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Christianisation et résilience des cultes du terroir à  Vo-Koutimé en pays Ouatchi (XXè-XXIè siècle)


par Edoh Emmanuel BODJRO
Université de Lomé - Master 2020
  

Disponible en mode multipage

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République Togolaise Ministère de l'Enseignement

Travail-Liberté-Patrie Supérieur et de la Recherche

FACULTÉ DES SCIENCES DE L'HOMME ET DE LA SOCIÉTÉ (FSHS)

DÉPARTEMENT D'HISTOIRE ET D'ARCHÉOLOGIE

2018-2020

Mémoire N° ../

CHRISTIANISATION ET RÉSILIENCE DES CULTES DU TERROIR A VO-KOUTIMÉ EN PAYS OUATCHI (XXE-XXIE SIÈCLE)

Pour l'obtention du Master en :

Domaine : Science de l'Homme et de la Société

Mention : Histoire

Spécialité : Histoire et civilisation des peuples africains des origines à la conquête coloniale

Présenté par :

Édoh Emmanuel BODJRO

Soutenu publiquement, Le 28/12/2020

Composition du Jury de soutenance

Président du jury : Komla ÉTOU, Professeur Titulaire

Examinateur/juge : Dola Angèle AGUIGAH, Maître de Conférences

Directeur de mémoire : Azontowou SÉNOU, Maître de Conférences

Co-directeur de mémoire : Banabia LONGA, Maître Assistant

À

i

Mes parents Komlan BODJRO et Dawoedé KONDO.

ii

REMERCIEMENTS

Au terme de ce travail, nous tenons à témoigner notre profonde gratitude à notre Directeur de mémoire M. Azontowou Sénou, Maître de Conférences et à notre codirecteur M. Banabia Longa, Maître Assistant, tous au département d'Histoire, pour leur contribution et apport dans la réalisation de ce travail en dépit de leurs emplois du temps surchargés. Nous leur disons un sincère merci.

Nous remercions du fond du coeur le Professeur Komla Étou, ex-chef du département d'Histoire et d'Archéologie, pour ses conseils et encouragements.

Notre gratitude va également à l'endroit de tous les enseignants du département d'Histoire et d'Archéologie pour leurs apports dans notre formation.

Aux docteurs et doctorants du département d'Histoire et d'Archéologie qui nous ont, d'une manière ou d'une autre, aidés tout au long de notre cursus.

Un sincère merci à tous nos camarades de promotion, pour la qualité des relations que nous avons entretenues.

Nous témoignons notre gratitude à tous les informateurs, en l'occurrence le Chef Zouméké Akakpo II, M. André Tonou, au prêtre Ziowu Fovi Agbégnigan, au président de l'association de prêtres vodou Zikpui Ayondo, au curé et au vicaire de la paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé, à tous les adeptes du culte vodou ainsi qu'aux fidèles chrétiens de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé.

Un bienfait n'est jamais perdu ! Nous remercions M. Sodéglan Réné Folly, Directeur Général de l'entreprise FAFAGNO, spécialisé dans la vente des produits surgelés et congelés, pour son soutien financier salutaire tout au long de notre formation.

iii

SOMMAIRE

DÉDICACE i

REMERCIEMENTS ii

SOMMAIRE iii

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

Première partie : MISE EN PLACE ET PANTHÉON DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ

À L'ORÉE DE L'IMPLANTATION DES MISSIONS CHRETIÉNNES EN 1914 13

Chapitre 1 : LA MISE EN PLACE DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ 15

Chapitre 2 : ÉTAT DES LIEUX DE L'UNIVERS SOCIORELIGIEUX DES OUATCHI DE

VO-KOUTIMÉ AVANT 1914 25

Deuxième partie : IMPLANTATION ET EXPANSION DU CHRISTIANISME A VO-

KOUTIMÉ DU XXE AU XXIE SIÈCLE 36

Chapitre 3 : IMPLANTATION DU CHRISTIANISME À VO-KOUTIMÉ AU XXE SIÈCLE

38

Chapitre 4 : EXPANSION DU CHRISTIANISME À VO-KOUTIMÉ DÈS 1971 45

Troisième partie : RÉSILIENCE DU CULTE VODOU DES OUATCHI DE VO-

KOUTIMÉ DU XX AU XXIE SIÈCLE 53

Chapitre 5 : DYNAMISME DU CULTE VODOU À VO-KOUTIMÉ : LE CAS DU

VODOUKONOUGAN 55

Chapitre 6 : LES CHRÉTIENS DE VO-KOUTIMÉ FACE AUX CULTES VODOU : LE

SYNCRÉTISME 65

CONCLUSION GÉNÉRALE 73

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE 78

ANNEXES 84

TABLE DES ILLUSTRATIONS 86

TABLE DES MATIÈRES 88

1

INTRODUCTION GÉNÉRALE

2

Les sociétés africaines vécurent, au cours de leur histoire, des évènements de nature exogène ayant bouleversé des ordres préétablis au rang desquels figurent les religions importées, notamment l'islam et le christianisme. Au Togo, la diffusion de cette dernière (la religion chrétienne) remonte véritablement vers la fin du XIXe siècle, période au cours de laquelle les missionnaires catholiques de la Société du Verbe Divin (SVD) et de Brême s'implantèrent sur le littoral aujourd'hui togolais (S. Edoh, 2017, p, 101). Ceux-ci, après avoir sillonné les localités de la côte à l'instar de Porto-Séguro (Agbodrafo), Petit-Popo (Aného) et soucieux de gagner les âmes à Christ, parvinrent à pénétrer les localités du pays ouatchi, à l'instar de Vo-Koutimé1, notre zone d'étude.

Au cours du XVIIIe siècle, les Ouatchi de ladite zone constituèrent, au fur et à mesure que s'affirma leur processus d'implantation, les bases d'une société religieuse en se confiant à leurs divinités. Ainsi, détourner ce peuple de ses pratiques ancestrales devint pour les missionnaires ambitieux une tâche difficile, car les croyances et pratiques religieuses du terroir se sont enracinées dans leur mode de vie. J-B. Sourou (2009, p. 1), fait ce constat en ces termes :

La religion traditionnelle africaine exerce encore une forte influence sur les Africains qui sont naturellement religieux [...] si l'on veut répondre à la question : en quoi l'Évangile a-t-il quelque chose de nouveau à dire aux Africains, il est indispensable de connaître et d'apprécier les racines religieuses des peuples de ce continent puisque, selon la sagesse africaine, " c'est en enfonçant ses racines dans la terre nourricière que l'arbre s'élève".

C'est cet aspect d'ancrage des cultes du terroir au Togo que nous voulons aborder en choisissant le thème : « Christianisation et résilience des cultes du terroir à Vo-Koutimé en pays ouatchi (XXe-XXIe siècles) ».

Le choix de notre sujet répond à deux préoccupations. D'abord, en dépit des études scientifiques menées dans l'aire ajatado d'une part et d'autre part sur les Ouatchi de Vogan, de Hahotoé, d'Akoumapé, de Gboto, etc., traitant des questions de peuplement, de christianisation et des religions endogènes, la problématique de la résilience des cultes du terroir en pays ouatchi en général et à Vo-Koutimé en particulier n'a pas encore fait objet de recherches approfondies. À cet effet, notre travail pourra compléter les travaux antérieurs sur le pays ouatchi, consacrés à la christianisation.

Ensuite, le village de Vo-Koutimé connut l'avènement du christianisme dès 1914 avec les missionnaires catholiques qui furent suivis par les missionnaires presbytériens (1967) et les

1 Dans les documents de l'époque allemande, il s'écrivait Wokoutimé. Le « w » en allemand signifie « v » en français.

3

Assemblées de Dieu (1990). Mais la population n'a guère abandonné le culte vodou témoigné par la présence de différents couvents de divinités, de déités érigées soit à l'entrée des maisons, soit sur les places publiques (dulégba) ou à l'intérieur des concessions familiales dont l'ensemble forme le panthéon qui est dynamisé par la cérémonie du Vodoukonougan. Cet univers religieux ainsi décrit suscite des interrogations auxquelles nous ne pourrions répondre que par un travail scientifique bien fourni. Pour la population ouatchi en général et celle de Vo-Koutimé plus précisément, ce travail fera valoir leurs richesses ancestrales.

Les bornes chronologiques de cette étude, le XXe et XXIe siècles, ne sont pas fortuites. Cela étant, la première (XXe), correspond à la période d'avènement de la mission catholique au sein de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé en 1914 et la seconde, le XXIe siècle est marqué par autant d'évènements religieux du côté de l'Église Chrétienne que de la religion vodou. Concernant l'Église, elle correspond non seulement à la période durant laquelle l'Église catholique obtient son érection canonique en 2004 sous le nom de la Paroisse Marie Reine de l'Univers, mais aussi l'année 2014 de ce siècle marqua les cent (100) ans de leur présence au sein de la communauté de Vo-Koutimé. Du côté de la mission presbytérienne, arrivée dès 1967, elle célébra en 2017 ses cinquante (50) ans d'existence.

Par ailleurs, les prêtres vodou de Vo-Koutimé créèrent en 2010 une association désignée sous le nom de la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC) et fut reconnue par le Ministre de l'administration territoriale, de la décentralisation et des collectivités locales en 2013 (Annexe n° 1).

De ce fait, le XXIe siècle constitue une période phare dans l'histoire religieuse de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé.

Au terme de la présentation des bornes chronologiques, il importe d'exposer la problématique de notre thème.

Les Ouatchi de Vo-Koutimé, migrèrent ensemble avec l'ancêtre fondateur d'Akoumapé en la personne de Togbui Akouma auprès duquel ils auraient résidé pour un temps indéterminé avant de poursuivre leur périple pour atteindre Vogan qui fut leur dernière halte, où ils quittèrent pour élire domicile sur le site aujourd'hui désigné « Vo-Koutimé ». Leur installation en ce lieu, probablement dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, s'accompagna de la mise en place d'un ordre religieux où les déités du terroir régissaient le mode de vie quotidienne de la population. Ainsi, avec l'avènement du christianisme en 1914 et nonobstant

4

son avancée, la « Bonne Nouvelle » n'a guère détourné, ni les adeptes vodou ni les néophytes chrétiens du culte vodou. De ce constat, une question se dégage : comment peut-on expliquer alors la résilience des cultes du terroir chez les Ouatchi de Vo-Koutimé en dépit de la christianisation de la zone du XXe au XXIe siècle ?

Pour appréhender les contours de cette interrogation, il revient à en déduire d'autres. Nous devons d'ores et déjà signaler que les bornes chronologiques de notre étude ne constituent guère de barrière. Les Ouatchi de Vo-Koutimé feraient partie des migrants Éwé ayant quitté Notsè au XVIIIe siècle en prenant la direction du sud. Une fois sur leur nouveau site, ils auraient mis en place un système religieux dominé par le culte vodou. Nous nous posons donc la question de savoir : comment s'est faite la mise en place des Ouatchi sur le site de Vo-Koutimé et qu'est ce qui caractérise leur univers socioreligieux à l'orée de l'avènement des missions chrétiennes en 1914 ?

Les missionnaires, à partir de la côte, pénétrèrent l'hinterland immédiat en atteignant le pays ouatchi dont Vo-Koutimé. Avec un début mitigé, la christianisation connut une évolution considérable au fil des temps. Comment se sont faites l'implantation des missionnaires et l'expansion du christianisme à Vo-Koutimé du XXe au XXIe siècle ?

Les missionnaires ayant pour objectif de détourner la communauté ouatchi de Vo-Koutimé du culte vodou, jugé « satanique » à tort ou à raison se seraient heurtés à la ténacité des Ouatchi de Vo-Koutimé à tourner dos à la religion vodou. Qu'est-ce qui caractérise alors cet attachement indéfectible de ladite communauté aux cultes vodou du XXe au XXIe siècle?

Outre ce questionnement qui illustre les grands axes de notre mémoire, nous ne pouvons pas mettre sous silence les objectifs de notre thème d'étude. À travers cette étude, nous voulons montrer la persistance du culte vodou traduisant l'affection que témoignent les Ouatchi de Vo-Koutimé envers les croyances ancestrales malgré la diffusion du christianisme (XXe-XXIe siècles).

Pour cerner cet objectif d'ordre général, nous voulons, tout d'abord, remonter à l'origine des Ouatchi de Vo-Koutimé et présenter ensuite leur univers religieux avant l'arrivée des missionnaires en 1914. De plus, faire le point sur l'implantation et l'expansion du christianisme à Vo-Koutimé (XXe-XXIe siècles) et enfin, Montrer les faits qui témoignent le dynamisme du culte vodou auprès des Ouatchi de Vo-Koutimé (XXe-XXIe siècles).

Toutefois, pour mieux appréhender le sens de notre sujet, les vocables clés qui le composent méritent d'être élucidés.

5

Nous désignons par « christianisation2 » l'action de christianiser, de convertir à la religion chrétienne. Par rapport à notre thématique, ce vocable désigne la conversion des Ouatchi de Vo-Koutimé à la foi chrétienne.

Le mot « résilience3 » est la capacité d'un écosystème, d'un individu ou d'un groupe à se rétablir après une perturbation extérieure. À cet effet, dans le sens de notre thème, il souligne l'attachement des Ouatchi de Vo-Koutimé à leur culte vodou malgré les moyens de conversion au christianisme mis en place par les missionnaires.

Par ailleurs, le vocable « culte4 » désigne un hommage religieux rendu à une divinité. En d'autre terme, il signifie l'ensemble des pratiques réglées par une religion, pour rendre hommage à la divinité. Dès lors, son emploi dans le cadre de notre travail fait référence aux cérémonies dédiées à tous les vodou du terroir de Vo-Koutimé notamment Ziofu, Yoho, Gbe, Hébiésso, Agboe, Sagbata, Dan, Tron, Légba, Tohossou, Vénavi Togossou, Togbui zikpi5, etc. et plus précisément à la grande cérémonie du Vodoukonougan.

La désignation de notre zone d'étude, l'espace « Vo-Koutimé6 », n'est pas anodine. Nous faisons par-là, référence aux populations des quartiers d'Atchandomé, Kpota, Glopé, Mamissi, Soko, Agadi et leurs sous-quartiers dont leur ensemble forme le grand village Vo-Koutimé (cf. carte n°1).

Dans le cadre de la rédaction de notre mémoire, nous avons eu à consulter des sources d'ordre écrites à l'instar des thèses, mémoires, quelques ouvrages et des textes d'archives et des sources orales, notamment les traditions des informateurs.

Concernant les thèses, celle de N. L. Gayibor, (1985) l'aire culturelle ajatado des origines à la fin du XVIIIe siècle a retenu notre attention. L'auteur nous a présenté le groupe de population éwé dont sont issus les Ouatchi. Ainsi, les informations que contient ce document nous permettent de remonter à l'origine des Ouatchi de Vo-Koutimé au XVIIIe siècle. Cependant, concernant les questions spécifiques au panthéon, à la christianisation, l'auteur a donné une vue générale sur les communautés du sud Togo pouvant nous servir de base pour cette étude de cas.

2 Selon le dictionnaire Petit Robert 2008.

3 Dictionnaire Petit Robert 2008.

4 Dictionnaire Petit Robert 2008.

5 Confère le chapitre II : État des lieux de l'univers socioreligieux des Ouatchi de Vo-Koutimé au début du XXe siècle.

6 Carte n°1.

6

D'autre part, la thèse de doctorat de K. Étou (2006), dont le titre est l'aire culturelle Nyigblin (Togo-Ghana) du XVIIe à la fin du XIXesiècle, a traité l'univers religieux de cette zone. Ainsi, son apport pour notre travail est indéniable. Cette thèse nous permet de savoir comment les cultes du terroir sont ancrés dans le quotidien des populations de cette aire. Ces dernières faisant partie du même groupe de migrants que les Ouatchi de Vo-Koutimé ayant quitté Notsè, nous ne pouvons que nous inspirer de l'approche adoptée dans ce travail.

C. J. Alladayé (2003) dans sa thèse intitulée : Christianisation, interférences religieuses et implications politiques dans une société africaine : cas du Dahomey/Bénin (1860-1990), a abordé plusieurs aspects de notre thématique et en particulier la complexité de l'univers religieux. Étant donné que toutes les communautés du bas Togo, Bénin, Nigéria et Ghana ont cette spécificité qu'est le culte vodou, ce travail est digne d'intérêts dans l'étude de la religion endogène des Ouatchi de Vo-Koutimé.

N. W. Mayéda (2009), dans sa thèse titrée : Christianisation et mutation socioculturelle du Togo septentrional aux temps coloniaux : 1896-1960, a mis l'accent sur les facteurs ayant conduits à l'implantation et l'expansion du christianisme dans l'hinterland du Togo en dépit des pratiques ancestrales. Cette thèse nous a servi de référence dans nos différentes approches.

La thèse de A. Sénou (2010), traitant la question des migrations éwé et occupation du pays ouatchi du XVIIIe siècle à la conquête coloniale, dans laquelle l'auteur a pris soin de présenter les périples de divers groupes ouatchi aboutissant à la création des premières localités dans le pays ouatchi. L'étude de la fondation d'Akoumapé et de Vogan, dans cette thèse nous, a servi de pierre angulaire pour élaborer l'aperçu historique sur la mise en place des ancêtres sur le site du futur pays des Ouatchi de Vo-Koutimé.

S. Édoh (2017), dans sa thèse sur les missions chrétiennes et pouvoirs coloniaux en pays bè-togo du XIXe au XXe siècle, a exposé l'univers religieux de sa zone d'étude et analyse l'implantation et les oeuvres des missions chrétiennes au sein d'une communauté réputée dans le culte Nyigblin, tout en montrant la survivance de cette pratique en dépit de la ferveur des missionnaires. Ce travail constitue un document de base sur les questions de résilience du culte vodou chez les Ouatchi de Vo-Koutimé.

La thèse de K. Hato (2019) sur l'histoire, société et reconstruction identitaire chez les Ouatchi du Togo et du Bénin du XVIIIe au XXe siècle nous renseigne sur la question de l'ancrage des cultes du terroir dans les communautés ouatchi. Ainsi, elle occupe donc une place de choix dans notre thématique.

7

Si ces thèses ont plus traité des questions de peuplement et du panthéon, celle de E. D. Trimua (1979), intitulée l'Église évangélique au Togo de 1914 à 1940, nous a fourni des informations crédibles relatives à l'avènement de l'église presbytérienne dans les communautés ouatchi y compris Vo-Koutimé.

A. Kuadjo-Ayédéwou (1986) dans son étude sur la problématique de l'église chrétienne en Afrique, a mis un accent particulier sur les difficultés des missions d'évangélisation dues en grande partie aux pratiques syncrétistes des fidèles. Comme le pays ouatchi de Vo-Koutimé est fortement ancré dans les croyances ancestrales, il nous a permis de cerner le problème du mimétisme religieux qui reste d'actualité et qui endigue la ferveur des missionnaires.

En dehors de ces thèses consultées, quelques mémoires ont également fait l'objet de notre étude. Ainsi, le mémoire de A. Sénou (2002), traitant le thème : Origine et identité des Ouatchi de Gboto, nous a livré des informations sur l'origine, les péripéties du groupe de population ouatchi.

En outre, celui de K. A. Anatho (2013) portant sur la Christianisation et résilience de la religion endogène en pays guin (Togo/Bénin) de la fin du XVIIe au début du XXe siècle, l'auteur a, dans sa troisième partie, traité de la question de la résilience des cultes du pays Guin nonobstant le progrès du christianisme et nous sert également de référence dans ce travail de même type.

Quant aux ouvrages, nous avons fait recours à quelques-uns des auteurs comme K. Étou, B. Gilli, C. Rivière et A. de Surgy.

L'acte de colloque de K. Étou (2019) ayant pour titre : Christianisation et résilience des religions endogènes en Afrique (XIXe-XXIe siècle), était pour nous un document important dans la rédaction de notre travail. En effet, ce document aborde la problématique de la résilience des cultes du terroir dans les sociétés africaines. Alors, nous nous sommes inspirés de la démarche adoptée dans les différents articles qui le composent, tout en se servant de référence pour illustrer nos arguments.

B. Gilli (1976) dans son ouvrage intitulé : Hébiésso et le bon ordre du monde. Approche d'une religion africaine, a détaillé le vodou Hébiésso qui occupe le summum du panthéon des Ouatchi. Ainsi, il nous a fourni de détails, dans l'étude de l'univers religieux de la communauté Ouatchi de Vo-Koutimé où le vodou Hébiésso a une grande assise territoriale.

8

Par ailleurs, le même auteur (1982) a posé sa plume sur la thématique des naissances humaines ou divines, un ouvrage qui nous a livré des informations importantes afin de comprendre les circonstances et le sens de certains noms théophores qui sont courants dans le panthéon vodou des Ouatchi de Vo-Koutimé.

C. Rivière (1979), dans son opuscule intitulé : Anthropologie religieuse des Evé du Togo, l'auteur a détaillé les composantes de l'univers cultuel de l'ensemble de ladite communauté dont les Ouatchi de Vo-Koutimé en font partie. Dans notre étude sur le panthéon, ce document nous a permis d'adopter une classification, bien sûr personnelle, des différents vodou qui s'y trouvent.

A. de Surgy (2011) avec son ouvrage titré : le système religieux des Evhé nous a permis, dans l'étude de notre deuxième chapitre sur le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé de trouver la fonction et le sens de quelques vodou de notre zone d'étude.

En dehors de ces sources écrites, nous avons accordé une priorité aux documents d'archives publiques et privées. Nous avons effectué ces consultations à Lomé, Vogan et Vo-Koutimé. Il faut rappeler que toutes ces recherches menées à Lomé sont consacrées aux missions chrétiennes.

À Lomé, nos recherches documentaires des archives se sont effectuées, dans la maison des missionnaires Comboniens à Cacavéli, à la maison régionale des Sociétés du verbe divin (SVD) sise à Hédzranawoé, et au Bloc synodal de l'Église presbytérienne au Grand Marché (Lomé).

Chez les Comboniens, nous avons pu trouver des documents7 qui nous ont permis de retracer l'histoire des missionnaires Comboniens sur la Paroisse Saint Ferdinand de Vogan et à Vo-Koutimé et quelques informations fragmentaires sur l'arrivée du Pape Jean Paul II à Togoville en août 1985.

D'autre part, à la maison régionale des SVD, nous avons eu accès à quelques notes laissées par les missionnaires, les pionniers dans la christianisation des localités de l'hinterland immédiat de la côte du futur Togo à l'instar de Bè, Togoville, Vogan, et ses périphériques.

Au Bloc synodal de l'Église presbytérienne, nous avons eu accès aux registres des synodes et plus spécifiquement ceux couvrant la période de 1967 à 1979, dans lesquels nous avons trouvé les différents bilans de la commission chargée pour la christianisation du pays ouatchi.

7 A titre d'illustration : Témoins de l'évangile : la présence des Missionnaires Comboniens au Togo-Ghana-Bénin, les gens vous attendent : Missionnaires Comboniens au Togo et leur Cent-cinquantenaire (1867-2017).

9

Ils ont été pour nous des valeurs non négligeables pour la reconstitution de l'historique de l'église presbytérienne à Vo-Koutimé.

Les recherches documentaires que nous avions menées à Vogan, précisément aux dépôts d'archives du Diocèse d'Aného et sur la Paroisse Saint Ferdinand, nous ont permis d'avoir accès à de bribes informations, pourtant précieuses, pour la reconstitution de l'histoire de la christianisation des missions catholiques à Vogan et Vo-Koutimé.

En pays ouatchi de Vo-Koutimé, notre zone de recherche, les recherches documentaires ont été faites en deux volets.

Une partie est consacrée à la religion vodou où nous avons consulté les archives privées du chef Akoété Zouméke Akakpo, de André Tonou8 et du président de la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC) en la personne de Hun? Zikpui Ayondo. Grâce à ces archives, nous avions trouvé quelques images ou photos de la cérémonie du Vodoukonougan pour l'illustration de notre cinquième chapitre.

L'autre partie, sur les recherches traitant les questions des missions chrétiennes, les registres de baptêmes, de communions, de confirmations et de mariages de la mission catholique nous ont permis d'analyser l'évolution du catholicisme et de nous rendre compte de la sauvegarde des noms théophores (Vodou).

En outre, nous avions trouvé leur quarantenaire et quelques notes retraçant, à leur manière, l'histoire de la mission.

Convaincu de l'importance des traditions orales dans les démarches scientifiques en histoire, nous avions, en dehors de ces sources, fait un travail de recueil d'informations pendant une durée de quatre mois auprès des personnes avisées notamment les autorités politiques, les prêtres vodou, les chefs de familles, responsables des différentes églises, les adeptes vodou, les fidèles chrétiens, etc. dans les localités de Atchandomé, Mamissi, Soko, Kpota, Glopé, Agadi, Vogan, et Lomé, reposant sur l'origine des ancêtres fondateurs du pays ouatchi de Vo-Koutimé ; les pratiques cultuelles, notamment la cérémonie du Vodoukonougan et des informations relatives aux missions de christianisation et la résilience du culte vodou, etc.

À toutes ces sources écrites comme orales, nous avions appliqué une méthodologie appropriée.

8 Président du comité cultuel de Vo-Koutimé.

10

Aux documents écrits, nous avions préféré la méthode quantitative qui nous a permis de regrouper les divers documents ayant trait à un des sous-thèmes de notre thématique afin de confronter les diverses informations véhiculées et pour en donner enfin une crédibilité. Toutefois, les informations recueillies sur le terrain nous permettrons de confirmer ou d'infirmer par moment ces écrits.

Concernant le traitement des traditions orales, nous avons adopté une méthodologie particulière. Nous avons effectué un pré enquête sur le terrain afin de déterminer les informateurs potentiels sur la thématique de notre travail.

Au cours du travail proprement dit, après les entretiens de groupes nous avons par habileté ciblé des informateurs avec qui nous avons eu des rencontres privées pour plus de précision sur quelques aspects. Toutes les informations recueillies soit en groupe ou en entretien privé ont fait objet de confrontation pour vérifier leur degré de véracité.

Aucune recherche scientifique n'est épargnée de difficultés, toutefois nous avions pu les surmonter.

La particularité de cette année (2020) avec la pandémie de Corona virus disease (COVID-19) a été notre difficulté majeure. En effet, les mesures prises par les autorités afin d'endiguer la propagation particulière de cette pandémie, spécifiquement le bouclage des villes, l'interdiction des rassemblements, etc. ont affecté nos recherches. Les recherches documentaires prévues dans quelques centres à Lomé se sont heurtées au refus des responsables des institutions surtout privées.

Par ailleurs, les informateurs, par crainte d'être contaminés, ont soit annulé des rencontres ou reporté à des dates ultérieures. Aussi, la grande cérémonie du Vodoukonougan, qui fait objet d'un sous-thème de notre travail, a été reportée pour les trois ans à venir par les autorités cultuelles.

Ainsi, pour répondre aux questions sur cette cérémonie, nous nous sommes contentés des photos et des sources orales.

Par ailleurs, les Ouatchi de Vo-Koutimé, population majoritairement d'agriculteurs, étaient pris dans leurs travaux au point que certains rendez-vous ont été reportés.

En dehors de cette difficulté, nous avions déploré la rareté des documents sur la paroisse de l'église catholique de Vo-Koutimé et surtout sur la mission presbytérienne. Mais nous les avions comblées par les traditions orales.

11

Notre travail répond se présente à trois parties dont chacune comporte deux chapitres. La première partie intitulée : mise en place et le panthéon des ouatchi de Vo-Koutime à l'orée de l'implantation des missions chrétiennes en 1914, est structurée en deux chapitres que voici : La mise en place des Ouatchi de Vo-Koutimé ; Etat des lieux de l'univers socioreligieux des Ouatchi de Vo-Koutimé avant 1914. La deuxième partie est l'implantation et expansion du christianisme à Vo-Koutime du XXe au XXIe siècle, composé des chapitres comme, Implantation du christianisme à Vo-Koutimé au début du XXe siècle ; Expansion du christianisme à Vo-Koutimé dès 1971. Enfin la troisième partie qui s'articule autour de la résilience du culte vodou à Vo-Koutime du XXe au XXIe siècle, se subdivise en deux chapitres dont : Dynamisme du culte Vodou à Vo-Koutimé : le cas du Vodoukonougan ; Les chrétiens de Vo-Koutimé face aux cultes Vodou : le syncrétisme.

Carte n°1 : L'espace ouatchi de Vo-Koutimé

12

Source : E. E. Bodjro, 2020

13

Première partie :

MISE EN PLACE ET PANTHÉON DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ
À L'ORÉE DE L'IMPLANTATION DES MISSIONS CHRETIÉNNES EN

1914

14

Le peuple ouatchi de Vo-Koutimé, au cours de l'exode de Notsè, ferait partie du groupe de migrants éwé ayant pris la direction de sud vers la mer. Une fois sur leur site actuel, après plusieurs pérégrinations, la communauté ouatchi de Vo-Koutimé mettait en place une organisation religieuse marquée par le culte vodou. Ainsi, remonter aux origines de ce groupe de population, à l'entame de notre étude, et présenter son univers religieux constituent les deux volets de cette partie. Pour y parvenir, deux interrogations se dégagent : comment s'est constitué l'espace ouatchi de Vo-Koutimé ? Qu'est-ce qui caractérise la religion du terroir ? Ainsi, nous allons, dans le premier chapitre, parler de la mise place des ouatchi de Vo-Koutimé et dans le second chapitre, aborder leur univers socioreligieux.

15

Chapitre 1 :

LA MISE EN PLACE DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ

Les Ouatchi sont l'un des groupes de populations éwé ayant quitté Notsè en prenant la direction du sud vers la mer. Ils sont dominés par les Dogbo et les lignages apparentés, sous la conduite de Wenya et de son neveu Sri. De ce groupe d'ethnie ouatchi, sortira un sous-groupe du nom Vo, qui aurait quitté Akoumapé pour fonder Vogan. De leur expansion à partir de ce village, naîtraient les villages de Vo-Koutimé, Wogba, etc. (R. Pazzi, 1979, p. 116). Ainsi, l'histoire des Ouatchi de Vo-Koutimé serait intrinsèquement liée à celles d'Akoumapé et de Vogan. Face à cette donne, quel aperçu historique peut-on faire de ces deux localités ? Comment s'est effectuée l'occupation de l'espace ouatchi de Vo-Koutimé ? Enfin, quelles étaient leurs organisations sociopolitique et économique ? Le présent chapitre s'articulera autour de ces trois axes.

1.1. Aperçu historique des Ouatchi d'Akoumapé et de Vogan

Akoumapé et Vogan sont les uns des villages de première génération fondée sur l'espace ouatchi par les migrants venus de Notsè, d'où seraient partie la majorité des ancêtres fondateurs de plusieurs localités du pays ouatchi en occurrence le futur Vo-Koutimé (K. Hato, 2019, p. 68)

1.1.1. Brève histoire sur les Ouatchi d'Akoumapé

Akoumapé, territoire limité au nord-ouest par la préfecture de Yoto, au nord-est par le canton de Dagbati, au sud par le canton de Sévagan et à l'ouest par le village de Hahotoé, est situé sur le plateau de Vogan-Attitogon, une partie de la zone des plateaux de la terre de barre (E. S. N'tsoukpo, 2011, p. 9).

Le peuplement d'Akoumapé remonte aux origines du peuple éwé qui, au XVe siècle, a fondé la cité État de Notsè après leur départ d'Oyo à Tado en passant par Kétu (N. L. Gayibor, 1985, p. 301-317). En effet, à Tado, au début du XVe siècle, se déroulèrent d'importantes migrations, dont les causes sont soit rattachées aux conflits politiques relatifs à la succession au trône, soit à la recherche d'espace vital, aboutissant à la fondation d'Allada (au sud-est) et de Notsè (à l'ouest) (N. L. Gayibor, 2011, p. 485).

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Cependant, près de deux siècles plus tard passés dans la cité État de Notsè, au XVIIe siècle, le peuple fuyant les exactions du roi Agokoli se dispersa sur toute la partie sud du territoire aujourd'hui togolais et de la Gold Coast (actuel Ghana). En effet, une fois sortis de la ville, les fugitifs auraient pris la même direction jusqu'à Gamé et de là, ils se séparèrent en trois groupes dont l'un prit la direction du sud, vers la mer (N. L. Gayibor, 2011, p. 529).

Parmi ceux-ci se trouvait le futur fondateur d'Akoumapé, l'ancêtre Akouma. Selon E. S. N'tsoukpo (2011, p. 11), « une partie du peuple sous la conduite des ancêtres Akouma, Gligoé, Assiobo, Akatsè, et Agboh se dirigea vers le sud-est du Togo et s'installa en un endroit dénommé « Akoumapé » (chez Akouma) du nom de l'aîné du groupe, Akouma ».

A contrario, sur la fondation du village d'Akoumapé, N. L. Gayibor (2011, p. 534) soulève une version faisant des ancêtres Agna et Gnado, les fondateurs du village suivant l'itinéraire : Notsè-Amakpapé-Tchékpo-Nyimabio-Akoumapé.

Toutefois, le nom de l'ancêtre Akouma qui s'est imposé au village ne serait dû qu'à sa réputation de grand chasseur, craint de tout le monde et qui soumettait tout le peuple à son autorité. Il devint chef en faisant du village, sa maison (E. S. N'tsoukpo, 2011, p. 15).

Craignant une nouvelle dictature à l'image de celle vécue à Notsè sous Agokoli, une frange de population d'Akoumapé, dont ferait partie le futur fondateur du village de Vo-Koutimé, migra plus à l'est donnant naissance à Vogan, localité située à environ quinze kilomètres d'Akoumapé. Que peut-on dire alors de l'histoire de cette localité ?

1.1.2. Historique des Ouatchi de Vogan

Les Ouatchi de Vogan, comme nous l'avions effleuré plus haut, sont du groupe ethnique des Vo ayant émigré de Fenyi, sous la conduite de l'ancêtre Akouma (fondateur d'Akoumapé) (R. Pazzi, 1979, p. 116). Quelques années plus tard, les ancêtres Assiobo, Akatsè et Agbo poursuivirent leur marche vers l'est, jusqu'à s'établir sur le site appelé aujourd'hui Vogan en se proclamant « enfin libre pour vivre » et faisant probablement allusion aux évènements malheureux qui ont jalonné leur pérégrination depuis Notsè (A. Senou, 2010, p. 106).

Par ailleurs, N. L. Gayibor (2011, p. 532) relate une autre version sur l'origine des Vo en ces termes:

Des informations fournies par Kalipé II, il ressort que les Vo auraient cheminé de concert avec les Anlo, sous la conduite de leurs ancêtres Assionbo, Draké, Dengblé, Dado, et Pédo. Après une halte à Agbélouvé, ils bifurquèrent vers le sud-est et, après avoir franchi le Haho, s'installèrent en un lieu dénommé Apédomé, d'où ils vinrent s'installer à Adjrigo, le quartier du chef, à partir duquel furent créés tous les villages Vo.

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Néanmoins, avant l'arrivée des Vo, le site était habité par une minorité de populations (un clan éwé). En effet, au cours d'une activité de chasse, l'ancêtre Assiobo et ses frères tombèrent sur un vieillard aux cheveux longs. Ils décidèrent alors de le coiffer. Au cours de leur besogne, il se pourrait que le vieil homme ait sa tête pleine de poux, qui se désigne dans leur jargon « yo ». Ils surnommèrent ainsi le vieux yoxo, « chambre ou demeure de poux » (A. Senou, 2010, p. 107).

Les Vo s'imposèrent très vite à ce groupe et conquirent la chefferie. Le village prit alors leur nom « Vogan ». Ce toponyme, constitué de « Vo » (le nom de l'ethnie) veut dire libre et « gan » signifie sain ou sauve (A. Magbo, 2012, p. 13).

D'autres vagues de migrants ouatchi vinrent s'ajouter à eux plus tard et fondèrent les quartiers de Bame, Sagada, Sopé, Amoindji, etc. et des groupes Xweda qui s'installèrent à Amoindji Xwedakome (A. Senou, 2010, p. 107).

De la fondation de Vogan, naîtra plusieurs autres villages ouatchi dans son hinterland immédiat en occurrence le village de Vo-Koutimé (notre zone d'étude). Comment ce sous-groupe ouatchi a-t-il occupé l'espace vo-koutimé ?

1.2. De Vogan à l'occupation de Vo-Koutimé

Notre travail sur l'occupation de Vo-Koutimé s'est reposé sur le recueil des traditions orales. En effet, selon le mot du Chef Togbui Akouété Zouméké Akakpo II9 :

Le fondateur de notre village est l'ancêtre Togbui Kotokou qui aurait migré ensemble avec le vieux Akouma jusqu'à Akoumapé. Plus tard, le vieux Kotokou reprit le chemin et parvint chez ses cousins à Vogan où il résida pour un temps indéterminé dans le quartier Bamé avant de venir élire domicile sur le site aujourd'hui Vo-Koutimé.

André Tonou10 de son côté relate :

Les mauvais traitements du roi Agokoli à l'encontre de son peuple les poussèrent à quitter la cité de Notsè. Ainsi, au cours de leur migration, le vieux Kotokou, le futur fondateur de Vo-Koutimé, aurait fait chemin ensemble avec Akouma. Ce dernier devint fondateur et chef d'Akoumapé, un village de son nom. Kotokou passa quelque temps là et continua le chemin avec ses cousins de Vogan où il résida. Mais toujours habitué au déplacement, le vieux parvint à fonder lui aussi un futur village du nom de Vo-Koutimé.

9 Entretien du 15 mars 2020 au palais du Chef Canton à Vo-Koutimé, 76 ans.

10 Conseiller du parti UNIR dans la commune Vo 1. Entretien du 22 juillet 2020 dans son domicile à Vo-Koutimé, 70 ans.

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Les traditions ci-dessus ont été considérablement influencées par les récits populaires des éwé qui font d'Agokoli un tyran. Or, la migration du groupe de migrants ouatchi de Notsè remonterait à quelques années plus tard du grand exode et serait due au manque de terres cultivable dans la cité de Notsè.

En dehors de ces traditions et tant d'autres, toutes sont unanimes autour de la fondation du village par Kotokou. Quelles sont les raisons qui l'auraient poussé à choisir ce site parmi tant d'autres ? Et pourquoi le site se fit appeler « Vo-Koutimé » ?

1.2.1. Les raisons du choix du site et le toponyme « Vo-Koutimé »

L'occupation du site et le nom qui lui est attribué ne sont pas anodins. Des caractéristiques géographiques de la zone auraient motivé le vieux Kotokou à y rester.

En effet, le site du futur village de Vo-Koutimé est situé au bord de la rivière Boko permettant la présence d'une forêt longeant de part et d'autre ses abords. Une zone de cette envergure permettrait l'abondance de gibiers.

Nous comprenons, alors que la zone serait propice à la chasse. André Tonou11 affirme en ces propos : « Le vieux Kotokou, quelques années plus tard, à la recherche de produits de chasse, trouve un lieu très giboyeux. Il alla à Vogan ramener ses parents ».

Les avantages de ce cours d'eau ne sauraient se limiter qu'à la chasse. La rivière a été pendant longtemps la source d'approvisionnement en eau pour les Ouatchi de Vo-Koutimé avant la creusée d'un puits, le premier dans la zone, dans le quartier Wuikpokopé par les Allemands pendant la colonisation.

Par ailleurs, le fondateur serait sans doute à la recherche d'un endroit où il sera libre de tous soubresauts. Étant donné qu'après le départ des Éwé de Notsè, les conducteurs des groupes ont pour objectif la recherche d'une idéale liberté.

L'agriculture aurait joué un rôle important dans la venue des prédécesseurs de Togbui Kotokou. Ainsi, selon N. L. Gayibor (1992, p. 230), « Vo-Kutimé, Vo-Ative, Vo-Asso, etc. étaient tous des fermes de cultures qui se sont par la suite étendues ». Alors la volonté de rester plus proche des champs aurait conduit les ancêtres à résider sur le site de Vo-Koutimé.

Le toponyme « Vo-Koutimé » en dit suffisamment sur cette dernière raison. « Vo-Koutimé » est composé de deux vocables : « Vo » le préfixe qui signifie « liberté » est le nom de l'ethnie Vo à laquelle appartenait Kotokou. Le radical « Koutimé » désigne « y mourir ». Alors, le

11 Entretien du 22 juillet 2020 à Vo-Koutimé, 70 ans.

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fondateur ajouta à ce radical « Vo » faisant ainsi appeler le milieu « Vo-Koutimé » qui veut dire « y mourir dans la liberté ». Il donna ce nom lorsqu'un jour ses frères de Vogan, au cours d'une visite, lui ont demandé de venir rester avec eux. Il leur répondit : « vous êtes à Vogan (libre et sauve), moi je suis libre et je vais mourir ici12 ».

Le site de Vo-Koutimé ne se résuma pas à son lieu originel. Il connaîtra une véritable extension.

1.2.2. L'extension du village

Dès l'arrivée, le vieux Kotokou construit son habitat auprès d'un anacardier « Atchanti » sous lequel il se reposait lors des campagnes de chasse avant son installation. De cet arbre, dérive le nom à ce premier quartier Atchandomé « sous l'anacarde ». Le rejeton de l'historique arbre, véritable lieu de mémoire, est encore de nos jours sur pied. Comme le montre la photo ci-dessous.

Photo n°1.1 : Le rejeton de l'historique anacardier des Ouatchi de Vo-Koutimé

Source : cliché E. E. Bodjro (24/07/2020).

Toutefois, aucune trace de présence ancienne d'un quelconque groupe de population n'a été signalée. Plus tard, Kotokou reçut d'autres migrants qui sont soit ses cousins ou soit ses oncles auxquels il céda des parcelles. Ils créèrent de nouveaux quartiers qui sont au nombre de cinq (5) en occurrence Mamissi fondé par le vieux Agbodi (cousin à Kotokou), Glopé du vieux Agahoun (oncle à Kotokou), Kpota de l'ancêtre Egun (aussi cousin à Kotokou), Soko

12 Information recueillie auprès de Kokouvi Amouzou, 65 ans, Géomancien à Vo-Koutimé, le 23 juillet 2020.

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de Edoue (également cousin à Kotokou) et enfin Agadi fondé par l'ancêtre du même nom Agadi13.

Tous ces quartiers, en plus de l'ancien, sont attenants dont l'ensemble forme le village. Il est alors clair que le fondateur s'est entouré de ses proches.

Par ailleurs, certains descendants de ces six (6) ancêtres fondèrent de nouveaux quartiers du même nom que les anciens à environ deux (2) à cinq (5) kilomètres les uns des autres et du village mère, désignés sous le nom commun « Agblédi » (ferme agricole). Ainsi, la recherche des terres arables pour l'agriculture sera un facteur principal de leur création. Au fil du temps, ces nouveaux quartiers connurent une évolution démographique aussi remarquable que celle du village matriciel.

En outre, l'avènement du chef Akakpo I (un yovo fio14 ) aurait contraint d'autres populations du village d'origine à aller rejoindre les siens dans les fermes. En effet, au cours de la colonisation française, il fut un allié de taille dans la circonscription d'Aného. Il obéissait à la lettre aux ordres du chef de circonscription surtout quand il s'agit de veiller à la collecte des impôts ou d'offrir des travailleurs forcés. Il appliquerait une rigueur sans distinction. Ainsi, pour riposter contre ce système, les siens quittèrent le village mère pour s'installer définitivement dans leurs nouveaux quartiers en créant des sous-quartiers15.

Ils devinrent ainsi de nouveaux villages au point que certains d'entre eux comme Mamissi, Glopé, Atchandomé et Soko, eurent avec la décentralisation, des Chefs de village. L'ensemble de tout ceci forme le grand village des Ouatchi de Vo-Koutimé (Carte n°1).

À quand remonte alors l'occupation de cet espace ?

1.2.3. Essai de périodisation

Les traditions des Ouatchi de Vo-Koutimé ne se souvinrent guère de la date effective d'occupation du site, car les détenteurs des sources orales ont rejoint leurs ancêtres. À cet effet, nous tenterons de situer cette occupation en nous reposant, d'une part, sur la liste généalogique des fondateurs de deux quartiers notamment celle du vieux Kotokou d'Atchandomé et de l'ancêtre Egun de Kpota et, d'autre part, sur les écrits reposant les Ouatchi d'Akoumapé et de Vogan. Quand bien même que nous doutons de la fiabilité des généalogies ci-dessous, par faute d'absence d'un travail archéologique qui pouvait nous

13 Koulékpato Djokoto, 87 ans, doyen de la famille Djokoto, entretien du 20/07/2020 à son domicile à Atchandomé.

14 Nommé par les administrateurs français en 1919.

15Abotsi Miwonunyi Hubert, 70 ans, ingénieur retraité. Entretien du 24/07/2020 à son domicile à Vo-Koutimé.

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donner plus de précision, nous ne pouvons que s'en contenter. Alors, parlant de la généalogie de Kotokou et de Egun, elles se présentent comme suit16 :

Généalogie

(Atchandomé)

de Kotokou

 

Généalogie

de Egun (Kpota)

Egun

Kotokou

 
 
 

Assagba

Djokoto

 
 
 

Midonou

Agboglo

 
 
 
 

Nouwaga

Apetovi

 
 
 
 

Fovi

Adelan

 

Houindolo

Gatri

Amouzou

Sruikpè

Sakpo

 
 

Koudjodji

De ces deux généalogies, nous ressortons chacune huit générations. En prenant alors la durée moyenne de 30 ans par génération à cause de la patrilinéarité de la société et en posant le calcul suivant : 2020- (30x8) qui donne 1780, nous pouvons dire à cet effet que les ancêtres

16 Koulékpato Djokoto, 87 ans, doyen de la famille Djokoto. Entretien du 07/03/2020, à Kpota, à son domicile.

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ouatchi de Vo-Koutimé occupaient le site actuel probablement dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Par ailleurs, Akoumapé aurait été fondé vers la fin du XVIIe siècle ou au début du XVIIIe siècle (E. S. N'tsoukpo, 2011, p. 14). Quant à ce qui concerne Vogan, si leurs ancêtres fondateurs ont quitté Akoumapé sous le chef Akouma, le premier sur la liste de la dynastie royale, ils auraient sans doute fondé Vogan à la même période qu'Akoumapé, c'est-à-dire au début du XVIIIe siècle. Alors, le vieux Kotokou, fondateur de Vo-Koutimé, aurait quitté de Vogan, dans la première moitié du XVIIIe siècle, pour mettre pied sur le site au cours de ses activités de chasse, puisque les chasseurs d'autrefois faisaient des jours avant de retourner au bercail. Nous pouvons, à cet effet, supposer que son installation définitive à Vo-Koutimé remonterait à la seconde moitié du XVIIIe siècle.

De son extension, le village connaîtra une organisation sociopolitique et économique un peu particulière.

1.3. L'organisation sociopolitique et économique des Ouatchi de Vo-Koutimé

À la différence de l'organisation sociopolitique qu'ont connue les Éwé avant leur exode de Notsè, les migrants, sur leurs sites, évitèrent la concentration du pouvoir dans les mains d'une seule personne craignant ainsi une nouvelle dictature.

A cet effet, à Vo-Koutimé, la société est hiérarchisée tant au niveau du village, des quartiers, qu'à celui des lignages ou familles.

Le chef du village occupe le sommet des couches sociales. Il est le détenteur des pouvoirs politiques et doit régner conformément selon la volonté des ancêtres. Car de son choix jusqu'à son intronisation, il se fiait à la volonté des ancêtres. Il règle les litiges, juge et condamne selon la gravité des fautes. Il se fait entourer des notables qui sont des représentants directs du chef de village et exécutent les ordres qui émanent de lui. La particularité de ces notables, à Vo-Koutimé, est que compte tenu de l'extension du pays, dans le village matriciel, tous les six (6) quartiers mères ont à leur tête un notable « Tchami » auprès du chef de village, mais qui sont encore considérés comme des chefs de quartier dans certaines circonstances. À la tête des quartiers d' « Agblédi », se trouvent encore des « Tchami » travaillant à la fois avec le chef du village, mais aussi avec le « Tchami » de leur quartier d'origine. Avec l'évolution que connurent les « Agblédi », certains obtiennent une large indépendance vis-à-vis du chef de

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village mère en devenant un village entier avec à leur tête un chef et seul le culte vodou les réunissait à l'occasion.

À la tête de chaque lignage ou famille, se trouve un chef appelé le « foméfia ». Celui-ci se charge des libations et des sacrifices aux ancêtres. Souvent, il tient à ce que les problèmes du lignage ou de la famille se règlent à l'interne.

Pour ce qui concerne l'économie, la principale activité repose sur l'agriculture. Même si l'ancêtre fondateur, Kotokou, s'adonnait à la chasse, les siens, par contre, sont de véritables laboureurs. À l'instar de tout le peuple ouatchi, la production du maïs et du manioc sont les produits de référence. Au sein de la société, on ne mérite des réputations qu'en fonction de l'espace cultivé et du rendement de ses moissons. Quant au commerce, les Ouatchi de Vo-Koutimé n'atteignent pas la renommée des Guin. Toutefois, à Vo-Koutimé, se trouvait, dans le passé, un important marché situé au bord de la rivière Boko dans l'actuel village d'Atchandomé. Ce marché, selon nos informations, aurait autrefois servi d'un lieu de traite où les négriers venaient en pirogue en passant par le lac Togo pour atteindre la rivière Boko. Des études pourraient nous en apporter plus de détails17.

En dépit de la présence de cette rivière, la pêche est quasi inexistante due à l'absence de véritables produits halieutiques.

En dehors de l'organisation sociopolitique et économique, le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé renfermerait des dieux, « vodou » caractérisant leur pratique cultuelle.

17 Miwonunyi Hubert Abotsi, 70 ans, ingénieur retraité. Entretien du 24/07/2020 à son domicile à Vo-Koutimé.

Carte n°2 : Itinéraire migratoire des Ouatchi de Vo-Koutimé

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Source : E. E. Bodjro, 2020

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Chapitre 2 :

ÉTAT DES LIEUX DE L'UNIVERS SOCIORELIGIEUX DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ AVANT 1914

Toutes les sociétés en Afrique sont naturellement religieuses. Les Éwé, depuis leur origine jusqu'à l'exode de Notsè, croyaient en des forces de la nature dont ils en font des dieux, le socle de l'unité sociale, même si le système religieux des Fon (Dahomey) emprunté en partie à celui des Yoruba a gagné leur monde (C. Rivière, 1978, p. 28). Ainsi, dans les habitats fondés dans le sud-est du pays éwé, les Ouatchi mettaient en place le prototype de leur religion d'origine avec quelques particularités par endroits.

Ainsi, les Ouacthi de Vo-Koutimé, dès leur mise en place, accordaient une grande dévotion à une multitude de dieux « vodou » caractérisant la richesse de leur panthéon. Comment se présente cet univers de dieux ? Quel est le degré d'enracinement du culte vodou dans la société ?

2. 1. Le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé

Le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé regorge une diversité de vodou qui assurent le rôle des porte-paroles entre leurs adeptes et Mawu, l'équivalent de Dieu.

2.1.1. Mawu (Dieu suprême)

Les communautés éwé, tout comme les Ouacthi, placent au summum de la hiérarchie des dieux, Mawu. « Puissance initiale et créatrice, quintessence énergétique de l'univers, Mawu est désigné par les Éwé comme le Dieu suprême et insurpassable en ce qu'il commande toutes les divinités, aux ancêtres et aux hommes » (C. Rivière, 1978, p. 18).

Tout prêtre vodou, à Vo-Koutimé, commence sa prière ou sacrifice en s'adressant en premier lieu à Mawu la tête levée vers le ciel, la résidence inatteignable des êtres vivants, souvent en ces mots « Mawugan, Mawu Sogbolissa mi yo » (Dieu le tout puissant nous t'implorons). Il termine selon les termes de C. Rivière (1978, p. 20) « Tout réussira pourvu que Mawu jette la main dedans ».

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Les noms théophores faisant référence à Mawu sont monnaies courantes à Vo-Koutimé, comme ailleurs. On peut citer notamment Mawuli, Mawuko, Mawuena, etc. du genre masculin et pour le genre féminin on trouve Mawussi, Mawulawoe, etc. ou d'autres désignant à la fois l'homme et la femme comme Mawuto, Mawugno, etc. En dépit de ces allégeances, à Vo-Koutimé, l'on ne peut atteindre Mawu qu'à travers les vodou qui sont leurs intermédiaires. Ils font recours à plusieurs que nous classons en mettant en tête les Togbui vodou. Toutefois, il n'existe pas une classification figée, tout dépend du point de vue de l'observateur.

2.1.2. Les Togbui vodou et leurs demeures à Vo-Koutimé

Les vodou, classés dans la catégorie des Togbui vodou, ont à Vo-Koutimé des caractéristiques qui leur sont spécifiques. En effet, ces vodou à la différence des autres, n'ont pas d'adeptes propres. Initialement, le fondateur du village est le chef de tous les clans dont il a autorisé l'occupation des terres à proximité. Ainsi, ces nouveaux venus sont contraints de se placer sous la protection du dieu propriétaire de terre (C. Rivière, 1978, p. 34).

Étant donné qu'ils constitueront un héritage des ancêtres fondateurs, tous leurs descendants en sont héréditairement adeptes. Ceci voudra dire que tous les Ouatchi de Vo-Koutimé obéissent à la fois aux interdits relatifs à Togbui Ziowu, à Togbui Yoho et à Togbui Gbe qui sont les trois et uniques dieux au rang des Togbui vodou.

Cependant, leur appartenance à la même catégorie ne les confère guère les mêmes pouvoirs. 2.1.2.1. Togbui Ziowu et le Ziowuvé

Togbui Ziowu est le Togbui vodou le plus réputé. Il joue un rôle important dans la bonne marche de la communauté. Il est le garant de la sécurité, il amortit les mauvais sorts, les malheurs de tous genres. Toute personne à la recherche de travail, d'un enfant, d'une promotion, bref des biens, lui fait des promesses par le biais du Tron nu, son prêtre-officiant, et a l'obligation de les respecter après satisfaction. Faute de quoi, les malheurs frapperont à sa porte. Appartenant à une communauté essentiellement agricole, il est le faiseur de pluie18.

Ainsi, lorsqu'il ne pleut pas au cours d'une saison des champs, le Tron nu, se fait accompagner par des sages et quelques vaillants cultivateurs, pour sarcler la terre sèche et puis semer. Trois jours plus tard, il peut « Maglo mada ».

Le Tron nu, méconnu du grand public, est exonéré de plusieurs activités. En effet, il lui est interdit d'aller au champ, il ne sort qu'en des circonstances particulières souvent lors de la

18 Zikpui Ayondo, 76 ans, président de l'association des prêtres vodou à Vo-Koutimé. Entretien du 15/03/2020 à Vo-Koutimé.

grande cérémonie des vodou en pagne blanc « Aklala ». Il est le représentant direct des ancêtres quand il s'agit des questions du culte vodou. Libre de se marier, sa femme ne doit en aucun cas transporter quoi que ce soit sur la tête ni aller au champ ni au puits.

Comme dans toute société religieuse, le Tron nu a un droit de regard dans la gestion de la chefferie. En effet, l'intronisation de tout chef doit d'abord passer par son aval où il s'occupe de la consultation des oracles.

Au vu du rôle que joue le Ziowu et des interdits du Tron nu et sa femme, la communauté a l'obligation de donner à manger au prêtre et à sa famille en leur offrant, après les prémices à Ziowu, une partie des récoltes.

Togbui Ziowu a un sanctuaire où réside le prêtre et une forêt19 qui lui est propre (Photo N° ci-dessous). Cette forêt est sacrée. Agbegnigan Fovi20 en parle : « La forêt de Ziowu est à l'image des autres dans l'aire Ouatchi. Cette forêt est réservée à l'enterrement des adeptes qui sont morts dans les couvents « Avomeku » au cours de leur initiation.

Par ailleurs, on enterre également ses prêtres (les Tron nu décédés). Donc, son accès est formellement interdit à toute personne sauf les prêtres et quelques vieux au cours des cérémonies.

Les ancêtres de Vo-Koutimé n'ont pas coupé le lien avec les Ouatchi d'Akoumapé surtout sur le plan cultuel. En effet, le Ziowu de Vo-Koutimé constitue le cordon reliant les deux villages. Le Ziowu étant la divinité mâle a sa femme, Ziowussi, avec une prêtresse du même nom (Ziowussi), qui se trouve chez les Akouma.

Les deux prêtres ont un droit de regard mutuel quand il s'agit d'introniser l'un ou l'autre. Ils assistent à toutes les cérémonies qui concourent à l'intronisation du prêtre ou de la prêtresse.

27

19 Qui fait environ trois (3) hectares de surface.

20 Actuel prêtre Ziowu, 65 ans. Entretien du 25/07/2020 au sanctuaire de Ziowu.

28

Photo n°2.1 : Sanctuaire de Togbui Ziowu Photo n°2.2 : Vue partielle de la forêt

et son prêtre sacrée de Ziowu

Source : cliché E. E. Bodjro (25/07/2020).

La réputation de cette forêt ne fait pas perdre de vue le rôle de Togbui Yoho et de Togbui Gbe. 2.1.2.2. Togbui Yoho et le Yohové

À la différence de Ziowu, Yoho n'a pas de sanctuaire. Il n'existe qu'à travers une forêt de son nom Yohové21. Si dans la forêt de Ziowu sont enterrés les adeptes et les prêtres, celle de Yoho est réservée à ceux qui sont morts de façon tragique, Djogbéku, soit par accident, incendie, noyade, etc. Par ailleurs, les foudroyés de Hébiesso ou tous fauteurs tués par un dieu du panthéon, quoi qu'il en soit, sont inhumés dans cette forêt qui leur est réservée. Malgré la sacralité de Yohové, elle ne constitue plus aux yeux des populations la même valeur comme dans le passé. Ce changement de regard serait dû à l'absence de cérémonies appropriées, aggravée plus tard par l'extension du village où les nouveaux quartiers ou villages lointains acquéraient une large indépendance en inhumant leurs morts chez eux, rompant avec l'ordre préexistant qui les obligeait à faire venir dans le village matriciel, leurs défunts. Ainsi, Yohové perdit sa place de « Djogbe » au profit des nouveaux cimetières des fermes.

Néanmoins, conscientes de sa place dans le patrimoine religieux, les autorités, gardiennes des coutumes, confient sa protection au prêtre Ziowu.

21 D'une surface de un (1) hectare.

Photo n°2.3 : Yohové

Source : cliché E. E. Bodjro (25/07/2020).

En dehors de ce Togbui vodou, Togbui Gbé est le troisième dieu des ancêtres.

2.1.2.3. Togbui Gbe et le Gbevé

Tout comme le Yoho, Togbui Gbé est un des vodou des ancêtres qui n'atteint pas le même

degré de réputation que le Ziowu. Sa particularité est qu'il n'a pas de couvent, à l'image de Ziowu. Ainsi, sa forêt « Gbevé22 » est son couvent où se trouvent des vodou dont les principaux, sont : Aguin, Azizan et Dan.

Par conséquent, cette forêt est réservée à des cérémonies et non à l'inhumation. L'accès à ce sanctuaire est formellement interdit à toute personne autre que le prêtre du Ziowu et quelques rares prêtres d'autres divinités. Au cours des cérémonies dans cette forêt, lors de la grande cérémonie de vodou « Vodoukonugan » sauf en cas de calamité, les boissons utilisées ne doivent pas être alcooliques23.

29

22 Située à l'ouest de Ziowuvé, elle fait environ un (1) hectare de surface.

23 Agbénigan Fovi, 65 ans. Entretien du 25/07/2020 au sanctuaire de Ziowu.

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Photo n°2.4 : Togbui Gbevé

Source : cliché E. E. Bodjro (25/07/2020)

Par ailleurs, Togbui Ziowu, Togbui Yoho et Togbui Gbé ne sont pas les seuls vodou du panthéon ouatchi de Vo-Koutimé. D'autres, que nous appelons secondaires à la différence de ces Togbui vodou, caractérisent eux aussi l'univers religieux.

2.1.3. Les dieux secondaires

Les vodou classés dans cette catégorie sont pluriels. De Hébiésso à la divination, en passant par Sagbata, « vodou anyigbanto » qui signifie « dieu de la terre », Légba, vodou Dan, vodou Tron ou Goro vodou, Gbana, et des vodou liés aux naissances comme Aloumon, Vénani « les jumeaux », Ago, Tohossou, la liste est loin d'être exhaustive.

Cependant, de tous les vodou du panthéon, nous ne parlerons que de Hébiésso, Légba, en fonction de leurs popularités.

En milieu ouacthi en général et à Vo-Koutimé en particulier, le vodou Hébiésso est le plus connu. On attend souvent dire que Hébiésso est d'origine dahoméenne précisément à Hevie, même si cette affirmation fut démentie dans la communauté ouatchi où le culte de So existerait depuis longtemps au sud du Togo (B. Gilli, 2016, p. 39) l'influence culturelle du Dahomey n'épargnerait pas le pays ouatchi.

Dans chaque famille ou lignage, on en trouve (cf. Tableau n°2.1). Gestionnaire du monde à la fois matériel et immatériel, principe de connaissance et d'ordre, ou fauteur de trouble et de chaos (B. Gilli, 1982, p. ix), son nom regroupe tous les vodou de la foudre, qui sont au nombre de sept. Nous pouvons trouver : Agbade, Aklobe, Adayro, Sogbo, Sakadja, Ayali et

31

Atisu dont chacun des initiés est appelé : Agbadesi, Aklobesi, Adayrosi, Sogbosi, Sakadjasi, Ayalisi et Atisusi (B. Gilli, 2016, p. 44).

De toute cette famille, à Vo-Koutimé, le plus populaire est Adayro. Par ailleurs, la liste se fait compléter par vodou Agboe qui, selon nos informateurs, est la femelle des sept Hébiésso. Elle est plus calme et chargée d'apaiser les mâles quand ils sont en colère24.

En dehors de Hébiésso, vodou Légba est très présent à Vo-Koutimé. On en distingue deux types : Dulégba et Afanlégba. Dulégba est celui qui se trouve sur la place publique dans chaque quartier de Vo-Koutimé. Le village matriciel dispose d'un Dulégba appartenant aux ancêtres fondateurs, qui est à la tête de tous les autres. À celui-ci, à chaque début ou fin des cérémonies de Vodou konougan, on fait des sacrifices après consultation d'Afan. Le choix du lieu où il se trouve n'est pas aléatoire. En effet, se trouvant souvent à l'entrée ou sur la place publique des villages ou quartiers, ils sont les gardiens de tous les habitants et veillent sur eux.

Photo n°2.5 : Dulégba du village mère

Source : cliché E. E. Bodjro (27/07/2020).

Toutes les cérémonies du culte vodou chez les Ouatchi de Vo-Koutimé débutent toujours par la consultation des oracles « Afan ». Nul n'a le pouvoir de connaître la cause d'une maladie, d'une calamité, d'une situation métaphysique si ce n'est qu'après la consultation des oracles.

Au lever du soleil, le prêtre vodou ou le chef de famille fait la consultation pour savoir ce que lui réserve la journée en bien ou en mal et les conduites à tenir pour que les malheurs enjambent le village ou la famille.

24 Entretien du 15/03/2020 à Vo-Koutimé, 76 ans.

En bref, quelle que soit la spécialisation des vodou, ils assurent tous la sécurité, la prospérité, la bonne marche de la vie quotidienne ; ils exaucent les voeux des habitants et les protègent de tout malheur.

2.1.4. Les couvents

Les vodou précités ont leur propre demeure qu'est le couvent « Kpanou ». En dehors des habitats de la population, les couvents de vodou sont visibles partout. Le village matriciel en concentre la majeure partie. À chacun des couvents, est attribué le nom d'un ancêtre et un responsable. Ce dernier est entouré d'autres prêtres qui ont leur vodou dans son couvent. À sa mort, il est remplacé par le plus ancien des autres prêtres vodou. En dehors de son vodou, les autres peuvent être de différentes natures. Dans un couvent, on peut alors trouver à côté du vodou Hébiésso, le vodou Dan, Mami, Agbana, etc. Cette convivialité entre les différents vodou se matérialise entre leurs prêtres. Ainsi, dans chaque quartier il est nommé un prêtre vodou à la tête de tous les autres et leurs convents qui est à l'image du chef de quartier vis-à-vis des autres prêtres (Zikpui Ayondo 25).

32

25 Entretien du 20/07/2020 à son domicile, 76ans.

33

Tableau n°2.1 : Récapitulatif des couvents

Quartier

Nom du couvent

Nombre de

prêtres

Responsable des

couvents

ATCHANDOME

Magnawui kpanou ; Melewome

Kpanou; Agbodi Kpanou ; Soviadè
Kpanou ; Kotchi Kpanou,; Adayrope

53

Hung Amakoe Sessou

GLOPE

Kpoka Kpanou ; Dedjani Kpanou ;

Nouwodou Kpanou ; Ketoglo Kpanou ; Awaka Kpanou

10

Hung Sika Kokouvi

SOKO

Amouzouhlan Kpanou ; Kouléhomé

Kpanou

Bébé Kpanou ; Agoudavi Kpanou ;

Vekini Kpanou

26

Hung Agboglan

KPOTA

Daklou Klové Kpanou ; Dansou Hanta Kpanou ; Somabé Kpanou ; Azianké Kpanou ; Bessanvi Kpanou

19

Hung Apeti Daklo

MAMISSI

Wonékou Agbadessi Kpanou ;

Kouléhomé Kpanou ; Messanvi

Kpanou ; Agbémadokponou Kpanou

11

Hung Wonékou Agbadessi

AGADI

Yovodévi Kpanou

5

Hung Yovodévi

Source : Archives du secrétariat du chef Zouméké Akakpo II.

La population ouatchi de Vo-Koutimé, face à cette pluralité de couvents, s'imprègne du culte vodou.

2.2. L'ancrage de la religion vodou à Vo-Koutimé

Dans la communauté ouatchi de Vo-Koutimé, de la naissance jusqu'à la mort, tout le quotidien des populations est régie par les vodou.

34

2.2.1. La vie sociale imprégnée du culte vodou

La communauté ouatchi de Vo-Koutimé a un degré d'enracinement particulier du culte vodou. Nul ne se réveille le matin de son plein gré, mais cela dépend plutôt de la volonté des vodou. Pour se coucher la nuit, le chef de concession ou de famille dira aux siens « Togbuiwo ne fomi », « que les ancêtres, qui sont encore des dieux nous réveillent ». On souhaite un bon voyage en disant « Togbuiwo ne kplomi dediede ».

Le simple fait d'éternuer regorge de significations. En éternuant du côté gauche, cela signifie le mal et le côté opposé est signe du bonheur26.

En outre, la vie quotidienne est rythmée de totems du culte vodou. Nul n'a le droit de porter une chaussure ni de balayer la nuit, car cela attirerait la variole qui est, selon la tradition, une punition émanant du vodou Sakpata, souvent représenté chez les Ouatchi avec de petits boutons sur son corps, une balaie à la main, et une chaussure au pied.

La naissance d'un enfant n'est pas fortuite, surtout quand il s'agit des naissances hors normes, en l'occurrence la naissance des jumeaux « Vénavi », une malformation morphologique « Tohossou », etc. Ces derniers portent dès leur naissance, le nom vodou qui ne s'agit pas des noms appartenant au vodou comme dans le cas des initiés (B. Gilli, 1982, p. x). En effet, les Vénavi portent des noms, après des cérémonies, comme Adjé-Adjété, Koété-Koélé, Wévi-Wétcha, Etsin-Atsou qu'on trouve couramment dans la communauté.

Par ailleurs, les animaux sont présagés. En effet, un coq de la base cour ne chante pas la nuit. Cela signifie que soit la mort ou un malheur arrivera dans la famille. Et souvent le chef de la famille reste éveillé sur ces signes. Très tôt le matin, il ira consulter les ancêtres pour comprendre exactement de quoi il sera question.

Tous ces signes sont loin d'être exhaustifs, car rien n'arrive au hasard ; toute chose a une signification divine pour des Ouatchi de Vo-Koutimé.

2.2.2. L'économie sous la marque des vodou

La bonne marche des activités économiques ne dépend pas de la capacité de l'homme. De l'agriculture jusqu'au commerce, le Ouatchi confie tout au vodou. Ainsi, le cultivateur avant le début de ses activités, implore les vodou. Souvent, c'est au grand prêtre du Ziowu à qui revient la charge d'organiser les cérémonies préalables pour le début des activités. La pluie devient une offre des vodou ; quand elle devient rare on se tourne vers eux.

26 Zouméké Akouété Akakpo II, 76 ans. Entretien du 15 mars 2020 au palais du Chef Canton à Vo-Koutimé.

35

Le cultivateur n'hésite même pas à placer, sous la protection des vodou, son champ (cf. Photo ci-dessous). Ils deviennent des gardiens et tous ceux qui toucheront les produits de ce champ à l'insu du propriétaire s'exposent à des effets divers selon la nature du vodou protecteur. Mais, habituellement, l'agriculteur fait recours au vodou Hébiésso en fonction de son intolérance envers les voleurs.

Photo n°2.6 : Type de champs placés sous protection de vodou

Source : cliché E. E. Bodjro (27/07/2020).

Après la réussite des champs, le paysan, en guise de récompense, offre les prémices de ses récoltes au vodou. Ceci donna en pays éwé, le nom des fêtes traditionnelles comme Adinukuzan, Djawuwuzan, Ayizan, dont les noms diffèrent selon les produits qui prédominent. En ce qui concerne l'activité commerciale, la mévente serait due à un sacrifice non fait, une promesse non tenue, bref quelque chose qui a trait aux vodou. Ainsi, le commerçant offre, aux vodou soit à l'autel des jumeaux, au Légba de village, ou tant d'autres, sa marchandise et demande leur grâce. Souvent, les jumeaux sont considérés comme des porte-bonheurs. Le commerçant ouatchi souhaite, qu'avant son arrivée au marché, qu'il en rencontre en cours de route.

En somme, de cette première partie, nous retenons que les Ouatchi de Vo-Koutimé ont immigrée de Notsè et après plusieurs périples marqués par des haltes, ils élisent domicile, à la première moitié du XVIIIe siècle, là où ils sont aujourd'hui. Mais étant des croyants en des forces de la nature depuis leur origine, sur leur nouveau site, ils développèrent un culte vodou de même nature. Cependant, avec l'ouverture au monde extérieur, ils connurent l'avènement de la religion chrétienne portée par les missionnaires blancs.

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Deuxième partie :

IMPLANTATION ET EXPANSION DU CHRISTIANISME A VO-KOUTIMÉ DU XXE AU XXIE SIÈCLE

37

Dans le courant du XIXe siècle, la côte des Esclaves, allant de l'embouchure de la Volta jusqu'au fleuve Niger qui regroupe aujourd'hui l'actuel Nigéria, Bénin, Togo et une partie du Ghana, a connu l'avènement des missionnaires chrétiens. Au Togo, ils débarquèrent sur la côte et de là atteignirent l'hinterland immédiat dont le pays ouatchi de Vo-Koutimé. Au fil des temps, l'évangélisation s'enracina dans ce monde religieux. Fort de ce constat, nous nous posons la question de savoir : comment les missions chrétiennes, depuis la côte, ont pu fouler le sol des Ouatchi à Vo-Koutimé ? En outre, qu'est-ce qui témoigne de l'expansion du christianisme à Vo-Koutimé ? Les réponses à ces interrogations constitueront la trame des deux chapitres de cette partie. Alors, après avoir parlé de l'implantation des missions chrétiennes à Vo-Koutimé, nous aborderions leur expansion.

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Chapitre 3 :

IMPLANTATION DU CHRISTIANISME À VO-KOUTIMÉ AU XXE

SIÈCLE

L'implantation du christianisme à Vo-Koutimé n'est pas l'apanage d'une seule confession. Mais à la différence de l'histoire générale du christianisme au Togo où les premiers porteurs de la Bonne nouvelle furent les missions protestantes, celle de Brême, l'évangélisation commença à Vo-Koutimé en 1914 par les missionnaires catholiques. Ils se font accompagner par les missionnaires de l'Église presbytérienne en 1967 et d'autres congrégations. A cet effet, que pouvons-nous noter de l'implantation de la mission catholique ? Et du côté de la mission presbytérienne, quand n'est-il réellement ? Quelles sont, à part ces confessions, celles qui s'implantèrent plus tard ? Les réponses à ces questions constitueront la trame de ce chapitre.

3.1. La mission catholique

L'arrivée des missionnaires catholiques à Vo-Koutimé n'a pas été spontanée ; elle serait due à leur présence antérieure à Togoville, puis à Vogan.

3.1.1. Le prélude à l'avènement des missionnaires catholiques à Vo-Koutimé

Togoville et Vogan sont les deux foyers du rayonnement du catholicisme en pays ouatchi, si bien que l'histoire des missionnaires catholiques à Vo-Koutimé est inséparable à celle des deux localités.

3.1.1.1. Brève histoire de la mission catholique à Togoville

L'avènement du christianisme sur le territoire aujourd'hui togolais date du XVIIIe siècle. Cette première tentative fut l'oeuvre de la communauté des Frères Moraves de Saxe en Allemagne, qui se solda par un échec dont les causes restent inconnues (M. V. Honyiglo, 2011, p. 13). Par ailleurs, depuis le Dahomey, précisément à Ouidah, des prêtres noirs, qui seraient sans doute des Afro-brésiliens issus de la traite, en venant à Agoué, allaient aussi à Adjido et Petit-Popo où se trouvait la famille de Souza et à Porto-Ségouro (K. Napala, 2007, p. 138). Mais, ces voyages qui se limitaient à la côte du futur Togo, n'eurent pas de retombées, du fait de l'intérêt que représentait le Dahomey aux missionnaires (S. Édoh, 2017, p. 102). En 1886, le Père Ernest Ménager, Préfet de la préfecture apostolique du Dahomey,

après avoir parcouru le sud-est du futur Togo, d'Agoué à Atakpamé en passant par Adangbé (N. L. Gayibor, 1975 II, p. 498), tenta un premier essai d'installation en envoyant les Pères Aimés Beauquis et Jeremiah Moran. Ce dernier se fit empoisonné le 7 août 1887 (K. Müller, 1968, p. 29 ; S. Édoh, 2017, p. 103). Dès lors, les missionnaires du Dahomey abandonnèrent le champ de la mission du Togo jusqu'à l'érection du Togo allemand en préfecture apostolique autonome en avril 1892 (S. Édoh, 2017, p. 104).

Cette préfecture apostolique du Togo fut créée par décret le 12 avril 1892 et a été confiée à la Société du Verbe Divin (SVD). Le 6 mai de la même année, par un décret du Pape Léon XIII, le Père Arnold Janssen 27 eut la permission d'envoi d'un grand nombre de missionnaires dans la nouvelle préfecture apostolique (M. V. Honyiglo, 2011, p. 14). Ainsi, il envoie une équipe de cinq missionnaires, en la personne des Pères Schäfer et Mathias Dier, vêtus de soutanes blanches et des frères Johannes, Norbertus et Venantius en soutanes grises (Photo n°3.2), qui foulèrent du pied le territoire aujourd'hui togolais le 26 août 1892.

Photo n°3.1 : Le Père Arnold Janssen Photo n°3.2 : Les cinq missionnaires SVD

39

Source : Archives de la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé.

De la côte en milieu Bè où le 3 septembre 1892 les missionnaires effectuèrent la pose de la première pierre de la Mission qui fut dédiée à la Vierge des Douleurs (K. Müller, 1968, p. 40), ils explorèrent, en décembre 1892 puis en février de l'année suivante, les localités telles que Porto-Seguro (Agbodrafo), Petit-Popo (Anécho), Adjido et Togoville.

Dans cette dernière localité, les missionnaires se sont heurtés au refus du Chef le 6 décembre 1892. Toujours déterminés à continuer l'oeuvre de Dieu, les pères Schäfer et Dier s'y

27 Fondateur de la Société du Verbe Divin, est né le 5 novembre 1837.

40

rendirent de nouveau le lundi 6 février 1893 au matin pour essayer d'acquérir un terrain pour leur future mission (K. Müller, 1968, p. 41). Cette fois-ci, ils eurent gain de cause en se voyant offrir un vaste espace à bon compte qui, selon les populations, appartenait à l'Empereur d'Allemagne. L'accueil particulier de la part des populations serait dû au fait que, quelques jours auparavant, les prêtres avaient sauvé une femme, en danger de mort aux environs de Lomé qui avait été mordue par un serpent. Après avoir recouvert la vie, elle retourna à Togoville pour annoncer la nouvelle aux siens (A. de Surgy, 1994, p. 91).

Sur le terrain acheté, les missionnaires posèrent solennellement la première pierre de la station le 24 mai 1893 et le 28 août 1893 elle fut consacrée. Un an plus tard, les missionnaires SVD célébrèrent leur première messe sur le territoire du futur Togo à Togoville et la mission se fit désigner paroisse Saint Esprit. C'est ainsi que commença le catholicisme à Togoville.

De Togoville, les missionnaires atteignirent les localités immédiates. En effet, dans une lettre du 21 mai 1902, les Pères donnaient des nouvelles assez réjouissantes de leurs postes en précisant que les stations secondaires se développèrent d'une façon intéressante à l'instar de Anjorokopé (Anyronkopé), Wobga (Wogba), Vogan, etc. (K. Müller, 1968, p. 60).

L'histoire du catholicisme à Togoville a été marquée par un grand évènement en 1985. En effet, du 8 au 10 août de cette année, le Pape Jean Paul II visita le Togo, un moment important pour l'Église qui a vu une mobilisation des consciences. Pendant toute cette visite, un moment solennel fut vécue par la communauté chrétienne de Togoville qui, au soir du 9 août, reçoit le Pape, via le Lac, au sanctuaire de Notre Dame du Lac Togo (Mère de la Miséricorde) à qui l'Évêque de Rome a eu la joie de confier le Togo tout entier28.

28 Source : Témoins de l'évangile. La présence des Missionnaires Comboniens au Togo-Ghana-Bénin (19642014).

41

Photo n°3.3 : Le Pape Jean Paul II sur le lac Togo en août 1985

Source : Archives de la Maison des Missionnaires Comboniens à Cacavéli (Lomé).

3.1.1.2. Panorama sur le catholicisme à Vogan

La genèse du catholicisme à Vogan remonte à la période coloniale allemande. En effet, les missionnaires des SVD qui oeuvrèrent depuis 1893 à Togoville, se lancèrent à l'exploration des villages situés au nord de Togoville. Ils parvinrent à atteindre premièrement Wogba, localité située à environ cinq kilomètres de Togoville et de là ils arrivèrent à Vogan.

Tout d'abord, ils faisaient de la promotion de l'éducation leur pilier pour gagner l'affection des populations. Ainsi, en 1903, le Préfet apostolique en la personne du Père Bücking inaugura une école primaire sur un terrain que le chef Assigble leur a offert29.

D'une salle de classe, elle servait en même temps de chapelle pour la mission. Le plus frappant des faits dans la création de cette école est le fait que le sous-chef Kalipé fréquentait régulièrement l'école en tant qu'élève au milieu des enfants en dépit de son âge avancé.

Le 30 mai 1905, soit deux ans plus tard, les missionnaires ont pu gagner 45 catéchumènes qu'ils baptisèrent. Le 30 mai 1908, le Père Ferdinand Lauer, curé de la paroisse de Porto-Seguro, consacra la petite église, construite par les donations de Mgr Bücking (1 000 marks), le Père Porten (55 marks), le Père Glanemann (400 marks), le Père Möhlis (220 marks), le Père Verstraelen (1200 marks) et le Père Ferdinand Lauer ( ?), sous le Saint Ferdinand (J-B, Améganvi-Attissou, 1981, p. 72).

Toujours assoiffés de gagner les âmes à Christ, les missionnaires, depuis la paroisse de Vogan, sillonnèrent les villages environnants et atteignent Vo-Koutimé en 1914.

29 Centenaire de la Paroisse Saint Ferdinand de Vogan.

Cependant, après le départ des SVD, les missionnaires de la Société des Missions Africaines et les missionnaires Comboniens ont tous fait leur passage sur la paroisse de Vogan. Surtout, les missionnaires Comboniens, en la personne du Père Augusto Zancarano, ont laissé de grands souvenirs sur la paroisse de Vogan et sur la future paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé. Ce prêtre combonien fut nommé supérieur et curé de Vogan en juillet 1966 dans une grande ambiance et enthousiasme des autorités religieuses avec la présence du nouveau Archevêque Mgr Dosseh Casmir Anyron et le chef Kalipé de l'époque au côté de Augusto Zancarano.

Vu son attachement à la population de Vogan pendant dix ans (1966 à 1976), à sa mort le 29 mai 1991 à l'hôpital d'Afagnan où il avait été admis le 14 avril, il fut enterré sur la paroisse de Vogan au cimetière des prêtres selon ses voeux (Photo n°3.5).

Photo n°3.4 : Ordination d'Augusto Photo n°3.5 : La tombe de A. Zancarano

Zancarano à Vogan

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Sources : Archives de la maison des Source : cliché E. E. Bodjro (27/07/2020).

Comboniens à Lomé.

3.1.2. Les missionnaires catholiques à Vo-Koutimé de 1914 à 1971

Les missionnaires catholiques foulèrent le terroir des Ouatchi de Vo-Koutimé le 11 janvier 1914 en la personne du Père Demont, quelques mois avant le début de la première Guerre Mondiale. En effet, ces missionnaires d'origine allemande se trouvaient bloquer dans leur mission à Vo-Koutimé par la Première Guerre mondiale. Après leur départ, la paroisse mère de Vogan était devenue orpheline, car malgré la présence des missionnaires, la christianisation était toujours à ses débuts. La paroisse Saint Ferdinand de Vogan, quant à elle, a bénéficié de temps à autre entre 1918 et 1919, de la sollicitude des prêtres de la Société des

43

Missions africaines (SMA) installée au Dahomey. Seules quelques visites des catéchistes de la paroisse s'effectuèrent à Vo-Koutimé. Ainsi, la jeune mission de Vo-Koutimé connaîtra une pénurie de personnel pour la relève30.

Cette donne changea avec la nomination du Père François Bozin à la tête de la mission d'Aného et de son district d'où il effectua quelques visites de 1921 à 1924. Lors de ses visites, il se rendait à Vo-Koutimé souvent accompagné de Casimir Dosseh31, pour rassembler les quelques fidèles que comptait la mission.

Par ailleurs, le travail des missionnaires se compliquait par l'absence d'un espace approprié pour construire une chapelle. Les fidèles catholiques de la mission ne manifestaient aucune ambition pour offrir un site à l'église. Les rares messes que desservaient les Prêtres de la paroisse de Vogan à Vo-Koutimé se faisaient selon les circonstances du moment, soit dans la maison d'un fidèle volontaire, soit sur la place publique. Une situation qui serait due également par manque de moyens.

Par conséquent, l'église catholique restera à l'étape embryonnaire jusqu'à l'arrivée de la mission presbytérienne en 1967 à Vo-Koutimé.

En bref, de 1914 à 1971, la christianisation de la mission catholique à Vo-Koutimé reste toujours à l'étape embryonnaire.

3.2. L'arrivée de la mission presbytérienne dès 1967 à Vo-Koutimé

Présents depuis 1964 à Hahotoé, les missionnaires presbytériens ne parvinrent à atteindre Vo-Koutimé qu'en 1967. En effet, l'évangélisation du milieu ouatchi fut confiée à une équipe sous la direction d'un missionnaire allemand du nom de Knall. Pour ce dernier, la mission d'évangélisation s'est heurtée à une crise sanitaire dans le pays ouatchi, précisément dans les environs de Vogan. Ainsi, cet espace géographique restera hors de la mission presbytérienne jusqu'en 1967 avec leur arrivée à Vo-Koutimé au grand dam de Vogan32, dont la population atteignait environ 12 000 personnes.

La présence de la mission presbytérienne à Vo-Koutimé ne se résuma qu'à quelques fidèles. Prenant conscience de la réticence des populations, le missionnaire allemand adopta une

30 Archives de la paroisse Saint Ferdinand de Vogan.

31 Père du premier Archevêque du Togo, Robert Dosseh Anyron.

32 Archives du bloc synodal de l'église presbytérienne.

stratégie suivant laquelle il fait du tremplin à son oeuvre de christianisation, les conseils sur les pratiques agricoles, l'organisation des jeux en se basant sur les passages bibliques, etc.

Le missionnaire s'inspira en partie des difficultés de la mission catholique déjà sur le terrain avant leur arrivée. Il eut gain de cause avec une flambée de fidèles dans les cinq années suivantes. Car, de 1967 à 1972, l'église presbytérienne compta environ 140 fidèles baptisés dont la majorité est de Vo-Koutimé et le plus marquant est que le chef de Vo-Koutimé de l'époque, Akakpo Domafli et sa famille furent partie des baptisés. Dès lors, l'église presbytérienne s'installa officiellement en pays ouatchi de Vo-Koutimé33.

3.3. Les autres confessions religieuses

En dehors de la mission presbytérienne, d'autres confessions virent le jour à Vo-Koutimé, au rang desquelles nous pouvons citer les Témoins de Jéhovah, les Assemblées de Dieu (1990) qui fut fondé par un diacre du Temple de Vogan Ville 1 du nom de Gbedjego Amétépé, lui-même natif de Vo-Koutimé. Par ailleurs, l'Église pentecôtiste, Agbagbé, l'Église de famille du Christ, etc., ont également une place indéniable dans la christianisation à Vo-Koutimé.

L'histoire du christianisme à Vo-Koutimé ne sera guère limitée à l'implantation des missions chrétiennes. À travers ces missions, le christianisme connaîtra, une évolution particulière.

44

33 Rapport du synode de 1973.

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Chapitre 4 :

EXPANSION DU CHRISTIANISME À VO-KOUTIMÉ DÈS 1971

Les missions d'évangélisation, commencées dans un premier temps dans le village matriciel (l'ensemble des quartiers de première génération), gagnèrent au fil du temps d'autres quartiers de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé. Cette expansion du christianisme diffère selon les missions ou confessions.

À cet effet, nous nous interrogeons : comment se présente l'évolution de la mission catholique à Vo-Koutimé ? Qu'est-ce qui caractérise l'expansion des missions protestantes ? Alors dans ce chapitre, il sera question, dans un premier temps, de parler de l'expansion du catholicisme et puis, celle des missions protestantes.

4.1. La mission catholique

Dès l'avènement de la mission catholique en 1914, le catholicisme ne connaîtra une évolution spectaculaire qu'à partir de 1971.

4.1.1. Les grandes phases du progrès catholique

L'évolution de la mission catholique se subdivise en deux phases : la première va de 1971 à 2004 et la deuxième de 2004 à 2014 avec des faits particuliers.

4.1.1.1. La première phase : de 1971 à 2004

Après une présence de plus de cinquante ans sans grand effet au sein de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé, l'année 1971, dans l'histoire de l'église catholique à Vo-Koutimé, constitue une période phare. En effet, depuis l'implantation de la mission en 1914, l'église était toujours à la traine à cause d'un manque d'espace approprié pour construire une chapelle.

Cependant, en 1971, le chef du village en la personne de Akakpo Domafli offrirait, sans aucune condition, une parcelle d'environ quatre hectares de surface aux missionnaires Comboniens (le Père Augusto Zancarano).

Selon Miwonunyi Abotsi34 en parle en ces termes :

34 Ingénieur retraité à Vo-Koutimé et fidèle catholique, 70 ans. Information recueillie le 24/07/2020 à son domicile.

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Cet acte de la part du chef n'était pas fortuit. En effet, l'espace offert aux missionnaires pour y construire l'église est un terrain litigieux. Deux quartiers du village matriciel à l'instar de Mamissi et de Glopé revendiquaient le droit de propriété du terrain. Or, comme nous l'avions dit plus haut, l'ancêtre fondateur de Mamissi est cousin au chef et celui de Glopé lui est son oncle. Confus dans cette situation et pour éviter d'être accusé par l'un ou l'autre, il décida d'en faire un don aux missionnaires.

Alors, les missionnaires, ne voulant plus perdre le temps compte tenu du litige à propos de l'espace, construisirent une chapelle qui fut inaugurée le 08 août 1971 sous le nom de Notre Dame de l'Eglise, pour abriter les messes (Photo n°4.1).

Photo n°4.1 : La chapelle Notre Dame de l'Église de Vo-Koutimé

Source : cliché E. E. Bodjro (11/03/2020).

Mais conscient de la résistance des parents à s'ouvrir à la Bonne Nouvelle, les missionnaires se tournaient vers les jeunes. Puisque, en 1978, soit sept ans plus tard, la mission ouvrait une école primaire qui était une école d'un bâtiment de quatre classes de CP1 au CM2 avec une combinaison de la classe de CP1 et CP2 et de la classe de CE1 et CE2 (Photo ci-dessous) et devrait servir de tremplin à l'évangélisation.

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Photo n°4.2 : Le bâtiment de l'école primaire catholique de Vo-Koutimé

Source : cliché E. E. Bodjro (15/03/2020).

Ainsi, pour une formation soutenue des néophytes, le clergé catholique accorda du prix à la catéchèse ajoutée au cours proprement dit. Les catéchumènes devraient d'abord obtenir le sacrement de baptême, l'eucharistie et plus tard la confirmation. Tous les élèves sont contraints à aller aux cours de catéchèse. Les missionnaires de leur côté veillaient à l'assiduité et à la régularité de tous, même aux messes dominicales (S. Edoh, 2016, p. 172). Ce système permettait une évolution de l'effectif des fidèles. Par ailleurs, en 2001, la mission catholique s'ouvrait au reste du pays ouatchi avec la création d'une seconde école primaire dans le quartier Djoguimé dont l'une de ses salles de classe servait de chapelle tous les dimanches pour les messes. En outre dans le village d'Adjodogou, qui est auparavant un quartier créé suite à l'extension du village mère, la mission fit créer une station secondaire qui est à l'étape expérimentale par manque de terrain pour construire une chapelle en torchis. Toutefois, compte tenu du nombre de fidèles toujours minoritaire sur ces nouvelles chapelles, les responsables de la mission n'envoyèrent que des catéchistes pour célébrer les messes dominicales. La mission de Vo-Koutimé demeure, au cours de cette phase, une station secondaire qui dépendait de la paroisse Saint Ferdinand de Vogan. Cette donne ne changea qu'à partir de 2004, année marquant le début d'une nouvelle phase35.

4.1.1.2. La deuxième phase : de 2004 à 2014

La station de Vo-Koutimé tourna une page de son histoire dès 2004. Avec l'évolution considérable du nombre des fidèles sur la station et ayant rempli des conditions nécessaires pour obtenir le statut de Paroisse, le 15 juin 2004, soit trente-trois ans après la construction de la mission, la station secondaire de Vo-Koutimé obtint son érection canonique sous le nom de

35 André Tonou, 70 ans, entretien du 22 juillet 2020 dans son domicile à Vo-Koutimé.

Marie-Reine de l'Univers. La même année, dix-neuf fidèles ont reçu leur baptême dont le tout premier est Abla Bernice Aklobessi.

La nouvelle paroisse n'a connu sa première communion et confirmation et son premier mariage qu'en 2005. Dès lors, l'évolution était significative tant au niveau des baptêmes, des communions, des confirmations que du mariage jusqu'en 2014 (cf. Tableau ci-dessous).

Tableau n°4.1 : Récapitulatif de baptêmes, de communions, de confirmation et de mariages sur la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé de 2004 à 2014

Baptêmes

490 fidèles baptisés

Communions

350 fidèles communiés

Confirmations

260 fidèles confirmés

Mariages

15 couples mariés

Source : Archives de la paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé

Par ailleurs, la paroisse connut le passage de plusieurs prêtres et vicaires de 2004 à 2014, comme le présente le tableau ci-dessous.

Tableau n°4.2 : Les Prêtres et Vicaires ayant servi sur la paroisse de Vo-Koutimé.

Prêtres

Vicaires

Durée

RP Isles Paul KOUMAKO

-

- 2004 à 2010 (soit 6 ans)

RP Henri Joël EKUE-TOTOU

- Abel Seho ALATE

- Yves ALLIN

- Joseph ADANDOHOUN - Jean Faustin ALEBOUDO

- 2010 (soit un an) - 2011 (soit un an) - 2012 (soit un an) - 2013 et 2014 (deux ans)

RP Abraham AGBOSSOU

- Jean Faustin ALEBOUDO

- À partir de 2014

48

Source : Archives de la paroisse de Vo-Koutimé.

49

Au vu de ce tableau 2, nous disons que pendant la période allant de 2004 à 2014, 3 Prêtres et 5 vicaires se sont succédé sur la paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé. Parmi tous les prêtres, le Père Isles Paul Koumako fut non seulement le premier prêtre qu'a connu la paroisse comme curé fondateur, mais aussi il fut celui qui a le plus duré (6 ans). Par contre, à la différence de ces successeurs, le curé fondateur n'a eu aucun vicaire qui pourrait l'aider dans ses tâches ce qui serait dû par l'absence d'un Presbytère pouvant héberger les prêtres. Le Père Koumako résidait sur la Paroisse Saint Ferdinand de Vogan pour desservir les messes dominicales sur la jeune Paroisse de Vo-Koutimé36.

Vers la fin de l'année 2010, avant l'arrivée du Père Henri Joël Ekue-Totou, l'église construisit la maison presbytérale. Ainsi, celui-ci y résidait et durant ses quatre ans (2010 à 2014), il travailla avec quatre vicaires successifs jusqu'à son départ en 2014. L'année qui marqua l'arrivée du Père Abraham Agbossou qui continua la mission de Dieu avec le dernier vicaire de son prédécesseur Jean Faustin Aleboudo.

Cependant, du côté des missions protestantes, l'évolution n'est pas de la même nature.

4.2. Les missions protestantes

Les missions protestantes, en l'occurrence celles de l'église presbytérienne, dès sa création en 1967, n'a pas fait de grands progrès dans leur mission de christianisation de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé. Elle se voit surclasser par l'Église des Assemblées de Dieu.

4.2.1. L'épiphénomène de la mission presbytérienne à Vo-Koutimé

L'ardeur qu'a prise la mission presbytérienne dès son arrivée à Vo-Koutimé n'a pas traversé les temps. Dès l'arrivée de la mission presbytérienne en 1967 et son évolution considérable dans les années 1970 avec une foule de conversion dont faisait partie le chef Domafli Akakpo, les années 1980 et jusqu'en 2017, elle ne traversa qu'un chemin de croix. La raison de ce piétinement de la foi presbytérienne à Vo-Koutimé est de divers ordres. Amèvi Agbassagbé37 affirme à ce propos :

Tout d'abord, les missionnaires presbytériens en la personne de l'Allemand Knall, dans sa mission d'évangélisation de Vo-Koutimé, n'a pas trouvé une place concrète à l'église avant la fin de sa mission en milieu ouacthi. Ainsi, après son départ, les fidèles presbytériens de Vo-Koutimé erraient de maisons à maisons au gré de quelques volontaires pour les messes

36 Jean Alfred Kloutsè, 51 ans, Vice-président de la Paroisse Saint Ferdinand de Vogan, entretien du 13/03/2020 à Vogan, à son domicile.

37 Enseignent retraité et fidèle de l'église presbytérienne, 70 ans. Entretien du 22/07/2020 à son domicile.

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dominicales. Par ailleurs, cette absence de temple décourageait certains de nos fidèles et avec l'évolution de l'église et la création d'autres églises, la concurrence devint rude. Ainsi, nous avons perdu des fidèles au profit de ces églises.

Cependant, malgré la construction, plus tard, d'un temple suite à un don38 d'un terrain d'environ six lots, la donne resta la même.

Photo n°4.3 : Temple de l'église presbytérienne de Vo-Koutimé

Source : Archives de M. Amèvi Agbassagbé.

Après cinquante ans d'existence (1967 à 2017) de l'église presbytérienne à Vo-Koutimé, l'état du temple (en photo) en dit long sur la situation de la mission. En effet, vu les difficultés de la mission, notamment l'absence de conversions massives, les premiers responsables hésitèrent à financer quoi que ce soit à Vo-Koutimé. Ce bâtiment ci-après, une oeuvre d'une dizaine d'années, n'est que le fruit du don des rares fidèles que compte encore l'église au sein de la communauté aoutchi de Vo-Koutimé39.

Néanmoins, l'église des Assemblées de Dieu, de son côté, marqua la mission de la christianisation à Vo-Koutimé.

4.2.2. Le progrès considérable des autres confessions : le cas de l'Église des Assemblées de Dieu

L'église des Assemblées de Dieu, en dépit de son arrivée récente (en 1990) à Vo-Koutimé a fait des pas considérables dans l'histoire du christianisme. À la différence de la mission

38 Le don est fait par M. Amèvi Agbassagbé, le seul tenant de la mission presbytérienne à Vo-Koutimé.

39 Amèvi Agbassagbé, 70 ans, enseignent retraité et fidèle de l'église presbytérienne. Entretien du 22/07/2020 à son domicile.

presbytérienne, dix ans après son arrivée, elle s'ouvrit à l'ensemble du pays ouatchi de Vo-Koutimé par la création de deux temples annexes à Mamissi et à Djoguimé.

Par ailleurs, elle gagna de la cote vis-à-vis des populations de par son partenariat signé le 5 novembre 2011 avec le Centre de développement des enfants (CDE la GRÂCE) dont les objectifs sont l'enseignement du curriculum dans les domaines spirituel, cognitif, physique et socio émotionnel des enfants. De par ce partenariat, le nombre des fidèles s'accroit, car tous les 260 enfants bénéficiaires du programme venaient tous aux messes dominicales.

Photo n°4.5 : Temple mère de l'église des Assemblées de Dieu

Source : cliché E. E. Bodjro (24/07/2020).

Tout compte fait, le chantier de la christianisation à Vo-Koutimé est loin d'être terminé (cf. carte n°3). Sur une population d'environ 20 000 habitants et en dépit d'une présence de cent (100) ans, plus de 75% sont toujours attachées aux pratiques ancestrales » selon les mots du Père Michel Têko Amah-Tchoutchoui40. Ainsi, le bilan de la christianisation reste négatif.

51

40 Curé de la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé. Entretien du 11/03/2020 sur sa paroisse.

52

Carte n°3 : Les différentes congrégations religieuses à Vo-Koutimé

Source : E. E. Bodjro, 2020.

De cette deuxième partie, retenons que l'avènement des missionnaires chrétiens à Vo-Koutimé s'est inscrit dans une suite logique de la mission d'évangélisation du Togo depuis la côte Atlantique. Toutefois, son expansion dans cette communauté ouatchi de Vo-Koutimé se heurta à tant de problèmes dont l'attachement sans condition de la population aux cultes du terroir.

53

Troisième partie :

RÉSILIENCE DU CULTE VODOU DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ
DU XX AU XXIE SIÈCLE

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Les Africains ont un profond sens religieux. Les Ouatchi de Vo-Koutimé en sont un exemple particulier. En effet, étant voués aux cultes vodou dès leur mise en place, l'arrivée du christianisme dans ce vieux monde religieux ne bouleverse guère l'ordre cultuel préétabli. Ladite communauté s'attache indéfectiblement aux cultes vodou. A cet effet, détourner quasiment le chrétien ouatchi de Vo-Koutimé du culte vodou devient pour les missionnaires et plus tard pour les prêtres et pasteurs une tache d'huile. De ce qui précède, se dégagent deux interrogations : qu'est-ce qui témoigne du dynamisme des cultes vodou à Vo-Koutimé ? En quoi peut-on dire que les chrétiens de Vo-Koutimé pratiquent le mimétisme religieux ? Alors les réponses à ces interrogations constitueront les deux chapitres de cette partie.

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Chapitre 5 :

DYNAMISME DU CULTE VODOU À VO-KOUTIMÉ : LE CAS DU

VODOUKONOUGAN

L'attachement des Ouatchi de Vo-Koutimé au culte vodou est très marquant. Dans cette communauté, la célébration de Vodoukonougan, une cérémonie dédiée à tous les vodou et plus particulièrement ceux à grande assise comme vodou Hébiésso, en est la preuve d'attachement. Dans le sillage de cette cérémonie, la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC) a vu le jour en prenant à corps les questions du culte vodou. Cette cérémonie du Vodoukonougan, à la différence de toutes cérémonies cultuelles, se fait suivant une organisation particulière et ses impacts à Vo-Koutimé sont très significatifs. À cet effet, nous nous posons les questions de savoir : quel aperçu historique peut-on faire de cette cérémonie ? Comment les prêtres vodou de Vo-Koutimé sont-ils parvenus à la création de la SAFCANIVKC ? Par ailleurs, de quoi regorge la cérémonie de Vodoukonougan ? Enfin, quels en sont ces impacts ? Les réponses à ses questions feront l'objet de ce chapitre.

5.1. Aperçu historique du Vodoukonougan

Le Vodoukonougan, comme son nom l'indique, est la grande cérémonie des vodou à Vo-Koutimé. Elle est célébrée tous les trois ans, selon le calendrier lunaire, à la différence d'autres sacrifices particuliers que chaque prêtre faits à ses vodou, etc. Cette cérémonie dédiée aux vodou ne date pas de nos jours. Selon Zikpui Ayondo 41 :

La cérémonie se faisait depuis le temps de nos ancêtres. Après leur installation sur le site, ils décidèrent un jour de remercier leur vodou, car depuis leurs trajets, en quittant Notsè et de leur passage à Akoumapé et à Vogan, aucun malheur ne leur est arrivé. De plus, sur ce site, leurs activités agricoles vont bon train. Or, ils sont conscients qu'ils auraient enfreint à des totems de leurs vodou et qu'ils ne seraient pardonnés une fois (un an), deux fois (deux ans) et une troisième (trois ans). Ainsi, ils conviennent à l'unanimité qu'à chaque trois an qu'ils se purifient de tout et qu'ils offrent les prémices de leurs produits agricoles au vodou en guise de remerciement. C'est ainsi qu'ils instituèrent le Vodoukonougan à Vo-Koutimé.

41 Président de l'association des prêtres vodou à Vo-Koutimé. Entretien du 20/07/2020 à son domicile.

56

Cependant, aucune date n'est donnée par nos informateurs concernant la première édition de cette cérémonie. Elle est tout simplement pour eux, un héritage. Au début du XXIe siècle, cette cérémonie a pris une nouvelle tournure avec la création de la SAFCANIVKC

5.2. La naissance de la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC)

En Afrique, l'emprise de plus en plus forte des messagers de la « Bonne Nouvelle » sur le quotidien des sociétés fait réagir les garants de l'ordre moral et social de diverses manières, pour faire échec à la propagation du christianisme, tout en s'employant à la sauvegarde de l'héritage cultuel des ancêtres (K. Étou, 2019, p. 13).

Ainsi, à Vo-Koutimé, l'heure est à la création d'une association des prêtres sous le nom de la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC) ouvrant ainsi une nouvelle phase dans la célébration du Vodoukonougan. Elle fut une initiative du Hun? Zikpui Ayondo remontant en 2010.

Avant la célébration de chaque Vodoukonougan, tous les prêtres vodou de Vo-Koutimé se réunissent pour choisir un Konoutato, « maître de la cérémonie » parmi tous les prêtres à qui on confie l'organisation des cérémonies.

Toutefois, celui-ci peut être reconduit à la tête de ses pairs pour la cérémonie s'il a bien exercé son rôle. En 2010, Hun? Zikpui Ayondo (Photo n°5.1) a été porté à la tête de l'association. À la différence de tous ses prédécesseurs, il est un lettré et de plus un géomètre agréé par l'État. Par ailleurs, dans le domaine cultuel, il est le vice-président de tous les prêtres vodou de la préfecture de Vo.

57

Photo n°5.1: Hun? Zikpui Ayondo

Source : Archives du prêtre Hun? Zikpui Ayondo.

De par son charisme, il mettra en place, dès 2010, l'idée de la création d'une Association pour unifier tous les prêtres. Très vite, l'idée fut épousée par tous les autres prêtres vodou de Vo-Koutimé.

Le 26 juillet de la même année, il envoya une lettre au Ministre de l'Administration territoriale pour la reconnaissance de leur Association sous le nom de la SAFCANIVKC, Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre, dont le but est d'assurer la continuité de l'oeuvre de Dieu par l'intermédiaire des esprits et des oracles des prêtres féticheurs. Ils désignent par « Centre » le village matriciel regroupant tous les six quartiers.

L'accusé de réception ne parviendra que le 16 octobre 2013, où le ministre Gilbert Bawara, par une lettre répond favorablement à la création de cette Association. Un mois plus tard le 02 novembre 2013, il fit publier ladite Association dans le Journal Officiel de la République (cf. Annexe N° 1).

Dès lors, la SAFCANIVKC acquit une existence légale et s'engage pour la pérennité de la cérémonie de Vodoukonougan.

5.3. Le Vodoukonougan à Vo-Koutimé

Le Vodoukonougan des Ouatchi de Vo-Koutimé se résume en de grandes phases et avec le pluralisme des vodou qui caractérise le panthéon, seuls ceux ayant de grandes assises sont plus impliqués. La participation la plus impressionnante à cette cérémonie est celle des jeunes de tout genre.

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5.3.1. Les grandes phases du Vodoukonougan

La cérémonie du Vodoukonougan se résume en trois grandes phases. Il s'agit de Doufankaka à Agbassakaka ou l'apothéose en passant par la phase des cérémonies proprement dites.

5.3.1.1. Le Doufankaka

Toute cérémonie cultuelle en pays ouatchi en général et plus particulièrement à Vo-Koutimé débute toujours par la consultation des oracles. Ainsi, dans le cas d'espèce du Vodoukonougan, cette consultation se désigne sous le nom de Doufankaka. Cette première phase de la cérémonie est symbolique. En effet, pour la circonstance, tous les prêtres vodou « Hun? » et quelques Husro « adeptes hommes » et Hussi « adeptes femmes » assistés par le grand prêtre de Ziowu et le chef du village matriciel accompagné de tous ses « Tchami » se réunissent devant le Dulégba du village mère tout en faisant appel à 7 différents oracles « Bokono ». Ces oracles consultent à tour de rôle les ancêtres pour connaître sous quel Kpolidu « destiné » sera placée la cérémonie de l'année pour qu'elle soit digne. Souvent, le message de tous les sept oracles est unanime sur un même Kpolidu et diffère d'une cérémonie à une autre42.

Voici l'exemple du Kpolidu « Gbe Woli » de la cérémonie de 2010 :

+

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A en croire les devins, ce Kpolidu dit que le chef Zouméké doit tuer un bélier et une poule au Dulégba et en outre, les prêtres vodou doivent une bouteille de Schnaps et de Sodabi au chef. Car selon les ancêtres, il y a une absence d'entente et de convivialité entre le chef et les prêtres vodou.

Toute l'organisation du konou dépend de ce que diront les ancêtres à travers la consultation. Parfois, on reporte carrément la cérémonie, car les ancêtres exigent au préalable soit l'immolation de deux chèvres à Doulégba, soit deux poules à Togbui Ziowu, car ils ont enfreint tel ou tel totems de vodou. Après ces cérémonies en amont, on fixe la date du début

42 Zikpui Ayondo, 76 ans, président de la SAFCANIVKC, entretien du 15/03/2020, à Mamissi.

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de la cérémonie proprement dite. Dès lors, les prêtres vodou envoient aux adeptes de leur couvent une graine de maïs en guise d'invitation et si le concerné habite très loin, sa famille se chargera de l'informer. D'autre part, les prêtres vodou, responsables des couvents, travaillent pour la mise au propre de tous les couvents avant la date butoir43.

5.3.1.2. Les cérémonies proprement dites

La cérémonie s'étale sur 16 jours et commence un mardi « Brada ». Dès ce premier jour, tous les couvents du village matriciel se remplissent d'adeptes et de prêtres vodou avec des caravanes. L'assistance aux cérémonies à l'interne des couvents est formellement interdite aux non-initiés. Ceux-ci ne sont autorisés à prendre part qu'aux joues de tam-tam tous les soirs sur les places publiques dans chaque quartier mère. Tous les désireux spectateurs sont contraints au respect strict de quelques interdits à savoir qu'ils ne doivent porter ni habits ni chaussures ni casquettes, bref ils doivent rester à moitié nu. Faute de quoi, ils se verront déchirer tout ceci par les Husro et les Hussi souvent lorsqu'ils entrent en transe. Par ailleurs, les contrevenants sont ramenés de force dans les couvents où ils paieront des amendes en argent et en boissons avant de sortir.

Photo n°5.2 : Un groupe d'adeptes vodou en caravane

Source : Archives privées de Zikpui Ayondo.

Au cours de la cérémonie, tous les vendredis « Fida », les vodoussi se rendent dans le grand marché de Vogan pour collecter soit des produits agricoles, soit de l'argent. Aucune d'elles ne s'en approprie. Au retour à Vo-Koutimé, elles offrent les prémices au Doulégba.

43 Zikpui Ayondo, 76 ans, président de la SAFCANIVKC, entretien du 15/03/2020, à Mamissi.

60

Au septième jour de la cérémonie, les prêtres vodou, quelques Husro et Hussi, en présence du chef de village et ses «Tchami », se retrouvent pour une deuxième consultation des ancêtres au même lieu et dans les circonstances que le cas du Dufan. Seulement qu'à cette occasion, ils feront un mini bilan de la cérémonie aux ancêtres et demanderont si effectivement le Vodoukonougan prendra fin le seizième jour. À cette occasion, les participants connaissent les cérémonies à faire et les conduites à suivre pour l'apothéose.

5.3.1.3 Agbassakaka ou l'apothéose

Le seizième jour de la cérémonie constitue le jour de l'apothéose où se fait Agbassakaka. Agbassakaka, en dehors de son sens d'apothéose, est une grande consultation de Doufan qui, à la différence de la première consultation des ancêtres, se fait devant toute une foule composite dans le marché Dégo. Tous les prêtres vodou, les Husro et Hussi, le chef et ses Tchami et sept autres oracles à la différence de ceux de la première consultation, se retrouvent pour Agbassakaka. Au cours de cette cérémonie, les ancêtres choisissent les Avlokété « adeptes femmes de Hébiésso » souvent au nombre de sept qui se chargeront de transporter les Avossa ou Agba « sacrifices » pour les déposer au grand carrefour situé au nord du village matriciel.

Photo n°5.3 : La participation des prêtres, adeptes et non-initiés à l'apothéose de la cérémonie de 2014

Source : Archives privées de Zikpui Ayondo.

La plus importante des cérémonies qui implique tous les Ouatchi de Vo-Koutimé au jour du Agbassakaka est que chacun balaie sa chambre et la cour de sa maison en ajoutant une pièce d'argent, selon son gré, et on dépose le tout dans de petits paniers que les Agboessi distribuent

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dans chaque concession à la veille. Vers 14h, les mêmes vodoussi passent ramasser les paniers pour les amener au lieu dédié à l'apothéose. Les habitants des quartiers éloignés du village mère se chargent d'apporter leurs ordures à la place de la cérémonie.

Dès 16h, on commence les cérémonies de l'apothéose proprement dites. Le prêtre Hun? chargé des cérémonies du Vodoukonougan avec l'aide de ses pairs distribuent dans sept grands paniers toutes les ordures collectées.

Ces paniers sont enroulés dans des clobas44 blancs, noirs et rouges et on immole sur chacun d'eux, soit des poules ou des chèvres, de tout pelage, accompagnés de diverses boissons et de farine délayée « Djati ». La nature des animaux et des boissons pour cette cérémonie dépend de la volonté des ancêtres. Tout au long de cette cérémonie, les adeptes et les prêtres chantent des chansons spécifiques à des circonstances.

Avant l'heure du départ (18h) des Avossa, les Avlokété choisies pour le transport des paniers se rendent dans le sanctuaire de Togbui Ziowu pour se faire asperger de l'eau lustrale se trouvant dans deux Adawa45 dont le sens est de se protéger de mauvais yeux.

Photo n°5.4 : Les deux Adawa au sanctuaire de Ziowu

Source : cliché E. E. Bodjro (25/07/2020).

Après cela, elles se rendent au lieu de la cérémonie. Le chef gongonne dans tout le village pour faire savoir aux populations que les Avossa vont partir et que nul n'a le droit de rencontrer les Avlokété avec les paniers sur la tête. On passe ce message à maintes reprises pour les avertir.

44 Pagne de couleur unique qu'on utilise pour les rituels.

45 Jarre en terre cuite

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À 18 h alors, les sept Avlokété transportent les paniers. Personne ne les accompagne ni les prêtres vodou. En cours de route, elles crient en disant « agbagbono, agbagbono, agbagbono, ekouneto, doneto » « sacrifices arrivent, sacrifices arrivent, que la mort parte, que la maladie parte ». Tous ces mots sont répétés à plusieurs reprises jusqu'à leur arrivée au carrefour réservé pour les paniers dont le but est d'avertir tous les usagers de cette route de rebrousser chemin. Faute de quoi, ils ramasseront tous les malheurs du village.

Photo n°5.5 : Les Avlokété transportant les Avossa

Source : Archives privées de Ayondo Zikpui

Cette dernière étape met fin à la cérémonie Vodoukonougan réservée plus aux déités de grande assise.

5.3.2. Les différentes déités du panthéon impliquées

Comme nous l'avions souligné plus haut, le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé se caractérise d'une pluralité de vodou. Pourtant, tous n'ont pas la même assise territoriale. Ainsi, la cérémonie du Vodoukonougan, en dehors des trois Togbui vodou, toute la famille de vodou Hébiésso et plus précisément Adayro et Agboe sont les vodou les plus impliqués dans cette cérémonie au point que certains ont l'habitude de désigner la cérémonie de Hébiésso Konou.

Toutefois, tous les vodou du terroir ouatchi de Vo-Koutimé sont honorés à l'occasion par la participation de leurs prêtres ou de leurs adeptes et celle d'une classe jeune.

63

5.3.3. L'engagement des jeunes dans le culte vodou

De tous les participants à la cérémonie de Vodoukonougan, celui d'une classe jeune de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé est la plus marquante. En effet, cette cérémonie démontre le degré d'attachement de la jeunesse au culte vodou, chose rarissime dans une mondialisation où les valeurs cultuelles des sociétés africaines sont en passe de disparaître. Ainsi, la prise de relève des pratiques cultuelles à Vo-Koutimé ne laisse personne dans la perplexité.

En dehors des noms théophores, Yébéssivi, Husrovi, qui font mention quotidiennement aux jeunes adeptes de vodou à Vo-Koutimé, leurs attachements sont plus vestimentaires (Photos ci-dessous). Lors des cérémonies du culte vodou et surtout du Vodoukonougan, les néophytes adeptes de vodou (Yébéssivi et Husrovi) se distinguent avec grand plaisir de par leurs accoutrements.

Photo n°5.6 : Une Yébéssivi et deux Husrovi en habits cultuels

Source : Archives de M. André Tonou46.

La cérémonie de Vodoukonougan impact considérablement la communauté de Vo-Koutimé.

5.4. Les impacts de la fête de Vodoukonougan à Vo-Koutimé

Aux yeux des populations de Vo-Koutimé, le Vodoukonougan a beaucoup de retombées d'ordres divers. Selon André Tonou47 :

46 Président du comité culturel de Vo-Koutimé.

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Nous ne regrettons jamais la cérémonie du Vodoukonougan à Vo-Koutimé. Elle nous procure sur le plan économique, la réussite des activités agricoles avec une pluviométrie régulière au cours des saisons permettant à son tour un bon rendement. En outre, tous les commerçants ouatchi de Vo-Koutimé attachés aux cultes vodou, trouvent toujours gain de cause. Par ailleurs, le Vodoukonougan nous épargne des accidents répétés, des morts prématurées, en bref des malheurs de tout genre. Un vodou qui ne satisfait pas ses adeptes se voit sa devanture poussée des herbes.

En conclusion, dans la communauté ouatchi de Vo-Koutimé, le culte vodou reste en vogue avec un attachement de la part d'une classe jeune, rassurant indubitablement la relève cultuelle. Au vu de cet enracinement dans la religion traversant les siècles, les chrétiens du pays ouatchi de Vo-Koutimé voient leur foi tachée de remords avec toujours un penchant à la religion de leur terroir.

47 Entretien du 22/07/2020 à son domicile à Vo-Koutimé.

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Chapitre 6 :

LES CHRÉTIENS DE VO-KOUTIMÉ FACE AUX CULTES VODOU : LE SYNCRÉTISME

Dans les communautés africaines, les missionnaires ont du mal à soustraire les néophytes chrétiens de leurs cultes du terroir. Ainsi, au Togo et précisément en pays ouatchi de Vo-Koutimé, le chrétien, en plus de sa foi biblique, n'hésite guère à recourir à la religion vodou. De ce constat, deux interrogations se dégagent à savoir : quels sont les facteurs qui contraignent les chrétiens à adopter le mimétisme religieux ? Quels sont les caractères que prenne le syncrétisme des chrétiens ? Ainsi, dans ce chapitre, nous aborderons les facteurs occasionnant le syncrétisme, en premier lieu, et puis, nous parlerons en second lieu des caractères que prenne ce phénomène du syncrétisme.

6.1. Les circonstances occasionnant le mimétisme religieux

La volteface du chrétien de Vo-Koutimé envers les cultes du terroir n'a toujours pas été un effet de hasard. Bien des circonstances obligent le néophyte chrétien ouatchi à accrocher par moment sa foi biblique. Miwonunyi Abotsi48 s'indigne en ces termes :

Si dans la Bible en Romains 8 v 9, il est dit : « Pour vous, vous ne vivez pas selon la chair, mais selon l'esprit, si du moins l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il ne lui appartient pas » et dans la même perspective en Jean 6 v 63 en soulignant que « c'est l'esprit qui vivifie ; la chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie » témoignant ainsi de l'importance particulière accordée à l'esprit au détriment de la chair humaine, le chrétien ouatchi a du mal à faire cette volonté biblique.

Alors, aux yeux du néophyte, à quoi est-il bon de ne vivre que pour l'esprit ?

Aussi, la recherche d'une promotion dans sa carrière, de la réussite des affaires, d'un enfant, ou bien vouloir recouvrer sa santé sont des désirs de la chair humaine qui poussent le croyant vers les cultes de son terroir, après avoir tant espéré une solution dans l'église. Il revient honorer ses engagements ou promesses lorsque les voeux sont exaucés (K. A. Honou-Amedome, 2015, p. 24).

48 Ingénieur retraité ç Vo-Koutimé et fidèle catholique, 70 ans, Information recueillie le 24/07/2020 à son domicile.

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Des lors, le néophyte a une conception magique de Dieu. Il prie Dieu, non pour l'aimer davantage et pour que sa volonté soit faite, mais pour que Dieu lui fasse sa volonté. Il demande le pain terrestre en négligeant celui du ciel ; il demande la tranquillité et non la paix. Il aimerait que Dieu révélé soit efficace comme les puissances tutélaires, hic et nunc (ici et maintenant) (M. K. Kuakuvi, 2011, p. 33).

Dans les sociétés africaines, la vie est un bien précieux, une richesse. Elle a plus de valeur que l'argent et l'or. Alors, on ne peut et ne doit la négliger ni la banaliser (A. Kuadjovi-Ayedewou, 1986, p. 8). Cela étant, en cas de maladie dont on n'a pu trouver solution dans les églises, on a recours aux géomancies, aux Bokono ou aux prêtres vodou afin d'en connaître en premier lieu les causes et d'y rémédier.

En effet, dans les sociétés africaines en général, la maladie est souvent vécue comme la conséquence d'une rupture avec les forces invisibles que sont les ancêtres et les esprits. Par conséquent, elle ne se limite guère à une atteinte du corps, mais nécessite une explication spirituelle. Or la médecine traditionnelle est inséparable des cultes du terroir, pas de soins sans sacrifices ou du moins sans une mise en scène rituelle (K. Napala, 2007, p. 692). Pour le néophyte, quelle que soit la médecine à laquelle il recourt, l'essentiel est qu'il recouvre sa santé, sans forcément tenir compte de sa foi chrétienne (K. Napala, 2007, p. 693).

Il faut noter que souvent, le patient chrétien, ne voulant pas s'afficher, se fait représenter par ses parents ou des membres de la famille pour les circonstances. Fréquemment, on fait toujours des promesses au vodou qu'on rembourse après avoir trouvé satisfaction de sa santé.

En outre, le missionnaire allemand Knall, lors de ses missions à Vo-Koutimé, a fait un constat amer qu'il exprime en ces termes :

[...] les Ouatchi de Vo-koutimé sont très enracinés dans la religion vodou au point que la mission catholique, présente depuis des dizaines d'années, n'arrive guère à les détourner.

Leurs fidèles, en dépit des baptêmes et confirmations, retournent dans la religion traditionnelle49.

J. C. Alladaye (2003, p. 307), qualifie ces types de fidèles de « Chrétiens caméléons » en donnant quelques caractéristiques en ces termes :

Le caméléon change de couleur. Son instinct le pousse à devenir vert avec le vert [...], il est un petit chef-d'oeuvre du Bon Dieu.

Le chrétien caméléon n'est pas un chef-d'oeuvre. Il change partout de couleur lui aussi. Le matin à l'église, il est bien blanc, il prie, il se confesse, il communie, il récite des prières très efficaces ; il n'oublie pas ses neuvaines.

49 Source : Archives du Bloc synodal de l'Église Évangélique Presbytérienne du Togo.

67

Quand tombe la nuit, il redevient gris, puis noir. Il retourne à la boue de ses passions ou aux errements de son ancien fétichisme [...], et le lendemain, la série des métamorphoses recommence.

Alors, bien des chrétiens ouatchi de Vo-Koutimé ne participent aux offices religieux et ne se retrouvent véritablement dans la liturgie chrétienne que dans la mesure où les cantiques sont chantés en langue locale, sur fond rythmique autochtone, ce qui n'est pas la moindre des choses dans leur vie spirituelle (A. Sénou, 2019, p. 88). Dans la même perspective, M. K. Kuakuvi (2011, p. 32) affirme :

Beaucoup de catholiques vont à l'église le dimanche, mais pour certains problèmes de santé et d'envoûtement, ils recourent aux pratiques traditionnelles. On a l'impression que la victoire des missionnaires est une victoire à la Pyrrhus ; les chrétiens conservent une croyance très forte en l'efficacité des pratiques des religions traditionnelles.

Par ailleurs, l'attachement du converti à la religion chrétienne et aux cultes du terroir est dû à la valeur du lien familial dans les communautés africaines. Il vit pour le groupe et par le groupe. Ses joies et ses peines sont celles de l'ensemble du lignage ou de la famille. Ainsi, ce qui l'affecte touche également les autres ; ce qui le rend heureux est aussi partagé avec son entourage. Son existence est donc communautaire et ne peut en être autrement (A. Kuadjovi-Ayedewou, 1986, p. 10).

En effet, les cultes constituent un cordon reliant les membres d'un lignage ou d'une famille. Ainsi, en devenant d'un jour à l'autre fidèle de la religion chrétienne qui, de par ses dogmes, rompt avec les cultes lignagers, le chrétien se place dans une impasse entre le choix de tourner le dos aux cultes de la famille et celui de faire la volonté du Christ. Or, en choisissant ce dernier, un éclatement nait au sein des familles bouleversant ainsi l'ordre préétabli. K. A. Anatho (2014, p. 135) s'inscrit dans la même logique en affirmant :

La vie chrétienne des nouveaux convertis ne pouvait pas se concevoir en dehors des habitudes et des exigences du milieu social et de l'éducation reçue de ce milieu. Les néophytes ne pouvaient pas suivre facilement les missionnaires dans leur prohibition [...], s'ils le faisaient, ils se retireraient aux conceptions et aux relations de leur enfance et de leur monde et formeraient un corps étranger dans l'organisation socioculturelle traditionnelle. Ils risqueraient alors de perdre le bénéfice de la confraternité et du soutien de l'ensemble de la collectivité.

Craignant alors les retombées qui pourraient subvenir, le chrétien ouatchi de Vo-Koutimé conserve à la fois ce lien tout en continuant de suivre les enseignements bibliques.

Par ailleurs, le noeud du phénomène de syncrétisme serait dû aux interprétations que feraient des néophytes chrétiens de certains discours et actes des responsables de l'Église. La méconnaissance de la liberté que l'Eglise proclame a produit chez certains la méfiance et même le recul (A. Kuadjovi-Ayedewou, 1986, p. 35).

68

En effet, lors de sa visite au Togo (1985), le Pape Jean Paul II, dans son discours, invite les Togolais à « être authentiquement africains et authentiquement chrétiens, sans séparer l'un de l'autre et sans craindre de témoigner en public nos convictions50 ». Ce discours ne sera qu'un stimulus pour le mimétisme religieux et la photo (ci-dessous) servira d'argument.

Photo n°6.1 : Le Pape Jean Paul II rencontre le nyigblinnu Asenu de Togoville en août

1985

Source : Archives de la Maison des Missionnaires Comboniens à Cacavéli (Lomé).

Alors, les conversions des néophytes n'étaient pas synonymes de ferveur, ils n'abandonnèrent pas totalement du jour au lendemain leurs habitudes, leurs cultes ancestraux. Ils ont une foi superficielle liée à l'enracinement dans la religion du terroir, car ils se bornent le plus souvent à adopter des marques extérieures de ces religions pour faire preuve d'émancipation et montrer qu'ils évoluent vers les idées européennes, mais le fond de l'individu arrive bien difficilement à se dégager de l'emprise des croyances et de la philosophie cultuelle de son milieu. Tel est le constat amer de K. Napala (2007, p. 724). Nombreux sont les caractères témoignant le syncrétisme du chrétien au sein de la communauté à Vo-Koutimé.

6.2. Les caractères syncrétistes des chrétiens à Vo-Koutimé

Le syncrétisme des fidèles chrétiens de Vo-Koutimé prend plusieurs formes, de l'observance des interdits cultuels jusqu'à la sauvegarde des noms vodou dans les registres de baptême en passant par le recours aux bo « gris-gris » (bienfaisant).

50 Témoins de l'évangile : la présence des Missionnaires Comboniens au Togo-Ghana-Bénin (1964-2014), p. 71.

69

6.2.1. L'observance des interdits cultuels

Les néophytes chrétiens de cette communauté ne se démarquent quasiment pas de cette emprise des cultes vodou. En effet, tous les interdits se doivent une observance particulière vis-à-vis des populations au risque de tomber sous le coup de la colère de leurs protecteurs. Le choix de tourner le dos aux cultes vodou ne donne à qui que ce soit la capacité de désobéir aux règles préétablies qui ne sont qu'une émanation des dieux du terroir. Nombreux sont les signes qui témoignent du respect des chrétiens à ces interdits. La forêt de Togbui Gbe est entourée de plusieurs interdits au rang desquels on trouve la défense d'y entrer, d'y chercher le bois de chauffage, de regarder de face les vodou qui s'y trouvent, tant de prohibitions bien connues par toute la communauté et autant respectées par les adeptes vodou que par les chrétiens.

Par ailleurs, le chrétien ouatchi de Vo-Koutimé obéit, dans son quotidien, à la défense de frapper qui que ce soit avec les ustensiles de cuisine en occurrence le pilon, la louche, la spatule, les assiettes, en bref à des règles placées souvent sous la protection de vodou Sagbata à qui appartient la terre.

6.2.2. Le chrétien et le bo

En dépit des condamnations des missionnaires et des clergés, les chrétiens font recours à une catégorie de bo ayant pour objet d'attirer sur soi des avantages, des profits, des bénéfices, du bien-être et du bonheur (J. C. Alladaye, 2003, p. 311).

La cherté de la vie et le fait de se protéger contre les mauvais sorts obligent certains chrétiens du pays ouatchi de Vo-Koutimé à se vouer aux ports des talismans, des amulettes, des bagues ou bracelets auxquels on attribue des pouvoirs de protection. Ainsi, dans la communauté ouatchi de Vo-Koutimé, les chrétiens font usage de ce type de bo dans les affaires, pour avoir plus de clientèle afin d'augmenter leur rendement. Les néophytes chrétiens, perdant souvent patience du laxisme de Dieu, s'adonnent à l'usage des bo ayant des effets immédiats, pour se protéger de toute tentation de la part d'un ennemi. Il est clair que le chrétien de Vo-Koutimé, en continuant d'aller à l'église, croit toujours en la force de ses pratiques cultuelles dans la perspective d'être fort et doté de tout.

6.2.3. La sauvegarde des noms théophores

Dans les communautés africaines, les noms sont des éléments d'identification d'une personne dont leur sens diffère d'une communauté à une autre. En bref, les noms constituent des cartes

70

d'identité. Ainsi, dans la communauté ouatchi de Vo-Koutimé, en fonction du pluralisme des vodou du panthéon, seuls les noms théophores distinguent un adepte de tel vodou à tel autre.

De par le sens cultuel des noms, les néophytes chrétiens de la communauté ouatchi de Vo-Koutimé en particulier, au cours de leur baptême, ajoutent aux noms théophores, un nom chrétien (cf. tableau ci-dessous). Or au cours des six premiers mois de l'instruction des aspirants-catéchumènes, on leur fait connaître les obligations du baptême qui sont l'abandon complet de la religion traditionnelle avec toutes ses composantes. Toutefois, le renoncement dont il s'agit était donc fait uniquement d'actes, de questions-réponses obligatoires qui n'impliquent pas forcément un rejet automatique du culte des ancêtres (K. Napala, 2007, p. 720) qui commence à Vo-Koutimé par la sauvegarde des noms théophores.

Même si pour le missionnaire, tout baptisé est considéré comme chrétien et compte comme tel sans rompre entièrement avec son paganisme, ou s'il a reçu le baptême en conservant de lui une conception toute païenne (K. Napala, 2007, p. 721), aux yeux des pratiquants de la religion du terroir, sans prosélytisme, cela témoigne la persistance de leur culte.

71

Tableau n°6.1 : Récapitulatif des noms théophores dans le registre de baptême

NOM DE FAMILLE

NOM THEOPHORE (VODOU)

NOM CHRETIEN

HELLE

Etsè

Godson

HELLE

Atsou

Godwin

AKAKPOVI

Azonsi

Martha

ANANI

Agossou

Irénée

ANANI

Akoété

Réné

ANANI

Edoh

Emmanuel

BADO

Edoh

David

SEVON

Akoètè

Roméo

AMETEPE

Agossivi

Jeannette

WUIKPO

Edoh

Gérad

N'SOUGAN

Dosseh

Norbert

BOLOUVI

Agossa

Honoré

AYAYI

Sonouga

Marthias

SOUNOU

Edoh

Paulin

ASSIGBE

Sémadégbé

Rémi

AMOUSSOU

Akoélé

Claudine

Source : Archives des registres de baptême de la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé.

Les noms théophores figurant dans ce tableau font référence à plusieurs vodou de l'univers religieux des Ouatchi de Vo-Koutimé, entre autres, Vénavi, Ago, Sogbo, et Afan et témoignent de l'importance qu'accordaient les baptisés à leur culte. Car, selon les mots du Père Amah-

Tchoutchoui Michel51 : « ce sont les fidèles qui désirent maintenir leurs noms de la religion traditionnelle en ajoutant un nom chrétien ».

Nous pouvons conclure que le converti ouatchi de Vo-Koutimé, bien qu'étant chrétien, ne rompt pas totalement avec la consultation des devins, le recours aux déités lignagères et avec les ancêtres défunts. En clair, les abandonner ou les renier constitue pour lui une crise d'identité.

De cette troisième partie, retenons que le culte vodou de la communauté de Vo-Koutimé n'a guère fléchi face à la ferveur et la détermination des missionnaires chrétiens. Alors du dynamisme de ce culte du terroir à travers la cérémonie de Vodoukonougan, aux actes syncrétistes des néophytes chrétiens de Vo-Koutimé, nombreux sont des éléments qui témoignent, en partie, l'échec du christianisme dans la communauté ouatchi de Vo-Koutimé.

72

51 Entretien du 11/03/2020 sur la paroisse Marie-Reine de l'Univers.

73

CONCLUSION GÉNÉRALE

74

Au terme de notre travail, il est impérieux de présenter le bilan des principaux volets de notre problématique.

Nous retenons que la fondation de Vo-Koutimé fut l'oeuvre de l'ancêtre Kotokou qui avait conduit la migration depuis Akoumapé. Au cours de l'accession au trône du vieux Akouma, Kotokou partit et fit escale avec ses alliés de Vogan en la personne de l'ancêtre Assiobo. Il quitta dans la seconde moitié du XVIIIe siècle à Vogan pour élire domicile sur le site de Vo-Koutimé précisément dans le premier quartier Atchandomé. Il se fit rejoindre plus tard par ses cousins qui résidaient à Vogan, en l'occurrence l'ancêtre Agbodi, Egun, Edoue et son oncle Agahoun sans oublier l'ancêtre Agadi. Ceux-ci fondèrent successivement les quartiers de Mamissi, Kpota, Soko, Glopé et Agadi.

Avec le développement de leurs activités agricoles souvent sur des champs éloignés d'environ deux à trois kilomètres de leur village et leur volonté de rester plus proche de leurs fermes, les ancêtres construisirent à l'origine des hameaux de culture (agbékopé) pour servir de lieu de repos qui devinrent un quartier du même nom que leurs quartiers d'origine.

Au cours de la colonisation française, la population, dû aux demandes accrues d'impôts ou taxes et surtout de la recherche des mains-d'oeuvre gratuites dans la réalisation des infrastructures, par le biais du chef Domafli Akakpo, quitta en masse pour rejoindre leurs parents, cousins, frères, oncles, etc. Ces nouveaux quartiers des fermes devinrent démographiquement plus importants que le village matriciel.

L'ensemble des nouveaux quartiers et le village matriciel forment alors la communauté ouatchi de Vo-Koutimé.

Il convient de rappeler que les Ewé, depuis leurs lieux d'origine, croyaient en la religion de leur terroir. Ainsi, les Ouatchi de Vo-Koutimé, sur ce nouveau site, n'ont guère hésité à mettre en place le même système religieux, sauf quelques particularités par endroits, avec une pluralité de vodou caractérisant leur panthéon. Ils évoluèrent dans ce monde cultuel jusqu'en janvier 1914 où les missionnaires chrétiens entrèrent en contact avec eux.

Ce premier contact marqua le début de la christianisation porté les missionnaires catholiques. Nous devons rappeler que l'avènement de la mission catholique n'est pas spontané.

Ainsi, les missionnaires catholiques ont, dans un premier temps, fondé la mission à Togoville le 28 août 1893. La localité mère dans l'histoire de l'expansion du catholicisme en pays ouacthi, d'où quittèrent les missionnaires pour atteindre Vogan en 1903.

75

La ferveur et la détermination conduisirent les missionnaires à se lancer dans la conquête des localités environnantes de Vogan en atteignant alors Vo-Koutimé en janvier 1914. Cette arrivée n'eut pas d'effet, car elle coïncida malheureusement avec la Première Guerre mondiale qui obligea les missionnaires à renoncer à leur mission d'évangélisation au Togo en général et à Vo-Koutimé en particulier de sorte que la mission restera toujours à l'étape embryonnaire jusqu'à l'arrivée des missionnaires de l'Église presbytérienne conduite par l'Allemand Knall en 1967.

L'avènement de la mission presbytérienne fut précédé de la fondation d'une des premières stations dans l'espace ouatchi à Hahotoé. Le missionnaire allemand partit de là pour l'exploration des localités situées à l'est dont fait partie Vo-Koutimé, qui, à la différence de Vogan, connut la première action de la mission presbytérienne.

Toutefois, l'évolution de ces deux missions avait une caractéristique spécifique. Le catholicisme connut une expansion en deux phases dont la première s'étend de 1971 à 2004. Elle est marquée par la construction de la chapelle Notre Dame de l'Église le 8 août 1971 par le Père Augusto Zancarano. La seconde qui s'étend de 2004 à 2014 qui est caractérisée par l'érection canonique de la station en paroisse sous le nom de la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé en 2004. Dès lors, le catholicisme tourna une nouvelle page de son histoire jusqu'en 2014, l'année marquant ses centenaires.

Si la mission catholique, de son côté, a connu des temps de gloire dès 1971, la mission presbytérienne, par contre, avait une existence épi phénoménale. En effet, en dehors d'une quarantaine de fidèles baptisés en 1973, soit cinq ans après, dès les années 1980, elle traversa « un chemin de croix ».

Du manque d'espace jusqu'à la désertion des fidèles soit au profit d'autres églises ou soit en faveur des cultes vodou en passant par la réticence de la population vis-à-vis de la religion chrétienne, après cinquante ans d'existence, la mission presbytérienne n'a quasiment pas gagné du terrain dans la christianisation de Vo-Koutimé.

A contrario, l'église des Assemblées de Dieu, malgré son implantation récente en 1990, en 2015 soit vingt-cinq ans après, devint la plus influente des confessions protestantes dans l'oeuvre d'évangélisation de Vo-Koutimé.

En dépit de cette ferveur des missionnaires, leur objectif premier, qu'est d'emmener les Ouatchi de Vo-Koutimé à faire table rase du culte vodou, reste toujours un défi après cent ans. Ainsi, M. K. Kuakuvi (2011, p. 32) avoue : « Dieu, en Afrique, au Togo, est unique et à ce

76

monothéisme sans dogme, pour échapper à l'évanescence temporaire chez un peuple profondément religieux par les sentiments, extrêmement porté à la suppression et outrageusement crédule, il aurait fallu un miracle. »

En effet, la population de Vo-Koutimé accorde une valeur aux cultes du terroir, à travers la cérémonie de Vodoukonougan. Célébrée tous les trois ans, elle constitue une identité culturelle pour toute la communauté. Son origine remonte à l'époque des ancêtres fondateurs du futur village de Vo-Koutimé en guise de gratitude envers les vodou de leur part dans l'évolution, la survie et la satisfaction du peuple.

Elle connaîtra une nouvelle phase dès 2010 avec la création de la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC) dont Hun? Zikpui Ayondo fut l'initiateur.

Elle acquit une existence légale avec sa publication dans le Journal Officiel en 2013, après l'approbation du Ministre de l'Administration territoriale en la personne de Gilbert Bawara.

De tous les vodou qui caractérisent le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé, vodou Adayro et Agboe (de la famille de Hébiésso) sont les plus impliquées.

Véritable ciment de la société, les néophytes chrétiens de Vo-Koutimé ne se démarquent guère du dynamisme du culte vodou qui reste à leurs yeux, une valeur cultuelle à qui ils continuent d'accorder une importance, en dépit de leur nouvelle foi. De l'observance des interdits cultuels, à la sauvegarde des noms théophores, sans oublier leur recours aux vodou en cas de besoin, nombreux sont les actes qui témoignent le caractère syncrétiste des chrétiens ouatchi. Le culte du terroir devint une porte de secours en cas d'insatisfaction.

Ainsi, la christianisation de Vo-Koutimé depuis 1914 s'est heurtée à la résistance de la communauté de Vo-Koutimé pour laquelle le culte vodou devient une question de prestige et d'honneur.

En dépit de quelques exploits, la conviction qu'avaient les missionnaires chrétiens à leur arrivée qu'il fallait déloger, délivrer la population du paquet de « sauvagerie » dans lequel elle étaient plongée et leur volonté affirmée de détruire le vieil édifice religieux africain en faisant germer sur ses cendres, la foi dans « le Christ ressuscité » est loin d'être atteinte (J. C. Alladayé, 2019, p. 117).

77

Les maints efforts des prêtres pour relever le défi n'ont toujours pas décanté le phénomène du syncrétisme qui taraude depuis des dizaines d'années l'évolution des missions d'évangélisations.

Toutefois, la pérennité du christianisme à Vo-Koutimé n'est pas menacée. Mais le phénomène du syncrétisme donne l'impression d'une nouvelle forme de christianisme, comme partout ailleurs en Afrique.

78

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

79

1. Les sources

1.1. Les sources orales : liste des informateurs

Nom et prénoms

Statut

social/fonction

Âge (ans)

Lieu de

l'entretien

Date de

l'entretien

1

ABOTSI Miwonunyi

Hubert

Ingénieur retraité

70

Agadi

24-07-2020

2

AGBASSAGBE Amèvi

Enseignant retraité

70

Kpota

22-07-2020

3

FOVI Agbénigan

Prêtre Ziowu

65

Mamissi

25-07-2020

4

AKAKPO Miwonunyi S.

Maître maçon

53

Soko

15-03-2020

5

AKAKPO Akouété Z.

Chef canton de Vo- Koutimé

76

Glopé

15-03-2020

6

AMAH-

TCHOUTCHOUI Têko Michel

Curé de la Paroisse

Marie-Reine de
l'Univers

45

Kpota

11-03-2020

7

AMEDONOU Yaovi

Diacre de l'église

des Assemblées de Dieu

51

Glopé

16-03-2020

8

AMOUZOU Kokouvi

Géomancien

65

Atchandomé

23-07-2020

9

AYONDO Zikpui

Prêtre vodou

76

Mamissi

15-03-2020

10

DESSABA Kodjo

Responsable des

Témoins de Jéhovah

75

Gahonou

17-03-2020

11

DJOKOTO Koulékpato

Doyen de famille

Djokoto

87

Kpota

07/03/2020

12

KLOUTSE Alfred Jean

Vice-Président de la

Paroisse catholique
de Vogan

51

Atchandomé

13-03-2020

13

KODJI Simon

Catéchiste (catholique)

52

Soko

12-03-2020

80

14

 

KOMBEDE Jean-Claude

Curé retraité

74

Vogan

23-07-2020

15

TONOU André

Conseillé UNIR

70

Agadi

22-07-2020

16

YENDABRE Renaud

Vicaire Vo-Koutimé

40

Kpota

23-07-2020

1.2. Documents d'archives

. Centenaire de la Paroisse Saint Ferdinand de Vogan

. Registre de baptême, de communion, de confirmation et de mariage de la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé

. Livret des quarantenaires de la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé

. Archives de la Maison des Missionnaires Comboniens à Lomé (Cacavéli)

. Archives des Missionnaires de Société du Verbe Divin à Lomé (Hédzranawé)

. Archives du Chef Akakpo Zouméké

. Archives de Tonou André

. Archives de Ayondo Zikpui

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83

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NAPALA Kuwedaten, 2007, Les forces religieuses et les rapports interreligieux au Togo sous la colonisation française : 1914-1960, Thèse de doctorat d'Histoire moderne et contemporaine, Bordeaux, Université de Montaigne-Bordeaux 3, 3 volumes.

PAZZI Roberto, 1979, Introduction à l'aire culturelle ajatado, Lomé, INSE. RIVIÈRE Claude, 1981, Anthropologie religieuse des Evé du Togo, Lomé, NEA.

SÉNOU Azontowou, 2002, Origine et identité des Ouatchi de Gboto, Mémoire de maîtrise en Histoire, Lomé.

SÉNOU Azontowou, 2010, Les migrations éwé et occupation du pays ouatchi du XVIIIe siècle à la conquête coloniale, Thèse de Doctorat unique en Histoire, Lomé, Université de Lomé.

SÉNOU Azontowou, 2019, « Religions dites traditionnelles et christianisme en pays ouatchi au sud-est du Togo (XIXe-XXIe siècle) » in ETOU Komla (dir), Christianisation et résilience des religions endogènes en Afrique (XIXe-XXIe siècle), Lomé, Notes scientifiques, homme et société, pp. 75-92

SÉWONU Seth, 1967, Le sacrifice dans la croyance traditionnelle des éwé, Thèse de doctorat en Théologie, Paris.

SURGY Albert (de), 1988, Le système religieux des Evhé, Paris, Harmattan.

TOULASSI Amè Mawuéna Julien, 2011, De la maladie au syncrétisme et du syncrétisme à la maladie : Esquisse d'une étude pastorale, Mémoire de Théologie, Lomé.

TRIMUA Daké, 1979, L'église évangélique au Togo : 1914 à 1940, Thèse de doctorat du 3e cycle en Théologie, Strasbourg.

84

ANNEXES

85

Annexe n° 1 : Publication de la S.A.F.C.A.N.I.V.K.C dans le Journal Officiel de la République Togolaise N° 1387/MATDCL-SG-DLPAP-DOCA DU 16/10/201352

52 Source : Archives de M. Tonou André, président du comité culturel de Vo-Koutimé.

86

TABLE DES ILLUSTRATIONS

87

Liste des photos

Photo n°1.1 : Le rejeton de l'historique Anacardier des Ouatchi de Vo-Koutimé 19
Photo n°2.1 : Sanctuaire de Togbui Ziowu et son prêtre Photo n°2.2 : Vue partielle de la

forêt sacrée de

Ziowu ....28

Photo n°2.3 : Yohové 29

Photo n°2.4 : Togbui Gbevé 30

Photo n°2.5 : Dulégba du village mère 31

Photo n°2.6 : Type de champs placé sous protection de vodou 35

Photo n°3.1 : Le Père Arnold Janssen Photo n°3.2 : Les cinq missionnaires SVD .39

Photo n°3.3 : Le Pape Jean Paul II sur le lac Togo 41

Photo n°3.4 : Ordination d'Augusto Zancarano Photo n°3.5 : La tombe de Zancarano à

Vogan 42

Photo n°4.1: La chapelle Notre Dame de l'Église de Vo-Koutimé .45

Photo n°4.2 : Le bâtiment de l'école primaire catholique de Vo-Koutimé 47

Photo n°4.3 : Temple de l'église presbytérienne de Vo-Koutimé 50

Photo n°4.4 : Temple mère de l'église des Assemblées de Dieu 51

Photo n°5.1 : Hun? Ayondo Zikpui 57

Photo n°5.2 : Un groupe d'adeptes vodou en caravane 59

Photo n°5.3 : La participation des prêtres, adeptes et non-initiés à l'apothéose de la cérémonie

de 2014 60

Photo n°5.4 : Les deux Adawa au sanctuaire de Ziowu 61

Photo n°5.5 : Les Avlokété transportant les Avossa 62

Photo n°5.6 : Une Yébéssivi et deux Husrovi en accoutrement de vodou 63

Photo n°6.1 : Le Pape rencontre le nyigblinnu Asenu de Togoville 68

Liste des tableaux

Tableau n°2.1 : Récapitulatif des couvents 33

Tableau n°4.1 : Récapitulatif de baptêmes, de communions, de confirmation et de mariages

sur la Paroisse Marie-Reine de l'Univers de Vo-Koutimé de 2004 à 2014 48

Tableau n°4.2 : Les Prêtres et Vicaires ayant servi sur la paroisse de Vo-Koutimé. 48

Tableau n°6.1 : Récapitulatif des noms théophores dans le registre de baptême 70

Liste des cartes

Carte n°1 : L'espace ouatchi de Vo-Koutimé 12

Carte n°2 : Itinéraire migratoire des Ouatchi de Vo-Koutimé 24

Carte n°3 : Les différentes églises et leur sise à Vo-Koutimé 52

88

TABLE DES MATIÈRES

DÉDICACE i

REMERCIEMENTS ii

SOMMAIRE iii

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

Première partie : MISE EN PLACE ET PANTHÉON DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ

À L'ORÉE DE L'IMPLANTATION DES MISSIONS CHRETIÉNNES EN 1914 13

Chapitre 1 : LA MISE EN PLACE DES OUATCHI DE VO-KOUTIMÉ 15

1.1. Aperçu historique des Ouatchi d'Akoumapé et de Vogan 15

1.1.1. Brève histoire sur les Ouatchi d'Akoumapé 15

1.1.2. Historique des Ouatchi de Vogan 16

1.2. De Vogan à l'occupation de Vo-Koutimé 17

1.2.1. Les raisons du choix du site et le toponyme « Vo-Koutimé » 18

1.2.2. L'extension du village 19

1.2.3. Essai de périodisation 20

1.3. L'organisation sociopolitique et économique des Ouatchi de Vo-Koutimé 22

Chapitre 2 : ÉTAT DES LIEUX DE L'UNIVERS SOCIORELIGIEUX DES OUATCHI DE

VO-KOUTIMÉ AVANT 1914 25

2. 1. Le panthéon des Ouatchi de Vo-Koutimé 25

2.1.1. Mawu (Dieu suprême) 25

2.1.2. Les Togbui vodou et leurs demeures à Vo-Koutimé 26

2.1.2.1. Togbui Ziowu et le Ziowuvé 26

2.1.2.2. Togbui Yoho et le Yohové 28

2.1.2.3. Togbui Gbe et le Gbevé 29

2.1.3. Les dieux secondaires 30

2.1.4. Les couvents 32

2.2. L'ancrage de la religion vodou à Vo-Koutimé 33

2.2.1. La vie sociale imprégnée du culte vodou 34

2.2.2. L'économie sous la marque des vodou 34

Deuxième partie : IMPLANTATION ET EXPANSION DU CHRISTIANISME A VO-

KOUTIMÉ DU XXE AU XXIE SIÈCLE 36

Chapitre 3 : IMPLANTATION DU CHRISTIANISME À VO-KOUTIMÉ AU XXE SIÈCLE

38

3.1. La mission catholique 38

3.1.1. Le prélude à l'avènement des missionnaires catholiques à Vo-Koutimé 38

3.1.1.1. Brève histoire de la mission catholique à Togoville 38

3.1.1.2. Panorama sur le catholicisme à Vogan 41

3.1.2. Les missionnaires catholiques à Vo-Koutimé de 1914 à 1971 42

3.2. L'arrivée de la mission presbytérienne dès 1967 à Vo-Koutimé 43

3.3. Les autres confessions religieuses 44

Chapitre 4 : EXPANSION DU CHRISTIANISME À VO-KOUTIMÉ DÈS 1971 45

4.1. La mission catholique 45

89

4.1.1. Les grandes phases du progrès catholique 45

4.1.1.1. La première phase : de 1971 à 2004 45

4.1.1.2. La deuxième phase : de 2004 à 2014 47

4.2. Les missions protestantes 49

4.2.1. L'épiphénomène de la mission presbytérienne à Vo-Koutimé 49

4.2.2. Le progrès considérable des autres confessions : le cas de l'Église des Assemblées de

Dieu 50

Troisième partie : RÉSILIENCE DU CULTE VODOU DES OUATCHI DE VO-

KOUTIMÉ DU XX AU XXIE SIÈCLE 53

Chapitre 5 : DYNAMISME DU CULTE VODOU À VO-KOUTIMÉ : LE CAS DU

VODOUKONOUGAN 55

5.1. Aperçu historique du Vodoukonougan 55

5.2. La naissance de la Spéciale association des féticheurs coutumiers africains nationaux et

indispensables cantonaux des féticheurs de Vo-Koutimé centre (SAFCANIVKC) 56

5.3. Le Vodoukonougan à Vo-Koutimé 57

5.3.1. Les grandes phases du Vodoukonougan 58

5.3.1.1. Le Doufankaka 58

5.3.1.2. Les cérémonies proprement dites 59

5.3.1.3 Agbassakaka ou l'apothéose 60

5.3.2. Les différentes déités du panthéon impliquées 62

5.3.3. L'engagement des jeunes dans le culte vodou 63

5.4. Les impacts de la fête de Vodoukonougan à Vo-Koutimé 63

Chapitre 6 : LES CHRÉTIENS DE VO-KOUTIMÉ FACE AUX CULTES VODOU : LE

SYNCRÉTISME 65

6.1. Les circonstances occasionnant le mimétisme religieux 65

6.2. Les caractères syncrétistes des chrétiens à Vo-Koutimé 68

6.2.1. L'observance des interdits cultuels 69

6.2.2. Le chrétien et le bo 69

6.2.3. La sauvegarde des noms théophores 69

CONCLUSION GÉNÉRALE 73

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE 78

ANNEXES 84

TABLE DES ILLUSTRATIONS 86

TABLE DES MATIÈRES 88






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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon