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Les autochtones minoritaires et la dynamique d'urbanisation au Cameroun: l'expérience du département du Mbéré dans la région de l'Adamaoua (Cameroun)


par Sylvester DIGNA DENAM
Université de Ngaoundéré - Master II en Science Politique 2018
  

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A- VERS UNE PERTE DES REPÈRES CULTURELS

Culture, conçue comme « un ensemble de règles stables et homogènes, partagées par les individus d'un groupe, et inspirant leurs actions et leurs modes de pensée ».128La culture, consiste en un. Au sens de Gabriel ALMOND, et Sydney VERBA, la culture politique quant à elle, réfère à. Il s'agit concrètement d'un ensemble de manière de voir, de faire et de sentir le monde propre à un groupe donné. L'urbanisation conduisant à l'avènement d'un monde cosmopolite, assure en zone urbaine, la prééminence de la culture majoritaire de la population locale. Il n'est dès lors pas rare d'identifier des autochtones citadins s'écarter des normes et valeurs traditionnelles au nom de la modernité129. Cette situation a grandement été évoquée par les populations autochtones qui, décriant la perte de sens ambiante, estiment « ne plus se reconnaitre dans le mode de vie des habitants ».

Dans une déclaration susceptible de faire état d'une confession, Jean GOTTMAN estime disait « Plus j'ai eu l'occasion d'étudier des phénomènes d'urbanisation, ceci depuis une vingtaine d'années au moins, plus j'ai été convaincu que nous passions actuellement par une révolution dans la répartition de l'habitat dans le monde qui s'accompagne d'une révolution dans le système de genres de vie prédominants dans les pays civilisés. Le genre de vie urbain va devenir, en

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128 Ricardo CIAVOLELLA et Éric WITTERSHEIM, Introduction à L'anthropologie du politique, Bruxelles, Louvain-La-Neuve De Boeck, coll. « ouverture politique », 2016, p. 8

129 Cet état de chose tendrait à légitimer la déviance politique, forme pathologique de la culture politique.

adoptant des formes différentes de celles qui furent classiques dans les villes du passé, même d'hier, celui de la grande masse de l'humanité dans la plupart des pays »130

B- LE CARACTÈRE RESIDUEL DE PARTICIPATION AU PROCESSUS D'URBANISATION

Le caractère résiduel de participation au processus d'urbanisation se traduit vraisemblablement d'une part, par le rejet implicite des pratiques sociales urbaines et la campagne de villagisation de la ville131d'autre part.

Il semble, à l'observation « béhavioriste », que la grande partie des populations autochtones qui, du fait de l'exode rural opte pour la ville comme lieu de prédilection continu à vouloir perpétuer certains comportements qui résiste douloureusement au mode de vie urbain. D'aucuns n'hésitent pas à transposer même dans les lieux publics ce qu'ils appellent affectueusement « mô'o sayé », ou choses du village.

Ce qui conduit parallèlement à la diffusion en plein centre urbain par exemple des pratiques propres à la campagne.

En tout état de cause, il convient de relever que bien que l'on observe une tendance à la ruralisation des zones urbaines du département, cette cohabitation semble faire corps avec le phénomène d'urbanisation d'autant plus que le rural dans cette circonscription précède l'urbain. Ce qui ne manque pas d'accroître incidemment les replis vers des espaces éloignés du centre urbain ou mouvement de délocalisation résidentielle.

C- LE RISQUE DE RECONVERSION POLITIQUE DES REFUGIES

Dans un contexte actuel marqué par une forte croissance démographique du fait des facteurs non seulement naturels (augmentation du taux de natalité, exode rural et migration) mais surtout conjoncturels avec le flux des refugies qui atteint des proportions considérables, et parfois même plus importante que la population locale autochtone, l'on est en droit de se préoccuper du sort futur du pouvoir politique. Car, Si à la suite des anthropologues et historiens, nous reconnaissons, que le pouvoir reposerait « sur la richesse en gens (wealth in people) et en biens (wealth in things), comme dans les sociétés eurasiatiques »132, a fortiori dans une société démocratique où la majorité fait la loi, il parait légitime de craindre le flux des refugies et leur potentiel implication politique sur le territoire d'accueil. Car ce serait signer l'extirpation des autochtones du monopole politique de décision. Cette préoccupation tient à deux raisons : la première est le caractère trait-d `union des communautés vivant dans le département, et la seconde, rigoureusement déductible de la première, la possession par les refugies de la carte nationale d'identité camerounaise qui les confère de droit la possibilité de se faire délivré une carte d'électeur.

SECTION II : LA PRÉDOMINANCE DU MOUVEMENT DE DÉLOCALISATION RÉSIDENTIELLE OU DESURBANISATION ET LE VISAGE CONTRASTÉ DE L'URBANISATION

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130 Gottmann Jean, L'urbanisation dans le monde contemporain et ses conséquences politiques, In: Politique étrangère, n°6 - 1960 - 25? année, p. 557

131 Mandjack Albert,

132 N. Loraux, Né de la terre. Mythe et politique à Athènes, Paris, Le Seuil, 1996 cité in Problèmes de l'autochtonie et de l'ethno citoyenneté en Afrique, Centre d'Etudes et de Recherche Internationales, 2000

Mémoire présenté par DIGNA DENAM Sylvester

L'espace constitue de tout temps, le terrain fertile à l'observation des rapports de force et phénomènes de pouvoir dans toute société politique. Les sociologues à l'instar de Jules Rémy et L. Voyez, mettant en évidence les dynamiques sociales des phénomènes d'urbanisation, voient les villes, à la fois comme enjeu de Politique (urbaines), comme espace d'appropriation et de mode de vie spécifique.133. Dans cette configuration, il importe d'analyser les ressorts du mouvement de délocalisation résidentielle d'une part, avant de scruter le visage contrasté de ce phénomène dans le département du Mbéré.

Photo 4 : Vue panoramique de Meiganga, chef-lieu du département du Mbéré

PARAGRAPHE I : LE MOUVEMENT DE DÉLOCALISATION RESIDENTIELLE

La délocalisation résidentielle en zone urbaine, est inextricablement liée à la notion de minorité. Au sens d'Alain Fenet, « il n'y a de minorité que lorsqu'il y a un groupe, c'est-à-dire non pas une collection indifférenciée d'individus, mais une entité sociale plus ou moins structurée par des facteurs de solidarité. La situation de minorité est produite par une relation de domination spécifique entre le groupe et le pouvoir dans la société globale, s'ajoutant aux liens de contrainte générale ou leur donnant une signification particulière. Il n'y a pas de minorité en soi, ni d'un point de vue quantitatif ni d'un point de vue qualitatif, mais des groupes ténus à l'écart du pouvoir et entravés dans leurs possibilités de développement, en raison de la nature de leur lien social spécifique. Ce dernier les met en dehors du référent de légitimité et le privé de la garantie de pérennité recherchée par la société dans son organisation politique et juridique.134

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Mémoire présenté par DIGNA DENAM Sylvester

133 Rémy (J) et Voye (L), Ville, ordre et violence, Paris, PUF, 1981

134 Geneviève Koubi, De la citoyenneté, 1995 p. 80

Mémoire présenté par DIGNA DENAM Sylvester

Elle est le produit d'un rapport entre un groupe social spécifique, le territoire et le pouvoir. Dans le département du Mbéré, ce phénomène se traduit par la désurbanisation, la périurbanisation qui trouvent leur exutoire dans le relis groupal

A- LA TENDANCE A LA DESURBANISATION/ PÉRIURBANISATION

La désurbanisation et la périurbanisation, que nous juxtaposons dans le cadre de ce travail, sont deux notions certes distinctes mais susceptibles de complémentarité. Il sied tout de même de présenter brièvement la notion de contre-urbanisation.

S'inscrivant dans une vision réversible de développement politique, le phénomène de contre-urbanisation a trouvé un terrain fertile dans les Etats du Nord dits civilisés (USA, Grande Bretagne, Belgique etc.). Au sens de Beale et Berry135, à qui il revient d'attribuer la paternité du concept, la contre-urbanisation symbolise le point culminant de l'urbanisation qui se caractérise par « un mouvement migratoire dirigé des centres à forte concentration de population vers les régions plus rurales et périphériques »136. C'est donc « un processus de déconcentration impliquant un mouvement d'un état de plus grande concentration vers un état de plus faible concentration »137

La population autochtone, qui structure douloureusement le tissu économique du département, se trouve lésée dans la lutte pour l'appropriation des facteurs de production et de l'espace. Ainsi, pour assurer leur survie, plusieurs n'hésitent pas à cédé leur « droit de propriété sur le sol » 138 aux organisations non gouvernementales, ou aux personnes nanties, à des prix dérisoires. Dans une sorte de bataille voe victis139, la population autochtone préférant ainsi se replier vers des zones reculées du centre urbain pour pouvoir bénéficier des bienfaits de la nature à l'état brut140. Cette situation illustre suffisamment le phénomène de désurbanisation dans le cas spécifique du Mbéré. Des quartiers tels Gbakoungue, Daa-Boloi etc. apparaissent comme des zones privilégiées de refuge face au dilemme urbain à Meiganga.

Outre l'essor de la vente des terrains en zone urbaine, il convient d'adjoindre les conflits fonciers entre autochtones et allogènes, ainsi que l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui sont aussi susceptibles de léser les autochtones dans l'aménagement du territoire.

B- LE REPLIS GROUPAL DANS LES ZONES PÉRIPHÉRIQUES

Il s'opère au profit des quartiers populeux, et reculés de la ville. Cette situation semble être à l'origine du visage contrasté141 que prend le phénomène de l'urbanisation dans cette société. Ainsi, fuyant par la force des choses ou par désir délibérément exprimé de continuer à jouir parallèlement des bienfaits de l'urbanisation et de la nature à l'état brute (pêche artisanale,

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135 Notamment dans une étude menée aux Etats-Unis en 1976

136 Laurence THOMSIN, L'apport du concept de contre-urbanisation au cas de la Belgique, Bulletin de la Société géographique de Liège, 35, 1998, p. 58

137 Op0cit p.59

138 Le terme droit de propriété ici étant pris au sens coutumier puisque la terre appartient ici aux ancêtres qui la cèdent aux générations futures

139 Terme latin qui signifie malheur aux vaincus

140 Ils s'installent le plus souvent à proximité des cours d'eau pour exercer la pêche, dans les savanes pour la chasse etc.

141 ONANA janvier, Gouverner le désordre urbain : Sortir de la tragique impuissance de la puissance publique au Cameroun, L'Harmattan, 2019

chasse, cueillette, agriculture de subsistance etc.), les autochtones s'engagent dans un mouvement de replis vers des zones reculées du centre urbain. Pour certains, il s'agit par-là d'agir pour joindre les deux bouts142.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle