition des concepts

Empruntons les termes de Baudry et Dubrion (2009)3, pour qui vouloir étudier la firme et ses transformations suppose en amont de s'entendre sur certains concepts centraux, sur le sens de ces concepts et leurs interrelations pour qualifier l'objet « firme ».

Aussi, il nous paraît important de rappeler brièvement les concepts d'organisation, d'action organisée et de changement pour nous appesantir sur les différentes théories du changement.

I.1.1/ La notion d'organisation et d'action organisée

Pour Mintzberg (1989 : 12)4, l'organisation se définit comme une action collective à la poursuite de la réalisation d'une mission commune.

Dans une conception classique, l'organisation est le lieu d'une action organisée ou collective, un construit humain (Crozier et Friedberg, 1977 : 52).

Pour Livian (2008), « l'organisation est un espace où il existe une certaine division du travail et faisant appel à l'existence de formalisation, de hiérarchie, d'objectifs, de frontières [...] L'action organisée répond à la nécessité pour les acteurs de trouver une solution pour établir une « coopération conflictuelle », nécessaire à l'atteinte des objectifs communs. Pour ce faire, ils structurent cette action sous des formes plus ou moins diffuses, plus ou moins stables, dont l' « organisation » est une des formes ».

« Investies par la rationalité, le respect des normes ou le contrôle ou davantage par l'importance de la motivation et de l'implication du personnel, les organisations sont des systèmes, des lieux de pouvoir où se retrouvent associés technologies, procédures et individus. Ce sont des lieux ouverts sur l'environnement, s'adaptant à l'évolution des

3 Baudry Bernard et Benjamin Dubrion, (Dir) Analyses et transformations de la firme. Une approche pluridisciplinaire, Editions La Découverte, 2009.

4 Henry Mintzberg, Management : Voyage au centre des Organisations, Eyrolles, Editions d'Organisation, 1989.

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variables externes et internes. Les organisations sont des lieux « structurés » par les échanges et se structurent elles-mêmes. » (Robert, 2007)5

Une organisation est toujours le fruit d'interactions et de compromis entre les acteurs composant l'entreprise, les forces extérieures jouant un rôle comme tant d'autres. L'organisation est un construit social (Bernoux, 2010).

On peut observer que ces définitions et explications sont délibérément limitées à un champ disciplinaire restreint et spécifique, en l'occurrence celui des sciences de gestion, car les définitions du concept d'organisation sont multiformes selon les champs disciplinaires existant tels que l'économie, la sociologie, le droit.

A travers ces développements, on peut dire que l'organisation est une forme spécifique d'action organisée et formalisée, avec un certain degré de hiérarchisation, visant des objectifs et utilisant des ressources humaines, matérielles et financières. Il s'agit entre autres d'entreprises publiques et privées, d'établissements publics ou privés, d'associations...

En ce qui concerne spécifiquement l'association qui est la forme initiale d'organisation concernée par notre étude, ce type d'organisation a des spécificités qui méritent d'être évoquées.

Le cadre juridique et organisationnel des associations est régi en France par la loi de 1901 et au Burkina Faso par la loi n°10/92/ADP du 15 décembre 1992 portant liberté d'association. Selon les dispositions de la loi française, les associations peuvent être regroupées selon leurs finalités :

- les associations de production de services ou la gestion d'équipement à finalité commerciale ;

- les associations militantes ;

- les associations de membres.

La logique économique des associations et ONG dans l'économie de marché a été développée par certains auteurs. En effet, deux types de problématiques relatifs au secteur non lucratif sont évoqués par DiMaggio et Anheier (1990) dans Méhaut et Mossé (1998)6 :

- la problématique de « l'origine » : pourquoi les organisations à but non lucratif existent-elles ? Cette question touche à la division du travail entre organisations lucratives, non lucratives et publiques.

- la problématique du « comportement » En quoi ces organisations se différencient-elles, en terme de performance de structures, de clientèle... des autres formes des organisations ?

5 Jocelyne Robert, Organisations et changements en entreprises : approches historique, théorique et pratique, Editions de l'Université de Liège, 2007.

6 Méhaut, P. et Mossé, P. (1998). Les politiques sociales catégorielles : fondements, portée et limites, p302.

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

L'association est un moyen pour suppléer à l'inexistence d'offre de services marchands. En effet, il s'agit de mécanismes de production de biens ou services sociaux ou une logique de réalisation d'activité purement commerciale mais à finalité sociale, avec des facteurs de production à rémunérer. L'association participe ainsi à l'activité économique par la création de biens et services, la distribution de revenus (salariés par exemple), mais c'est l'utilisation du résultat dégagé qui fait la différence.

Les concepts d'organisation et ses diverses formes telles les associations étant définis, comment appréhender le concept de changement dans les organisations de façon générale ?

I.1.2/ La notion de changement

Dans le chapitre introductif de son ouvrage, Bernoux (2010)7 annonce que « Le changement en général et le changement dans les organisations en particulier sont des objets difficiles à cerner ».

Demers (1999) nous indique que le concept de changement a fait l'objet d'une quantité phénoménale d'articles et de livres. Pour Perret (1996), il constitue un thème aussi majeur que difficile d'autant plus qu'une réflexion en terme de changement et de transformation se substitue peu à peu à des raisonnements en terme de stabilité et de permanence.

Le changement peut se définir comme « la démarche qui accompagne la vie de toute entreprise face à l'instabilité et au développement de son environnement » (Fabre et al., 2007). Pour ces auteurs, une organisation se modifie du fait d'un changement dû à la nécessité de s'adapter à un environnement instable. Le changement entraîne une transformation voulue ou subie.

Pour Robbins et DeCenzo (2008), le changement est une modification durable apportée à l'environnement, la structure, la technologie ou au personnel d'une organisation en vue d'une amélioration significative de son fonctionnement et de sa performance.

Pour Collerette, Delisle et Perron (2008)8, il s'agit de tout passage d'un état à un autre, qui est observé dans l'environnement et qui a un caractère relativement durable.

Crozier et Friedberg (1977)9 proposent d'abord de considérer le changement comme un problème sociologique et le définissent ensuite comme un phénomène systémique car portant sur la transformation d'un système d'action, mettant en pratique de nouveaux rapports humains, de nouvelles formes de contrôle social, et enfin considèrent le changement comme un apprentissage de nouvelles formes d'action collective, entraînant la

7 Philippe Bernoux, Sociologie du changement dans les entreprises et les organisations, 2010, Editions du Seuil, p.7.

8 Collerette, Delisle et Perron, Le changement organisationnel, théorie et pratique, 2008, p20.

9 Crozier et Friedberg, L'acteur et le système, 1977, p391.

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découverte, l'acquisition de nouvelles capacités et la prise en compte de construits d'action collective comme obstacles à l'apprentissage et le changement comme une rupture.

Pour Bernoux (2010), le changement est le résultat d'une combinaison entre un ensemble de forces, les contraintes, les institutions, et les acteurs, où se mêlent domination et liberté.

A partir de ce concept de portée plus ou moins large, des précisions peuvent être apportées à la notion de changement et donner ce que Pesqueux (2010) appelle changement « à épithète ». Pour lui, parler de changement, c'est poser la question de la dialectique (ou de la dualité) « stabilité-changement », dans un flou terminologique où « stabilité », « permanence », « immobilisme », « inertie », « rigidité », « permanence », « continuité »,

de même « changement », « mouvement », « modification », « mutation »,
« métamorphose », « transformation », « adaptation », « évolution », « réforme » se trouvent « confondus » dans l'un ou l'autre des champs lexicaux, sans compter la relativité radicale des deux concepts l'un vis-à-vis de l'autre ».

Cette dialectique changement/continuité qui a fait l'objet d'écrits importants est résumée par Mignon (2009), en rapport avec différentes théories des sciences de gestion comme suit:

Tableau n°1 : Auteurs et courants clés sur la dialectique changement/continuité

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Auteurs et courants clés

 

Terminologies

Ecologie des populations

M.T. Hannan et J. Freeman (1989) R.P. Rumelt (1995)

M.T. Hannan et al. (2004)

Favoriser l'inertie (la stabilité est sélectionnée positivement par l'environnement) sans que cette dernière inhibe les transformations et les ajustements nécessaires à l'adaptation.

Pérennité organisationnelle

J.C. Collins et J.I. Porras (1994)

De Geus (1997) ; J.C. Collins (1997) Aronoff (2004)

Préserver l'essence et stimuler le progrès

Théories évolutionnistes

R.R. Nelson et S.G. Winter (1982) J.A.C Baum et J.V. Singh (1994)

S.G. Winter (2000) ; R. Durand (2006)

Développer des routines source

d'apprentissage

Ecologie intra-organisationnelle R.A. Burgelman (1991,1994) R.A. Burgelman, A. Grove (2007)

Faire régner/maîtriser le chaos

Développer de façon équilibrée les stratégies autonomies/induites

Equilibre ponctué

L.E. Greiner (1972)

D. Miller, P.H. Friesen (1984)

M.L. Tushman et al. (1986)

M.L. Tushman, C.A. O'Reilly III (1996)

C.A. O'Reilly, M.L. Tushman (2004)

Alterner les réorientations majeures et les

changements mineurs.

Promouvoir conjointement des innovations incrémentales, architecturales et radicales

Dynamic capabilities

D.J. Teece, G. Pisano, A. Shuen (1997) K.M. Eisenhard et J. Martin (2000) S.G. Winter (2003)

G. Schreyogg, M. Kliesch-Eberl (2007) J.B. Harreld et al. (2007)

Créer des capacités dynamiques et flexibles pour continuer d'exister dans la durée

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

Apprentissage et changement organisationnel

C. Argyris, D. Schon (1978)

J.G. March (1991), Huber (1991)

D.A. Levinthal (1991), C. Argyris (1995)

C.A. O'Reilly, M.L. Tushman (2004)

W. Liu (2006), K.D. Miller et al. (2006)

Equilibrer l'exploration et l'exploitation. Distinguer les changements en simple et double boucle.

Source : Sophie Mignon (2009)10

La toute première théorie évoquée (écologie des populations, avec comme chefs de file Hannan Freeman) prônait l'inertie des organisations et le maintien par l'environnement de celles qui sont stables. De même, la théorie de la pérennité organisationnelle développée par J.C. Collins et J.I. Porras voit dans les organisations cette capacité à maintenir ses atouts propres tout en stimulant le progrès.

La théorie évolutionniste voit dans les routines (opérationnelles, génériques et de recherche) une source d'apprentissage. La théorie intra-organisationnelle prône de s'appuyer sur le processus de sélection interne de la part des dirigeants pour trouver un équilibre entre initiatives stratégiques autonomes et initiatives stratégiques induites afin d'aboutir à des innovations.

La théorie de l'équilibre ponctué conduit à dépasser l'opposition entre les changements incrémentaux et de réorientations majeures et s'intéresser à la capacité des entreprises à développer simultanément tout un ensemble d'innovations incrémentales (améliorations mineures des procédés, produits), architecturales (changements fondamentaux des procédés et technologies) et radicales (innovations discontinues rendant obsolètes les produits et processus de production).

La théorie de la capacité dynamique ou dynamic capacity permet à l'organisation d'introduire des changements en créant des capacités dynamiques et flexibles, résultats d'un processus d'apprentissage. Enfin, l'apprentissage permet l'exploration et l'exploitation de nouvelles connaissances et par conséquent d'introduire des changements organisationnels.

Au regard de ce qui précède, la notion de changement semble indéterminée (Pesqueux, 2010) et difficile à cerner, sauf à adopter un référent ou un contexte bien défini.

Ainsi, nous traitons du changement dans les organisations, d'où le concept de changement organisationnel.

« Le changement organisationnel doit être perçu comme une solution permettant à l'organisation de répondre au problème de l'adaptation à son environnement et de sa capacité à évoluer » (FABRE et al., 2007).

10 Sophie Mignon (2009), La pérennité organisation, Revue française de gestion, n°192, p77.

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

La définition suivante est donnée par Collerette et al. (2008) : « Toute modification relativement durable dans un sous-système de l'organisation, pourvu que cette modification soit observable par ses membres ou les gens qui sont en relation avec ce système ».

En liaison avec la découverte et l'acquisition de capacités, Crozier et Friedberg (1977) définissent le changement et son processus : « Il ne s'agit pas de décider une nouvelle structure, une nouvelle technique, une nouvelle méthode, mais de lancer un processus de changement qui implique action et réactions, négociation et coopération. Il s'agit d'une opération qui met en jeu non pas la volonté d'un seul, mais la capacité de groupes différents engagés dans un système complexe à coopérer autrement dans la même action. »

Collerette et al. (2008) relèvent la distinction entre processus et démarche. Ainsi, pour eux, l'expression processus fait référence aux différentes phases vécues par le système social qui doit intégrer le changement. Le processus se déroule au niveau de l'expérience personnelle de ceux qui vivent le changement.

La démarche de changement quant à elle fait référence aux différentes étapes qui seront franchies pour entreprendre, promouvoir et implanter un changement dans un système. Elle contient les différentes activités qui seront exécutées par les agents du changement pour s'assurer qu'il se matérialise dans l'organisation. La démarche du changement organisationnel peut suivre quatre grandes phases :

- le diagnostic de la situation insatisfaisante ;

- la planification des actions ;

- l'exécution du plan d'actions ;

- l'évaluation des résultats obtenus.

Cependant, la littérature révèle que la mise en oeuvre du changement est un processus généralement long et présente un caractère conflictuel et chaotique (Collerette et al.,2008).

Au-delà de ces définitions préliminaires, nous allons approfondir le concept de changement organisationnel à travers la vaste théorisation dont elle a fait l'objet.

Au regard de ce qui précède, nous pouvons définir le changement organisationnel comme un processus introduit dans une organisation, au regard des contraintes de son environnement ou de besoins stratégiques, entraînant une transformation de son système d'actions et visant une amélioration significative de son fonctionnement et de sa performance.

Les concepts d'organisation et de changement étant définis, il s'avère nécessaire à présent d'analyser les modes d'introduction du changement dans l'organisation, les modes de conduite du changement et les atouts indispensables à son succès, tout ceci au regard des nombreux enjeux et contraintes que sa mise en oeuvre entraîne nécessairement.

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Mise en oeuvre du changement organisationnel : enjeux et défis de la transformation d'une organisation à but non lucratif

Les différents modèles présentés ci-dessous nous permettent de comprendre tout ce processus et leur contenu.

I.2/ Modèles explicatifs et compréhensifs du changement organisationnel

Au regard de la littérature assez florissante, il ressort que le changement organisationnel a fait l'objet de modélisations tendant à expliquer et se voulant des outils ou modèles de prédilection de comportements des organisations dans un contexte de changement. Egalement, se fondant sur la spécificité de chaque organisation, des approches de compréhension du changement dans les organisations ont enrichi la littérature. Les principaux modèles du changement sont présentés dans les lignes qui suivent.

I.2.1/ Modèles liés à la dynamique environnementale ou aux choix stratégiques

Des auteurs comme Perret (1996) et Hannan et Freeman (1994) dans Demers (1999) ont mis en évidence deux principales conceptions qui expliquent le changement : la conception « déterministe » et la conception « volontariste ».

La conception déterministe, se fondant sur la théorie de l'écologie des populations, envisage le changement organisationnel comme une dynamique de l'environnement sur l'organisation considérée comme une entité passive (Hannan et Freeman, 1994) cité par Demers (1999).

Cette conception met en évidence (Perret, 1996) le caractère inflexible de l'organisation et voit dans la structure, le système et la culture, des facteurs de rigidité et d'inertie qui tendent à préserver l'organisation des changements.

Le déterminisme de l'environnement est d'un côté, relatif à la population d'organisations, faisant ainsi référence aux lois du secteur dans lequel évolue toute organisation (Hannan et Freeman, 1984) dans Demers (1999), de l'autre à l'organisation elle-même, faisant référence à la façon dont le contexte organisationnel est façonné par les contraintes auxquelles l'entreprise doit faire face (Nadler et Tushman, 1994) dans Demers (1999).

Le rôle déterminant de l'environnement externe sur la structure des organisations a fait l'objet de beaucoup d'apports pour donner la théorie de la contingence structurelle (Cordelier et Montagnac-Marie, 2008).

Toutefois, des critiques sont formulées à l'endroit de la conception déterministe. En effet (Livian, 2008), elle évacue la dimension stratégique interne de l'organisation et laisse place à un naturalisme naïf. Elle méconnait également le fait qu'un groupe d'entreprises dans un secteur donné n'est pas un simple agrégat, mais un ensemble structuré par des relations.

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L'approche volontariste ou théorie des choix stratégiques (Child, 1972 cité par Perret, 1996) par contre, met en évidence le rôle prépondérant des choix stratégiques, de l'acteur comme facteur de transformation de l'organisation.

Cette approche a permis de développer la théorie de l'adaptation (Robert, 2007) aux mécanismes internes de l'organisation « permettant d'envisager la stratégie comme résultant de la volonté des managers agissant et prenant des décisions en fonction des contraintes internes et externes. La stratégie ainsi élaborée est imposée au reste de l'organisation ».

La tendance (à l'opposition déterministe-volontariste) longtemps entretenue dans la littérature n'est pas pertinente (Livian, 2008 ; Crozier et Friedberg, 1977). En effet, « la discussion philosophique habituelle oppose tout à fait artificiellement les partis pris déterministes ou volontaristes sur le changement ». Pour eux, « il s'agit d'un faux problème », car toutes les théories explicites ou implicites du changement sont, en effet, à la fois volontariste et déterministes (Crozier et Friedberg, 1977 : 376).

Ainsi, comme l'ont démontré certains auteurs, au-delà des approches revendiquant le déterminisme de l'environnement sur l'organisation ou des choix stratégiques à mettre en oeuvre par les acteurs de l'organisation, il conviendrait plutôt de voir une interdépendance de l'organisation avec son environnement. Les managers sont mus dans ce système par cette volonté permanente de vaincre les contraintes de l'environnement, d'en tirer des opportunités, tout cela en déployant des stratégies conséquentes.

Un autre angle d'attaque lié à la dynamique de l'environnement ou des choix stratégiques est le modèle des forces qualifiées de forces extérieures et de forces intérieures (Robbins et DeCenzo, 2008) pour motiver le changement. Les forces extérieures comprennent le marché, les lois passées par le gouvernement, la technologie et les changements économiques. Les forces intérieures concernent la redéfinition ou modification de la stratégie et l'introduction d'un nouvel équipement par exemple.

Ces modèles sont pertinents dans la mesure où ils tentent d'expliquer les causes ou les motifs d'un changement. Ainsi, pour une organisation placée dans un contexte de changement, il peut être nécessaire pour ses dirigeants ou les acteurs donnés, de comprendre et de justifier le changement à travers ses causes, les facteurs et les forces qui l'imposent. Les enjeux liés à sa conduite et à son succès peuvent fortement en dépendre.

Ces concepts seront pris en compte dans les modèles développés par d'autres auteurs qui placent l'organisation dans un environnement sujet à des turbulences nécessitant par conséquent une capacité dynamique et stratégique des managers de l'entité.

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I.2.2/ Modèles basés sur l'initiative du changement

Le changement pouvant se définir comme un processus qui implique actions et réactions, négociations et coopération, la connaissance de l'approche par l'initiative est importante et peut être déterminante dans la réussite du processus.

Sous l'angle de l'initiative du changement, il est distingué le changement intentionnel (Child, 1972 cité par Perret, 1996), ou délibéré (Perret, 1996) ou planifié (Collerette et al., 2008) ou proactif (Johnson et Scholes, 2000 cités par Autissier et Vandangeon-Derumez, 2004) et le changement contraint (Lawrence & Lorsh, 1983 cité par Perret, 1996) ou subi. Ici, il est mis en emphase la faculté d'anticipation, de planification et motivée par une attitude proactive en opposition à des phénomènes présents et non prévus et qui nécessitent une attitude réactive.

Il est également fait cas du changement dirigé ou prescrit (Vandangeon-Derumez, 1998), où la dynamique de changement est à l'initiative unilatérale des dirigeants en opposition au changement construit (Cordelier & Montagnac-Marie, 2008), où les dirigeants tiennent compte à l'inverse des idées émises par leurs subordonnés.

Il apparaît que cet angle d'approche n'est pas totalement éloigné du précédent et qu'une conciliation peut même être opérée entre ces approches. En effet, le changement organisationnel qu'il soit intentionnel, délibéré, prescrit ou par contre contraint, nécessite des actions de planification et une gestion efficace.

Cette approche de la connaissance du changement s'est révélée pertinente dans la mesure où elle permettra à d'autres auteurs de proposer des modèles basés sur la coconstruction de l'organisation par l'implication et la participation large des acteurs de la base au sens de Mintzberg et par un leadership assuré par le sommet hiérarchique de l'organisation.

On peut supposer que les enjeux divers d'un changement sont fonction de son ampleur. Tel sera l'apport des modèles présentés ci-dessous.

I.2.3/ Modèles basés sur l'ampleur du changement

L'ampleur et l'importance du changement ont été mises en exergue dans la littérature sur le changement à travers l'emploi de plusieurs terminologies. Ainsi, le changement radical (Brassard, 2003 ; Christensen & Overdorf, 2000 ; Rondeau, 1999 ; Demers, 1989 ; Johnson et Scholes, 2000) permet d'introduire une refonte globale ou substantielle d'un système ou d'une organisation. Il marque une rupture (Christensen & Overdorf, 2000) ou une révolution (Brassard, 2003). Par contre, le changement marginal ou incrémental (Tushman & Romanelli, 1985) cité par Demers, (1999) fait référence au caractère évolutif ou progressif du changement.

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Toujours en relation avec l'importance du changement, trois (3) niveaux de changement sont mis en évidence par Watzlawick (1975) cité par Soparnot (2005)11. Le niveau 0 est celui où rien ne change ; c'est la continuité, l'immobilisme. Le changement d'ordre 1 est correctif, mineur et permet à l'organisation de maintenir son équilibre. Le changement de niveau 2 est un changement majeur qui vise à transformer complètement l'entreprise, ses valeurs, ses règles et à métamorphoser le comportement des salariés. Il s'agit d'un changement de logique qui modifie le système en profondeur.

Dans le même ordre d'idées, Mintzberg et al. (1999) cité par Soparnot (2005) distinguent les micro changements des macro changements. Le micro changement ne concerne qu'un espace restreint de l'entreprise alors que le macro changement la concerne dans toute sa dimension.

Les actions à mettre en place pour introduire et gérer le changement dépendront de l'ampleur du changement. On peut convenir qu'un changement de faible ampleur ne mobilisera qu'une capacité assez limitée de l'organisation tandis qu'un changement de grande ampleur mobilisera une capacité beaucoup plus importante et suscitera aisément les phénomènes tels que les résistances. La combinaison de types de changement a permis à Johnson et Scholes (2000) cités par Autissier et Vandangeon-Derumez (2004) d'établir la typologie suivante :

Tableau n°2 : Typologie des changements selon Johnson et Scholes

Proactif

Réactif

AJUSTEMENT

 

TRANSFORMATION PLANIFIEE

Anticiper les besoins de changement par

Planifier un changement drastique par

un processus proactif d'ajustement des

anticipation aux techniques d'analyse

pratiques en cours

stratégique et d'aide à la décision

ADAPTATION

TRANSFORMATION FORCEE

Réagir aux pressions environnementales

Remettre en cause les schémas de

et concurrentielles.

pensée implicites à la suite d'un

Adapter le paradigme organisationnel

existant afin d'éviter les incohérences
trop flagrantes avec l'environnement

processus de dérive stratégique

Changement incrémental Changement radical

Source : Johnson et Scholes (2000) dans Autissier et Vandangeon-Derumez (2004)12

Il établit qu'un changement incrémental et réactif est une adaptation, mais que le changement incrémental qui se veut proactif s'assimile à un ajustement des pratiques en cours. Le changement de grande ampleur et réactif est considéré comme une transformation forcée en réaction à un processus de dérive de la stratégie. Le changement radical proactif se présente comme une transformation planifiée.

11 Richard Soparnot, L'évaluation des modèles de gestion du changement : de la capacité de gestion du changement à la gestion des capacités de changement, Gestion, volume 29, numéro 4, hiver 2005.

12 Autissier et Vandangeon-Derumez, 13ème Conférence de l'AIMS. Vallée de Seine 2, 3 et 4 juin 2004.

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Certains auteurs (Brassard, 2003 ; Johnson et Scholes, 2000) ont introduit le débat pour nuancer les notions de changement et de transformation, la transformation étant définie comme un changement radical et de grande ampleur.

Cette approche s'avère utile dans la conduite du changement dans une organisation car elle montre que la manière de réagir (pro-action ou réaction) ou d'introduire (planifiée ou forcée) le changement permet de cerner ses déterminants essentiels et sa conduite efficace.

I.2.4/ Modèles basés sur les dimensions affectées par le changement

Robbins et DeCenzo (2008) définissent trois (3) points sur lesquels porte le changement : la structure, la technologie ou le personnel.

Schéma n°1 : Dimensions du changement

+

+

Structure

Relation d'autorité
Coordination de mécanismes
Refonte de postes
Eventails de contrôle

Technologie

Processus de travail
Méthodes de travail
Equipement

Personnel

Attitudes
Attentes
Perceptions
Comportements

Source : Robbins et DeCenzo (2008)

Le changement peut toucher la structure de l'organisation en ce sens il portera sur les relations d'autorité, la coordination de mécanismes, la refonte des postes et divers éventails de contrôle.

En ce qui concerne la technologie, le changement peut concerner les processus et les méthodes de travail et tout l'équipement nécessaire. De nombreux changements ont été induits par les nouvelles technologies (Internet, ...).

Quant au personnel, le changement peut affecter leurs attitudes, leurs attentes, leurs perceptions et leurs comportements.

On peut prédire qu'un changement de grande importance va toucher tous les volets définis par Robbins et DeCenzo, mais aussi peut concerner l'un ou l'autre de ces volets de façon prononcée.

Cette approche théorique est pertinente car elle permet de comprendre que le lancement d'un processus de changement passe nécessairement par le ciblage préalable des zones ou dimensions qui feront justement l'objet de changement, de la nature du changement ou de l'orientation à donner à l'organisation.

La conduite d'un changement s'effectue nécessairement dans le temps et par phases successives.

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I.2.5/ Modèles basés sur le processus de changement

Deux principaux modèles sont présentés ci-dessous : le modèle de Lewin et l'approche constructiviste-systémique.

I.2.5.1/ Le modèle de Lewin

Le modèle de Lewin s'attèle à définir le processus de changement en trois étapes (Lewin in Collerette et al., 2008)13 :

- la décristallisation

La décristallisation ou dégel correspondrait à la période où un système, qu'il s'agisse d'un individu, d'un groupe ou d'une collectivité, commence à remettre en question, volontairement ou non, ses perceptions, ses habitudes ou ses comportements.

- la transition

Cette phase (mouvement et gel) correspondrait à l'initiation au nouveau mode de fonctionnement et à l'expérimentation des « nouvelles façons » de faire les choses.

- la recristallisation

A cette phase aussi appelée phase de regel, les nouvelles pratiquent « s'harmonisent » avec les autres dimensions du quotidien et font désormais partie des habitudes.

I.2.5.2/ L'approche constructiviste-systémique

L'approche constructiviste-systémique explicitée par Collerette et al. (2008)14 se rapproche de l'approche de Lewin en définissant également des étapes dans la compréhension du changement comme suit :

- l'éveil

« En présence d'une pression visant un changement, l'éveil est cette activité mentale qui consiste à s'interroger, ne serait-ce qu'à des fins stratégiques, sur l'utilité de prêter attention à cette pression » (Collerette et al. 2008).

Cette étape est donc considérée comme le point de départ du processus de changement. - la désintégration

Collerette et al. (2008) caractérisent la désintégration comme consistant à déterminer quels sont les aspects jugés non adaptés à un système de représentation et dans les pratiques qui en découlent, pour les écarter et en déduire la valeur relative. Ils précisent que c'est à cette

13 Collerette, Delisle et Perron, Le changement organisationnel, théorie et pratique, 2008, p22.

15

14 Op. cit., p25-36

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étape que se développe chez les destinataires l'attitude réceptive ou réfractaire, à l'égard du changement et par voie de conséquence la période où les « alliances et les coalitions » commencent à prendre forme au sein des groupes.

- la reconstruction

A cette phase, indiquent-ils, le système se met à la recherche de significations nouvelles qui l'aideront à réagir de façon satisfaisante aux situations qui se présentent.

- l'intégration

Ici, « l'enjeu ne se situe pas entre les anciennes et les nouvelles façons de faire, mais plutôt sur le plan de l'équilibre, de l'harmonie entre la nouveauté et les autres conceptions et pratiques toujours en vigueur dans le système » (Collerette et al. 2008).

Ces deux modèles sont superposables comme le montre le schéma ci-dessous :

Schéma n°2 : Phases et étapes du changement

Phases du processus vécu

Recristallisation

Décristallisation Transition

105

100

Energie (%)

75

Désintégration Reconstruction

Eveil

Intégration

 
 

Analyse préliminaire

Diagnostic Exécution Evaluation

Planification

 
 

Temps (semaines-mois)

Etapes de la démarche entreprise

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Source : Collerette, Delisle et Perron (2008)

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Sur le schéma, on peut observer que l'éveil correspond à peu près à la phase de décristallisation ; la désintégration et la reconstruction renvoient approximativement à la phase de transition et l'intégration à la phase de recristallisation. Ces phases se distinguent selon le processus global de planification, d'exécution et d'évaluation.

Ces étapes se rapprochent également de celles définies par Vandangeon-Derumez (1998) qui sont la maturation, le déracinement et l'enracinement.

Face aux limites des différents modèles processuels, Vandangeon-Derumez (1998) propose d'introduire la notion de « temporalité » permettant notamment de déterminer quel facteur, à quel moment et selon quelle intensité peut expliquer ou non l'engagement d'un changement.

Ces modèles sont fort utiles dans la mesure où ils aident tout acteur de changement à bien identifier les principales phases d'un processus, généralement long, et le déploiement d'actions conséquentes.

I.2.6/ Typologie fondée sur les relations acteurs et destinataires du changement

Cette typologie, fondée d'un côté sur les relations entre l'agent de changement, c'est-à-dire la personne responsable du changement ou pilotant le changement ou selon Kotter (1990) un leader emblématique, charismatique symbolisant la volonté de changer, et de l'autre les destinataires du changement. Elle comprend également trois approches :

- Les approches consensuelles visent à recueillir l'adhésion la plus grande possible des acteurs.

- Les approches conflictuelles consistent à bien localiser l'adversaire, à engager le conflit et à tenter de le gagner pour obtenir les changements qu'on désire.

- Les approches marginales s'appuient sur une rupture plus ou moins prononcée des relations avec les autres groupes de l'environnement. Elles posent, pour différentes raisons, qu'il est inutile de vouloir influencer les autres pour les changer, et qu'il est préférable de changer ce que l'on veut, pour soi, indépendamment des contraintes de l'environnement.

I.2.7/ L'approche « contextualiste »

Nizet et Pichault (2000)15 vont mettre en exergue une approche contextualiste, fondée sur le contenu, le contexte et le processus.

- le contenu : il s'agit du domaine du changement ou ce sur quoi porte le changement ;

15 In Jocelyne Robert, Organisations et changements en entreprises : Approches historique, théorique et pratique, Les Editions de l'Université de Liège.

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- le contexte : il s'agit des facteurs internes et externes à l'organisation, à l'origine du changement, avec une dimension objective et observable et une dimension subjective mettant en avant le rôle des acteurs et leur interprétation du phénomène de changement ;

- le processus : il permet d'analyser les initiatives développées par les acteurs face au changement.

Ces différentes approches non limitatives nous ont permis de faire une meilleure connaissance des méthodes de compréhension et de conduite du changement.

Un changement a un début et une fin ; il est introduit d'une certaine manière dans l'organisation et touche ses différentes dimensions avec une intensité variable ; il se décompose en plusieurs phases et se mène à travers des relations de nature diverses entre les meneurs et les destinataires.

Le changement comporte des enjeux, de part la manière dont il est introduit et la manière de le mettre en oeuvre. Nous allons à travers un bref parcours théorique déterminer les enjeux principaux et les conditions du phénomène.

I.3/ Les enjeux et conditions du changement I.3.1/ Les enjeux du changement

Tout changement comporte des enjeux, ne serait-ce qu'au vu de ses causes, des objectifs visés et la manière de le conduire.

Rondeau et Bareil (2010) nous propose un cadre d»analyse des enjeux du changement comme suit :

Tableau n°3 : Cadre d'analyse des enjeux du changement proposé par Rondeau et Bareil

Enjeu 1 : légitimer le changement

. Etablir un dialogue soutenu avec les cadres

. Aider les cadres à composer avec les déséquilibres et protéger leur intégrité

Enjeu 2 : réaliser le changement

. Favoriser la visualisation du changement

. Amener les cadres à adopter un mode de gestion de projet

. Utiliser la mise en oeuvre du changement pour développer de nouvelles capacités

Enjeu 3 : favoriser l'appropriation du changement

Amener les cadres à :

. exercer du leadership

. accompagner leurs équipes dans la modification de leurs comportements et habitudes

. Considérer le changement comme une situation d'apprentissage

. Aborder le changement dans la perspective d'une amélioration continue

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Source : Rondeau et Bareil (2010)

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Ainsi, selon les auteurs, le premier enjeu du changement réside dans sa légitimation. Légitimer le changement signifie inculquer dans toute l'organisation un sentiment qui constitue une réponse valable aux difficultés auxquelles cette dernière fait face ou aux nouvelles exigences de son environnement d'affaires.

Les auteurs relèvent que même lorsqu'il s'agit d'un changement imposé par une législation ou une réglementation, l'exercice de légitimation est toujours approprié.

Un regard croisé par rapport aux modèles vus sur le changement nous permet de dire que cet enjeu apparaît dès le début du processus, ou la phase d'éveil ou de décristallisation. Il est donc déterminant pour la suite du processus.

Le deuxième enjeu consiste à réaliser le changement. Cela semble évident dans la mesure où c'est l'étape la plus critique pour l'exécuter avec succès. Le réaliser amène à déployer au sein de l'organisation les nouvelles configurations d'action et les nouvelles pratiques dans lesquelles s'incarne la transformation.

Il nous semble que le plus important ici est la manière de réaliser le changement, en d'autres termes, comment mettre les atouts de son côté pour réussir le changement.

Enfin, favoriser l'appropriation du changement, c'est faire en sorte que les personnes concernées adoptent les nouvelles pratiques comme si cela représentait dorénavant la façon naturelle de fonctionner.

Il peut s'avérer nécessaire de mobiliser efficacement les ressources afin de gérer simultanément le projet de changement de façon concomitante avec les autres projets en cours. Ainsi, Pichault (2010) indique que l'un des enjeux majeurs de tout processus de changement consiste à combiner la temporalité du projet concerné avec les temporalités des autres projets en vigueur dans l'organisation, ces derniers pouvant largement interférer avec le projet actuel et en conditionner le cours.

On peut avancer qu'un des enjeux importants du changement réside dans sa mise en oeuvre par l'adhésion totale et l'implication véritable des différents acteurs, en dehors de tout phénomène de résistance.

I.3.2/ La résistance au changement

Il est difficile de traiter la question de changement sans évoquer le thème de résistance au changement comme le montrent les nombreuses contributions théoriques et empiriques, ce qui justifie qu'elle en est un enjeu important. Ces résistances sont le plus souvent présentées comme l'apanage des destinataires ou des victimes du changement (Strebel, 2000)16.

16 Paul Strebel, Pourquoi les salariés résistent-ils au changement ?, Harward Business Review, Les Editions d'organisation, 2000.

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Ainsi, Bareil et Savoie (1998) définissent sept phases de préoccupations et expressions connexes :

Tableau n°4 : Sept phases de préoccupation selon Bareil et Savoie

Le destinataire se préoccupe de la (du) :

Phase 1. Aucune préoccupation

Le destinataire ne se sent pas personnellement concerné par le changement, il poursuit ses activités habituelles et fait « comme si de rien n'était ». Il demeure indifférent au changement organisationnel.

Phase 2. Sécurité de son poste

Le destinataire est inquiet des incidences du changement sur lui-même et sur son poste. Il s'interroge sur le maintien de son poste à la suite de l'implantation du changement et sur les

conséquences de ce dernier sur son rôle, ses responsabilités, son statut et son pouvoir
décisionnel. Il a l'impression de ne plus maîtriser la situation ou de ne plus savoir ce qui l'attend, et se questionne sur sa place dans l'organisation.

Phase 3. Volonté et sérieux du changement

Le destinataire se questionne sur les impacts et les conséquences qu'aura le changement sur l'organisation. Il désire s'assurer que son investissement en temps et en énergie en vaudra la peine. Il se demande entre autres jusqu'à quel point l'organisation est sérieuse dans le maintien du changement à plus long terme et si le changement sera rentable.

Phase 4. Nature du changement

Le destinataire quitte la zone de confort et commence à s'interroger sur la nature exacte du changement. Il cherche des réponses à sa méconnaissance du changement. Il devient attentif et proactif et souhaite obtenir davantage de précisions sur le changement : de quoi s'agit-il, quand et comment cela se fera t-il, etc.

Phase 5. Soutien disponible

Le destinataire est disposé à se conformer au changement prescrit et à en faire l'essai. Cependant, il éprouve un sentiment d'incompétence par rapport à ses nouvelles fonctions, habiletés et attitudes. Il se dit inquiet sur sa capacité à réussir et c'est pourquoi il s'interroge sur le temps, les conditions, l'aide et le soutien qui lui sont offerts. Il veut pouvoir être sûr de réussir son adaptation.

Phase 6. Collaboration avec autrui

Le destinataire se montre intéressé à collaborer et à coopérer avec d'autres. Il désire partager son expérience avec des collègues et s'enquérir de leurs façons de faire. Il veut s'impliquer dans la mise en oeuvre du changement.

Phase 7. Amélioration continue du changement

Le destinataire recherche de nouveaux défis. Il désire améliorer ce qui existe déjà, en modifiant de façon significative son travail ou ses responsabilités, ou en proposant de nouvelles applications du changement. Il remet en question ses méthodes de travail et souhaite améliorer ou généraliser le changement.

Source : Bareil et Savoie (2005)17

Ces étapes explicitées dans le tableau traduisent assez bien les principales préoccupations du destinataire du changement. Elles vont d'un état d'indifférence chez le destinataire à une implication et une appropriation du changement.

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17 Céline Bareil et André Savoie, Comprendre et mieux gérer les individus en situation de changement organisationnel, Gestion, vol 24, n°3, automne 1999, p90.

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Ces préoccupations telles qu'exposées par les auteurs impliquent que la mise en oeuvre du changement se déroule selon un processus dont chacune des étapes fait l'objet d'interrogation de la part du destinataire.

Robins et DeCenzo (2008) définissent trois grandes raisons qui motivent les résistances au changement : l'incertitude et la perte des repères, la peur d'une perte au niveau personnel et le sentiment que l'évolution n'est pas ce qu'il y a de mieux pour l'organisation.

La question de résistances au changement est également abordée par Collerette et al. (2008) qui distinguent également trois (3) sources de résistances comme suit :

- les résistances liées à la personnalité ;

- les résistances liées au système social ;

- les résistances liées au mode d'introduction du changement.

Cette vision nous semble un peu restrictive car elle ignore tout le reste du processus, notamment la phase de conduite du changement durant laquelle les actions mises en oeuvre peuvent rebuter les destinataires. Comme exemple, un changement entamé et accepté par les destinataires peut engendrer par la suite une restriction de l'effectif ce qui va forcement implanter un environnement de résistance voire de sabotage.

Pour briser la résistance ou à tout le moins la limiter, Robins et DeCenzo (2008) préconisent plusieurs stratégies résumées dans le tableau ci-dessous :

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Tableau n°5 : Stratégies pour briser la résistance selon Robins et DeCenzo

Technique

Utilisation

Avantage

Inconvénient

Education et

communication

Lorsque la résistance est

due à une
désinformation

Efface les

malentendus

Peu efficace en cas de manque de confiance et de crédibilité

Participation

Lorsque les résistants

sont assez compétents

pour apporter leur
contribution

Accroît l'implication

et l'acceptation

Prend beaucoup de

temps et mène

éventuellement à une
solution médiocre

Aide et soutien

Lorsque les résistants

sont victimes de craintes et d'angoisse

Peut faciliter

certaines adaptations

Coûte cher et ne garantit pas une réussite

Négociation et

entente

Lorsque la résistance est

l'oeuvre d'un groupe
puissant

Peut permettre

« d'acheter » des

engagements

Peut coûter cher et offre

à d'autres la possibilité
d'exercer des pressions

Manipulation et cooptation

Lorsque l'appui d'un

groupe puissant est

nécessaire

Peu coûteuse,

facilité de s'assurer
un soutien

Risque d'échec et de

perte de crédibilité de
l'agent du changement

Coercition

Lorsque l'appui d'un

groupe puissant est

nécessaire

Peu coûteuse,

facilité de s'assurer
un soutien

Eventuellement illégale

et peut nuire à la
crédibilité de l'agent du changement

Source : Robbins et DeCenzo (2008)

De façon générale, des styles sont préconisés pour gérer efficacement le changement tout en réduisant la résistance. Pour Livian (2010), ces styles sont : l'autorité (changement imposé), la persuasion (changement « vendu »), la négociation et le changement « participatif ».

L'implication, la négociation et la communication sont des atouts essentiels pour réussir un changement. Un changement peut être la cause de stress observé chez certains agents.

Nombre d'expériences de changement ont conduit à des échecs. Certains auteurs présentent les causes essentielles d'échec de ces tentatives. Ils préconisent par conséquent des solutions pour un succès du projet de changement.

I.3.3/ Les causes d'échec et les facteurs de succès du changement

Pour Kotter, le processus de changement suppose que l'on passe par un certain nombre de
phases. Aussi, il définit huit (8) causes essentielles d'échec formulées sous forme d'écueil :

- Ecueil n°1 : ne pas stimuler suffisamment le sentiment d'urgence - Ecueil n°2 : ne pas constituer de noyau dur

- Ecueil n°3 : manquer de vision

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- Ecueil n°4 : minimiser l'effort de communication

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- Ecueil n°5 : laisser des obstacles

- Ecueil n°6 : ne pas se donner des repères

- Ecueil n°7 : crier trop tôt victoire

- Ecueil n°8 : ne pas encrer le changement dans la culture de l'entreprise.

Collerette et al. (2008) ont dégagé en retour six (6) conditions qui maximisent les chances de succès d'une entreprise au changement organisationnel planifié :

1. Les destinataires perçoivent le problème comme assez prioritaire et insatisfaisant pour être motivés par une intervention.

2. Il y a suffisamment d'énergie disponible chez les destinataires et les agents de changement pour entreprendre et mener une intervention à terme.

3. L'agent de changement a, ou peut obtenir, le pouvoir ou les moyens de réaliser le changement ; les destinataires le perçoivent.

4. Les avantages du changement sont perçus et valorisés par les destinataires.

5. Les avantages associés au changement sont perçus par les destinataires comme étant supérieurs aux bénéfices perdus dans la situation actuelle, additionnés aux désavantages qui viendront avec le changement.

6. L'agent est capable de procurer aux destinataires la sécurité et le support dont ils auront besoin pour traverser la période du changement.

Après avoir parcouru les différentes théories sur le changement organisationnel, avec une mise en exergue de ces enjeux principaux, du phénomène de résistance généralement vécue lors du processus, des causes de l'échec des projets et de l'exposé de pistes pour leur réussite, nous pouvons à présent déterminer le modèle d'analyse pour aborder les principales questions soulevées pour comprendre l'introduction et la mise en oeuvre du changement dans une organisation donnée.

I.4/ Modèle d'analyse

Nous présentons dans un premier temps le modèle de Rondeau et la justification du choix et dans un second temps la grille d'analyse qui sera extraite du modèle de Rondeau.

I.4.1/ Présentation du Modèle de Rondeau

Pour comprendre les différentes facettes du changement et sa mise en oeuvre dans les organisations, Rondeau a élaboré un modèle qui se présente de façon schématique comme suit :

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Schéma n°3 : Modèle de Rondeau

Source : Rondeau (1999)

La démarche de transformation et les trois (3) dimensions du modèle sont ci-dessous sont définies par Rondeau (1999).

I.4.1.1/ La démarche de transformation

Elle comporte cinq (5) aspects : un scénario, un plan d'action, l'encadrement, le rythme et les cibles.

La construction de la démarche de changement se présente comme un scénario qui va guider le déroulement du changement afin de faire pénétrer l'intention stratégique au sein de l'organisation. La conduite du changement nécessite un plan d'action qui identifie l'ensemble des activités et leur séquence de mise en oeuvre du changement. L'encadrement du changement consiste dans le partage des rôles et responsabilités entre les acteurs impliqués (niveau stratégique, fonctionnel et opératoire) dans la conduite du changement. Le rythme est lié à la cadence d'action à maintenir dans la mise en oeuvre du changement. Les cibles d'action ont trait à la fois aux objectifs visés et aux résultats escomptés par la transformation.

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I.4.1.2/ Les trois (3) dimensions du modèle

Dimension 1 : Le contexte du changement : identifier les conditions déterminantes

Pour comprendre ce qui se passe dans la transformation d'une organisation, il faut d'abord se pencher sur le contexte dans lequel cette transformation se déroule, c'est-à-dire les conditions qui prévalent dans l'organisation et dans son environnement et qui sont susceptibles d'influencer le déroulement éventuel de la transformation. Rondeau définit les variables contextuelles majeures :

- la complexité du changement : cas de changement radical ou de changement imposé, perturbation des équilibres internes, perturbation du système, taille importante de l'organisation, activités multiples, marchés diversifiés, nombreuses technologies, ressources hautement qualifiées et fortes pressions de son environnement.

- la légitimité du changement : pertinence perçue de la transformation annoncée eu égard à la performance de l'organisation.

- le niveau d'inertie de l'organisation : dans quelle mesure l'organisation est perméable à son environnement tout en sachant préserver ce qui constitue ses forces propres. Elle porte sur la structure, la culture et l'historique de changement.

- la disponibilité des ressources car tout changement a un coût et une vision sans moyens n'a pas de grandes chances de se réaliser.

- les pressions de l'environnement : structure concurrentielle (acteurs actuels et potentiels) à prendre en compte.

- le soutien des groupes intéressés : tout acteur social ayant une influence quelconque sur l'évolution d'une organisation (gouvernements, donneurs d'ordre, les syndicats, les groupes d'intérêt).

Dimension 2 : Les acteurs du changement : enjeux et rôles déterminants

Pour Rondeau (1999), le changement organisationnel est le fait d'une masse critique d'acteurs organisationnels qui s'y investissent parce que ce changement représente un enjeu pour eux et qu'ils considèrent avoir un rôle à y jouer : interprétation de la haute direction du besoin de changer en tant que déclencheur du changement, travail d'un ou de plusieurs « champions », véritables catalyseurs du changement appuyés par des « équipes porteuses », « destinataires » du changement ou personnes touchées.

L'analyse des acteurs et des enjeux organisationnels met en évidence la nature essentiellement perceptuelle et politique de toute transformation.

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Dimension 3 : Les conditions à créer au sein de l'organisation : produire des effets désirables

Changer, c'est améliorer la capacité installée de l'organisation à faire face à la turbulence de son environnement. C'est faire de chaque sous-système, et éventuellement de chaque acteur, un agent de changement qui non seulement comprend bien ce qu'il faut réaliser, mais qui est aussi en mesure d'y contribuer en développant les capacités nécessaires.

Les principales conditions sont définies comme suit :

- clarification de la direction par l'articulation d'un ensemble d'activités d'orientation (objectifs poursuivis, modèle organisationnel visé).

- favorisation chez les divers acteurs organisationnels d'une disposition positive à investir des énergies dans le projet par des activités de sensibilisation.

- développement des capacités individuelles et organisationnelles par des activités d'habilitation.

- Agencement de l'appareil organisationnel d'origine avec les nouvelles exigences par des activités d'intégration.

- dotation de l'organisation de mécanismes d'apprentissage continu visant à la rendre plus sensible à des modifications de son environnement et à réduire la nécessité d'éventuelles transformations radicales par un ensemble d'activités de régénération.

I.4.2/ Justification du choix du modèle de Rondeau

Les principaux modèles rappelés antérieurement permettent de comprendre le changement organisationnel sous des perspectives multiples allant des facteurs qui le motivent ou l'occasionnent, aux facteurs clés de succès pour la réussite du changement, en passant par des dimensions liées au style de management des acteurs et des destinataires du changement et bien d'autres phénomènes. La plupart de ces modèles abordent une facette donnée du changement. Par exemple, les modèles déterministes et volontaires donnent des pistes pour apprécier la manière dont le changement s'introduit dans l'organisation ou comment il se justifie.

Le modèle basé sur l'initiative du changement permet de comprendre comment il est enclenché. Une approche un peu plus globalisante est observée avec le modèle contextualiste. Ces modèles fondateurs ont permis l'élaboration d'autres modèles. Sont de ceux-là le modèle de Rondeau qui a su faire une combinaison subtile des préconisations effectuées. Le modèle de Rondeau met en évidence les dimensions suivantes dans la démarche du changement :

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- le contexte du changement pour identifier les conditions déterminantes ;

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- les acteurs du changement permettant d'analyser leurs enjeux et leurs rôles déterminants ;

- la progression du changement pour mettre en évidence les « capacités » déterminantes.

Les principales variables définies dans le modèle nous semblent assez pertinentes pour la compréhension du changement dans l'organisation étudiée. En effet, les variables contextuelles prédéterminent dans une large mesure la réussite d'un changement. Un ensemble de variables permettent également de capter les intentions et comportements des différents acteurs du changement, notamment celui ou ceux chargés de la conduite du changement et ceux qui en sont affectés mais dont l'apport est essentiel à sa réussite. Des variables permettent également de mesurer les effets du changement.

Le modèle de Rondeau nous paraît pertinent pour l'analyse de notre situation. En effet, la force de ce modèle est qu'il permet d'analyser non seulement le contexte du changement, le point de vue des acteurs comprenant les agents de changement et les destinataires du changement, mais aussi les conditions de succès du changement. Ce cadre prend en compte la démarche d'analyse ou « analyse stratégique » du système et des acteurs préconisée par Crozier et Friedberg (1977) indiquant que l'organisation n'est pas une « « donnée naturelle » mais un « construit social » ; il faut en étudier les enjeux, les intérêts, les règles du jeu et comprendre les stratégies développées par les acteurs. Les auteurs assimilent les individus à des « acteurs » et non à des agents passifs qui exécutent des consignes.

Le modèle permet enfin de répondre aux problématiques essentielles du changement, en l'occurrence au « quoi », au « pourquoi » et au « comment » du changement (Demers, 1999).

L'auteur indique toutefois que son modèle « n'est en fait qu'un guide d'action, qu'un outil de travail pour favoriser rigueur et transparence dans la conduite de la démarche de transformation » et que « cet outil est actuellement testé dans l'accompagnement de transformations majeures auxquelles participent les chercheurs du Centre18 »

La compréhension et la conduite d'un changement nécessitent la mise à contribution et la combinaison d'un ensemble de facteurs environnementaux, internes et d'aptitudes propres au promoteur du changement face à d'autres acteurs essentiellement considérés comme les destinataires du changement ; autant d'éléments qui ont été pris en compte dans le modèle de Rondeau. Cependant, nous avons opté d'adapter la troisième dimension du modèle à notre environnement. En effet, nous percevons que le changement n'a pas encore produit des effets tangibles et les conditions essentielles à leur aboutissement immédiates ne sont pas réunies. C'est ainsi que notre grille d'analyse ci-dessous va retenir quatre (4) aspects essentiels de cette dimension.

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18 Centre d'Etudes en Transformation des Organisations de HEC Canada

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1.4.3/ Grille d'analyse

Sur la base du modèle, nous avons élaboré un guide d'entretien contenant dix neuf (19) questions à administrer au personnel (cf annexe 1.1) et un second adapté pour être administré aux acteurs externes (cf annexe 1.2). Ce dispositif est complété par des notes d'observations ou des notes prises lors des réunions. Ces trois éléments mis ensemble ont permis de faire une triangulation des données collectées.

La grille d'analyse découlant de cet éventail de questions et d'items se présente comme suit :

Tableau n°6 : Grille d'analyse

Dimensions

Variables

Conditions déterminantes

Complexité du changement Origine de la transformation Objet du changement

Pertinence du changement Spécificité de l'organisation Encadrement de la réglementation

Enjeux et rôles déterminants

Enjeux réels ou perçus

Vision, style et stratégie mis en oeuvre

Participation des acteurs

Position concurrentielle

Enjeux et problèmes vécus

Effets du changement

Niveau de changement Rythme du changement Réussite du changement Adaptation aux nouvelles exigences

Source : Elaboré par nous-mêmes

La grille d'analyse comprend au total quinze (15) variables issues du dispositif énoncé ci-dessus. L'examen et l'analyse de ces variables nous permettront de caractériser le changement au sein de l'organisation faisant l'objet d'étude.

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II/ METHODOLOGIE

II.1/ Démarche méthodologique

Notre sujet est traité sous forme d'une étude d'un cas sur une période de deux ans environ.

L'étude de cas est une description d'un phénomène, d'une organisation ou d'un incident. Elle s'applique (Miles et Hubermann, 2003)19 dès que le chercheur veut faire une observation in situ, une observation compréhensive et observation sur la durée permettant une meilleure connaissance du cas.

«In brief, the case study method allows investigators to retain the holistic and meaningful characteristics of real-life events - such as individual life cycles, small group behavior, organizational and managerial processes, neighborhood change, school performance, international relations, and the maturation of industries.» Yin (2003)20

L'étude approfondie d'un cas nous semble appropriée pour mieux analyser la situation d'ensemble, son contexte, l'évolution du processus ainsi que les jeux d'acteurs comme l'a souligné Yin (2003).

L'étude approfondie utilise des données qualitatives qui, selon Miles et Huberman (2003) « sont séduisantes. Elles permettent des descriptions et des explications riches et solidement fondées de processus encrés dans un contexte local. Avec les données qualitatives, on peut respecter la dimension temporelle, évaluer la causalité locale et formuler des explications fécondes ».

Cette méthodologie présente cependant l'inconvénient de la non généralisation des résultats (Stake, 1978)21 sauf sous certaines conditions.

L'étude de cas nécessite le recours à un ensemble de techniques et d'outils complémentaires. Dans le cas présent, la technique documentaire, l'observation souvent participante, les focus groupes (diner-débat et autres réunions) d'une part et des entretiens semi-directifs d'autre part sont les principales méthodes d'investigation utilisées.

La technique documentaire permettra grâce aux principaux documents (outils de gestion internes, études réalisées, textes institutionnels et règlementaires) de connaître la situation initiale de l'organisation, le contexte du changement, l'environnement et le secteur d'activité.

19 Matthew B. Miles et A. Michael Huberman, Analyse des données qualitatives, 2ème éd., De Boeck (2003). P11.

20 Yin, R K (2003), Case study research: Design and methods (3rd ed.) Thousand Oaks, CA : Sage.

21 Robert E, STAKE, The Case Study Method in Social Inquiry, Educational Researcher, vol.7, n°2, Feb. 1978.

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La réalisation d'un guide d'analyse des contenus et d'un guide d'entretiens avec les acteurs permettra de mieux définir et cerner les contours de la transformation engagée. Les entretiens semi-directifs seront réalisés auprès des principaux acteurs de l'organisation et du changement.

Un diner-débat organisé par la Mutuelle des agents de l'Agence Faso Baara S.A et réunissant le Directeur Général et l'ensemble du personnel a également servi de cadre à la collecte de données. Ce diner-débat qui a duré environ deux (2) heures a été entièrement enregistré.Trois thèmes ont constitué l'ossature du diner-débat : la vision des responsables, la stratégie et l'ouverture du capital dont la Mutuelle est ciblée pour bénéficier d'actions.

L'observation et souvent la participation à certains cadres de concertation tels que les réunions au regard de notre position de cadre dans l'organisation sont utilisées tout au long du processus et permettent une triangulation des données issues de l'analyse documentaire et des entretiens. Des notes d'observation étaient régulièrement rédigées.

II.2/ Technique d'échantillonnage et de collecte de données

Notre échantillon d'interviewés internes a concerné les fonctions principales de l'entité. Une fois la fonction déterminée, le choix des interviewés a été faite de façon aléatoire. Il s'agit : d'un (1) directeur, de trois (3) comptables, de deux (2) chefs de projets, de trois (3) assistants chef de projet, de deux (2) cadres du pool conseillers, de deux (2) cadres représentant la Mutuelle, soit au total treize (13) personnes interviewées représentant approximativement 33% de l'effectif du personnel.

Notre questionnaire a été administré à des acteurs externes en son volet contextuel. Ainsi, nous avons pu nous entretenir avec deux (2) cadres supérieurs de deux agences d'exécution, sociétés d'état exerçant dans le même secteur que l'entité étudiée.

La collecte des données va concerner d'un côté les documents internes qui sont

essentiellement : les statuts et règlement intérieur de l'organisation, les statuts et
règlement intérieur du personnel, les manuels de procédures, les notes de service et les correspondances, et de l'autre les documents externes dont principalement les textes règlementaires, les arrêtés et les études réalisées par les consultants.

Les entretiens ont fait l'objet d'enregistrements. Chaque enregistrement était affecté d'un code permettant de les suivre chronologiquement et suivant la fonction de l'interviewé. Un second niveau de codification a concerné les dimensions du questionnaire. Ce questionnaire est subdivisé en trois dimensions conformément au modèle d'analyse. La codification à l'intérieur de chaque dimension permettait de suivre chacune des questions posées et les éléments de réponse.

La durée de chaque entretien a varié globalement entre quarante cinq (45) minutes et une heure vingt cinq minutes (1h25mn).

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Il convient de noter que les entretiens avec le personnel ont été réalisés en deux étapes essentielles pour prendre en compte l'effet dynamique du changement mais surtout au regard d'une perspective de dénouement de certaines problématiques posées lors du processus. En effet, la première s'est située avant et pendant les échanges houleux sur les doléances du personnel liées à leurs droits et la seconde à peu près deux mois après que ses préoccupations aient été traitées. Deux acteurs ont été interviewés sur chacune des deux phases pour apprécier l'évolution de leurs perceptions.

Le point de vue des dirigeants a été capté à l'occasion d'un diner-débat entre le personnel et le Directeur Général, organisé le 14 décembre 2012.

II.3/ Techniques de traitement et d'analyse des données

Les données utilisées sont principalement qualitatives constituées de textes (rapports, PV, documents internes ...) et des entretiens posant ainsi la problématique du traitement d'une masse d'informations. Cependant, comme le soulignent Miles et Huberman (2003)22, ces données ne sont pas habituellement immédiatement accessibles à l'analyse, mais ont besoin d'être préalablement traitées. Les notes de terrain à l'état brut doivent être corrigées, mises en forme, tapées. Les enregistrements doivent être transcrits et corrigés.

Ainsi, les enregistrements des entretiens ont été effectués grâce à un support vidéo et audio notamment l'application Cyberlink YouCam intégré à l'ordinateur portable. La retranscription a été effectuée manuellement par nous-mêmes et saisie sur MS Word.

La caractérisation des points de vue est effectuée selon le code suivant conformément à la liste des codes établie par Miles et Hubermann (2003) :

- Très peu de répondants : moins de 10% des répondants ; - Peu de répondants : entre 10 et 33% des répondants ;

- Une partie des répondants : entre 33 et 50% des répondants ; - La majorité des répondants : entre 55 et 66% des répondants ; - La plupart des répondants : supérieurs à 66% des répondants.

22 Matthew B. Miles et A. Michael Huberman, Analyse des données qualitatives, 2ème éd., De Boeck (2003). p26.

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III/ CADRE PRATIQUE

Il est présenté ici le contexte institutionnel du changement et l'entité objet de changement. III.1/ Le contexte institutionnel du changement

III.1.1/ Un secteur d'activité particulier : la maîtrise d'ouvrage déléguée

La complexité de certains projets nécessite l'intervention d'acteurs multiples aux compétences avérées et diversifiées dans les domaines faisant ainsi l'objet de projets. La construction de routes, la réalisation de barrages, de ponts, la construction de bâtiments devant accueillir du public (écoles, hôpitaux...) sont des exemples d'infrastructures complexes appelées ouvrages.

L'ouvrage est défini23 « comme le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné à remplir par lui-même une fonction économique ou technique. Il peut comprendre notamment des opérations de construction, de reconstruction, de démolition, de réparation ou rénovation, tels que la préparation du chantier, les travaux de terrassement, l'érection, la construction, l'installation d'équipement ou de matériel, la décoration et la finition d'équipement ou de matériel, la décoration et la finition ainsi que les services accessoires aux travaux si la valeur de ces services ne dépasse pas celle des travaux eux-mêmes».

Les définitions et principales attributions des principaux acteurs intervenant dans la réalisation d'un ouvrage sont données ci-contre et s'inspirent des dispositions du décret ci-dessus cité.

Il ressort que le Maître d'Ouvrage est la personne morale de droit public ou de droit privé qui est propriétaire final de l'ouvrage ou de l'équipement technique objet du marché.

Dans le cadre de la délégation de la mission de maîtrise d'ouvrage et dans la limite du programme et de l'enveloppe financière qu'il a arrêtée conformément à sa mission, le maître d'ouvrage peut déléguer les attributions suivantes :

- la définition des conditions administratives et techniques de réalisation de l'ouvrage ou de l'étude ;

- la gestion de l'opération au plan administratif, financier et comptable ;

23 Article 1er du décret n°2008-374/PRES/PM/MEF du 02 Juillet 2008 portant règlementation de la maîtrise d'ouvrage publique déléguée au Burkina Faso.

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- la préparation des dossiers d'appel d'offres, la sélection, après mise en compétition du maître d'oeuvre, des entrepreneurs et des prestataires, l'établissement, la signature et la gestion de leurs contrats ;

- l'approbation des avant-projets ; l'accord sur le projet d'exécution des travaux ;

- le versement de la rémunération du maître d'oeuvre, des entrepreneurs et prestataires ;

- la réception et l'accomplissement de tous actes afférents aux attributions prévues ; - les actions en justice.

Le maître d'ouvrage peut toutefois se réserver l'exercice des attributions suivantes : - l'accord sur le projet d'exécution technique ;

- la sélection ou la non objection sur le choix du maître d'oeuvre et la signature du contrat de maître d'oeuvre ;

- la sélection ou la non objection sur le choix des entrepreneurs et prestataires ; - la réception de l'ouvrage ou l'approbation des études ;

- Il peut également déléguer ces attributions sans condition, ou encore les déléguer sous réserve de son accord ou de son approbation.

Le Maître d'ouvrage délégué est la personne morale de droit public ou de droit privé qui est le représentant du maître d'ouvrage dans l'exécution de ses missions et qui reçoit, à cet effet, mandat dans le cadre d'une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée.

Aux termes des dispositions de l'Article 2 du décret n°2008-374/PRES/PM/MEF du 02 Juillet 2008, le Maître d'Ouvrage dans le cadre de sa mission doit :

- s'assurer de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération ;

- déterminer la localisation, s'il s'agit d'un ouvrage ;

- définir et adopter le programme ;

- arrêter l'enveloppe financière prévisionnelle ;

- assurer le financement ;

- choisir le mode et le processus de réalisation conformément à la réglementation en vigueur.

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Lorsque le Maître d'Ouvrage est une personne morale de droit public (Etat, démembrements de l'Etat, Collectivités territoriales, sociétés, entreprises ou établissements publics...), on parle de maîtrise ou maître d'ouvrage publique délégué(e).

Le Maître d'oeuvre est la personne physique ou morale de droit public ou de droit privé chargée par le Maître d'Ouvrage ou le Maître d'ouvrage délégué, d'attributions attachées aux aspects architectural et technique de la réalisation d'un ouvrage de bâtiment ou d'infrastructure aux termes d'un contrat de maîtrise d'oeuvre ; la maîtrise d'oeuvre inclut des fonctions de conception et d'assistance au maître d'ouvrage ou au maître d'ouvrage délégué dans la passation, la direction de l'exécution des contrats de travaux, dans l'ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier, dans les opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement.

Cette activité est de pratique relativement récente en Afrique par rapport à l'Europe. En effet, elle est apparue pour la première fois au Sénégal avec AGETIP Sénégal en 1989.

En 2012, vingt (20)24 structures appartenant au réseau AFRICATIP interviennent dans différents pays d'Afrique sur le mandat de leurs Gouvernements et des partenaires techniques et financiers principalement comme maîtres d'ouvrage délégués, sous la forme associative, à l'exception du Bénin où deux structures avaient déjà opéré une mutation de leur forme juridique pour devenir des sociétés anonymes.

Au Burkina Faso, au-delà de certains démembrements de l'Etat jouant le rôle de bras technique pour la conduite de certains projets, la maîtrise d'ouvrage déléguée est pleinement apparue à la suite de la mise en oeuvre du Programme d'ajustement structurel (P.A.S) dans un contexte de réforme et de restructuration de l'économie nationale.

Ce secteur d'activité a été dominé principalement par une structure, créée sous l'impulsion de l'Etat et la Banque Mondiale, sous la forme d'association à but non lucratif à l'image de nombre de structures évoluant dans différents pays africains au sein du réseau AFRICATIP.

Mais, au regard du développement du secteur au Burkina Faso avec la création de structures aussi bien publiques que privées, le cadre réglementaire national initialement relatif aux marchés publics a été complété pour cerner ce domaine d'activité.

III.1.2/ Réglementation du secteur

Les perspectives de réglementation du secteur avaient déjà été évoquées à travers une étude. Ainsi, «En fait, les AGETIP demeurent des intervenants spécifiques continuant à mener les interventions à contenu social prononcé aux prestations de pur maître d'ouvrage délégué ou, maintenant, d'assistant à maître d'ouvrage. Par ailleurs, dans certains pays, la

24 Il s'agit (cf www.africatip.net) du Bénin (2), Burkina Faso (1), Burundi (1), Cap-Vert (1) Centrafrique (1), Djibouti (1), Gambie (1), Guinée (1), Guinée Bissau (1), Madagascar (1), Mali (2), Mauritanie (2), Niger (1), Sénégal (1), Togo (1), Rwanda (1) et la Côte d'Ivoire (1).

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concurrence est de règle- au moins théoriquement- et c'est une tendance qui très probablement se généralisera. Ces évolutions ne peuvent pas ne pas être sans conséquence sur le fonctionnement dérogatoire et les exonérations dont bénéficient les AGETIP « historiques »»25.

Ainsi, certains pays avaient connu une réglementation dans le sens de la mise en concurrence des AGETIP, conformément à un cadre communautaire de l'UEMOA en vigueur depuis 2005.

Un dispositif communautaire et national encadre les marchés publics de façon générale et l'activité de maîtrise d'ouvrage déléguée de façon spécifique au Burkina Faso. Il s'agit :

- de la directive n°04/2005/CM/UEMOA du 9/11/2005, portant procédures de passation, d'exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public dans l'UEMOA ;

- du décret n°2012-123/PRES/PM/MEF du 02 Mars 2012 modifiant le décret n°2008-173/PRES/PM/MEF du 19 Avril 2008 portant réglementation générale des marchés publics et des délégations de service public ;

- de décret n°2008-374/PRES/PM/MEF du 02 Juillet 2008 portant réglementation de la maîtrise d'ouvrage publique déléguée.

D'autres textes complètent ce dispositif règlementaire :

- l'arrêté conjoint n°2010-214/MEF/MHU du 09 juin 2010 portant conditions d'octroi et de retrait des agréments en matière de maîtrise d'ouvrage publique déléguée relative aux travaux de bâtiments (TB) ;

- l'arrêté conjoint n°2010-33/MEF/MAHRH du 15 juin 2010 portant conditions d'octroi et de retrait des agréments en matière de maîtrise d'ouvrage publique déléguée relative aux travaux d'hydraulique et travaux d'aménagement hydro agricoles (TH) ;

- l'arrêté conjoint n°2010-231/MEF/MID du 24 juin 2010 portant conditions d'octroi et de retrait des agréments en matière de maîtrise d'ouvrage publique déléguée relative aux travaux de routes et d'ouvrages d'art (TR) ;

- la circulaire n°2010-2129/MEF/SG/DGMP/DSMP du 12 août 2010 portant mise en oeuvre de la règlementation sur la maîtrise d'ouvrage publique déléguée.

Au Burkina Faso, du fait de certaines contraintes pour l'application effective décret n°2008-374/PRES/PM/MEF, les différentes organisations évoluant dans le secteur étaient sélectionnées par entente directe jusqu'à l'avènement de la circulaire ministérielle ci-dessus citée.

Il est rappelé dans cette circulaire que les conventions de maîtrise d'ouvrage déléguée qui établissent les bases contractuelles entre le Maître d'ouvrage et le Maître d'ouvrage délégué

25 Diou, Henry et Deme (2007), La délégation de maîtrise d'ouvrage déléguée en Afrique en 2007 : Bilan, enjeux et perspectives, PPIAF-AFRICATIP.

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sont des prestations intellectuelles et, comme telles, soumises aux procédures de sélection prévues par les textes en la matière.

Il en résulte que les maîtres d'ouvrage publics délégués devront être retenus à l'issue d'un appel à la concurrence auquel ne prendront part que les personnes morales de droit public ou de droit privé disposant d'un agrément administratif délivré par arrêté conjoint du ministre chargé du Budget et du ministre technique compétent, après avis favorable d'une commission technique composée de l'Administration et du secteur privé.

Selon les termes de l'article 13 du décret n°2008-374/PRES/PM/MEF, les activités de maîtrise d'ouvrage déléguée sont réservées :

- aux personnes morales de droit privé, sociétés, en fonction des conditions et modalités déterminées par l'agrément dont elles bénéficient et dont la maîtrise d'ouvrage déléguée entre dans l'objet social ;

- aux personnes morales de droit public, dans les limites fixées par les textes réglementaires et statutaires ;

- aux associations reconnues d'utilité publique.

Ainsi rappelé, le point de départ du processus de changement engagé au sein de l'organisation traitée est la réaffirmation par la circulaire ci-dessus citée de l'application pleine de la règlementation sur les marchés publics, notamment en ses dispositions relatives à la maîtrise d'ouvrage déléguée.

En réaction à cette volonté des autorités d'appliquer effectivement les dispositions réglementaires, une série d'études ont été engagées dans ce sens. Mais le processus de changement qui va s'entamer va-t-il aboutir aux résultats souhaités ? L'environnement tel qu'il se présente sous forme de contrainte offrira t-il toutefois des opportunités à ladite organisation ? Tels étaient quelques-uns de nos principaux questionnements.

La présentation du contexte organisationnel nous a permis de comprendre les motivations premières qui vont induire un changement organisationnel.

La première manifestation de ce changement sur l'organisation à but non lucratif est la création par cette dernière d'une société anonyme.

Aussi, il convient de préciser d'ores et déjà les dénominations suivantes :

- l'association Agence Faso Baara est la structure originelle. Cependant, depuis la création de la société anonyme, elle porte la dénomination de Association Faso Baara ;

- l'Agence Faso Baara S.A est la société anonyme créée par l'association Agence Faso Baara.

Ainsi donc, notre analyse va porter sur l'agence Faso Baara, dans sa configuration d'origine et sur la société anonyme Agence Faso Baara nouvellement créée. L'association Faso Baara étant restreinte à un volet purement social, cette entité ne fera pas l'objet d'une analyse

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particulière dans la mesure où la société a « vidé » de son contenu l'association en prenant en charge les activités économiques précédentes exécutées par l'association, celle-ci se recentrant sur ses missions sociales.

III.2/ Présentation du cas

Le cas sera présenté en fonction des deux étapes essentielles qui ont marqué son évolution juridique.

III.2.1/ De l'association Agence Faso Baara à la société Agence Faso Baara S.A III.2.1.1/ Les textes fondateurs et les modalités d'intervention

Dans sa configuration initiale, l'Agence Faso Baara était une association de droit privé à but non lucratif, spécialisée dans la maîtrise d'ouvrage déléguée de projets de construction de bâtiments et de travaux publics (BTP). Elle a été créée en juin 1991 pour l'exécution du Projet de Travaux d'Intérêt Public pour l'Emploi (TIPE) financé par l'Association Internationale de Développement (IDA, Groupe de la Banque Mondiale), l'Etat Burkinabè et la République Fédérale d'Allemagne (KfW).

En sa qualité d'association à but non lucratif, l'organisation de l'Agence s'inspire des textes ci-après :

- la loi n° 10/92/ADP du 15 décembre 1992, portant liberté d'association ;

- l'arrêté n° 91/151/MAT/SG/DELPAJ du 17 juillet 1991 portant reconnaissance de l'association Agence Faso Baara ;

- les statuts et le règlement intérieur de l'association Agence Faso Baara ;

- l'acte uniforme de l'OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE. L'Agence Faso Baara a exercé suivant quatre (4) principales modalités :

- la maîtrise d'ouvrage déléguée ;

- l'exécution de projet ou programme de développement ; - l'assistance aux maîtres d'ouvrage ;

- la conduite d'opérations.

Cependant, la modalité pilote demeure la maîtrise d'ouvrage déléguée.

L'Agence Faso Baara est une agence membre du réseau AFRICATIP (Association des Agences Africaines d'Exécution des Travaux d'Intérêt Public) créée le 21 janvier 1993 à Ouagadougou, pour promouvoir et faciliter les activités des Agences d'Exécution des Travaux d'Intérêts Publics (AGETIP) à travers le continent.

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III.2.1.2/ Organisation de l'Association Agence Faso Baara

La composition, les pouvoirs et le fonctionnement des organes principaux sont décrits dans les statuts et le règlement intérieur de l'Agence. Il ressort clairement de ces documents institutionnels que l'Agence ne peut être assimilée à un projet. L'Agence est une structure autonome à laquelle l'Etat confie l'exécution de projets publics. Les relations qui existent entre elle et les autorités de l'Etat sont fonctionnelles mais non de subordination.

Les organes de gestion de l'Agence comprennent l'Assemblée Générale des membres, le Président de l'Association, la Direction Générale, les services techniques et les Commissions spécialisées.

Tableau n°7 : Rôles, pouvoirs et composition des organes

Organe

Rôles et pouvoirs

Composition

L'Assemblée Générale

L'AG est l'organe d'approbation des actes de l'Agence. C'est l'organe suprême de

l'Agence. Elle qui définit les grandes

orientations des activités de l'Agence,
approuve le programme annuel d'activités de l'Agence, approuve le budget annuel et les états financiers annuels de l'Agence,

approuve le MPAFC et ses révisions
ultérieures. Ses décisions sont prises sous forme de résolutions.

Elle comprend un Président, cinq membres dont le Directeur Général de l'Agence Faso Baara et un observateur.

La Direction Générale

La Direction générale est l'organe de

gestion de l'Agence. Le DG est nommé par

l'Assemblée Générale (AG). Il reçoit ses
pouvoirs de l'AG. Il est responsable de la bonne marche de l'Agence tant sur le plan

technique que financier et administratif
vis-à-vis de l'AG, du Gouvernement et des PTF.

La Direction générale comprend : un DG, une Attachée de Direction, un Conseiller

Informatique, un Conseiller juridique
Spécialiste en passation des marchés, un

Archiviste et un Agent de liaison, un

Service Contrôle de Gestion et des
Statistiques (SCGS).

Le DG se fait assister par un Directeur

technique (DT) et un Directeur financier (DF)

Le Comité de

Direction

Le CD permet de faire le point des activités du mois écoulé ; il se réunit une fois par mois. Il est présidé par le DG.

Le comité de direction (CD) se compose du staff de l'Agence (DG, DT, DF, SCGS, CI, Chefs de projet, Chef comptable).

Le Comité

Technique

Il permet le suivi technique des projets ; il est présidé par le DG ou le DT.

Il regroupe le personnel de la DT et le service contrôle de gestion et statistiques

Le Comité

Administratif

Il permet de faire le point du déroulement des activités de la Direction Financière ; il est présidé par le DG ou le DF.

Il regroupe le personnel de la Direction Financière et le service contrôle de gestion et statistiques.

La Commission

d'Attribution

des Marchés

Elle a pour rôles de procéder à l'ouverture publique des offres ou des propositions de

travaux, de services de consultants et

Elle comprend le Directeur Général,

président de la commission, le Directeur

technique, rapporteur, le Directeur

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(CAM)

d'équipements, de désigner la

composition de la SCEO.

Financier, membre et le maître d'ouvrage, observateur.

La Sous

La SCEO a pour rôles principaux

Elle comprend deux membres au moins

Commission

de procéder à l'analyse et l'évaluation des

dont le président de la sous-commission et

d'Analyse et

offres et de rédiger un rapport d'analyse et

un Chef de Projet, rapporteur. Elle peut

d'Evaluation

d'évaluation des offres qui fait des

éventuellement s'adjoindre un ou plusieurs

des Offres

propositions d'attribution de marchés

ACP, le maître d'oeuvre du projet concerné,

(SCEO)

soumises à la CAM.

observateur et un représentant du Maître d'ouvrage, du service technique compétent ou bénéficiaire, observateur.

Source : Manuel de procédures techniques de l'Agence Faso Baara

Cette configuration a caractérisé l'Agence Faso Baara jusqu'à la création de la société anonyme.

III.2.1.3/ La création de l'Agence Faso Baara S.A

Le changement majeur de l'association à la suite des études a été la création de l'Agence Faso Baara S.A par l'association Faso Baara sous forme de société de capitaux. La première étude avait proposé cette forme mais sans éléments assez convaincants aux yeux des membres de l'association. C'est ainsi qu'une seconde étude a été réalisée aux fins d'approfondissement en mettant en exergue les éléments justifiant le choix retenu.

Ainsi, sur le plan juridique, deux entités juridiques existent désormais : l'Association Faso Baara et l'Agence Faso Baara S.A.

L'Association Faso Baara a vu ses nouveaux statuts et règlements intérieurs adoptés par l'autorité compétente. Elle se voit « amputée » de son bras technique comprenant la Direction générale et l'ensemble des services. Elle se cantonne ainsi à la réalisation d'activités à caractère social.

Les nouveaux membres de l'association sont définis comme suit :

- la chambre de commerce et d'industrie du Burkina Faso (CCI-BF) représentée par son

Président ;

- l'association des municipalités du Burkina Faso (AMBF) représentée par son Président ;

- le secrétariat permanent des organisations non gouvernementales représenté par son

Président du conseil d'administration ;

- le syndicat national des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics ;

- le Directeur Général de l'Agence Faso Baara S.A.

La Présidence du Faso est présente en qualité d'observateur.

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L'Agence Faso Baara S.A, elle a été immatriculée au registre du commerce et du crédit mobilier, le 15 novembre 2011 et le 17 novembre 2011 à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Elle se voit dévolue l'exécution des activités de maîtrise d'ouvrage déléguée. Des demandes d'agrément pour l'exercice de l'activité de maîtrise d'ouvrage déléguée ont été introduites en décembre 2011 et agréées en mai 2012.

Sur le plan organisationnel général, l'effet immédiat de la mutation juridique est le transfert de l'activité économique et par conséquent de toute la capacité technique (moyens humains, matériels et financiers) d'exécution de l'activité de maîtrise d'ouvrage déléguée de l'association à la société.

Le Directeur Général de l'association Faso Baara a été nommé par le conseil d'administration comme Directeur Général de l'Agence Faso Baara S.A.

Le contrat qui liait chaque employé à l'association a été résilié au 31 décembre 2011. Tout le personnel de l'ancienne structure a conservé son poste dans la nouvelle société à travers de nouveaux contrats à durée d'une année comptant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, et cela dans les mêmes conditions que les contrats initiaux.

Ce personnel devra être maintenu intégralement dans les mêmes postes au-delà du 31 décembre 2012, sous une des deux formes contractuelles (contrat à durée déterminée ou indéterminée) qui sera arrêtée par le conseil d'administration de l'Agence en sa session prévue le 21 décembre 2012.

Les principaux textes (statuts, règlement intérieur, manuels de procédures...) de la nouvelle structure sont en cours d'élaboration.

A l'issue de cet aperçu sur l'évolution de la structure, les principaux résultats sont présentés et analysés ci-après.

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IV/ RESULTATS

Les différentes dimensions ci-dessous évoquées seront analysées essentiellement à travers d'une part une revue des documents techniques, des rapports d'études, des comptes rendus de réunions et d'autre part les entretiens et observations effectuées pour prendre en compte les points de vue des acteurs.

IV.1/ Le contexte du changement : identifier les conditions déterminantes IV.1.1/ La complexité du changement

Certains changements sont marqués par une complexité exceptionnelle. C'est le cas du changement opéré dans de grandes organisations comme France télécoms. Des dimensions très complexes peuvent être affectées par le changement. Comme indiqué par Michel Bon, Président directeur général de cette entreprise, dans la préface de l'ouvrage de Harvard Business Review consacré au changement26, « Et il est vrai que France Télécom vit simultanément plusieurs changements : changement d'univers, de l'administration des PTT à celle de l'entreprise ; transfert de pouvoir, de la tutelle ministérielle à celle des actionnaires ; mutation de la téléphonie vocale classique vers les mobiles, les données et internet ; passage enfin du monopole à la concurrence. Un seul de ces changements justifierait à la fois la lecture de cet ouvrage et la mobilisation de toute l'énergie de l'entreprise ! »

De plus, la complexité tient à la taille de l'entreprise. Daniel Duck (2000)27 le disait si bien : « Le changement tient avant tout aux individus. Pour qu'il s'instaure dans une entreprise, il faut que chacun pense et agisse en conséquence. Il en est de même dans les grands groupes où il faut convaincre des milliers de salariés. Et l'on attend parfois de 25.000 personnes qu'elles franchissent au point voulu, au moment voulu. Qui s'étonnera dès lors que le changement soit une tâche aussi pénible que décevante.»

Plusieurs facteurs peuvent traduire la plus ou moins grande complexité d'un projet de changement : son historique, son environnement, le type de marché, la technologie utilisée, etc.

L'organisation étudiée évoluant dans ce secteur a une vingtaine d'années d'expérience, donc sur un terrain bien connu. Elle dispose à l'instar des agences de maîtrise d'ouvrage déléguée du réseau AFRICATIP d'une structuration souple avec un personnel qui n'a jamais excédé un effectif de quarannte personnes depuis sa création. Par conséquent, au regard de ce qui

26 Harvard Business Review, Le changement, Editions d'Organisations, 2000.

27 Jeanie Daniel Duck, Gérer le changement : l'art de l'équilibre, Harvard Business Review, Le changement, Editions d'Organisations, 2000.

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précède et des objectifs visés, on peut dire que le phénomène étudié n'est pas particulièrement complexe. Pour autant, cela n'en fait pas un cas dépourvu de pertinence.

IV.1.2/ La légitimité du changement

Le succès d'une transformation est fortement conditionné à sa légitimité. La légitimité du changement sera appréciée à travers les principales variables suivantes : l'origine de la transformation, son objet, sa pertinence, la spécificité de l'organisation, la perception de la vision des responsables et de celle des autorités.

IV.1.2.1/ L'origine de la transformation

L'origine de la transformation est parfaitement comprise par les principaux acteurs. En effet, la plupart sinon la totalité des agents interrogés ont pu expliquer le bien fondé de la transformation. Ainsi, de l'avis d'un agent de la Direction Financière, il ressort ce qui suit :

Interview n° 1 :

« C'est à partir du décret 2008, dans le cadre de l'ouverture à la concurrence sur la maîtrise d'ouvrage déléguée, un décret du Ministère des Finances est venu rappeler à l'Agence Faso Baara de se conformer aux textes. Faso Baara, en tant que entité associative ne peut pas concurrencer les sociétés privées. Il fallait que Faso Baara adapte son statut à la nouvelle réglementation. C'est dans ce cadre que depuis 2010, Faso Baara s'est lancée dans ce processus... »

Pour un agent de la Direction Technique :

Interview n° 3 :

« C'est la réglementation, le contexte macro, c'est un problème qui dépasse l'Agence. Il est aussi dicté par les directives de l'UEMOA... »

Un autre agent interviewé s'exprime comme suit :

Interview n° 5 :

« Depuis 2008, le gouvernement burkinabé a pris la décision d'ouvrir le secteur de la maîtrise d'ouvrage déléguée à la concurrence pour permettre au privé de pouvoir compétir, de même que ça ne fait qu'une ouverture sur le marché de l'emploi. *...+ Ils ont estimé que Faso Baara ne pouvait pas faire face à elle seule à la demande, ne pouvait pas absorber à elle seule l'ensemble des travaux. L'Agence depuis des années était restée sans concurrent. Il fallait aussi permettre à d'autres acteurs de pouvoir s'affirmer... »

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Un acteur externe à l'Agence justifie la réglementation d'un point de vue institutionnelle :

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Interview n° 14 :

« C'est la nécessité de la célérité des dossiers, l'absorption efficace des crédits et des ressources mises à disposition par les partenaires techniques et financiers, le principe de mise en concurrence ... »

Il ressort donc que la transformation se justifie par la nécessité d'adapter le régime juridique de l'Agence Faso Baara non seulement aux modalités prévues par la réglementation mais aussi à celles qui permettent une pleine participation à la concurrence. Elle répond à un souci de se conformer à la réglementation locale qui elle-même découle d'un souci d'harmoniser les procédures générales de passation des marchés au niveau communautaire (pays appartenant à l'UEMOA).

IV.1.2.2/ L'objet du changement

Les termes de références de la première étude consacrée au changement étaient intitulés comme suit : «Etude institutionnelle pour déterminer la forme juridique la mieux adaptée pour l'Agence Faso Baara dans le contexte du nouveau cadre réglementaire et de l'évolution future de l'Agence ».

A travers ce titre, on perçoit que l'objectif premier consistait à trouver une forme juridique « la mieux adaptée » à cette organisation. Cependant, la prise en compte des perspectives « d'évolution future » nécessite une approche globalisante de réforme organisationnelle. En effet, il est question d'un contexte marqué par l'application de mesures devant promouvoir la libre concurrence entre des entreprises évoluant dans un secteur donné. Il ressort ainsi que des considérations économiques justifient ces mesures comme indiqué dans les objectifs globaux de l'étude : « fournir à l'Agence Faso Baara les éléments nécessaires pour fonder le choix d'un nouveau statut juridique permettant à l'Agence de s'adapter au changement de son environnement aussi bien règlementaire qu'économique ».

Aussi, si l'objet du changement ou les dimensions touchées par le changement sont clairement perçu en ce qui concerne l'aspect juridique, ils sont nombreux les agents qui estiment que le changement ne saurait se limiter aux seuls aspects juridiques. Une transformation globale s'avère nécessaire, par une remise en cause de l'organisation, des méthodes de travail, des mentalités, etc. afin de relever de nouveaux défis. Quelques illustrations de ces éléments sont :

Interview n° 4 :

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« Le changement est juridique dans un premier temps, mais dans un deuxième temps, ça doit concerner les hommes qui vont animer la structure ; nous en tant que personnel, il faut un changement de comportement, un changement de méthode [...] et aussi pour la direction, il faut changer de stratégie, la manière de gérer quotidiennement les opérations, si nous voulons rester effectivement compétitifs ...»

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Interview n° 2 :

« Il y a l'aspect social que ça touchera, en l'occurrence le personnel. Est-ce que cela ne va pas entraîner une compression du personnel, des licenciements ? Il y a aussi l'aspect financier, la mise en oeuvre des actions pour engendrer des ressources pour le bon fonctionnement, la bonne rentabilité de l'activité en question. »

Interview n° 3 :

« Son mode de fonctionnement doit changer. Le personnel forcément doit changer. La manière d'intervenir, de faire les choses doit changer. On n'est qu'à une étape. Il s'agissait essentiellement d'avoir un statut d'abord. On est en train de dépasser cette phase. Ce n'est qu'un processus. »

La plupart des agents questionnés font ressortir des aspects essentiels. Il s'agit de la distinction de deux phases essentielles dont la première correspond à la transformation juridique et la seconde qui devrait porter sur d'autres dimensions du changement telles que l'aspect social, le comportement, les méthodes de travail, la stratégie, le mode de fonctionnement. On note cependant qu'un accent particulier a été mis sur la première phase et elle constitue le passage obligé à la seconde phase.

IV.1.2.3/ La pertinence de la transformation

Au regard entre autres des objectifs annoncés, de l'environnement et des ambitions d'expansion de l'Agence, la pertinence de la transformation a été relevée par la plupart des acteurs interrogés comme suit :

Interview n° 1 :

« Il fallait forcément le faire. Sans cette transformation, on ne peut pas aller à la concurrence avec les sociétés privées. C'est un décret, il faut forcément s'adapter au décret. C'est en fait économique, puisque nous sommes embarqués dans l'UEMOA, donc dans une intégration sous-régionale, à la CEDEAO ; alors tous ces pays veulent harmoniser et veulent avoir les mêmes pratiques, si bien que si on parle de libre circulation des personnes et des biens, que dans tous ces pays, on puisse intervenir. »

Interview n°7 :

« C'est le contexte qui l'oblige. Je pense qu'elle (la transformation) est pertinente ; est-ce que en tant qu'association, on pouvait effectivement subsister ou exister ? Je crois que non. La période tampon que nous avons mis pour changer, c'est-à-dire en 2011 et 2012, nous avons perdu beaucoup de conventions parce que nous avions un statut d'association ; en réalité, en tant qu'association, les marges de manoeuvre sont limitées. »

Ainsi, il ressort qu'il fallait obligatoirement entamer cette transformation afin de s'adapter au contexte externe. La forme associative bien que prévue par la réglementation ne permet pas une perspective de pleine activité ni de développement, de diversification et d'expansion.

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IV.1.2.4/ La spécificité de l'organisation - Le statut associatif

Une des caractéristiques essentielles de ce changement est la nature première de la structure transformée. Les expériences de transformation de structure à but non lucratif ne sont pas nombreuses. Cependant, dans le domaine de la maîtrise d'ouvrage déléguée (MOD) et au sein du réseau AFRICATIP, une structure du Bénin avait été la première à engager ce processus.

C'est ainsi que dans le cadre de la première étude, il ressortait des termes de références (TDR) que « le Consultant étudiera des cas similaires de changement de statut d'agences dans la sous-région (notamment au Bénin), et proposera des solutions adaptées au cas spécifique de FASO BAARA ».

Dans l'architecture juridique actuelle, les associations et ONG ne sont pas écartées du domaine d'activité de la MOD. Il y aura pour ainsi dire des segments en fonction des statuts juridiques des différents intervenants. En effet, le décret 2008 indique en son article 13 que « ... les activités de maîtrise d'ouvrage déléguée sont réservées :

- aux personnes morales de droit privé, sociétés, en fonction des conditions et modalités déterminées par l'agrément dont elles bénéficient et dont la maîtrise d'ouvrage déléguée entre dans l'objet social ;

- aux personnes morales de droit public, dans les limites fixées par les textes réglementaires et statutaires ;

- aux associations reconnues d'utilité publique ».

Faso Baara avait un statut d'association mais non celui d'association reconnue d'utilité publique, puisque cette dernière forme nécessite des formalités spécifiques. Même si cette étape était franchie, il faut noter que la part de marché réservée aux associations et ONG serait logiquement faible puisque requise de façon exceptionnelle, dans la mesure où le principe de sollicitation des maîtres d'ouvrage délégués demeure la mise en concurrence de ceux-ci, comme indiqué dans le décret précité.

De plus, il ne peut être envisagé qu'une association même d'utilité publique comme indiquée dans le décret puisse participer à la concurrence à côté des sociétés anonymes. La raison est qu'elles ne sont pas soumises aux mêmes obligations, fiscales par exemple par le fait des nombreuses exonérations accordées aux associations, ce qui créerait un problème d'égalité de traitement de ces formes d'organisations. D'ailleurs, les dispositions des alinéas 2 et 3 de l'article 17 du dudit décret excluent les associations de la prise de participation à la compétition suite à un appel d'offre ouvert.

L'Agence Faso Baara était une association qui menait une activité économique avec des moyens techniques donnés. Elle bénéficiait de la part de l'Etat et de certains partenaires de

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contrats d'activités ou conventions. De par son statut d'association, elle bénéficiait de certains privilèges et avantages fiscaux ; tout ceci faisant que la structure se plaçait dans une position stable. La transformation imposée par la réglementation est perçue alors comme une contrainte et la structure doit faire preuve d'innovation pour garder sa position de leader ou à tout le moins prospérer.

- Le niveau d'inertie de l'organisation

A partir du modèle de Rondeau, il s'agit d'apprécier la capacité de l'entreprise à intégrer les forces de son environnement tout en préservant ses forces propres qui constituent un atout. L'analyse de la structure organisationnelle fait apparaître que cette préoccupation a été prise en compte.

En effet, l'Agence Faso a toujours été « une structure souple et légère » et donc flexible. Elle se compose d'une direction générale et de deux autres directions, à savoir une direction technique et une direction financière. L'organigramme présente une structure hiérarchico-fonctionnelle assez simplifiée. L'exécution technique des projets est menée par des chefs de projets. Des procédures sont mises en oeuvre et encadrées par un manuel de procédures administratives, financières et comptables, un manuel de procédures techniques et des règles et codes déontologiques définies dans les statuts et règlement intérieur. Ces procédures également sont assez souples pour permettre une célérité et une efficacité dans l'exécution des projets confiés par les maîtres d'ouvrage. Cela est conforme aux prédictions de Mintzberg qui présente ce type d'organisation comme très flexible et réactif.

Il est vrai que la structure n'a pas une expérience antérieure dans la mise en oeuvre de changement significatif ou majeur. Le projet qui aurait eu un impact déterminant sur la structure était la mise en oeuvre de la démarche qualité en vue de la certification. Ce projet, inscrit aux budgets de l'Agence en ses exercices 2011 et 2012, a été pratiquement mis en veille avec l'entame de la transformation institutionnelle et juridique qui a semblé focaliser l'ensemble des énergies.

En somme, bien qu'elle n'ait pas eu d'expérience précédente dans la mise en oeuvre de changement majeur, et qu'elle soit restée dans une position stable de quasi monopole durant de nombreuses années, l'Agence Faso Baara S.A ne présente pas des « boulets » quelconques qui l'empêcheraient de tirer un meilleur profit du nouvel environnement juridique et économique.

- Les ressources

L'étude de la situation du personnel faite dans le premier rapport a abouti à la conclusion que les moyens matériels, techniques, financiers et humains sont adéquats avec les exigences de la réglementation.

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En effet, en ce qui concerne les compétences et l'effectif requis, les conditions sont remplies par l'Agence pour lui permettre d'obtenir les agréments techniques dans les catégories 2 des secteurs d'activité. L'Agence a effectivement obtenu ces agréments, certes avec beaucoup de retard, ce qui a eu pour conséquence la non participation à certaines manifestations d'intérêt lancées par des maîtres d'ouvrages au cours du dernier trimestre de 2011 et au début de 2012.

La même étude dans le cadre de l'analyse des moyens matériels fait ressortir que « Pour ce qui concerne le matériel, les équipements de l'Agence sont au-delà des exigences réglementaires ».

Les ressources financières ne sont pas en défaut. L'Agence dispose de moyens financiers adéquats pour mener à bien ce processus de transformation. En effet, dans un premier temps, en prévision des études à réaliser, la résolution n°1/2011 adoptée par la 34ème Assemblée Générale28, une « réserve pour assistance technique dans le cadre de la transformation de l'Agence » a été constituée. Les deux principales études ont été réalisées grâce à ces ressources prises en compte dans le budget 2011.

La société a été créée avec un capital initial de 500.000.000 FCFA souscrit et entièrement libéré par l'association. De plus, les principales décisions financières relatives au processus de transformation sont consacrées par la 15ème Assemblée Générale Extraordinaire tenue le 23 mai 2012 à travers les résolutions suivantes :

- le paiement d'un loyer mensuel par la société à l'association ;

- la cession à titre onéreux à Faso Baara S.A de certains biens meubles ;

- la cessation des contrats de travail liant l'ensemble du personnel à l'Agence Faso Baara ;

- le paiement au personnel des droits et indemnités correspondants ;

- le paiement au personnel d'une allocation pour services rendus.

Ainsi, l'entité dispose des moyens humains, financiers et matériels indispensables à la réussite d'un changement majeur.

IV.1.2.5/ L'encadrement de la réglementation

Une des variables de cette étude consiste à déterminer la perception des acteurs sur la mise en oeuvre efficace de cette réglementation et par conséquent de son encadrement.

28 Assemblée Générale Ordinaire du 07 octobre 2011 portant affectation du résultat au 31 décembre 2011.

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La conviction qui se dégage en rapport avec la poursuite des objectifs de la réglementation par les autorités est que le processus étant lancé, il devrait pouvoir être mis en oeuvre, dans la mesure où il s'agit d'objectifs partagés par un certain nombre de pays dans le cadre d'une convergence de leurs politiques. Ceci est illustré comme suit :

Interview n°5 :

« Je me dis que c'est irréversible. Tout changement prend du temps ; pour que ça prenne forme, il faut que ça aille doucement. La tendance est que l'Etat lui-même a créé des sociétés dans ce domaine là. Est-ce à dire qu'il n'a pas confiance aux structures privées qui sont mises en place. C'est sûr que l'Etat va continuer à faire du gré à gré avec elles. Mais on ose espérer que ce qui est compétitif va renter dans le domaine de la compétition, au regard de la concurrence... »

Cependant, des critiques et suggestions sont formulées à l'égard du système mis en place :

Interview n° 1 :

« Nos politiques font des discours, mais à la longue, ils ne mettent pas en oeuvre ces discours ; parce que l'ouverture à la concurrence est dictée par cette vision de l'intégration dans la sous-région *...] Parce que si l'on crée une émulation par la concurrence, c'est pour rendre les sociétés compétitives. Alors laisser quelques petites entreprises s'installer, qui vont avoir une courte durée de vie, c'est en réalité nous enfoncer dans un problème drastique dans les jours à venir. »

Interview n°8 :

« Le principe de la concurrence est bon. Mais en réalité, il y a des garde-fous qu'il fallait développer à l'intérieur. C'est-à-dire en créant cette loi. Nous, on a parcouru cette loi-là. Aujourd'hui, tout le monde peut faire ce métier *...] Les garde fous nécessaires n'ont pas été définis. La pratique de ce métier a des risques. Nouvellement, il y a ce qu'on appelle les ERP, c'est-à-dire des Equipements recevant du public, les grands bâtiments. Il y a un certain nombre de principes qu'il faut respecter pour exécuter ces travaux. Il n'est pas donner à n'importe qui de venir comme ça avoir des conventions et disparaître. C'est vrai qu'il y a les cautions mais les cautions sont des actes bancaires que n'importe qui peut avoir. Donc il ya un certain nombre de garde-fous qu'il faut retravailler pour que le métier ne soit pas laissé au hasard. »

Ainsi, des inquiétudes sont perçues en ce que, sentant la bonne affaire, des détenteurs de capitaux ne soient tentés juste par le souci de les fructifier alors qu'il s'agit d'un domaine où la responsabilité sociale des entreprises devrait être forte.

Il ressort en conclusion que la transformation entamée par l'Agence Faso Baara est légitime, car justifiée, nécessaire, comprise, pertinente et entamé à un moment opportun. Cependant, les responsables n'ont pas communiqué à temps leur vision du processus, ce qui a crée des incompréhensions.

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La réglementation intervenue vient établir la légalité d'une activité qui a évolué sans un cadre juridique approprié. Elle permet également son institutionnalisation avec la définition des acteurs et leurs rôles, leur responsabilisation dans la chaîne des marchés publics.

Le dispositif réglementaire ainsi défini devrait pouvoir être appliqué ; cependant, il faudrait qu'il soit encadré efficacement par l'autorité publique pour ne pas qu'il y ait une perturbation par le fait de sociétés non fiables.

IV.2/ Les acteurs du changement : enjeux et rôles déterminants IV.2.1/ Les enjeux perçus par les acteurs

Il est difficile de définir tous les enjeux du projet de changement. En effet, il apparaît que l'environnement sera bouleversé pendant un certain temps de la mise en oeuvre de la réglementation, ce qui aurait pour conséquence la non participation de l'Agence à certaines manifestations d'intérêt du fait du processus de mutation juridique. Il n'empêche qu'un des enjeux importants est le maintien du rang de leader.

Interview n° 2 :

« L'enjeu principal pour l'Agence, c'est de pouvoir maintenir sa position de leadership. Vingt ans d'activité, ce n'est pas rien. C'est sûr que c'est harassant, mais c'est une lutte perpétuelle. Un leadership n'est jamais acquis définitivement. Nous avons les ressources. C'est un dilemme pour tout dirigeant. C'est sûr qu'il y aura une période tampon, comment maintenir ses ressources et ses compétences ? Les ressources humaines sont des enjeux très très importants. »

La perspective prévisible de baisse à court terme de l'activité pendant un certain temps peut-elle amener l'Agence à procéder à une réduction de postes de travail ou du personnel et des avantages auparavant servis au personnel ? Telle semble être une des préoccupations fortes du personnel.

Interview n° 3 :

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« Mettre l'accent sur le personnel. C'est l'élément clé. Le personnel a ses inquiétudes...Dans la mesure du possible, maintenir tout le personnel. Mais si le changement impose la compression, il faut le faire. Parce qu'on était pléthorique à un moment parce qu'on avait le monopole. On avait pas mal d'activités. Maintenant il faut couvrir d'énormes charges. »

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Interview n°4 :

« Parlant d'enjeu, tout dépend du volume d'activité. Si le volume d'activité augmente, nécessairement ça va créer de l'emploi ; mais si ça baisse, bon mais la baisse n'implique pas forcément une réduction d'emploi. On peut proposer de réduire les salaires pour pouvoir conserver le personnel... »

Un acteur externe s'exprime comme suit :

Interview n° 15 :

« Le premier enjeu est l'application saine de la concurrence. Ici, nous sommes dans le domaine des marchés publics où la corruption règne. C'est ça qui peut tuer la compétence... »

La plupart des avis sur les enjeux convergeaient au maintien de la position de leader, au maintien du volume des travaux à réaliser et à la conservation des emplois et avantages servis au personnel mais aussi sur le plan institutionnel à l'application rigoureuse des textes pour éviter des situations favorables à la corruption.

Relativement aux emplois, quelques-uns ont estimé qu'une concession pourrait être faite dans le sens de la réduction des avantages plutôt que de réduire le personnel, au cas où une baisse des activités s'observait sur une durée assez prolongée.

IV.2.2/ La participation des acteurs

La participation des agents est constatée mais la plupart des agents estiment n'avoir pas été suffisamment impliqué dans le processus comme l'attestent ces témoignages :

Interview n°7 :

« Pour moi, chacun doit s'impliquer et donner le meilleur de lui-même pour que ça marche *...+ Je veux que tout le monde s'implique. Maintenant comment ? Peut-être que les premiers responsables doivent créer un environnement favorable. »

Interview n° 9 :

« Ma voix personnelle n'a pas été entendue. Mais, à chaque fois, le personnel s'est vu, a eu des échanges et est arrivé à un consensus. Ce n'est qu'à ce niveau qu'on a participé. »

La participation des acteurs a aussi été analysée à travers l'exploitation des comptes rendus de réunion et les échanges de courriers.

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Une des recommandations fortes formulées suite à la rencontre entre une délégation des administrateurs comprenant le président de l'association et le Directeur Général et l'ensemble du personnel a porté sur la nécessité d'un « engagement fort en vue d'une plus grande productivité et de meilleures performances sur tous les plans ».29

L'objectif de cette rencontre consistait à échanger avec l'ensemble du personnel sur le processus de transformation juridique de l'Agence Faso Baara en vue de :

- recueillir les préoccupations du personnel ;

- apporter des réponses à ces préoccupations ;

- dissiper les inquiétudes éventuelles quant à ce processus qui ne saurait se faire au détriment du personnel.

La 34ème Assemblée Générale du 07 octobre 2011 a également consacré la création d'un Comité de pilotage dans le cadre du changement juridique de l'Agence.

Cependant, la mission de ce comité s'est focalisée à la gestion du transfert des biens de l'association à la société et à la gestion des modalités du transfert du personnel de l'association à la société anonyme.

Du côté du personnel, de nombreuses assemblées générales ont été convoquées pour échanger sur des points de préoccupations. Des divergences énormes existaient au début du processus en ce qui concerne spécifiquement la gestion du personnel. Le personnel a toujours manifesté son soutien à la réussite du processus. Seulement, son souhait est la prise en compte de ses principales préoccupations.

Un des acteurs essentiels du contexte interne demeure la mutuelle des travailleurs de l'Agence. En effet, une telle entité pourrait être l'interlocutrice auprès du conseil d'administration de la société pour la défense des intérêts moraux et financiers de ses membres. La mutuelle a été mise en place par le personnel, par assemblée générale constitutive le 13 mars 2012.

Un des objectifs les plus importants de la Mutuelle est la participation à l'administration de la société. En effet, à travers cette représentation, la voix du personnel sera entendue et défendue et mieux, la mutuelle devrait pouvoir être actionnaire de la société. Le principe a été accepté par les membres de l'association Faso Baara, mais cela nécessitait des réflexions approfondies. Pour ce faire, pour trouver une réponse globale à cette question, une étude a été commise à l'effet de permettre l'ouverture du capital de la nouvelle société à d'autres acteurs stratégiques.

Le rapport provisoire de cette étude a été livré et présenté au conseil d'administration en sa séance du 21 décembre 2012. Il a été validé sous réserve des approfondissements à faire.

29 Cf Compte rendu de la rencontre du 20 janvier 2012.

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Le rapport de la seconde étude avait déjà évoqué l'absence des velléités de résistance au changement ou à la transformation institutionnelle envisagée et qu'au contraire, il est noté une bonne connaissance des raisons motivant le changement à venir et une adhésion à cette perspective.

Globalement, on peut dire que les principaux groupes concernés ont été suffisamment mis en branle pour aboutir à des solutions consensuelles.

Les agents ont été amenés à se réunir pour prendre des décisions, donner des points de vue sur certains aspects. Cependant, la prise en compte du personnel dans le processus a été décriée en ce sens qu'il est reproché aux responsables de n'avoir pas impliqué suffisamment le personnel.

IV.2.3/ La perception de la vision des responsables de l'organisation

Un grief essentiel formulé par la majorité des répondants à l'encontre des responsables est l'absence de planification ou de vision de ce processus, en ce sens que beaucoup d'éléments semblent échapper aux responsables :

Interview n°1 :

« Pour ma part, je pense que avant même cette transformation, il fallait organiser un atelier, expliquer tous les enjeux, c'est-à-dire tout le processus du début jusqu'à la fin. Ça allait donner des idées aussi claires aux responsables, quand bien même ils ont une idée vague de la transformation, parce qu'ils ne connaissaient pas jusqu'à présent toutes les implications de la transformation...»

Interview n° 5 :

« ... il faudra qu'une vision claire soit définie, communiquée et que ça soit peut-être comme une feuille de route, du moins figée pour un certain nombre d'années que tout le monde est obligé de respecter ; on n'a pas encore défini ça ».

Cette insuffisance a été constatée malgré les prémices de stratégie proposée par les consultants dans le cadre de la seconde étude30. En effet, afin de maîtriser les principaux risques liés au projet de transformation, formulés notamment en termes de résistance au changement de la part des salariés et de certains dirigeants, mais aussi à la mauvaise interprétation du processus par les clients et partenaires de l'Agence, il avait été préconisé :

- de partager une vision stratégique grâce à un management efficace ; - de mettre en oeuvre une démarche participative ;

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30 Rapport d'étude du Cabinet Dembs associates SARL, Septembre 2011

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- d'impliquer et responsabiliser le personnel ;

- de définir des objectifs à court terme ;

- de mettre en place un système de communication efficace pour informer les différents acteurs et l'opinion publique de la vie de l'organisation pour éviter des réticences au niveau des clients.

Cependant, le diner-débat organisé par la mutuelle qui a inscrit à l'ordre du jour, outre d'autres points, la communication de la vision du Directeur Général a offert l'occasion de donner des indications à court et moyen terme. Cette vision se résume aux perspectives meilleures pour 2013, aux projets en cours de négociation avec certains partenaires stratégiques, à la participation du personnel à l'actionnariat, à l'exercice d'autres activités à côté de la MOD, au développement des activités au-delà des frontières nationales.

Ce diner-débat a eu le mérite de dissiper les inquiétudes et de motiver davantage le personnel. IV.2.3/ Le style et la stratégie mis en oeuvre

Il s'agissait de voir à travers cette variable dans quelle mesure le style du dirigeant et la stratégie adoptée peuvent faciliter la réussite du changement ou au contraire créer des incompréhensions, voire engendrer des blocages.

Interview n°5 :

« D'une part, ça a été imposé. Les dirigeants aussi n'avaient pas le choix. Ça leur a été imposé aussi. Mais, il y a eu quand même de la négociation, des échanges. »

Interview n° 8 :

« L'expérience que j'ai de la transformation de structure, c'est que ça ne peut marcher que dans le cadre d'un dialogue. Moi en tout cas, si j'ai l'occasion, je demanderai au DG de mettre en place un comité de réflexion. »

Il est noté que les décisions étaient prises à d'autres niveaux et communiquées aux acteurs. Cela rejoint le défaut d'implication véritable du personnel dans les réflexions stratégiques.

Vis-à-vis des partenaires, une absence de collaboration franche a été décriée.

Interview n° 1 :

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« L'ouverture à la concurrence est une bonne chose. Maintenant, le processus qui conduit à la transformation a été biaisé. Il fallait au départ un atelier. Expliquer toutes les implications. Qu'est-ce qu'on gagne. Sensibiliser les acteurs. On allait aller plus vite et vraiment, il allait y avoir une participation large de tous les acteurs. On a voulu aller vite en escamotant les différentes étapes et voilà les résultats. »

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Interview n°10 :

« Il aurait fallu engager des concertations franches avec le ministère de l'économie. Ils ont écrit pour faire des propositions aux responsables. C'est comme s'ils ne reconnaissent pas le statut actuel. Ils ont même noté que l'Etat a contribué à faire de l'Agence ce qu'elle est aujourd'hui. *...+ Des négociations devaient être immédiatement entamées avec le ministère pour éviter des redressements fiscaux. »

Aucune action coercitive véritable n'est menée par le dirigeant à l'endroit du personnel comme le montrent les témoignages suivants :

Interview n°4 :

« Dans notre cas, je ne pense pas qu'il y ait eu des influences ; tout se passe bien. Je ne sens pas cette divergence. »

Interview n°6 :

« ...au jour d'aujourd'hui, je ne pense pas qu'il y a des menaces. On sent ça, on voit ça. Mais légalement, ce n'est pas possible. Il faut que le processus soit terminé. »

Le processus se mène sans influence ou menace à l'endroit des acteurs. Cependant, la méthode employée par les dirigeants est beaucoup contestée.

Pour la plupart des agents, la meilleure stratégie aurait été une meilleure considération du personnel pour lui permettre d'avoir une participation plus active et pertinente au processus comme l'illustrent ces points de vue ci-dessous :

Interview n°4 :

« Instaurer des séances de rencontres pour rapprocher le personnel. »

Interview n°11 :

« Il faut revenir en arrière, s'asseoir avec le personnel, qu'on définisse ensemble les lignes conductrices ; associer d'autres acteurs. C'est vrai qu'on est embarqué, mais ça c'est des rectificatifs qu'il faut faire sinon on risque d'avoir des difficultés devant. »

En somme, il ressort qu'un effort de communication a été fait à l'endroit du personnel pour qu'il puisse disposer de bonnes informations. Cependant, la non implication véritable de ce groupe, notamment la non mise en place d'un comité dont il serait partie prenante a été décriée.

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IV.2.4/ Les contraintes et problèmes perçus

Le montage juridique de la société a fait l'objet de critique par un acteur :

Interview n°12 :

« Les observations du Ministère de l'Economie et des Finances devait être examinée avec la plus grande attention. Ils ont suggéré une autre forme juridique que la Société anonyme. De toute façon, ils peuvent nous avoir à tout moment, ne serait-ce qu'à travers l'administration fiscale. »

Il convient de signaler que le Ministère de l'Economie et des Finances a attiré l'attention des administrateurs sur la nécessité de distinguer les organes dirigeants de l'association de ceux de la société anonyme.

Il est noté que la société dispose d'un conseil d'administration pendant qu'il s'agit d'un actionnaire unique qu'est l'association. Dans une telle situation, selon le SYSCOHADA, il devrait s'agir d'une société anonyme avec administrateur général.

Il se trouve que les administrateurs de l'association se retrouvent au niveau de la société, ce qui crée donc la confusion des rôles.

La non séparation est également constatée sur le plan opérationnel, comme l'illustre cette intervention :

Interview n°6 :

« Il aurait fallu faire l'état des lieux de tous les projets et l'attester par un acte pour marquer la séparation avec l'association. Il en est de même du matériel cédé par l'association à la société pour lequel aucune base d'amortissement n'a été établie ».

Le défaut d'implication du personnel constitue également les contraintes ou les problèmes éventuels qui peuvent miner le processus de transformation. Les problèmes évoqués ont également trait aux blocages constatés dans la satisfaction des doléances du personnel qui se présentent comme suit telles qu'elles ressortent des documents :

- l'arrêt des contrats de travail du personnel à durée déterminée avec l'Association Faso Baara, la liquidation des droits légaux et le règlement d'indemnités pour services rendus ;

- la reconduction de l'ensemble du personnel de l'Association dans la nouvelle société anonyme Faso Baara S.A pour préserver les emplois et assurer une dynamique de continuité et d'efficacité de la structure ;

- la participation du personnel au capital de la S.A pour impliquer davantage ce personnel dans la gestion et dans les défis du privé.

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Cette préoccupation fondamentale des travailleurs a constitué un point focal des différents échanges avec les dirigeants, de sorte que toute idée de non satisfaction absolue semblait créer un malaise en leur sein. Des attitudes de démotivation étaient perceptibles. Le rendement individuel et collectif baissait, tel qu'il ressortait des évaluations des activités réalisées.

Interview n°3 :

« Je ne vois pas de problème majeur ou de frustration quelconque, en dehors de bruit où on parle de droits négociés *...+ Quand je regarde l'environnement, je vois que les gens ne sont pas motivés comme avant. Quand on vient à 07h30, maintenant tout le parking est vide. Avant le weekend, quand tu arrivais à l'Agence, tu avais l'impression que c'était un jour ouvrable. »

Cette observation s'est vérifiée. En effet, de la Note d'observation n°1, il ressort que les parkings du personnel étaient quasiment vides jusqu'à 09h, les journées du 19 et 20 juillet 2012, constats faits en présence de deux (2) cadres.

Le rappel au respect des horaires a été effectué à plusieurs reprises par le Directeur Général lors de réunions, avec à la clef une note de service en date du 23 novembre 2012.

Les principales contraintes relevées ont trait au montage juridique, au défaut d'implication du personnel, à la non satisfaction de certaines doléances du personnel et à la démotivation au sein du personnel. Cependant, certaines préoccupations ont été partiellement prises en compte par la suite. En effet, les contrats du personnel ont été rompus avec l'association et signés à nouveau avec la société anonyme. Les droits ont été liquidés et payés au personnel. De même, l'ouverture du capital à d'autres parties prenantes, validée par le conseil d'administration en sa séance du 21 décembre 2012, permettra de solutionner les insuffisances liées à la composition de cet organe.

IV.2.5/ La perception de la position concurrentielle et des opportunités IV.2.5.1/ L'environnement concurrentiel

La transformation juridique se justifie par le besoin des autorités gouvernementales de créer un environnement concurrentiel, par conséquent un environnement économiquement efficace, dans le secteur de la maîtrise d'ouvrage déléguée.

L'étude préliminaire réalisée par l'Agence a fait un état des lieux des entreprises évoluant dans le secteur. Elles se regroupent en trois catégories : les sociétés de droit public, les sociétés de droit privé et les ONG et associations.

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Les sociétés de droit public

Il s'agit des sociétés d'Etat et des établissements publics à caractère administratif : - l'Agence d'Exécution des Travaux Eau et Equipement Rural (AGETEER) ;

- l'Agence de Conseil et de Maîtrise d'ouvrage déléguée en bâtiment et aménagement urbain (ACOMOD-BURKINA) ;

- l'Agence des travaux d'infrastructures du Burkina (AGETIB) ; - Le Fonds de l'Eau et de l'Equipement Rural (FEER).

Les sociétés de droit privé

Il s'agit principalement de deux sociétés : AGEM-Développement, Boutique du Développement et CEIA/2I-CI. D'autres sociétés étaient en cours de constitution.

Les ONG et associations

Il s'agit d'ONG travaillant principalement avec le Ministère en charge de l'éducation nationale pour la construction de salles de classes. Ce sont essentiellement de :

- Plan Burkina ;

- OEuvre Suisse d'Entraide Ouvrière ; - Catholic Relief Service/CATHLWEL ; - Aide et Action.

Au regard de cette situation concurrentielle composée essentiellement d'entreprises jeunes et insuffisamment dotées, l'Agence Faso Baara ne devrait pas avoir du mal à conserver sa position de leader. Cependant, elle rencontre déjà des difficultés dans la participation à la concurrence. En effet, à l'issue d'une consultation lancée par un maître d'ouvrage pour la réalisation d'une importante infrastructure, d'un coût prévisionnel dépassant six (6) milliards de FCFA, l'Agence a été écartée parce qu'elle n'avait pas produit de document justifiant de son statut de société anonyme.

Après introduction d'une plainte auprès du Comité de Règlement des Différends (CRD), elle a été sollicitée par demande de proposition n°2012-000017/MENA/SG/DMP à participer à la consultation.

Il est de coutume de requérir aux éventuels candidats des conditions rigoureuses en fonction du coût prévisionnel et de la complexité de l'ouvrage (par exemples au minimum trois (3) références techniques, un chiffre d'affaires élevé, cautions plus importantes). Dans le cas

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présent, une seule référence technique était demandée aux postulants. Est-ce dans le souci de ne pas éliminer dès le départ la plupart des sociétés ?

Les résultats publiés dans la revue des marchés publics en son numéro 882 du lundi 19 novembre 2012 se présentaient comme suit :

Agences

Total

Rang

AGEM-

Développement

97,65

1er

Boutique de

Développement

91,82

2ème

Faso Baara

90,82

3ème

CEIA/2I-CI

58,82

4ème

De l'examen du détail des notes demandées par l'Agence, il ressort que des rubriques importantes telles que l'expérience de l'entreprise (notée sur 30 points), la qualification et l'expérience du personnel (notée sur 40 points) n'ont pas départagé les trois premiers candidats. Il en était de même de la présentation de l'offre notée sur 5 points. La différence s'est située au niveau de la compréhension des termes de références et, de la compréhension du chronogramme proposé avec la mission, notées respectivement sur 10 et 15 points. Ces résultats ont suscité à nouveau un recours de l'Agence Faso Baara S.A auprès du CRD.

Ce cas a laissé une forte impression de corruption dans l'esprit de la plupart des agents de Faso Baara S.A.

Cet exemple vient montrer que l'expérience de la structure, la qualification et l'expérience du personnel qui semblaient des atouts essentiels ne suffisent pas. D'autres mécanismes peuvent constituer des obstacles importants au maintien de leadership de la structure. Ils pourraient s'expliquer par des facteurs comme l'imperfection du marché et l'opportunisme de certains acteurs.

Cependant, des espoirs restent permis puisque certains partenaires institutionnels et privés continuent de faire confiance à l'Agence. Il s'agit notamment de l'Union Economique et Monétaire ouest Africaine qui a signé avec elles de nouvelles conventions portant sur d'importants projets. C'est le cas également de la BOA-Burkina pour la construction de son siège.

Une autre problématique liée à la maîtrise d'ouvrage déléguée est le développement des sociétés d'Etat alors que la logique de départ était de faire exécuter les grands travaux par des structures autonomes et suffisamment indépendantes de l'Etat.

Pourtant, la réglementation (article 17 du décret 2008-174 portant règlementation de la MOD) interdit la mise en compétition des sociétés publiques et des sociétés privées. Elle consent cependant qu'à titre dérogatoire, les personnes morales de droit public peuvent

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demander aux directions techniques d'exécuter des missions de maîtrise d'ouvrage déléguée sans avoir recours aux procédures de sélection compétitive.

Dans la mesure où le portefeuille des projets confiés par le biais de la MOD est en grande partie dû par l'Etat, il se pose le problème l'importance de la part de marché qui pourrait être mise en concurrence entre les sociétés privées, en imaginant que l'Etat va confier dans la mesure du possible ses projets aux agences publiques. Va-t-il respecter la limite de 5% des projets confiés par la procédure de gré à gré à ses sociétés d'Etat ? Si oui, c'est la viabilité à terme des sociétés d'Etat qui peut se poser.

En tout état de cause, cet aspect peut constituer un des enjeux cruciaux de l'environnement de concurrence établie. En effet, comment assurer le jeu de parfaite concurrence entre les acteurs ? Le renforcement de la réglementation peut en être une solution.

IV.2.5.2/ La perception des acteurs

La mise en oeuvre de la concurrence ne fait pas craindre au personnel une perte de part de marché. Au contraire, le personnel estime qu'une réorganisation pertinente permettra à l'Agence de conserver, sinon d'accroître sa part du marché, au regard de son potentiel.

Interview n°1 :

« L'Agence peut conserver sa part de marché, puisqu'elle a les ressources nécessaires et des ressources humaines compétentes. »

Interview n°4 :

« Moi, j'ai foi en l'Agence. Tout est une question d'organisation ; tout est une question de motivation. »

Cependant, la problématique de la saine concurrence est posée par certains acteurs :

Interview n°3 :

« Faso Baara était leader. Toutes les chances sont données à tout le monde. Aujourd'hui, on est face à une concurrence. Il faut prouver, c'est tout. Si la concurrence est saine, le leader va émerger. »

Cela est également confirmé par les interrogations d'un intervenant lors du diner-débat, faisant allusion à la manifestation d'intérêt pour laquelle tout semblait être mis en oeuvre pour écarter l'Agence Faso Baara S.A. Ses propos ont fait l'objet d'ovations nourries, montrant ainsi qu'ils traduisent des sentiments largement partagés par la plupart des participants :

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Intervenant lors du diner-débat :

« Faso Baara fait face à un environnement concurrentiel où tous les coups semblent permis. Que faut-il faire ? »

Malgré ces préoccupations, de nouvelles opportunités sont perçues pour s'offrir à l'entreprise du fait de son nouveau statut juridique.

Interview n°3 :

« Quand on prend les autres agences comme AGETIP Benin et AGETUR, ce sont des agences d'exécution, mais qui font autres choses, notamment ils ont des logements qu'ils mettent en location, les agences de location, agences immobilières ; les prestations de pesage ; ils en ont plusieurs, même les ramassages des tas d'ordures, l'enfouissement... »

Ceci est confirmé par les propos du Directeur Général comme suit lors du diner-débat :

« La stratégie consiste à faire des prestations de bonne qualité, à envisager non seulement à court et moyen terme la diversification des activités pour ne pas se contenter de la maîtrise d'ouvrage déléguée mais aussi une expansion géographique des activités au-delà de nos frontières . »

Le personnel estime que l'Agence a de réelles chances de conserver sa position de leader. Mais, la mise en oeuvre d'une saine concurrence demeure une condition nécessaire. D'autres opportunités existent pour l'Agence à l'instar de ce que font des structures homologues dans d'autres pays notamment au Bénin.

IV.3/ Les effets du changement

Il s'agira d'analyser les effets immédiats obtenus et les effets encore attendus. L'analyse porte sur le niveau de changement, le rythme de changement, la réussite du changement et l'adaptation au changement.

IV.3.1/ Le niveau de changement

La transformation engagée au sein de cette organisation marque un tournant décisif dans son cycle de développement. Imposé par une disposition réglementaire, le cadre institutionnel d'exercice de cette activité s'en trouvera profondément marqué avec l'arrivée de nouveaux acteurs et l'application du principe de la concurrence entre l'ensemble des acteurs. Un changement profond devrait pouvoir être mis en oeuvre et toucher l'entreprise dans sa globalité. Cela devrait passer par le déploiement d'une bonne stratégie

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concurrentielle et la remise en cause de certaines méthodes de travail qui ont montré leurs limites.

IV.3.2/ Le rythme du changement

La question du rythme du changement permet de mener l'analyse sous l'angle de la temporalité et du processus.

Il est observé que ce changement semble s'installer dans la durée, ce qui crée le risque d'émousser les ardeurs et toute l'attention nécessaire. En effet, le dispositif réglementaire a été défini en 2008 et le processus a été véritablement enclenché au sein de l'Agence en 2010 avec les premières études. La mutation juridique a été effectuée en fin 2011. Le véritable enjeu se situe plus dans la réussite d'une mutation globale aussi bien de la structuration de l'organisation que des habitudes et des méthodes de travail pour pouvoir prospérer dans ce nouvel environnement juridique, institutionnel et économique.

L'étendue ou la durée d'étape du changement paraît déjà longue aux yeux des acteurs. Ceci nécessite de définir un repère. En effet, le point de départ du processus se situe sur le plan institutionnel, certes au décret 2008-374/PRES/PM portant réglementation de la maîtrise d'ouvrage publique déléguée, mais effectivement à la circulaire n°2010-2129/MEF/SG/DGMP/DSMP du 12 août 2010 adressée aux administrateurs de crédits par le ministre de l'économie et des finances. L'objet de la circulaire est la mise en oeuvre de la réglementation sur la maîtrise d'ouvrage publique déléguée. Sur le plan interne et organisationnel, le point de départ considéré correspond au lancement des premières études engagées en fin 2010 dès la prise de connaissance, à travers la circulaire mentionnée, de la volonté de l'Etat d'appliquer strictement les dispositions du décret à partir du 1er janvier 2011. On peut déduire que le processus compte, à la date de fin décembre 2012, un peu plus de vingt quatre (24) mois de mise en oeuvre.

IV.3.3/ La réussite du changement

Au regard de ce qui précède, l'acquis majeur est la phase juridique qui a été opérée avec succès. Hormis cela, aucun changement véritable n'est constaté dans le vécu quotidien des agents.

Interview n°2 :

« Le changement n'est pas totalement installé. Dans la tête du personnel, on est dans le statu quo. Nous attendons de voir. »

Interview n°3 :

« Il ya encre beaucoup de choses à faire. Le manuel de procédures est en révision. J'ai toujours dit qu'il fallait un plan de carrière pour permettre aux agents d'évoluer, surtout que certains sont à leur poste depuis vingt ans. Il ya

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R ème p) nal

aussi beaucoup de changement à faire, surtout sur le plan fiscal...»

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Interview n°7 :

« C'est pratiquement les mêmes habitudes. Par exemple, la dernière fois, quand il y a eu des critiques sur les rapports d'activités, c'est bien parce que il faut qu'on commence à respecter nos échéances, mais aussi la qualité des documents. Ce sont des documents qui sortent à l'extérieur et qui peuvent tomber entre les mains des Ministres. Il faut qu'ils soient bien présentés...»

Les préoccupations essentielles du personnel ont été partiellement prises en compte ce qui a contribué quelque peu à baisser la forte tension initialement perceptible. Cependant, sur le plan organisationnel, les attentes sont encore nombreuses.

IV.3.4/ L'adaptation au changement

Une idée semble résumer les difficultés que rencontre la structure à se faire une place dans ce nouvel environnement :

Interview n°7 :

« L'Agence n'arrive pas à s'adapter à ce nouvel environnement. Les dirigeants n'ont pas compris qu'il faut savoir traiter les partenaires pour avoir des marchés. Ce n'est pas de la corruption mais il faut savoir intéresser les gens. Certains concurrents l'ont compris et ils ont déjà de gros marchés à peine arrivés.»

En somme, le changement est toujours en cours après pratiquement deux années de déclenchement du processus ; il est émaillé de difficultés diverses, parmi lesquelles une implication insuffisante des acteurs internes, une stratégie non définie de façon formelle, la présence de sociétés d'Etat limitant l'étendue des interventions des structures privées et des procédés qui n'assurent pas de la transparence du marché.

Une phase de transformation juridique est réalisée permettant à la structure de pouvoir prendre part à la compétition pour la sélection des maîtres d'ouvrage publics délégués. L'enjeu majeur prend naissance à ce niveau car le tout n'est pas d'adopter une forme juridique mais de déployer des stratégies avec l'appui des parties prenantes, notamment le personnel pour que la structure continue de bénéficier du label de leader du secteur.

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V/ DISCUSSION

A la lumière des principaux résultats obtenus, quels enseignements peut-on en tirer ? Un retour à la littérature permet à travers ces lignes de discuter de ces résultats. Ce parcours est effectué en fonction des trois dimensions analysées.

Les conditions déterminantes

En ce qui concerne les conditions déterminantes du changement dans l'organisation, il est ressorti dans un premier temps que ce changement observé confirme l'idée de changement entamé en réaction aux pressions environnementales, à la nécessité de l'adaptation à cet environnement et à la capacité à évoluer » (FABRE et al., 2007). L'idée de la nécessité organisationnelle ou représentation positive du changement (Perret, 2000) est mise en évidence. L'adaptation peut être vécue comme un événement dramatique, une crise dans la vie d'une organisation (Demers, 1999). Ces phénomènes ont été observés avec les problèmes essentiels liés à la gestion du personnel.

La légitimité du changement a par conséquent été reconnue par les destinataires du changement, ce qui en a favorisé l'adhésion (Bernoux, 2010). En effet, lorsque les acteurs perçoivent la légitimité d'un changement et son bien-fondé, ils ne s'opposent aucunement à l'idée de sa mise en oeuvre. L'exercice de légitimation s'avère fondamental, tel que cela a été développé par certains auteurs dont Rondeau et Bareil (2010).

En considérant l'objet du changement, celui-ci devrait pouvoir toucher toutes les dimensions essentielles de l'entreprise (Robbins et DeCenzo, 2008). Cette transformation devrait permettre à l'organisation de revoir de façon profonde son organisation et sa stratégie.

En effet, les volets du changement, hormis le besoin nécessaire et urgent de la transformation juridique, n'ont pas été déterminés de façon formelle et précise par les dirigeants. Il n'en demeure pas moins que les attentes formulées par les destinataires du changement sont une suite logique à la réaction face à l'environnement concurrentiel. Ces attentes concernent entre autres la réorganisation de la comptabilité, l'apprentissage de procédures fiscales liées au nouveau statut juridique, la révision des procédures budgétaires, l'adoption de nouveaux comportements individuels et collectifs.

Le changement entamé a été appréhendé sous l'angle de son niveau et de son ampleur. (Brassard, 2003 ; Christensen & Overdorf, 2000 ; Rondeau, 1999 ; Demers, 1999 ; Johnson et Scholes, 2000). Dans le cas présent, il est marqué par une rupture avec un système préexistant même si sa mise en oeuvre semble s'opérer de façon progressive. Il est à un stade parcellaire ; l'étape visible est la transformation juridique. Il est vrai que l'activité initiale se poursuit mais sous une forme totalement nouvelle et dans un contexte tout aussi nouveau.

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Les enjeux et rôles déterminants

Un des enjeux majeurs de cette transformation pourrait être la flexibilité de l'organisation dans un environnement concurrentiel (Tarondeau et al., 1994 in Soparno, 2005).

Cela pourrait se situer au niveau des processus mais aussi des ressources. Il a été montré que les processus aussi bien internes que ceux liés à la gestion des projets de la structure sont suffisamment souples et flexibles. L'enjeu pourrait véritablement se situer au niveau des ressources. Au stade actuel, l'Agence a des charges de fonctionnement assez élevées en comparaison avec les autres structures privées. Ces structures minimisent leurs coûts de production en ressources humaines et en équipement technique.

Ceci pourrait être paradoxalement un élément à leur avantage, dans la mesure où la réglementation a fixé un niveau minimal d'équipement et de compétences. La plupart des structures pourraient disposent de ce minimum. Cependant, il s'agit d'un domaine où le niveau de qualification et l'expérience des prestataires devraient être des éléments déterminants. Tout ceci pose le problème de la flexibilité ou du dynamisme des capacités qui est « une aptitude à reconfigurer ses compétences pour faire face aux changements rapides de l'environnement ou pour les instaurer ». Il est distingué des capacités proactives reflétant un comportement « pionnier » et des capacités réactives traduisant la rapidité à réagir à une offensive de la concurrence (Soparno, 2005).

Bien que cet aspect n'ait été un facteur de différenciation au profit de l'Agence lorsqu'elle a participé à certaines compétitions, il n'en demeure pas moins que sur le long terme, cela devrait pouvoir s'imposer. De plus, il est inimaginable de chercher à réduire les ressources, notamment humaines, au regard d'une situation conjoncturelle. La perspective de diversification et de développement des activités sur d'autres horizons renforcent cette conviction à conserver tout le personnel et mieux à le renforcer.

Bénéficier de l'adhésion au changement est un enjeu important. Cet élément s'observe lorsque les avantages associés au changement sont perçus par les destinataires comme étant supérieurs aux bénéfices perdus dans la situation actuelle, additionnés aux désavantages qui viendront avec le changement (Collerette et al. (2008). Vu sous le prisme de l'organisation, rester dans le statut d'association ne permet pas à l'entité de tirer profit de ce nouvel environnement. Elle pourrait être vouée à disparaître dans la mesure où la part de marché dévolue à cette catégorie de prestataires serait très marginale. En effet, cela se fera par les attributions de gré à gré, ce qui est une exception au principe de la mise en concurrence des acteurs. Il est établi sur le plan économique que ce procédé d'allocation des ressources est inefficace.

Pour assurer l'adhésion au projet, il convient de faire de la communication un facteur essentiel de réussite du changement (Strebel, 1996 in Cordelier et Marie-Montagnac,

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2008)31. Cet aspect a été suffisamment pris en compte avec la série de rencontres organisées entre les dirigeants et le personnel à l'effet d'informer largement et régulièrement le personnel, confirmant l'idée que, même si la dynamique du changement est à l'initiative des dirigeants, ces derniers tiennent à l'inverse compte des idées émises par leurs subordonnés (Cordelier et Marie-Montagnac, 2008) ou la théorie de l'implication du personnel développée par des auteurs (Demers, 1999).

Ceci n'a pas empêché une manifestation de la méfiance par moments. En effet, le personnel a été amené à formuler des doléances à même d'atténuer les risques éventuels qu'ils prendraient en s'engager avec la nouvelle société. Cela confirme l'idée que la mise en oeuvre du changement est le lieu de constatation de logiques différentes et contradictoires et des coalitions (Crozier et Friedberg, 1977 ; Pichault, 2009 ; Bareil et Savoie 1998) qui se forment entre acteurs en vue de défendre un certain nombre d'intérêts. Sur la table des négociations, le maître mot justifiant les doléances du personnel était le caractère incertain de la nouvelle société. La gestion des contrats liant le personnel de l'association à la nouvelle société est allée dans le sens des revendications du personnel.

La nécessité de l'adaptation à l'environnement devrait passer par la mise en oeuvre de choix stratégiques ou d'une politique volontariste comme l'ont montré Hafsi et Hatimi (2003)32 dans le cadre d'une étude sur le secteur industriel des télécommunications sujet à une réglementation en rapport avec les choix stratégiques des entreprises évoluant dans ce secteur. Le maintien de la position de leader est une lutte perpétuelle.

Ceci a été constaté à la suite de la première participation de la structure à la mise en concurrence des agences de maîtrise d'ouvrage déléguée et s'est présenté comme le premier test de son repositionnement comme leader.

Les effets du changement

L'analyse des effets du changement permet de traiter de certaines problématiques telles la durée attendue, la perception de la fin du changement et les résultats escomptés.

A ce propos, comme l'indique Brassard (2003), ce sont les acteurs qui déclarent que le changement a été amorcé à tel ou tel moment, après la prise de conscience d'une impulsion de changement. Ce sont eux aussi qui déclarent qu'à tel ou tel moment le changement est achevé, ou devrait arriver à son terme, qu'il est réussi ou non ou qu'une transformation s'est produite ou non.

31 Benoît Cordelier et Hélène Marie-Montagnac, Conduire le changement organisationnel, (33) 2008, Communication et Organisation.

32 Taieb Hafsi, Imad-eddine Hatimi, changement institutionnel, stratégie concurrentielle et performance, XIIème conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique, 3,4,5 et 6 juin 2003.

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Si le début du processus peut être situé au début des premières études, ou en termes de processus à la phase de décristallisation ou d'éveil et de désintégration, aucun élément prévisionnel ne sert pour l'instant de référence quant à la fin.

Ceci n'est peut-être pas très étonnant dans la mesure où il s'agit d'une première véritable expérience de mise en oeuvre de changement important, mais aussi et surtout au regard du fait que toute transformation consistant à se repositionner dans un environnement ayant changé de façon soudaine et imprévue (Demers, 1999), est vue comme très coûteuse et difficile à réaliser.

Le processus semble être parti pour durer et aucune formulation expresse n'est faite pour indiquer les aspects qui seront modifiés. A défaut de cette précision, les dimensions probables à toucher ont été proposées par les acteurs.

Cependant, des indicateurs peuvent être définis pour permettre dans un horizon de six (6) à douze (12) mois d'apprécier de façon plus conséquente les effets réels du changement : nombre de participation aux manifestations d'intérêt, nombre de manifestations d'intérêt remportées, niveau d'exécution des prestations, qualité des prestations (délais, coûts, réceptions effectives), formations effectuées au profit des acteurs (personnel), appropriation des formation, appropriation des nouvelles méthodes de travail.

Aussi, la mise en oeuvre du changement fait apparaître des écueils qu'il faut savoir éviter. Les préconisations de Kotter se manifestent. Il est constaté un certain piétinement d'où la non stimulation suffisante « du sentiment d'urgence », « un manque de vision » et la non constitution « d'un noyau dur ».

Le modèle de Rondeau, inspiré d'autres modèles notamment le modèle contextualiste et des approches basées sur le style de mise en oeuvre du changement, s'avère pertinent pour l'analyse d'un phénomène multidimensionnel dans lequel le contexte dans lequel évolue est déterminant, de même que les points de vue des acteurs et leurs perceptions ; le processus et la dimension temporelle sont des aspects essentiels et constituent de ce fait des variables à suivre par tout acteur de changement pour la réussite de son projet.

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CONCLUSION

La présente étude a porté sur une organisation évoluant dans un secteur d'activité qui a connu une modification de son dispositif institutionnel et réglementaire. Ceci a eu pour effet d'impulser un changement dans ladite organisation.

Le changement organisationnel a fait l'objet de définitions multiples et désigne (Brassard, 2003) le processus par lequel un aspect d'une organisation (ou plus largement, d'un système d'action collective), dont l'altération ou la modification équivaut à l'ajout, à la suppression ou au remplacement, de façon partielle ou totale, de l'un, de plusieurs ou de tous les éléments composant une organisation et de l'une ou l'autre des caractéristiques de ceux-ci.

L'objectif essentiel de cette étude était de chercher à comprendre le mécanisme d'introduction et de mise en oeuvre du changement dans cette organisation, notamment en analysant les processus et les contenus pour dégager les principales contraintes et les enjeux déterminants au regard de sa spécificité et de son domaine d'activité.

Pour mener à bien cette analyse, le modèle d'analyse de Rondeau a servi de base à l'étude. Ainsi, pour permettre une meilleure compréhension de ce phénomène organisationnel, nous avons analysé les trois (3) dimensions principales du modèle à l'aide d'une grille d'analyse comportant quinze (15) variables.

Il a été établi que la mise en place d'un cadre réglementaire a justifié la transformation envisagée au regard du fait que son statut antérieur ne lui permettrait plus de prospérer dans ce domaine. Par conséquent, la transformation a été jugée pertinente et a, de ce fait, recueilli l'adhésion des principaux acteurs mais surtout des destinataires du changement. Cependant, la stratégie déployée dans la mise en oeuvre du changement n'a pas connu une implication véritable de ces derniers, ce qui a constitué une insuffisance importante.

La réglementation du secteur paraît salutaire dans la mesure où elle permet d'institutionnaliser une activité qui se menait jusqu'ici sans un cadre juridique approprié.

Il ressort que cette entreprise est à un tournant important de sa vie. Après une vingtaine d'années de présence et de règne sur un marché en qualité de leader, des difficultés importantes se dressent toutefois sur son parcours dans le cadre de cette transformation déclenchée en réponse au dispositif réglementaire mis en place.

D'importants enjeux se présentent à cette organisation au regard du fait que sa survie même dépend de la réussite de ce changement et de son adaptation à ce nouveau contexte. Ces enjeux sont d'ordre sont d'ordre interne et externe.

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Sur le plan interne, il conviendrait en plus de la communication qui a été suffisamment instaurée dans le processus, de la faire doubler d'une réelle implication des acteurs internes à la prise de décision.

Des signes d'inquiétudes et de piétinement ont été observés chez les destinataires du changement, ce qui dénote un défaut de maîtrise des principaux paramètres en jeu. Aussi, un des enjeux essentiels est le maintien de la position de leader de cette activité. Pour ce faire, il est nécessaire d'engager des actions concrètes et rapides, de déployer un scénario de riposte et une stratégie adéquate de positionnement dans un environnement désormais concurrentiel. Ce scénario devra inclure des gages d'exécution rapide et efficace des projets confiés par les partenaires techniques, le renforcement de la compétence du personnel et sa motivation. Un degré d'innovation s'impose pour continuer à mieux faire que les concurrents.

Aussi, bien que l'entité se soit attachée les services d'un conseil fiscal dans la mise en oeuvre de ce changement, des inquiétudes existent également quant au montage juridique de la nouvelle entité émanant d'une association de droit privé certes mais dont l'Etat et la Banque mondiale en ont été les pères fondateurs. Il convient donc de revoir l'architecture du capital social et la séparation nette des organes de direction des deux entités. De plus, sur le plan opérationnel certaines actions notamment comptables devaient être mises en oeuvre très rapidement pour constater la séparation nette des deux entités.

Sur le plan externe, on note déjà la présence sur le marché de la maîtrise d'ouvrage déléguée d'entreprises naissantes. Il s'agit d'un domaine nouveau suscitant de l'engouement. Mais la loi de la sélection naturelle pourrait régir le secteur et faire ainsi disparaître les entreprises « aventurières ». Dans cet environnement, la prolifération des sociétés d'Etat pose des problèmes. En effet, les sociétés pourraient se limiter aux domaines marqués par l'inexistence de l'initiative privée ou par la complexité de l'activité.

Il convient de remarquer que l'environnement externe est le plus délicat à cause des paramètres qui échappent aux dirigeants de l'organisation. En effet, l'application non rigoureuse des règles de parfaite concurrence pourrait compromettre les chances d'un géant. L'organisation évolue dans un secteur où la procédure de sélection fait désormais appel aux règles de passation des marchés publics. Ce domaine est connu comme étant celui où les présomptions ou les cas de manifestation de tous les abus existent : corruption, trafic d'influence, fraude, détournement, faux en écriture... D'ailleurs, l'actualité au Burkina Faso est suffisamment alimentée ces derniers temps par les activités de lutte contre le fléau de corruption, comme l'attestent les premières assises nationales de l'Autorité Supérieure de Contrôle de l'Etat (ASCE), prévues du 19 au 21 décembre 2012. Il en est de même du Réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC) qui était sous les feux de la rampe en novembre et décembre 2012 avec la présentation de son rapport annuel sur l'état de la corruption, l'inventaire des cas de corruption restés impunis, et aussi à travers une série de conférences et de débats. Les autorités sont interpellées à travers l'instrument de régulation qu'est

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l'Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) qui se penche sur le phénomène, comme l'illustre la tenue d'un atelier le 17 décembre 2012 pour la restitution d'une étude relative à l'élaboration d'une stratégie nationale de lutte contre la fraude et la corruption spécifique aux marchés publics et aux délégations de service public au Burkina Faso.

Il apparaît que la pérennité même de cette activité passe ainsi par l'instauration de la garantie de transparence du jeu et l'obligation de rigueur à incomber aux structures de maîtrise d'ouvrage déléguée dans la réalisation des infrastructures de bonne qualité. Ceci nécessite un approfondissement de la réflexion sur la maîtrise d'ouvrage déléguée, la formation et la sensibilisation de tous les acteurs de la chaîne. Mieux, la promotion du secteur par l'élaboration d'une stratégie nationale de développement de la maîtrise d'ouvrage déléguée serait le cadre idéal de professionnalisation des acteurs et le gage d'exécution d'ouvrages respectueux des normes de qualité.

Cette étude confirme que la dimension stratégique est importante dans un environnement nouveau et concurrentiel. Elle a montré que la dimension environnementale est tout aussi importante dans la mesure où il s'agit d'un domaine dans lequel le produit générant le revenu est spécifique et s'acquiert à travers des procédures de passation des marchés, domaine sujet à des perceptions multiformes de non transparence dans la chaîne.

Par conséquent, l'étude a permis de relever que la transparence des règles de concurrence est une caractéristique importante à l'environnement des affaires.

La présente étude comporte infailliblement des limites. Parmi elles, on peut retenir le temps d'observation y consacrée. En rappel, la transformation a été véritablement initialisée en début 2011 avec les premières études. L'observation s'est déroulée jusqu'en fin décembre 2012. Il va de soi qu'un temps d'observation plus long aurait permis d'appréhender beaucoup d'autres aspects et de comprendre davantage les contours du changement dans cette organisation. Une autre limite méthodologique est le choix d'un cas unique, ce qui restreint la richesse et la portée des observations.

Pour autant, nous avons pu mettre en oeuvre certains outils méthodologiques pour comprendre ce phénomène à la lumière d'une approche théorique emprunte de la multiplicité des modèles d'analyse du changement organisationnel.

Nous avons eu cependant le mérite de réaliser cette étude sur une organisation assez spécifique qui évolue dans un domaine tout aussi spécifique et dans contexte nouveau, et par conséquent, d'avoir contribué à la réflexion sur le changement.

Cependant, une recherche étendue à un certain nombre de structures de maîtrise d'ouvrage déléguée qui ont entamé un processus de changement serait intéressante. Cela permettrait d'appréhender le phénomène de façon globale, notamment les enjeux transfrontaliers et communautaires, le besoin de convergence des politiques de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, l'absorption efficace des ressources par le recours à la maîtrise

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d'ouvrage déléguée et la nécessité de disposer d'infrastructures de haute qualité nécessaires au développement des Etats africains auxquels il est le plus souvent reproché le gaspillage et/ou le détournement des ressources mises à leur disposition par les partenaires techniques et financiers pour leurs besoins de croissance et de développement.

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Rapport d'étude du Cabinet Dembs associates SARL, Septembre 2011 Rapport d'étude du Cabinet CGIC Afrique, Janvier 2011

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TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS i

DEDICACE iii

LISTE DES SIGLES ET ABBREVIATIONS iv

LISTE DES TABLEAUX ET SCHEMAS v

SOMMAIRE vi

INTRODUCTION 1

I/ REVUE DE LITTERATURE 4

I.1/ Définition des concepts 4

I.1.1/ La notion d'organisation et d'action organisée 4

I.1.2/ La notion de changement 6

I.2/ Modèles explicatifs et compréhensifs du changement organisationnel 10

I.2.1/ Modèles liés à la dynamique environnementale ou aux choix stratégiques 10

I.2.2/ Modèles basés sur l'initiative du changement 12

I.2.3/ Modèles basés sur l'ampleur du changement 12

I.2.4/ Modèles basés sur les dimensions affectées par le changement 14

I.2.5/ Modèles basés sur le processus de changement 15

I.2.5.1/ Le modèle de Lewin 15

I.2.5.2/ L'approche constructiviste-systémique 15

I.2.6/ Typologie fondée sur les relations acteurs et destinataires du changement 17

I.2.7/ L'approche « contextualiste » 17

I.3/ Les enjeux et conditions du changement 18

I.3.1/ Les enjeux du changement 18

I.3.2/ La résistance au changement 19

I.3.3/ Les causes d'échec et les facteurs de succès du changement 22

I.4/ Modèle d'analyse 23

I.4.1/ Présentation du Modèle de Rondeau 23

I.4.1.1/ La démarche de transformation 24

I.4.1.2/ Les trois (3) dimensions du modèle 25

I.4.2/ Justification du choix du modèle de Rondeau 26

1.4.3/ Grille d'analyse 28

II/ METHODOLOGIE 29

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II.1/ Démarche méthodologique 29

II.2/ Technique d'échantillonnage et de collecte de données 30

II.3/ Techniques de traitement et d'analyse des données 31

III/ CADRE PRATIQUE 32

III.1/ Le contexte institutionnel du changement 32

III.1.1/ Un secteur d'activité particulier : la maîtrise d'ouvrage déléguée 32

III.1.2/ Réglementation du secteur 34

III.2/ Présentation du cas 37

III.2.1/ De l'association Agence Faso Baara à la société Agence Faso Baara S.A 37

III.2.1.1/ Les textes fondateurs et les modalités d'intervention 37

III.2.1.2/ Organisation de l'Association Agence Faso Baara 38

III.2.1.3/ La création de l'Agence Faso Baara S.A 39

IV/ RESULTATS 41

IV.1/ Le contexte du changement : identifier les conditions déterminantes 41

IV.1.1/ La complexité du changement 41

IV.1.2/ La légitimité du changement 42

IV.1.2.1/ L'origine de la transformation 42

IV.1.2.2/ L'objet du changement 43

IV.1.2.3/ La pertinence de la transformation 44

IV.1.2.4/ La spécificité de l'organisation 45

IV.1.2.5/ L'encadrement de la réglementation 47

IV.2/ Les acteurs du changement : enjeux et rôles déterminants 49

IV.2.1/ Les enjeux perçus par les acteurs 49

IV.2.2/ La participation des acteurs 50

IV.2.3/ La perception de la vision des responsables de l'organisation 52

IV.2.3/ Le style et la stratégie mis en oeuvre 53

IV.2.4/ Les contraintes et problèmes perçus 55

IV.2.5/ La perception de la position concurrentielle et des opportunités 56

IV.2.5.1/ L'environnement concurrentiel 56

IV.2.5.2/ La perception des acteurs 59

IV.3/ Les effets du changement 60

IV.3.1/ Le niveau de changement 60

IV.3.2/ Le rythme du changement 61

IV.3.3/ La réussite du changement 61

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IV.3.4/ L'adaptation au changement 62

V/ DISCUSSION 63

CONCLUSION 67

BIBLIOGRAPHIE 71

TABLE DES MATIERES 75

ANNEXES 78

77

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ANNEXES

- ANNEXE N°1 : Guides d'entretien

- ANNEXE N°2 : Présentation détaillée de l'Agence Faso Baara S.A

- ANNEXE N°3 : Circulaire relative à la mise en oeuvre de la réglementation sur la Maîtrise d'ouvrage déléguée (MOD)

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ANNEXE N°1 : Guides d'entretien

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1.1 Guide d'entretien avec le personnel

Dimensions

Contenu

Questions

Eléments de réponse

1/ Le contexte du changement : identifier les conditions déterminantes

1.1/ La

légitimité du changement

D'après vous, quelle est l'origine

de la transformation (Qu'est-ce
qui la justifie)?

 
 
 

Sur quoi porte le changement ou

quelles sont les dimensions

touchées par le

changement (structure, culture,

ressources, procédés,

procédures...)?

 
 
 

La transformation amorcée est-

elle pertinente (au regard des

objectifs, de l'environnement

concurrentiel, des besoins
internes...)?

 
 
 

Pensez-vous que les objectifs

visés par la nouvelle

règlementation seront

réellement poursuivis par l'Etat

(appel à concurrence, sélection
rigoureuse) ?

 

2/ Les acteurs du changement : enjeux et rôles déterminants

2.1/ Les enjeux et rôles

déterminants

Quels sont les enjeux perçus et

réels (suppression ou

augmentation de postes,
réduction ou augmentation des avantages, réorganisation...) ?

 
 
 

La nouvelle forme adoptée est-

elle avantageuse plus pour les

dirigeants ou le personnel ou

tout autre groupe
intéressé (Ministère, Mutuelle,...)?

 
 
 

D'autres formes juridiques

semblaient-elles plus indiquées

(pour assurer efficacement la

fonction économique tout en

maintenant l'équilibre des
pouvoirs) ?

 
 
 

Quel a été ou est le style de mise

en oeuvre (imposition,

participation, négociation,
coercition,...) ?

 

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Pensez-vous que les responsables de l'organisation ont une vision

claire de la transformation
amorcée ?

 
 
 

Quels sont les rôles joués ou que

pensez qu'il faille faire pour
réussir la transformation ?

 
 
 

Quelles sont les contraintes qui

s'imposent à vous (de façon
individuelle ou collective) ?

 
 
 

Quels sont les problèmes qui

peuvent miner le processus ?

 
 
 

Quelle stratégie avez-vous

adoptée (de façon individuelle
ou collective) pour accompagner la transformation ?

 
 
 

Si la concurrence est mise en

oeuvre, pensez-vous que

l'organisation conservera une
part importante du marché ?

 
 
 

Des opportunités d'affaires

s'offrent-elles à la nouvelle
structure ?

 
 
 

Assiste t-on à des menaces ou influence quelconque de la part des responsables?

 
 
 

Quelles sont vos perceptions

(attitude, comportement) sur ce
changement ?

 

3/ Les Effets du changement

 

Qu'est-ce qui change

véritablement pour vous ?

 
 
 

S'il y a eu changement, vous

adaptez-vous à cette nouvelle
situation ?

 

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1.2 Guide d'entretien avec les acteurs externes

Contenu

Questions

Eléments de réponse

Analyse de l'environnement

Qu'est ce qui motive la nouvelle réglementation ?

 

Pensez-vous que les objectifs visés par la nouvelle

règlementation seront réellement poursuivis par l'Etat (appel à concurrence, sélection rigoureuse) ?

 

Quels sont les enjeux de cette réglementation ?

 

Quel impact de cette réglementation sur les structures évoluant dans ce secteur ?

 

Quel est la spécificité de ce secteur (cas du BTP, des

ouvrages hydrauliques...) en terme d'obligation de
contrôle de qualité... ?

 

Quelle est la place des sociétés d'Etat, des sociétés

privées et des Associations d'utilité publique, ONG dans cet environnement?

 

Quelles sont les perspectives d'évolution du secteur de la maîtrise d'ouvrage déléguée ?

 

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ANNEXE N°2 : Présentation détaillée de l'Agence Faso Baara S.A

 
 

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L'AGENCE FASO BAARA S.A est la nouvelle forme juridique sous laquelle est gérée l'activité de maîtrise d'ouvrage déléguée depuis le 01 janvier 2012. Elle est une société anonyme avec conseil d'administration au capital de cinq cent millions (500.000.000) de francs CFA. Cependant, un regard rétrospectif permet de noter que l'Agence FASO BAARA fût créée sous la forme d'une association de droit privé à but non lucratif. En effet, elle a été créée en juin 1991 par arrêté N° 91/151/MAT/SG/DELPAJ du 17 Juillet 1991 par le Gouvernement du Burkina Faso avec l'appui de la Banque Mondiale pour l'exécution du Projet de Travaux d'Intérêt Public pour l'Emploi (TIPE) financé par l'Association Internationale de Développement (IDA, Groupe de la Banque Mondiale), l'Etat Burkinabè et la République Fédérale d'Allemagne (KfW). Mise en place dans un contexte de reformes et de restructuration de l'économie (Programme d'ajustement structurel), l'AGENCE FASO BAARA a expérimenté pendant vingt (20) ans l'exercice de la maîtrise d'ouvrage déléguée (MOD) dans le secteur du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP) en dehors des structures publiques de l'Etat.

L'AGENCE FASO BAARA S.A exerçe suivant quatre (4) principales modalités :

- la maîtrise d'ouvrage déléguée qui est la modalité pilote; - l'exécution de projet ou programme de développement ; - l'assistance aux maîtres d'ouvrage ;

- la conduite d'opérations.

La structure compte au 31 décembre 2012 un effectif de trente quatre (34) personnes aux profils suivants :

· Gestionnaires financiers ;

· Comptables ;

· Ingénieurs de génie civil ;

· Ingénieurs de génie rural ;

· Architectes ;

· Techniciens supérieurs ;

· Ingénieurs de travaux informatiques ;

· Agents d'appui (secrétaires, agents de liaison, chauffeurs...).

L'Agence comporte deux organes de gestion (le Conseil d'administration et la Direction Générale) et un organe de contrôle, l'assemblée générale.

Les services techniques, comités et commissions composant la Direction générale sont :

· la Direction Générale qui comprend : un (01) DG, une (01) Attachée de Direction, un (01) Conseiller Informatique, un (01) Archiviste et un (01) Agent de liaison. Pour la mise en oeuvre des activités de l'Agence, il a une structure d'appui qui est le Service Contrôle de Gestion et des Statistiques (SCGS) comprenant un Chef de service, un contrôleur de gestion, un chargé de production statistiques,

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· la Direction technique (DT) qui comprend un (01) Directeur Technique (DT), une (01) Secrétaire du Directeur Technique, une (01) Secrétaire de Direction du personnel de projets, trois (03) Chefs de Projets (CP), trois (03) Assistants Chefs de Projets (ACP), un (01) Agent de liaison et cinq (05) Chauffeurs.

· la Direction financière (DF) qui comprend : un (01) Directeur Financier (DF), une (01) Secrétaire du DF (SDF), un (01) Chef Comptable (CC), quatre (04) Comptables (CPT), un (01) Assistant Financier (ASF), une (01) Assistante Administrative (ASA) et une (01) Standardiste Réceptionniste.

· Les comités d'orientation et de gestion : le Comité de direction, le comité technique, le comité administratif, le comité informatique,

· Les Commissions spécialisées : La Commission d'Attribution des Marchés (CAM et la Sous-Commission d'Analyse et d'Evaluation des Offres (SCEO

Les maîtres d'ouvrage, clients de l'AGENCE FASO BAARA S.A sont :

· L'Etat burkinabé ;

· Les collectivités territoriales ;

· Le secteur privé ;

· Les institutions internationales.

Les prestataires de l'AGENCE FASO BAARA S.A sont les entreprises de travaux, les maîtres d'oeuvre (cabinets d'architecture et/ou d'ingénierie), les structures de contrôle technique, les fournisseurs et prestataires divers.

Au 31/12/2012, les principaux résultats enregistrés sont résumés comme suit :

Résultats atteints

Montant milliards FCFA)

(en
de

Montant mobilisé

 

370

Montant engagé

 

320

Montant travaux réalisés

 

300

Investissement sur fonds propres

 

1,3

Masse salariale distribuée

 

39

 

85

Résultats atteints

Nombre

Marchés attribués

7000

Prestataires

900

Emplois créés

241 000 (dont

6.000

permanents)

 

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Les réalisations par secteur d'activités donnent :

Secteur d'activités

 

Montant (en

milliards de

FCFA)

Éducation - Formation

 

123

Santé

 

69,9

Eau, aménagements hydro-agricoles

 

8,7

Commerce

 

24,5

Infrastructures administratives

 

42,3

Habitat et urbanisme

 

6,4

Élevage

 

1,3

Environnement

 

1,7

Transport (Routes, pistes,

urbaines,...)

voiries

24,9

 

L'AGENCE FASO BAARA S.A est une agence membre du réseau AFRICATIP (Association Africaine des Agences d'Exécution des Travaux d'Intérêt Public) créé le 21 Janvier 1993 à Ouagadougou pour promouvoir et faciliter les activités des Agences d'Exécution des Travaux d'Intérêts Publics (AGETIP) à travers le continent. Le réseau regroupe, au 31 décembre 2012, vingt (20) agences comme suit :

· ABUTIP (Burundi)

· ADETIP (Djibouti)

· ADU (Mauritanie)

· AGECABO (Cap Vert)

· AGEOPPE (Guinée Bissau)

· AGEROUTE (Côte d'Ivoire)

· AGETIER (Mali)

· AGETIP (Sénégal)

· AGETIP (Mali)

· AGETIPA (Madagascar)

· AGETIP-BENIN SA

· AGETIPE CAF (Centrafrique)

· AGETIPE (Guinée)

· AGETUR (Togo)

· AGETUR-BENIN SA

· AMEXTIPE (Mauritanie)

· ASSETIP (Rwanda)

· AGENCE FASO BAARA S.A (Burkina Faso)

· GAMWORKS (Gambie)

·

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NIGETIP (Niger)

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ANNEXE N°3 : Circulaire relative à la mise en oeuvre de la réglementation sur la Maîtrise d'ouvrage déléguée (MOD)

 
 

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