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La politique du tourisme durable en France: avancées et limites

( Télécharger le fichier original )
par Fanny Fonteyraud
Université Panthéon Sorbonne - Master 2 Droit du tourisme 2018
  

Disponible en mode multipage

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1

La politique du tourisme durable en

France : avancées et limites

Mémoire professionnel présenté pour l'obtention du

MASTER 2 DROIT DU TOURISME

Présenté par :

Fanny FONTEYRAUD

Sous la direction de :

Mme Laurence JEGOUZO

Directrice du Master 2 Droit du tourisme

Master II Droit du tourisme

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Année Universitaire 2017-2018

2

Remerciements

Je souhaite adresser toute ma reconnaissance aux différentes personnes qui m'ont aidée dans la réalisation de ce mémoire.

Je tiens tout d'abord à remercier Madame Laurence Jegouzo, pour m'avoir permis d'intégrer le Master 2 Droit du tourisme. En tant que Directrice de ce master et tutrice de mon mémoire, elle m'a guidée dans mon travail et m'a aidée à trouver des solutions pour avancer.

Mes remerciements vont également à tous les professeurs du master pour la richesse et la qualité de leurs enseignements, leur patience et leur disponibilité.

Je voudrais exprimer ma reconnaissance envers mes parents Evelyne et Pascal, et mon frère Julian, qui m'ont toujours soutenue et encouragée pendant mes études. Ils ont permis à ce mémoire d'être ce qu'il est aujourd'hui, aussi je voudrais leur exprimer ma gratitude.

Enfin, un grand merci à mes proches et tout particulièrement à Jeremy, qui m'a apporté un soutien inestimable, tout au long de cette aventure.

3

Table des matières

Remerciements 2

Introduction 4

Partie 1. Une politique peu à peu tournée vers le tourisme durable 10

Section 1. Bilan et conséquences du tourisme de masse 10

A. Une incidence néfaste sur l'économie 11

B. Un impact alarmant sur la société et les populations 13

C. Des conséquences environnementales catastrophiques 17

Section 2. Une prise de conscience tardive par les acteurs publics des enjeux du

tourisme durable 20

A. Une organisation politique touristique confuse 21

B. Le tourisme durable dans les dispositifs législatifs de mise en valeur du territoire 24

C. Les autres mesures nationales en faveur du développement du tourisme durable 28

Partie 2. Les avancées en faveur du tourisme durable et les limites pratiques à son

développement 32

Section 1. Le tourisme durable impulsé par la soft law et les initiatives privées 32

A. La dimension internationale et communautaire de la soft law 33

B. Les acteurs privés, créateurs de droit mou 38

Section 2. Les freins et les limites au développement du tourisme durable 44

A. Un mode de tourisme marginal et méconnu 45

B. Le tourisme durable : beaucoup de croyants mais peu de pratiquants 47

C. Le greenwashing ou le faux tourisme durable 50

Bibliographie 54

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Introduction

« L'un des paradoxes du tourisme d'aujourd'hui est de tuer ce dont il vit, en véritable parasite mondophage. Celui-ci préfère le divertissement à la diversité ; le premier est en effet plus confortable car il ne remet rien en cause. Ainsi le touriste déclare son amour à cette planète qu'il visite dans ses moindres recoins et, ce faisant, il contribue à l'épuiser impitoyablement. »

Extrait du Manuel de l'anti-tourisme, par Rodolphe Christin (2018).

En tant que première industrie mondiale, le tourisme est aujourd'hui devenu une véritable manne financière pour l'économie de la planète. Selon le baromètre de l'Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), le tourisme représente 10 % du PIB mondial avec 1,322 milliard de touristes internationaux en 2017 et plus de 7% du PIB français, avec 82,6 millions d'arrivées de touristes internationaux en 2016. La France conserve ainsi le premier rang mondial, en termes d'arrivées de touristes internationaux, devant les États-Unis, l'Espagne et la Chine. Toutefois, en termes de recettes, la France se retrouve cinquième du classement mondial avec 38,4 milliards d'euros pour l'année 20161. Pour se rendre compte de l'éloquence de ces chiffres, 1,8 milliard d'arrivées de touristes internationaux sont prévus par l'OMT pour 2030, tandis qu'en 1950, on n'en comptait que 25 millions2.

Au fil du temps, le tourisme a évolué de façon spectaculaire et est devenu l'un des secteurs économiques les plus rentables au monde. Selon l'OMT, « le volume d'affaires du tourisme égale, voire dépasse celui des industries pétrolière, agroalimentaire ou automobile3. » Aujourd'hui, le tourisme est un facteur essentiel de développement à l'échelle mondiale et en particulier dans certains pays en ce qu'il permet de générer des recettes et des ressources non négligeables, notamment en termes d'emploi. Le tourisme représente en effet 1 emploi sur 10 dans le monde et 1,267 million d'emplois salariés en France4.

Dans le langage courant, le tourisme est l'action de voyager et visiter des lieux pour son agrément. L'Organisation Mondiale du Tourisme en donne une définition plus large mais plus précise et considère que « le tourisme correspond aux activités déployées par les personnes au cours de leur voyage et de leur séjour dans des lieux situés en dehors de leur

1 Veille Info Tourisme, le Memento du tourisme, 2017, p. 12

2 OMT, Les faits saillants du tourisme, 2017, p. 3

3 Cf. < www.unwto.org >

4 Atout France, Rapport d'activité, 2016, p. 11

5

environnement habituel, à des fins de loisirs, pour affaire et autres motifs ». Les voyageurs intéressant le tourisme sont appelés « visiteurs ». Les touristes sont donc des visiteurs qui passent au moins une nuit (et moins d'un an) hors de leur environnement habituel5.

Au 19ème siècle, Stendhal écrivait l'ouvrage « Mémoire d'un touriste » dans lequel il définissait le tourisme comme le fait de se déplacer pour son plaisir. Ainsi, être « touriste » signifiait voyager et jouir de sa vie par la découverte du monde6. La notion de tourisme revêtait alors un caractère beaucoup plus personnel contrairement à la définition moderne, tournée vers le divertissement et l'amusement.

Historiquement, le tourisme était pratiqué par les familles aristocrates britanniques au 18ème siècle, puis il s'est démocratisé pour devenir un loisir universel de masse à l'origine de nombreux troubles à travers le monde. Ainsi, le tourisme est une pratique ancienne qui consistait pour les jeunes nobles à faire le tour de l'Europe, afin de se construire au travers d'une expérience initiatique. Puis c'est en 1841 que Thomas Cook, homme d'affaires britannique (1820-1890), fonde la première agence de voyages. En effet, il a l'idée d'utiliser les services du train pour permettre aux familles aisées de se rendre dans les villes côtières du pays, créant ainsi le premier forfait touristique. C'est ensuite à l'ère de l'industrialisation puis après la Première Guerre Mondiale que les choses se sont accélérées, allant de pair avec l'évolution des moeurs et entre autres, le développement des transports ou encore la mise en place des congés payés. Toute la société est alors concernée par le tourisme qui devient un loisir pour tous. Depuis, le tourisme n'a cessé de croitre à mesure que la société s'est développée au rythme d'internet et de l'émergence des compagnies « low-cost7 » et a fini par basculer dans une nouvelle dimension, celle du tourisme de masse.

Aujourd'hui, la définition du tourisme ne ressemble plus à l'idée qu'en avait Stendhal, même s'il est une manière de s'évader du quotidien et surtout de son travail et qu'il est devenu un véritable moyen d'assouvir ce désir toujours plus croissant de se réaliser individuellement à travers la découverte du monde. En effet, le tourisme dans sa massification est l'exemple même de la domestication de la nature pour le rendement. « Le tourisme, c'est le voyage devenu prestation » selon Rodolphe Christin8, dont les propos sont très parlants. Quant au touriste, le monde est transformé en « un espace de libre circulation pour cet individu qui incarne au plus haut point le marché universel »9.

Si le tourisme est devenu un véritable produit de consommation, seule une faible proportion de personnes a les moyens d'être touriste. Le tourisme est le luxe d'une minorité, la pratique d'un petit nombre qui dispose d'assez de ressources pour profiter et découvrir la planète.

5 Cf. < www.unwto.org >

6 Stendhal, Mémoire d'un touriste, 1838

7 De l'anglais, signifiant : à moindre coût

8 Rodolphe Christin, « Manager le monde », article pour la revue Offensive n°14, p. 16, mai 2017

9 Philippe Muray, Festivus festivus, 2005

6

N'étant pas accessible à tout le monde, le tourisme est surtout un loisir occidental et se pratique majoritairement dans les pays occidentaux favorisant ainsi un clivage entre les pays riches et les pays pauvres, mais aussi entre ceux qui ont suffisamment de ressources pour voyager et ceux qui en payent le prix. Pour l'heure, les touristes ne représentent pas plus 3,5% de la population mondiale qui, rappelons-le, vit majoritairement sous le seuil de pauvreté10.

Le tourisme se développe toujours plus massivement et rien ne semble pouvoir stopper cette ascension. Pourtant, le tourisme est la source de nombreuses nuisances à l'échelle planétaire, de dommages sociaux et culturels, problèmes économiques ou encore dégâts naturels. En d'autres termes, les effets liés au tourisme ne sont pas seulement positifs : pollution, dérèglement climatique, destruction de la faune et la flore, sur-fréquentation des sites historiques et culturels, artificialisation des lieux, folklorisation, inégalités sociales, précarisation de l'emploi, spoliation des populations locales, déviances etc.

Face à ces conséquences de plus en plus alarmantes, la nécessité de se tourner vers une consommation touristique plus durable s'est imposée afin de trouver un équilibre entre valorisation et préservation des territoires et des personnes. Dans ce contexte et à mesure que les mentalités évoluent, les touristes sont de plus en plus nombreux à s'orienter vers de nouveaux modes de tourisme. Dès lors, parler « des tourismes » au pluriel et non plus « du tourisme » au singulier, semble plus approprié car aujourd'hui le phénomène s'est nettement transformé. Au fil du temps et des bouleversements de toute nature, liés au tourisme, des formes alternatives et durables sont donc apparues. D'un premier abord ces notions pourront paraître abstraites, mais en réalité chacune met l'accent sur un aspect particulier. Elles gravitent toutes autour d'un concept clef, objet de notre étude : le tourisme durable. On retrouve ainsi sous ce grand principe les notions de tourisme éthique, tourisme équitable, tourisme solidaire, tourisme social, éco-tourisme etc. Ces types de tourismes visent tous la même finalité : la remise en question de la pratique touristique actuelle et un plus grand respect pour ce qui nous entoure.

On retrouve généralement les définitions suivantes11 :

- Le tourisme éthique ou responsable « fait référence à la conscience sociale et à la façon de voyager du touriste. Dans cette optique, les organismes décideurs et les entreprises peuvent aussi être parties prenantes d'un tourisme responsable, tant pour ce qui touche leurs politiques de développement que leurs produits »12.

10 Rodolphe Christin, Manuel de l'anti-tourisme, 2018

11 Liste non exhaustive

12 Veille Info Tourisme Québec, Le tourisme durable, équitable, solidaire, responsable, social... Un brin de compréhension, 2005

7

- Le tourisme équitable est « basé sur le modèle du commerce équitable et met l'accent sur la juste rétribution des producteurs du Sud, la participation des communautés d'accueil, sur les prises de décisions démocratiques. Les bénéfices de ces activités doivent être perçus en grande partie localement et partagés entre les membres de la population autochtone »13.

- Le tourisme solidaire désigne « les voyages organisés dans un but d'échange réel avec les populations accueillantes, dans le respect de leur culture, de leur histoire et de l'environnement. C'est un tourisme qui permet aux populations de bénéficier réellement des ressources engendrées par le tourisme et d'améliorer leur niveau de vie par ce moyen tout en respectant leur dignité »14.

- Le tourisme social a pour but « de favoriser l'accessibilité au tourisme pour le plus grand nombre et tend à évoluer vers des formes de tourisme solidaire »15.

- L'écotourisme est « une forme de tourisme qui vise à faire découvrir un milieu naturel tout en préservant son intégrité, qui comprend un volet éducatif »16.

Quant au tourisme durable, laconiquement, l'OMT le défini comme étant « un tourisme qui tient pleinement compte de ses impacts économiques, sociaux et environnementaux actuels et futurs, en répondant aux besoins des visiteurs, des professionnels, de l'environnement et des communautés d'accueil. »17 L'organisation ajoute de façon plus conceptuelle que les principes du tourisme durable sont applicables à tout type de destination et toutes les formes de tourisme, tant que toutes les parties concernées y compris les pouvoirs politiques, assureront sa viabilité de façon consensuelle et continue. Il découle ainsi de ce postulat trois enjeux de taille pour lesquels un équilibre doit être conservé : les enjeux environnementaux, les enjeux socioculturels et les enjeux économiques.

Selon l'OMT, « le tourisme durable doit :

- Exploiter de façon optimum les ressources de l'environnement qui constituent un élément clé de la mise en valeur touristique, en préservant les processus écologiques essentiels et en aidant à sauvegarder les ressources naturelles et la biodiversité ;

- Respecter l'authenticité socioculturelle des communautés d'accueil, conserver leurs atouts culturels bâti et vivant et leurs valeurs traditionnelles et contribuer à l'entente et à la tolérance interculturelles ;

13 Trade for Development, Le tourisme équitable et solidaire, septembre 2010, p. 7

14 Cf. < www.ritimo.org/Le-tourisme-solidaire >

15 Op. cit. Association Trade for Development

16 Op. cit. Veille Info Tourisme Québec

17 Cf. < www.unwto.org >

8

- Assurer une activité économique viable sur le long terme offrant à toutes les parties prenantes des avantages socioéconomiques équitablement répartis, notamment des emplois stables, des possibilités de bénéfices et des services sociaux pour les communautés d'accueil, et contribuant ainsi à la réduction de la pauvreté. »18

Ces définitions du tourisme durable ont été établies dans la lignée de la naissance officielle du développement durable. Bien que des questions d'ordre écologique et environnemental font leur apparition dans les années 1970 avec le premier Sommet de la Terre à Stockholm19, c'est en 1987 que la notion de développement durable émerge, suite au rapport Brundtland émis par la Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement de l'Organisation des Nations Unies (ONU)20. A cette époque, le tourisme n'est pas encore celui que l'on connait aujourd'hui et les effets sur l'environnement, la société et les populations ne sont pas aussi alarmants. Pourtant, il va falloir penser le tourisme d'une façon plus durable, à l'image d'autres secteurs économiques et penser sur le long terme.

C'est en ce sens que les préoccupations internationales et communautaires vont se multiplier, influençant les pouvoirs publics français à prendre des décisions concrètes. D'importants textes apparaissent alors, tels que le Code mondial d'éthique du tourisme, institué en 1999 par l'Assemblée générale de l'OMT21 ou encore la Charte européenne du tourisme durable mise en place en 1995 lors de la Conférence mondiale du tourisme durable à Lanzarote22. En France, des mesures nationales sont mises en oeuvre au niveau législatif et règlementaire, des mécanismes plus « doux » tels que les labels, certifications ou concours sont créés face aux conséquences dramatiques d'un tourisme toujours plus intense.

A ce titre, dans une perspective de protection de l'environnement et de respect de la biodiversité, plusieurs associations ont lancé en avril 2018, un appel pour une Constitution écologique. A ce jour, les seules dispositions en faveur de l'environnement figurent dans la Charte de l'Environnement de 2005. En dépit de la valeur constitutionnelle de la charte, la protection de l'environnement n'est pas inscrite dans la Constitution elle-même. Il est ainsi proposé de l'inscrire à l'article 1er : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique, sociale, solidaire et écologique. [...] La République veille à un usage économe et équitable des ressources naturelles, garantit la préservation de la diversité biologique et lutte contre les changements climatiques dans le cadre des limites planétaires. Elle assure la solidarité entre les générations. Une génération ne peut assujettir les générations futures à

18 Cf. < http://sdt.unwto.org/fr/content/definition >

19 Conférence des Nations Unies sur le développement humain, 1972

20 Rapport de la Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement de l'ONU, présidée par Gro Harlem Brundtland, « Notre avenir à tous », 1987

21 OMT, Code Mondial d'Éthique du Tourisme, pour un tourisme responsable, 1999

22 Cf. < www.e-unwto.org/doi/pdf/10.18111/unwtodeclarations.1995.21.14.1 >

9

des lois moins protectrices de l'environnement que celles en vigueur. E...] »23. Pour beaucoup, il apparait indispensable pour la France de s'inscrire dans une telle perspective, face aux enjeux écologiques actuels. Si cette proposition de modification de l'article 1er ne fait pas l'unanimité, d'autres militent pour réformer l'article 34, afin d'y inscrire le respect du bien commun, la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodiversité24. Face à l'urgence climatique et environnementale, la planète et l'ensemble du vivant doivent être préservés du tourisme et ses dérives.

En parallèle, des acteurs privés agissent aussi pour un tourisme plus durable. Les textes semblent lacunaires et limités, tandis que le tourisme est toujours en pleine croissance, laissant présager d'inquiétantes répercussions pour l'avenir. C'est pourquoi des réseaux associatifs privés mais aussi des professionnels du secteur touristique, à l'instar des grandes organisations internationales, mettent en place divers dispositifs non contraignants, permettant de sensibiliser et conscientiser les différents acteurs du tourisme, pour l'épanouissement du tourisme durable. Toutefois et bien qu'à priori engagés, certains acteurs ne sont pas toujours bienveillants. Profitant d'une prise de conscience générale du grand public et de l'attrait grandissant des touristes pour la cause écologique, ils n'hésitent pas à user de stratégies marketing trompeuses dans le seul but d'intensifier leur chiffre d'affaires, freinant ainsi le développement du tourisme durable.

Les questions que l'on se posera dans cette étude seront les suivantes : comment la politique du tourisme en France répond-elle à la nécessité d'une dimension plus durable ? Quels sont les moyens mis en oeuvre par les différents acteurs dans la recherche d'un équilibre entre le tourisme et la protection de l'environnement, de la société et de l'économie, face aux limites s'opposant au développement du tourisme durable ?

Pour répondre à cette question, ce mémoire sera divisé en deux parties.

Dans la première partie, nous étudierons le concept même de tourisme durable face aux désastres du tourisme de masse. Nous dresserons un constat de la politique menée actuellement en France en ce sens, puis nous nous attacherons aux différentes stratégies envisagées par les pouvoirs publics.

Dans la seconde partie, il conviendra d'analyser la richesse de la soft law, qui tend à combler les lacunes réglementaires et législatives et qui permet ainsi de renforcer l'impact positif du tourisme durable sur les variantes environnementales, socioculturelles et économiques. Enfin, nous détaillerons les nombreux freins et limites qui perdurent en pratique et s'opposent à son développement.

23 Cf. < www.notreconstitutionecologique.org/ >

24 Audition de Véronique Champeil-Desplats, Professeure de droit public à l'Université de Nanterre, pour Libération, 26 juin 2018

10

Partie 1. Une politique peu à peu tournée vers le

tourisme durable

L'humanité est trois fois plus riche qu'il y a 40 ans et un Français est en moyenne 7 fois plus riche qu'il y a un siècle selon Atout France25. Depuis le début de la société industrielle, la majorité des habitants des pays développés connaissent des conditions de vie meilleures notamment en termes de loisirs et de tourisme. Ce développement rapide a conduit de façon inéluctable à l'épuisement des ressources de la planète et a engendré bon nombre d'effets négatifs. Le tourisme durable s'est donc imposé comme étant une solution pour que le tourisme reste viable le plus longtemps possible. La France a ainsi remis en question le modèle de consommation touristique actuel qu'elle repense désormais de façon plus durable. En effet, si aucune solution n'était apportée, il est certain qu'à terme le tourisme ne serait plus envisageable, ou en tout cas n'aurait plus la même essence, tant il est amené à croitre dans les prochaines années.

Il a ainsi fallu de nombreuses années aux pouvoirs publics avant de mettre le tourisme durable sur le devant de la scène et de l'ériger comme partie intégrante des nouvelles stratégies touristiques du pays, faisant ressentir alors dans les textes pris en faveur du tourisme durable, de sérieuses carences et un certain laxisme (section 1). Avant d'étudier les dispositifs et mécanismes mis en oeuvre, il convient de comprendre comment ce tournant est arrivé et pourquoi les acteurs publics ont pris la décision d'intégrer le tourisme dans l'objectif de développement durable (section 2).

Section 1. Bilan et conséquences du tourisme de masse

Le tourisme durable, de par ses objectifs, est l'antinomie du tourisme de masse. Alors que le tourisme durable prône des valeurs positives et constructives pour l'économie, l'environnement et la société, le tourisme de masse provoque de terribles conséquences à tous les niveaux.

D'un loisir jadis exclusif, le tourisme est devenu, pendant la seconde moitié du 20ème siècle, une migration saisonnière de masse. Le phénomène du tourisme de masse consiste en effet pour les touristes à se déplacer massivement vers un même lieu et le plus souvent au même moment. Ces déplacements sont majoritairement concentrés sur les littoraux, mais aussi en montagne selon la saison, et dans les grandes villes. Le tourisme de masse suppose ainsi des coûts de transports amoindris et un hébergement plus accessible afin de permettre au plus

25 Atout France, Tourisme et développement durable, de la connaissance des marchés à l'action marketing, 2011, p. 8

11

grand nombre de se déplacer. Sur le lieu de vacances, tout est mis en place pour que le touriste ne s'éloigne pas de son mode de vie occidental, de telle sorte qu'on y trouve des produits et des services en adéquation avec ses habitudes de consommateur. Ainsi, non seulement le tourisme de masse n'est pas authentique, mais il ne permet pas l'échange, si bien que le touriste porte des oeillères et ne perçoit pas les effets néfastes engendrés, tant à l'égard des populations que sur l'environnement et l'économie.

Bien que le tourisme soit une véritable manne financière pour la France, comme pour beaucoup d'autres États, sa massification engendre toutefois des effets très négatifs sur le plan économique (A) mais aussi socioculturel (B), et des conséquences écologiques catastrophiques sur l'environnement (C).

A. Une incidence néfaste sur l'économie

L'économie est en pleine expansion, et le tourisme de masse y est pour beaucoup. En effet, en 2016, le tourisme représentait plus de 7% du PIB français26. Concernant les recettes, les chiffres présentés pour 2016 par la Banque de France faisaient état de 38,4 milliards d'euros de recettes touristiques. Seulement ces chiffres ont été sous-estimés puis modifiés, passant ainsi de 38,4 à 49 milliards d'euros27. Si ces données sont impressionnantes et font de la France la cinquième destination touristique au monde en termes de recettes, il n'en reste pas moins des disparités économiques au sein même du pays. A l'image de certains pays pauvres mais touristiques, les revenus générés par l'activité ne profitent pas toujours à qui l'on croit. Ainsi, s'il existe des inégalités entre pays du Nord et pays du Sud, on observe également un déséquilibre entre milieux urbains et ruraux du fait de l'activité touristique dans sa forme massificatrice.

En France, il existe de sérieux contrastes entre les régions. Les recettes du tourisme sont concentrées sur certains territoires, tandis que d'autres souffrent de cette absence de bénéfices, restant ainsi en retrait des flux économiques générés. C'est le cas de beaucoup de zones rurales. En effet, l'espace rural est vidé de ses habitants par l'exode vers des régions plus urbaines et de ce fait, il est délaissé par les grands investisseurs qui n'y trouvent ni la main-d'oeuvre, ni les infrastructures nécessaires à leur activité. Pourtant, la présence d'équipements d'accueil et de loisirs sont nécessaires pour attirer les touristes et générer des ressources. Partant, il apparaissait nécessaire de recourir à des investisseurs extérieurs, dans la mesure où les acteurs locaux ne disposaient pas de moyens suffisants pour amorcer le développement touristique dans les zones rurales. Les touristes se concentrent en effet sur des territoires bien particuliers tels que les littoraux, la montagne, les espaces insulaires ou encore les grandes zones urbaines (Paris, les grandes métropoles...). Dans cette situation, les bénéfices tirés de l'activité touristique dans les zones rurales sont amassés par les

26 Le Compte Satellite du tourisme n°78, octobre 2017

27 Le Revenu, France : le tourisme rapporte plus que prévu, janvier 2018

12

investisseurs et le territoire d'accueil, sur lequel les activités ont lieu, en est privé. De surcroit, l'action publique étant territorialisée à certains égards, il est difficile pour ces espaces en difficulté de se développer en même temps que les régions les plus prisées par le tourisme. Toutefois, cet aspect peut être considéré comme une opportunité pour le tourisme durable. En effet, il semble plus aisé de transmettre et mettre en oeuvre des valeurs locales et plus durables dans des espaces encore loin du tourisme de masse.

L'isolement des zones rurales en France est pris au piège dans un cercle vicieux. Dans la mesure où les touristes sont plus nombreux dans certaines régions, ils y dépensent ainsi plus d'argent, renforçant les disparités. En 2011, la moitié des 145 milliards d'euros dépensés par les touristes a ainsi bénéficié à trois régions. Cette année-là, l'Ile-de-France a perçu 39 milliards d'euros grâce au tourisme, tandis que les régions Paca et Rhône-Alpes ont reçu chacune près de 18 milliards d'euros. Enfin, les dépenses étaient plus faibles dans le reste du pays avec par exemple 7 milliards en Aquitaine et en Bretagne28. Ces chiffres relevés par l'INSEE démontrent nettement les contrastes existants entre les régions françaises. En effet, ils s'expliquent par la présence de grandes infrastructures et équipements touristiques, tels que des aéroports, des structures d'hébergements etc. Ces zones les plus touristiques, telles que la capitale ou encore le littoral méditerranéen, jouissent ainsi de recettes plus importantes, le tourisme y étant bien plus dense.

Concernant les territoires d'outre-mer, c'est un tout autre tableau qui se dessine. Seulement 4 milliards d'euros ont été dépensés par les touristes, contre 145 milliards en métropole, ce qui représente un écart assez stupéfiant. Pourtant, le tourisme occupe une place centrale dans les économies d'outre-mer car il a des effets sur d'autres secteurs d'activité. En effet, le secteur du tourisme représente en moyenne 10% du PIB de ces territoires29. Mais depuis plusieurs années et malgré son importance, le secteur du tourisme en outre-mer traverse une crise marquée30. Cette situation tient au fait notamment que l'offre touristique est vieillissante et que les actions et les stratégies menée par les acteurs locaux et Atout France sont insuffisantes et en mal de mutation. En effet, ces territoires ont été fortement marqués par le tourisme de masse impliquant une construction massive d'infrastructures et une bétonisation accrue sur les littoraux pour accueillir un grand nombre de touristes. Aujourd'hui, les attentes ne sont plus les mêmes et les touristes, essentiellement métropolitains, délaissent ces destinations pour des endroits où l'offre est plus authentique. La politique en outre-mer ayant toujours beaucoup misé sur le tourisme a rendu ces territoires dépendants à l'image d'autres pays qui ont axé leur modèle économique sur le tourisme et qui ne comptent plus que sur ces revenus, au détriment d'autres secteurs. Ainsi, certains évènements peuvent avoir de lourdes conséquences sur ces territoires. On citera ainsi le vieillissement de l'offre

28 INSEE, Les dépenses des touristes en France, INSEE Première n°1510, juillet 2014

29 Atout France, Cluster du tourisme des outre-mer, Plan d'action 2018

30 Avis du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE), Promouvoir le tourisme durable dans les outre-mer, mars 2018

13

touristique mais aussi par exemple les attentats du 11 septembre 2001, la crise sociale aux Antilles en 2009, ainsi que la forte concurrence des îles Caribéennes etc.

On pourrait penser que la France est à l'abri lorsque l'on compare avec des pays plus pauvres dont l'économie est essentiellement basée sur le tourisme (de masse), mais il n'en est rien. L'activité touristique massifiée engendre de sérieuses conséquences économiques et plus particulièrement dans les zones rurales et ultra marines, comme nous venons de l'évoquer. Mais, le secteur économique n'est pas le seul impacté par le tourisme de masse en France. La population, la culture et de façon plus générale, la société, le sont aussi.

B. Un impact alarmant sur la société et les populations

De prime abord, on pourrait penser que le tourisme de masse est un tourisme pour tous, accessible au plus grand nombre. Si cela est vrai en théorie, en pratique la réalité est tout autre. Le tourisme de masse qui a trouvé sa source dans l'organisation de la vie sociale autour du temps libre, des loisirs et des vacances, se veut accessible à tous à moindre coût. Mais cette massification de l'accès aux vacances ne réduit pas les inégalités, bien au contraire.

A titre d'exemple, 80 % de personnes touchant des hauts revenus déclaraient partir en congés contre 40 % de personnes ayant un revenu bas, selon une étude du CREDOC de janvier 201531. Partir en vacances n'est ainsi pas donné à tous et ce sont surtout les contraintes financières qui sont la raison de l'absence de projet des ménages, à 61% selon le rapport du CREDOC32. Le tourisme, même de masse, reste le luxe d'une minorité.

Parallèlement à ces inégalités qui touchent les différentes classes de la population touristique française, la question de l'emploi des salariés dans le secteur du tourisme pose problème et donne matière à réflexion. Une fois de plus, le tourisme de masse montre là toute sa perversité. En effet, il est l'un des facteurs liés à l'exode rurale, comme nous l'avons évoqué dans le paragraphe précédent. La massification du tourisme a permis la création d'un grand nombre d'emplois, mais en attirant les travailleurs dans les grandes zones touristiques, il a contribué à vider certains territoires de leurs habitants. Le tourisme de masse est à l'origine de déplacements massifs des populations tant des zones rurales vers des hauts lieux du tourisme, que des zones urbaines vers des zones périphériques. Sur ce point, on peut parler du phénomène de gentrification qui se traduit par l'appropriation de quartiers populaires urbains par une population aisée au détriment des habitants les plus pauvres, bien souvent contraints à déménager33. Par exemple à Paris, des lieux tels que le Quartier latin ou le Marais sont délaissés par les habitants au profit de quartiers populaires comme Belleville car ils n'ont plus les moyens d'y rester. Dans ces quartiers, les commerces mettent la clef sous

31 Rapport du CREDOC, « Conditions de vie et aspirations des français », réalisé à la demande de la DGE, Sandra HOIBAN et Jörg MÜLLER, p. 6

32 Id. p. 22

33 Terme employé pour la première fois par la sociologue Ruth Glass, London : aspects of change, 1964

14

la porte en échange de grandes enseignes et les locations saisonnières font la loi. De ce fait, ils deviennent majoritairement fréquentés par les touristes, favorisant ainsi la flambée des prix des loyers et plus généralement du niveau de vie34. En un mot, le tourisme de masse, engendre des migrations de populations : les habitants de zones rurales se déplacent vers les zones urbaines où se concentrent les infrastructures touristiques et où les offres d'emplois fleurissent, tandis que dans ces zones urbaines, les plus pauvres sont bien souvent contraints à déménager et s'excentrer en raison de l'invasion touristique, creusant toujours plus les inégalités.

Les plateformes de locations saisonnières entre particuliers sont ainsi vigoureusement décriées dans de nombreuses villes à travers le monde. Tel est le cas à Paris où désormais la loi impose la limitation des locations de meublés touristiques à 120 jours par an35 tant le phénomène impacte la vie de la capitale. Airbnb, qui est au coeur de la tourmente, va devoir veiller à respecter ces obligations légales puisque désormais le projet de loi ELAN prévoit un durcissement des sanctions en cas de non-conformité36.

Pour poursuivre l'analyse quant aux effets du tourisme de masse sur l'emploi, il profite effectivement à ces populations à la recherche de travail. Cependant, compte tenu de la nature saisonnière de ce tourisme, les emplois proposés sont bien souvent précaires. Cette précarisation se traduit par des contrats à durée déterminée, des contrats saisonniers, à temps partiel ou encore en intérim. Pour beaucoup et notamment les jeunes actifs, cette situation représente quelques avantages : c'est un moyen de gagner de l'argent rapidement sur une courte période, cela permet de ne pas être lié à un employeur à long terme et de choisir quand travailler etc. Pourtant, de nombreux inconvénients peuvent être relevés : ces contrats n'apportent pas de stabilité en raison des changements fréquents de situation et d'environnement, il est difficile de faire valoir son expérience et son ancienneté quand on a eu une multitude d'employeurs, la rémunération proche du SMIC etc. De nombreux emplois touristiques seraient encore trop peu qualifiés, sous-payés ou précaires, et le tourisme serait la première source de conflits aux Prud'hommes, selon Atout France37. En effet, en dépit du grand nombre d'emplois créés dans le secteur, le tourisme de masse est vecteur d'instabilité et de précarisation que les salariés subissent plus qu'ils ne choisissent.

Face à la fragilité de l'emploi, le tourisme de masse pose de sérieux problèmes au niveau culturel. Depuis plusieurs années, on voit naître de nombreux conflits entre les habitants et les touristes, dans certaines zones où le tourisme de masse devient invivable. Cet état de guerre n'est que le reflet d'un processus de déculturation38, c'est à dire que le tourisme de masse ne prend pas en compte les particularités locales et contribue à leur disparition,

34 Anne Clerval, La gentrification à Paris intra-muros : dynamiques spatiales, rapports sociaux et politiques publiques, 2008

35 Loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique

36 Projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), juin 2018

37 Atout France, Tourisme et développement durable, p. 15

38 Jean Poirier, Ethnies et cultures, 1972, sur la notion de déculturation

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agissant comme une véritable gangrène sur l'identité culturelle. Avec la pratique du tourisme de masse, on ne compte plus les projets d'aménagement qui ont suscité des levées de boucliers de la part des habitants. Plusieurs auteurs, dont Bruno Charlier39, démontrent que les conflits les plus fréquents sont très souvent provoqués par les aménagements touristiques ou de loisirs. Dès lors, si des revendications épidémiques anti-touristes explosent un peu partout dans le monde, et plus particulièrement en Europe, c'est parce que le tourisme de masse a pris une telle ampleur que les populations d'accueil ne se sentent plus chez elles. Ces révoltes sont de plus en plus nombreuses et se traduisent majoritairement par des manifestations mais aussi des actes plus violents pouvant semer le trouble dans certaines villes. En 2017 à Barcelone, des manifestations ont eu lieu contre les touristes avec des slogans très explicites tels que « le tourisme tue » ou « touristes, rentrez chez vous »40. Très vite le mouvement s'est propagé au Pays Basque français. Des autocollants « Parisien dégage, t'as Paris Plage » ont pu être observés à Biarritz. Les touristes, perçus comme des envahisseurs, sont devenus un cauchemar pour les habitants malgré la manne financière qu'ils apportent. Comme d'autres territoires français, le Pays Basque a une identité très forte et malgré son attractivité, rejette avec ferveur le tourisme de masse. En effet, « il faut éviter la folklorisation de la culture et de l'identité basques » selon Mathieu Bergé, conseiller municipal de Bayonne41.

Dans ces zones fortement touristiques, quand vient la fin de la saison c'est souvent avec soulagement que la population voit les touristes vider les lieux. Bien souvent, ces territoires ne connaissent que « la foule ou le vide ; quand vient l'hiver, il ne reste plus qu'une cité morte où sifflent les vents »42.

Source : Offensive n°14, p. 22, mai 2017 - Autocollant édité par le mouvement Breton Emgann, années 90

39 Bruno Charlier, La défense de l'environnement : entre espace et territoire, sur les conflits d'environnement recensés entre 1974 et 1994 puis jusqu'en 2004 pour la revue Combat Nature

40 The Guardian, First Venice and Barcelona: now anti-tourism marches spread across Europe, août 2017

41 France TV Info, Mouvement anti-touristes au Pays Basque, août 2017

42 Bernard Charbonneau, Babylone à la plage, pour la revue Offensive n°14, p. 19, mai 2017

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Cette affiche éditée par des militants Bretons démontre précisément le phénomène. La concentration des touristes durant la période estivale crée à fortiori de multiples déséquilibres pour la région, victime du tourisme de masse. Passé les mois d'été, la Bretagne se vide de touristes et alors il devient difficile pour les professionnels du tourisme, de la restauration, de l'hôtellerie, de maintenir leurs activités.

C'est l'organisation saisonnière de l'activité qui engendre la concentration de la fréquentation touristique. Dans la mesure où la répartition est inégale tant sur le plan géographique que sur le plan temporel, les touristes se retrouvent au même endroit au même moment, provoquant inévitablement de nombreux problèmes. La concentration spatiale du tourisme est significative, selon l'avis du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) de 201443. Emma Delfau, sous-directrice du Tourisme à la DGE, la résumait ainsi : « 20 % du territoire accueillent 80 % des flux touristiques »44.

Source : Mémento du tourisme 2017.45

Cette carte souligne la prééminence, quant à la fréquentation touristique, des départements littoraux, en particulier de l'Atlantique et de la Méditerranée, ainsi que des montagnes, et surtout des territoires alpins, où est concentrée la majorité des stations de ski françaises. S'ajoutent à ces zones, fortement fréquentées, Paris et plusieurs autres grandes villes françaises, ainsi que la Bretagne, la vallée de la Loire, la Dordogne et l'Alsace, qui sont aussi des régions où le tourisme de masse s'est installé. La fréquentation varie de façon significative en fonction du type d'espace, mais aussi selon les périodes, au regard des congés qui ont lieu au même moment pour tout le monde. C'est ainsi que schématiquement, en hiver, la fréquentation est plus élevée à la montagne, tandis qu'en juillet et août, c'est le littoral qui se retrouve surpeuplé.

43 Conseil Économique, Social et Environnemental, Tourisme et développement durable, 2014, p. 111

44 Audition d'Emma Delfau, sous-directrice du tourisme à la DGE

45 Veille Info Tourisme, le Memento du tourisme 2017, p. 98

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Cette concentration touristique de masse dans le temps et dans l'espace représente à tous les niveaux, un vrai déséquilibre. Les populations en souffrent et s'insurgent contre les touristes, mais l'environnement est également impacté.

C. Des conséquences environnementales catastrophiques

Le tourisme de masse peut être un véritable fléau sur notre environnement : pollution des sites naturels, dénaturation des paysages ou encore facteur aggravant du réchauffement climatique. Si des mesures ont été prises en France pour sauvegarder l'environnement, la politique du tourisme a encore beaucoup à faire sur le chemin du développement durable.

De même, suite du développement précédent, relatif au climat hostile entre populations locales et touristes, on peut évoquer les conflits d'usage de la terre et d'occupation de l'espace qui apparaissent du fait d'une certaine concurrence entre les usages traditionnels et les infrastructures touristiques. A ce titre, des territoires sensibles tels que les zones littorales ou encore montagneuses ont subi de nombreuses transformations au niveau de l'environnement et ont été vidées de leurs habitants afin de mettre sur pieds des complexes hôteliers, des zones commerciales, des voies d'accès etc. Il existe aujourd'hui de nombreux exemples de stations balnéaires françaises qui ont été dénaturées et bétonnées pour accueillir le plus de possible de touristes. C'est le cas par exemple de la ville de La Baule, à l'image de laquelle un grand nombre de villes littorales ont été urbanisées très rapidement au détriment de l'environnement, sans penser aux éventuels désastres écologiques. Imaginée au départ comme une station balnéaire pour des familles catholiques dans la lignée de Blankenberge, sur la côte flamande, La Baule s'urbanise rapidement pendant la première moitié du 20ème siècle, grâce notamment à sa gare située à 400 mètres de la plage, pour devenir finalement la station que l'on connaît aujourd'hui, très bétonnée. Toutefois, consciente de l'urbanisation de masse dont elle a été l'objet et face aux enjeux actuels, la ville tente aujourd'hui de protéger son environnement, dans une démarche durable.

L'environnement a subi de nombreux dégâts du fait du tourisme de masse. En France, les effets sur l'environnement sont certainement plus légers qu'ailleurs dans le monde où, bien souvent, la nature a été frappée de plein fouet par une urbanisation massive mal gérée et un afflux outrancier de touristes. C'est le cas dans des pays comme la Thaïlande, la République Dominicaine, l'Égypte etc. A ces endroits, ce sont surtout les littoraux qui ont été touchés en premier, avec la construction d'hôtels sur plusieurs centaines de kilomètres, le long des plages et à quelques mètres seulement du rivage, privatisant ainsi les plages. De sorte que, dans ces pays et notamment en République Dominicaine, ces plages ne sont plus accessibles qu'aux touristes, les locaux n'ayant plus l'autorisation d'y circuler librement. En France, la situation n'est pas aussi scandaleuse, mais l'environnement n'en reste pas moins touché. Sur la côte Méditerranéenne, le tourisme représente 11 % du PIB cumulé des pays côtiers, contribuant le

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plus à leur économie46. Le tourisme de masse actuel implique malheureusement un développement effréné du littoral, une consommation d'eau et d'énergie excessive et une gestion non durable des déchets et des eaux usées. Selon un rapport de WWF de 2017, le tourisme représente plus de 90 % de la production économique annuelle de la Méditerranée47. Et le nombre de touristes attendus dans les années à venir est sur le point de doubler.

Source : Rapport WWF, « Reviving the economy of the Mediterranean Sea », 2017.

La France dispose de plusieurs milliers de kilomètres de côtes (plus de 7000 kilomètres) sur lesquelles l'activité humaine est très intense. Eu égard à l'urbanisation et au développement des activités touristiques sur les littoraux, ils représentent des espaces menacés et fragiles que les pouvoirs publics tentent depuis plusieurs années de protéger par la réglementation et la maîtrise foncière. Il faut savoir qu'à moins de 500 mètres de la mer, on compte 2 à 3 fois plus d'habitants au kilomètre carré et 6 fois plus de logements qu'ailleurs sur le territoire. A ce titre, 1,4 million d'habitants de plus sont attendus d'ici 2040. Le littoral est également la première destination touristique en France avec une offre d'hébergements colossale48. L'activité touristique sur le littoral menace ainsi directement l'équilibre de la mer. Quant aux côtes, elles reculent de plusieurs dizaines de centimètres par an du fait de l'érosion mais aussi des déséquilibres produits par les infrastructures portuaires, l'activité maritime etc.

C'est pourquoi, il apparaissait nécessaire de trouver des solutions et il est indispensable désormais de se diriger vers une approche du tourisme plus durable et respectueuse de ces territoires sensibles. C'est en 1986 que les acteurs publics ont véritablement pris conscience de la menace pesant sur le littoral et de la nécessité de le protéger, avec l'entrée en vigueur de la « loi relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral », dite « loi littoral »49. Votée avec un large consensus, elle interdit toute construction et installation nouvelle à moins de 100 mètres du rivage en dehors des zones urbanisées. Concernant ces zones déjà urbanisées, la loi prévoit des opérations de rénovation et de réhabilitation de l'habitat existant.

46 WWF, Reviving the economy of the Mediterranean Sea, p. 9, 2017

47 Id. p. 18

48 Conservatoire du littoral, Les chiffres clés du littoral, février 2016, p. 3

49 Loi n° 86-2 du 3 janvier 1986

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Néanmoins, en dépit de cette loi, le tourisme n'a cessé d'évoluer et se pratique toujours plus massivement sur les côtes françaises. Le littoral reste exposé aux dangers du tourisme de masse et il convient de prendre des mesures plus radicales pour sa protection, faute de quoi il pourrait être fortement dénaturé et perdre en superficie dans les années à venir. Pourtant, dans le cadre du projet de loi ELAN50, les débats ont été assez virulents quant à l'assouplissement de certaines dispositions de la loi Littorale. Face à l'ampleur des protestions, il semblerait que les députés soient revenus sur leurs intentions. Mais le débat n'est pas clos, la loi n'est pas à l'abri d'éventuelles modifications, ce qui pourrait s'avérer tragique pour les littoraux français.

Parallèlement, les zones de montagnes ont également été la cible d'un tourisme de masse qui encore aujourd'hui reste nettement présent, notamment dans les Alpes pendant les saisons hivernales. Le tourisme est un levier central du développement économique de la région alpine et comme nous l'avons évoqué pour les zones littorales, c'est l'un des principaux moteurs de l'urbanisation. Chaque année, le territoire alpin reçoit des dizaines de millions de touristes pour près de 200 stations de montagne. Ainsi, l'impact sur la faune et la flore est de plus en plus important, et l'urbanisation liée au tourisme se propage à grande vitesse, allant même jusque dans des zones reculées et fragiles.

Selon WWF, les sports d'hiver ont de graves conséquences d'un point de vue écologique. En effet, près de 3400 kilomètres carrés de paysages sauvages du massif ont été transformés pour créer des pistes de ski mais aussi des remontées mécaniques ainsi que toutes les infrastructures nécessaires à l'accueil des touristes51. Ces constructions provoquant de profondes modifications du paysage, notamment avec les déboisements et les terrassements, augmentent le phénomène d'érosion et favorisent le risque de glissements de terrain, bouleversant tout l'écosystème local.

Outre les installations, toujours plus nombreuses, ce type de tourisme engendre à fortiori une consommation d'eau conséquente. Dans son rapport, le CESE explique qu'en hiver, au moment où la saison touristique est la plus importante, le débit des cours d'eau est très bas. Pourtant, c'est aussi à ce moment-là que la demande en eau est la plus forte à cause des équipements des hébergements touristiques (piscine, spa etc.) mais aussi du fait de la production de neige artificielle car l'enneigement est de moins en moins optimal52. En effet, outre le fait que les glaciers alpins aient déjà perdu 25 % de leur superficie en dix ans, l'usage des canons à neige est un véritable gouffre en matière de consommation d'eau et ils sont d'autant plus problématiques car on utilise des eaux chargées en matières organiques qui déséquilibrent les sols, mais aussi des additifs polluants permettant à la neige de fondre plus lentement53.

50 Projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), juin 2018

51 WWF, Les Alpes : entre nature et culture

52 CESE, Tourisme et développement durable, 2014, p. 231

53 Institut des Géosciences de l'Environnement, recherches sur la fonte des glaces, février 2017

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Face à ces mutations inquiétantes, la « loi relative au développement et à la protection de la montagne », dite « loi Montagne »54 avait permis en 1985 de considérer la montagne comme une zone où les conditions de vie sont plus difficiles au regard de l'altitude, des conditions climatiques et de l'écosystème, freinant ainsi l'exercice de certaines activités économiques, dont le tourisme. Toutefois, à l'image du littoral cette loi ayant vocation à protéger les patrimoines naturel et culturel, n'a pas empêché le tourisme d'évoluer massivement et d'engendrer de véritables dégâts écologiques allant de pair avec un phénomène désormais admis et tangible, le réchauffement climatique55.

Le tourisme dans sa forme massificatrice ou non, contribue indéniablement au réchauffement climatique, entraînant une large consommation de ressources naturelles non renouvelables, tant au niveau des déplacements que pendant le séjour. La question des émissions de gaz à effet de serre est ainsi au coeur des préoccupations car c'est l'un des facteurs liés au réchauffement climatique. Il faut savoir que l'activité touristique dans son ensemble est responsable d'environ 8 % du total des émissions de gaz à effet de serre de l'humanité, représentant un pourcentage bien supérieur aux évaluations antérieures, dont les pourcentages oscillaient entre 2,5 % et 3 % 56. Quant à l'aviation, le secteur représente aujourd'hui 3,5 % des gaz à effets de serre d'origine humaine, proportion qui pourrait atteindre 15 % d'ici 2050 57.

Face au constat alarmant du réchauffement climatique qui s'amplifie de façon flagrante eu égard aux nombreux changements climatiques tels que l'intensification des catastrophes naturelles, la mise en péril de la biodiversité, ou encore les risques sanitaires engendrés, il apparaît nécessaire de prendre de véritables mesures afin de réduire drastiquement les effets du tourisme de masse et de se tourner vers le tourisme durable.

Section 2. Une prise de conscience tardive par les acteurs publics des enjeux du tourisme durable

Si les pouvoirs publics n'ont eu d'autres choix que de se tourner vers la solution du tourisme durable face aux désastres provoqués par le tourisme de masse, l'avancée a été plutôt timide et lente du fait notamment d'une politique touristique dépourvue de stratégies adéquates et d'un manque cruel de moyens de fonctionnement (A). Toutefois, de nombreux textes ont été institués par l'État et les collectivités (B), concomitamment à d'autres mesures nationales officielles témoignant de l'intérêt croissant des pouvoirs publics pour le tourisme durable (C).

54 Loi n° 85-30 du 9 janvier 1985

55 Rapport du GIEC (Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Évolution du Climat), 5ème rapport sur les changements climatiques et leurs évolutions futures, septembre 2013

56 Revue scientifique Nature Climate Change, « The carbon footprint of global tourism », mai 2018

57 OMT, Tourisme et changement climatique : affronter les défis communs, octobre 2007

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A. Une organisation politique touristique confuse

Si l'année 2017 a été celle du tourisme durable selon l'Organisation Mondiale du Tourisme58 et a permis de mettre un point d'honneur à sa reconnaissance et à son développement, la prise de conscience a été relativement lente et reste toutefois perfectible encore aujourd'hui. Cet éveil est né des effets alarmants provoqués par le tourisme de masse sur l'environnement, la société, la culture ou encore l'économie. Ainsi, il est apparu indispensable de trouver des solutions sur le long terme pour le tourisme, tant par des acteurs publics que privés, et aussi bien à l'échelle des professionnels que des consommateurs.

Dès le début des années 1970, le thème du développement durable est saisi par un grand nombre d'institutions, tant au niveau mondial que national. En France comme dans de nombreux autres pays européens, les pouvoirs publics ont rapidement inscrit le développement durable au coeur de leurs priorités, ouvrant le débat au moyen de comités d'experts, d'études, de travaux parlementaires etc. C'est d'abord en 1972 que le premier Sommet de la Terre s'est tenu à Stockholm, abordant pour la première fois des questions d'ordre écologique au niveau international59. Quelques années après, la notion de développement durable émerge et représente l'idée selon laquelle les sociétés humaines doivent pouvoir exister et répondre à leurs besoins sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins. Cette définition fut dégagée par la Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement de l'Organisation des Nations Unies (ONU), dans le rapport Brundtland en 198760. Il fut évident à ce moment-là d'appliquer les préceptes du développement durable au tourisme, c'est-à-dire de faire en sorte que le secteur réponde à des normes édictées pour le bien-être des sociétés et des populations, de l'économie, et de l'environnement. Ainsi, très vite des lois comme la « loi Montagne » et la « loi Littoral » ont pu voir le jour, au même titre que la création de parcs nationaux, dans le but de préserver l'environnement notamment au regard de l'expansion du tourisme.

Face à ces démarches encourageantes, la suite de l'histoire est quelque peu confuse et obscure. En effet, si le tourisme en France représente plus de 7% du PIB, on pourrait penser que les pouvoirs publics s'y consacrent pleinement et en font une stratégie majeure par la mise en place, à l'échelle étatique, d'un ministère du tourisme. Il n'en est rien. Il est intéressant de noter qu'il n'y a jamais eu de ministère dédié au tourisme en France et qu'il n'y en a pas non plus aujourd'hui.

Du fait de son hétérogénéité, le secteur du tourisme fait intervenir des matières variées, rendant difficile son insertion dans l'organisation administrative, de sorte qu'au grè des

58 Cf. < www.unwto.org >

59 Conférence des Nations Unies sur le développement humain, 1972

60 Rapport de la Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement de l'ONU, présidée par Gro Harlem Brundtland, « Notre avenir à tous », 1987

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mandats, le tourisme fut rattaché à des ministères différents, freinant l'évolution de la politique touristique. En 2007, la révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy avait pour objectif d'améliorer l'efficacité des services publics mais aussi de diminuer la dépense publique, en réduisant drastiquement les moyens de fonctionnement de l'État, et notamment le nombre de ministères. On se pose ainsi la question de savoir quelle est la place du tourisme dans l'administration, puisque sans ministère approprié il est difficile d'accentuer le positionnement de la France au niveau international et de prendre en compte les besoins du secteur touristique et notamment les besoins en matière de tourisme durable.

A titre d'exemple, plusieurs pays comme la Chine, la Nouvelle Zélande ou encore le Costa Rica61, disposent d'un ministre du tourisme à temps plein affirmant ainsi leur volonté de développer leur positionnement. En France, malgré sa première place au classement en termes d'arrivées de touristes internationaux, le tourisme est noyé dans divers secteurs d'activités. En effet, après avoir été rattaché à des ministères tels que la qualité de vie, la culture et l'environnement, la jeunesse, les sports et les loisirs, le temps libre, le commerce extérieur, l'artisanat ou encore l'industrie, le tourisme est aujourd'hui divisé entre le ministère de l'Économie et des Finances et le ministère de l'Europe et des Affaires Étrangères62. Il y a de quoi s'interroger sur la logique de ce rattachement et sur la place qu'occupe le tourisme dans les priorités et les stratégies du gouvernement. Si le tourisme en tant que tel n'est pas au coeur des préoccupations, on se pose alors la question de la place du tourisme durable, relégué à un plan plus que secondaire.

Dans la continuité de la RGPP, l'administration nationale du tourisme a été profondément transformée en 2009 avec tout d'abord la création de la Direction Générale des Entreprises (ex-DGCIS)63 qui est chargée d'élaborer et mettre en oeuvre les politiques publiques relatives au secteur du tourisme, et qui aide à la compétitivité des entreprises dans le but de favoriser l'attractivité économique de la France par le biais de plusieurs bureaux. Enfin, une loi du 22 juillet 2009 a donné lieu à l'agence de développement touristique, Atout France64. A travers ses diverses missions, Atout France permet d'unir sous forme d'un partenariat l'État, les collectivités territoriales ainsi que les professionnels du tourisme. En effet, le législateur a opté pour la forme juridique du groupement d'intérêt général qui a vocation à faciliter et développer l'activité économique de ses membres. L'agence a une dimension nationale et internationale, et dispose à ce titre d'une trentaine d'antennes à travers le monde afin de promouvoir la destination. Parallèlement, elle est chargée de l'immatriculation des opérateurs de voyages et de séjours et du classement des hébergements touristiques marchands. En résumé, les missions d'Atout France sont très larges, et il semblerait que l'État lui ait confié le rôle d'un véritable conseiller en matière touristique.

61 OCDE, Tendances et politiques du tourisme de l'OCDE, 2016

62 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

63 Décret n° 2009-37 du 12 janvier 2009 relatif à la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS devenue DGE par un décret n° 2014-1048 du 15 septembre 2014)

64 Loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques

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Cependant, on note une perte de lisibilité importante et une certaine imprécision quant aux matières attachées à l'une ou l'autre des deux structures, qui font que ce secteur n'est plus véritablement affiché comme étant une priorité politique. Face à ces constats, les controverses sont nombreuses. C'est l'exemple du sociologue Jean Viard, pour qui il est nécessaire de mettre en place une véritable gouvernance de la politique du tourisme, l'absence d'un ministère dédié au tourisme étant pour lui, « consternante ». En effet, au regard du poids du tourisme en France, il faut une pensée globale. Pour le sociologue, « toute activité humaine transforme le territoire. On ne peut pas déplacer tant de gens sans avoir des stratégies très précises » 65. Il est nécessaire de diffuser ces individus sur le territoire de façon à ce que le tourisme dans une dimension plus durable soit un phénomène de respect envers l'environnement et les populations. La directrice de l'observatoire du comportement des touristes, Josette Sicsic, rejoint l'avis de Jean Viard66 et considère qu'il est temps de faire autre chose face à cette course à la performance et ce tourisme de masse néfaste. En effet, les chiffres du tourisme en France sont très bons, mais il est nécessaire de réfléchir et d'encadrer le tourisme, dans une dynamique plus durable et respectueuse.

Si l'organisation de la politique du tourisme à l'échelle étatique fait débat, elle pose également question au niveau de l'administration déconcentrée du fait d'un émiettement des compétences et d'une répartition peu claire.

L'article L.211-1 du Code du tourisme dispose que « l'État, les régions, les départements et les communes sont compétents dans le domaine du tourisme et exercent des compétences en coopération et de façon coordonnée », pourtant en pratique, la répartition pose parfois problème et ne permet ainsi pas d'avoir un positionnement stable en matière de tourisme durable. Pour Emma Delfau, la gouvernance du tourisme par ses acteurs est une des faiblesses du secteur : « cette gouvernance est très émiettée. Le secteur est géré par l'Etat mais aussi et surtout par les collectivités qui sont elles-mêmes à plusieurs niveaux. Toutes ont une compétence (régions, départements, communes), finalement cela crée des difficultés pour avoir une stratégie globale et commune de promotion des territoires »67.

En effet, à chaque échelon administratif correspond une institution en charge du tourisme. A l'échelle régionale, la région est dotée d'un comité régional du tourisme (CRT), chargé de mettre en oeuvre la politique régionale touristique. A l'aide de subventions de l'État, les CRT mettent en place des schémas régionaux de développement touristique sur plusieurs années afin de définir des stratégies pour la promotion de la région. Au niveau départemental, on trouve les comités départementaux du tourisme (CDT), ayant pour vocation de contribuer au développement et au dynamisme du tourisme départemental à l'aide, comme pour la région, de subventions étatiques et d'un schéma d'aménagement touristique départemental. Enfin,

65 Audition de Jean Viard, sociologue, écrivain et directeur de recherche au CNRS, pour France Culture, août 2017

66 Audition de Josette Sicsic, directrice de l'observatoire du comportement des touristes et rédactrice en chef du journal mensuel Touriscopie, pour France Culture, août 2017

67 Audition d'Emma Delfau, sous directrice du tourisme à la DGE

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au niveau communal, le développement du tourisme s'opère par le biais d'institutions spécialisées, les syndicats d'initiative et les offices de tourisme. L'office de tourisme est un centre d'information dont la mission est « l'accueil, l'information et la promotion du tourisme » créé par les communes sur leur territoire ou sur un territoire intercommunal, tandis que le syndicat d'initiative, plus rare, résulte d'une création par des acteurs exclusivement privés et a pour ambition de développer l'accueil des touristes, la promotion et l'animation touristique.

Cet enchevêtrement de compétences et d'interventions, entre l'État central et les collectivités territoriales, rend difficile la mise en place d'une véritable gouvernance du tourisme et donc du tourisme durable. L'enjeu aujourd'hui pour le secteur touristique c'est, « à l'image de ce qu'ont fait d'autres secteurs avant lui, de mettre à plat l'organisation touristique afin de responsabiliser chaque maillon de la chaîne. Du petit artisan au grand groupe international, en passant par la commune, la région ou le département, tous doivent saisir l'urgence de s'engager dans des stratégies de tourisme durable »68. Quant au CESE, il préconise dans son avis de 2014 que « le développement durable des territoires en matière de tourisme ne pourra se faire qu'avec une volonté politique affichée au plus haut niveau de l'État »69.

En accord avec cette perspective, de plus en plus d'actions pour un tourisme plus durable sont instituées à tous les échelons territoriaux, compte tenu des effets pervers du tourisme de masse sur l'environnement, la société et l'économie, et sous l'impulsion d'autres acteurs, que nous étudierons dans la partie suivante.

B. Le tourisme durable dans les dispositifs législatifs de mise en valeur du territoire

Comme le démontre le sociologue Jean Viard, il est impératif de construire une véritable gouvernance de la politique du tourisme en France70. Le terme « gouvernance » est important pour l'auteur et signifie dans ce contexte, de mettre en oeuvre un pilotage, une stratégie touristique et non pas une simple régulation. Ces stratégies sont fondamentales car elles permettront, sur le long terme, de penser le tourisme dans une dimension durable et viable pour l'environnement, les populations d'accueil et l'économie. En somme, il est nécessaire d'élaborer des dispositifs pour la mise en valeur du territoire tout en se soumettant aux principes du tourisme durable. Les politiques publiques, bien que la mise en oeuvre fût lente, mettent une plus grande priorité au tourisme durable, à l'image du développement durable dans les autres secteurs tels que l'économie, la construction, l'énergie etc. On peut citer à titre d'exemple les lois Littoral et Montagne que nous avons évoquées précédemment. Grâce au législateur, ces lois concourent à la protection de zones très sensibles et fortement exposées

68 Comité 21, Agir ensemble pour un tourisme durable, août 2008, p. 3

69 CESE, Tourisme et développement durable, 2014, p. 15

70 Audition de Jean Viard, sociologue, écrivain et directeur de recherche au CNRS, pour France Culture, août 2017

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au tourisme de masse. Elles font donc partie intégrante, comme d'autres lois pour la protection de l'environnement, d'un pilotage politique en faveur d'un tourisme plus durable.

Au niveau étatique, la compétence en matière touristique est partagée entre la DGE et Atout France, chacune ayant des missions bien précises bien que parfois mêlées, comme nous l'avons évoqué précédemment. A l'image d'une jungle tentaculaire, la DGE est composée de cinq grands services, eux-mêmes composés de plusieurs sous-directions qui, à leur tour, sont composées de différents bureaux71. Ainsi, le service « tourisme, commerce, artisanat et services » est constitué d'une sous-direction du tourisme comprenant en son sein, quatre bureaux. Parmi ces quatre bureaux, on retrouve le « bureau des destinations touristiques », qui est chargé de la mise en oeuvre de la politique du tourisme sur les territoires touristiques du littoral, de la montagne, des territoires ruraux, urbains, en métropole ainsi que dans les départements et régions d'Outre-mer. Le bureau est également compétent pour la mise en oeuvre des politiques nationales de tourisme durable, responsable et éthique et la desserte équilibrée du territoire72. A titre d'exemple, le bureau des destinations touristiques a lancé un programme appelé « la France à vélo », permettant aux touristes de découvrir les régions françaises d'une façon plus authentique et durable. On peut également citer le tourisme fluvial et la randonnée pédestre comme autres modes de tourisme en accord avec une démarche plus respectueuse. En ce sens, la DGE soutient et accompagne le développement de ces pratiques touristiques, que l'on peut rattacher à ce que l'on appelle le « slow tourisme », consistant à découvrir de manière plus authentique et plus en profondeur une région ou un département tout en prenant son temps et en réduisant son impact et ses déplacements73.

Le soutien apporté par l'État, via les DIRRECTE, la DGE et Atout France, s'effectue notamment par le biais des « contrats de destination ». Afin de consolider les destinations et marques existantes en France, sur la scène internationale notamment, les contrats de destination ont été mis en place. Ces contrats ont pour but de créer des destinations au-delà des périmètres administratifs, et en fédérant l'ensemble des acteurs du tourisme, ils permettent de renforcer l'attractivité des territoires et de proposer une offre mieux structurée. Cette innovation répond ni plus ni moins à la principale critique qui était faite, celle d'un manque de coordination entre les acteurs et d'un enchevêtrement des compétences. Les acteurs signataires sont généralement les collectivités territoriales, les comités régionaux et départementaux du tourisme, les offices de tourisme, les opérateurs de transports, les hébergeurs, les prestataires de services, etc.74 Pour le moment, une vingtaine de contrats de destination ont été sélectionnés par deux appels à projets organisés par la DGE en 2014 et 2015, regroupés en cinq thèmes dont l'un d'eux porte sur « l'écotourisme, bien vivre et la

71 Arrêté du 15 septembre 2014 portant organisation de la Direction Générale des Entreprises

72 Article 11 de l'arrêté du 15 septembre 2014 portant organisation de la Direction Générale des Entreprises

73 Veille Info Tourisme, Vincent Oberto, Slow tourisme, janvier 2018

74 Cf. < www.entreprises.gouv.fr >

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découverte des sites naturels et patrimoniaux ». Si les quatre autres thèmes comportent pour la plupart un aspect durable au sein de leurs objectifs, le thème de l'écotourisme est sérieusement axé sur cette problématique et regroupe cinq contrats parmi lesquels on retrouve par exemple le contrat Bretagne, Corse, Guyane-Amazonie etc.

Concernant le contrat Bretagne, un des objectifs principaux est de positionner la région comme destination durable d'exception. La Bretagne, qui s'est très rapidement dirigée vers le tourisme durable, bénéficie pour cette convention d'un grand nombre d'acteurs signataires, tous fédérés autour de ce même objectif de durabilité et d'authenticité. La région est effectivement très impliquée à ce niveau depuis un certain nombre d'années comme en attestent les schémas régionaux du tourisme sensiblement axés sur le développement durable. Motivée par la beauté et la richesse du patrimoine naturel mais aussi par la culture vivante transmise par les habitants, elle s'efforce de trouver l'équilibre entre les aspects économiques, sociaux et environnementaux de l'économie touristique. Le portail « voyagez-responsable.tourismebretagne.com » a d'ailleurs été créé en 2009 par le CRT Bretagne avec pour objectif d'encourager et de valoriser l'ensemble des acteurs qui s'engagent pour un tourisme plus responsable et de sensibiliser les touristes à ces enjeux. Parmi toutes les régions du territoire, la Bretagne est un véritable laboratoire d'initiatives touristiques durables. En effet, cette volonté se traduit par de nombreuses actions telles que la valorisation du vélo (véloroutes et voies vertes) et de la randonnée, les initiatives écologiques auprès des professionnels et des touristes (économie d'énergie, tri des déchets, réduction de la consommation en eau), la création de labels (la Bretagne est devenue la première région de France engagée dans l'éco labélisation) etc.

Par ailleurs, l'État apporte son soutien au développement du tourisme durable par des partenariats avec des réseaux, tels que les parcs nationaux de France, la fédération des parcs naturels régionaux ou encore le réseau des Grands Sites de France. Concernant les parcs nationaux, on en compte aujourd'hui sept en France et trois en Outre-mer. Ils ont été créés par une loi du 22 juillet 196075 et sont aujourd'hui régis par la loi du 14 avril 200676, qui a mis à jour leur organisation et leurs missions. Gérés par l'État, ces parcs sont structurés en deux secteurs à la réglementation distincte : une zone de protection appelée « zone coeur » qui bénéficie d'une protection accrue et une « zone d'adhésion » regroupant les communes limitrophes, ayant vocation à en faire partie. Celles-ci sont partenaires du développement durable du parc et adhèrent ainsi à sa charte. Chaque parc élabore sa charte et organise sa stratégie touristique selon les particularités environnementales, économiques, sociales ou culturelles du territoire. En effet, ils favorisent la démarche du tourisme durable à travers diverses activités, des rencontres humaines, des découvertes et du ressourcement, en

75 Loi n°60-708 du 22 juillet 1960 relative à la création de parcs nationaux

76 Loi n° 2006-436 du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux

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partenariat avec les acteurs économiques locaux77. A titre d'exemple, le tourisme durable est au coeur des stratégies touristiques du Parc national des Cévennes. Il se développe notamment grâce à de solides relations avec les acteurs touristiques privés et public du territoire. Le parc fédère un réseau de professionnels du tourisme locaux au sein de l'association « Cévennes Écotourisme », travaille avec des agences 100% écotouristiques, met en place des actions phares telles que la réalisation d'une large offre de randonnée, la création d'un festival ou encore la mise en place d'écomusées78.

Parallèlement aux parcs nationaux, les parcs naturels régionaux ont été créés pour mettre en valeur de grands espaces ruraux habités, dont les paysages, les milieux naturels et le patrimoine culturel nécessitent une protection, en conséquence de leur équilibre fragile. C'est un décret du 1er mars 1967 qui a permis leur création, puis la loi Paysage du 8 janvier 199379 a légitimé leur existence en définissant leur procédure de création et leurs missions. La marque « parc naturel régional » est une marque déposée qui est attribuée par l'État. Chaque parc possède une charte graphique nationale, dans laquelle on retrouve une volonté très forte de sensibiliser les voyageurs aux préceptes du tourisme durable et de développer la coopération entre acteurs privés et publics, dans un but de préservation des milieux sensibles80. Enfin, qu'ils soient nationaux ou régionaux les parcs doivent canaliser la fréquentation des visiteurs et s'assurer qu'elle ne contrevient pas à l'objectif de protection du patrimoine naturel du parc qui fonde leur existence.

Enfin, le réseau « Grands Sites de France » s'adresse aux sites naturels et culturels remarquables, dont la dimension nationale est reconnue, accueillant un large public et nécessitant une gestion partenariale pour préserver leur valeur. La démarche est proposée par l'État aux collectivités territoriales et le but est de conserver l'esprit des lieux et de mettre l'accueil, le partage et le développement local durable au coeur de leur action. Ce réseau a également comme défi d'organiser et maîtriser de façon intelligente la fréquentation touristique, de manière à préserver ces territoires fragiles et attractifs et promouvoir de véritables valeurs durables auprès des visiteurs.

Par ailleurs, les collectivités territoriales disposent de plusieurs outils pour à la fois protéger et mettre en valeur les territoires. Bien que la répartition des compétences soit parfois confuse et suscite des tensions (notamment entre les communes et les intercommunalités depuis la loi NOTRe81, la compétence tourisme semble plus éclatée que partagée), les collectivités ont pour objectif d'oeuvrer en faveur du tourisme durable. C'est le cas par exemple des règles d'urbanisme, qui prennent en compte ces enjeux, à travers les Schémas de cohérence territoriale (SCOT) et les Plans locaux d'urbanisme (PLU), permettant d'assurer le respect des objectifs du développement durable lors de l'aménagement urbain notamment

77 Cf. < www.parcsnationaux.fr >

78 Cf. < www.cevennes-parcnational.fr >

79 Loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages

80 Cf. < http://www.parcs-naturels-regionaux.fr >

81 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe)

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touristique. En outre, les départements jouent également un rôle important face à ces enjeux. En effet, grâce à une taxe d'aménagement (qui est également perçue par les communes et les régions), les départements mènent une réelle politique de protection des espaces naturels sensibles, au titre de leur compétence en matière rurale, qui se traduit par l'acquisition de terrains en zones sensibles pour assurer leur sauvegarde face à l'expansion urbaine qu'engendre la hausse de la fréquentation touristique.

A travers tous ces dispositifs, dont la liste n'est pas exhaustive, les pouvoirs publics se sont efforcés à la fois de mettre en valeur le territoire, tout en le protégeant. Cela peut sembler contradictoire, car en tout état de cause, les espaces naturels ou culturels sont par essence attractifs et indispensables au développement de la plupart des communes. Ils supposent un déplacement des populations dans ces espaces au sein desquels elles séjournent et effectuent des activités, participant alors à la transformation des territoires. D'autres mesures sont alors prises pour pallier ces effets.

C. Les autres mesures nationales en faveur du développement du tourisme durable

Outre les mécanismes législatifs ou réglementaires relatifs à la protection et la valorisation des espaces naturels et du patrimoine culturel, diverses mesures tendent à renforcer le caractère durable du tourisme en France.

Pour faciliter la mise en oeuvre des politiques du développement et du tourisme durables, le gouvernement a mis en place des institutions capables d'en assurer le suivi et le déploiement. On peut citer le Commissariat Général au Développement Durable (CGDD), qui a été créé le 9 juillet 200882, et qui se charge entre autres de piloter des sujets interministériels sur le développement durable, ou encore de favoriser le dialogue environnemental parmi les divers acteurs83. Cette entité avait participé à la mise en place du Grenelle de l'Environnement, un ensemble de rencontres politiques organisées en 2007, visant à prendre des décisions à long terme en matière d'environnement et de développement durable. Il y a également l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie (ADEME) qui oeuvre pour le développement durable et donc indirectement pour un tourisme plus respectueux84. L'ADEME est un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du Ministère de la Transition écologique et solidaire qui participe à la mise en oeuvre des politiques publiques dans les domaines de l'environnement, de l'énergie et du développement durable grâce à ses capacités d'expertise et son rôle de conseil pour les pouvoirs publics85.

82 Décret n° 2008-680 du 9 juillet 2008 portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

83 Cf. < www.ecologique-solidaire.gouv.fr/commissariat-general-au-developpement-durable-cgdd >

84 Articles L131-3 à L131-7 du Code l'environnement

85 Cf. < www.ademe.fr >

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Au niveau étatique, on retrouve des démarches encourageantes pour le développement du tourisme durable à travers un système intéressant de labélisation et de création de marques. A ce titre, il existe une multitude de labels ou démarches mis en oeuvre par divers réseaux ou organisations privés ou des associations, mais il est parfois difficile d'y voir clair. Ainsi, afin de bâtir un véritable cadre et fédérer les professionnels du tourisme souhaitant proposer une offre touristique durable de qualité pour la clientèle, l'État a créé la marque Qualité Tourisme dans le cadre du Plan Qualité Tourisme (PQT). Le PQT a été mis en place lors du comité interministériel du 9 septembre 2003, quant à la marque Qualité Tourisme, elle a été créée en 200586. Aujourd'hui, c'est le bureau des clientèles touristiques de la DGE qui participe à son développement et s'occupe de promouvoir la démarche auprès des acteurs du tourisme mais aussi du grand public, à l'instar d'autres labels nationaux comme « Tourisme et Handicap » ou « Vignoble et Découverte ». Le PQT a également intégré au sein de la marque des critères de développement durable, contribuant ainsi à la reconnaissance et l'expansion du tourisme durable87. A ce jour, plus de 5000 établissements ont adhéré à Qualité Tourisme, tous secteurs confondus, tels que les hébergements, les restaurants, les offices de tourisme, les lieux de visites etc. Outre la démarche de qualité, cette marque avait également vocation à pallier la carence du classement hôtelier avant la réforme instituée par la loi du 22 juillet 200988.

En effet, avant 2009, le classement des hébergements touristiques devenait obsolète et la signification des étoiles faisait l'objet d'un certain affaiblissement89. Bien que facultatifs, les labels sont devenus très utilisés et certains sont encore en vigueur aujourd'hui, permettant ainsi aux touristes d'accéder à plusieurs sources d'information concernant la qualité des hébergements. Malgré cela, on trouve toutefois des critères relatifs au développement durable dans le système de classement des hébergements touristiques. En effet, la réforme de 2009 a permis d'une part, une homogénéisation et une meilleure lisibilité des référentiels constitutifs du classement des hébergements touristiques et d'autre part de conserver les spécificités propres à chaque type d'hébergements. Il existe ainsi trois catégories de référentiels, dont l'un s'attache à l'accessibilité et au développement durable. Les critères inhérents à ce chapitre permettent en effet d'analyser la performance de ces hébergements au regard de leur préoccupation pour les enjeux du développement durable, c'est-à-dire par leur aptitude à réduire leur consommation d'eau et d'énergie, et leur production de déchets. Ainsi, dans chaque catégorie d'hébergements, de l'hôtel (toutes étoiles confondues) au camping, en passant par les résidences de tourisme, les bonnes pratiques environnementales sont prises en compte. Néanmoins, cette considération s'avère très marginale par rapport à d'autres critères, qui semblent bénéficier d'un plus grand intérêt, ce qui est regrettable. On constate aussi que les critères durables attachés au label « Palace » sont insuffisants. Pourtant, il convient ici de souligner que le luxe et le développement durable ne sont pas

86 Cf. < www.entreprises.gouv.fr/qualite-tourisme >

87 CESE, Tourisme et développement durable, 2014, p. 240

88 Loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques

89 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

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antinomiques. En effet, le tourisme de luxe est un secteur économique florissant en France et dans le monde, et à ce titre il pourrait être exemplaire en matière de tourisme durable. Mais bien souvent, les offres semblent considérer l'aspect durable afin de séduire la clientèle, tandis que sur place c'est bien souvent une autre histoire.

Parallèlement à ces dispositifs officiels mis en place par l'État, il convient d'évoquer le cas de la labélisation partenariale avec le Conseil National des Villes et Villages Fleuris (CNVVF). C'est en 1972 que l'association CNVVF est créée, sous la tutelle du ministère de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi en charge du tourisme. Il est chargé d'organiser et de promouvoir le concours des villes et villages fleuris pour l'attribution du label qui fut mis en place en 1959 pour promouvoir le fleurissement et les espaces verts dans les communes. Actuellement, on compte environ 4700 villes et villages classés. Ce concours a été le moyen de fédérer et unir les communes autour d'un même but, celui de la recherche de qualité dans la politique du tourisme90. Il faut savoir que les communes classées mettent en oeuvre une véritable politique de préservation de l'environnement en accord avec l'esprit du tourisme durable. C'est à travers une gestion raisonnée des espaces verts et des terres, une consommation modérée en eau, en énergie et en hydrocarbures ainsi que la diminution de l'utilisation des pesticides que ce label concoure au respect des ressources naturelles. En effet, les communes s'engagent ainsi à promouvoir la biodiversité sous toutes ses formes et à sensibiliser le public sur l'importance de ces actions, notamment au moyen d'événements comme la Fête de la nature ou encore la Journée du développement durable91.

Enfin, ajoutons que suite au deuxième comité de pilotage du tourisme du 4 juin 2018, treize stations de montagne et balnéaires, dont l'Alpe d'Huez et les Deux Alpes en Isère, la Grande Motte dans l'Hérault, ou encore la Baule en Loire-Atlantique, ont été désignées pour bénéficier d'un soutien en ingénierie pendant 18 mois dans le cadre de la mise en place du plan « France Tourisme Ingénierie ». Cette expérimentation nationale vise à impulser de nouvelles démarches innovantes notamment pour la rénovation des hébergements et la transition énergétique des stations92. Dans ce cadre, l'enjeu consiste à développer des actions d'efficacité énergétiques et durables, notamment dans les zones de montagnes où les changements climatiques posent de sérieux problèmes écologiques, et à rénover les hébergements de façon à ce qu'ils s'inscrivent dans cette dynamique de développement durable.

Conjointement à l'intérêt grandissant des pouvoirs publics pour le tourisme durable dans la création d'institutions, de label, de marques, de concours, ou encore par la réformation des référentiels relatifs au classement des hébergements touristiques, ce sont d'autres acteurs qui oeuvrent en faveur de son développement. Les pouvoirs publics ont très vite été

90 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

91 Cf. < www.villes-et-villages-fleuris.com >

92 Communiqué de presse du deuxième Comité de pilotage du tourisme, 5 juin 2018

confrontés au tourisme de masse, mais n'ont pas toujours pris les mesures nécessaires à temps pour y faire face. Finalement, on observe des résultats plutôt inégaux concernant la lutte contre la massification du tourisme et la protection des espaces, de la culture ou des populations93. En effet, pour l'instant, si le tourisme durable montre son omniprésence dans les textes et les dispositifs mis en place, il reste perfectible. L'environnement, la société, les populations mais aussi l'économie souffrent encore aujourd'hui des conséquences du tourisme de masse. Si les autorités publiques ont toutefois suivi le chemin du développement durable devenu primordial, elles n'ont eu d'autres choix que d'inciter les acteurs du tourisme à s'orienter eux aussi dans cette voie. Aujourd'hui, le tourisme durable prend de l'ampleur, grâce aux actions de l'État d'une part, mais aussi à l'aide de ce que l'on appelle la « soft law »94 émanant d'autres acteurs, notamment internationaux. Finalement, l'approche internationale du tourisme durable semble beaucoup plus riche que l'approche nationale.

Dans une seconde partie, nous nous attacherons ainsi à analyser en quoi les entités internationales et les acteurs privés, à l'aide de normes non contraignantes ou de dispositifs spécifiques, apportent leur concours à la diffusion des valeurs du tourisme durable. A la suite de quoi, nous nous intéresserons aux différents freins s'opposant au développement du tourisme durable.

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93 CESE, Tourisme et développement durable, 2014, p. 214

94 De l'anglais, signifiant : droit mou.

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Partie 2. Les avancées en faveur du tourisme

durable et les limites pratiques à son

développement

Le tourisme durable est aujourd'hui en pleine expansion. Bien qu'il ait fait son apparition depuis de nombreuse années, cette forme de tourisme a souffert d'un manque d'intérêt de la part des pouvoirs publics et d'une certaine hésitation dans la prise de décisions. Face à cette politique touristique confuse, le droit mou pris a le relais et a permis au tourisme durable de s'épanouir et d'être reconnu, notamment grâce aux initiatives privées mais aussi à sa portée internationale. Cette reconnaissance engendre désormais de nombreux effets positifs, en termes de protection environnementale, de développement socio-culturel et de retombées économiques.

Toutefois, dans le contexte actuel, le tourisme durable se confronte à de nombreux freins. Si l'on exclut le tourisme de masse qui existe toujours, notamment dans certaines régions du monde telles que les destinations balnéaires et insulaires, destinations phares du low-cost, le tourisme durable fait face à de nombreuses critiques qui tendent à discréditer cette forme de tourisme.

Bien que la soft law concoure honorablement au développement du tourisme durable, grâce aux entités internationales et communautaires et à certains acteurs privés faisant valoir les valeurs durables du tourisme (section 1), le tourisme durable n'est pas encore très pratiqué car marginal et peu connu, souffrant même parfois d'une image négative (section 2).

Section 1. Le tourisme durable impulsé par la soft law et les initiatives privées

Face au bilan très négatif du tourisme de masse sur l'ensemble des trois valeurs, environnementale, socioculturelle et économique, et à l'hésitation des pouvoirs publics, on retrouve un grand nombre d'initiatives prises à une autre échelle. La soft law aspire en effet à venir combler les carences des textes et des actions menées par les autorités publiques. En pratique, ce droit mou met aussi en place des textes et des actions. Bien que ceux-ci ne revêtent pas le même caractère juridique que les textes officiels et la plupart des actions menées sous l'égide de l'État, c'est-à-dire un caractère contraignant, ils semblent toutefois efficaces.

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C'est au niveau international et communautaire que la soft law démontre une importance majeure (A). Les acteurs privés participent également à son essor par la mise en place de chartes ou de codes, mais aussi la réalisation de projets en faveur du tourisme durable (B).

A. La dimension internationale et communautaire de la soft law

En premier lieu, il convient de s'intéresser à la définition de la soft law. Dans le dictionnaire du droit international publié sous la direction de Jean Salmon, la soft law représente « des règles dont la valeur normative serait limitée soit parce que les instruments qui les contiennent ne seraient pas juridiquement obligatoires, soit parce que les dispositions en cause, bien que figurant dans un instrument contraignant, ne créeraient pas d'obligation de droit positif, ou ne créeraient que des obligations peu contraignantes »95. Par soft law il convient « d'entendre, non pas le vide absolu de droit, mais une baisse plus ou moins considérable de la pression juridique »96. Il s'agirait ainsi de « jalons normatifs »97. Concernant le tourisme durable, la soft law a non seulement vocation à pallier les lacunes des normes juridiques mais aussi à influencer le droit dans son application et son interprétation.

L'efficacité de la soft law réside d'abord dans sa dimension internationale. Elle a ce rôle de guide reconnu à travers le monde, en partie grâce à l'Organisation Mondiale du Tourisme (OMT). L'OMT est une institution faisant partie de l'Organisations des Nations Unies (ONU) chargée de promouvoir le tourisme responsable, durable et accessible à tous, tout en veillant à la bonne croissance économique, au bon développement des populations locales et au respect de la durabilité environnementale98. Sous l'égide de l'ONU, l'OMT a ainsi développé un rôle politique non négligeable pour la défense des intérêts touristiques des États membres. A l'heure actuelle, 158 États sont membres de l'OMT. Toutefois, certains grands pays touristiques tels que les États-Unis ou le Royaume Uni n'en font pas partie tandis que d'autres, moins touristiques ou émergents, en sont membres comme certains pays du Golfe ou des pays du continent Africain99. Il existe également six États membres associés et des membres affiliés. L'OMT agit de différentes manières et met un point d'honneur au développement du tourisme durable, responsable ou encore éthique. L'objectif est « d'appuyer les politiques et les pratiques compatibles avec un tourisme durable, c'est-à-dire les politiques faisant un usage optimal des ressources environnementales, respectant le caractère socioculturel authentique des communautés d'accueil et assurant des retombées socioéconomiques pour tous »100. L'OMT est véritablement au service du développement du tourisme durable. En ce sens, les Nations Unies ont proclamé l'année 2017 comme « l'année internationale du tourisme

95 Jean Salmon, Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001

96 Jean Carbonnier, Flexible droit « Pour une sociologie du droit sans rigueur », LGDJ, 10e édition, 2011

97 Alain Pellet, Les raisons du développement du soft law en droit international : choix ou nécessité ?, LGDJ/Lextenso, 2018

98 Cf. < www.unwto.org >

99 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

100 Cf. < www.unwto.org >

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durable pour le développement ». Cette résolution adoptée le 22 décembre 2015101 constate « l'importance attachée au tourisme international, en particulier à la proclamation d'une année internationale du tourisme durable pour le développement, pour ce qui est de favoriser la compréhension entre tous les peuples, de faire mieux connaitre le riche héritage des différentes civilisations et de faire davantage apprécier les valeurs inhérentes aux différentes cultures, contribuant ainsi à renforcer la paix dans le monde »102.

Cette décision fait directement écho au célèbre Sommet de la Terre, une conférence organisée tous les dix ans par les Nations Unies dans le but de réfléchir à de nouvelles politiques de développement durable. Le Sommet de la Terre de Rio de 1992 est devenu une référence historique, en ce qu'il a permis la création de l'Agenda 21 rassemblant plus de 2 500 recommandations concrètes pour traverser le 21ème siècle dans une démarche écologique et responsable. Depuis, c'est une véritable lutte pour le développement durable et contre le réchauffement climatique qui a été mise en oeuvre. Vingt ans plus tard, lors de la Conférence Rio + 20 sur le développement durable en 2012, on reconnaît qu'un « tourisme bien conçu et bien organisé » peut contribuer au développement durable103.

De surcroît, l'OMT encourage l'application du Code mondial d'éthique du tourisme104 à la fois pour multiplier les bienfaits du tourisme sur l'environnement, la société et l'économie, et pour limiter au maximum ses effets négatifs. Adopté en 1999 par l'Assemblée générale de l'OMT, le Code mondial d'éthique du tourisme établit à travers dix articles un véritable cadre de référence en faveur du développement durable et responsable du tourisme dans notre société moderne. Avec ce texte, l'OMT a pris l'engagement de promouvoir le tourisme durable dans le monde et à destination de tous les acteurs : les autorités publiques, les institutions, les professionnels du tourisme, les associations, mais aussi les touristes105. Le dixième article est consacré à la mise en oeuvre des principes énoncés par le code. Il est prévu un contrôle de l'application effective des principes mais aussi et surtout un mécanisme de règlement d'éventuels litiges confiés à un organisme tiers, le Comité mondial d'éthique du tourisme106.

Malgré le contrôle de l'application effective prévu à l'article 10, le code fait face à de multiples critiques portant sur son caractère non contraignant qui au fond n'engage que très peu les signataires107. Au surplus, il est reproché à l'OMT et à ce code une certaine contradiction entre leurs objectifs. En effet, il peut sembler paradoxal de favoriser d'un côté le développement durable à travers le tourisme et d'un autre côté, de vouloir développer le tourisme pur et tout ce qu'il implique (infrastructures d'accueil, transports aériens etc.). Le développement du

101 Résolution 70/193 adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU le 22 décembre 2015

102 OMT, Les Nations Unies proclament 2017 Année internationale du tourisme durable pour le développement, décembre 2015

103 GEO, Agenda 21, un programme responsable et écologique pour le 21ème siècle, janvier 2017

104 OMT, Code Mondial d'Éthique du Tourisme, pour un tourisme responsable, 1999

105 Cf. < ethics.unwto.org >

106 Ibid. OMT, article 10, 1999

107 Nadège Chabloz, Vers une éthique du tourisme ?, Revue Autrepart, 2006

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tourisme en tant que tel est inévitablement facteur d'effets néfastes pour l'environnement, l'économie et la société. Cependant, la volonté de l'OMT à travers le Code mondial d'éthique du tourisme a au moins le mérite de véhiculer des idées en faveur d'un tourisme plus durable et ainsi de susciter une prise de conscience collective au bénéfice de la nature et de l'Homme108. En dépit des critiques, les actions mises en oeuvre par l'OMT au niveau national ont de l'influence sur tous les acteurs du tourisme, à commencer par les États. Ces derniers ont le choix de suivre ou non les principes établis par l'OMT, mais en tout état de cause, l'adhésion à cet organisme prouve bien qu'il y a une volonté certaine de s'orienter vers un tourisme plus durable et respectueux.

Dans une autre mesure, l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) agit aussi en faveur du tourisme durable au niveau international. L'organisation, dont la devise est « des politiques meilleures pour une vie meilleure », a été initialement fondée en 1948, au départ au sein de l'Europe, pour mettre en place le plan Marshall. L'OCDE constitue aujourd'hui un cadre international privilégié pour une meilleure harmonisation des politiques économiques des États membres. Elle contribue également au bon fonctionnement de l'économie mondiale, notamment en stimulant et en harmonisant les efforts de ses membres en faveur du bien-être économique et social mondial. Globalement, l'OCDE se tourne de plus en plus vers des stratégies de croissance verte, respectueuses de l'environnement et promeut l'innovation afin d'encourager de nouvelles sources de croissance109. A l'aide du comité du tourisme, l'un des premiers comités constitués en 1948, l'OCDE veut promouvoir, dans le secteur du tourisme, le passage à une consommation et à une production durable permettant de contribuer à la viabilité des destinations, d'associer les communautés locales et de leur bénéficier, de créer des emplois et de favoriser le développement110.

Toutefois, la politique menée par l'OCDE fait l'objet de controverses, en raison notamment d'une conception économique jugée trop libérale et de la promotion excessive du libre-échange et de la concurrence. En effet, il semble difficile d'encourager une gestion durable du tourisme d'une part et la libéralisation touristique d'autre part.

Par ailleurs, l'OCDE joue un rôle important grâce à des études et publications mais aussi au moyen d'actes juridiques. Néanmoins, bien que certains actes, tels que les accords internationaux ou les décisions, revêtent un caractère contraignant pour les États membres, la plupart des instruments juridiques de l'OCDE n'ont pas de portée obligatoire. A titre d'illustration, l'organisation compte à ce jour 172 recommandations, 25 décisions et 9 accords internationaux.

En tout état de cause et malgré les critiques, tout porte à croire que les États réalisent la nécessité de changer les habitudes de consommation touristique, faute de quoi le tourisme

108 Bernadette Ducret, L'éthique dans le tourisme. La nécessité d'un engagement politique des États, Cahiers Espaces, n° 67, p. 52, 2000

109 Cf. < www.ocde.org >

110 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

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pourrait un jour mener à sa propre perte. Rappelons à ce titre que « l'un des paradoxes du tourisme d'aujourd'hui est de tuer ce dont il vit, en véritable parasite mondophage »111.

Parallèlement à la dimension internationale, l'Union Européenne (UE), outre la construction de normes juridiques contraignantes, est également créatrice de soft law.

Au niveau européen comme au niveau national, le tourisme en tant que secteur économique à part entière a longtemps été mis à l'écart. Le Traité de Rome112 et le Traité de Maastricht113 ne s'intéressaient pas au tourisme et laissaient la compétence aux États membres. Ce n'est que le 13 décembre 2007 lors de la signature du Traité de Lisbonne114 que l'Union Européenne se voit reconnaître des prérogatives concernant le tourisme. En effet, l'article 195 du traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) octroie à l'Union une compétence d'appui et d'accompagnement des États membres dans leurs politiques touristiques, en accord avec le principe de subsidiarité :

« 1. L'Union complète l'action des États membres dans le secteur du tourisme, notamment en promouvant la compétitivité des entreprises de l'Union dans ce secteur.

À cette fin, l'action de l'Union vise :

a) à encourager la création d'un environnement favorable au développement des entreprises dans ce secteur ;

b) à favoriser la coopération entre États membres, notamment par l'échange des bonnes pratiques.

2. Le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, établissent les mesures particulières destinées à compléter les actions menées dans les États membres afin de réaliser les objectifs visés au présent article, à l'exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres. »115

C'est le seul article relatif au tourisme dans le TFUE. On voit bien que le rôle législatif de l'Union Européenne au niveau touristique est léger et qu'il est laissé au bénéfice des États membres qui décident eux-mêmes de la politique qu'ils souhaitent mener. Conséquemment, l'Union a développé son influence en matière soft law. Depuis plusieurs années, l'Union Européenne oeuvre en faveur du tourisme durable à l'aide de mesures non contraignantes mais qui conscientisent progressivement les États membres et leurs ressortissants. Le réchauffement climatique fait ainsi partie des thématiques politiques de l'Union, en raison notamment du nombre toujours plus croissant de touristes sur son territoire et donc de vols aériens au sein

111 Rodolphe Christin, Manuel de l'anti-tourisme, 2018

112 Traité de Rome, instituant la Communauté économique européenne, du 25 mars 1957

113 Traité de Maastricht sur l'Union européenne, du 7 février 1992

114 Traité de Lisbonne, modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, du 13 décembre 2007

115 Titre XXII « tourisme », article 195 du Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne

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de l'espace européen. En effet, les déplacements touristiques participent activement aux émissions de gaz à effet de serre, faisant ainsi l'objet d'une problématique de taille.

En accord avec les principes du tourisme durable, la Commission a adopté le 19 octobre 2007, une communication appelée « un agenda pour le tourisme européen durable et compétitif » soulignant la nécessité de promouvoir le tourisme durable, puis le 30 juin 2010, une communication concernant un nouveau cadre politique pour le tourisme européen, préconisant également un tourisme durable, responsable et de qualité116.

Outre ces initiatives, l'Union Européenne oriente les politiques nationales vers un tourisme plus durable grâce à d'autres outils. C'est le cas par exemple de la Charte européenne du tourisme durable dans les espaces protégés (CETD)117. Née en 1995 sous l'impulsion de la Fédération Europarc118, suite au Sommet de Rio en 1992, elle vise à encourager les bonnes pratiques pour la protection des espaces et la gestion durable du tourisme. La CEDT a été élaborée au moyen d'une expérimentation conduite par une dizaine de parcs pilotes en Europe et rédigée avec l'aide du comité de pilotage européen représentants des organismes touristiques et oeuvrant pour l'environnement. Cette charte reprend à son compte, les principes du développement durable appliqués au tourisme dans les espaces protégés et déclinés dans les trois domaines environnemental, socio-culturel et économique, avec comme stratégie globale, l'implication de tous les acteurs du tourisme dans le cadre de multi partenariats119.

Dans le même sens que la CEDT, l'Écolabel Européen, initié dès 1992 par la Commission Européenne120, est reconnu dans tous les pays de l'UE et attribué pour une période de 5 ans. Les critères, à destination des hébergements touristiques, portent principalement sur les impacts en eau, énergies, déchets, substances chimiques et sur des critères de management environnemental. En France, près de 115 établissements sont certifiés par l'Écolabel Européen. A titre de comparaison, les Pays Bas comptent 5 établissements certifiés, l'Autriche en compte 48, l'Italie en compte 172 etc.121

Enfin, les principes du tourisme durable sont pris en compte au sein de l'organisation du concours EDEN122. Par le biais d'une charte, le concours contribue à une meilleure prise en compte de ces critères malgré une absence de force obligatoire. L'acronyme EDEN désigne les destinations européennes d'excellence ayant manifesté la volonté de s'ouvrir à un développement plus durable du tourisme123. Il s'agit d'un projet mis en place dans le cadre de

116 CESE, Tourisme et développement durable, 2014, p. 238

117 Cf. < www.e-unwto.org/doi/pdf/10.18111/unwtodeclarations.1995.21.14.1 >

118 Cf. < www.europarc.org/network/ >

119 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

120 Règlement (CEE) N°880/92 du 23 mars 1992, remplacé par le Règlement (CE) N°66/2010 du 25 nov. 2009

121 Cf. < www.ec.europa.eu/ecat/hotels-campsites/en >

122 European Destinations of Excellence (destinations européennes d'excellence)

123 Cf. < www.atout-france.fr/content/le-reseau-eden >

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l'Union Européenne, par lequel des concours nationaux sont organisés chaque année et débouchent sur la sélection d'une destination d'excellence touristique dans chaque pays participant, encourageant ainsi le développement du tourisme durable.

Les objectifs sont les suivants :

- Améliorer la visibilité des destinations touristiques d'excellence européennes émergentes, et notamment les moins connues ;

- Faire connaître la diversité et la qualité du tourisme en Europe ;

- Promouvoir tous les pays et toutes les régions d'Europe notamment celles ayant une action forte pour promouvoir le tourisme durable ;

- Lutter contre le phénomène des hautes et basses saisons, rééquilibrer le flux des touristes et l'orienter vers de nouvelles destinations ;

- Récompenser le tourisme durable ;

- Créer une plate-forme pour l'échange des bonnes pratiques au niveau européen ; - Encourager la mise en réseau des destinations récompensées124.

En 2018, le réseau EDEN compte près de 160 destinations lauréates et plus de 450 destinations primées dans toute l'Europe. En France, 7 destinations lauréates ont été désignées et 23 autres destinations ont été récompensées, selon Atout France, permettant, au moyen d'outils non contraignants et conscientisants, d'impulser le tourisme durable en France.

Tandis que les entités internationales et communautaires s'accordent à développer des normes juridiques souvent non contraignantes ou des dispositifs spécifiques tels que des codes ou chartes, des acteurs privés apportent leur concours à la diffusion des valeurs du tourisme durable.

B. Les acteurs privés, créateurs de droit mou

Nombre d'acteurs privés, dans le cadre associatif, partenarial ou à titre individuel, mettent en oeuvre des actions positives en faveur du développement durable dans leur fonctionnement et leur organisation. Ces initiatives visent à moraliser et conscientiser le comportement des voyagistes, des touristes, mais aussi des gouvernements. Parmi ces acteurs, on peut mentionner les associations ou organisations non gouvernementales (ONG), des réseaux et des collectifs ou encore des entreprises du secteur touristique. C'est en partie au moyen d'actions menées par cette variété d'acteurs, que la soft law du tourisme durable s'enrichie davantage au fil des années. A tel point, qu'il est parfois difficile de s'y retrouver en matière de labels, chartes, certifications etc.

124 Laurence Jegouzo, Le droit du tourisme, 2018

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Une des premières associations à avoir oeuvré pour le développement du tourisme durable, est l'association Agir pour un Tourisme Responsable (ATR), en 2004125. Au moment de sa création, ATR réunissait les principaux voyagistes du tourisme d'aventures, qui avaient pour but d'améliorer l'impact de leur activité sur la nature et les populations. Progressivement, le réseau s'est élargi à d'autres opérateurs spécialistes et même généralistes tels que TUI ou Club Med. A ce jour, l'association regroupe une trentaine de membres dont une dizaine ayant obtenu le label ATR. En effet, l'association a mis en place un label, se définissant autour de trois grands axes : transparence, partenariat et cohérence. A travers ce système de labélisation, ATR a pu développer une méthode d'évaluation de l'engagement des voyagistes souhaitant non seulement agir pour un tourisme responsable mais aussi faire la démonstration de leur engagement. Notons que depuis 2016, le label est certifié par ECOCERT Environnement. L'association ATR diffuse également les principes du tourisme durable à travers la Charte éthique du voyageur126. Cette dernière édicte des conseils à destination des voyageurs, avant, pendant et après le voyage, dans le but de promouvoir le respect de la nature, des hommes et de leur culture et dont la devise est : « Seule l'empreinte de nos pas doit rester derrière nous, laissons le meilleur des souvenirs à nos hôtes ».

A côté d'ATR, on retrouve l'Association pour le Tourisme Équitable et Solidaire (ATES) qui consiste en un réseau de spécialistes du tourisme équitable et solidaire. Créée en 2006, l'association regroupe des voyagistes, des opérateurs du tourisme ainsi que des membres associés, tous engagés pour faire du voyage un levier de développement et de solidarité internationale127. Comme ATR, l'ATES compte une trentaine de membres, possède un label et a mis en place une Charte du Tourisme Équitable et Solidaire. L'association, reconnue au niveau national et international, repose sur trois grands piliers : le commerce équitable, la solidarité internationale et l'utilité socio-économique. En France, sa mission est surtout de sensibiliser le public, puisque les français voyagent de plus en plus vers des pays en voie de développement ou du tiers monde et qu'il importe désormais de réduire l'impact que l'on a sur la nature, les peuples et leur culture. Le label ATES « Garantie Tourisme Équitable et Solidaire » permet une évaluation des pratiques des opérateurs et de leurs partenaires à travers plus de 50 critères. L'objectif de ce label est de démontrer aux clients que les voyages proposés par les opérateurs membres sont en adéquation avec les engagements pris dans le cadre de la charte d'ATES.

Enfin, on peut mentionner l'association Acteurs du Tourisme Durable (ATD), créée en 2011 par un collectif de journalistes français engagés afin d'accompagner et de soutenir les professionnels du tourisme engagés dans une démarche de développement durable128. L'association a notamment pour missions de :

125 Cf. < www.tourisme-responsable.org >

126 ATR, Charte Éthique du Voyageur, depuis 1996

127 Cf. < www.tourismesolidaire.org >

128 Cf. < www.tourisme-durable.org >

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- Fédérer l'ensemble des professionnels du tourisme et ainsi de favoriser les synergies dans le sens du progrès durable ;

- Promouvoir les valeurs du tourisme durable et récompenser les acteurs engagés ;

- Informer les professionnels sur les bonnes pratiques et les enjeux du tourisme durable.

ATD regroupe un grand nombre de membres dont les réseaux ATR et ATES, mais aussi des voyagistes tels que Club Med, des offices de tourisme, des comités régionaux de tourisme etc. Cette association ne délivre pas de certification ni de label, il s'agit d'une démarche de progrès continue entre professionnels. Divers évènements sont également organisés afin de promouvoir le développement durable du tourisme, tels que les Universités du tourisme durable ou encore les Palmes du tourisme durable (créées en partenariat avec le magazine TourMag). A ce titre, depuis 2017, les Palmes du tourisme durable récompensent les acteurs du tourisme engagés dans une démarche de tourisme durable. Le concours est ainsi ouvert aux acteurs des catégories suivantes : mobilité ; voyagistes ; hébergements ; loisirs ; territoires et destinations. Les candidatures sont reçues entre mai et octobre. Parmi celles-ci, un jury est chargé d'effectuer une première sélection. Enfin, le public désigne un lauréat dans chaque catégorie.

A titre d'illustration, le gîte touristique breton « La Belle Verte » a reçu la palme dans la catégorie hébergement, lors de la première édition129 : le gîte propose deux écolodges semi enterrés dotés d'un toit végétal et parfaitement autonomes d'un point de vue énergétique. Dans une démarche « zéro impact », le site produit de l'électricité et de l'eau chaude grâce à l'énergie solaire et est équipé d'un système de phyto-épuration pour l'assainissement écologique des eaux usées. Dans la catégorie territoire et destination, la palme a été attribuée au réseau Grands Sites de France, pour son projet innovant « Escapade nature sans voiture », mettant à l'honneur des modes de déplacements écologiques, en faveur d'un tourisme plus durable, pour découvrir d'une autre manière les paysages et le patrimoine français130. Cette initiative permet de promouvoir les bonnes pratiques du tourisme durable auprès de tous les professionnels du secteur touristique et de faire du tourisme durable une aspiration commune.

Outre les réseaux associatifs, il existe d'autres labels permettant de faire valoir les principes du tourisme durable, en France mais aussi à travers le monde. Ces labels, toujours d'initiative privée, sont très nombreux. Parmi ceux-ci, on peut citer par exemple le label international Clef Verte mis en place par la Fondation pour l'Éducation à l'Environnement, et qui accompagne les hébergeurs et les restaurateurs depuis près de 20 ans, sur les critères de gestion environnementale131. Ces critères portent sur la gestion de l'eau et de l'énergie, le traitement des déchets, les achats responsables, la sensibilisation du personnel et des clients etc. Depuis

129 TourMag, Palmes du Tourisme Durable : découvrez les 6 lauréats 2017, 12 décembre 2017

130 Cf. < www.ecolodge-labelleverte.fr/demarche-ecologique/ >

131 Cf. < www.laclefverte.org/le-label/présentation/ >

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2017, la liste de critères a été élargie aux questions de parité et d'emploi, mais aussi du gaspillage alimentaire, de la réduction de produits carnés, du bio, le but étant d'orienter progressivement les professionnels vers de nouveaux enjeux.

Pavillon bleu est également un label d'initiative privée et comme Clef Verte, il est reconnu au niveau international. Créé en 1985, le Pavillon Bleu valorise les communes mais aussi les ports de plaisance menant une politique touristique durable. Les ports de plaisance labellisés oeuvrent pour la protection de l'environnement et du milieu marin, aussi les plaisanciers ont accès à des aires de récupération des eaux usées des bateaux et des zones de récupération des déchets spéciaux. Quant aux communes labélisées, le but est de limiter les impacts de la fréquentation touristique par l'installation d'équipements spécifiques en bord de mer, mais aussi l'organisation d'activités de sensibilisation à l'environnement à destination de tous132. C'est l'exemple du port de La Rochelle, en Charente Maritime, qui a mis en place « l'opération pontons »133 par laquelle des associations livrent des informations et des conseils pour une conduite écoresponsable dans les ports de plaisance (sensibilisation au tri des déchets, au traitement des eaux usées etc.).

Aux côtés de ces labels, toujours plus nombreux, de grandes sociétés touristiques internationales se lancent dans le tourisme durable. Pour se distinguer, elles n'hésitent pas à créer leurs propres labels. Si les gestes et actions sont louables, il s'agit bien trop souvent d'opérations marketing mises en place dans le but de séduire les clients, qui sont de plus en plus sensibles à cette cause. L'offre s'adapte en effet à la demande. C'est pourquoi il est important de se renseigner sur les enseignes et les valeurs qu'elles portent avant l'achat.

Le leader européen de l'hôtellerie AccorHotels ou encore la plateforme de réservation Airbnb, dont la régulation fait actuellement couler beaucoup d'encre, sont deux exemples de sociétés privées oeuvrant pour le tourisme durable.

AccorHotels est une entreprise touristique pionnière en matière de développement durable et son engagement s'est concrétisé en 2012 lors du lancement du projet « Planet 21 ». Articulé autour de 21 objectifs, ce programme est dédié à la mise en place d'actions effectives pour une prise de conscience à tous les niveaux. Depuis 2016, un nouveau chapitre de Planet 21 s'est ouvert concernant les enjeux pour 2020.

132 Cf. < www.pavillonbleu.org/l-of-feee/le-pavillon-bleu.html >

133 Cf. < www.pavillonbleu.org >

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Le programme Planet 21 s'articule autour de six piliers dont l'hôtel est le coeur :

Source : AccorHotels, 2016-2020.134

En ce sens, AccorHotels a mis en place une Charte éthique depuis 2015 dans laquelle l'hôtelier s'engage notamment à maîtriser les consommations d'énergie de ses hôtels et réduire les émissions de CO2, privilégier les énergies renouvelables pour les nouvelles constructions ou rénovations afin de limiter l'empreinte sur l'environnement, préserver les ressources en eau et maîtriser l'impact des rejets d'eau usée, réduire la quantité de matières premières utilisées en limitant les emballages et en privilégiant les matériaux recyclés ou recyclables, sensibiliser et informer les clients par le déploiement d'une signalétique dans les hôtels etc135. Enfin, grâce à toutes ces mesures, AccorHotels travaille en collaboration avec des structures locales sur des projets d'agroforesterie, dans le cadre de « Plant for the Planet ». Le leader de l'hôtellerie est très engagé sur la voie du tourisme durable et n'hésite pas à étendre son influence sur tous les fronts, aussi bien à l'égard de l'environnement, que des êtres humains, pour un impact positif et durable.

Parallèlement aux actions menées par le groupe AccorHotels, la plateforme Airbnb s'est également emparé de la question du tourisme durable et tente ainsi de faire taire les critiques à son encontre. Il est de bon augure pour la plateforme de démontrer qu'elle peut devenir un véritable acteur pour la défense des communautés et de l'environnement. En effet, le 17 avril 2018, Airbnb a lancé un service dédié au tourisme responsable (« Office of Healthy Tourism »), pour un tourisme plus sain face aux effets néfastes toujours plus importants du tourisme de masse136. Selon la plateforme, on trouve une quantité de logements hors des zones

134 Cf. < www.press.accorhotels.group/planet21-dossier-de-presse/les-engagements-a-2020/ >

135 AccorHotels, Charte Éthique et Responsabilité Sociétale d'Entreprise, novembre 2015

136 Airbnb, Airbnb launches OHT, 17 avril 2018

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touristiques permettant ainsi un désengorgement des centres-villes. D'ailleurs, qu'il s'agisse d'un logement en centre-ville ou non, les hôtes n'hésitent pas à recommander des lieux d'intérêt situés dans le même quartier, facilitant ainsi la promotion des commerces de proximité. Airbnb signale également que 88 % des hôtes intègrent des pratiques écologiques dans leur activité et que 66 % des voyageurs affirment que les avantages écologiques du partage de logement ont joué un rôle important pour eux137.

A ce propos, une étude publiée en mars 2017 par la société établissait des comparaisons entre le logement chez l'habitant et en hôtellerie. L'étude révèle qu'en Europe, le recours à Airbnb plutôt aurait permis d'éviter l'équivalent des émissions de 1,6 million de voitures, tout en économisant l'énergie de 566 000 logements et l'eau de 9 000 piscines olympiques138.

Source : Airbnb, mars 2017

Toutefois, selon Guillaume Cromer139, « d'un point de vue marketing, cette étude est très rusée. Elle consiste à tirer parti d'un état de fait ». A l'évidence, la plateforme se contente principalement d'attirer les voyageurs déjà convertis à ce type de tourisme et sensibles à la cause écologique. Contrairement à des hôteliers comme AccorHotels, Airbnb ne sensibilise pas franchement140. Par sa politique en matière de tourisme durable, AccorHotels est en mesure d'engager un processus de sensibilisation auprès de divers acteurs tels que ses collaborateurs, partenaires ou fournisseurs, la clientèle mais aussi les communautés locales. La comparaison n'est pas vraiment convaincante, mais il importe de souligner tout de même qu'en pratique, l'environnement est impacté à une échelle plus réduite par ce type de location.

Pourtant, en dépit de ce point, les valeurs du tourisme durable n'en sont pas moins affectées. Si l'on prend l'exemple de villes européennes telles que Barcelone où le tourisme de masse est toujours un véritable fléau, c'est en partie du fait d'Airbnb que les touristes continuent

137 Cf. < www.airbnbcitizen.com/data/#/ >

138 Airbnb, rapport du 10 mars 2017

139 Guillaume Cromer, Président d'Acteurs du Tourisme Durable (ATD), depuis 2014 et gérant du cabinet ID-Tourism, depuis 2012.

140 Amélie Mougey, Airbnb se rêve en écotouriste, article pour Terra Eco n°62, novembre 2014

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d'affluer. En effet, souvent moins onéreux que les hôtels et de plus en plus attractifs, le grand nombre de logements proposés à la location participe au dépeuplement des centres-villes au profit des touristes et de ce fait, influe sur l'envolée des prix des loyers et des coûts de la vie en général. Comme nous l'avons étudié précédemment, ces conséquences sont dramatiques pour les habitants, qui désormais, n'hésitent plus à faire entendre leur mécontentement à l'aide d'actions parfois radicales.

Face aux avancées générées à grande échelle au moyen de la soft law internationale et communautaire, mais aussi à l'aide d'acteurs privés associatifs ou professionnels, de multiples limites freinent le bon développement du tourisme durable.

Section 2. Les freins et les limites au développement du tourisme durable

Le développement du tourisme durable fait en effet face à de nombreux obstacles. Si aujourd'hui ce type de tourisme s'amplifie c'est parce que l'on fait face à une époque charnière, où le tourisme doit être pensé de manière pérenne pour la sauvegarde de l'environnement, des populations et de la société elle-même. Il y a désormais une sérieuse nécessité de changer les habitudes de consommation touristique, faute de quoi le tourisme pourrait un jour mener à sa propre perte. Comme nous l'avons exposé précédemment, un tourisme trop intense participe au phénomène de réchauffement climatique, engendre pollution et destruction de la faune et la flore, entraine une altération des sites historiques et culturels, provoque des inégalités sociales et une précarisation de l'emploi etc. En conséquence, les acteurs publics, privés, nationaux ou internationaux se sont tourner vers de nouvelles stratégies, de nouvelles mesures et dispositifs, afin de trouver un équilibre entre valorisation et préservation des territoires et des personnes.

Toutes ces mesures permettent d'éveiller les consciences sur la nécessité d'un tourisme plus durable et plus largement, d'un mode de vie plus sain ; même si certaines décisions critiquables démontrent parfois une régression dans des secteurs autres que celui du tourisme... Ces préoccupations liées au développement du tourisme durable varient au gré de la couverture médiatique et de l'actualité, notamment via les réseaux sociaux qui sont de bons vecteurs de communication, et on voit qu'aujourd'hui les questions d'ordre écologique sont relayées un peu partout autour du globe : les individus semblent de plus en plus sensibles à ces causes et veulent impacter le moins possible la planète et ses habitants.

Toutefois, le tourisme durable demeure marginal. C'est une notion floue et il n'est pas encore très pratiqué par les touristes français (A). En effet, beaucoup sont en faveur d'un tourisme plus respectueux mais peu passent à l'action du fait de nombreux préjugés (B). En outre, son développement est entravé par ce qu'on appelle le « greenwashing » (C).

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A. Un mode de tourisme marginal et méconnu

Si le tourisme en tant que tel peut être facilement défini puisque bien connu des sociétés occidentales où il se pratique aisément, le tourisme durable peine encore à se clarifier et par conséquent, à se démarquer parmi le grand nombre d'offres proposées sur le marché. La méconnaissance du tourisme durable voire l'ignorance de son existence représente un véritable frein à la consommation touristique.

Le principe même de tourisme durable fait l'objet de nombreuses définitions, le rendant approximatif aux yeux des individus. En effet, autour de cette notion, on retrouve une multitude d'autres termes tels que le tourisme responsable, le tourisme social, le tourisme solidaire, le tourisme équitable, l'éco-tourisme etc. Bien que ces types de tourismes visent tous la même finalité, à savoir la remise en question de la pratique touristique actuelle et un plus grand respect pour la nature et les êtres vivants, il est difficile d'y voir clair dans ce vaste paysage lorsqu'on est un touriste lambda. Selon une étude Atout France réalisée en 2009, seul 28 % des Français seulement connaissent l'expression « tourisme durable »141 tandis que les termes « tourisme responsable », plus utilisés par les voyagistes, sont mieux introduits dans l'esprit du public. En 2009, 69 % des touristes français déclaraient connaître cette expression142. En 2012, ils étaient 84% à avoir entendu parler d'au moins un des termes attachés au concept du tourisme durable tels que l'éco-tourisme, le tourisme équitable, le tourisme solidaire etc.)143. Cependant, les deux enquêtes citées révèlent que les touristes ne voient pas très bien ce que recouvrent ces termes. Ces nombreux termes utilisés entrainent des difficultés de compréhension quant aux nuances entres les notions, qui bien que très liées, ne sont pas hermétiques les unes par rapport aux autres.

Source : Acteurs du Tourisme Durable (ATD) 144

141 Atout France - Altéa, Demande des clientèles en tourisme durable : enquête qualitative, 2009

142 TNS Sofres - Voyages-sncf.com, Les Français et le tourisme responsable, 2007 - 2010

143 Harris Interactive pour Voyages-sncf.com et Routard.com, sondage dans le cadre des Trophées du Tourisme Responsable, 2012 (enquête réalisée en ligne du 6 au 10 septembre 2012 sur un échantillon de 1959 individus)

144 Bernard Schéou, La pyramide des tourismes, Du tourisme durable au tourisme équitable, quelle éthique pour le tourisme de demain ?, 2009

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Cette pyramide, dont la base repose sur le tourisme durable montre la pluralité des termes existants, afférents tous au tourisme alternatif. Si chacun est relatif à des principes bien précis comme nous avons pu le remarquer en introduction, les définitions sont souvent différentes d'un organisme à un autre, il est donc complexe pour les touristes d'y voir clair. Ces derniers associent encore massivement le tourisme durable à l'environnement et à l'écologie uniquement, pensant que ce type de vacances se pratique surtout dans des parcs naturels ou des régions préservées. Si cela n'est pas totalement erroné, le tourisme durable se pratique en réalité à tous les niveaux et à tout moment, et cela même durant un séjour basique : il est en effet possible de réduire son empreinte par de petits gestes où que l'on soit dans le monde. Beaucoup de touristes pensent encore que le tourisme durable est une contrainte incompatible avec les vacances.

Par ailleurs, si la plupart des touristes français sont capables de définir globalement le tourisme responsable, une bonne partie confond ce type de tourisme avec les voyages humanitaires ou le bénévolat à l'étranger145. Le tourisme humanitaire et le tourisme durable ne sont pas deux notions antinomiques en ce que les valeurs défendues sont similaires, mais en pratique, ces deux types de tourismes comportent des différences.

L'expression « tourisme humanitaire » est majoritairement comprise par les touristes comme du « volontourisme », du bénévolat à l'étranger. Le terme « humanitaire » renvoi en réalité à une aide d'urgence, comme par exemple, le fait d'envoyer des médecins pour dispenser des soins après une épidémie, d'apporter des vivres aux survivants d'une catastrophe naturelle etc. Dans ces cas-là, les individus ne sont pas des touristes mais des personnes qualifiées pour intervenir telles que des médecins, infirmiers etc.

Le volontourisme en revanche, propose aux participants sur la base du volontariat, d'aider les populations et les communautés en difficulté à s'orienter vers un meilleur développement local, tout en voyageant et découvrant de nouvelles cultures146. De plus en plus d'organismes se lancent dans la commercialisation de ce type de séjours, proposant des façons différentes de voyager, tout en aidant les communautés. Toutefois, le volontourisme est très critiqué : beaucoup d'organismes font du profit sur le dos des pays les plus pauvres mais aussi des bénévoles qui allouent bien souvent des sommes conséquentes. Ainsi, si en théorie les séjours humanitaires à l'étranger semblent partager les valeurs du tourisme durable, en pratique ce n'est pas toujours la même chose.

Cette confusion entre le tourisme durable et le tourisme humanitaire est très fréquente dans l'esprit des individus, représentant un obstacle à son développement. Pourtant, la compréhension progresse et les touristes sont en demande d'informations sur ce sujet. Selon l'étude Atout France, 90 % des personnes interrogées souhaitent être mieux informées par le biais de reportages, de guides touristiques etc.147

145 Atout France, Tourisme et développement durable, 2011, p. 33

146 Cf. < www.aidehumanitaire.org/tourisme-humanitaire/ >

147 Op. cit. Étude TNS Sofres - Voyages-sncf.com

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L'information passe également par les labels, marques, certifications etc. Or, la pluralité de labels existant n'oriente pas toujours les touristes vers une bonne compréhension de l'offre. En règle générale, les labels du tourisme durable ont une notoriété assez faible, hormis les labels nationaux officiels tels que les Parcs Nationaux de France, qui bénéficient d'une reconnaissance plutôt forte de la part des touristes. Ayant un impact prioritaire dans la réassurance des voyageurs, les labels sont pourtant très importants parce qu'ils permettent de rendre la démarche durable plus crédible. La pluralité et la faible notoriété des labels augmentent les risques de confusion pour les touristes et participent ainsi à freiner l'essor du tourisme durable148.

De surcroit, l'insuffisance d'une offre repérable et accessible joue aussi un rôle dans la limite au développement du tourisme durable. En effet, il existe plusieurs voyagistes spécialisés dans le tourisme durable mais ces derniers ne sont pas nécessairement connus du grand public. En parallèle, des opérateurs de tourisme généralistes commercialisent des séjours responsables mais l'offre n'a pas toujours été mise en avant. Toutefois, depuis quelques années, le tourisme durable sort peu à peu de l'ombre et devient une nécessité, comme évoqué ci-avant. On voit ainsi émerger de plus en plus d'offres de ce type, accompagnées de stratégies marketing élaborées pour les mettre en lumière. Si le tourisme durable n'est pas encore une notion bien connue, confondue avec d'autres types de tourismes, et qu'il peine à se démarquer c'est en partie la faute des voyagistes eux-mêmes. Les touristes ne savent pas toujours où et quoi chercher. Pour le tourisme durable, 31 % des voyageurs seulement estiment l'offre accessible et facile à trouver, selon Atout France149. Les voyagistes font désormais beaucoup de publicité et mettent en avant leur engagement pour cette forme de tourisme, mais longtemps le tourisme durable est resté sur le banc de touche, ce qui n'a pas aidé à sa reconnaissance et son développement. On peut ainsi penser que c'est un moyen pour les grandes enseignes d'accroitre leur chiffre d'affaires, parce que le tourisme durable est maintenant très en vogue auprès des touristes.

B. Le tourisme durable : beaucoup de croyants mais peu de pratiquants

Le développement du tourisme durable est également paralysé par l'attitude même des touristes. Si les gestes se multiplient dans une optique plus durable et responsable, il y a indéniablement un décalage entre la volonté d'agir et l'action en elle-même, faisant ainsi ressortir un certain manque d'intérêt de la part des touristes pour le tourisme durable. En effet, en 2012 seul un Français sur cinq déclare avoir déjà fait au moins un voyage responsable ce qui est une très faible proportion150. En 2009, selon l'étude Atout France, 4% des interrogés avaient déjà pratiqué le tourisme durable151.

148 Atout France, Tourisme et développement durable, 2011, p. 41

149 Id. p. 40

150 Op. cit. Harris Interactive pour Voyages-sncf.com et Routard.com

151 Op. cit. Atout France - Altéa

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Pourtant, dans les études citées par Atout France, une majorité de personnes interrogées est prête à privilégier un tourisme plus durable :

- 68 % des Français sont prêts à privilégier une destination en faveur de l'écologie ;

- 86 % sont prêts à adopter un comportement éco-consommateur sur le lieu de séjour ; - 68 % sont prêts à opter pour un mode de transport moins polluant ;

- 56 % sont prêts à privilégier un hébergement disposant d'un écolabel152.

En 2018, selon une étude Booking.com, 68 % des voyageurs internationaux comptent séjourner dans un hébergement écoresponsable, révélant une hausse de l'intérêt pour les hébergements respectueux de l'environnement et plus généralement pour le tourisme durable au niveau international153.

On est amené à se poser la question de savoir pourquoi existe-t-il un tel engouement, mais si peu de résultat ? Le tourisme durable est maintenant très en vogue auprès des touristes à l'image d'un mode de vie plus sain d'une manière plus générale au regard de la conjoncture économique et politique des dernières années. En effet, les questions d'ordre écologique, relatives au respect de l'environnement, de la nature mais aussi aux conséquences du réchauffement climatique sont au coeur des préoccupations de nombreux français : « la prise de conscience s'accroît, les connaissances progressent et les inquiétudes se renforcent »154. Cette prise de conscience des problèmes environnementaux causés par l'activité humaine, dont le tourisme, s'accompagne d'une remise en question des modes de vie. En effet, on observe depuis plusieurs années que certaines pratiques de consommation plus écologiques se développent telles que le « bio », le commerce équitable et solidaire, le recours aux producteurs locaux, les gestes écocitoyens etc. C'est pourquoi aujourd'hui dans la même lignée, le tourisme durable prend de l'ampleur. Les touristes se sentent de plus en plus concernés par les enjeux environnementaux et sont prêts à voyager plus responsable.

Toutefois, les études ont montré que si beaucoup se disent prêts à faire du tourisme durable et trouve la démarche attractive, en pratique peu de touristes passent à l'acte. Ce fossé entre la volonté et la pratique s'explique notamment par ce que nous avons expliqué plus haut concernant une méconnaissance du tourisme durable et un accès difficile à l'information, mais se justifie également par une image parfois négative de ce type de tourisme.

Si l'intérêt pour le tourisme responsable semble réel, il demeure néanmoins des préjugés empêchant la pratique de ce type de voyages et ralentissant son développement. Selon Atout France, le critère de durabilité peut être vu comme une contrainte et se place ainsi derrière d'autres éléments juges plus importants par les touristes comme le prix, la qualité, le confort etc. Le fait d'être en vacances accroît le sentiment de contrainte dans le fait de consommer durablement et beaucoup de touristes ne semblent pas vouloir pas se préoccuper de l'impact

152 Eurobaromètre - Commission européenne, Attitudes des citoyens européens vis- à-vis de l'environnement, 2008

153 Enquête réalisée à la demande de Booking.com, de février à mars 2018 sur 12 134 individus

154 ADEME, La lettre stratégie n°55, février 2018, p. 1 et 2

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qu'ils ont sur l'environnement pendant ce laps de temps155. Pour beaucoup, ces gestes ne seraient pas d'une grande utilité et ils n'y voient pas d'intérêt. En effet, si l'on compare avec les autres industries polluantes, le tourisme peut sembler beaucoup moins néfaste en termes de nuisances sur la nature, les populations, l'économie. Il est difficile pour un touriste de mesurer l'importance de son impact lorsqu'il voyage. Pourtant, l'incidence du tourisme et en particulier de masse, tel qu'il est pratiqué en majorité aujourd'hui, est très négative à tous les niveaux, comme nous l'avons illustré en première partie. Les individus sondés dans l'étude Atout France considèrent que leur impact est minime et par exemple, dans le cas où ils choisiraient de voyager de manière durable, les avions décolleraient et pollueraient malgré tout. Ainsi, qu'ils consomment mieux ou non, cela n'aurait pas d'impact156.

Ce manque d'intérêt de la part des touristes est également accentué par d'autres facteurs, notamment l'image d'un tourisme très coûteux. Le prix demeure un élément très important dans l'acte de consommation. Les touristes imaginent en effet qu'un séjour ou une prestation touristique dans le cadre du tourisme durable est inévitablement plus onéreux qu'un séjour ou une prestation touristique classique selon Atout France. La première raison évoquée est le coût réel de production du séjour qui est perçu comme plus élevé que pour un séjour classique et la seconde est le risque d'abus sur le prix de vente de la part des voyagistes157.

Le tourisme durable et plus généralement le développement durable est facilement assimilé à la rareté et la préciosité des matériaux et des produits utilisés dans l'esprit des individus. Ce sont des préjugés très récurrents. A titre d'illustration, 71% des Français estiment que l'offre actuelle de tourisme responsable est chère, et 53% estiment que cela revient plus cher de voyager responsable158. Par exemple, il n'est pas rare de penser que des panneaux solaires sont plus onéreux qu'une chaudière ou qu'un ballon d'eau chaude. De même, les excursions prévues lors d'un voyage durable dans des endroits reculés ou au contact des populations locales sont perçues comme plus atypiques ou authentiques et conséquemment plus coûteuses que les excursions d'un voyage classique. Les touristes pensent également que le tourisme durable se pratique dans des pays lointains. Partant, ils sont persuadés que le coût du voyage sera beaucoup plus cher que pour un séjour dans un pays plus proche.

Or, les touristes oublient bien souvent qu'une politique respectueuse de l'environnement s'inscrit sur le long terme. La temporalité est donc un élément important à prendre en compte. S'il peut être entendu que le tourisme durable coûte plus cher que le tourisme classique, il est nécessaire de le penser sur le long terme. Ainsi après retour sur investissement des sommes initialement dépensées pour une démarche plus durable, par un hôtelier par exemple, il sera plus facile de faire des économies : une approche durable vise le recyclage, l'usage de produits moins polluants, une consommation plus basse en énergie ou en eau, une plus large réduction

155 Atout France, Tourisme et développement durable, 2011, p. 39

156 Id. p. 40

157 Id. p. 44

158 Op. cit. Harris Interactive pour Voyages-sncf.com et Routard.com

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des déchets etc. Sur le long terme, les économies réalisées permettent aux professionnels d'absorber les investissements. Ces actions mènent ainsi nécessairement vers une réduction des coûts et une optimisation des ressources permettant ainsi d'améliorer la qualité du service et même la possibilité de réinvestir pour une démarche encore plus durable et respectueuse de l'environnement.

Par ailleurs, si les touristes démontrent un réel engouement pour le tourisme durable mais ne passent pas toujours à l'action, il convient de relever qu'il existe également un clivage géographique en termes d'achats responsables. Les Français ne consomment pas de la même manière que les Allemands, les Britanniques ou encore les Scandinaves. C'est ce qu'affirme Atout France : comme pour la consommation générale, les voyageurs allemands et britanniques ont des modes de consommation prenant davantage en compte le tourisme durable. Dans l'étude d'Atout France GMV Conseil, 17 % des Allemands et des Britanniques venant en France déclaraient avoir déjà acheté des prestations ou services relevant du domaine du tourisme durable contre 2 % seulement pour les Français159.

Le développement du tourisme durable est actuellement en pleine croissance, mais les comportements des touristes dans leurs modes de consommation paralysent cette progression, du fait notamment d'un manque d'information mais aussi d'idées reçues résistantes et pourtant fausses. Le tourisme durable n'est pas inutile car chaque geste compte, même le plus infime ; le tourisme durable peut à la fois se pratiquer à l'autre bout du monde comme très proche de chez soi ; le tourisme durable n'est pas incompatible avec la notion de plaisir, il est possible de profiter de ses vacances tout en agissant de façon respectueuse envers la nature et les populations ; enfin, le tourisme durable n'est pas plus cher si l'on s'adresse à de bons et sérieux voyagistes réellement engagés.

C. Le greenwashing ou le faux tourisme durable

Si les idées reçues concernant le prix sont si ancrées dans les esprits, c'est en partie parce que les touristes redoutent d'être trompés ou escroqués. En effet, il n'est pas rare dans les stratégies marketing de voir que derrière une façade engagée, ce sont en réalité les intérêts privés qui priment. Bon nombre d'entreprises, tout secteur confondu, se servent des modes et des comportements des consommateurs pour mettre en place des actions de communication destinées à les attirer, quitte à tromper, à mentir ou à changer légèrement la réalité. Dans le tourisme, les voyagistes ne dérogent pas à cette règle, notamment en matière de tourisme durable. Si cette forme de tourisme est au coeur des préoccupations des touristes, désormais de plus en plus sensibles à la cause environnementale, il faut en effet s'attendre à des abus de la part des opérateurs de voyages. C'est ce qu'on appelle le greenwashing.

159 Atout France, Tourisme et développement durable, 2011, p.35

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Selon l'ADEME, le greenwashing ou en français « l'éco-blanchiment », consiste pour une entreprise à orienter ses actions marketing et sa communication vers un positionnement écologique. On utilise ce terme pour définir un message publicitaire vantant les bienfaits environnementaux d'un produit, abusant ou utilisant à mauvais escient l'argument durable. C'est également souvent le fait de grandes multinationales qui, de par leurs activités, polluent la nature et l'environnement. Afin de redorer leur image de marque, ces entreprises dépensent des sommes importantes dans la communication pour « blanchir » leur image, allant même jusqu'à changer leur identité visuelle, c'est pourquoi on parle de greenwashing160. Dans un guide anti-greenwashing161, l'ADEME montre plusieurs exemples et signes permettant de reconnaître des pratiques de greenwashing. Ces méthodes consistent en l'usage excessif et trompeur du mot « vert », des visuels ou logos de couleur verte, la création de labels non officiels voire fictifs, des engagements environnementaux sans lendemain, des argumentaires mensongers des publicitaires pour mieux vendre des produits n'ayant souvent aucun lien avec l'écologie etc. Une étude réalisée par Terra Choice décrypte les « pêchés de la mascarade écologique »162 :

- Compromis caché : le produit est qualifié de vert mais pas les composantes ;

- Absence de preuve : les prétentions ne peuvent être étayées par une documentation facilement accessible ;

- Imprécision : les propos communiqués sont volontairement flous ;

- Non pertinence : communication sur l'absence d'un composant déjà interdit par la loi ; - Affabulation : utilisation de faux labels ;

- Moindre des deux maux : l'argument écologique ne supprime pas les impacts négatifs des produits ou services commercialisés.

En somme, le développement durable consiste en un simple alibi dans les stratégies de communication des entreprises, perçues par les touristes comme opportunistes et uniquement préoccupées par des considérations de rentabilité économique.

En matière de tourisme, les voyagistes sont également amateurs de greenwashing. Dans les faits, il s'agit souvent de professionnels désireux de « surfer sur la vague », le tourisme durable étant en vogue depuis quelques années.

Alors que l'année 2017 a été élue année du tourisme durable par l'OMT163, des critiques ont été émises concernant le greenwashing pratiqué par divers acteurs du tourisme. L'année 2017 a ainsi permis à nombre d'entre eux de faire valoir leur engagement en termes écologiques auprès du grand public et même de mettre en place de nouvelles actions en ce sens. La compagnie aérienne nationale Air France par exemple, s'engage comme acteur du tourisme durable. Afin de sensibiliser ses passagers, la compagnie publie des articles au sein d'Air

160 Cf. < www.greenwashing.fr/definition.html >

161 ADEME, Guide anti-greenwashing, 2012

162 Terra Choice, Les pêchés de la mascarade écologique, 2010

163 Cf. < www.unwto.org >

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France Magazine, diffuse des courts métrages sur le tourisme responsable, soutient de nombreux projets humanitaires, sociaux ou de préservation de la nature164 etc. Air France prévoit également de réduire ses dépenses en carburant et les émissions de CO2 au moyen de nouveaux appareils Airbus et Boeing. Pourtant, la société a été au coeur de polémiques. En 2013, Air France a été sur la liste des finalistes pour un prix très particulier, le prix Pinocchio, dans la catégorie de « l'entreprise ayant mené la campagne de communication la plus abusive et trompeuse au regard de ses activités réelles ». Le prix Pinocchio est organisé par des ONG écologistes et l'association Les Amis de la Terre, et attribué aux entreprises dont les activités nuisent à l'environnement et aux populations. Air France avait financé un programme de lutte contre la déforestation à Madagascar. Mais en réalité, ce sont des zones forestières entières qui ont été confisquées aux populations, contraintes alors de se déplacer. De surcroit, une milice a même été créée pour surveiller les villageois qui voudraient cultiver sur ces zones pour se nourrir165. Ces agissements pourtant louables au départ démontrent parfaitement en quoi consiste le greenwashing dans le secteur du tourisme.

En 2010, c'est la SNCF qui a remporté un prix Pinocchio, pour une publicité prônant une émission de « 0% de CO2. Ou presque ». Finalement, cette campagne s'est révélée trompeuse et mensongère. En effet, les termes utilisés dans le slogan induisaient le consommateur en erreur tout simplement parce qu'atteindre 0% de CO2 est impossible : en France, on utilise majoritairement l'énergie nucléaire pour la production d'électricité, engendrant inévitablement des émissions de CO2166.

Un autre exemple frappant est celui de Center Parcs qui fonde son discours commercial sur des pratiques respectueuses de l'environnement. Selon l'opérateur, grâce à des domaines situés en plein coeur de la nature, le développement durable fait partie intégrante de ses priorités. A l'occasion de la Journée de la Terre, le 22 avril 2018, Center Parc a mis en avant ses engagements et ses actions pour l'environnement : réduction de la consommation en eau et en énergie, recyclage des déchets, énergie solaire etc.167 Pour autant, les pratiques du groupe sèment la discorde, notamment en Isère où le projet de construction d'un nouveau centre pose problème. En pratique, ce projet est contesté par différents groupes militants en raison de la destruction de 250 hectares de forêt, très riches en sources d'eau, zones humides et espèces protégées, ce qui contredit totalement le discours commercial de l'entreprise. Par ailleurs, Center Parcs s'appuie sur une certification européenne, la norme ISO 14.001 pour prouver son engagement durable. Or, l'entreprise décide elle-même des objectifs à atteindre, ce qui ne représente pas vraiment une garantie168. En dépit des efforts pour réduire la consommation en eau ou en énergie, pour préserver la biodiversité, le groupe Center Parcs est loin d'être un exemple. Les infrastructures et plus précisément les piscines des centres

164 Cf. < https://corporate.airfrance.com/fr/actualite/air-france-sengage-pour-le-tourisme-durable >

165 L'Écho Touristique, Air France nominée pour le prix Pinocchio sur le greenwashing, 16 octobre 2013

166 Id.

167 Cf. < https://magazine.centerparcs.fr/nature/journee-de-la-terre >

168 Reporterre, Center Parcs au banc d'essai écolo. Verdict : roi de l'écoblanchiment, 2016

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sont de véritables gouffres à eau et énergie. Il s'agit en réalité, non pas de préserver la nature, mais de la détruire pour construire une mise en scène, faisant croire aux touristes par une parure de labels ou des publicités trompeuses que l'impact écologique est minime et maîtrisé. Cet exemple est typique d'une démarche de greenwashing.

Tous ces exemples de mascarades écologiques pratiquées par les entreprises du secteur touristique sont des freins très lourds au développement du tourisme durable. Cette pratique fallacieuse a pour effet de désinformer les touristes, qui sont désormais beaucoup plus méfiants voire réfractaires à consommer de manière plus durable. A force de discours trompeurs et de publicités mensongères, ils se protègent des arnaques en tout genre et peuvent se désintéresser totalement de la démarche. C'est pour cette raison que l'argument du prix trop élevé est invoqué par les touristes, qui ont peur d'être dupés. De plus, ces pratiques discréditent les efforts de sensibilisation et les actions menées par d'autres acteurs publics ou privés, oeuvrant véritablement pour la cause écologique. A ce titre, il est intéressant de s'interroger sur la nécessité du marketing écologique. Le marketing semble incompatible avec l'éthique du tourisme durable, en particulier si l'on s'attache aux dérives telles que le greenwashing. Pourtant, il est nécessaire pour une entreprise de communiquer sur sa démarche et son engagement en matière durable, puisque paradoxalement, c'est le seul moyen d'atteindre les touristes, aussi bien les adeptes du tourisme durable que les novices. Comme tout outil, le marketing doit être utilisé de façon transparente afin d'obtenir la confiance des touristes, qui de plus en plus sensibles, sont prêts à pratiquer un tourisme en phase avec l'environnement, les populations et la société.

L'essor du tourisme durable ces dernières années est remarquable. Grâce aux actions des pouvoirs publics mais aussi des acteurs privés, la prise de conscience est massive, face aux désastres causés par un tourisme trop intense et tous les effets catastrophiques qu'il a engendré. Avec 1,8 milliard d'arrivées de touristes internationaux prévus par l'OMT pour 2030, il est plus que nécessaire de changer nos habitudes touristiques et tendre vers une limitation de notre impact sur la planète.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand