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Accueil et influence d'a rebours dans la littérature fin-de-siècle


par Nada Arfaoui
Université de Nantes  - Master de recherche en littérature française et comparée  2018
  

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UNIVERSITÉ DE NANTES

UFR Lettres et Langages

Laboratoire L'AMo

Nada Arfaoui

ACCUEIL ET INFLUENCE D'À REBOURS DANS LA

LITTÉRATURE FIN-DE-SIÈCLE

Mémoire de Master 1 Recherche de Littérature

française sous la direction de Monsieur le professeur

Paul-André CLAUDEL

2017-2018

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REMERCIEMENTS

La réalisation de ce mémoire a été possible grâce à l'aide de plusieurs personnes à qui je voudrais témoigner toute ma reconnaissance.

Je voudrais tout d'abord exprimer toute ma gratitude à l'égard du directeur de ce mémoire: Paul-André Claudel, pour sa patience, sa disponibilité et surtout ses judicieux conseils, qui ont contribué à alimenter ma réflexion et à me mettre sur le bon chemin dans mes recherches.

Je tiens aussi à remercier Madame la professeur Chantal Pierre, qui nous honorera de sa présence le jour de la soutenance pour le temps qu'elle a consacré à lire ce mémoire.

Je remercie mes très chers parents, Farhat et Zina qui m'ont toujours encouragé: vous avez tout sacrifié pour vos enfants n'épargnant ni santé, ni efforts. Vous m'avez donné un magnifique modèle de labeur et de persévérance. Je suis redevable d'une éducation dont je suis fière.

Je remercie très spécialement Bilel Issaoui, qui a été toujours là pour moi.

Enfin, je remercie tou(te)s mes ami(e)s Français(es) que j'aime tant : Amandine Mondonnet-Dupont, Marian Laloi, Jean-Hermann Hutchings pour leur sincère amitié et confiance et à qui j'adresse ma reconnaissance et mon attachement.

À tous ces intervenants je présente mes remerciements, mon respect et ma gratitude.

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Introduction

Notre recherche s'intéresse à la question de la réception d'À Rebours et à son influence dans la littérature fin-de-siècle. En effet, nous allons consacrer notre étude à la comparaison de trois ouvrages de la littérature française. La comparaison va se baser essentiellement sur À Rebours de Joris Karl Huysmans, paru en 1884, que nous allons considérer comme l'oeuvre repère. En effet, il s'agit d'une oeuvre pionnière, qui a jalonné la fin du XIX ème siècle par ses aspects novateurs, à savoir la manière dont elle a fait table rase des valeurs héroïques classiques et sa façon originale de mettre en scène une jeunesse en crise. Dès son apparition publique, l'ouvrage connaît un retentissement considérable, notamment dû aux polémiques qui se sont élevées autour du sujet et du style inaccoutumés d'À Rebours.

Le succès de l'oeuvre fut sans précédent à tel point que la critique la considère désormais comme étant "la bible d'une génération"1, selon l'expression d'André Billy. L'oeuvre marque un point décisif dans la vie de son auteur, dans le sens où elle symbolise à la fois la rupture avec le naturalisme et l'inauguration d'une voie nouvelle dans la littérature. Partant de ce fait, l'originalité de l'oeuvre réside dans la capacité de créer un antihéros dandy et capricieux, à l'instar d'une jeunesse désenchantée, qui se reconnut à cette époque dans cette esthétique fin-de-siècle. Le caractère anticonformiste d'À Rebours trouve son origine également dans le fait qu'il se présente comme une narration romanesque incluant des réflexions sur l'art et la littérature.

Toutes ces considérations font du roman de Huysmans, si on s'autorise une telle association de termes, un "roman-source", dans le sens où il est devenu en très peu de temps un modèle littéraire, qui a suscité maintes imitations. En effet, plusieurs ouvrages ont été fortement imprégnés par À Rebours. On peut citer parmi les plus connus le roman d'Oscar Wilde intitulé Le portrait de Dorian Gray, paru en 1890. Par ailleurs, Wilde écrivait que l'idée de son roman lui était venue en lisant l'oeuvre de Huysmans. Dans le même sillage, on retrouve également deux autres ouvrages fort influencés par À Rebours, qui sont Sixtine de Remy de Gourmont publié en 1890 et Monsieur de Phocas de Jean Lorrain, en 1901. Ces deux ouvrages se présentent comme un prolongement de l'oeuvre de Huysmans. La preuve en est que les deux personnages principaux, Hubert et Monsieur de Phocas, sont construits selon le prototype de des Esseintes et possèdent la même sensibilité qui hante le héros d'À

1 François LIVI, J.K.Huysmans, À Rebours et l'esprit décadent, Paris, A.G.Nizet, 1991, p.7

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Rebours. C'est la raison pour laquelle nous les trouvons propices pour notre étude comparatiste.

L'étude vise essentiellement à comparer la manière dont les trois auteurs ont créé leur personnage romanesque, tout en s'interrogeant sur l'attribution d'une psychologie à ces êtres de papier nés de la littérature même. Notre étude se focalisera sur le personnage principal d'À Rebours et plus particulièrement sur la construction de sa personnalité, à la fois problématique et emblématique. En effet, nous allons montrer comment Huysmans a fait de son livre un roman de type psychologique, en conférant à son héros une intériorité complexe et comment il a réussi à instaurer, non pas une représentation idéale de l'Homme, mais un échantillon humain représentatif de la fin du XIX ème siècle. Nous dévoilerons au cours de notre étude comment cette représentation de l'intériorité de des Esseintes sera reprise dans les deux ouvrages postérieurs.

L'objet du mémoire porte aussi sur la valeur de l'art, qui se présente dans ces trois oeuvres comme un moyen d'évasion, voire même un moyen de guérison de la "maladie psychique" qui tourmente les trois "héros". L'art a un rôle majeur dans les trois textes. En effet, il permet une projection dans les pensées des personnages, notamment à travers leurs souvenirs, leurs rêves et leurs hallucinations. Ceci facilite la compréhension de la psychologie des personnages, tout en permettant de trouver des explications à leurs attitudes. On note à cet égard qu'il y a une relation de contiguïté entre la psychologie des personnages et l'art, dans le sens où l'art se montre comme un élément catalyseur, qui se joue du développement de la psychologie et participe même aux représentations que les personnages se font d'eux-mêmes. De l'art ressort une orientation de la conscience des personnages. Dans les trois textes les héros n'ont pas les mêmes passions artistiques: Hubert est un personnage-écrivain, Monsieur de Phocas se penche sur la peinture, des Esseintes est passionné principalement par la lecture. Cependant l'art ne change pas de valeur en changeant de formes, il est toujours esquissé comme étant un moyen de guérison spirituelle.

Notre étude prend également en considération l'analyse des deux notions cruciales: l'intrigue et la non-intrigue dans les trois textes, autrement dit, la manière dont se déroulent les évènements et l'histoire. Nous allons consacrer notre troisième partie à l'étude de l'enchaînement des actions à travers l'ensemble du corpus. En effet nous avons affaire, dans les trois ouvrages, à une non-intrigue, dans la mesure où il n'y a pas une progression effective des évènements : le roman abandonne la "forme flèche" traditionnelle et s'est converti vers une "forme circulaire" et vertigineuse. Cette forme se débarrasse complètement du fil conducteur du récit. Le roman forme désormais une sorte de boucle dans laquelle l'intrigue n'aboutit à rien.

Nous ferons le point dans cette étude sur le double rôle initiateur d'À Rebours à la fin du XIX ème siècle. Ce livre était parmi les premiers "traités "sur la névrose, cette maladie psychique moderne. Le livre huysmansien a donc participé au développement des études sur cette maladie, qui atteignaient leur apogée. L'oeuvre nous offre la présentation d'un tableau

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panoramique et complet de la névrose moderne. En effet Huysmans, fait émaner une volonté d'édifier l'art romanesque initiatique, dans la mesure où, via une mise en scène d'un cheminement évolutif du héros maladif, l'auteur a probablement voulu amener ses lecteurs à explorer les symptômes d'une maladie peu connue à l'époque. Huysmans ne se suffit pas à présenter les signes de cette manie, mais essaye de la rattacher à l'art avec ses diverses formes, tout en mettant en relief son double rôle à savoir le déclencheur et l'antidote de la névrose.

Par ailleurs, Huysmans dans sa préface, considère son livre comme une «étude psychologique»1 c'est la raison pour laquelle le roman revêtit ce rôle initiatique en matière de psychologie . À ce propos, il déclare qu'avant À Rebours «le roman se pouvait résumer en [...] savoir pourquoi monsieur un tel commettait ou ne commettait pas l'adultère avec madame une telle»2. Voilà l'objectif que vise À Rebours : apprendre l'analyse de soi afin de se comprendre et comprendre les comportements d'autrui.

Nous montrerons dans notre étude la distance qu'a prise J.K. Huysmans par rapport à ses prédécesseurs romantiques, réalistes et naturalistes. Tout en créant son personnage principal des Esseintes, Huysmans s'inscrit dans une vague controversée, nommée "le décadentisme", qui désigne un état d'esprit plus qu'un véritable mouvement littéraire. En choisissant une expression novatrice, Huysmans acquiert un caractère d'ambivalence. Il est à la fois le dissident de la génération qui l'a précédé, mais aussi le parent de la génération qui le suit. Il va léguer à ses descendants le même état d'esprit qui a hanté son antihéros des Esseintes.

On compte ainsi, par le biais d'une étude analytique et comparative d'À Rebours, revaloriser une littérature mal considérée à l'époque. Cette remise en valeur ne peut s'effectuer concrètement qu'à travers l'étude des oeuvres inspirées d'À Rebours et les auteurs qui ont suivi les pas de Huysmans.

Le traitement du sujet se basera essentiellement sur les points de rapprochement entre les trois oeuvres, mais également sur les aspects qui font l'originalité d'une oeuvre par rapport aux autres. C'est pourquoi nous optons pour une étude comparative qui traite le trio du corpus simultanément et qui se préoccupe d'aborder les convergences et les divergences pouvant exister entre les trois textes à étudier.

Notre recherche tourne autour de l'étude des personnages, notamment de leur psychologie: nous allons essayer d'analyser et de comprendre la structure et le fonctionnement de leur activité mentale et les comportements qui leur sont accordés. En l'occurrence, nous focaliserons notre attention sur la névrose, en tant que maladie contemporaine, qui torture les trois héros ; mais nous allons également la traiter comme

1 Joris-Karl HUYSMANS, À Rebours [préface], Paris, Fasquelle,1974.

2 Ibid.

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étant l'état d'esprit principal, qui gère leur conduite et attitude. Nous allons donc aborder les causes profondes de cette maladie à savoir les éléments qui la font surgir.

Dans un deuxième temps, nous allons étudier le rapport qu'entretiennent les personnages avec l'art, qui acquiert dans ces trois ouvrages une ample dimension dans le sens où il possède un rôle ambivalent et équivoque: l'art est souvent le provocateur des crises nerveuses mais pour autant il apparaît, maintes fois, comme le remède auquel recourent les personnages pour oublier leur malaise et apaiser leurs nerfs. En effet, les personnages, suite à la lecture de tel livre ou la contemplation de tel tableau, se prennent dans une crise nerveuse très aigüe et vice-versa lorsqu'ils se plongent dans une oeuvre d'art, les héros semblent être transportés dans un monde onirique, qui leur assure la quiétude de l'âme.

Dans la dernière partie nous tenterons d'élucider le parti-pris des trois auteurs, qui ont opté pour une forme vertigineuse. En effet, nous montrerons la manière dont la circularité de l'intrigue va accentuer le sentiment vertigineux et la crise nerveuse, qui hantent les héros tout le long des textes. Nous allons donc mettre en relief l'aptitude de la forme à mimer le fond.

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Première partie

La psychologie des personnages

I- la place du personnage dans la littérature fin-de-siècle

Pour commencer, il faut signaler que le personnage, dans la littérature dite décadente et plus particulièrement dans les trois ouvrages que nous allons étudier, sort de son statut ordinaire: il n'est plus un composant de l'intrigue parmi d'autres, il est devenu le centre même de l'histoire et du roman. Au fait, le personnage, selon les traditions littéraires, se définit dans un système de relations avec les autres sujets, adjuvants et ou opposants, et c'est grâce à la relation qui les unit que le récit progresse. Dans les trois ouvrages à étudier, ce n'est pas du tout le cas dans le sens où ce modèle abstrait accapare toutes les fonctions agissantes au sein d'un système de relations. C'est-à-dire que le personnage joue un triple rôle: il est lui-même le héros, son adjuvant et son opposant. Dans le cas de nos antihéros maladifs, on a affaire à des personnages centraux qui se sont eux-mêmes les adjuvants parce qu'ils viennent en aide de soi. D'abord parce qu'ils sont tous conscients de leur maladie, ensuite parce qu'ils savent se guérir même si c'est une guérison provisoire.

Ces personnages monopolisent aussi le rôle d'opposants, tout simplement parce que le seul ennemi, qui menace leur paix, serait leur propre maladie: la névrose. Même si nous avons quelques autres personnages dans les trois romans, ils sont soit réduits à un rôle passif (tel est le cas des deux domestiques dans le livre huysmansien), soit ils sont rabaissés au rang de simples figurants pareillement à ceux des livres de Gourmont et de Lorrain. Il en résulte donc que les trois auteurs ont cristallisé des postulations typiques de la société de la fin du XIX ème siècle, non pas à dans une intention réaliste comme a fait Zola: ils ont plutôt réussi à créer un personnage capable de signifier un état d'esprit fiévreux représentatif d'une génération toute entière à un moment de son histoire. Les auteurs ont choisi de bâtir leur roman, tout en se basant sur l'une des caractéristiques de la création romanesque, par le procédé de condensation, de faire apparaître des prototypes particuliers et représentatifs de l'époque fin-de-siècle.

Ainsi les trois auteurs, et en particulier Huysmans, qui était en quelque sorte le précurseur de la vague décadente, ont redéfini, par la création de ces personnes fictives, toute une ancienne conception du personnage. En effet, l'humanisme optimiste n'est plus de mise dans l'oeuvre de 1884 et dans celles qui suivent quelques années plus tard. Les auteurs

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décadents abandonnent le personnage frivole et jovial, ils ont privilégié des personnages plus profonds dans leur perspective de vie et dans leur manière de voir le monde. Nous en déduisons que les romanciers se sont ingéniés à faire du personnage le pivot et le moteur de la fiction, c'est pourquoi ils ont brossé leur personnage selon un portrait physique bien précis en fonction de détails particuliers susceptibles de suggérer quelques traits psychologiques par exemple ils sont tous affectés par la névrose. ces traits moraux permettent l'attribution d'une identité particulière, qui fait d'eux des héros exceptionnels et singuliers.

La création romanesque des personnages aussi importants comme des Esseintes , Hubert et Monsieur de Phocas sur lesquels seulement repose le roman, n'est pas anodine. En effet, cela résulte d'un travail méticuleux, qui nécessite obligatoirement des sources d'inspiration. Commençons par l'oeuvre-bible, il est très évident que Huysmans ait beaucoup de sources d'inspiration lors de la création de son livre. En effet, Huysmans féru et grand lecteur du comte Robert de Montesquiou, qui était un poète noble et qui se caractérisait par son dandysme et son goût excentrique, s'est muni de ses premières armes pour bâtir son personnage problématique à savoir le duc Jean des Esseintes, qui partage de nombreux traits avec la figure de Robert Montesquiou. Parmi les traits de caractère qui légitiment un certain rapprochement entre les deux figures de deux natures différentes ( figure imaginaire, figure réelle), nous citons en premier la classe sociale dont ils sont issus dans la mesure où des Esseintes, à l'image de Montesquiou, est un aristocrate ayant des problèmes familiaux depuis la plus tendre enfance. Aussi de même, l'idole et sa reproduction traduisent un penchant naturel envers le bizarre autrement dit le héros huysmansien, tout comme Montesquiou, est à la recherche incessante de tout ce qui est étrange et insolite. Autre aspect, qui met en parallèle la personne de Montesquiou et le personnage du livre de 1884, est celui du décor notamment les toiles de Gustave Moreau, qui ornementent la pièce de des Esseintes et qui étaient aussi présentes dans le domicile de Montesquiou. Le rapprochement se fortifie de plus en plus parce que si Huysmans a suivi le modèle de Robert Montesquiou pour construire son personnage des Esseintes, Robert Montesquiou a à son tour évoqué les expressions de Huysmans dans ses poèmes sur Moreau, ce qui dévoile parfaitement une relation de vénération, qui unit les deux figures: Montesquiou et Huysmans. Autre trait commun qui rattache des Esseintes à ce comte: la tendance instinctive vers l'expérimentation: «Des Esseintes comme Montesquiou se retirent dans leur «laboratoire» pour tenter la mise en application de tous les possibles»1.

L'alliance ne se borne pas seulement aux aspects cités-dessus, mais elle devient de plus en plus directe et signifiante avec l'épisode de la tortue doré dans le sens où on assiste presque à une reproduction fidèle de l'incident de la tortue, qui a eu lieu avec Montesquiou.

1 Antoine BERTRAND, les curiosités esthétiques de Robert de Montesquiou, t I, Genève, Droz, 1996, p.25

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«Pour que la carapace de l'animal ne gâche pas les tons du décor, Montesquiou l'avait effectivement fait recouvrir d'or»1.

Il en va de même pour Jean Lorrain, qui lui aussi s'est largement inspiré d'À Rebours, qui était sa première source d'inspiration, mais pour autant il est concerné par cette correspondance entre la personne de Montesquiou et son personnage dans la mesure où son oeuvre présente également un personnage dandy et esthète, à l'appui du portrait de la personne de Robert Montesquiou. Dans le cas de Jean Lorrain, si comme s'il s'agissait d'une double inspiration ou si on s'autorise une telle alliance terminologique, "une inspiration dérivée" autrement dit que la filiation entre l'oeuvre de Lorrain et la vie de Montesquiou, quoiqu'elle figure, elle est moins importante et moins visible que dans l'oeuvre de Huysmans. Il en résulte que c'est cette dernière, qui va plutôt servir d'une source basique pour Monsieur de Phocas. On lit dans une lettre envoyée de la part de J.K.Huysmans à Lorrain une confirmation d'une étroite liaison entre les deux ouvrages "Mon cher Lorrain, je crois très franchement que votre littérature reste le plus sérieux de mes vices".2

En revanche, Remy de Gourmont, dans son livre intitulé Sixtine, qui fut publié six ans après la publication d'À Rebours, reste plus associé à cette "oeuvre-bible" puisque nous avons le sentiment que l'ouvrage de Gourmont repose beaucoup plus sur la fiction romanesque huysmansienne que sur des éléments biographiques de Robert Montesquiou. Toutefois, nous constatons qu'il y avait tout de même des échos biographiques du comte dans la vie de Hubert mais cela ne peut pas se lire comme référence directe à la figure du Robert Montesquiou puisque cela s'explique par le fait que tous les trois personnages partagent avec la personne de Montesquiou l'attitude raffinée du dandy. Mieux encore, il s'avère que le livre de Gourmont, ne se borne pas à la simple reprise des préceptes de Huysmans mais il fait son originalité par rapport aux autres oeuvres par l'ajout de nombreux éléments qui sont propres à la personne de l'auteur, visibles notamment dans la figure de Hubert, qui ne se définit pas comme étant seulement un prolongement de des Esseintes mais aussi une marque de particularité de Gourmont: Hubert serait aussi l'incarnation de l'auteur, amoureux fou pour Berthe de Courrière.

À l'époque de la création de ces trois oeuvres, de nombreuses études sur la névrose atteignent leur apogée, comme les Leçons sur les maladies du système nerveux, de Charcot paru en 1872 et qui traite les symptômes de cette maladie contemporaine. Les trois auteurs ont bénéficié du développement de ces études et ont en profité pour inventer leur personnages névrosés. On constate que les livres s'insinuent dans un contexte purement médical fructueux, de la fin du XIX ème siècle.

1 Mathieu LINDON, 21 juillet 2010, Montesquiou, Dandy «Tarabiscoté», Libération, disponible sur: http://next.liberation.fr/culture/2010/07/21/montesquiou-dandy-tarabiscote_667351 [consulté le 05-06-2018]

2 Hélène ZINCK, dossier sur Monsieur de Phocas [Jean LORRAIN, Paris, Flammarion, 2001]. [Cette lettre, datée du 29 juillet 1901, est citée par Jacques Lethève dans «L'Amitié de Huysmans et de Jean Lorrain», Mercure de France, t. 331, no 1129, septembre-décembre1957, p.86]

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