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Analyse des crises sociopolitiques dans l'espace CEDEAO de 1990 à  2020: cas du Togo et de la Côte d'Ivoire


par Gnimpale BARTCHE
Université de Kara - Master 2022
  

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ABSTRACT:

This thesis entitled « analysis of socio-political crises in the ECOWAS region from 1990 to 2020: the case of Togo and the Ivory Coast» aims to reflect thirty years of political history of two African countries in the West, namely Togo and the Ivory Coast. The sociological study of the sociopolitical crises in these two countries is examined through the origins of these crises and the involvement of ECOWAS. However, the multiple consequences of these crises are both internal and external. The negative impacts of these crises leads to an analysis of the prospects for their resolutions which are also of two dimensions, namely internal and international.

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Keywords: Crises, socio-political, ECOWAS, Togo, Ivory Coast.

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INTRODUCTION

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La fin de la guerre froide, caractérisée par la chute du mur de Berlin a fait naître au niveau global, un phénomène structurant : l'universalisation de la démocratie libérale. En effet, le mouvement démocratique au début des années 1990, marqué par les conférences nationales dans les pays de l'Afrique à l'instar du Zaïre (actuelle RDC), du Congo, du Bénin, du Gabon et autres vont apporter de profondes mutations dans la vie sociopolitique africaine. La scène politique démocratique va très vite connaître de nombreuses crises dues généralement aux mécanismes d'organisation et d'exercice démocratiques du pouvoir politique1. En s'appuyant sur les propos d'André ADJO2, on peut estimer que cette période qui s'enclenche dans les années d'après-guerre froide au niveau de l'espace africain, est ce moment qui permet à la forme africaine de sortir du colonialisme.

Mais aujourd'hui il y a de cela plus de trois décennies après le déclenchement du renouveau démocratique en Afrique, on assiste à de multiple crises sociopolitiques dans cette partie du globe. Cette situation chaotique que vit le continent nous rappelle la thèse de René Dumont selon laquelle « l'Afrique noire est mal partie »3.

Dans la suite de cette recherche, nous procéderons tour à tour à la présentation du sujet, la problématique, la clarification conceptuelle, la justification du choix du sujet, la présentation du cadre théorique et méthodologique de la recherche, les difficultés méthodologiques, in fine à l'organisation du travail.

1. Présentation du sujet

Les questions de paix et de sécurité ont toujours été l'une des préoccupations des relations internationales. A cet effet, « maintenir la paix et la sécurité internationale et à cette fin, prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d'écarter les menaces à la paix »4 constitue l'un des principes fondateurs de l'Organisation des Nations Unies. Ainsi donc, le maintien de la paix ne peut s'établir dans une logique unilatérale mais plutôt multilatérale. Ce mécanisme dénommé « sécurité collective » est une notion des relations internationales qui prône une collaboration entre les Etats en matière de sécurité. Autrement dit, c'est un système de défense mis en place par plusieurs Etats souverains et qui sont liés par

1 KOUMASSI Afandi, Réflexions sur la problématique du coup d'état en Afrique, mémoire de Master 2 en Droit Public Fondamental, Université de Lomé, 2015

2 ADJO André, le système international africain post-décolonisation : morphogenèse des configurations nouvelles cadre d'analyse topologique, perspective scientifique, thèse de doctorat en science politique, Université Jean Moulin Lyon 3, 2008.

3 DUMONT René, L'Afrique noire est mal partie, Revue française de science politique, 1964, pp. 588-590.

4 Charte des Nations Unies, chapitre 1, article 1

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des accords militaires ou tout autre accord leur permettant de prévenir les conflits armés entre eux, de les résoudre si ceux-ci éclatent et aussi faire face efficacement à toute agression extérieure dirigée contre leurs membres. C'est sans doute le cas de l'Organisation des Nations Unies (ONU), en remplacement de la société des Nations (SDN) qui avait vu le jour au lendemain de la première guerre mondiale (1914-1918).

Depuis sa création jusqu'à nos jours, le bilan de l'ONU révèle une multitude de crises qu'elle a géré sur le plan mondial. Sur le plan régional, des institutions telles que l'Union Européenne et l'Union Africaine se sont également données pour mission la prévention des crises et le maintien de la paix. Plus que n'importe quel autre continent, la fin de la guerre froide a créé un climat de remise en cause d'un système international et d'une évolution politique en vogue dans les pays africains. Au début des années 1990, Robert Kaplan invoquait dans une formule restée célèbre, « the coming anarchy »5. En rapprochant ce concept de l'auteur au cas africain, le continent était alors celui des haines ethniques et de la violence aveugle ; Sonia Le Gouriellec soulignait en son temps que « vingt ans plus tard, le gagnant du prix Pulitzer, Jeffrey Gettleman, peignait le tableau, se désespérant que les guerres ne terminent jamais et s'étendent, comme pour reprendre ses termes, une pandémie virale »6. Allant dans le même sens, Mohammed BEDJAOUI décrit la situation déplorable dans laquelle se trouve le continent africain. Pour lui, l'Afrique d'aujourd'hui est menacée par des conflits meurtriers qui se caractérisent par une implosion interne des Etats et des nations; des guerres internes ont permis de découvrir avec horreur et stupéfaction, les moyens barbares d'extermination massive des populations.

Le renouveau démocratique dans les années 1990 a provoqué des crises sociopolitiques au plan interne dans de nombreux Etats. Le nombre croissant et la complexité grandissante de ces situations de crise ainsi qu'un intérêt moins marqué de la communauté internationale pour la région au lendemain de la guerre froide, ont conduit de nombreux Etats et organisations africains à prendre les initiatives pour trouver les solutions à leurs propres problèmes7. C'est à cet effet qu'avec l'expérience des regroupements de coopération régionale, les Etats de l'Afrique de l'Ouest ont témoigné de beaucoup de solidarité et d'esprit communautaire à travers la création de la CEDEAO et sa vocation à élargir ses objectifs au maintien de la paix dans les années 1990. En effet, la création de la CEDEAO, marquée par les querelles de

5 KAPLAN Robert., (1994), « The Coming Anarchy », Atlantic Monthly, vol. 273, n° 2, pp. 44-76.

6 LE GOURIELLEC Sonia., Gestion de crises et résolution des conflits en Afrique subsaharienne, revue défense nationale, 2016, pg. 15-1

7 FARIA Fernanda., « La gestion des crises en Afrique subsaharienne : le rôle de l'Union Européenne », 2004.

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leadership sous régional va se concrétiser avec le Traité de Lagos le 28 Mai 1975 regroupant à l'origine seize Etats à savoir: Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée Conakry, Guinée Bissau, Liberia, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sierra Leone, Sénégal, Togo. Aujourd'hui, « le nombre est ramené à quinze suite au retrait de la Mauritanie en 2011 »8.

L'idée de création de la CEDEAO est née d'une initiative des Présidents nigérian Yakubu Gowon et togolais Gnassingbé Eyadema, qui proposent dès 1972 la création d'une zone d'intégration économique régionale. L'objectif était donc à l'époque, de créer un véritable bloc économique régional, bien plus large que l'union douanière de l'ouest africain formé en 1959 par les pays du Conseil de l'Entente et du Mali. Par ailleurs, la conflictualité dans cette partie du continent va emmener l'organisation à repenser ses missions notamment en se penchant sur les questions de paix, de sécurité et de stabilité. C'est ainsi que, avec la prise de conscience de la dangerosité des crises qui sévissent dans cette partie du continent, la CEDEAO va mettre au centre de ses intérêts, la promotion de la paix et de stabilité, condition sine qua non du développement régional qui va se concrétiser par la mise en place d'une sécurité collective.

2. Problématique

Malgré les initiatives en matière de sécurité collective, les conflits sociopolitiques ne cessent de se répéter dans la plupart des pays membres de ces organisations sous régionales africaines telles que la CEMAC, la CEDEAO et autres. Cela témoigne sans doute que l'Afrique est la victime de ses propres impuissances. Durant la période 1990-2020, le Togo et la Côte d'Ivoire ont connu de multiples crises sociopolitique qui ont eu de nombreuses conséquences tant sur le plan interne que sur le plan international. La perpétuation de ces crises sociopolitiques et l'impact qu'elles ont eu durant cette période et même aujourd'hui suscitent des interrogations qui font objet de notre recherche.

Dans le cadre de cette recherche la question principale est de savoir : comment appréhender les crises sociopolitiques au Togo et en Côte d'Ivoire entre 1990 et 2020 ? Pour mieux répondre notre question principale, nous nous sommes posé deux questions spécifiques. La première est de savoir quelle étude sociologique peut-on faire des crises sociopolitiques au Togo et en Côte d'Ivoire entre 1990 et 2020 ? La deuxième question est de savoir quelles sont

8 SALL Alioune., Les mutations de l'intégration régionale des Etats de l'Afrique de l'Afrique de l'Ouest, Paris, l'Harmattan, 2007, p.45-46

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les conséquences et les approches de solutions aux crises sociopolitiques togolaise et ivoirienne?

3. Hypothèses

Les interrogations que nous nous sommes posées précédemment suscitent des hypothèses. Dans son cours de méthodes et techniques de recherche en sciences sociales, MAGNETINE Assindah soulignait que « les hypothèses sont les idées provisoires ou des solutions provisoires qu'il faut éprouver »9. En guise d'hypothèse principale, notre recherche postule que les crises sociopolitiques au Togo et en Côte-d'Ivoire entre 1990 et 2020 s'appréhendent à plusieurs niveaux à savoir leur sociologie, leurs conséquences et les approches de solutions. De façon spécifique, d'une part, l'étude sociologique de ces crises renferme les causes et l'implication de la CEDEAO et d'autre part, les conséquences ainsi que les approches de solution.

4. Objectifs

Cette recherche vise un objectif général et deux objectifs spécifiques. L'objectif général consiste à analyser les crises sociopolitiques togolaise et ivoirienne de 1990 à 2020. De cet objectif général, se dégagent deux objectifs spécifiques. Le premier est de faire l'étude sociologique des crises sociopolitiques togolaise et ivoirienne de 1990 à 2020 et le second à pour ambition d'analyser à partir des conséquences de ces crises, pour proposer des solutions.

5. Clarification conceptuelle

Un chercheur conscient de ses besoins ne peut s'en passer de clarifier les concepts ; car une exigence essentielle de la recherche est que le concept soit défini avec une clarté suffisante pour lui permettre de progresser. Selon Madeleine GRAWITZ, « le concept n'est pas seulement une aide pour percevoir, mais une façon de concevoir. Il organise la réalité en retenant les caractères distinctifs, significatifs des phénomènes. Il exerce un premier tri au milieu du flot d'impressions qui assaillent le chercheur »10.

Dans le but de rendre une lecture aisée de ce travail et éviter des interprétations contradictoires, la définition de certains concepts fondamentaux s'avère nécessaire pour mener à bien notre étude. Il convient donc de définir les concepts de « crise » et «

9 MAGNETINE Assindah, Cours inédit de méthodes et techniques de recherche en sciences sociales, Master Sciences politiques, Université de Kara, 2019-2020

10Méthodes des sciences sociales, éditions Dalloz, 1984, p.307

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sociopolitique ». On ne peut définir la notion de «crises sociopolitiques»sans passer en revue ce qu'est une crise parce que ce concept porte souvent à confusion avec celle de conflit. Selon William Zartman, la différence s'opère par rapport au conflit qui peut être armé ou non.

5.1. Crise

Le mot "crise" est issu du vocabulaire médical où il représente l'étape charnière, le moment paroxystique d'une maladie, qui peut en ce point "critique" évoluer vers la guérison comme vers la mort. Selon Natacha Ordioni,

« cette connotation déborde le champ médical. Dans la Guerre du Péloponnèse, l'historien Thucydide d'Athènes affirme que les combats auraient permis de "rendre la crise", c'est-à-

dire de prendre une décision, de trancher, au sein d'un conflit entre Perses et Grecs (Starn, 1971). Il reste que le terme demeure longtemps utilisé principalement dans le domaine médical, son extension métaphorique à d'autres sphères se déroulant en plusieurs étapes (Grand Robert), entre le XVIIe (période de crise) et le XIXe siècles »11.

La crise par définition, déborde les capacités de compréhension et d'action ; en termes généraux, la crise est une situation d'anomie provoquée par le changement. On distingue plusieurs type parmi lesquelles on peut citer la crise alimentaire, la crise sécuritaire, la crise sanitaire, crise sociopolitique, la crise économique et autres. La notion de « crise » s'oppose en principe à celle de « normalité ». Pour certains auteurs telle que Madeleine GRAWITZ, la crise est une modification brutale d'un équilibre. Une situation est qualifiée de crise si elle présente des caractéristiques considérées comme anormales sur une période donnée et si, sur cette période, les outils de régulation existants s'avèrent inadéquats. Ainsi une situation présentant des signes d'anomalie ne devient crise que si les organisations compétentes faillissent à restaurer la normalité. La crise connaît donc une dynamique qui est en partie fonction de sa gestion et des processus de décision qui se mettent en place pour y faire face. Selon Marcel MAUSS, « la crise est un état dans lequel les choses irrégulières sont la règle et les choses régulières impossibles »12.

La notion de crise connote l'idée de perturbation ou de dysfonctionnement dans le fonctionnement routinier d'un système ou le déroulement d'un processus. Dans le cadre de notre recherche, la crise est un état d'instabilité brusque qui peut durer sur une période donné et avoir des répercussions.

11 ORDIONI Natacha, « Le concept de crise : un paradigme explicatif obsolète ? Une approche sexospécifique », Mondes en développement, 2011/2 (n°154), p. 137-150.

12 Cité par BARRY S., Analyse sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso: Cas de l'université de Ouagadougou, Mémoire de DEA Droit Public: Option: Science Politique, Université de Ouagadougou, 2011

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5.2. Sociopolitique

La « sociopolitique » renvoie à la fois au politique et au social. Il s'agit de deux concepts intimement liés. Le social embrasse tous les aspects de la vie humaine. Madeleine GRAWITZ le définit comme étant tout ce qui concerne les hommes en société. Quant à Max WEBER, la politique est la direction du groupement politique que nous appelons aujourd'hui Etat, ou l'influence que l'on exerce sur cette direction.

Par ailleurs, selon David EASTON, le système politique se présente comme un ensemble de relations politiques. Pour lui, le système politique n'est pas isolé des autres systèmes sociaux car il entretient des échanges avec son environnement économique, culturel et religieux. Il conçoit le système politique en termes de « réponse » dynamique à son environnement social.

Dans le cadre de notre étude, on entend par « crises sociopolitiques », les crises s'inscrivant dans le monde politique et dont les répercussions englobent toute la société. D'ailleurs la politique concerne directement la société.

6. Justification du choix du sujet

Les années 1990 ont été des moments de libéralisation de l'espace politique dans les Etats africain et particulièrement au Togo et en Côte d'Ivoire. Très tôt, l'objectif de consolidation de la démocratie se heurte aux crises sociopolitiques dans ces pays. Au Togo, tout a commencé avec la conférence nationale en 1991 tandis qu'en Côte d'Ivoire, c'est la mort du Président Houphouët Boigny qui a enclenché l'instabilité politique due à la succession. Derrière toute cette panoplie de crises que ces pays ont connues jusqu'en 2020, l'analyse de leur origine s'avère donc important. Il convient également d'analyser l'implication de la CEDEAO dans ces crises, les conséquences de ces crises ainsi que les approches de solutions. Nous avons choisi de limiter notre étude de 1990 à 2020 pour le fait que c'est à partir de 1990 que le continent africain et précisément le Togo et la Côte-d'Ivoire ont connu un tournant décisif dans leur vie politique avec l'avènement des crises sociopolitiques. Notre étude s'arrête à 2020 parce-que nous n'avons pas voulu embrasser une période trop vaste.

7. Cadre théorique et méthodologique

Toute recherche scientifique doit se baser sur une théorie. Selon Mucchielli,

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« la recherche constructiviste doit faire appel à un cadre de référence théorique plus large et souple qui est vu comme une carte provisoire du territoire, composée de connaissances générales à propos du phénomène qu'il s'apprête à étudier, ainsi que les repères interprétatifs »13.

Dans le cadre de notre analyse, nous avons choisi la théorie de la sociohistoire et celle du libéralisme institutionnel. La première est une approche historique apparue dans les années 1990 avec une méthodologie propre empruntant des éléments à la sociologie et aux autres disciplines des sciences sociales. N'ayant pas d'aspiration théorique, elle se présente comme une « boite à outils ». Son objectif est de comprendre relativement au passé historique, comment les choses du présent fonctionnent. Depuis les années 1990, la définition de la sociohistoire n'est pas entièrement établie. D'après Gérad Noiriel, la sociohistoire combine les « principes fondateurs »14 des deux disciplines. Parmi les précurseurs de cette théorie, on compte le sociologue Durkheimien Maurice Halbwachs, le sociologue historique Norbert Elias et autres. Selon Norbert Elias, « la sociohistoire veut mettre en lumière l'historicité du monde dans lequel nous vivons, pour mieux comprendre comment le passé pèse sur le présent »15. Quant à François Buton et Nicolas Mariot, ils résument l'approche sociohistorique appliquée à la science politique de la façon suivante:

« on dirait volontiers que son penchant la porte à la fois vers la restitution la plus fine possible des logiques de construction des institutions, au sens anthropologique du terme et vers l'investigation la plus approfondie possible du rapport des individus à ces mêmes institutions »16.

Nous avons choisi la théorie de la sociohistoire d'une part parce-que les bornes d'étude de cette recherche font partie intégrante de l'histoire et d'autre part parce-qu' il faut s'appuyer beaucoup plus sur des données du passé pour expliquer la recrudescence des crises sociopolitiques.

Ensuite, selon le libéralisme institutionnel, « ce sont les institutions internationales qui sont dotées d'un pouvoir stabilisateur. Elles consolident, en l'institutionnalisant, la coopération entre les Etats jusqu'à la rendre, dans les cas les plus avancées comme l'Union

13 Cité par MAGNETINE Assindah., « Analyse des relations civilo-militaires dans une démocratie en construction: cas du Togo », Thèse de doctorat, Université de Lomé, 2015

14 NOIRIEL Gérard., Introduction à la sociohistoire, Paris, La Découverte, coll. Repères, 2006, p.3

15 Idem

16 BUTON François et MARIOT Nicolas., Pratiques et méthodes de la sociohistoire, Paris, Presses universitaire de France, 2009, p. 11

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Européenne, irréversible »17. Cette théorie postule que la communication et la coopération entre les Etats dans divers domaines est un gage de limitation des mésententes et de conflits, et donc de sécurité. Les Etats devraient en ce sens dépasser leurs intérêts unilatéraux et chercher à régler leurs conflits, soit par des procédures juridiques mises en place par les organisations internationales, soit par le processus de sécurité collective. Telle est la démarche suivie par la CEDEAO à travers les dispositions prises pour dissuader les Etats cherchant leurs intérêts unilatéraux et pour encourager la coopération dans la gestion et le règlement des crises. Le choix de cette seconde théorie s'inscrit dans la logique d'analyser la CEDEAO en tant qu'organisme de sécurité collective et son rôle dans la gestion des crises sociopolitiques.

La méthodologie se définit comme l'ensemble des procédés et des techniques propres à un domaine spécifique et des techniques pouvant conduire à atteindre un objectif. Ici nous devons cerner d'abord le sens de la recherche dite scientifique18.

En effet, selon Paul N'DA :

« La recherche scientifique, c'est avant tout un processus, une démarche rationnelle d'examiner des phénomènes, des problèmes à résoudre, et d'obtenir des réponses précises à partir d'investigations. Ce processus se caractérise par le fait qu'il est systématique et rigoureux et conduit à l'acquisition de nouvelles connaissances »19.

La méthode est définie comme une démarche intellectuelle qui vise d'un côté à établir rigoureusement un objet de science et de l'autre côté, à mener le raisonnement portant sur cet objet de la manière la plus rigoureuse que possible20. Pour traiter l'application concrète, elle doit s'appuyer sur un certain nombre des procédés qui ne sont autres que les techniques de recherche ; définit d'ailleurs comme étant : « un outil, un instrument ou moyen concret utilisé par le chercheur pour récolter ou traiter les informations »21. Quelques techniques nous ont permis de récolter et d'analyser les données de cette étude. D'abord, la technique documentaire nous a aidé à exploiter les documents issus de diverses sources. Il y'a notamment les documents issus des bibliothèques mais aussi des documents de l'internet (rapports, articles, mémoires, et autres) afin de bien dresser notre état de la question et de donner un appui théorique aux données recueillies. Ensuite, l'analyse de contenu nous a

17 TSHILOBO MATANDA Winnie., Op.cit.

18 DEGBE Kossi., « la CEDEAO et la crise sociopolitique togolaise », Mémoire, Université de Lomé, 2012

19 DEGBE Kossi., Op.cit.

20 JAVEAU Comi. ; Comprendre la sociologie, Paris, Marabout, 1976, P 68

21 DEGBE Kossi., Op.cit.

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permis d'exploiter le fond des données récoltées tout au long de nos recherches et investigations. Nous les avons analysées en y appliquant une critique raisonnable pour donner un sens scientifiquement acceptable à notre réflexion.

8. Difficultés méthodologiques

L'élaboration de ce document a rencontré de multiples difficultés. Sur le plan théorique, les difficultés sont liées à la définition du concept de crise qui se distingue de celui de conflit dont les interprétations diffèrent d'un auteur à l'autre. Sur le plan pratique, les difficultés rencontrées sont liées au difficile accès à la documentation dans les différentes administrations traitant des crises au Togo en particulier et également à l'insuffisance des sources documentaires due à la carence des bibliothèques publiques.

Cependant ces difficultés ne sauraient être une excuse quant à l'évaluation de la qualité de cette recherche. Face à ces difficultés, nous avons eu recours à l'achat des ouvrages en ligne, à la consultation des documents en ligne grâce aux bibliothèques en ligne telle que Cairn info, dont notre université est l'un des abonnés. Nous nous sommes également appuyés sur les travaux tels que les thèses, mémoires et articles en ligne ainsi que les documents qui nous ont été fourni par nos directeurs.

9. Organisation du travail

Les résultats de la recherche sont organisés en deux parties. D'abord, l'étude des origines des crises sociopolitiques qui nous conduira à analyser les fondements endogènes et les fondements exogènes et l'analyse de l'implication de la CEDEAO. Ensuite, partant des conséquences tant sur le plan interne que sur le plan externe, nous analyserons quelques approches de solutions à ces crises. Pour ce faire, nous aborderons dans une première partie l'étude des crises sociopolitiques au Togo et en Côte d'Ivoire de 1990 à 2020 et dans une seconde partie nous partirons des conséquences de ces crises pour aborder les approches de solutions.

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PREMIERE PARTIE : ETUDE SOCIOLOGIQUE DES
CRISES SOCIOPOLITIQUES AU TOGO ET EN CÔTE
D'IVOIRE DE 1990 A 2020

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Les crises sociopolitiques ne sont pas un phénomène nouveau pour l'Afrique. Elles apparaissent lorsqu'une population perd confiance dans son régime politique ou le gouvernement, lorsqu'un régime veut s'accaparer le pouvoir de façon illégale ou encore lorsqu'il y a un coup d'état. Par ailleurs, le coup d'état peut être constitutionnel ou militaire. Dans le cadre du Togo et de la Côte d'ivoire, on a assisté à plus de coups d'états constitutionnels. La période 1990-2020, marquée par le processus de démocratisation, a connu une ascension fulgurante de crises dans toute l'Afrique. Ce désir de passage d'un régime autoritaire à un gouvernement démocratique, s'inscrit dans l'esprit du respect des libertés et droits politiques de l'Homme. A ce point, « le début des années 1990 a été une période de grandes espérances en ce qui a trait aux enjeux de stabilité dans le monde en général, et en Afrique en particulier »22. Ainsi, les années 1990 ont été marquées sur le continent africain par des mouvements de contestations animés par divers acteurs23.En effet, ces crises ont pris de l'ampleur dans les années 1990 et n'ont perdu de leur acuité ni de leur actualité jusqu'en 2020. Le Togo et la Côte d'Ivoire ont vécu des moments de troubles durant cette période. On peut noter par exemple, l'organisation de la conférence nationale au Togo, la crise de succession de Félix Houphouët Boigny en Côte d'Ivoire, les tentatives de renversement du pouvoir en place, les soulèvements populaires, les coups d'Etats constitutionnel, politique et autres. Leurs origines sont multiples et peuvent être analysées de diverses façons tant sur le plan structurel c'est-à-dire à des raisons internes, que conjoncturel c'est-à-dire lié aux jeux d'intérêt en relations internationales.

Par ailleurs, dans cet environnement conflictuel, plusieurs organisations internationales telles l'ONU et l'UA ont joué un rôle significatif. La CEDEAO, une organisation régionale d'intégration économique au départ, n'est pas restée les bras croisés ; avec sa force d'intervention ECOMOG24, elle a joué un rôle prépondérant pour le maintien de la paix et de la stabilité dans cette partie du continent ; toutefois, elle a rencontré d'énormes insuffisances.

22 COULON Jean, Le guide du maintien de la paix 2005, Montréal, Athéna Éditions, 2004, p. 99-124.

23 PRE N'Gwè, « Médias et dynamique démocratique au Togo : cas de la presse écrite privée », mémoire de Master, Université de Kara, 2020

24 ECOMOG: Economic Community for West African States Cease-fire Monitoring Observer Group. De groupe de supervision, l`ECOMOG est devenu une force d`interposition en 1999. Composé de plusieurs modules polyvalents (civils et militaires) en attente dans leurs pays d`origine et prêts à être déployés dans les meilleurs délais, l`ECOMOG est chargé entre autres : de la mission d`observation et de suivi de la paix; du maintien et rétablissement de la paix; de l`action et de l`appui aux actions humanitaires; du déploiement préventif; des opérations de consolidation de la paix, du désarmement et de la démobilisation.

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Cette gestion des crises africaines par les Africains eux-mêmes tire ses origines dans les années 1990 dans l'appel à la « coopération avec les acteurs et les organismes régionaux »25 du secrétaire Général de l'ONU, Boutros Boutros Ghali dans son agenda pour la paix publié en 1992. Pour Luk Van Langenhove, c'est ce qu'on appelle l'« ordre mondial régional »26.

A l'égard des différentes crises sociopolitiques qui se sont déroulées entre 1990 et 2020 au Togo et en Côte d'Ivoire et pour répondre aux questions que nous nous sommes posées, nous étudierons dans une première partie les origines des crises sociopolitiques au Togo et en Côte-d'Ivoire (Chapitre 1) et dans une seconde partie, nous analyserons l'implication de la CEDEAO dans les crises sociopolitiques au Togo et en Côte-d'Ivoire (Chapitre 2).

25 Chapitre VIII. Examen des questions relevant de la responsabilité du Conseil de sécurité à l'égard du maintien de la paix et de la sécurité internationales, consulté en ligne le 12 décembre 2021 sur https://www.un.org/fr/sc/repertoire/89-92/CHAPTER%208/GENERAL%20ISSUES/item%2029_Agenda%20for%20peace_.pdf

26 VAN LANGENHOVE Luk, Vers un ordre mondial régional, Essai in Chroniques ONU, N° 3, 2004

20

CHAPITRE I : LES ORIGINES DES CRISES SOCIOPOLITIQUES AU TOGO ET EN COTE-D'IVOIRE

« Les démocraties jeunes ou vieilles ne sont pas à l'abri du déclenchement des haines identitaires, dès lors que l'irresponsabilité politique s'installe au pouvoir »27. Ces propos de Denis Cogneau illustrent très bien plus de quinze années après la chute du mur de Berlin, le fait que le continent africain soit le théâtre de multiples crises sociopolitiques qui rendent difficile l'objectif de démocratisation. La recrudescence de ces crises emmène le chercheur tel que Mamadou Gazibo à s'interroger sur leurs origines. Dans le cadre de cette étude, il est question d'analyser le lien entre les crises sociopolitiques en Afrique et l'histoire du contact avec l'Occident puisque les dynamiques de décolonisation et la période postcoloniale ont fourni un terreau particulièrement fertile au développement des crises sociopolitiques. L'implication des superpuissances n'a cessé malgré l'accession des Etats à la souveraineté internationale. Aujourd'hui on constate un nouvel interventionnisme des grandes puissances autour d'enjeux stratégiques ou économiques qui s'inscrivent dans une logique non pas de bloc, mais d'intérêt national. Toutefois il faut noter que pour Hans Morgenthau,

« les hommes d'Etats pensent et agissent en terme d'intérêt défini comme puissance. L'histoire a confirmé cette supposition qui nous permet de retracer et de prévoir le pas qu'un homme d'Etat passé, présent ou futur a fait ou fera sur scène politique. Les hommes d'Etat distinguent entre leur devoir officiel qui est de penser et d'agir en termes d'intérêt national et leur désir personnel qui est de voir triompher leurs propres valeurs morales et les principes politiques réalisés partout dans le monde »28.

En s'inspirant de la logique de Hans Morgenthau, il faut comprendre que les hommes d'Etat des puissances étrangères dans leurs apports avec les Etats d'Afrique n'ont que pour objectif principal de servir leur nation.

Durant la période 1990 à 2020, les origines des crises sociopolitiques du Togo et de la Côte d'Ivoire sont d'ordre endogène et exogène.

Dans cette partie de notre étude, nous analyserons d'une part les fondements endogènes (Section 1) et d'autre part les fondements exogènes (Section 2). Toutefois, il convient de noter que les facteurs qui seront analysés ici sont loin d'être exhaustifs.

27 COGNEAU Dénis, « Côte d'Ivoire : histoires de la crise », Afrique contemporaine, vol. 206, no. 2, 2003, pp. 5-12.

28 Hans Morgenthau, cité par MWAYILA Tshiyembé, « Ambition rivale dans le monde diplomatique », n° 29, janvier, 1999.

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SECTION 1 : LES FONDEMENTS ENDOGENES

Il ne fait aucun doute que l'on assiste à un regain d'intérêt pour l'étude des crises sociopolitiques en Afrique au niveau national, régional et international. Par fondements endogènes, il faut comprendre les raisons internes qui minent le continent Africain et qui font objet des crises sociopolitiques.

L'une des caractéristiques communes aux crises togolaises et ivoiriennes tire ses origines dans l'histoire précoloniale ; même si certains auteurs pensent que la « colonisation en Afrique a été généralement brève »29, il faut noter cependant que la colonisation a impacté et continue d'impacter la recrudescence des crises sociopolitiques en Afrique et plus précisément au Togo et en Côte-d'Ivoire. De même, les différences identitaires surtout l'ethnie et la nationalité ont eu un fort impact sur la politique africaine.

A la lumière de ce qui a été dit et pour mieux comprendre les fondements endogènes des crises sociopolitiques togolaises et ivoiriennes, il sera question d'analyser d'abord l'héritage de la colonisation et ensuite les différences ethniques comme moyen d'instrumentalisation politique.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault