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Analyse des déterminants de la sécurité alimentaire en république Centrafricaine.


par Chancel Japhet KPATAGUELE
Université de Yaoundé II-SOA - Master 2 en politique publique et développement durable 2018
  

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INTRODUCTION GENERALE

1. CONTEXTE ET JUSTIFICATION

Le concept de sécurité alimentaire est apparu pour la première fois lors de la conférence mondiale sur l'alimentation de 1974,1(*) la définition retenue à cette occasion, est que la sécurité alimentaire consiste à « disposer à chaque instant d'un : Niveau adéquat de produits de base pour satisfaire la progression de la consommation et atténuer les fluctuations de la production et des prix » (Maxwell, 1995, cité par Kako, 2000). A cette conception de la sécurité alimentaire essentiellement basée sur l'offre alimentaire, a succédé à la suite des travaux d'Amartya Sen sur les famines, une approche plus globale basée sur la notion de droit d'accès à l'alimentation (entitlements approach). 2(*)La nouvelle approche accorde une place primordiale à l'accessibilité alimentaire. L'idée étant que même dans le cas où l'offre alimentaire est suffisante, certains ménages peuvent avoir un accès limité à la nourriture du fait de conditions d'échange défavorables ou d'une insuffisance de moyens.

Depuis lors, la définition de la sécurité alimentaire généralement utilisée est plus large. En effet, dans sa définition reformulée, la sécurité alimentaire est la possibilité pour chaque individu d'accéder en tout temps à une alimentation salubre et nourrissante, lui permettant d'avoir une vie saine et active. Pour Hoskins (1990), la sécurité alimentaire est définie comme la possibilité physique et économique d'accéder pour tous et en tout temps aux produits alimentaires. Cette seconde définition est adoptée lors des travaux du sommet mondial sur l'alimentation en 1996. Ainsi, dans sa définition vulgarisée, « la sécurité alimentaire existe lorsque tous les êtres humains ont à tout moment, un accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active » (FAO, 1996)3(*). Quatre dimensions sont définies dans la sécurité alimentaire : La sécurité alimentaire comporte quatre dimensions: La disponibilité de la nourriture en quantité suffisante; La stabilité de l'approvisionnement ; L'accessibilité physique et économique des denrées et la qualité nutritionnelle.

L'amélioration de la sécurité alimentaire fait l'objet d'un consensus unanime, des grandes agences internationales la mettent au coeur de leurs préoccupations, tandis que les initiatives régionales de lutte contre la faim gagnent du terrain : en juillet 2014, lors du sommet de l'Union africaine à Malabo (Guinée équatoriale), les chefs d'États africains se sont engagés à mettre un terme à la faim sur le continent d'ici à 2025 et en 2013, lors du premier sommet de la Communauté des États latino-américains et caribéens, les chefs d'État et de gouvernement ont approuvé l'objectif Faim zéro 2025 et réaffirmé l'engagement de la région en faveur de l'initiative Amérique latine et Caraïbes libérées de la faim en 2025 lancée en 2005 (Zidouemba et Gérard. 2015).

Au cours des 20 dernières années, le nombre de crises alimentaires a augmenté d'une moyenne de 15 par an dans les années 1981 à plus de 30 par an à partir de l'an 2000. Les crises alimentaires les plus graves provoquées par l'intervention humaine qui persistent pendant plusieurs années sont considérées comme des crises prolongées. La plupart des crises prolongées touchent l'Afrique, où le nombre moyen de crise a triplé au cours des 20 dernières années. Ces crises sont essentiellement favorisées par les conflits armés, souvent accompagnés de sécheresses, d'inondations et des effets de la pandémie du sida. L'incidence de ce facteur sur la production alimentaire et la sécurité alimentaire a été catastrophique pour des millions de personnes qui sont obligées de quitter leurs foyers, ont l'impossibilité de travailler leurs terres, coupés des marchés où ils peuvent écouler leurs produits ainsi que des approvisionnements commerciaux de semences, d'engrais et du crédit (FAO, 2006).

La RCA dont le développement repose sur le secteur agricole ne fait pas exception à la situation d'insécurité alimentaire qui touche le continent africain.

Cependant, on pense que les conditions climatiques défavorables et les conflits, qui se produisent souvent en même temps, sont des facteurs clés qui expliquent l'augmentation récente de l'insécurité alimentaire dans le pays. Un environnement économique mondial difficile, reflété dans la baisse des prix des produits extractifs et non extractifs et une faible croissance, a également contribué à l'augmentation de l'insécurité alimentaire dans de le pays, la majorité des personnes en insécurité alimentaire en 2016 vit dans des zones touchées par des conflits. Le taux de l'insécurité alimentaire est environ deux fois plus élevé dans les zones touchées par des conflits en situation de crise prolongée que dans les zones qui ne sont pas touchées par des conflits, et généralement, les résultats en matière de nutrition sont plus graves dans ces zones (FAO, 2017).

Plusieurs travaux, s'interrogeant sur les raisons de la persistance de l'insécurité alimentaire mettent en avant le rôle de la pauvreté (Sen, 1981). La croissance durable de l'agriculture apparaît alors comme une condition essentielle, étant donné la part de la population dans ce secteur et l'importance de la pauvreté rurale (World Bank, 2008).

Dans les mécanismes décrits, la faiblesse de l'investissement est la variable clé et l'investissement en zone rurale est désigné comme élément essentiel dans la lutte contre la pauvreté et l'insécurité alimentaire (World Bank, 2008 ; Barett et al., 2010 ; De Janvry, 2010 ; De Janvry et Sadoulet, 2010). Comme les ménages se trouvent pris dans un cercle vicieux, il est nécessaire de trouver des leviers capables de rompre ces enchaînements (Poulton et al., 2006). On attend de la croissance des investissements des impacts positifs sur la sécurité alimentaire non seulement en zone rurale mais aussi en zone urbaine, la baisse des prix consécutive à la croissance de la production permettant de satisfaire à la fois les ruraux et les urbains (Timmer, 2000 ; FAO, 2012). Afin de générer cette croissance des investissements, de nombreux auteurs mettent en avant la nécessité d'infrastructures publiques, essentielles pour créer un environnement plus favorable (Barro et Sala-I-Martin, 1995 ; Aghion et Howitt, 1998). En effet, en l'absence d'investissements publics en zone rurale (ou encore de leur faible efficacité, voire leur détournement), l'offre de biens publics (routes, entrepôts de stockage, irrigation, électricité, accès à la santé et à l'éducation) est insuffisante, accroissant considérablement les coûts et grevant ainsi la rentabilité des activités économiques. La faiblesse de la densité de la population qui rend la construction des infrastructures plus coûteuse explique partiellement cette situation dans de nombreux pays d'Afrique Sub-saharienne (Cour, 2001 ; Fafchamps et al., 2005).

Selon le rapport de l'organisation mondiale l'alimentation et de l'agriculture (FAO, 2016), 2 million des centrafricains étaient en situation insécurité alimentaire, soit 48% de la population. La RCA se classait parmi les pays qui ont une forte prévalence en sous-alimentation, sur 18 pays en forte insécurité alimentaire, la RCA se classait 13ème. L'un des symptômes de la grande pauvreté des ménages est naturellement l'allocation de la proportion importante voire très importante de leur budget dans l'achat de nourriture. L'analyse de la dimension économique de l'insécurité alimentaire sur la base de l'indice part de la dépense alimentaire au sein des ménages, indique qu'à l'échelle nationale, 31% de la population centrafricaine ont des dépenses alimentaires représentant plus de 75% de leurs dépenses totales, cette situation de l'insécurité alimentaire est très sérieuse et mérite bien l'attention sérieuse étant donné que le pays est en train de se battre pour relancer son activité économique.

Dans cette même logique, on note que pour 75% des ménages, la dépense alimentaire atteindrait plus de 50% de leurs dépenses totales. Cette situation explique que la préoccupation première des ménages demeure l'accès à l'alimentation et cela au détriment des autres dépenses en lien avec (i) l'investissement agricole, (ii) la santé et (iii) l'éducation.

Située au coeur de l'Afrique, la République Centrafricaine (RCA) a une superficie de 623.000 Km². Elle est limitée au Nord par le Tchad, au Sud par le Congo et la République Démocratique du Congo (RDC), à l'Est par le Soudan et à l'Ouest par le Cameroun. La RCA a une population estimée à 4.479.444 habitants en 2010, soit une densité de 7,2 hab./Km² (RGPH 2003). Les plus fortes concentrations de populations sont remarquées le long des axes routiers, notamment dans les préfectures de l'Ouham, l'Ouham-Pendé, la Ouaka et la Basse-Kotto et dans la périphérie de la capitale (Bangui). Le relief, très peu accidenté, est dominé par une dorsale centrale qui sépare les deux principaux réseaux hydrographiques du pays: le bassin Tchadien au nord et le bassin Oubanguien au sud. Un pays enclavé dont l'économie est essentiellement basée sur l'agriculture, la RCA est encore classée parmi les Pays les moins avancés malgré ses énormes potentialités qui demeurent faiblement exploitées. En effet, sur près de 15 000 000 d'hectares de terres arables, seulement 700.000 ha sont mis en culture chaque année soit environ 2% de ce potentiel.

En effet, l'économie centrafricaine repose encore largement sur le secteur agricole (agriculture, pêche, chasse, forêt). Ce secteur emploie environ 70% de la population active du pays et contribue pour 55% au produit intérieur brut (PIB) en 2008, contre 13,1% pour le secteur secondaire et 31,9% pour le secteur tertiaire (Banque des États de l'Afrique centrale, BEAC, 2008). La contribution des différents sous-secteurs (agriculture, élevage, chasse et pêche, et forêts) au PIB agricole (PIB-Agri) est très inégale : en 2008, la part des cultures vivrières dans le PIB-Agri était de 51,40% alors que celle des cultures de rente (coton, café, tabac) n'était que de 1,23%. Les sous-secteurs de l'élevage (bovins, caprins, ovins), de la chasse et pêche et des forêts représentaient respectivement 22,83%, 9,60% et 14,94% du PIB-Agri. Les principales productions de rente se sont généralement repliées. Globalement, les activités rurales, malgré les conditions agro écologiques favorables dont elles bénéficient, présentent des performances très faibles. Pendant trois décennies, les sous-secteurs agriculture et élevage, qui occupent près de 75% de la population active du pays et représentent près de 50% du PIB, ont connu une croissance annuelle moyenne faible de l'ordre de 2%, inférieure de fait au taux de croissance de la population estimé à 2,5% lors du recensement de la population de 2003 (BEAC, 2009).

Outre la faiblesse structurelle du secteur agricole, de nouveaux facteurs contribuent aujourd'hui à accroître la vulnérabilité des populations. Notamment, ces dernières années la crise économique mondiale, la volatilité des cours des denrées alimentaires et les conflits armés sont venues exacerber les difficultés économiques du pays. Or, selon les résultats de l'Analyse Globale de la Vulnérabilité et de la Sécurité Alimentaire en RCA (AGVSA), 64 % des ménages ont recours au marché comme principale source d'approvisionnement des produits alimentaires. Même parmi les ménages ayant pour activité principale l'agriculture, 48 % d'entre eux ont recours au marché comme principale source d'approvisionnement des produits alimentaires, ce qui explique la faiblesse de production agricole. La capacité de l'agriculture a assuré la sécurité alimentaire est alors remise en cause.

L'investissement dans des biens publics à des effets très positifs sur la croissance agricole, la réduction de la pauvreté et lutte contre la faim, la fourniture de biens publics est une part essentielle de l'environnement porteur à mettre en place pour encourager les investissements agricoles. Les données recueillies dans de nombreux pays, au cours de cinq décennies, montrent que les investissements publics consacrés à la R&D agricole, à l'éducation et aux infrastructures rurales sont plus rentables que d'autres dépenses comme la subvention des intrants. L'investissement dans des biens publics utiles à l'agriculture a des incidences très positives sur la productivité agricole et la réduction de la pauvreté, ce qui montre que ces deux objectifs sont souvent compatibles, et non pas antagonistes. En outre, en milieu rural, les investissements dans les biens publics seront probablement complémentaires, par nature; ainsi, les investissements dans l'éducation et les infrastructures rurales ont tendance à améliorer les investissements agricoles et figurent souvent parmi les principaux facteurs de croissance agricole et, en général, de croissance économique en milieu rural. Les effets relatifs d'autres types d'investissement varient d'un pays à l'autre, d'où la nécessité de définir localement les priorités en matière d'investissement mais il faut bien admettre qu'en milieu rural, les investissements dans des biens publics produisent des résultats qui se renforcent mutuellement (FAO, 2012).

* 1 Conférence mondiale de l'alimentation est convoquée par l'Organisation des Nations Unies en 1974 en application d'une résolution de l'Assemblé générale des Nations Unies, cette conférence représente le premier sommet international sur l'alimentation (http://www.persee.fr/doc/ecoru_0013-0559_1997_num_1_4858).

* 2 Armatya Sen «The entitlement approach to famine» (http://www.wider.unu.edu)

* 3 Sommet mondial sur l'alimentation organisé par la FAO du 13 au17 novembre 1996 à Rome avec la participation de 185 pays (http://www.fao.org/about/meeting/global-parliamentary-summit/fr/)

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote