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Les échanges transfrontaliers entre la ville de Rosso Sénégal et la Mauritanie: Organisation et impacts

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par M. Souleymane DIALLO
Université Gaston Berger de Saint-Louis (Sénégal) - DEA de Géographie 2004
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT- LOUIS

**********************

U.F.R. DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

**********************

SECTION DE GEOGRAPHIE

*************************

OPTION URBANISME

THEME : DYNAMIQUES TRANSFRONTALIERES ET DEVELOPPEMENT LOCAL URBAIN

SUJET : Les échanges transfrontaliers entre la ville de Rosso Sénégal et la Mauritanie :

Organisation et impacts.

Présenté par : Sous la direction de :

Souleymane DIALLO M. Cheikh SARR

Chargé d'enseignements

ANNEE ACADEMIQUE 2004 -2005

DEDICACES

Ce travail est dédié à ma famille : ma seule vraie raison de lutter.

* A mon Père et à ma Mère pour nous avoir élevé, mes jeunes frères et moi, dans la dignité et l'honneur; pour aussi, avoir toujours été là pour nous soutenir, nous encourager mais surtout pour avoir cru en nous. Puisse Dieu leur accorder longue vie.

* A mes frères et soeurs, Diaw Guèye, Ibrahima et son épouse, Dramane, Ndèye Bineta, Mame Fama, Guédado, Farmata et Cheikh dit Papa. Puisse Dieu raffermir les liens qui nous unissent.

* A ma grand-mère Guédado Sow pour nous avoir toujours couvé de tant de tendresse. Puisse Dieu te laisser encore devant nous encoure des années.

* Au « compagnon de fortune et d'infortune » pour toutes ces longues années passées ensemble, Dieu voit tout.

* A mon homonyme, Souleymane Diallo Junior, Puisse Dieu faire de toi un Homme.

REMERCIeMENTS

Tout d' abord, nous rendons grâce à Allah Le Tout Puissant pour nous avoir accordé la vie et la vigueur, prêté la santé et le temps, de nous avoir insufflé la volonté le courage et de faire ce travail.

En suite, nous rendons hommage à l'ensemble des enseignants de la section de Géographie de l'Université Gaston Berger de Saint-Louis pour les sacrifices consentis dans le cadre de notre formation universitaire et d'avoir partagé leurs savoirs, leurs expériences et leurs savoir faire avec nous, particulièrement ceux du Module Urbanisme pour avoir suscité en nous la passion qui nous a encouragé à suivre cette voie. Mention spéciale à l'endroit du Pr. Cheikh SARR qui est le directeur de ce travail de recherche. Sa patience, ses conseils éclairés, ses remarques et suggestions ont guidé la réalisation de ce travail. Nous lui exprimons ici notre gratitude et lui témoignons de notre respect et considération.

A nos amis de toujours : Ibrahima Ndiaye, Mamadou Diouf dit Diola, Abdoulaye Bâ, Issa Fall, Madické Mbengue, Abdoul Sy, Demba Diop, Waly Sarr, Mbaye Bathily, Abdou Aziz Ndiaye, Amadou Dème, Iba Fall, Imam Djiby Diop, Amadou Fall, Mbaye Fall, Amadou Samba Souna Fall, Aminata Niang , Amy Laye Sène, Fanta Diagne; les camarades étudiants ressortissants de Dagana à l' Université de Saint-Louis et à l' UCAD, à tous les membres de l'amicale des étudiants ressortissants de Dagana, les résidents du G2D, les camarades de promotion (particulièrement ceux du module urbanisme) nous disons merci pour leur soutient moral, leurs encouragements ainsi que leurs exhortations.

Nos remerciements vont également à l'endroit de tous ceux qui, de prés ou de loin, n'ont cessé de nous encourager et de nous inciter au travail. Les autorités municipales de Rosso Sénégal, à savoir : le maire, le secrétaire municipal et le conseil municipal en général, sont associées à ces remerciements. Leur collaboration nous a été d'un apport inestimable.

A tous ceux que nous ne pouvons pas citer ici et qui d'une manière ou d'une autre nous ont aidé, soutenu, encouragé, priés pour nous, (ils sont nombreux), nous exprimons ici notre profonde gratitude.

SOMMAIRE

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS 3

INTRODUCTION GENERALE 4

PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU CADRE D'ETUDE ET ETUDE DES FACTEURS DE DEVELOPPEMENT DES ECHANGES TRANSFRONTALIERS 21

CHAPITRE I : PRESENTATION DU CADRE REGIONAL ET LOCAL 24

CHAPITRE II: HISTORIQUE DES RELATIONS SENEGALO-MAURITANIENNES 38

CHAPITRE III: LES FACTEURS DE DEVELOPPEMENT DES ECHANGES TRANSFRONTALIERS 52

DEUXIEME PARTIE : L'ORGANISATION DU SYSTEME DES ECHANGES TRANSFRONTALIERS 69

CHAPITRE I: LES ACTEURS INTERVENANTS DANS LES ECHANGES TRANSFRONTALIERS 70

CHAPITRE II : UNE ECONOMIE URBAINE SOUTENDUE PAR LES ACTIVITES DU SECTEUR INFORMEL 87

CHAPITRE III : LA RENTE FRONTALIERE COMME SOURCE DE REVENU POUR LA MUNICIPALITE 97

CONCLUSION GENERALE 104

BIBLIOGRAPHIE 106

TABLE DES MATIERES 111

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

AOF:Afrique occidentale française

ARD : Agence Régional de Développement

CEDEAO: Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest

CESTI : Centre des Etudes des Sciences et Techniques de l'Information

CFA : Communauté Financière Africaine

CIE: Comité Inter Etat

CSS: Compagnie Sucrière Sénégalaise

FLAM: Front de Libération des Africains de Mauritanie

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique

OERS: Organisation des Etats Riverains du Sénégal

OMVS : Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal

OUA : Organisation de l'Unité Africaine

PAD: Port Autonome de Dakar

PASA: Programme d'Ajustement Structurel du secteur Agricole

PIB: Produit Intérieur Brut

PLB : Produit Local Brut

RGPH: Recensement Général de la Population et de L'Habitat

SAED: Société d'Aménagement et d'exploitation des terres du Delta

SOCAS: Société de Conserveries Alimentaires du Sénégal

UA : Union Africaine

UCAD : Université Cheikh Anta Diop de Dakar

UEMOA: Union économique et Monétaire Ouest Africaine

UGB : Université Gaston Berger de Saint-Louis

UM : Uguya mauritanien

INTRODUCTION GENERALE

L'évolution des réseaux urbains en Afrique de l'Ouest renferme une double transition : transition morphographique des armatures urbaines qui s'étoffent, transition fonctionnelle des systèmes urbains qui d' embryonnaires et entretenus deviennent, dans le contexte de crise des économies rentières, de véritables réseaux liés à l' économie marchande endogène.

L'étude des systèmes urbains montre le rôle fondamental de l'économie régionale dans la mise en place et l'évolution des armatures urbaines. On assiste de plus en plus à une génération de petites villes. Elles sont issues, le plus souvent, du semi des marchés ruraux. Leur sélection au sein de ce semi s'opère en fonction des avantages de position étant donné que la promotion administrative et industrielle n'apparaissent plus comme les moteurs premiers de l'urbanisation de base. Pour le cas de Rosso Sénégal la communalisation semble découler tout d'abord du processus général de la décentralisation en cours au Sénégal ensuite et plus du constat des dynamiques économiques locales qui fondent la volonté des pouvoirs politiques de promouvoir la ville.

Un peu partout en Afrique de l'Ouest, on observe un renouvellement du semi des villes petites et moyennes. Ce processus correspond à la diffusion de nouveaux modes de production et d'échanges, autrement dit, à une mutation dans la diffusion du travail.

Une observation attentive des dynamismes urbains laisse apparaître le poids de la localisation relative aux grandes artères routières, et cela, aux différents niveaux de l'armature urbaine. Les positions privilégiées restent donc celles d'étape sur une grande artère, ou celle d'intermédiaire et de contact (contact de milieux écologiques, de régions agricoles, périphéries de grandes agglomérations, frontières politiques etc.).

La fin des années quatre vingt a été profondément marquée par une série de mutations qui ont fortement affecté les organisations sociales, politiques, économiques et administratives de la sous région ouest africaine. Les petites villes ont bien évolué dans ce contexte et se retrouvent à exercer de nouveaux rôles. Dans le cadre des politiques de décentralisation, avec un désengagement de plus en plus accentué des Etats, elles accueillent les instances des nouvelles collectivités territoriales souvent plus autonomes et moins dotées en moyens que leurs aînées. On remarque que la promotion administrative n'est plus forcément génératrice d'urbanité. Cette dernière viendrait plutôt, comme une consécration, de la dynamique endogène consécutive d'une position éminente. De plus en plus, le développement à la base est entrepris en attribuant une place de choix au gouvernement local et à ses capacités de mobiliser les ressources propres du milieu.

Les petites villes sont devenues un enjeu politique pour les pays en développement. Elles ne laissent pas aussi indifférente la communauté scientifique mondiale. Elles font l'actualité dans le domaine de la recherche sur les établissements humains. On perçoit de mieux en mieux l'intérêt qu'elles suscitent auprès des chercheurs et des politiques. Cette attention portée en elles trouve bien une explication dans ces contextes majeurs : - l'échec de nombreux projets de développement et d'aménagement, - un désengagement des Etats aux prises avec une grande pénurie de ressources, - la descente du pouvoir au gouvernement local, - une approche du développement local impliquant d'avantage les populations à la base, - le développement de la coopération décentralisée1(*). L'autre explication est à chercher dans le fait que c'est ici l'émergence de novelles formes d'urbanité qui ne sont pas les fruits de l'héritage colonial.

Le contexte colonial a été aussi celui de l'émergence des frontières nationales, de la constitution de grandes métropoles et du développement du trafic routier, autant d'éléments géographiques qui offrent des opportunités à certains établissements humains selon leur position relative. Les petites et moyennes villes peuvent profiter de l'existence de routes mais rares sont celles qui peuvent réclamer une position de ville carrefour.

Le Sénégal s'est fortement encré dans la poursuite des politiques de décentralisation. La région, les communes et les communautés rurales voient ainsi leurs prérogatives plus importantes. Cette orientation poussée vers la décentralisation offre à la commune de Rosso Sénégal des perspectives nouvelles.

La ville de Rosso fait partie de la dernière génération des communes instituées au Sénégal. Cette communalisation peut être vue comme une consécration administrative. Elle témoigne d'un d'intérêt affiché par l'Etat central pour une collectivité périphérique. Rosso se singularise par le dynamisme des activités transfrontalières qui sont le ferment d'une économie locale potentiellement forte. La décision de faire de Rosso une commune de plein exercice n'est il pas une façon pour l'Etat de marquer sa présence tout en confiant la gestion de la localité à un « gouvernement local » qui a la charge de son développement ? La rente frontalière est elle suffisamment conséquente pour impulser un développement local urbain ? Tout au long de ce travail il sera question de replacer la commune dans le contexte géographique et géopolitique qui est le sien. Aussi allons nous voir qui sont les parties prenantes dans la gestion de l'espace frontalier avant de nous intéresser aux effets de la dynamique frontalière dans le développement économique et social de la collectivité.

PROBLEMATIQUE 

Les relations qu'une ville peut entretenir avec son environnement lointain ou immédiat sont essentielles dans sa structuration économique et sociale. Comme le dit J.B. GARNIER « la ville noue des relations avec d'autres villes qui lui sont proches ou lointaines, qui entretiennent des relations avec elle »2(*). La faiblesse ou la performance de l'économie dans une cité, détermine les conditions de vie de ses populations donc conditionne leur épanouissement. La capacité que peut développer une ville à nouer et à entretenir des relations avec d'autres homologues contribue beaucoup à la construction d'une économie locale dont la bonne tenue reste largement dépendante de la qualité et de l'efficience de ces relations. Ces dernières sont vécues à tous les niveaux et secteurs de la vie économique et sociale. Ce sont surtout des relations d'échange dans l'essentiel des domaines d'activité.

Les échanges qu'un organisme urbain développe avec ses milieux, aussi bien intérieur qu'extérieur en font simultanément, un débouché c'est à dire un marché récepteur lieu de consommation et producteur de biens et de services c'est à dire un marché émetteur. Cela rend indispensable son intégration dans les différents niveaux et compartiments de l'armature urbaine de la région ou du pays où il se trouve, voire de la sous région, avec lesquels il est lié par des liens d' interdépendance.

Dans l'armature urbaine sénégalaise, on note l'existence de villes bordières comme celles qui longent le fleuve Sénégal. Ce dernier représente la limite septentrionale du territoire national et n'en est pas moins la frontière avec la Mauritanie. Cependant, l'existence d'une frontière ne semble point être un obstacle encore moins un frein qui empêche les villes du Delta de se tourner vers celles de la Mauritanie voisine. Cette ouverture vers ce pays a favorisé l'existence de relations dynamiques dans des domaines aussi divers que variés. Ils vont des échanges de services, de biens en passant par les ressources naturelles. Ils sont aussi commerciaux et socioculturels.

Les échanges commerciaux sont, sans conteste, les plus prépondérants. Ils concernent essentiellement les produits et marchandises, les denrées de première nécessité, des matériels divers: appareils électroniques et électroménagers. Aucun doute ne persiste en ce qui concerne l'importance et la diversité des échanges effectués entre ces deux souverainetés. L'activité commerciale entre les deux pays s'insère, d' une part, dans un circuit formel, dans lequel il est contrôlable et contrôlé par les services compétents, représentants les deux Etats. Cela est possible parce que l'essentiel des produits échangés transite par les voies de passage officielles. Cette activité fournit des dividendes considérables aussi bien pour les Etats que pour les collectivités locales directement concernées, grâce aux taxes prélevées sur les biens et les personnes. Cela constitue par ailleurs un ensemble de contingences que bien des acteurs tentent de déjouer en choisissant la pratique de leur activité en toute illégalité.

D' autre part, le commerce transfrontalier, pour une large part, gît dans l'informel. Leurs succès sont surtout dus à la surpuissance du franc CFA (devise sénégalaise) sur l'UGUYA (UM : la monnaie mauritanienne). Cet écart dans la valeur des monnaies favorable au Sénégal permet aux commerçants sénégalais de se procurer des produits à des prix relativement bas comparés à ceux qui sont pratiqués au Sénégal. Le non paiement de taxes et les quantités souvent importantes de marchandises échangées, favorisés par la porosité de la frontière fait que ce secteur ne cesse de recruter au sein des populations en manque d'activité. C'est devenu pour beaucoup d'individus un créneau porteur compte tenu du taux de chômage sans cesse galopant, qui frappe tout le pays mais surtout les villes de l' intérieur qui souvent n' enregistrent la présence d' aucune unité industrielle et ont du mal à offrir des emplois salariés. Pour les villes de la région de Saint-Louis, cette situation est rendue plus difficile par les écueils sur lesquels bute le secteur agricole, dont le dynamisme est en perte de vitesse depuis ces dernières décennies et qui a longtemps été perçu comme une vocation naturelle de la région. Aujourd'hui, il occupe une bonne partie de la population des villes de la région sans distinction aucune ni du sexe ni de l'âge.

Le caractère illégal, qui fait que la majorité des échanges n'empruntent pas les voies officielles rend difficile le fait d'en parler. En effet, il est pratiquement impossible de dresser des statistiques fiables qui puissent rendre compte de manière fidèle et scientifique l'information sur les quantités et la qualité, mêmes approximatives, des échanges effectués. Cela pose naturellement la problématique des réseaux d'échange. Il serait intéressant d'étudier leur configuration mais aussi et surtout leur opérationnalité dans le contexte géographique et sociologique qui est notre cadre d'étude.

Parler des échanges transfrontaliers entre le Sénégal et la Mauritanie c'est aussi évoquer le problème des ressources naturelles. Pour le cas d'espèce il est surtout question de ressources halieutiques tant il est vrai que les deux pays ont en commun le fleuve Sénégal et l'océan atlantique. Les implications économiques et les enjeux stratégiques font que la gestion et l'exploitation de ces ressources demandent une certaine coordination entre les deux ensembles. Si pour le cas du fleuve le problème ne semble point se poser, grâce, d' une part à l'existence d'un organisme régulateur : l'Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS)3(*) et d'autre part par la timidité du secteur de la pêche fluviatile, cela est loin d'être le cas pour ce qui est des ressources maritimes. En effet malgré la signature d'accords dans ce domaine, il est fréquent de voir la presse faire écho d' heurts entre les pêcheurs sénégalais et les gardes de côte mauritaniens. Cette situation installe souvent les populations des deux pays dans un climat de friction qui n'est jusqu' à présent pas arrivé à bout des relations de « bon voisinage » mais qui, à la longue, peut être source de conflits. La connaissance de l'importance de ces échanges peut aussi être un indicateur de la situation d'interdépendance qui prévaut entre les deux entités territoriales.

Outre ceux que nous venons d'évoquer, il y a aussi des échanges socioculturels. Ils sont fondamentaux dans le cas présent. En effet le Sénégal et la Mauritanie sont liés par une histoire commune. Celle ci transparaît dans la communauté des peuples et des langues. Cette symbiose socioculturelle prend sa source aussi bien dans l'histoire ancienne que celle récente. Pendant la période coloniale, la ville de Saint-Louis a été la capitale de la Mauritanie jusqu' à l'accession de celle-ci à la souveraineté internationale en 1960.

Si on reconsidère aujourd'hui la situation économique dans les villes du Delta, compte tenu de la conjoncture actuelle, on est tenté de se poser cette question simple mais non moins importante : comment cette population parvient elle à survivre ? En effet, la région du fleuve est réputée de vocation agricole et depuis les programmes d'ajustements structurels des années quatre vingt, le secteur agricole ne cesse de battre de l'aile. La situation s'aggrave, accentuée par une constante augmentation de la population des jeunes. Le problème de l'emploi se pose avec acuité. La recherche de solutions à leurs problèmes de chômage a favorisé l'émergence d'un secteur intermédiaire autrement nommé secteur informel. La question est de savoir si est ce que ce secteur informel n'est pas tributaire des échanges transfrontaliers? Les réponses à ces différentes questions sont d'une importance capitale car elles sont posées dans un contexte de promotion et développement des collectivités locales à partir de leurs ressources locales propres.

HYPOTHESES

1. L'économie de la Région de Saint-Louis, particulièrement celui de la ville de Rosso Sénégal, dépendrait de sa proximité avec la Mauritanie.

2. La ville de Rosso Sénégal n'existerait que grâce à la rente frontalière, à l'existence du commerce et des échanges entre le Sénégal et son voisin du Nord.

3. Elle dépendrait aussi du développement de plusieurs types d'activités qui sont de prés ou de loin dépendantes de la situation de ville frontière qui offre des emplois en dehors des secteurs traditionnels et qui contribuent à la création de richesses et la formation de revenus pour la collectivité.

4. La ville de Rosso serait structurée par les échanges transfrontaliers.

QUESTIONS DE L' ETUDE

La perspective de vérification de cette présente hypothèse, nous a conduit inéluctablement à essayer de répondre sinon d'ausculter les questions suivantes:

1. Comment s'organisent ces activités, qui en sont les principaux acteurs intervenants et quel est leur apport dans le développent urbain de la commune?

2. Comment se présente l'avenir de ces échanges dans le contexte économique et social où se situent les villes du Delta particulièrement ici la ville de Rosso?

3. Quelle place occupent les échanges transfrontaliers dans l'économie locale domestique ?

4. Le développement de la ville de Rosso Sénégal n'est il pas intrinsèquement lié à l'existence des activités attitrées par la frontière et du ``désordre''  qu'elles causent ?

OBJECTIFS POURSUIVIS

Les villes du Delta sont de tailles petites ou moyennes. Elles font partie de cette catégorie d'organismes urbains qui suscitent, dans le contexte africain actuel, un grand intérêt pour la recherche en milieux urbain. Dans ce travail, les objectifs visés sont articulés autour des différents axes ci dessous dégagés :

1. Etudier pour comprendre les dynamiques économiques, sociales et spatiales des agglomérations de la région Nord du pays en procédant à l'étude de cas de la commune de Rosso Sénégal.

2. Voir comment la ville fait face à ses nouvelles responsabilités. Joue-t-elle un rôle moteur ou se laisse-t-elle entraîner par sa voisine du Nord?

3. Apprécier la capacité d'adaptation des populations à faire face à la crise qui affecte les économies locales de ces structures urbaines émergentes.

4. Déterminer l'impact des échanges transfrontaliers dans le développement urbain de ville de Rosso Sénégal.

APPROCHE THEORIQUE

Etudier les échanges transfrontaliers entre les villes du Delta et la Mauritanie constitue pour nous une nouvelle problématique dans le contexte de recherche où nous sommes. Tout au long de ce travail nous serons emmenés à faire recours à certains notions et concepts, qui constituent les mots clés du sujet que nous abordons. Ils méritent qu'on y apporte quelques éclaircissements qui nous permettrons de nous familiariser avec eux car, sans doute, reviendront-ils souvent tout au long de l'analyse.

Qu'entendons nous par « échanges transfrontaliers ou frontaliers » ? Quelle compréhension devons-nous avoir du mot « échange ». Quelles réalités entourent la notion de « frontière » ? Quelle est l'origine du mot ? Quelle est sa signification dans le contexte africain ? Quels sont ses différents rôles, où se situe  le débat qui est entretenu autour de la question des frontières? La frontière est susceptible de créer un nouveau type d'espace : l'« espace frontalier ». Qu'en est il de cet espace, et comment est-il analysé et perçu par les auteurs qui s'y intéressent comme sujet de réflexion et qui étudient les nouvelles problématiques qu'il dégage?

La notion de frontière

Habituellement, la frontière est entendue comme une limite de la souveraineté et de la compétence territoriale d'un Etat. Pour DURRUAU. M.4(*), l'espace étatique est limité par des frontières qui sont des faits géographiques « par le problème que pose leur localisation géographique, et par le phénomène humain dont elles entraînent la création ». NOON. H.5(*) fait l'analyse de la frontière et finit par la définir comme étant «  une ligne dynamique de part et d'autre d'une limite». Selon lui, la notion de frontière, dans sa conception, renferme aussi bien le géographique que l'idéologique.

En effet, la notion de frontière est omniprésente dans le discours idéologique défendu par les mouvements de revendication nationalistes qui ont émaillé de leur présence et parfois même de leur virulence toute la fin du 19ème et le début du 20ème siècle. La question des frontières a toujours été au centre du débat politique et idéologique. Les compréhensions des différents groupes divergeaient assez souvent tant les arguments utilisés comme termes de référence dans la définition et la justification des légitimités étaient distincts. Les frontières mettent en lumière les intérêts divergents des Etats, surtout quand ils sont voisins. De ce fait, les disparités se dessinent en fonction des critères de définition qu'on prend en compte. Si on met en avant la dimension historique cela peut ne pas être en corrélation avec la dimension idéologique qui elle se réfère, la plus part du temps, au caractère naturel. Sous l'angle historique, les frontières sont tracées en fonction des réalités du passé où elles sont considérées comme un leg dont devait hériter les nouvelles communautés. Les réalités géographiques ont servi, elles aussi, de support pour revendiquer, exiger ou tout simplement ériger des frontières. Ces réalités géographiques peuvent correspondre à des accidents topographiques majeurs, à des tracées hydrographiques de grande envergure comme les fleuves, les rivières, les grands lacs etc. Pour autant ; la frontière n'est pas uniquement une ligne qui sépare des entités territoriales distinctes.

Elle est une réalité qui regroupe plusieurs dimensions. On peut en ressortir l'économique, le politique, le social et le culturel. Cet aspect multidimensionnel permet à la frontière de jouer plusieurs rôles en cela qu'elle est un catalyseur d'énergies. RATTI cité par NOON, donne cette définition de la notion de frontière qui a le mérite de faire un tour d'horizon des différentes spécialités des frontières. Il voit en la «  frontière » :

« un concept duel à la fois, doté de fonctions de séparation entre : des systèmes politiques et institutionnels différents, autour des aspects légaux de contrôle et de pouvoir, mais aussi un rôle de contact et d'intermédiation, entre sociétés et collectivités différentes telles qu' on les observait dans les régions transfrontalières et doté d' effets selon que la barrière économique, le rôle de filtre, plus ou moins perméable ou de celui de zones de contact voire d' intégration économique, se replient ou ouvrent les horizons et les relations.»6(*)

Selon BURNET7(*), « les frontières sont des ruptures stables, ce qui ne les empêche pas, comme d'autres ruptures, d'être le lieu de dynamismes particuliers » qui sont les ferments d'autres vocations. Parmi celles-ci, il y a celle créatrice. En effet, la frontière peut favoriser et même être à l'origine de l'installation militaire, du développement des activités douanières etc. Elle a aussi cette capacité de faire émerger des pôles d'attraction qui ont un effet magnétique sur les hommes qui, le plus souvent, ont intérêt à la franchir, ou à profiter du franchissement par les autres : ouvriers, commerçants frontaliers8(*).Comme autres vocations, la frontière divise, désunifie, selon les idéologies qui courent de part et d'autre. G.WACKERMANN9(*) le dit bien, « c'est au nom des frontières que les Etats se protègent politiquement en tentant d'éliminer ou de réduire au silence intérieur et extérieur.» Ces différentes analyses rendent compte de la dimension géographique des frontières. D'autres mettent l'accent sur l'économique.

La notion de frontière renvoie à une réalité purement économique de l'avis de certains auteurs. Pour G. WACKERMANN, elle a toujours servi et, sert encore, de base au protectionnisme. En outre, la frontière ne signifie pas toujours et ne s'érige pas tout à fait comme une cassure10(*). Elle peut assurer et, dans bien des cas, assumer un certain nombre de fonctions qui sont souvent complémentaires et qui s'arriment plus ou moins parfaitement au reste de l'économie.

Son pouvoir économique se manifeste par la manière dont elle incite les différents acteurs appartenant à des localités différentes mais qui la juxtaposent (la frontière étant une ligne de démarcation), de mettre à profit les différences observées au niveau des législations ou des situations contrastées. Grâce aux opportunités qu'elle ouvre dans ce domaine, la frontière peut encourager les trafics et les commerces internationaux. Ces derniers sont considérés par de nombreux auteurs comme étant lucratifs. D'ailleurs, certaines réalités aux frontières tendent à confirmer cette hypothèse. En effet, sur les frontières on note l'existence de différences de prix, de taux de change inégaux, de pratiques sociales permanentes ou saisonnières. Ces considérations sont valables pour la réalité frontière. Cependant en fonction du contexte de leur émergence, du lieu de leur situation, de leur histoire, les frontières peuvent avoir des significations différentes.

En Afrique subsaharienne, les frontières telles que nous les connaissons aujourd'hui, sont une partie intégrante de l'héritage colonial. Elles ont été tracées par les puissances impériales occidentales, non pas « pour permettre un développement des pays africains mais uniquement dans le souci de créer des espaces dont la signification ne dépasse pas celle d'un cadre de prélèvement colonial » IGUE. J. O cité par BENNAFLA11(*). Dans ce sillage on trouve de nombreuses thèses qui établissent des liens étroits entre la situation de sous développement du continent et son émiettement en une multitude d' Etats, ou bien trop grands, ou bien trop petits, qui ont comme point commun, la lancinante équation que pose leur viabilisation. Le morcellement politique est un facteur primordial de différentiation de l'espace et de création des jeunes Etats nations. L'Etat étant synonyme de frontière, les lendemains des indépendances ont fini par « sacraliser » les frontières léguées par les régimes coloniaux malgré les veux pieux, les déclarations d'intention et le combat acharné de plusieurs partisans de l'union africaine. Pape Demba Fall12(*) lit ici une certaine centralité des frontières dans la genèse des Etats africains. Il donne l'exemple du Sénégal pour illustrer son propos. En effet, ce pays, aussi petit qu' il est de par sa superficie qui ne fait même pas 200.000 Km², renferme toute la gamme des frontières identifiées à l' échelle de la planète : - frontières naturelles ( cours d'eau comme les fleuves), - frontières artificielles « allant à travers champs », - frontières maritimes.

Longtemps soumises aux feux de la critique, les frontières sont aujourd'hui de mieux en mieux assimilées et les africains ont fini par s'identifier à elles. Les frontières sont devenues des réalités intangibles consacrées dans la charte régissant l'Organisation de l' Unité Africaine (OUA) qui s'est muée aujourd'hui en Union Africaine (UA). Elles ont contribué à l'émergence d'autres espaces. Ces espaces nouvellement créés transcendent les Etats. Ils font qu'en Afrique, la problématique des frontières est, plus que jamais, posée. Les acteurs politiques et économiques regardent les espaces frontaliers de plus en plus comme des territoires économiquement viables surtout avec les différentes crises économiques qui ont traversées le continent noir au cours des dernières décennies du 20ème siècle. La frontière est vécue comme un support et pas seulement comme un lieu de déséquilibre.

Les espaces transfrontaliers

Le tracé des frontières a fondamentalement contribué à l'apparition d'un nouveau type d'espace qui est le fruit de son dynamisme. Nombres d'analystes ont essayé de mettre la lumière sur le phénomène de leur naissance ainsi que sur les mécanismes de leur fonctionnement. On voit apparaître dans la littérature une multitude de termes et expressions, qui font souvent référence à un ou plusieurs de leurs aspects, pour les nommer. Des auteurs comme IGUE ont consenti des efforts de typification. Pour IGUE il y' a trois sortes d'espaces transfrontaliers en Afrique de l'Ouest. Il les distingue en fonction de leur degré de structuration et parvient à proposer la classification suivante:

· les espaces à faibles dynamismes des franges septentrionales arides saharro-saharienes,

· les espaces dits alternatifs actifs mais sans équipements conséquents ni supports d'échanges et qui fonctionnent comme de simples couloirs de passage et,

· les périphéries nationales qui se singularisent par leur structuration par de nombreuses petites villes frontalières, espaces d'échanges et de marchés autour desquels, s'organisent une véritable vie des relations.

Cette typification insiste beaucoup sur le dynamisme souvent constaté dans ces espaces situés aux franges des pays. Ces « espaces périphériques nationaux » qui, selon STARY13(*), sont des espaces économiques articulés sur une ou plusieurs nations. Ils s'appuient sur plusieurs éléments tels que les flux de produits passant d'un Etat à un autre aux grés des opportunités.

Plusieurs termes sont ainsi utilisés par différents auteurs qui, pour les spécifier par rapport au reste des territoires, n'hésitent pas à user d'expressions de type descriptives :

· « régions informelles » en prenant en considération le développement de petites activités de commerce, d'artisanat, de contrebande, de trafics qui s' y déroulent ...,

· « d'espaces d'échange réel » eu égard au déploiement d'une vie des relations très actives qui fait souvent fi des réglementations qui peuvent subsister. Cette dernière appellation permet d'avoir la pleine mesure du dynamisme dont peuvent se prévaloir les espaces transfrontaliers.

Le dynamisme, dont font montre les espaces transfrontaliers, suscite des réflexions au niveau de la communauté des chercheurs qui s'intéressent à cette problématique. Au delà de l'effet frontière, d'autres paramètres sont recherchés pour rendre compte du bouillonnement des franges périphériques. Un fait important est à noter, les espaces frontaliers semblent se détourner des territoires nationaux. On les appréhende souvent comme des dynamismes locaux et localisés. Tel n'est pourtant toujours pas le cas. En effet, ces dynamismes que l'on peut abusivement caractériser de locaux, s'avèrent être, des témoins importants à l'effort d'intégration par les mouvements migratoires qui s'y passent sous diverses formes, les mouvements productifs, les mouvements commerciaux spontanément mis en oeuvre par les réseaux de solidarité communautaires, plus ou moins commerciales et religieuses. Elles traduisent un effort d'articulation des territoires à travers les échanges économiques et sociaux. On parle dans la littérature, de triangle de développement, d'espace de proximité, de zone de solidarité et enfin de pays frontière.

· triangle de développement renvoie au tropisme économique soulignant l'importance de la combinaison de facteurs de production dans l'espace,

· espace de proximité met l'accent sur l'intégration,

· les zones de solidarité témoignent d'une certaine homogénéité des systèmes socioculturels partagés par des populations éloignées.

· pays frontière se réfère à l'homogénéité des systèmes de valeurs mais aussi similitudes des systèmes de production afférents à un espace transfrontalier qui peut également être un bassin de peuplement.

Ces concepts ont un dénominateur commun. Ils renvoient tous, aux dynamiques d'intégration qui peuvent s'opérer au niveau des espaces transfrontaliers, aux contours que prennent ces formes d'intégration aux mécanismes complexes et qui favorisent, pour le moins, les échanges entre différents territoires.

Le concept d'échanges transfrontaliers

Communément, on parle d'échange lorsque qu'il se produit une opération de transmission, d'un produit, d'une propriété, d'une possession moyennant une contre partie. Cette contrepartie peut se présenter en nature ou en espèce. Dans le premier cas, il est question d'un système de troc où les échanges de biens se font sans intervention de la monnaie. Dans le second cas, l'opération d'échange s'effectue avec le versement d'une somme d'argent équivalente à la valeur marchande du bien ou du produit. Une opération d'échange requiert, nécessairement, l'intervention de plusieurs acteurs dont les rôles et les influences peuvent différer, respectivement, en fonction de leur importance. Les acteurs sont soit des personnes physiques, soit des personnes morales14(*).

Les termes de l'analyse ci-dessus font, pratiquement, référence au commerce. En effet, échanger peut vouloir dire simplement commercer tant les propriétés et les caractéristiques sont valables pour expliquer les deux mots. De ce point de vue, si on fait référence aux échanges transfrontaliers, on peut penser, de prime abord, aux activités commerciales, aux échanges internationaux, qui intègrent la réalité de « franchissement » des frontières nationales.

Le franchissement des frontières implique les échanges transfrontaliers qui n'ont pas laissé les chercheurs indifférents. Certains d'entre eux ont étudié le phénomène afin d'en définir les mécanismes et de déterminer les incidences sur la vie des nations et de leurs populations. On leur attribue plusieurs qualificatifs qui rendent compte des nombreuses facettes dont ils répondent. On parle tantôt, d'informels, de parallèles, de clandestins, voire d'échanges de contrebande. D. BACH introduit le concept de régionalismes transétatiques aux fins de mieux rendre compte, d'introduire et de mettre à jour la nature et l'aspect des nombreuses activités qui se déroulent au niveau de ces espaces.

METHODOLOGIE

Pour répondre à quelques questions essentielles posées par l'étude (la définition de certains notions et concepts, la prospection de l'état des lieux sur la problématique des espaces transfrontaliers) l'une des voies méthodologiques privilégiée a été la recherche documentaire. Elle nous a permis aussi de prendre en considération plusieurs aspects du phénomène étudié.

Celle-ci nous a amené à visiter les bibliothèques centrales des universités Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), Gaston Berger de Saint-Louis ainsi que le centre de documentation des sections de sociologie et de géographie de L' UGB.

v Les ouvrages consulté à la bibliothèque de l' UCAD :

GONÇALVES J., 2001 : Socio économie des grands fleuves africains, CODESRIA, 50p.

SINJOUN L., 2002 : Les relations internationales africaines : entre Etats en crise et flux transnationaux, Dakar, CODESRIA, 95p.

WACKERANN G., 2000 : Géographie humaine, Paris, Ellipse Marketing SA, 352p.

v Les ouvrages consultés à la bibliothèque de l' UGB

BARRI B., 1985 : Le royaume du Walo : le Sénégal avant la conquête, Paris, Karthala, 421 pages. ;

BELVAUDE C., 1998 : La Mauritanie, Paris, Karthala, 205p.

BERTRAND M. et Dubresson A., 1997  Les petites et moyennes villes d'Afrique Noire, Paris, Karthala, p.p.7-13.

GIRAUT F., 1999 : Villes et Campagnes dans les pays du Sud, Paris, Karthala.

Nourrir les villes en Afrique subsaharienne, 1985 : Paris, Altersial, ENSIA-CRET, CRED, CERNEA, MSA, ORSTOM.

LAVERGNE R. (sous la direction de), 1996 : Intégration et coopération en Afrique de l'Ouest, Paris, Karthala- CRDI, 406p.

v Les ouvrages et mémoires du centre de documentation de sociologie et de Géographie :

DIOP M. C. ET DIOUF M., 1990 : Le Sénégal sous Abdou Diouf, Paris, Karthala, 436p etc.

KANE O., 2000-2001 : Etude d'un système de transport fluvial en zone frontalière : stratégie des acteurs et impact socio-économique (l'exemple des piroguiers de Rosso), Mémoire de maîtrise de sociologie, Université Gaston Berger de Saint Louis, 130p.

LOUM  M. B., 1999-2000 : Dynamique économique et intégration urbaine des marchés de Saint-Louis, Mémoire de maîtrise de Géographie Université Gaston Berger de Saint Louis, 109 p.

SAM K., 1996-1997 : Situation et intégration des réfugiés mauritaniens au Sénégal : le cas du département de Matam, Mémoire de maîtrise de sociologie, Université Gaston Berger de Saint-Louis, 110 p. etc.

Ces différentes institutions ont été d'un apport important surtout en ce qui concerne la disponibilité des ouvrages généraux et des mémoires des étudiants avancés. Les documents officiels proviennent de l' ARD Saint-Louis (agence régional de développement) et de la commune Rosso Sénégal. La recherche sur le net a aussi été d'un apport considérable.

Nous avons aussi fait recours à d'autres matériaux comme les guides d'entretien qui ont orienté les entrevues que nous avons tenues avec certains acteurs et les autorités locales.

L'élaboration d'un questionnaire a été aussi nécessaire pour compléter certaines informations en procédant à une collecte de données sur un échantillon de la population. Les nombreux séjours que nous avons effectués dans le lieu d'étude, notre « immersion » dans les activités nous ont permis de nous frotter avec la réalité de la frontière.

Voici en résumé les conditions dans lesquelles nous sommes parvenus aux résultats qui ont guidés la structuration de ce texte autour de trois axes majeurs. D' abord, dans la première partie nous procéderons à la définition de certains termes, notions et concepts qui intègrent l'étude suivie d'une présentation du cadre régional et local dans lequel nous agissons. Ensuite, nous ferons une deuxième partie dans laquelle nous essayerons de déterminer les facteurs du développement des échanges, de décliner l'identité des acteurs qui interviennent au sein des espaces transfrontaliers et de préciser le contenu des échanges. Enfin, la troisième partie sera consacrée à l'impact des activités transfrontalières dans la vie de la collectivité de Rosso Sénégal.

PREMIERE PARTIE :

Présentation du cadre d'étude et des facteurs de développement des échanges transfrontaliers


CHAPITRE I : PRESENTATION DU CADRE REGIONAL ET LOCAL

La présentation d'ensemble du cadre dans lequel se déroule notre étude est d'un intérêt particulier. Elle permet, de procéder à l'étude du milieu, en portant notre attention sur les cadres physique, économique, géopolitique etc. Cette présentation permettra de faire l'état des lieux sur plan de la région avant de descendre au niveau local sur quelques uns de ces aspects.

1. Le cadre régional

Le grand bassin du Sénégal peut être décomposé d'Est en Ouest en trois grands compartiments. Il s'agit d'abord, de la Haute vallée qui correspond au cours supérieur du Sénégal situé au Mali et en Guinée Konakry. Ensuite, de la Moyenne vallée qui se présente comme étant une région avec un climat plus clément et moins extrême. C'est sans doute se qui en fait une région ou la pratique de l'agriculture sous pluie est développée notamment dans sa partie qui n'est pas inondable : le « djiéry ». Le « djiéry » s'oppose au « walo » qui est la partie submersible lors des crues du fleuve. C'est la partie la plus haute et ses étendues larges font que c'est aussi une zone où se pratique l'élevage. Enfin, la basse vallée : c'est la partie la plus au Nord du cours du fleuve. Allant de Richard Toll à Saint-Louis, on peut y distinguer la zone éco-géographique du Delta.

a) Le cadre géographique général du Delta

La région du Delta proprement dite est une grande étendue d'environ 5000km2. Elle va de la nouvelle brèche artificielle creusée en 2002 jouant le même rôle que l'embouchure du fleuve Sénégal située à 25km en aval de la ville de Saint-Louis à l'amont de la ville de Dagana. Elle est délimitée par les latitudes 16° et 15°30 Nord et les longitudes 15°30 et 16°30 Ouest. La zone du Delta est assimilable à une vaste plaine dont l'altitude moyenne est inférieure à deux mètres (IGN). Elle est bordée au Nord et au Sud par des massifs dunaires dont la hauteur peut atteindre dix mètre. Le Delta présente un milieu naturel très spécifique. La pluviométrie y est dans l'ensemble très faible et dépasse rarement les 300 mm/an. La présence de grandes cuvettes argileuses a favorisé l'idée d'un développement par l'agriculture bien avant les indépendances. C'est pourquoi, il est vite devenu un « point d'ancrage» pour les grands projets de développement hydro agricoles et agro industriels. Pourtant, a priori, le Delta n'était pas destiné à l'agriculture. En effet  l'essentiel de ses terres sont salées. Dans sa partie appelée « walo », c'est à dire les zones de crue, les terres les plus fertiles ne représentent qu'un faible pourcentage (5% pour certains) du total de sa superficie.

La région du Delta présente un profil climatique presque désertique au Nord devenant de plus en plus sahélien dans ses parties Sud et Centre. Ces caractéristiques du climat ne manquent pas d'influencer le régime du fleuve même si ce dernier dépend aussi largement des cours d'eau du haut. Actuellement, l'érection des barrages (Diama et Manantali) a modifié le régime hydrologique du fleuve qui ne suit plus le rythme des saisons.

Le fleuve Sénégal, d'une longueur de 1800 Km est la résultante de la réunion à Bafoulabé de deux affluents : le Bafing et le Bakoye. Sa source se situe sur les montagnes du Fouta Djalon en Guinée. Il se présente aujourd'hui comme une frontière commune partagée par les Etats du Mali, de la Mauritanie et du Sénégal. Ainsi, il devient l'élément central de la réalité géopolitique de ces trois Etats. Il est aussi le noeud autour duquel se pose un certain nombre de problèmes afférents à l'eau, la terre, aux flux migratoires qui sont cruciaux car, renvoyant à l'expression de la souveraineté nationale de ces pays.

Dans la tradition ancienne, le Delta se situait sur les marges occidentales des grands empires qui ont marqué l'histoire politique du Sahel tels que : les empires du Ghana, du Mali et du Songhaï. Aussi, était-il un point d'aboutissement du commerce transsaharien. Principale territoire de la pénétration européenne au 19ème siècle, le Delta a été le point de départ de l'occupation coloniale au Sénégal et dans les pays du Soudan. De ce fait il sera la première entité territoriale à être conquise et de manière totale par la puissance impériale française en Afrique de l'Ouest. Cette occupation précoce va rapidement modifier les systèmes de valeurs, les formes d'organisation sociale et de production économique. On assistera à une occupation effective qui va se matérialiser par l'implantation d'une nouvelle économie et qui va jeter les bases d'une nouvelle forme d'organisation spatiale et de l'urbanité.

b) Une région dépositaire d'une vieille tradition urbaine.

Le Delta est décrit aujourd'hui comme étant une région ancrée dans une ancienne tradition urbaine. Presque toutes les villes qui y sont rencontrées, sont pour la plus part d'anciennes escales fluviales qui ont fait la prospérité de leurs populations aux temps où le commerce de la traite avait pignon sur rue. Le trafic fluvial qui permettait de faire la jonction entre les différentes localités a été très déterminant dans la mise en place des centres urbains dans la vallée. Dans l'ensemble, la structuration de l'armature urbaine a fortement été influencée par les mutations fonctionnelles qu'ont subi ces différents centres urbains. La région se trouve au coeur et aux premières loges des politiques de développement initié par les gouvernements du Sénégal. C'est là, sans doute, une des principales raisons de l'omniprésence de la Puissance publique dans le secteur où elle vise un objectif central à savoir une meilleure exploitation et une mise en valeur plus judicieuse des potentialités locales. Cet intérêt a eu, par conséquent, des effets plus ou moins stimulants sur le ou les processus d'urbanisation de l'ensemble de la vallée et plus particulièrement dans sa région basse.

Au demeurant, les villes du Delta n'ont pas toutes suivi les mêmes trajectoires, n'ont pas intégré les mêmes processus, ne présentent pas toujours les mêmes éléments pour rendre compte de la façon dont s'est fait leur urbanisation :

-Saint-Louis, une ancienne plaque tournante et ancienne tête de pont des villes du delta. Elle a joué à la fois le rôle de capitale de l'Afrique occidentale française (AOF), du Sénégal et de la Mauritanie.

-Richard Toll, a été propulsée par l'installation d'une agro-industrie de très grande envergure juste au début des années 1970. Elle est la deuxième dans la hiérarchie du point de vue de sa population et premier si on prend le critère économique15(*).

- Dagana est un petit centre administratif. Elle joue un rôle très important dans l'encadrement de son hinterland. Jusqu' à récemment (2002) elle avait sous sa tutelle administrative Saint- Louis qui n'en était pas moins le chef lieu de région.

-Rosso Sénégal peut réclamer la situation de ville carrefour. Elle fait la jonction par la route et par le bac entre le Sénégal et la Mauritanie. Cette localité vient d'acquérir le statut de commune de plein exercice en 2002.

Dans l'ensemble on peut dire que les processus d'urbanisation se singularisent partout par leurs spécificités locales même si par ailleurs, ils recoupent plusieurs points de similitude. Les aménagements réalisés pour le développement agricole ont été déterminants pour chacune d'elles.

Dans le cadre du Delta les aménagements réalisés ont conduis à un développement exponentiel du taux de la croissance démographique. Celle ci a longtemps été freinée par les conditions « écologiques contraignantes » qui se manifestaient par une rigidité du milieu naturel qui n'encourageait pas une fixation encore moins un peuplement massif. Ce vide humain sera progressivement pallié par la foule des nouveaux arrivants attirés par les potentialités d'emploi et surtout par les tendances à la sédentarisation qui sont les corollaires directs des nouveaux aménagements sur les populations.

c) L'économie locale du Delta16(*)

Le Delta en tant que zone éco-géographique se confond aux départements, fruits du découpage administratif et territorial, de Dagana et de Saint-Louis. La structure de son économie locale est fortement marquée par la présence des trois secteurs traditionnels à savoir le primaire, le secondaire et le tertiaire. Dans ce cas précis, le secteur primaire joue les premiers rôles devant un secteur moderne (secondaire) bien représenté et une économie tertiaire très dynamiques.

Le secteur primaire joue un rôle très important dans la structuration économique du Delta. En 1995 elle contribuait jusqu'à hauteur de 22% du PLB (Produit Local Brut)17(*). Ce dernier était estimé à l'époque à 3,5% du PIB (Produit Intérieur Brut) du Sénégal. La représentativité du secteur primaire est perceptible à travers ses sous secteurs que sont l'agriculture, l'élevage et la pêche. L'agriculture occupe naturellement la première place. En effet, depuis l'époque coloniale le Delta a fait l'objet de nombreux projets et programmes d'aménagement dans ce domaine. Evoquer le secteur agricole du Delta peut renvoyer à la riziculture. Toutefois, «contrairement à ce que l'on peut penser, la culture du riz ne représente que 38% de la valeur ajoutée produite par le sous secteur agricole »18(*). En réalité, c'est la canne à sucre qui domine dans ce domaine et occupe la place de première spéculation. Les autres productions sont relativement importantes mais restent modestes face aux deux précédemment citées. Tout de même il faut relever l'importance qui est accordée au secteur de l'agriculture. Pourtant on ne peut pas dire la même chose pour l'élevage qui est une partie intégrante de l'économie primaire.

Aussi important soit-il dans la vie économique des populations du delta, le secteur de l'élevage n'a pas été considéré comme une priorité lors de la mise en place des aménagements hydro agricoles. Pour d'aucuns, il serait même le principal laissé pour compte dans les grands projets hydrauliques. Sa réalité n'étant pas forcement bien intégrée dans la planification globale, il se voit obligé, de disputer le territoire avec une agriculture intensive (irriguée) avec laquelle elle est presque incompatible. En effet, les aménagements supportent mal l'empiétement et la transhumance qui faisait qu'une partie de l'année les éleveurs venaient faire pâturer leurs troupeaux sur les terres du Walo est devenue impossible. Cette situation est à l'origine de sa marginalisation. Elle demeure cependant la principale activité des Peuls une ethnie très représentative de la région. Le secteur n'affiche plus ce dynamisme qui lui permettrait de contribuer plus conséquemment à la formation du PLB tant le contexte a évolué en sa défaveur. Tel n'est pas le cas pour la pêche. Certes, elle n'a pas été épargnée par les diverses mutations mais elle affiche, quand même, une meilleure santé.

En effet, le secteur de la pêche pourrait se définir comme un poumon de l'économie primaire dans la région. Ouverts sur l'océan atlantique, traversés par le fleuve Sénégal sur toute leur longitude et abritant d'autres cours d'eau de dimensions respectables comme le Lac de Guère et la Taouey, les département de Dagana et de Saint- Louis se trouvent dans une situation privilégiée qui donne aux populations la possibilité de s'adonner aux activités de la pêche aussi bien continentale que maritime. Seulement il faut souligner que la pêche continentale a perdu beaucoup de terrain dans le Delta. Cette réalité est inhérente aux transformations écologiques, consécutives à l'érection des ouvrages de Diama et de Manantali qui sont venus perturber le régime hydrologique du fleuve. A cela s'ajoute, la sur exploitation qui a conduit à une diminution considérable de la ressource halieutique des eaux douces19(*). Il ne faut pas aussi occulter le fait que le secteur de la pêche dans son volet pêche maritime dépend beaucoup de la coopération entre le Sénégal et la Mauritanie. Ce sous secteur est très dynamique surtout à Saint-Louis avec les pêcheurs traditionnels de Guet Ndar. Elle participe grandement à la constitution du PLB. Il est cependant difficile de mesurer ou de quantifier sa contribution exacte mais sans risque de se tromper on peut dire qu'elle est conséquente20(*).

A côté du secteur primaire on note la présence d'un secteur moderne très dynamique.

Il est caractérisé par la présence et le développent d'unités agro industrielles. Il génère à peu prés 20% du PLB local dont presque les ¾ par les seules industries. La Compagnie Sucrière Sénégalaise fait figure de locomotive dans ce sous secteur et, à elle seule contribue, pour plus de 15% dans le PLB des deux départements de Dagana et de Saint-Louis pour l'année 199521(*).

Dan ce sous secteur on note aussi la présence d'un ensemble de petites et moyennes entreprises dont le chiffre était estimé en 1995 à prés 800 et qui en dehors des chefs d' entreprise offraient plus de 5000 emplois. Dans ce domaine le secteur du bâtiment et des travaux publics se positionne avec une part de 3% au PLB.

Le commerce est très présent. Il tient avec le secteur informel une place de choix dans la mobilisation du PLB. Selon une étude commanditée en 1995 par le Club du Sahel sur la relance des économies locales du Delta, le nombre d'unités de production du secteur informel urbain était de 29000 dont 13000 dans le secteur du commerce. Toujours d' après cette étude, le secteur informel emploierait dans la région une population de plus de 54000 personnes22(*).

Dans l'ensemble, on peut dire que l'économie du Delta est essentiellement urbaine. En effet, la Zone du Delta fait partie des plus urbanisées du Sénégal avec une population urbaine qui frôle les 62% de la population totale et où 82% du PLB est produit par les citadins23(*). Plusieurs acteurs économiques se déploient dans la région avec aux premières loges l'Etat. La présence de ce dernier s'explique par l'enjeu économique qu'elle comporte et qui le place au coeur « des stratégies agricoles de l'Etat Sénégalais ». Le Delta a énormément bénéficié des politiques et programmes de développement de l'agriculture dans notre pays. La présence de l'Etat se lit aussi dans le choix d'implanter dans la région une grande infrastructure agroindustrielle, des infrastructures aéroportuaires, de grandes structures d'éducation et de formation.

Les collectivités locales, pour être en phase avec les nouvelles compétences et prérogatives institutionnelles doivent se positionner comme de véritables acteurs de développement. Une vue d'ensemble montre qu'elles peinent à jouer pleinement ces nouveaux rôles. En attestent les nombreux problèmes d'ordre structurel auxquels elles sont confrontées. Il est aussi indispensable de replacer le Delta dans le contexte géopolitique de la vallée pour avoir une meilleure compréhension de l'organisation et du fonctionnement global de l'économie. En effet une bonne partie de l'économie dépend des échanges qui se passent avec les villes de la Mauritanie voisine et dans lesquels la ville frontalière de Rosso Sénégal joue un rôle stratégique.

2. Monographie de la ville de Rosso Sénégal.

a) Caractéristiques physiques et ethno démographiques de la population

Les aspects physiques du milieu : La ville de Rosso n'est pas très présente dans la nombreuse littérature consacrée à la région de Saint-Louis. Elle se positionne géographiquement entre le méridien 14° 48 Ouest et le parallèle 16° 30 Nord. La ville est assise sur les hautes levées de terres qui bordent le fleuve sénégal. Les propriétés physiques sont pratiquement identiques à celles que l'on rencontre dans le Delta du sénégal. Ici les sols sont de type argilo limoneux. Cette caractéristique les rend favorables à la pratique de l'agriculture. Pour preuve, la ville est encadrée par les plantations de cannes à sucre de la compagnie sucrière sénégalaise, les périmètres irrigués ou se pratique la culture du riz, de la tomate et d'autres spéculations.

Le climat est de type sahélien, la ville est située à la marge Sud du désert du Sahara. Les saisons des pluies dépassent rarement 3 mois, les saisons sèches vont d'Octobre à Juin. Pendant cette période, la ville est soumise à l'influence des vents venant du Nord. Des vents chauds et sec plus connus sous le nom d'harmattan. Il faut dire que cette caractéristique du climat n'est pas une exclusivité de la ville de Rosso, elle est à peu prés, la même pour tout le Nord du Sénégal.

Les aspects ethnographiques : Traditionnellement, la ville de Rosso était occupée par trois principaux groupes ethniques que sont : les Wolofs, les Haalpoulars, les Maures. Ces trois groupes ethniques sont les mêmes que l'on retrouve presque partout au niveau de la vallée. Jusqu' en 1950, la localité était un petit village. Elle était opposée sur l'autre rive à Rosso Mauritanie qui était une escale pour le trafic fluvial colonial. L'année 1950 est marquée dans l'histoire des deux localités jumelles. En effet, il s' y produisit une inondation de la ville de Rosso Mauritanie. Chassées par la montée des eaux, les populations de cette localité viendront s'installer dans la ville de Rosso Sénégal contribuant ainsi, considérablement, à l'augmentation de son poids démographique.

Rosso Sénégal va gagner en importance avec la faillite du trafic fluvial, mais aussi avec la construction de la route du « djéri » en 1964 et la mise en service des bacs. Le recensement général de la population de 1988, estimait la population totale à 4825 habitants. En 2002, la population de Rosso est passée à 9328 habitants24(*). Le sexe ratio y est favorable aux hommes, contrairement à la tendance nationale qui voit ce paramètre favorable aux femmes. Ici les chiffres sont éloquents, on recense, 4737 hommes soit 50,8% et 4591 femmes soit 49,2%. Cette disparité entre les hommes et des femmes trouvent sans doute leur explication dans les différents processus migratoires en cours dans la cité.

Outre la supériorité numérique que représentent les hommes, la population de la ville est aussi majoritairement composée de jeunes. Les moins de trente cinq ans constituent presque plus de la moitié de la population totale (58,7%). Autant les jeunes sont nombreux, autant les vieux ne constituent qu'une faible minorité avec seulement 3,8 %. La sur représentativité des jeunes n'est pas la conséquence direct d'un accroissement naturel de la population, les raisons évidentes sont à chercher dans le fait que la ville est devenue, par ses nouvelles fonctions, un réceptacle pour toute une population de migrants, de plus en plus importante, en provenance des localités de vallées, des autres contrées du Sénégal et même des pays voisins. Le statut de « ville frontière » et « de couloire d'échange » en fait une destination finale ou provisoire, plus que potentielle pour les populations migrantes.

Rosso est une ville multiethnique avec une forte dominance des Wolofs qui font 73% de la population globale. Cette domination des populations wolofs est à l'image du peuplement du Delta en général où ils sont majoritaires25(*). Il sont suivis des Haalpoulars qui représentent 21%. Les Maures et les Soninkés sont faiblement représentées avec respectivement 04 et 0,3%. On note cependant la présence de plusieurs autres nationalités de la sous région. Toutes ces caractéristiques de la population déteignent une réalité qui fait de Rosso une ville d'intégration.

Il faut aussi souligner que la composition ethnique de la ville était un déterminant majeur pour la vie économique et social des habitants. En effet, elle régentait les systèmes de production traditionnels et influençait beaucoup les structures économiques locales

Tableau 1: Données démographiques sur la ville de Rosso Sénégal

Situation des ménages de la ville de Rosso en 2002

Nombre de ménages

1051

Nombre de concessions

753

Effectif des Hommes

4737

Effectif des Femmes

4591

Effectif total la population

9328

Nombre de personnes par ménage

9

Taux de masculinité

103,2%

Source : Service régional de la prévision et des statistiques / RGPH 2002

Figure1 :

Source : Document provisoire du plan d'investissement

Communal de Rosso Sénégal (2004)

b) Les systèmes de production

Le système traditionnel : Traditionnellement, la économique reposait sur une économie de subsistance. L'agriculture y occupait une place centrale à côté de l'élevage, de la pêche et du commerce. Tout d'abord, on pouvait distinguer un système de production wolof basé l'agriculture de décrue au niveau des terres inondables du Walo et sur intense activité de pêche fluvial. Ces systèmes restaient très dépendants du milieu naturel. Les cultures de décrues permettaient la production de céréales comme le mil et le sorgho. La pêche se développait surtout dans les cuvettes de décantation qui constituaient ainsi des endroits très poissonneux tant les conditions écologiques étaient favorables au développement et au renouvellement de la ressource.

Ensuite, il y a les systèmes de production maures et haalpoulars (peuls).Ces deux derniers étaient quasiment, identiques. Ils étaient aussi fondés sur l'agriculture, l'élevage, et le commerce. Leur point commun est la mobilité des acteurs. En effet les activités d'élevage et de commerce imposaient à leurs pratiquants, des déplacements fréquents à travers la région. C'est bien entendu la transhumance et le colportage dont il ici question.

Ces systèmes de production dont nos avons fait ici état, sont largement dépendantes des conditions naturelles qui était à la fois leur force mais étaient en même temps le ventre mou.

Le système moderne : Aujourd'hui, l'économie de la ville s'articule autours des secteurs primaires et tertiaires. En effet, pour ce qui concerne la ville de Rosso, il sera difficile de faire état d'un secteur secondaire qui n'est pas du tout représenté. Cependant, le secteur primaire joue un rôle considérable dans la structuration économique de la ville. L'agriculture, à elle seule, produit 20,8% du produit local brut26(*). Presque c'est le seul sous secteur qui affiche un dynamisme palpable. De plus en plus l'élevage et la pêche diminuent en importance.

L'économie de la ville repose de plus en plus sur le commerce transfrontalier et sur les nombreuses activités parallèles engendrés par l'effet de la frontière. Le secteur informel se distingue de plus en plus par sa présence. Elle est devenue l'une des principales sources de production de richesse pour la ville.

c) L'état des infrastructures.

La ville est devenue commune grâce à la réforme administrative et territoriale survenue en février 2002. Ce nouveau statut est confirmé par le décret 171 du 21 février 2002. A première vue, la commune offre le visage d'un « gros village ». Les infrastructures sont absentes ou se trouvent dans un état de dégradation avancé.

Les infrastructures scolaires se résument ainsi : une école primaire, un collège d'enseignement moyen de huit salles de classes fonctionnelles et de deux autres en cours de construction. L'établissement ne dispose pas encore d'un mure de clôture, n'est pas connecté au réseau d'électricité et l'eau courante y encore un luxe inaccessible. Il est aussi à noter la présence de « daara » (écoles coraniques) dans les quartiers qui participent à l'éducation religieuse des enfants.

Pour ce qui est du domaine de la santé, la localité compte deux dispensaires qui s'occupent de la santé de populations. Ces structures malgré leur présence sont minées par des maux comme : exiguïté de l'espace, déficit de personnel qualifié, manque de moyens logistiques. Ces carences constatées dans les domaines de la santé et de l'éducation sont les mêmes qu'on retrouve aussi dans les autres secteurs. Cette situation est d'autant plus compréhensible que la ville vient juste d'acquérir le cachet officiel d'établissement humain urbain avec sa récente communalisation même si les phénomènes d'urbanisation y son pendant longtemps perceptibles.

La commune est desservie par une bretelle jusqu' à la route nationale N° 2. Le paradoxe est cependant frappant entre l'importance de cette bretelle si on considère son rôle cruciale dans le système des échanges, et l'état de vétusté dans laquelle elle est. Les multiples crevasses, les innombrables nids de poules, l'étroitesse de cette route, sont autant d'aspects qui, combinés à la sur fréquentation dont elle fait l'objet, en font un danger permanant pour les personnes qui l'empruntent et leurs biens. L' inexistence d'une gare routière fonctionnelle entraîne une concentration de véhicules de toute nature et de toutes dimensions sur un espace étroit , qui sert à la fois de gare routière, de place de marché, de débarcadère. Cette concentration se traduit par des embouteillages monstres qui ne manquent pas de conséquences négatives sur la gestion des flux surtout au niveau du quai.

Le quai de Rosso est sans doute le lieu le plus connu de la ville. Il est construit sur à la pointe nord de la commune. Son aménagement actuel, aussi fonctionnel soit - il, est frappé par la vieillesse. En effet, il date de 1950 ce qui veut dire qu'il souffre du poids de l'âge. Ce qui fût à l'origine une simple escale est aujourd'hui le centre névralgique des échanges transfrontaliers entre deux Etats voisins.

CHAPITRE II: HISTORIQUE DES RELATIONS SENEGALO-MAURITANIENNES

Les liens qui unissent les villes du Delta et leurs homologues de la Mauritanie trouvent leurs racines dans l'histoire récente et ancienne. Les deux territoires ont toujours entretenu des relations de dépendance et d'interdépendance. Une complémentarité qui se manifeste, aujourd'hui, dans les échanges qui existent entre les deux pays. Le Nord du Sénégal et le Sud mauritanien appartiennent à un même cadre géographique. Cette proximité géographique favorise les connexions entre les populations. Il faut le souligner, les relations entre les deux pays ont traversé des zones de turbulence qui ont conduit à des déchirements certes, mais aussi par des moments de stabilité qui ont été déterminants dans la consolidation des fondements des relations qui unissent aujourd'hui ces deux entités. Les rapports tumultueux de la période anté-coloniale jalonnée de guerres et de razzias, vont être suivies de la colonisation qui en fera, le temps de la colonisation, un territoire unique sous le joug de l'impérialisme français. Plus tard, les indépendances et les besoins d'affirmation de souveraineté combinés aux conséquences produits par les différentes politiques nationales vont peser de tous leurs poids dans les relations entre les deux pays.

1. Evolution des rapports avant et pendant la colonisation

a) Le déclin du royaume du Walo

Le cadre géographique du Delta se confond avec le territoire de l'ancien royaume du Walo. Entité politique et historique, le Walo n'a pas été épargné par les effets du commerce transatlantique qui a pénétré par le fleuve qui en a été le véhicule. Ce dernier l'a, d'ailleurs, grandement bouleversé. Le commerce de la région reposait sur le trafic des esclaves et de la gomme. Le commerce triangulaire y a entraîné une crise très profonde aux dimensions sociales, politiques et économiques qui finiront par mettre un terme au dynamique trafic transsaharien. Ce trafic était le lien qui unissait le Walo à l'Afrique du Nord. Du reste, il concernait toute la vallée du fleuve Sénégal. L'équilibre rompu entre les différentes institutions du royaume, constituèrent les germes d'une guerre civile (1830) qui contribuera à le rendre d'avantage vulnérable. Cet état de faits est aussi consécutif au renforcement de la présence et de l'influence des royaumes maures sur la rive droite du fleuve où ils détiennent le monopole du commerce de la gomme. Bien que l'exportation de ce produit ne fut pas très importante, dans le commerce atlantique de l'époque, elle occupait, néanmoins, une place considérable dans le commerce de l'embouchure,27(*) aussi bien au Walo que dans les régions côtières mauritaniennes situées entre le Cap Blanc et le fleuve Sénégal

Les communautés villageoises fortement islamisées résistèrent aux parties belligérantes de la guerre civile à savoir : les « bracks », les « thiédos », et les grands notables. Elles furent épaulées par les marabouts musulmans dont l'un des principaux objectifs était d'interdire la traite des noires (l'exportation hors du continent)28(*). Il faut noter que l'esclavage domestique continuait toujours d'exister. Pendant la période qu'a duré la guerre des marabouts (entre 1673 et 167729(*) ) les pratiques commerciales seront affectées par de profondes mutations survenues sous l'impulsion des populations maures et du pouvoir théocratique musulman qui gouvernait les « Haalpoulars » de la moyenne vallée après 1776. Ils refusent de continuer le commerce des esclaves avec les négociants traitants européens. Cela ne signifiera pas non plus la fin de l'esclavage.

b) La vallée lieu d'affrontement de la caravane et de la caravelle

Le 18ème siècle sera sous le signe de relations conflictuelles entre les communautés maures (berbères) et noires dans la région sud de la mauritanie. Le Walo très affaiblit est obligé d'opérer le transfert de sa capitale de la rive gauche à la rive droite. En même temps les dépendants, serviteurs et affranchis exploitaient les terres de la partie Nord de la vallée au profit de leurs maîtres : les tributs guerrières des maures blancs. Le 18ème siècle est aussi très important en cela qu'il voit le fleuve devenir un axe majeur de la pénétration européenne. La vallée devient le lieu où vont s'affronter la « caravane » et la « caravelle ». Simultanément se développent des escales fluviales qui, à la longue, sont devenues des villes qui s'échelonnent aujourd'hui le long du fleuve comme : Rosso, Richard Toll, Dagana, Matam, Podor pour ne citer que ceux là. Saint-Louis qui était plus en aval jouait un rôle de commandement qui dépendait beaucoup des axes de circulation que sont le fleuve et la plaine alluviale.

A la fin du 19ème siècle, la plaine riveraine de la rive droite était sous le contrôle des émirats du Brakna et du Trazza. Les maures menaient des activités de plus en plus manifestes aux points de traite et leur « emprise intéressait les gommerais du sud mauritanien et du nord Sénégal ». L'influence des maures est aussi perceptible à travers la religion et les activités commerciales qui se déroulent dans les différents royaumes du Sénégal à l'époque. L'intervention des colons français et la conquête du Nord du Sénégal vont mettre un terme à cette situation chaotique. Une ère nouvelle s'annonçait: la colonisation.

c) la pénétration européenne ou l'ère de la colonisation

« La conquête coloniale a donné un coup d'arrêt à un siècle de crises internes et d'instabilité politique et d'affrontement entre les populations négro-africaines et les maures pour le contrôle des terres en rive gauche»30(*). Le Sénégal et la Mauritanie sont devenus des territoires conquis et font partie de l'empire colonial français. Ces deux territoires sont désormais séparés par des limites administratives définies par le gouvernement colonial. Au niveau des zones riveraines on assiste à de profondes mutations et des relations de toutes natures prospèrent entre les deux rives du fleuve. Ces dernières peuvent être lues comme étant les signes d'un brassage admis et encouragé par l'autorité coloniale.

La colonie de la Mauritanie aura Saint-Louis comme capitale d'où elle sera administrée. Il en sera ainsi jusqu' à son accession à la souveraineté internationale en 1960. Que la capitale de la colonie fût Saint-Louis, c'est sans doute là une explication de la présence de nombreux sénégalais dan le corps de l'administration mauritanienne. Ces fonctionnaires étaient surtout des saint-louisiens ou étaient des ressortissants des autres localités de la vallée31(*). Aux lendemains de la conquête déjà, le sud mauritanien est investi par les ressortissants sénégalais dont la présence sera renforcée.

Les échecs répétés de l'administration coloniale dans son projet de colonisation agricole dans le Walo ainsi que le développement amorcé dans le bassin arachidier sénégalais ont détourné les actions des colonisateurs vers l'intérieur du pays. La production marchande et le commerce sont de plus en plus polarisés par la capitale (Dakar). On assiste ainsi au dépérissement progressif du trafic fluvial. Saint-Louis dont le rôle a été d'approvisionner la colonie de la Mauritanie et des villes intérieurs dans la vallée ne joue plus qu'un rôle secondaire même pour ce qui concerne les villes du Delta qui lui sont géographiquement plus proches. La Mauritanie, région désertique, n'intéressait pas. Elle se retrouve presque délaissée et même marginalisée. Elle s'est tournée vers sa capitale administrative et vers les escales du fleuve Sénégal dont les économies ne sont pas mieux loties ; elles sont soit au ralenti ou tout à fait stagnantes.

La période de la colonisation est aussi marquée par l'implantation des communautés maures au Sénégal. «Elles investissent le petit commerce dans les villes et les villages du Sénégal »32(*).On peu aussi remarquer l'essor des affinités religieuses sénégalo-mauritaniennes grâce à la filiation maraboutique « khadres », « mourides », «  tijanes »33(*) etc.

Les deux colonies du Sénégal et de la Mauritanie, étaient aussi reliées par une intense activité de transport. BONARDEL. R. fait dans son ouvrage référence l'existence d'une activité aérienne entre les deux territoires et du dynamisme dont ces activités se prévalaient. Selon elle, elles assuraient le transport de passagers et surtout assuraient les approvisionnements urgents dans les villes intérieures mauritaniennes qui disposaient de pistes d'aviations à l'époque.

Un bref aperçu sur cette analyse montre ce que SAM. K. avait constaté « les échanges entre les deux rives du Sénégal datent bien avant l'installation des frontières issues du jeu colonial »34(*). Dans le même sillage, DIOP. M .C et DIOUF. M., cités par SAM K. (1996-1997) affirment que « les populations de la plaines riveraine du fleuve n'ont jamais pensé et vécu le fleuve comme une barrière. »35(*) Pour les deux auteurs la colonisation a même favorisé une fragmentation de l'espace constitué par le bassin du fleuve Sénégal par des délimitations frontalières superficielles qui constituent un obstacle à l'intégration.

2. Des indépendances nationales au conflit frontalier de 1989

a) La réalité des frontières nationales

Les années soixante sont témoins en Afrique de l'émergence et du développement de mouvements nationalistes plus ou mois exacerbés. Cette aspiration à la souveraineté est suivie d'un vaste mouvement d'indépendance. Les colonies du Sénégal et de la Mauritanie accédèrent presque toutes ensemble à l'indépendance. Pour le Sénégal, les services centraux de l'Etat sont transférés à Dakar. En ce qui concerne la Mauritanie, la nouvelle capitale sera Nouakchott au détriment de Saint-Louis. Les rapports entre les deux Etats nouvellement indépendants vont se détériorer au cours des ans. L'approvisionnement à partir de Saint-Louis des villes mauritaniennes va disparaître petit à petit même si une vie des relations est entretenue par la voie terrestre jusqu'au début des années 1970 grâce à l'ouverture de la grande route reliant l'ex capitale du Sénégal et la ville de Nouakchott.

Les frontières commencèrent alors à peser de tout leurs poids sur les relations entre les deux Etats. En 1966, la Mauritanie déicide de passer à une nationalisation de son commerce et de se départir de l'alliance douanière qui le liait avec le Sénégal. Cette alliance douanière faisait passer toutes les importations et exportations mauritaniennes par le Sénégal qui avait hérité de la colonisation d'une solide infrastructure portière. L'affirmation de son indépendance vis à vis du Sénégal est sans doute, plus que tout autre chose, l'expression de la souveraineté nationale. Les mêmes raisons l'amèneront à quitter la zone du franc de la Communauté Financière Africaine (f CFA), à créer sa banque centrale et à émettre sa monnaie: l' UGUYA Mauritanien (UM).

Dans le cadre géographique de la vallée, il existait une organisation économique et sociale essentiellement fondée sur les ethnies et leur statut dans la société en général. Pour l'individu, l'appartenance à une famille conférait un rôle et un statut dans l'ensemble social. Les familles étaient lignagères et « elles établissaient entre elles des relations de ségrégation par rapport à leur activités des ordres de prééminence différemment justifié, de liens de simple contact, des rapports de souveraineté, et de dominance ou de subordination à conséquence économique plus ou moins étendues.» On pouvait donc distinguer une certaine division du travail qui était le socle sur lequel reposait tout le système social avec des classes d'hommes libres, des hommes de caste et des esclaves.

Le prestige et la représentativités des familles dépendaient beaucoup de l'envergure des possessions en terre surtout celles du Walo, réputés plus fertiles et de loin les plus convoitées. Contrairement aux terres du « djiéry », les parties inondables du fleuve étaient dotées d'un régime foncier coutumier qui conférait le droit de propriété. Même après les indépendances et la définition des cadres nationaux qui les ont suivies, les populations de la vallée continuaient d'exercer ce droit coutumier sur ces superficies sans tenir compte des nouvelles limites imposées par la naissance des nouveaux Etats.

Les nouveaux gouvernements, aussi bien celui du Sénégal que celui de la Mauritanie, à la suite des gouvernements coloniaux, avaient eux aussi, acquis la conviction que le développement économique et social ne saurait se faire sans le développement de l'agriculture dans la zone de la vallée du fleuve sénégal. Cependant, il était clair que cette promotion de l'agriculture ne pouvait avoir lieu sans une modernisation du secteur qui, nécessairement, devait passer par la réalisation d'aménagements plus conformes à l'air du temps. La réalisation de ces ambitions étatiques se heurtait à une forme d'agriculture ancienne, fortement ancrée dans une tradition millénaire mais aussi et surtout à une nature juridique des terres, qui ne laissait pas aux Etats la liberté d'action sur le territoire.

Au Sénégal les autorités vont promulguer la loi sur le domaine national en 1964 mais en Mauritanie la gestion des terres est dévolue à l'autorité administrative.

-L'explication du conflit par la loi sur le domaine national

L'Etat du Sénégal a adopté au mois de juin 1964 une loi portant sur le domaine national. Cette loi avait comme objectif principal de permettre à l'Etat de réaliser la politique de planification et de développement du pays initiés après son accession à la souveraineté international. Elle lui a permis d'avoir, au moins, les coudées franches en annihilant les contraintes relatives au sol. En effet, la loi sur le domaine national fait de la Nation le propriétaire de plein droit de toutes les terres non classées et de celles qui n'ont pas été immatriculées avant l'entrée en vigueur de ladite loi. Elle aurait ainsi permis à la puissance publique de s'accaparer de presque 45% du territoire du pays.

Cette loi qui venait remettre en cause une coutume de plusieurs générations aura du mal à s'appliquer puisque contestée par les classes qui étaient les véritables détenteurs du pouvoir en milieu rural. L'Etat du Sénégal essayera de contourner ces difficultés en adoptant la loi sur la décentralisation de 1972. Il s'agit là d'une décentralisation administrative et territoriale qui donne le pouvoir à la communauté rurale par délégation de pouvoirs parmi lesquels celui de la gestion des terres. Le décret N° 80-86 /MINT/DCL du 29 janvier 1980 mettra cette loi en application et permet ainsi, aux conseils ruraux de gérer et de contrôler les zones de terroirs. Par la même occasion il sera confié à la SAED (société d'aménagement et d'exploitation des terres du Delta), la mise en valeur des zones pionnières dans la vallée36(*). A partir de se moment il à été plus loisible à l'Etat de mettre en oeuvre ses projets d'aménagement. En regardant cette loi, on peut dire qu'elle a été plus respectueuse et moins brutale pour les populations aussi bien sénégalaises que mauritaniennes. Puisque il faut aussi le souligner, les mauritaniens, même si c'est à des proportions plus faibles étaient propriétaires de terres sur la rive gauche. Il sera difficile de dire la même chose pour la gestion de l'administration mauritanienne des terres de la vallée.

-La gestion administrative des terres en Mauritanie

En Mauritanie l'attribution des terres en rive droite est dévolue à l'administration qui élabore et adopte des textes législatifs. C'est le cas de l'ordonnance N°83-127/CSMN du 05 juin 1983, du décret N°84-009 du 19janvier 1984 et circulaire N° 0005 avril 1984. Comme ont le verra ces textes n'eurent aucun mal a entrer en vigueur et se verront même appliquer par les représentants de l'administration mauritanienne dans la région de la vallée. En effet, « le préfet mauritanien de Bogué a décidé par arrêt N° 119/DB du 10 mai 1988 d'affecter des terres, neuf (9) lots de terrains de 20 à 689 ha à de nouveaux arrivants maures (béydanes) ». C'était là une mesure d'expropriation, de facto, des anciens propriétaires en l'occurrence les paysans négros mauritaniens et Haalpoulars. Les mouvements d'humeur ne se firent point attendre de la part des sénégalais qui revendiquaient leur droit de propriété coutumière. La négation de ce droit par la Mauritanie est un élément important et constitue un facteur essentiel dans la genèse du conflit.

En réalité, les programmes d'aménagement entrepris sur les deux rives n'ont pas pris suffisamment en compte le préoccupations des populations locales et surtout les rapports de celles ci avec la terre. Les réformes foncières de 1984 en Mauritanie sont venues mettre un terme sur le droit de propriété que détenaient les populations sénégalaises sur la rive gauche alors que, pendant ce temps là, au Sénégal, des mauritaniens étaient toujours en possession de terres qu'ils continuaient à exploiter. Les frustrations n'en étaient que plus exacerbées du coté des sénégalais.

L'attitude du gouvernement mauritanien a l'endroit des négros mauritaniens et surtout des Haalpoulars n'est pas étrangère au contrôle plus ou moins total des instances supérieurs de l'Etat par la composante arabo-bèrebère. En plus d'être au sommet de l'Etat elle détenait aussi le pouvoir économique notamment les secteurs du grand commerce et de l'industrie. Cette position stratégique pourrait expliquer l'utilisation de l'administration dans la « compétition et la rivalité ethnique ». Ceci a inévitablement aiguisé les sentiments de haine et augmenté les frustrations au sein des communautés marginalisées.

La dégradation des rapports entre les Haalpoulars et les Maures va s'accentuer surtout avec les crises politiques et économique du milieu des années 1980. Pour exprimer leur mécontentement et en guise de protestation il sera publié le « Manifeste du Negro mauritanien opprimé »  par le FLAM (Front de Libération de Africains de Mauritanie)37(*). Le FLAM sera accusé de tentative de coup d'Etat le 22 octobre 1987. Celle-ci conduira à l'arrestation de plusieurs personnes appartenants au mouvement surtout les Haalpoulars. Ce précédent sera aussi un argument pour réprimer une nouvelle fois des Haalpoulars lors du nouveau tentative de putsch survenu en Août 1988 alors qu' elle était cette fois ci le fait d' opposants du mouvement bassiste. L'année 1988 précédant l'année du déclanchement du conflit sera jalonnée de toute sorte d'incidents d'ampleurs différentes entre agriculteurs et pasteurs, entre populations noires et populations blanches, elle a été une année marquée par de fortes tensions dans les relations diplomatiques entre les deux Etats voisins.

-L'éclatement du conflit ou la mise a nu de la haine raciale

La superposition de petites querelles dans l'espace transfrontaliers sénégalo-mauritanien « du fait de l'organisation territoriale ancienne, des perspectives nouvelles créées par les nouvelles législations sur le foncier », s'ajoutant à ces point les arbitrages exercés sur les zones aménagées ont aboutit à l'explosion d'un conflit entre deux pays liés par l'histoire et la géographie et qui s'emblaient être voué  au même destin, un conflit aux relents fratricides

b) Une volonté d'intégration toujours exprimée

Malgré les différends qui les opposent, les deux pays n'ont pas cessé d'avoir des relations « privilégiées » tant au sommet qu'aux niveau de la base. Ces relations sont visibles à travers les nombreuses tentatives de mise en musique d'une politique d'intégration économique, sociale et culturelle. Au cours de l'histoire récente, les deux pays se sont regroupés dans des organisations inter étatiques qu'ils ont tous les deux contribué à mettre en place avec d' autre pays du Bassin pour favoriser l' unités des Etats et des populations autours de projets de développement économique et sociale commune. Les organisations mises sur pieds sont nombreuses mais leurs fortunes seront diverses avec des ambitions qui étaient presque à chaque fois identiques.

Ces manifestations de la volonté des Etats à l'intégration sont exprimées à travers la création, juste après leur accession à l'indépendance en juillet 1963 à Bamako (Mali), du Comité Inter Etat (CIE) pour l'aménagement du bassin du sénégal. C'est le CIE qui décidera plus tard du statut du fleuve Sénégal auquel il confère le statut de fleuve international. Il tombera vite en désuétude et sera remplacé, cinq années seulement après sa création, par l' OERS (l'Organisation des Etats Riverains du Sénégal) en 1968. L' OERS avait comme objectif majeur de « favoriser un climat de compréhension et de stimuler la solidarité entre les Etats », « de favoriser le développement et l'indépendance économique des Etats membres ainsi que leur progrès social », « de promouvoir et d'intensifier les échanges commerciaux, la circulation des personnes et des biens dans les Etats membres »38(*). Cette organisation, suite aux malentendus survenus entre sénégalais et guinéens sera contrainte à la disparition. Elle sera finalement « remplacée » en 1971 par l' OMVS (l'Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal). Elle sera portée sur les fonds baptismaux avec comme ambitions : « la promotion et la coordination des études et des travaux de mise en valeur des ressources du Bassin du fleuve Sénégal sur les territoires des Etats membres. » (Article premier de la convention créant l' OMVS)39(*). De toues les organisations qui l'on devancé dans le champ de l'intégration sous régionale, l' OMVS est la seule a avoir fait des réalisations concrètes dont la portée est ressentie par tous ses Etats membres. L'exemple le plus approprié est la construction des Barrages de Diama et de Manantali.

Les deux voisins ont aussi cheminé ensemble au sein de la CEDEAO (communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest) jusqu à ce la Mauritanie décide de la quitter en 1999. Il faut aussi signaler que la Mauritanie ne fait pas partie de UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine)40(*).

Malgré les efforts énormes et les intérêts communs poursuivis à travers ces organisations internationaux, les deux pays n'ont pas su se prémunir d'un conflit frontalier dont nous allons tenter de décrypter ici les tenants.

c) Le différend frontalier de 1989

Le conflit entre le Sénégal et la Mauritanie n'a pas seulement comme cause les débordements de 1989 à Diawara. Il prend racine dans la grande crise politico économique occasionnée par les politiques discriminatoires des autorités mauritaniennes à la défaveur des populations noires autochtones (Wolofs, Haalpoulars, Soninkés). Suite aux désastres causés par les multiples cycles de sécheresse qui ont jalonné les premières décennies de l'indépendance. En effet, l'économie mauritanienne est à dominante pastorale. Celle-ci se trouvait entre les mains des maures (blancs) qui ont toujours adopté la vie nomade. Les années 1968 et 1973 ont été caractérisées par des piques de sécheresse qui ont laminés les troupeaux des maures blancs. Ces pasteurs nomades habitués des zones plus au Nord, se retrouvent dans une situation qui leur impose de migrer vers le sud de la Mauritanie aux fins de profiter des terres du « walo ». Cette situation va se traduire par une concurrence accrue entre les populations autochtones et les nouveaux arrivants. Les cycles de sécheresse ont donné aux maures blancs des arguments supplémentaires de s'implanter d' autant plus que leurs modes de vie étaient rudement remis en cause par les aléas de la nature. La tendance à la sédentarisation devient pour beaucoup d'entre eux une option pour la survie. La population des nomades en Mauritanie passera de prés de 80% de la population totale dans les années 1970 à 23% en 198041(*). Cette sédentarisation n'a pas uniquement concerné les régions côtières qui enregistrent les densités les plus fortes. Elle intéresse aussi le Sud-ouest mauritanien qui est le prolongement naturel de la vallée du fleuve. Ce vaste mouvement de sédentarisation a beaucoup influencé la structuration économique et sociale dans l'ensemble de la vallée.

Les maures blancs (béydanes) vont exercer une pression de plus en plus grande sur des terres qui, traditionnellement, n'étaient pas les leurres. Par ailleurs, leur principale activité, l'élevage, va progressivement être remplacée par l'agriculture. Naturellement la méfiance allait grandissante chez les occupants traditionnels des terres de la vallée plus particulièrement les Haalpoulars et les Wolofs. Ces populations habitaient la rive gauche mais détenaient des possessions coutumières sur les terres de la rive droite qu'ils ont pendant longtemps exploité.

Toute cette situation découle de la démultiplication des enjeux dans la région. Comme on pouvait bien s'y attendre, ils n'ont pas laissé les autorités politiques indifférentes. Un signe évident de leur prise de conscience, est l'organisation et la tenue de rencontres entre les représentants déconcentrées des deux gouvernements dans la région. En effet, le 28 Août 1988, auront lieux à Aleg (Mauritanie) des assises qui ont regroupés le gouverneur de la région de Saint-Louis et les gouverneurs d'Aleg, du Gorgol, et de Rosso Mauritanie. Cette rencontre avait débouché sur la signature d'un accord sur cinq points saillants :

1) création d'une commission mixe chargée de recenser les terres exploitées par les ressortissants sénégalais en terre mauritaniennes et vice versa.

2) intégration des ressortissants sénégalais en Mauritanie dont les terres ont fait partie des programmes d'aménagement dans les zones aménagées.

3) maintient du statu quo partout où les aménagements n'ont pas été effectués, c'est à dire les occupants conservent leurs terres.

4) Libre circulation des biens et des personnes entre et sur les deux rives

5) Les gouverneurs ayant participé à cette rencontre organiseraient des tournées conjointes dans les localités des départements sénégalais (Matam, Podor, Dagana) et mauritaniennes (Kaédi, Bogué) pour expliquer les accords d'Aleg aux populations et calmer les esprits.42(*)

Comme le souligne MAIGA, ces accords auront beaucoup de mal à être appliqués par les deux parties. Du même coup, les populations n'étant pas très bien informées et souvent n'étant même pas au fait des dits accords, il va sans dire que, les incidents n'ont donc pas cessés d'exister entre les deux parties et de détériorer l'état de leurs relations.

Un regard sur cette analyse ne faite que confirmer l'idée que le conflit entre le Sénégal et la Mauritanie a aussi comme fondement la question du foncier. Ce dernier en est, sans doute, le principal élément d'explication.

L'incident qui met le feu aux poudres survient à Diawara, un village du département de Bakel, suite à une simple confrontation entre des cultivateurs et des pasteurs au mois d'avril 1989. Ce qui était au début une simple altercation va dégénérer en un conflit sanglant où seront massacrés des dizaines de milliers de citoyens appartenants aux deux pays43(*) sans compter les immenses pertes en biens matériels et immatériels. Tout semble être parti de l'intervention des gardes frontalières mauritaniennes qui vont abattre deux sénégalais et prendre aussi de nombreux autres en otage à la préfecture de Silibabi (Mauritanie). A cette répression musclée des autorités mauritaniennes sur des sénégalais, va suivre un vaste mouvement d'humeur qui très vite se transformera en des émeutes qui vont rapidement gagner les autres localités de la vallée mais surtout les capitales des deux pays.

Au Sénégal ont s'en prit surtout aux boutiquiers maures facilement repérables par l'activité. Des commerçants maures ont été dépouillés de leurs biens au cours des scènes de pillage. Nombre d'entre eux seront aussi victime de lynchage par des foules hystériques en soif de vengeance.

Le mois d'avril aura été aussi très chaud pour les milliers de ressortissants sénégalais vivants, en grande partie, dans les quartiers pauvres de Nouakchott. Ils seront victimes de nombreux sévices. Beaucoup seront tués, des milliers d'autres blessés et mutilés. A l'époque de nombreuses témoignages recueillis à chaud par la presse auprès des premiers réfugies faisait état d'une complicité de l'Etat mauritanien dans les exactions commises contre les sénégalais. Pour les plus extrémistes, il aurait même organisé les massacres. Ce qu'il faut retenir c'est que: au cours des événements de 1989, de nombreuses personnes seront déplacées dans les deux sens de la frontière. Des populations furent expulsées de Mauritanie alors qu'elles pouvaient attester d'une présence en terre mauritanienne antérieure aux indépendances nationales. Selon SAM. Kh. (1996-1997)44(*) 60000 négro mauritaniens se retrouveront sur la rive gauche et 15000 autres au Mali. Se considérant comme des mauritaniens ils se retrouverons au Sénégal comme des réfugiés. D'ailleurs il est difficile de les qualifier d'où cette profusion de vocabulaire pour les désigner: « réfugiés », « rapatriés », « refoulés »45(*). C'est là toute l'explication des difficultés qu'ont éprouvé les autorités à leur donner une nationalité et simplement à régulariser leur situation. Les deux gouvernements vont mettre un terme à leurs relations diplomatiques suite ces événements tragiques.

Le conflit de 1989 ont surviennent dans un contexte politique et ethnique bien particulier. Ils ont beaucoup affectés les relations diplomatiques et simplement de voisinage entre les deux nations. Ils ont aussi permis de prendre la mesure des différances qui les sépares et ont démontré combien le chemin qu'il restait à parcourir était long dans la réussite de l'intégration des deux pays.

Le conflit va remettre au goût du jour la question de la frontière longtemps éludée par les deux parties. C' set là une question difficile à laquelle devront répondre les autorités. Suites aux événements le Sénégal a évoque la question en en brandissant un décret datant du 08 Décembre 1933 et stipulait que la frontière entre les deux colonies du Sénégal et de la Mauritanie passait sur la rive droite du fleuve sénégal. Ainsi, compte tenu des dispositions régissant les deux Etats de l'Organisation de l' Unité Africaine (OUA) aujourd'hui transformé en Union Africaine (UA) sur le principe sacro-saint de l' « intangibilité des frontières »46(*) le fleuve Sénégal devrait normalement revenir au Sénégal ainsi qu'une patrie des terres longeant le fleuve sur sa rive droite. A ce décret, les autorités mauritaniennes opposeront un autre décret datant de 1905 signé par l'administration coloniale faisant du fleuve la frontière naturelle entre les deux pays et qui plus est n'aurait pas été abrogé. Ce qui rend le problème du tracé des frontières très complexe pour espérer une résolution facile.

Quoi qu'il en soit, les deux gouvernements reprendront leurs relations diplomatiques le 02 mai 1992 sans avoir résolu « l'équation frontière » de même, la situation des populations expulsées est toujours à l'ordre du jour.

Malgré le réchauffement des relations diplomatiques, la reprise des échanges officiels et le redéploiement de la coopération, les deux Etats ne sont pas à l'abri de problèmes dont la source principale ne serait rien d'autre que les contentieux non encore vidés. Les responsables au sommet ont sans doute affiché la volonté de surpasser et de transcender les questions difficiles mais tel n'est certainement pas le cas pour les milliers de personnes qui ont toujours le sentiment d'avoir été spoliées de leurs terres, dépossédées de leurs biens. D'ailleurs si le problème des réfugiés peine à être solutionné c'est certainement à cause des multiples écueils sur les quelles buttent les autorités pour la satisfaction des conditions que posent ces derniers pour leur retour en terres mauritaniennes.

CHAPITRE III: LES FACTEURS DE DEVELOPPEMENT DES ECHANGES TRANSFRONTALIERS

Les échanges transfrontaliers sont essentiels pour le développement de la ville de Rosso Sénégal. Ils en ont fait, une ville célèbre, dynamique,  active et fluide. Comme toute activité de développement, leur extension est lié à un ensemble de facteurs aussi bien endogènes qu'exogènes qui, finalement, en définissent les aspects et en orientent l'évolution. Les relations pouvant exister entre les différents aspects tant géographiques, économiques, sociales, culturelles, géopolitiques et bien d'autres, ont des impacts qui peuvent être mitigés, pour dire en d'autres termes qu'elles peuvent militer, oui ou non, en sa faveur. Nous allons, dans le contexte précis de notre cadre d'étude, mesurer le poids de chacun de ces facteurs sur l'essor des échanges transfrontaliers.

1. Les aspects politiques des échanges transfrontaliers.

Les échanges transfrontaliers comportent une dimension politique. Ainsi, ils apparaissent comme des indicateurs qui permettent de prendre conscience et de mieux évaluer «l'état de dépendance qui peut subsister entre deux Etats qui partagent une même frontière»47(*). Cette relation découle du fait que les Etats n'ont pas les mêmes niveaux de développement et restent forcément liés par un système d' interdépendance qui résulte de la différence entre leurs ressources respectives, leurs types de production, leurs politiques économiques (qui ne sont pas toujours identiques), la nature de leurs demandes sociales, les exigences que leurs imposent les options de développement qu'ils ont adoptées et les exigences de la géopolitique (qui les poussent à nouer et à maintenir des relations avec d'autres Etats).

a) Une exigence géopolitique

Comme le dit si bien SINJOUN48(*), « les relations internationales africaines sont marquées par l'interdépendance entre les Etats et les acteurs internationaux ». Cette dépendance interétatique est un phénomène connu de tous. Elle entre dans le cours normal de la marche des nations. Cependant, tous les lieux du territoire national ne sont pas, au même niveau, concernés. Elle devient une réalité vécue, au quotidien au sein des espaces transfrontaliers et surtout dans les villes et villages qui les composent. La frontière est une réalité politique. Elle structure, à la limite, la vie économique et sociale des cités bordières grâce à l'installation et au développement d'activités qui accompagnent les échanges.

C'est dans cette logique politique que s'inscrivent les Etats du Sénégal et celui de la Mauritanie qui, depuis leurs indépendances respectives, ont cultivé des relations diplomatiques et économiques qui ont permis l'existence d'un environnement propice aux échanges entre leurs deux territoires.

L'une des nombreuses conditions nécessaires à l'installation d'une activité transfrontalière dense et dynamique est, de tout évidence, l'existence de relations diplomatiques « solides », de l'effectivité d'une vie des relations (voies de communication) favorable aux déplacements, des conditions de paix qui font qu'une frontière est rigide ou souple pouvant occasionner une discontinuité ou un prolongement du territoire.

b) La complémentarité territoriale

En ce qui concerne les Etats du Sénégal et de la Mauritanie, il  a toujours existé des échanges transfrontaliers. Depuis la période coloniale jusqu'aux premières décennies de l'indépendances, les deux pays en dépit d'une certaine distance due à des raisons politiques et culturelles ont toujours manifesté un certain intérêt au système de leur échanges. La crise de 1989 a marqué un coup d'arrêt dans ces échanges. Les rappels des ambassadeurs respectifs consacraient ainsi la rupture diplomatique entre les deux voisins. Une rupture à la quelle fera suite, la fermeture des frontières séparant les deux pays pendant plus de trois ans (de 1989 à 1992). Ces mesures ont été consécutives au conflit ayant opposé les deux pays dont nous avons fait état dans les pages précédentes. Elles vont paralyser l'économie des régions périphériques du Nord du Sénégal et du Sud de la Mauritanie. De l'avis de M.D49(*)., habitant Rosso Sénégal et conseiller à la mairie de la ville :

« Les années de la crise ont été les plus difficiles que j'ai eu à vivre ici. En effet, nous avions perdu l'habitude de nous approvisionner au Sénégal en ce qui concerne l'essentiel de nos besoins aussi bien alimentaire, d'habillement comme bien d'autres d'autre. En plus de cela, nous ne disposions plus d'un pouvoir d'achat étant donné que l'essentiel d'entre nous a une activité qui est soit le commerce ou les affaires qui dépendent de l'ouverture de la frontière. Beaucoup travaillent même en Mauritanie. Ajouté à cela les nombreuses personnes qu'on avait rapatriées de la Mauritanie, Rosso était devenu très difficile à vivre »50(*).

Ce témoignage vient démontrer éloquemment comment une crise politique peut influer négativement sur les échanges transfrontaliers.

Cependant, depuis la restauration des relations diplomatiques, les échanges ont repris de plus belle et l'économie des deux villes s'est restructurée sur de nouvelles bases. Les secteurs d'activité dépendants de la frontière ont recommencé à s'activer à peine les barrières enlevées. Ces signaux, viennent confirmer que la définition de politiques de coopération et d'intégration économique contribuent à rendre plus souple et plus flexible l'ensemble du système des échanges.

c) Les différences des politiques nationales

Le développement des échanges transfrontaliers dépend des différentes politiques étatiques qui sont déroulées de part et d'autre des frontières notamment en matière de la protection des territoires et surtout de gestion économique. Il s'agit de politiques qui entrent dans la gestion légitime de ces espaces par les Etats auxquels il revient la tâche de contrôler et de surveiller leurs territoires nationaux. Les politiques économiques et commerciales divergentes font partie des raisons du déploiement des échanges transfrontaliers.

Le fait politique essentiel est simplement l'existence d'une frontière. C'est un élément politique et géographique qui rend possible et, est d' ailleurs, la seule condition, sans laquelle, il n'existerait pas les besoins d'échanger avec d'autres territoires dans la mesure où elle met en relief les avantages comparatifs.

Les facteurs géographiques des échanges transfrontaliers

Les échanges transfrontaliers dépendent de facteurs géographiques qui sont très déterminants en fonction du rôle qu'ils jouent. Certaines particularités géographiques peuvent se transformer en des conditions susceptibles d'impulser le dynamisme nécessaire à leur développement. Aussi, les éléments comme la position géographique, la situation de la ville de Rosso Sénégal au niveau de l'armature urbaine régionale, les caractéristiques physiques du milieu, les avantages de la proximité et de la localisation sont fondamentales dans les rapports d'échanges entre les deux villes voisines et entre celles-ci et leur environnement immédiat et/ ou lointain.

a) Une ville carrefour et un passage obligé

Sur une distance de plus de 650 Km de frontière d'eau, Rosso est l'un des rares points de passage disposant d'un équipement sous la forme d'un bâtiment fluvial navigant, à même de faire certains types de transport. Le bac, pour le citer, est un bâtiment de transport à tirant d'eau peu profond. Il est spécialisé dans la traversée des rivières et des fleuves. Au niveau de Rosso il permet de procéder au transport de camions, de véhicules légers, des personnes et des biens. La présence sur cette localité de ce moyen de transport spécifique, fait que Rosso est devenue un lieu de passage obligé, une plaque tournante où des échanges de toutes natures se font.

Comme la quasi-totalité des villes et villages frontaliers, Rosso Sénégal dispose aussi d'une importante flotte piroguière. Aujourd'hui avec le recul de la pêche fluviale, ces pirogues participent au transport et assurent le déplacement des personnes et des biens entre les deux rives. Dans les autres localités frontalières elles constituent les seuls moyens de transport disponibles sur le fleuve.

La ville de Rosso garde une place centrale dans l'ensemble du dispositif des échanges transfrontaliers. Elle tire partie de sa proximité avec la ville de Rosso Mauritanie dont elle est « la soeur jumelle ». Cette dernière est de taille considérable et renferme des responsabilités importantes dans l'organisation de l'armature urbaine mauritanienne.

b) La position géographique avantageuse de Rosso Mauritanie

Rosso Mauritanie occupe une position stratégique et éminente dans le découpage administratif et territorial du pays. Elle est chef lieu de sa région : le Trazza qui fait partie des plus peuplés de la Mauritanie. Au lendemain des indépendances elle faisait partie des villes qui affichaient les poids démographiques les plus considérables en Mauritanie. C'est en effet la région du fleuve. Ses terres fertiles sont très convoitées par des populations d'agriculteurs et d'éleveurs. Elle est aussi l'une des parties les moins désertiques de la Mauritanie même si elle est logée au coeur du Sahel. Rosso Mauritanie bénéficie aussi de conditions de localisation avantageuses. Elle n'est distante de la capitale administrative, Nouakchott, que de 200 Km, par laquelle elle est raccordée par une infrastructure routière fonctionnelle. La ville se trouve ainsi au coeur du système des échanges commerciaux entre les deux pays mais aussi entre la Mauritanie et d'autres pays à travers le monde. Une partie importante des importations mauritaniennes transite par le port de Dakar. De là, elles sont acheminées par route vers la Mauritanie dont la porte de passage est les deux Rosso.

c) Rosso Sénégal : Une ville plus tournée vers son homologue mauritanien

En ce qui concerne le cas de Rosso Sénégal, une analyse géographique de l'armature urbaine du Delta nous autorise à dire que la ville, malgré sa position un peu enclavée, est un maillon fort du système urbain de la vallée du fleuve sénégal. Rosso Sénégal se démarque des autres villes qui sont presque toutes positionnées sur la route nationale à laquelle elle est reliée par une bretelle vétuste. Rosso Sénégal semble être plus tournée vers sa soeur jumelle de la rive gauche avec laquelle elle entretient un ensemble de relations qui sont le soubassement d'une complémentarité économique structurante.

3. Les aspects économiques des échanges transfrontaliers.

Pour avoir une meilleure compréhension du système des échanges transfrontaliers, il est important de parler des aspects économiques qui les fondent. C'est un ensemble de facteurs qui rendent compte du comportement du système des échanges.

a) L'intégration économique «de fait »

Les échanges qui peuvent se dérouler entre deux localités frontalières sont difficilement mesurables aussi bien quantitativement que qualitativement. Il est aussi ardu de rendre compte des composantes des biens et produits qui sont échangés. Toutefois, une observation objective et pointue de ce qui se passe aux frontières permet d'affirmer que les échanges transfrontaliers occupent une place de premier rang et sont déterminants dans la structuration et l'organisation des économies locales des villes bordières. Il en est ainsi pour l'économie locale de la ville de Rosso Sénégal.

Les difficultés rencontrées pour évaluer et pour déterminer l'impact des échanges transfrontaliers sur les économies domestiques sont dues au fait que les avantages qui y sont tirés par les populations fluctuent et se font souvent au profit des uns aux détriments des autres. Cela dit, pour les Etats, les échanges transfrontaliers sont, à l'évidence, des sources de production de richesse, des créneaux générateurs de revenus tant pour les populations que pour les administrations, aussi bien locales que centrales, et contribuent indubitablement à l'essor des villes.

Les régions frontalières comme le souligne IGUE O. J.51(*) « malgré leur appartenance à des pays distincts, sont caractérisés par leur intégration économique plus poussée », articulée autour des échanges formels, officiels et des échanges non formels voir clandestins. Ces échanges s'appuient sur des éléments multiples tels que : -les flux de produits passants d'un Etat à un autre au grés des opportunités, - les différences de politiques économiques entre voisins. Plus ces opportunités sont nombreuses et garanties, plus les échanges sont dynamiques.

b) Le différentiel économique

Un autre des facteurs du dynamisme des échanges est aussi l'existence d'un « différentiel économique». Celui-ci est souvent « engendré par la présence de politiques monétaires différentes qui sont à l'origine de la présence de deux monnaies » selon Kate MEAHGER.52(*) Dans la mesure où le commerce transfrontalier se déploie dans l'informel, IGUE explique que le mouvement des échanges est fonction de la répartition inégale des zones de monnaie convertibles telle que la zone CFA. Dans un contexte de rareté des devises, les zones à monnaies convertibles comme la zone franc attirent les produits venants des autres pays à monnaie inconvertible. Pour MEAHGER, « c'est par le biais du taux de change officiel que l'attraction des monnaies convertibles sur les produits... des pays voisins se traduit en prix incitatifs ». Par exemple :

1kg de sucre sénégalais vaut 450f CFA

1Kg de sucre « mauritanien » est vendu 250 à 300f CFA.

50kg de riz blanc sénégalais coûte entre 7500 et 9000 f CFA au Sénégal

======================= entre 9500 et 11 000f CFA en Mauritanie

Comme le dit NAUDET cité par MEHGER, «  la valeur des monnaies est primée grâce à l'avantage transactionnel qu'elles confèrent. Une prime de même genre s'applique en faveur de la monnaie des Etats aux politiques d'importation particulièrement libérales ». La présence d'un « différentiel économique » est un paramètre incitatif dans le choix de la fréquentation d'un marché. Elle détermine le sens de cette fréquentation ; les marchands et les clients sont guidés, entre autres raisons, par la possibilité d'accès à des prix avantageux, par la quête de produits rares et prisés par les consommateurs générateurs de valeurs marchandes plus importantes et créateurs de bénéfices. Plus le « différentiel économique » est important plus les échanges se développent avec ou non la présence des barrières.

L'essor de la place de Rosso Sénégal est forcement à lier à l'existence de ce différentiel qu'a favorisé les présences du Franc de la Communauté financière Africaine (f CFA) monnaie pratiquée au Sénégal et de UGUIYA (UM) monnaie de la République Islamique de Mauritanie. Cette situation peu aussi avoir un rapport étroit avec la situation économique globale de la vallée pendant la décennie 1980-1990.

c) Les effets de la crise économique

Les années 1990 ont coïncidé avec une augmentation relative des échanges commerciaux entre les pays de l'Afrique Occidentale. Il s'agit surtout du développement du commerce des produits agricoles, de fabrication artisanale ou industrielle originaires de la région. On assiste aussi, pendant cette période, à une augmentation des échanges qui est le résultat des politiques de libéralisation économique adoptées dans les programmes régionaux d'ajustement structurels, de la dévaluation du f CFA en Janvier 1994, de l'amélioration des procédures d'importation et d'exportation devenues moins contraignantes. Tous ces facteurs énumérés ont beaucoup contribué à l'augmentation du volume des échanges entre les pays de l'Afrique Occidentale. Une augmentation qui trouve aussi ses racines ailleurs.

Pendant cette période, les Etats de l'Afrique de l'Ouest affichent des taux de croissance démographique très élevés. A cela s'ajoute une tendance nouvelle à l'urbanisation ; phénomène constaté depuis la fin de le seconde Guerre Mondiale. L'accélération de ces dernières années est imputable aux crises économiques et écologiques aigues dont la région a été le théâtre dernièrement. Ainsi le nombre des citadins ne cesse d'augmenter créant, dans la foulée, de nouveaux besoins à satisfaire par des Etats économiquement affaiblis et frappés d'impécuniosité. Ces crises vont entraîner des changements dans les modes d'intervention des bailleurs de fonds mais aussi dans les critères de financement du développement. Les modifications vont concerner les subventions aux produits nationaux et internationaux.

L'environnement économique africain des années 1990 est très important pour comprendre l'évolution des économies africaines. Il est presque difficile de traiter des problématiques actuelles sans jeter un regard sur les importantes mesures qu'imposèrent les bailleurs de Fond,- les institutions de Bretton Woods (Fond Monétaire Internationale, Banque Mondiale)- aux nations du Tiers monde. Le Sénégal faisant partie des pays concernés n'a pas échappé à cette batterie de mesures ainsi combinée :

« La dévaluation des différentes monnaies, l'adoption d'un taux de change plus flexible, la réduction ou la suppression des taxes à l'exportation, l' allègement ou la suppression des contrôles à l'importation, la privatisation ou la réforme des entreprises publiques, la suppression du contrôle des prix à l'importation, la réduction des effectifs du secteur publique53(*) ».

L'application de ces injonctions des institutions financières ont diminué substantiellement les effectifs de la fonction publique qui, pendant longtemps, à été la principale pourvoyeuse d'emploies en milieu urbain, entraînant brutalement au chômage des milliers de citoyens, conduisant, par la même occasion, une réduction considérable des revenus dans les ménages tout en accentuant la pauvreté dans les villes. En plus de la fonction publique, d'autres secteurs de l'économie sont aussi touchés. L'agriculture n'a pas dérogé à la règle avec le volet PASA (programme d'ajustement du secteur Agricole). La vallée du fleuve Sénégal a été concernée par ce volet qui a conduit un désengagement presque total de la Puissance publique du secteur agricole. Les entreprises publiques (SAED) dont la fonction était de soutenir l'agriculture ont vu une partie de leurs compétences transférées vers le secteur privé. Aujourd'hui, le secteur agricole a fini de montrer ses limites quant à ses capacités de développement sans l'aide de l'Etat. Dans le contexte précis du Delta, sa finalité reposait aussi au règlement de la crise de l'emploie. Le constat est claire, ses aptitudes d'absorption des demandes d'emploie sont faibles. Pierre angulaire du développement économique et social de la vallée, l'agriculture, au même titre que l'industrie, n'a pu résoudre les problèmes du chômage qu'imparfaitement.

L'industrie, est sans doute la principale pourvoyeuse d'emplois salariés dans le Delta. Avec les programmes d'aménagement hydro-agricols et agroindustriels initiés dans la vallée, le gouvernement du Sénégal a montré une volonté d'accorder la priorité au secteur moderne. Tous les symptômes d'affaiblissement montrent que ce secteur a atteint ses limites. L'installation de la Compagnie Sucrière sénégalaise (CSS) à Richard Toll, ville voisine de Rosso Sénégal, ne peut répondre à toutes les sollicitations, qui sont exprimées du fait de l'attractivité qu'elle exerce.

Voici, un ensemble de facteurs d'ordre économique qui contribuent à expliquer l'augmentation des échanges entre les deux Etats mais surtout le recrutement de nouveaux acteurs par les activités transfrontalières. Ces dernières recèlent des opportunités manifestes de travail, ce sont aussi des sources potentiels de revenus pour les milliers de sans emploies en quête du pain quotidien. Les activités transfrontalières prennent un cachet officiel, certes, seulement le fait le plus important est perceptible dans la recrudescence des flux informels. Nous le verrons plus loin, ils constituent le support de l'essentiel du commerce qui fait intervenir des acteurs qui ont une perception propre et singulière des relations internationales.

4. Les aspects humains : une variable centrale dans les échanges transfrontaliers.

a) Identité des peuples et des cultures

 « Un pays fait son histoire mais subit sa géographie ». Les populations qui habitent une frontière sont souvent amenées à vivre en étroite symbiose de par leurs cultures, leurs langues, leurs cadres de pensée, leurs valeurs sociales et religieuses qui recoupent des points identiques. Comme nous avons essayé de le montrer dans l'étude des composantes de la population des deux pays, il transparaît clairement que, les communautés vivantes au Nord du Sénégal et au Sud de la Mauritanie n'ont pas renié leurs appartenances ethniques et culturelles qu'elles continuent de conserver jusqu' à présent. Les échanges transfrontaliers sont souvent le fait des populations riveraines. Ici la notion de nationalité est bien présente mais y a une autre valeur toute particulière. Les populations changent de nationalité en fonction des opportunités. Dans certains écrits on parle de ces citoyens comme étant des citoyens transnationaux. Ils sont autant sénégalais que mauritaniens. Pour preuve, au niveau de la frontière, il n'est pas rare de rencontrer des doubles nationalités. Elles sont nombreuses, les individus qui sont à même de présenter aussi bien une carte d'identité sénégalaise au Sénégal et une autre mauritanienne sur le territoire de ce pays. Pour ceux qui le font, l'argument principal est la parade face aux tracasseries qui sont liées aux modalités de traversée et de séjours.

b) Une gestion « souple » de la circulation entre les deux villes voisines

Depuis la fin de la crise sénégalo-mauritanienne en 1992, l'Etat mauritanien exige aux étrangers (sénégalais) souhaitant se rendre sur son territoire de disposer de la somme de 35.000 FCFA communément appelée « devise » pour pouvoir disposer d'un droit de séjours. Cependant il faut noter que cette mesure ne concerne pas les voyageurs qui ont une autorisation de se rendre uniquement à Rosso Mauritanie. Pour ces derniers il suffit de tout juste disposer : d'un carnet de vaccination attestant de l'état de santé normal du voyageur, d'une carte nationale d'identité et d'une autorisation de circuler délivrée par la municipalité de Rosso Sénégal. Cela revient à dire que l'entrée à Rosso Mauritanie est moins contraignante et n'est pas soumise à cette conditionnalité de la « devise ». Les liens sociaux entre les populations des deux rives ont sans doute eu raison des autorités.

Selon Emmanuel GREGOIRE, dans son analyse des périphéries du Niger, « les espaces frontaliers sont aussi caractérisés par les liens familiaux qui peuvent exister entre citoyens de différents pays et les multiples relations qu'ils entretiennent sont les bases sociales »54(*)  des échanges transfrontaliers. La densité de ces liens constitue un élément déterminant. Elle est même une condition de performance des échanges surtout ceux relatifs au commerce. Au terme d'une étude sur « les espaces d'échange, et les territoires en Afrique  de l'ouest », A. LAMBERT reprit par Karine BENNAFLA, note « l'appartenance des africains à des espaces multiples (culturel, cultuel, politique, religieux, marchands, national) et l'usage circonstanciel donc distendu avec le territoire national ». Pour LAMBERT, « les acteurs sociaux et économiques ont le sentiment d'être membre de d'une nation mais ils s'inscrivent en même temps à travers leur groupe de parent, leurs confréries religieuses, leur communauté marchandes, leur appartenance ethnique et régionale, dans des espaces qui dépassent le cadre des Etats »55(*). Selon que la conjoncture leur soit favorable ou non ils mobilisent l'un ou l'autre de ces modes d'appartenance.

Comme montré dans la partie historique des relations entre les deux voisins, les populations de la région que nous étudions sont les mêmes avec celles du sud mauritanien si on prend en considération des critères tels que l'ethnie, la langue, les valeurs sociales, les valeurs culturelles, les modes de production, les systèmes de valeurs. L'aspect humain des échanges transfrontaliers ressort plus nettement si nous les appréhendons dans leur dimension historique. Comme dans beaucoup d'espaces frontaliers, ici aussi on constate que la proximité socio culturelle, socio linguistiques est mis à contribution dans les relations qui se déroulent entre les deux entités. Ils constituent un terreau fertile pour un développement solide et solidaire des échanges transfrontaliers.

c) Essai d'identification du contenu des échanges

Le commerce transfrontalier implique l'échange de produits et de marchandises qui n'ont pas les mêmes valeurs marchandes selon qu'on est sur l'un ou l'autre des marchés. Les commerçants et les populations qui s'adonnent à l'activité commerciale, jouent sur le prix des marchandises mais aussi sur la nature des demandes exprimées de part et d'autre. Les deux pays n'ont pas les mêmes ressources, n'ont pas les mêmes politiques d'importation et d'exportation, n'édictent pas les mêmes lois pour le contrôle des frontières et les taxes sur les produits ne sont pas aux mêmes taux selon qu'on est sur la rive gauche ou sur la rive droite. Ainsi nous assistons à la formation d'un avantage comparatif qui peut être, une conséquence des spécialités de production qui sont propres aux pays ou bien qui découle des disparités notées sur les différentes politiques économiques. La présence de ces deux situations conduit à une diversité des produits et marchandises qui sont le contenu des échanges entre les pays.

Les produits échangés à la frontière sénégalo-mauritanienne sont très nombreux et englobent presque toutes les catégories. On y trouve qui d'origines agricoles, manufacturés, des matières cosmétiques, des matériels électroniques et électroménagers etc.

Ce qu'ont peut dire d' emblé c'est que les deux pays n'offrent pas les mêmes types de marchandises. En effet, le Sénégal présente plus des produits agricoles, plus précisément des produits vivriers provenant du secteur de l'agriculture et de ses dérivés. Quand à la Mauritanie, elle semble se spécialiser dans la fourniture des produits manufacturés. Pourtant, la Mauritanie n'est pas plus industrialisée que le Sénégal. Seulement, sa politique commerciale, favorise les importations ce qui participe à une libéralisation plus poussée et à une ouverture vers des marchés d'importations plus diversifiés. Cette ouverture du marché mauritanien se remarque par la gamme très étendue des produits qui sont proposés sur le marché de Rosso.

Les populations se souciant plus de la disponibilité de la marchandise et aux possibilités de son acquisition à des prix abordables que sur la qualité viennent faire leur marché.

Tableau 2 : Produits qui proviennent de Rosso Mauritanie.

TYPES DE PRODUIT

COMPOSANTES

Produits alimentaires

-Farine,

-canettes (jus, sirops, boissons gazeuses)

-Lait en poudre, lait concentré,

-Huile de cuisine,

-Tomates concentré,

- Thé, sucre cristallisé,

- Viande (poulet de chaire etc.)

Ustensiles de maison

- Ustensiles de cuisine,

- Verroteries de maison,

-Matériel de décoration d'intérieur

Produits cosmétiques

-Crèmes et laits de beauté,

-Tubes de dépigmentation

-Parfums, savons, détergents

Matériels électroniques :

-Téléviseurs,

-Magnétophones,

-lecteurs CD, DVD et VCD,

-Téléphones portables et

- Autres gadgets électroniques.

Matériels mécaniques :

- Voitures, pièces détachées, etc.

Produits pétroliers :

- Essence, gasoil, etc.

Atres types de produits :

- Tissus (wax, khartoum, basin, etc.)

- Matelas mousse, moquettes tapis de prière, - Tapis de décoration, coussins,

- Produits artisanaux en cuire).

- Produits pharmaceutiques (médicaments.)

Source : données de l'enquête 2005

Tableau 3 : Les produits sénégalais s'exportant en Mauritanie

Produits agricoles :

-Riz (paddy ou décortiquée),

-Patate douce,

-Tomates fraîches,

-Produits fruitiers (Mangues)

-Aliments de bétail (« ripasse », « rakal »)

Matériaux de construction :

-Ciment,

-Fer,

-Bois d'oeuvre,

Produits énergétiques 

-Gaz butane,

Matières plastiques

-Chaises,

-Ustensiles de maisons,

-Divers récipients en plastique

Source : Résultats de l'enquête (2005)

Voici de façon globale le contenu des marchandises échangées à Rosso. Cependant, pour ce qui concerne les produits entrants au Sénégal, nous en avons certains dont le trafic est interdit par la législation en vigueur en la matière. C'est le cas du sucre cristallisé, de la tomate concentrée, des médicaments des stupéfiants etc. En effet, le Sénégal produit du sucre via la Compagnie Sucrière Sénégalaise qui se situe dans la ville voisine de Rosso Sénégal : Richard Toll. De même, la SOCAS fabrique le double concentré de tomate. Une autorisation du trafic de ces deux produits, menacerait la vie de ces entreprises et mettrait en péril, l'emploie de milliers de travailleurs dans la région du Delta. C' est pourquoi les trafiquants de ces produits sont traqués par les agents de la douane. Cependant, il faut souligner que le sucre qui vient de la Mauritanie est moins cher que celui produit au Sénégal.

Cette différence sur les prix incite les populations, conscientes ou non des méfaits de leurs actes sur l'économie du pays, de s'approvisionner en produit mauritaniens.

Concernant les produits qui partent du Sénégal, on note qu'ils sont constitués pour une large part des produits de l'agriculture et des dérivés de celles ci. Rosso Mauritanie est devenue ainsi un débouché pour la production agricole de sa voisine. Au delà de la ville de Rosso c'est pratiquement la Mauritanie qui est un marché d'écoulement des productions agricoles de la vallée. En effet, comme nous le savons, la Mauritanie est un pays désertique. C'est aussi un pays à longue tradition pastorale. La production agricole du pays ne couvre pas les besoins nationaux en terme de produits alimentaires agricoles. Se pose ainsi le problème de l'alimentation aussi bien au niveau de la population que du cheptel dans son ensemble.

A Rosso Sénégal, nous avons une production agricole locale qui se développe. Cette dernière n'a pas les problèmes d'écoulement des productions. L'essentiel de la partie à vendre de la production est fait à Rosso Mauritanie. Outre les tracasseries de la part des gardes frontières, les commerçants et commerçantes, en rapport avec les piroguiers, font passer des quantités de riz énormes de l'autre coté du fleuve. Une denrée rare sur l'autre rive, le riz est une composante essentielle de l'alimentation des mauritaniens. Le pays en produit mais à des proportions faibles.

Conclusion partielle:

Ce rappel historique est pour nous essentiel pour avoir une plus rapide compréhension des relation qui lient le Sénégal et la Mauritanie. Nous pouvons voir ici que les liens qui unissent les deux nations ont des fondements aussi bien dans l'histoire récente que dans celle ancienne. L'autre constat c'est aussi l'évolution en dent de scie des relations. En effet, l'évolution historique démontre que les deux pays sont unis par une proximité géographique qui imprime sa tyrannie, en imposant un système d'échange qui a existé quel que soit le contexte et la situation dans laquelle se trouve les relations entre les deux voisins.

DEUXIEME PARTIE :

L'organisation du système des échanges transfrontaliers

CHAPITRE I: LES ACTEURS INTERVENANTS DANS LES ECHANGES TRANSFRONTALIERS

Le système des échanges transfrontaliers mobilise un nombre impressionnant d'acteurs aux activités diverses et souvent complémentaires. D'emblée, il est possible de faire une différenciation entre ces différents intervenants de par leur statut, leur fonction ainsi que par leur niveau d'implication. Le premier critère de différentiation sera pour nous l'appartenance des acteurs à la sphère public ou au secteur privé. En effet, les espaces transfrontaliers sont les lieux d'interventions de l'Etat qui, par l'intermédiaire de ses agents déconcentrés, participe à la gestion, et à l'encadrement de ses espaces périphériques. Ce qui, du reste, entre en droite ligne dans sa mission régalienne de sauvegarde du territoire national. Les franges frontalières voient aussi évoluer des acteurs appartenant au secteur privé qui trouvent en ces espaces des gisements d'opportunités à saisir et à exploiter.

1. Le rôle de l'Etat, de ses agents déconcentrés et de la collectivité locale.

Une partie importante des échanges transfrontaliers qui ont lieux entre les deux Etats voisins se fait par l'intermédiaire du Port Autonome de Dakar (PAD). Le port de Dakar est une infrastructure de grande envergure qui fait partie des plus grandes, des plus modernes et des plus fonctionnels de l'Afrique de l'Ouest. Bénéficiant aussi de la position de finistère du presqu'île du Cap-Vert sur lequel il est bâtie, il fait de Dakar une porte d'entrée et de sortie pour l'ouest africain. L'infrastructure portière de Dakar présente un certain nombre d'avantages parmi lesquels ont peut retenir, la profondeur de ses eaux. Cette caractéristique physique lui autorise à accueillir des bateaux gros porteurs à tirant d'eaux profond. Ces types de navires sont très utilisés dans les échanges internationaux surtout dans le commerce international où l'acheminement des produits pondéreux se fait le plus souvent par la voie maritime.

Depuis la période de la colonisation, le Port de Dakar a servi de point de transit pour les pays de l' AOF (Afrique occidentale française). La survenue des indépendances, et l'aménagement d'infrastructures dans les Etats nouvellement indépendants ont considérablement réduis ce rôle mais il est toujours sollicité par des pays de l'intérieur comme le Mali et la Mauritanie pour une bonne partie de leurs échanges extérieurs.

La construction du port minier et minéralier de Nouadhibou et l'aménagement du port de Pêche de Nouakchott, n'ont pas empêché la Mauritanie de faire toujours recours au port de Dakar pour une partie de ses importations. Les produits débarqués à Dakar sont convoyés par la voie routière (la route nationale N°2) sur des camion à conteneur verrouillés jusqu' au bac de Rosso. Cette activité participe au maintien et à la densification des relations d'échange. A côté de ce service de transit qu'offre le port de Dakar, la Mauritanie importe aussi des produits du Sénégal et l'essentiel passe par la route. Cette activité commerciale induit une action de gestion et de contrôle des Etat concernés par le truchement des agents déconcentrés appartenants à différents démembrements de l'Etat.

Les agents de l'Etat intervenant sur les espaces transfrontaliers sont : la police, la douane, la gendarmerie. Leur mission consiste en la gestion, le contrôle de ces espaces pour la défense des personnes, des biens et des économies mais aussi pour tirer profit des ressources que génèrent ces espaces. Les espaces frontaliers sont pour les Etats des sources précieux de recettes. Aussi adoptent- ils « des attitudes variables qu'on soit dans l'un ou l'autre. Ils sont partagés entre une volonté plus ou moins coercitive et effective de contrôle des flux et un soucis d'ouverture commercial indispensable et encouragé par la conjoncture économique ». BENNAFLA. 56(*).

Nous le verrons ici, l'intervention de l'Etat n'est pas seulement circonscrite dans des mesures de limitation ou d'interdiction du trafic frontalier, ni au bouclage des frontières. L'Etat peut être emmené à jouer d'autres rôles. Il intervient même parfois dans le sens de promouvoir ces espaces situés sur les franges frontalières en procédant à la mise sur pied de certains types d'infrastructures. Par exemple la construction de routes d'accès, la création de marchés frontaliers etc.

a) La douanes : un rôle d'encadrement, de surveillance et de contrôle

A Rosso Sénégal on note la présence de l'administration des douanes. Cette présence peut être lue comme une volonté manifeste de l'Etat du Sénégal de participer à la gestion de ce secteur transfrontalier dont le dynamisme est sans équivoque. La place de Rosso a très tôt attiré l'attention des autorités étatiques avec l'installation d'un service de contrôle douanier dans la ville. Cette présence de la douane témoigne d'un acte de souveraineté exercé par l'Etat qui montre ainsi sa capacité de veiller sur son territoire. Du reste, l'intérêt porté sur l'espace frontalier de Rosso découle du fait que c'est un lieu de collecte de ressources énormes pour toute la collectivité. En moyenne, le poste de Rosso fait rentrer dans les caisses du trésor public la somme estimée à plusieurs millions de Franc CFA annuellement. Elle participe donc à la collecte de la rente frontalière.

L'érection des barrières douanières cadre parfaitement avec les politiques initiées par le gouvernement du Sénégal, dans la protection de l'économie nationale. Malgré les options économiques libérales, l'importation de certains produits est formellement interdite pour protéger les industries du pays. C'est à cet effet que, des produits tels que le sucre et la tomate sont interdits d'importation de manière systématique. Par exemple, si on considère le cas de ces deux produits, leur inondation dans le marché sénégalais mettrait en péril l'emploie de plusieurs milliers de populations de la vallée qui travaillent dans les industries fabriquant ces deux produits à savoir la compagnie sucrière installée à Richard Toll et la SOCAS sise à Dagana et à Savoigne. Pour ne point mettre en danger ces emploies, la douane veille à la protection des frontières pour parer ces types d'importation.

b) La police et la gendarmerie

L'Etat du Sénégal se manifeste aussi à Rosso avec la mise sur pied du poste de police au niveau de la frontière. La police de Rosso est subdivisée en deux services : la brigade de sûreté de l'Etat et la brigade des stupéfiants. La brigade de sûreté a pour rôle principal la gestion et le contrôle des flux de personnes. Elle procède ainsi à la collecte d'informations sur les voyageurs comme par exemple leurs identités, leurs nationalités etc. Ces types d'informations permettent de confectionner de fichiers concernant les voyageurs. Leur travail participe à garantir la sécurité et la sûreté du pays. Selon les statistiques de la police de Rosso Sénégal un nombre important de personnes traverse chaque jour la frontière et entre sur le territoire sénégalais. Parmi cette foule nombreuse on note une part non négligeable de touristes.

Tableau 4: Le nombre de touriste de Passage à Rosso Sénégal

Années

2000

2001

2002

2003

Nombre

1506

3443

2642

2875

Source : Police de Rosso Sénégal

Les registres de la police nous montrent aussi le nombre de mauritaniens qui entrent et qui sortent du territoire sénégalais. Il faut tout de suite dire que ce n'est là que ceux qui passent par les services des polices. A côté de ces chiffres qui n'ont que valeur d'illustration il faut signaler que nombre de mauritaniens entrent et sortent du territoire sans passer par ces services de contrôle.

Tableau 5 : Flux de mauritaniens entrés au Sénégal entre le 1er janvier et 4 Avril 2004

Flux

Entrées

Sorties

Nombre

3003

2262

Source : police de Rosso Sénégal.

Ces deux tableaux nous permettent d'avoir idée du volume des flux de personnes que la police de Rosso gère au niveau de la frontière. Il faut cependant signaler que la surveillance de la frontière au niveau de Rosso n'est pas rigide. Ils sont de plus en plus nombreux ceux qui franchissent la frontière sans détenir par devers eux le moindre papier. De l'autre côté sur la rive gauche, il suffit de « payer un pot de vin  aux policiers » pour circuler librement.

La brigade des stupéfiants est chargée de veiller à ce que la frontière au niveau de Rosso ne soit pas un point de passage des produits illicites et prohibés comme la drogue. En effet, les échanges transfrontaliers sont aussi marqués par le transit de la drogue d'Etats en Etats, de produit dont la vente est répréhensible, des trafics illégaux etc.

c) La commune : un acteur comme les autres

La municipalité intervient dans la gestion et participe dans l'exploitation de l'espace transfrontalier. Son rôle consiste principalement à délivrer des autorisations de circuler en terre mauritanienne. Selon le document portant le Plan d'investissement de la commune de Rosso Sénégal, le seul poste budgétaire qui concerne la vente de ces autorisations de circuler à Rosso Mauritanie était estimé, dans les prévisions de 2003, à plus de 25 millions de FCFA. Selon les autorités de la mairie ce chiffre peut être largement dépassé dans les années à venir.

La commune intervient aussi dans l'organisation de l'espace frontalier. Elle se charge de la gestion du marché et de la gare routière, procède à la location des cantines, étales etc. Son action est aussi visible à travers la mise sur pied de certains types d'infrastructures. C'est le cas avec la construction de la nouvelle gare routière qui attend d'être ouverte au grand public.

Pour la collectivité de Rosso Sénégal les échanges transfrontaliers sont des sources de recettes. Ils favorisent des levées de taxe sur les nombreuses activités qui s'installent du fait de l'« effet frontière » et sur les transactions qui s' y déroulent. La frontière attire pour la commune l'installation d'une économie informelle qui, avec un minimum d'organisation peut devenir une source de ressources additionnelles pour l'institution municipale.

2. Le rôle du secteur privé

Rosso Sénégal est une plate forme dont le dynamisme se manifeste à travers l'implantation de beaucoup d'acteurs économiques. Cet espace frontalier, compte tenu des possibilités qu'il regorge, a favorisé l'éclosion d'un ensemble d'activités, impliquant des acteurs qui ne se réclament pas de la sphère publique. Ce sont les acteurs privés. Ces derniers sont attirés par les multiples opportunités qui leur sont ouvertes notamment dans le domaine du commerce, de l'offre de services marchands etc. L'intervention de ces agents privés a participé à la structuration de l'économie locale de la ville de Rosso. Il est très difficile de faire l'inventaire de tous ceux qui gravitent autours de ces activités. Il sera ici question de relever ceux qui nous semblent les plus importants et les plus représentatifs mais aussi ceux qui entrent directement en rapport avec les activités d'échange comme c' est le cas des transitaires (sociétés ou simples agents), des assureurs, des transporteurs, des « trafiquants », des commerçants etc.

a) Les agences de transit (sociétés et particuliers)

Leur rôle est de faciliter le transit des marchandises entre les deux Etats, d'alléger les difficultés et d'atténuer les complications qui peuvent survenir du fait de la différence existante entre réglementations douanières en vigueur de part et d'autre. Les agences de transit ne sont pas importantes en nombre mais de nombreuses personnes se disent être des transitaires. La plus part du temps, ils usent des relations et accointances qu'ils peuvent avoir avec les services de l'Etat pour mener cette activité qui est même devenue pour certains, un travail à temps plein.

La profession de transitaire est très complexe et requiert des connaissances notamment en ce qui concerne les lois et réglementations édictées au sein des deux états. Les acteurs surtout les commerçants ne sont pas toujours au fait de ces lois. C' est pourquoi ils fonts recours, aux services des transitaires. Pour s'adonner aux activités d'échanges transfrontaliers, particulièrement le commerce, il faut disposer de certains types de documents administratifs qui l'égalisent l'activité. Il s'agit principalement d'une autorisation d'import/ export. Les commerçants sont aussi tenus de déclarer systématiquement les marchandises qu'ils manipulent. Cette opération se fait compte tenu d'un ensemble de modalités d'ordre administratives et fiscales que ne maîtrisent pas forcement ceux qui s'adonnent aux activités de commerce. Cette situation fait intervenir les transitaires qui jouent un rôle d'intermédiaire mais surtout de facilitateur dans les opérations d'échanges au niveau de la plate forme de Rosso Sénégal. Depuis la fin de la crise sénégalo-mauritanienne, elles sont de plus en plus nombreuses les agences de transit qui s'implantent dans la ville.

A Rosso les principales sociétés de transit qui ont élu domicile sont. La SOTRASEN implantée à Rosso depuis 1986, la CASH INTER venue en 2002, et CAP TRANSIT qui est la dernière venue de toutes s'y est implantée en 2004. On note ainsi que les sociétés de transit viennent de plus en plus se positionner à Rosso. Deux de plus en deux ans cela peut être interprété comme un signe de bonne santé de la filière qui apparemment attire de mieux en mieux. C'est aussi un symptôme du développement plus accru des échanges entre le Sénégal et la Mauritanie.

b) Les sociétés d'assurance

Des sociétés d'assurance ont choisit de s'installer à Rosso sénégal. Leur présence se justifie par la situation de zone stratégique qu'occupe la ville. Rosso est comme une porte d'entrée et de sortie, une zone où des flux convergent. Ici la frontière offre des opportunités qui recoupent directement les exigences de leur travail. En effet la présence d'un bac fait de Rosso un point de passage incontournable pour les véhicules qui sont en provenance de la Mauritanie et voulant continuer de circuler au Sénégal.

Toutes les voitures entrant dans le territoire sénégalais par Rosso et immatriculées en Mauritanie ou bien venant d'Europe par le désert donc ailleurs qu'au Sénégal, pour des raisons de sécurité, ont pour obligation de souscrire une police d'assurance. L'obtention de ce document leur garantis la sécurité le temps de leur séjours dans le pays. C'est donc là un besoin exprimé et un service à satisfaire. Rosso étant un lieu de passage très fréquenté par, les populations mauritaniennes qui se rendent très souvent au Sénégal soit pour régler des affaires soit pour passer les week end ou seulement venus rendre visite à leurs familles, les touristes en transit par le désert. Tant de sollicitations, font que Rosso est devenu une ville carrefour par où entrent des centaines de véhicules par mois. Avec la normalisation de plus en plus avancée des relations entre les deux Etats voisins, les flux s'accroissent d'année en année.

Aussi, la présence des agences d'assurance à Rosso Sénégal n'est pas fortuite. Pour la plus part ce sont des agence de grandes sociétés dont les maisons mères se situent à Dakar ou dans d'autres villes. On peut en citer quelques unes avec leurs dates d'installation.

- Nationale d'Assurance 1992,

-Axa 1999,

-Assurco 2002,

-SNAM 2002.

On note ici une arrivé régulière de sociétés d'assurance. C'est là un signe de l'augmentation des besoins de service qui montre que, de plus en plus, les relations entre les deux pays s'intensifient.

c) Les agents transporteurs

Les activités d'échanges sont étroitement liées au secteur stratégique des transports. Leur développement et leur dynamisme sont mesurés à l'aune de la capacité du secteur des transports à jouer son rôle. Les échanges transfrontaliers supposent des déplacements massifs de marchandises, de biens et des personnes effectuant ces transactions. La plus part des acteurs évoluant dans les échanges sont des allochtones venus d'autres localités bénéficier des opportunités offertes et des gains qu'ils peuvent tirer de la frontière. Les déplacements des populations et des biens ont entraîné une densification du trafic routier menant à Rosso, le développement d'un trafic fluvial très dense et bien structuré faisant intervenir des acteurs qui intègrent ainsi le système des échanges transfrontaliers.

Selon le Plan d'investissement communal de Rosso, le seul secteur des transports contribue pour prés de 12,5% à la formation du PLB. Il occuperait aussi prés de 3,5% de la population active. Au regard de ces chiffres il n'est plus besoin de démontrer l'importance de ce secteur dans l'économie locale urbaine. A partir de ses statistiques, ont peut dire que le secteur des transport outre le fait qu'il produit des ressources additionnelles à l'économie de la ville prouve aussi sa capacité de création d'emploi et de réduction du taux de chaumage. Mieux, ces chiffres sont la preuve de la performance de cette branche de l'économie dont le dynamisme est perceptible au niveau du poste de contrôle des flux sis à l'entrée de la ville mais aussi au niveau du débarcadère.

· Le transport routier

De nombreux véhicules viennent à Rosso. La ville est très fréquentée par des populations appartenant à différentes catégories socioprofessionnelles. La majeure partie ne fait que transiter car la réalité est que cette foule de visiteur vient profiter du service que rend le bac mais a généralement pour destination finale Rosso Mauritanie plutôt que Rosso Sénégal. En moyenne la ville reçoit la visite de plus de 60 voitures par jour si on ne prend en compte que les jours ordinaires. Pendant les jours de fête, on peut comptabiliser jusqu' à plus de 200 véhicules par jours dont la majeure partie ne fait que transiter. Tout compte fait, la ville jouit, quand même, des effets induits par les nombreuses sollicitations de sa soeur jumelle et, par conséquent, en tire bien profit comme nous allons le montrer dans les paragraphes qui vont suivre.

Malgré son importance dans le système des échanges, le secteur des transports souffre de certaines tares qui diminuent son efficacité. Il s'agit d' abord de la vétusté du parc automobile. Entre Rosso et les localités voisines, autant les flux sont importants, autant les véhicules qui assurent les déplacements des populations et des biens sont des « cercueils roulants ». A cela s'ajoute l'état de dégradation des routes et la cherté des prix de transports. Ces derniers sont décriés par les voyageurs que nous avons côtoyés durant les différents séjours que nous avons effectué sur les lieux. Les personnes et les marchandises voyagent dans des véhicules surchargés qui mettent la vie des citoyens en danger.

· Le transport piroguier

Parler ici du secteur des transports piroguiers c'est surtout grâce au rôle important qu'il joue et sa place dans l'environnement des échanges entre les deux villes voisines. On ne peut donc se limiter au seul transport routier. En effet, la frontière est un cours d'eau, un obstacle qui pose le problème des moyens de son franchissement. Aussi, se développe un transport piroguier très florissant qui assure aux voyageurs la traversée du fleuve, grâce à la mise sur pied d'une flotte piroguière importante, motorisée ou non, par les promoteurs privés et par les pécheurs traditionnels. Selon le président de l'association des piroguiers rencontrés, « le nombre de pirogues en service sur le quai avoisine la centaine ». Les pirogues opèrent ainsi des mouvements pendulaires entre les deux rives. Les promoteurs sont des deux nationalités.

Le transport piroguier se singularise par les fluctuations des prix de la traversée en fonction des heures de circulation du bac. Le bac circule entre 8 heures et 12 heures le matin et l'après midi entre 15 heures et 18 heures. Durant les heures de circulation du Bac le tarif piroguier se marchande et se situe entre 100 F CFA et 150 C FA. En dehors de ces heures le tarif piroguier est fixé à 250 F CFA. Un fait est aussi à noter. C'est que, quel que soit leur nationalité, les piroguiers acceptent d'être payé avec les deux monnaies. La circulation des pirogues entre les deux rives ne semble pas être soumise à des dispositions particulières.

· Le transport par Bac

Les bacs de Rosso sont mis en place durant les années 1950 presque une décennie avant les indépendances au moment où les deux pays faisaient encore partie du territoire colonial de la France. Ils furent mis en activité par une société nommé Lacombe basée en Mauritanie et qui intervenait à Rosso sénégal. Pour le transport de ses véhicules de 4 et 5 tonnes qui venaient du Sénégal ou des autres pays africains la société mis sur pied le système de transport par bac qui se prêtait mieux à ses activités. Ces bacs de la société Lacombe sont la première génération. Ils étaient des bâtiments dont la capacité de transport était : un véhicule de 20 tonnes et 3 autres de 05 tonnes. Les bacs de la deuxième génération sont affrétés par l'Etat mauritanien. Leurs capacités de transport dépassent largement ceux de la première génération. Chaque bac peut, au cours d'une traversée, embarquer deux camions de 30 tonnes, un autre de 20 et de trois véhicules légères en plus des voyageurs. L'Etat mauritanien en a assuré la gestion jusqu' en 1990. Depuis cette Date la gestion et l'exploitation ont été confiées au secteur privé. Actuellement c'est la Société des Bacs, de droit mauritanien qui en assure la gestion. Les bacs sont actuellement au nombre de deux. Ils se relaient au cours de l'année pour ne pas interrompre le service de transport qui est le cordon ombilicale relient les deux Rosso.

Le bac opère des mouvements pendulaires entre les deux rives à un rythme régulier et à des horaires fixes calquées sur l'organisation du travail en rive gauche, suivant ainsi les heures d'ouverture et de fermeture de la frontière. Il faut aussi signaler que le bac effectue aussi des traversées à la demande d'opérateurs privés, des Etats ou simplement de particuliers qui ont des marchandises, du bétail ou d'autres types de produits dont le franchissement ne peut toujours s'effectuer aux heures normales de rotation.

Aujourd'hui, le bac constitue le maillon le plus fort de la chaîne et l'élément régulateur du système si on considère les échanges transfrontaliers comme étant un système. La dynamique frontalière repose beaucoup sur ce moyen de transport qui pour le moment fait office de pont reliant les deux territoires.

· Les transporteurs un rôle qui dépasse le transport

Les acteurs évoluant dans le secteur des transports s'impliquent d'avantage dans le système des échanges et en plus de leurs activités principales, ils se déploient dans d'autres sous secteurs. Ce dédoublement dans plusieurs rôles fait de ces derniers les agents les plus dynamiques du système. Ces acteurs ne se limitent pas seulement au transport des personnes et des marchandises comme le laisse supposer leur outil de travail. Ils sont à la fois, transporteurs, passeurs, « trafiquants », commerçants etc.

Les transporteurs, surtout les piroguiers sont des pions efficaces en ce concerne le petit trafic de marchandises. Dans le jargon local on les nomme « thieup-thieup man » c'est à dire ceux qui font du « thieup-thieup » (des petites affaires).

Le terme « thieup-thieup » désigne l'ensemble des petites activités et petits trafics, les petites affaires auxquels s'adonnent les conducteurs de pirogue qui ne sont toujours pas les propriétaires des pirogues. La plupart du temps ils sont des conducteurs à la solde de propriétaires. Ainsi au même titre que les personnes qui n'ont pas de travail fixes et gravitent dans l'espace frontalier, ils sont à l'affût de la moindre opportunité « d'affaire ». Ils sont souvent le relais entre les populations qui ne peuvent pas se rendre sur l'autre rive pour le règlement de petites détails tels que l'achat de denrées alimentaires, d'appareils électroniques comme les téléphones portables, les matériels électroniques domestiques qu'ils viennent revendre au Sénégal a des prix abordables.

Nous avons rencontrés M.N. un conducteur de pirogue. Pour lui il ne peu se limiter au seul métier de transporter des personnes.

 « En plus du fait que je transporte des passagers si mon tour arrive, mais je travailles aussi comme passeur. En effet les commerçantes viennent solliciter mes services pour le transport du riz ou de la tomate souvent aux heures de fermeture de la frontière. Cette activité la plupart d'entre nous la mène. Seulement il faut avoir des relations pour pouvoir s'en sortir »57(*).

Les transporteurs piroguiers ont un rôle prééminent dans le système des échanges. Ils sont souvent les intermédiaires entre les populations des deux rives. Ils bénéficient souvent d'un avantage sur le reste de population car plus au fait des variations qui s'opèrent sur les prix des marchandises etc. Les populations font aussi recours à leurs services du fait de leur remarquable capacité à déjouer les obstacles qui, il faut le souligner, sont imprévisibles et complexes.

Figure 1 : Les flux sortants du territoire sénégalais 

Commerçants, voyageurs, visiteurs simples, chauffeurs

Habitants de Rosso Sénégal

Agents et sociétés de transit

Agents de change (trafiquants)

Bac ou pirogues

Service des douanes

Police de Rosso Sénégal

Sociétés d'assurance

Source : S. DIALLO

Figure3 : Le circuit officiel des flux entrant dans le territoire sénégalais par

Rosso- Sénégal :

Agents de change

(Trafiquants)

Brigade de Douane :

Déclaration de la marchandise

Sociétés d'assurance

Commerçants, transporteurs, visiteurs simples, voyageurs, touristes etc.

Bac ou Pirogue

(En provenance de Rosso Mauritanie)

Poste de police de Rosso Sénégal

Agents et sociétés de transit

Source : S. DIALLO

3. Les commerçants transfrontaliers.

Parmi les composantes du système des échanges transfrontaliers, les activités commerciales sont, sans nul doute, ceux qui retiennent le plus l'attention. On confond même parfois échanges transfrontaliers et commerce transfrontalier. Cela est dû, certainement, à  la place que prennent les activités commerciales dans les échanges. La plus pars des activités qui se déroulent dans les espaces transfrontaliers sont tributaires du secteur du commerce.

a) Rosso Sénégal : une ville de transit plus qu'un marché

Rosso Sénégal et Rosso Mauritanie chevauchent le fleuve Sénégal qui est aussi la frontière entre l' UM et le FCFA. Contrairement à la monnaie mauritanienne, le F CFA est convertible et stable. Elle est échangée à un cours plus intéressant que celui de UM. Une analyse approfondie sur les types de produits, leurs natures, et leurs lieux de production, montre qu' en dehors des produits agricoles, la ville de Rosso Sénégal n'est pas , émettrice en ce qui concerne les produits manufacturiers, industriels et semi industriels. La Mauritanie ayant adopté une politique de libéralisation de son commerce extérieur, offre des produits alimentaires, des produits de premières nécessités, des produits d'origine industrielle qui ne sont pas fabriqués dans son pays mais qui sont moins chères que quant ils devaient être achetés sur le marché sénégalais. Il n'est pas exagéré de dire que c'est effectivement la ville de Rosso Mauritanie qui polarise le plus les villes du Delta. Ce constat est visible sur le comportement et l'aspect physique des deux marchés, sur leur dynamisme et surtout dans le sens de la fréquentation.

Cette situation que nous avons tenté de brosser ici sommairement nous permet de parler des acteurs particuliers que sont les commerçants frontaliers qui sont, de tous les intervenants aux frontières, ceux qui retiennent le plus l'attention. La seule évocation du terme échanges transfrontaliers revoie aux activités commerciales qui se déroulent au niveau de ces plates formes situées aux périphéries des pays.

Parler du commerce transfrontalier n'est pas un exercice simple. En effet il est très complexe et c'est une réalité très difficile à toucher du doit car ayant des aspects qui peuvent aller du simple au plus compliqué, de l'officiel à l'officieux, du formelle à l'informel, du licite à l'illicite, du légal à l'illégal. Qui est commerçant transfrontalier ? Qui ne l'est pas ? Combien sont ils ? Quel est le volume de leurs activités ? Quel est leur statut ? Voici une foule de questions qui, loin d'être exhaustives, se sont posées à l'esprit des apprentis chercheurs que nous sommes. Mais il faut le dire tout de suite, la réponse à ces questions n'est pas facile. Dans cette partie nous allons tout au moins essayer de faire une certaine catégorisation des commerçants transfrontaliers en fonction de leur mobilité et du lieu d'établissement de leur travail. Les commerçants exerçants à Rosso se divisent en deux grandes composantes :

-Ceux qui se sont fixés à Rosso Sénégal disposant de cantines, d'étales, de tables, qui résident ou exercent régulièrement dans la ville.

-Ceux qui ne sont pas fixes et qui se distinguent par leur grande mobilité. Ils peuvent résider dans la ville ou bien venir d'autres localités proches ou lointaines comme Saint-Louis Dakar etc.

b) Les commerçants fixés à Rosso Sénégal.

Selon les données du Chambre de commerce de Saint-Louis, ils seraient plus de 200 les commerçants qui se sont établit de manière fixe à dans le marché et se sont inscrits régulièrement sur les registres de commerce. Pour le vieux O.S58(*) le président de l'une des associations regroupant les commerçants affiliés au Cambre de Commerce de Saint-Louis les catégories de commerçants de Rosso se limitent aux demi-grossistes et aux détaillants. Pourquoi l'absence des Grossistes, le commerce dans les boutiques est handicapé par la rude concurrence des grands magasins situés de l'autre côté du fleuve.

La politique de libéralisation du commerce appliqué chez le voisin du Nord est en compétition avec la politique de contrôle exercée sur les produits provenant de la Mauritanie. Les commerçants sénégalais, particulièrement les boutiquiers de la ville de Rosso Sénégal, n'ont pas le droit de s'approvisionner directement de la ville voisine pour revendre sur le marché local sans avoir dédouané la marchandise. Selon le vieux O.S ils seraient même victime de fréquentes opérations de perquisition de la part des agents de douanes qui opèrent des descentes intempestives dans leurs boutiques à la recherche de marchandises frauduleusement acquises. Ils ne gagneraient pas grands chose sur les marchandises qu'ils accepteraient de prendre directement à Rosso Mauritanie en s'acquittant des taxes et droits de douanes. Voici les raisons qui expliquent, en partie, l'absence de commerçants grossistes dans la ville.

Les commerçants demi-grossistes ont pignons sur rue. Ils se sont surtout spécialisés dans la vente de produits qui sont rares sur l'autre rive. Il s'agit de produits et de denrées alimentaires agricoles, des produits énergétiques tels que le gaz butane destiné à la consommation domestique, les matériaux de construction comme le ciment, et le fer. De l'avis du vieux O.S, ces produits sont les seuls qui peuvent générer des bénéfices pour les commerçants locaux en plus des produits manufacturiers comme les matières plastiques. Pour la vente de ces types de produits, les commerçants de Rosso Sénégal nouent de rapports discrets avec leurs homologues mauritaniens auxquels ils revendent leurs stocks de marchandise sans pour autant que ces transactions se conforment aux règles établies par les deux pays. Pour cela, M. O.S nous a fait état, de la grande flexibilité des autorités frontalières mauritaniennes qui laissent ainsi de nuit des chargements de produits sénégalais entrer sur leur territoire. On sent bien entendu le parfum de la corruption dont beaucoup d'acteurs font état.

Les commerçants détaillants s'activent dans l'écoulement des produits de grande consommation. Il s'agit surtout des denrées de première nécessité (huile, savons, thé, sucre, etc.). Pour M. O.S les détaillants sont les mieux lotis car ils déploient des mécanismes qui leur permettent de tirer parties des opportunités que confèrent les différences de prix.

c) Les commerçants itinérants ou « banas-banas »

Les commerçants qui évoluent dans le secteur de Rosso et qui n' y sont pas installés sont nombreux. Ils constituent l'écrasante majorité de ceux qui pratiquent cette activité. Pour l'essentiel, ont y trouve des femmes « Baanas Baanas » qui viennent des localités ou des villes environnantes comme Dagana, Richard Toll. Nombreuses sont aussi celles qui viennent des villes plus éloignées comme Saint- Louis, Dakar etc.

Ces types de commerçants et commerçantes contribuent peu ou prou dans la formation du PLB. Ils n'ont pas de liens directs avec la ville de Rosso Sénégal. Leur principale destination demeure Rosso Mauritanie qui est la ville marchée. Ils viennent pour s'approvisionner en marchandises diverses qu'ils vont écouler dans les marchés plus éloignés tels que les marchés hebdomadaires qui se tiennent dans les villages environnants, ou bien dans les marchés urbains ou ils parviennent à réaliser des bénéfices

CHAPITRE II : UNE ECONOMIE URBAINE SOUTENDUE PAR LES ACTIVITES DU SECTEUR INFORMEL

L'économie la ville est fondamentalement liée à l'existence du secteur informel. Ce constat n'est pas une particularité propre à la ville. Pour Abdoulaye NIANG (1997), « le secteur informel serait constitué d'un ensemble d'activités économiques de production et de distribution de biens et de services à petite échelle exercées à des degrés variables en marge de la réglementation instituée par la puissance publique (code des impôts, code du travail code des obligations civiles...) mais au vu et au su de l'administration ». Elle est une variable centrale dans l'explication de la dynamique économique et sociale des milieux urbains.

1. Un secteur intermédiaire dynamique

A Rosso, il se développe une économie urbaine essentiellement basée sur l'accroissement des activités du secteur informel. Ce dernier fait aujourd'hui partie des secteurs les plus dynamiques de la ville. C'est d'ailleurs le cas dans la majeure partie des villes africaines donc des villes de la vallée. La particularité de l'économie informelle dans la ville de Rosso réside dans le fait que les biens qui y sont produits et les services qui y sont proposés sont essentiellement dépendants de la réalité de la frontière. Chaque acteur de l'économie informelle vient pour remplir un rôle précis et profiter des opportunités offertes par la frontière. La présence de quelques acteurs comme les agents de change informels, les tailleurs, les mécaniciens, les unités de transformation de riz, les ateliers de menuiseries métalliques, les dibiteries, les télecentres, les pousses- pousses sont des preuves du dynamisme de ce secteur.

a) Les travailleurs transfrontaliers.

Tableau n° 6: les domaines d'activité des chefs de ménages :

Domaines d'activité

Effectifs

Taux en %

Chauffeurs

9

8.5

Piroguiers

4

3.8

Commerçants

18

17.1

Boutiquiers

3

2.8

Thieup-thieup

23

21.9

Menuisiers métalliques

1

0.9

Paysans

10

9.5

Maçons

2

1.9

trafiquants

4

3.8

Electriciens

2

1.9

Mécaniciens

5

4.7

Travaillants en Mauritanie

22

20.9

autres

2

1.9

Total

105

100

Source : donné de l'enquête juin 2005

Au regard des résultats issus de l'enquête que nous avons menés auprès des ménages, nous notons une forte dépendance de celle-ci à l'endroit des activités frontalières. Une bonne partie des chefs de ménage est occupé par une activité dépendante aux échanges.

Il faut remarquer aussi la présence d'une forte colonie de population de Rosso Sénégal en Mauritanie. Dans la plus part des ménages interrogés, il y a un ou plusieurs membres de la famille qui travaillent ou vivent en Mauritanie.

La particularité de la commune est le dynamisme des femmes. En effet, on remarque une forte présence des femmes qui s'activent elles au sein de l'espace frontalier. Elles jouent ici un rôle très important. La plus part du temps il s'agit de jeunes femmes qui vont se faire employer comme « domestique » au niveau de Rosso Mauritanie ou dans la capitale Nouakchott. D'autres plus entreprenantes se déploient dans la prestation de services comme la restauration. La présence des femmes est surtout remarquable dans le commerce. C'est une activité dans laquelle elles ravissent la vedette aux hommes.

b) Les agents de change ou « trafiquants »

Rosso Sénégal correspond à une limite de deux zones monétaires : La zone de la Communauté financière Africaine et la zone de l' UGUYA (UM) de la Mauritanie. Ces deux monnaies n'ont pas le même coure ni la même valeur d'échange. Des deux, le Franc CFA est la plus convertible. Le quai de Rosso se singularise par les flux massifs d'argent qui sont brassés chaque jour. Ici l'argent circule, il est échangé c'est à dire « acheté »  ou « vendu ».

Cette activité est devenue un créneau pour de nouveaux acteurs qui proposent ainsi un service de change qui concurrence rudement le change fait au taux officiel déterminé par les banques centrales. Ces acteurs sont communément des « trafiquants » dans le jargon local. En réalité c'est des agents de change informels. Ils participent très activement au système des échanges dont ils constituent un élément important. Le service qu'ils proposent facilite les transactions et rend plus fluide les flux transfrontaliers en permettant aux voyageurs et commerçants de faire des gains de temps substantiels. Comme il s'inscrit dans une informalité caractérisée, les trafiquants ont une perception de l'argent qui fait qu'ils le considèrent telle une marchandise comme tout autre. En effet, l'opération de change fait l'objet de marchandage sur le taux entre « trafiquants » et clients comme entre commerçants et clients. Les commerçants et les voyageurs avertis savent que le taux de change fluctue couramment et de ce fait, n'hésitent pas à le marchander. Cette situation s'explique simplement par le coure instable de l' U M tantôt en hausse tantôt en baisse. Les « trafiquants » jouent naturellement sur cette instabilité pour fixer des taux qui leur permettent de faire des bénéfices énormes au détriment des clients.

Les « trafiquants » ont été très difficiles à aborder. Ils sont frileux et peu loquaces lorsqu'on les questionne sur le travail qu'ils font. Cela n'a pas été une surprise car leur activité est informelle et son utilité sociale ne lui enlève pas son caractère d'activité illégale. L'instinct de survie accroît leur méfiance à l'endroit de tout individu, inconnu, qui veut en savoir plus sur leur travail au lieu de demander simplement un service de change. Ils ne sont pas structurés. On ne trouve trace d'une quelconque association ou organisation qui les réunit. La municipalité a un grand mal à les repérer. Ils ne payent pas de taxes ni au trésor public encore moins à la collectivité locale. Ils n'ont donc pas de charges administratives ou fiscales. Ainsi ils sont des concurrents redoutables pour les bureaux de changes officiels qui ont simplement fermé boutique. Présentement on ne trouve aucun bureau de change officiel implanté à Rosso.

De l'avis de Y.D59(*) gérant d'un télé centre (Espace Tel Plus) au Marché de Rosso Sénégal, « j'ai tout simplement fermé mon agence ce change qui était agréé par les autorités locales et qui me faisait payer des taxes énormes aux trésor public pour la reconvertir à ce télé centre qui est pour moi de loin plus rentable »60(*).Cet avis démontre que la présence des trafiquants n'est pas exempte d'effets négatifs pour la collectivité locale. C'est une activité qui génère certes des revenus pour ceux qui en font la pratique mais c'est aussi une perte considérable de recettes pour la commune de Rosso Sénégal en empêchant le développement d'autres secteurs. En effet la Compagnie Bancaire Ouest Africaine qui avait ouvert une agence sur place a du la délocaliser à Richard Toll tant la concurrence des « trafiquants » était insoutenable pour ces agences formelles.

Le marché du change semble bien se porter malgré la réticence affichée par les acteurs à le reconnaître. L'activité de change est très sensible à la fluctuation des cours des différentes monnaies en circulation. Le constat que nous avons fait est que, les « trafiquants » sont de véritables banques ambulantes. Ils gardent par devers eux des sommes d'argent énormes en différentes devises. Il nous à été très difficile de savoir exactement les montants qu'ils pouvaient détenir sur eux mais le choc visuel est sans équivoque. En effet, les attachés cases et les mallettes qu'ils ont débordent de billets de banque. Du franc CFA à l'Euro ils échangent des devises en prélevant des commissions. Dans le système des échanges à Rosso ils jouent un rôle essentiel. Leur activité s'intègre dans le secteur informel ce qui ne l'empêche pas de faciliter les échanges, de les rendre plus fluides et plus efficaces. C'est une activité qui attire de plus en plus de monde et contribue ainsi à résorber le taux de chômage. Beaucoup de migrants, surtout les soninkés et les haalpoulars s'activent dans ce sous secteur dont ils détiennent ici le monopole. Des réseaux très structurés sont établis. Il y' a les rabatteurs qui accueillent les clients, leur proposent le service avant des les conduire vers les véritables « trafiquants » qui sont souvent détenteurs de cantines où ils tiennent boutique.

c) Les prestations de services marchands

* Les tailleurs : Leur présence à Rosso se remarque vite par le visiteur. Ils sont nombreux à y exercer leur métier. Leur travail s effectue dans des baraques en taules de zinc souvent rouillé. On peut trouver parfois plus de quatre machines dans un atelier ou ils sont regroupés. Pourquoi ont -il choisi de s'installer ici ! La réponse est presque une évidence. Selon un d'entre eux que nous avons interrogé il s'est installé ici

« Pour travailler à la sueur de leur front pour avoir de quoi subvenir à leur besoin mais nous nous sommes surtout établis ici parce que c'est mieux pour l'exercice de notre métier de tailleur. Aussi sommes nous là parce qu'il y a une demande très forte qui vient de Rosso Mauritanie et qu'il faut la satisfaire. Seulement nous avons choisi de ne pas aller nous installer là bas puisqu' ici nous pouvons tirer plus de revenus alors que sur la rive gauche les maures ne sont pas toujours faciles à vivre. »

Ainsi donc nous pouvons dire que c' est surtout la présence d' une clientèle qui provient de la ville voisine qui fait que les tailleurs s' installent de plus en plus à Rosso Sénégal.

* Les Pousse -pousse : Sur la place du débarcadère ; dans la place du marché ; dans les artères de la ville, on rencontre presque dans tous les coins de rue des  véhicules poussés à deux bras qui sont souvent lourdement chargés de marchandises, de valises etc. Ce sont les Pousse -pousses. Pour Rosso, nous pouvons dire qu'ils font partie du décor. Il sont d'une très grande utilité pour le transport des marchandises du débarcadère vers ce qui sert de gare routière. Leur efficacité est aussi à mettre en rapport avec leur adoption au milieu urbain. En effet Rosso se trouve confronté à un problème d'espaces. Les pousse- pousse sont ici des véhicules adaptés pour transporter les marchandises en grande quantité en évitant le plus les embouteillages. Le travail de pousseur de pousse -pousse est aussi une occupation qui rapporte pour ceux qui exercent ce métier. En moyenne un pousseur peu gagner entre 2000 f CFA et 7500 f CFA par jour. La plus grande partie des pousseurs ne possède pas l'outil de travail et sont à la solde de propriétaires moyennant un salaire.

* Les garages de mécaniciens et les menuiseries métallique et de bois : La vétusté du parc automobile est sans doute l'une des raisons qui favorisent l'implantation de garages de mécaniciens. La proximité d'une ville capitale régionale sur l'autre rive engendre aussi des demandes à satisfaire dans ce domaine. C'est ainsi qu'on note leur forte présence dans la localité.

* Les restaurants, gargotes et dibiteries ; L'une des principales activités qui marchent ici c'est la restauration. C'est une activité très florissante vu le nombre impressionnant qu'on y rencontre dans un espace aussi réduit que la place du marché de Rosso. Sans évoquer de chiffre nu regard simple promené sur les devantures des bâtiments ou baraques nous renseigne sur le nombre de restaurants. Elle est une occupation, principalement, pour les femmes. Elles participent ainsi à la création de richesses pour la ville.

Les dibiteries aussi ne passent pas inaperçues du fait de leur nombre important. C'est le domaine des hommes. La situation de ville d'étape oblige souvent les voyageurs à se restaurer en attendant les heures de rotation ou simplement en patientant que leur tour arrive de traverser.

* Les télé-centres : Les télé-centres font partie de ce qui marche le mieux à Rosso. De nombreux jeunes se sont investis dans ce nouveau secteur des télécommunications. La communication est ici un besoin des populations de la ville des voyageurs mais aussi des mauritaniens aussi viennent souvent exprès à Rosso Sénégal pour passer des appels, surtout les appels internationaux. En effet, le Sénégal fait partie des pays africains les plus en avance dans ce domaine. Les tarifs sont plus réduits que ceux qui sont pratiqués en Mauritanie. Comme partout au Sénégal les télé- centres jouent ici un rôle important dans la réduction du chômage des jeunes. En ce qui concerne les échanges transfrontaliers ils sont d'une utilité reconnue. Ils participent à rendre les échanges plus fluides en cela qu'ils sont des véhicules d'informations qui sont indispensables pour asseoir un environnement des échanges plus facile.

* Les unités de transformation du riz : Ils sont bien présents dans la ville. L'importance de leur nombre rend compte de la place qu'occupe le marché du riz dans la localité. Ces unités de transformation sont de petites entreprises qui participent à juguler la crise de l'emploi. Ils occupent des jeunes et des femmes qui sont à tous les niveaux de la transformation ainsi qu'au niveau de la vente du riz. La particularité ici c'est que l'essentiel du riz transformé est destiné au marché mauritanien. C'est par conséquent, la principale raison de la localisation en grand nombre de ces entreprises est à mettre en relation avec la proximité avec la ville capitale régionale du Trarza. La taille de cette localité favorise une demande à satisfaire. Ces entreprises s'installent à Rosso Sénégal. Pour eux c'est moins contraignant et ils ne sont pas toujours obligés de subir les humeurs des autorités frontalières mauritaniennes. A la question de savoir les avantages qu'ils tirent de rester à Rosso c'est de pouvoir être payé en franc CFA.

Si nous avons insisté pour parler de ces activités qui sont des parties intégrantes du secteur informel c'est pour montrer leur présence remarquable. Elles ont un point commun au moins outre le fait d'être informels c'est qu'elles tirent leurs prospérités des échanges frontaliers. Cependant elles jouent un rôle très important dans la réduction du chômage, donnent des réponses aux besoins des populations et participent à rétrécir le cercle de la pauvreté des ménages corrigeant ainsi les inégalités sociales.

2. Atténuation de la crise sociale urbaine

Une enquête menée dans les ménages nous a permis de voir qu elle pouvait être l'impact des activités transfrontalières dans l'économie locale domestique mais aussi d'avoir la mesure des effets sur la constitution des budgets des ménages. Cette enquête s'est réalisée sur 105 ménages. Les ménages sont choisis de manière aléatoire sans tenir compte de leur localisation dans la ville. Il faut souligner que pour nous ménage ne signifie pas concession. Dans une concession on peut avoir plusieurs ménages et c'est une situation fréquente pour Rosso.

Tableau  7 : Le revenu mensuel des ménages dans la commune de Rosso

Montants

Effectifs

Taux %

]- 30 000]

04

3.8

[30 000 - 50 000]

24

22.8

[50 000 - 75 000]

34

33.3

[75 000 - 100 000]

18

17.1

[+ 100 000[

24

22.8

TOTAL

105

100

Source : donnés de l'enquête juin 2005

Le tableau des revenus des ménages montre que 35% de la population à un niveau de revenus compris entre 50 et75000 francs CFA, 18% sont entre 75 et 100000 f CFA. Il est important de constater que prés du quart des ménages enquêtés présente un niveau de revenus supérieurs à 100 000 francs CFA par mois.

a) La participation des femmes aux activités frontalières.

Les raisons de cette implication des femmes dans le commerce transfrontalier sont liées à plusieurs facteurs :

La crise de l'emploi : C'est une donne valable pour majeure partie des villes ouest africaine. De plus en plus les femmes investissent le secteur informel. Pour le cas de Rosso le commerce transfrontalier a été une solution pour atténuer les effets de la crise. Grâce à leur petit commerce, les femmes participent à la formation du revenu des ménages.

La facilité de l'accès au commerce : L'entrée des femmes dans le commerce transfrontalier est relativement facile. Elle ne demande pas souvent de disposer d'un capital énorme pour y accéder. Avec des sommes relativement faibles, femmes peuvent ouvrir des étales où elles vendent du sucre, des biscuits, du thé, du savon, des cigarettes, et biens d'autres articles vendus au détail dans les coins de rue.

Habileté à contournement de la répression : Les femmes ont ici la réputation de pouvoir déjouer le contrôle de la douane mais aussi d'être plus tolérées par ces derniers. Par ailleurs les femmes usent de stratagèmes très malignes pour tromper la vigilance des autorités. Il faut cependant montrer la place importante des femmes venant d'autres localités qui viennent elles aussi jouer leur partition.

Les résultats de l'enquête ménage révèlent que les ménages qui présentent le plus important revenu sont ceux qui ont plus de membres qui se développent dans les activités transfrontalières.

Il faut souligner ici le fait des travailleurs transfrontaliers. De nombreux habitants de la ville se rendent très fréquemment à Rosso Mauritanie et au-delà pour profiter des offres de travail qui ne manquent pas dans les villes mauritaniennes. Ces travailleurs transfrontaliers ont été presque toujours présents. Un regard sur l'histoire montre que déjà pendant la période coloniale des sénégalais sont partis en masse travailler sur la rive gauche. Ce sera le cas aussi au lendemain des indépendances. Aujourd'hui aussi les travailleurs transfrontaliers existent. Seulement sous d'autres formes et selon de nouveaux rapports.

b) Les mouvements pendulaires 

Les mouvements pendulaires quotidiens : Chaque matin, de nombreux habitants de la ville se rendent sur la rive gauche pour y travailler. Ils sont présents dans le secteur de la construction, des transports, de la pêche, du mareyage, dans l'artisanat. Les mouvements pendulaires sont journaliers pour une bonne partie des travailleurs transfrontaliers. Ils peuvent aussi être hebdomadaires. Le plus souvent ils dépendent simplement des heures de rotation du bac ou des allers et retours des pirogues.

Ces transfrontaliers parviennent à subvenir aux besoins de leurs familles grâce aux emplois exercés dans le pays voisin. C'est la survie de familles entières qui dépend des activités transfrontalières surtout celles exercées par les femmes.

Les grands retours les veilles de fêtes : Les grandes fêtes particulièrement celles musulmanes comme les « tabaski », les « korités » occasionnent des retours massifs de ressortissants de la ville. C'est dans de pareilles occasions que beaucoup de travailleurs, souhaitant communier avec leur famille, préfèrent revenir. Ces flux massifs de population viennent confirmer le rôle de la proximité dans la recherche de solutions pour les habitants de ville en terme de recherche d'emplois.

Aujourd'hui 65% des ménages enquêtés affirment avoir au moins un membre de leur famille qui se trouve en Mauritanie. Les rapports que la population entretient avec le pays voisin, sont très complexes et de plusieurs ordres.

Les relations économiques sont les plus visibles. Les populations vont faire leur marché à Rosso Mauritanie et semblent ne pas tenir compte de la frontière. La plus part des produits de consommation domestiques sont directement achetés en Mauritanie.

En plus de ces rapports économiques qui poussent à la fréquentation viennent les liens sociaux. La plupart des familles ont des parents proches établis sur l'autre rive. Ces liens occasionnent des déplacements fréquents de part et d' auutre du fleuve et dans les deux sens.

Ces deux liens sont difficiles à distinguer car souvent il est difficile de savoir lequel des deux motive le déplacement. Tous deux peuvent servir de prétexte pour vaquer à de petits trafics qui sont plus ou moins tolérés par les autorités. Seulement il faut souligner que c'est par eux que des quantités énormes de marchandises entrent dans la ville. On aura aussi compris que c'est par les réseaux tissés par le biais que la contrebande se développe et inonde le marché local et les autres localités environnantes.

CHAPITRE III : LA RENTE FRONTALIERE COMME SOURCE DE REVENU POUR LA MUNICIPALITE

Selon les textes de la décentralisation, ne peuvent être constituées en commune que les localités ayant un développement suffisant pour pouvoir disposer de ressources propres nécessaires à l'équilibre de leur budget61(*). La commune de Rosso répond sans doute à ce critère simple pour avoir été érigé en 2002 en commune de plein exercice. En tant ville frontalière, la rente tirée de sa position est d'une importance dans la mobilisation des ressources. Les échanges transfrontaliers constituent pour la commune de Rosso Sénégal un enjeu économique majeur. Ils sont devenus aujourd'hui un facteur incontournable dans la mise en oeuvre des politiques et des programmes visant le développement. Pour s'en convaincre il faut regarder la place occupée par les activités dépendantes directement des échanges transfrontaliers dans la mise sur pied du budget.

1. Un budget communal essentiellement dépendant de la rente frontalière.

La commune dépend pour la constitution de son budget annuel essentiellement des recettes prélevées sur les activités qui se déroulent grâce à l'existence de la frontière. Nous allons a travers une étude détaillée des secteurs participants au budget voir le poids des activités frontalières sur ce dernier.

Au regard des chiffres qui indiquent la participation des différents secteurs à la constitution du budget de la commune il ressort nettement que les activités qui contribuent le plus sont celles dont la pratique est majoritairement si non totalement dépendante de l'ouverture de la frontière. Il est aussi clair que l'existence et la survie de la commune sont liées à l'existence et à la florescence des activités et des effets frontaliers induits.

Le tableau de la page suivante nous montre les secteurs qui font entrer des recettes pour la commune. Les chiffres proviennent du service départemental de la perception et font l'état des finances de la commune de l'année 2005 au mois de juillet.

Le tableau nous montre que les prévisions les plus importantes sont faites sur les chapitres tels que les « légalisations », « les produits de droit de places » concernant les étales des marchands, « les permis de stationnement ». Ces chapitres dans le budget occupent respectivement dans les prévisions budgétaire de l'année 2005 : 28.7, 14.9 et 40.1% ; dans les prévisions de recette. Après six mois d'exercice, le recouvrement concernant ces trois chapitres s'élève à 89.3% du taux de recouvrement.

Les légalisations sont les droits que toute personne désireuse de se rendre à Rosso Mauritanie doit payer à la mairie à hauteur de 500 f CFA. La prévision concernant ce chapitre du budget était estimé à 25.000.000 f CFA pour l'année 2005. En fin juillet le taux de recouvrement était de 8.660.000 f CFA.

Les permis de stationnement concernent les véhicules qui passent par Rosso. Ces véhicules peuvent passer parfois des jours à attendre leur tour de passage. Pour une prévision de recette de 35.000.000 f CFA la commune a collecté après d'exercice, une rentrée de 13.404.900 f CFA.

C' est aussi le cas pour les droits de places qui sont payés par les marchands, les commerçantes et les commerçants , les marchands occasionnels , les artisans , et tous ceux qui pour exercer leurs activités occupent une place localisable par les collecteurs de la mairie.

Les ressources que la commune tire des activités qui se déroulent au sein de son territoire sont d'une importance non négligeable dans la confection du budget communale. Or, le tableau que nous avons ici montre de manière nette la part considérable de secteurs dont l'existence est exclusivement liée à l'activité transfrontalière.

Il y'a donc une dépendance certaine de la municipalité vis à vis d'activités qui, même si elles ne sont pas précaires, ne jouissent pas d'une stabilité sans faille. On constate ici que la source de revenus de la municipalité est intrinsèquement attachée aux activités qui se déroulent au sein de l'espace frontalier. La question qui se pose ici est naturellement la viabilité de cette nouvelle collectivité de base. Car si le développement local doit être entre les mains de la municipalité à partir de ses ressources propres, il est évident que pour le développement communal de Rosso Sénégal la rente frontalière est au centre du processus.

Tableau 8: Les prévisions de recette et le recouvrement effectif des recettes sur le budget 2005

Situation au 31 juillet 2005

Nomenclature

Prévisions

Taux

Recouvrements

Taux

Taxes sur les ordures ménagères

1 000 000

1,1

55 800

0,1

Etats civil

1 500 000

1,7

170 000

0,5

Légalisations

2 500 000

28,7

8 660 000

26,6

Locations restaurants et gargots

500 000

0,5

500 000

1,5

Produits droits de place

13 000 000

14,9

6 960 000

21,4

Permis de stationnement

35 000 000

40

13 404 000

41,2

Droit d'occupation du domaine public

1 500 000

1,7

57 5000

0,1

Patentes

6 000 000

7

1 990 000

6,1

Impôt sur le foncier bâti

2 000 000

2,2

193 975

0,5

Taxes sur les véhicules hippomobiles

1 000 000

1,1

390 000

1,2

Taxes sur les spectacles

300 000

0,3

29 000

0,08

Taxes sur l'électricité

300 000

0,3

70 000

0,2

TOTAL

84 600 000

100 %

32 482 015

100 %

Source : Commune de Rosso Sénégal, juillet 2005

2. Des obstacles à la collecte des revenus

Malgré l'apport considérable dans la formation du budget de la commune, d'après les autorités municipales, la ville ne bénéficie pas au maximum de la rente frontalière. En effet la municipalité ne disposant pas de suffisamment de moyens pour titrer partie des potentialités de ressources.

* Moyens institutionnels insuffisants : La commune n'est pas la seule institution qui intervient dans la gestion des activités transfrontalières. Elle partage ce travail avec des organes de l'Etat central qui sont présents pour saisir les opportunités offertes par la frontière. La commune n'a donc pas les coudées franches pour organiser à sa guise les activités. On assiste souvent à des conflits d'intérêt qui découlent du fait que les enjeux sont importants.

* Difficultés liées à la maîtrise des flux. La mairie doit en principe prélever 500f CFA sur chaque voyageur. Seulement tous ceux qui franchissent de la frontière à ce niveau ne payent pas toujours la taxe. Les usagers usent de ruses pour ne point s'acquitter de ce devoir. Il faut souligner que la mairie ne dispose pas d'instruments de contrôle des flux sur le débarcadère. Ce problème est lié à la vétusté de l'infrastructure et au conflit d'intérêt entre les administrations déconcentrées (police et douane) et l'administration locale.

* Difficultés de localisation de certaines activités : Des activités comme par exemples le change, sont difficilement repérables pour un prélèvement efficace des taxes malgré leur présence en grand nombre sur l'espace et leur rôle important dans le processus. C'est une perte de recette énorme pour la commune.

* Le manque d'infrastructures : La ville souffre d'un manque d'infrastructures et d'équipements qui sont la base de tout développement urbain. L'absence de ces dernières ne facilite pas pour la collectivité le travail de collecte de revenu qui est indispensable au financement de son développement.

Une politique de collecte s'impose pour la commune pour pouvoir titrer le plus de gains de sa situation de ville frontalière.

3. Les défis posés par les impératifs de développement municipal.

La situation de « ville frontière » ne présente pas que des opportunités pour la commune de Rosso. Elle pose aussi de nombreux défis à relever amenant ainsi la collectivité à devoir répondre à des questions spécifiques et contextuelles. La réponse à ces questions est aussi une des voies naturelles pour impulser un développement local durable. La promotion du développement local urbain, la réadaptation du commerce local à la réalité économique du milieu, la sécurité des populations, les effets néfastes sur les efforts d'éducation etc.., sont quelques défis majeurs auxquels fait face la municipalité.

La promotion du développement local urbain : Depuis son érection en commune, la ville fait face à de nouvelles responsabilités. Ces dernières doivent être à la hauteur du rôle que doit jouer la ville dans le contexte géopolitique dans lequel il est placé. C'est pourquoi depuis 2004, en partenariat avec l'Agence Régional de Développement, la commune a élaboré un Plan d'investissement communal dans lequel sont diagnostiqués l'ensemble des secteurs qui font la ville ; ce document fait l'état des lieux ; définit, en rapport avec les populations, les différentes priorités et propose un plan d'investissement qui à terme donne à la ville un statut plus respectable de commune. Selon les autorités de la municipalité, seule la promotion du développement urbain changera la situation actuelle qui fait que beaucoup de valeur ajoutée est perdue à cause de la vétusté du cadre urbain et d' une absence notoire de politique d'aménagement. Celle-ci passe par :

· La réalisation d'infrastructures urbaines : Elles sont essentielles pour la ville qui en affiche un réel déficit.

· La mise sur pied de structures d'accueil : Pour une ville porte d'entrée et qui est un lieu de transit bien fréquenté, Rosso ne possède pas de structures d'accueil pouvant répondre aux besoins éventuels d'hébergement. C'est ici une contrainte qui fait que beaucoup de voyageurs passent leurs nuits à Richard Toll ou Saint-louis. La définition d'une bonne politique d'assainissement afin d'améliorer le cadre de vie. Lutter contre certains fléaux qui sont des résultantes directes des activités se passant à la frontière comme :

· Renforcement de la sécurité sanitaire des populations: Les déplacements quotidiens des populations et l'enregistrement de nouveaux venus font que la ville est le lieu de rencontre d'individus venus de tous horizons. Le contact humain est ici une réalité. Cette situation de carrefour fait de ville une zone potentiellement à risque pour des maladies pandémiques : les maladies sexuellement transmissibles (sida), le cholera.

La ville se singularise par la vétusté de ses infrastructures sanitaires qui ont du mal à prendre en compte cette réalité. Les populations se trouvent donc dans une situation d'insécurité sanitaire qui est due à la place qu'occupe la localité dans les échanges transnationaux entre le Sénégal et ses voisins. La collectivité qui a la charge de la santé de la population a ici un rôle important à jouer.

La lutte contre la déperdition scolaire : Le gouvernement du Sénégal fournit des efforts considérables pour asseoir une bonne politique d'éducation. Dans cette politique, la généralisation de l'éducation, la scolarisation des filles, le maintien à l'école, figurent en bonne place dans le tableau des objectifs. Dans le cadre de la décentralisation, l'éducation est devenue une prérogative des collectivités de base.

La commune de Rosso se trouve confronté à un défi majeur : celui du maintien des enfants à l'école surtout des jeunes filles. Ces dernières sont les victimes du phénomène de la déperdition scolaire qui est une gangrène de l'école dans la commune.

Frappés par la pauvreté, nombre de jeunes se lancent dans les activités de contrebande, de trafic, entrent dans le « tieup-thieup », vont travailler en Mauritanie pour aider des familles démunies. La commune pourra initier des campagnes de sensibilisation pour le maintien des jeunes surtouts des jeunes filles à l'école.

Prévention contre la délinquance juvénile : De nombreux enfants gravitent au niveau du débarcadère. Ils sont dans le « thieup thieup ». La plus pars sont dans la petite délinquance et font des victimes auprès des usagers. La ville est aussi un lieu potentiel de passage de drogue et de produits prohibés créant une situation d'insécurité auprès des jeunes.

Conclusion partielle

Les défis auxquels se confrontent la collectivité de Rosso Sénégal montrent bien que loin de toujours constituer des opportunités de profits pour les populations, les échanges transfrontaliers ont aussi des effets négatifs sur quelques aspects du développent local. Toutefois, ces dommages collatéraux ne remettent pas en question l'utilité économique et sociale de ces échanges. Seulement ils appellent de la part des autorités locales une meilleure prise en charge de la réalité frontière dans l'élaboration et la mise en place des plans et programmes de développement local. Pour se faire, les activités qui se déroulent aux frontières doivent non pas être considérées comme des anomalies à corriger mais plutôt comme un potentiel à explorer pour la collectivité.

CONCLUSION GENERALE

La politique de décentralisation qui constitue le lieu de mise en oeuvre des politiques de développement local, institue aux collectivités de s'appuyer sur leurs ressources réelles ou potentielles pour se structurer. De plus en plus les Etats se retirent en délégants leurs compétences aux gouvernements locaux. La loi au Sénégal portant transfert des compétences a été votée en 1996. Presque une décennie après sa promulgation, les collectivités locales dans leur majorité peinent à s'acquitter convenablement des nouvelles responsabilités qui leur sont attribuées.

Pour le cas de la ville de Rosso, les ressources qui constituent les moteurs du développement local sont tributaires de la réalité géopolitique et géographique du milieu. Toute politique visant le développement de cette cité doit nécessairement intégrer cette réalité, s'appesantir sur les mécanismes à mettre en place afin de faire profiter la commune au maximum de l'importante rente engendrée par l'effet frontière, de considérer les activités se déroulant au niveau de la frontière non point comme un désordre dont il faut se désoler mais surtout comme un levier du développement. En effet, il est impossible de penser l'épanouissement économique des villes périphériques  en ignorant la réalité géographique et économique qui les soutiennent.

Au regard des résultats obtenus, il apparaît clairement que, la ville pour sa survie et son développement socio-économique doit beaucoup à sa voisine du nord. La proximité géographique, la situation de ville carrefour : le seul point de la vallée à disposer d'un bac pour traverser, font que de nombreuses activités y sont développées, différents et divers acteurs y exercent leurs activités dont le but ultime est de tirer le maximum de profit des opportunités que fournit la localité. Tout ce dynamisme se ressent dans le regain d'intérêt observé par les populations de la vallée pour cette nouvelle commune.

Avec l'effet frontière, presque la quasi-totalité des activités qui soutiennent l'économie urbaine sont étroitement liées à la nature des relations entre le Sénégal et la Mauritanie. La nouvelle municipalité a révélé sa dépendance vis-à-vis des recettes qu'elle tire de la frontière pour la constitution de son budget qui, on le sait, est le principal instrument pour opérer les investissements nécessaires à la création d'un environnement urbain viable, vivable.

On l'a vu, l'essentiel des acteurs de l'économie locale gravitent autour des activités transfrontalières. La plus grande partie du produit local brut est engendrée par des secteurs directement rattachés aux activités transfrontalières. D' où la nécessité de prendre en compte cette réalité dans les politiques de développement de la localité.

Le développement futur de la ville ne peut se faire sans que l'on prenne en compte des scénarios qui intègrent des variables tels que l'évolution des rapports politiques entre le Sénégal et la Mauritanie, les changements politiques en Mauritanie etc.

Depuis quelques temps, ces rapports se sont réchauffés et les cadres de la coopération bilatérale ne cessent de se consolider par des actes posés par les autorités de part et d'autre. De grands projets sont annoncés comme la réalisation d'un pont qui va relier les deux rives à Rosso. Avec l'avènement du nouveau pouvoir, et compte tenu des voyages d'affaires les déplacements annoncés des nouvelles autorités mauritaniennes sur Dakar, on s'achemine vers une consolidation des relations. Il ne faut pas oublier aussi l'exploitation prochaine des gisements de pétrole découverts à Keur Massène, village mauritanien situé dans la zone du bas Delta mauritanien qui devrait fournir des emplois supplémentaires au profit des localités de la zone.

Toutes ces mutations annoncées de part et d'autre ne vont pas laisser la ville indemne. D'une manière ou d'une autre Rosso doit s'attendre à devoir jouer un rôle plus important que ce qu'elle a connu jusqu' à présent. C'est pourquoi des projets comme le plans d'investissement communal doivent se focaliser surtout sur l'anticipation pour que Rosso puisse intégrer ces nouvelles mutations sans grands heurts.

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27. MAIGA M., 1995 : Le bassin du fleuve Sénégal : de la traite négrigrière au développement local autocentré, Paris, l' Harmattan, 321p.

28. MAIGA M., 1995 : Le fleuve Sénégal et l'intégration de l'Afrique de l'Ouest en 2011, Dakar, CODES RIA.

29. MEAGHER K., 1996 : « Le commerce parallèle en Afrique de l'Ouest : intégration informelle ou subversion économique ?» in Intégration et coopération régionale en Afrique de l'Ouest, Paris, Karthala, pp.197-222.

30. NIANG A., 1996 : « Le secteur informel, une réalité à ré explorer : ses rapports avec l'institution et ses capacités développantes » in Africa Développement, vol. XXI N° 1, pp.57-80.

31. NIANG A., 1997 : « Le secteur informel en milieux urbain, un recours à la crise de l'emploi au Sénégal » in Ajustement structurels et emploie au Sénégal, Paris, Karthala- CODESRIA, pp.29-55.

32. NOON H., 2001 : « Régions et Nations » in Les Concepts de la Géographie Humaine, Paris, Armand Colin, V.U.E.F, 333 p.

33. POURTIER R., 2001 : Afrique Noire, Paris, Hachette, coll. Carré géographique, 256 p.

34. SAM K., 1996-1997 : Situation et intégration des réfugiés mauritaniens au Sénégal : le cas du département de Matam, Mémoire de maîtrise de sociologie, Université Gaston Berger de Saint-Louis, 110 p.

35. SARR C., 1997 : Relance des économies locales en Afrique occidentale : le cas du département de Dagana ; le peuplement, l'occupation de l'espace et l'aménagement du territoire du Delta. CLUB DU SAHEL, 90 p.

36. SECK S. M., 1991 : « Les cultivateurs transfrontaliers de Diome face à la question foncière » in La vallée du fleuve Sénégal : évaluation et perspectives d'une décennie d'aménagement, Paris, Karthala, pp. 297-315.

37. SINJOUN L., 2002 : Les relations internationales africaines : entre Etats en crise et flux transnationaux, Dakar, CODESRIA, 95 p.

38. STARY B., 1997 : « De la rente agricole à la rente frontalière : Niablé une petite ville ivoirienne à la frontière du Ghana » in Petites et moyennes villes d'Afrique Noire, Paris Karthala, pp. 61-85

39. STRYKER J. D. et al, 1996 : « Une stratégie pour les échanges et la croissance en Afrique de l'Ouest : analyse sectorielle et plan d'action » in Intégration et coopération régionale en Afrique de l'Ouest, Paris, Karthala-CRDI, pp.223-250

40. WACKERANN G., 2000 : Géographie humaine, Paris, Ellipse Marketing SA, 352 p.

41. WARR B., 1997 : Relance des économies locales en Afrique de l'Ouest : cas du département de Dagana Région de Saint-louis (Sénégal) ; la pêche dans le département de Dagana, Club du Sahel.

42. YAPI-DIAHOU A., 2003 : La recherche urbaine à l'épreuve des milieux marginalisés dans la ville : Réflexion sur les défis méthodologiques en sciences humaines, EDUCI, (collection Recherche et Méthodologie), 123 p.

LISTE DES TABLEAUX

Pages

Titres

1

32

Données démographiques sur la ville de Rosso Sénégal : Situation des ménages de la ville de Rosso en 2002

2

67

Produits qui proviennent de Rosso Mauritanie.

3

68

Les produits sénégalais s'exportant en Mauritanie

4

72

Le nombre de touriste de Passage à Rosso Sénégal

5

72

Flux de mauritaniens entrés au Sénégal entre le 1er janvier et 4 Avril 2004

6

87

Les domaines d'activité des chefs de ménage

7

93

Le revenu mensuel des ménages dans la commune de Rosso

8

98

Les prévisions de recette et le recouvrement effectif des recettes sur le budget 2005. Situation au 31 juillet 2005

LISTE DES FIGURES

Pages

Titres

1

33

Répartition ethno-démographique de la population

2

82

Les flux sortants du territoire sénégalais 

3

83

Le circuit officiel des flux entrant dans le territoire sénégalais par

Rosso- Sénégal :

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE 2

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS 3

INTRODUCTION GENERALE 4

PROBLEMATIQUE 7

HYPOTHESES 10

QUESTIONS DE L' ETUDE 10

OBJECTIFS POURSUIVIS 11

APPROCHE THEORIQUE 12

METHODOLOGIE 19

PREMIERE PARTIE : Présentation du cadre d'étude et des facteurs de développement des échanges transfrontaliers 21

CHAPITRE I : PRESENTATION DU CADRE REGIONAL ET LOCAL 24

1. Le cadre régional 24

a) Le cadre géographique général du Delta 24

b)Une région dépositaire d'une vieille tradition urbaine. 26

c) L'économie locale du Delta 27

2. Monographie de la ville de Rosso Sénégal. 30

a) Caractéristiques physiques et ethno démographiques de la population 30

b)Les systèmes de production 33

c) L'état des infrastructures. 34

CHAPITRE II: HISTORIQUE DES RELATIONS SENEGALO-MAURITANIENNES 38

1. Evolution des rapports avant et pendant la colonisation 38

a) Le déclin du royaume du Walo 38

b) La vallée lieu d'affrontement de la caravane et de la caravelle 39

c) la pénétration européenne ou l'ère de la colonisation 40

2. Des indépendances nationales au conflit frontalier de 1989 42

a)La réalité des frontières nationales 42

b)Une volonté d'intégration toujours exprimée 46

c)Le différend frontalier de 1989 47

CHAPITRE III: LES FACTEURS DE DEVELOPPEMENT DES ECHANGES TRANSFRONTALIERS 52

1. Les aspects politiques des échanges transfrontaliers. 52

a)Une exigence géopolitique 52

b)La complémentarité territoriale 53

c)Les différences des politiques nationales 54

2.Les facteurs géographiques des échanges transfrontaliers 56

a)Une ville carrefour et un passage obligé 56

b)La position géographique avantageuse de Rosso Mauritanie 57

c)Rosso Sénégal : Une ville plus tournée vers son homologue mauritanien 57

3. Les aspects économiques des échanges transfrontaliers. 58

a)L'intégration économique «de fait » 58

b)Le différentiel économique 59

c)Les effets de la crise économique 60

4. Les aspects humains : une variable centrale dans les échanges transfrontaliers. 63

a)Identité des peuples et des cultures 63

b)Une gestion « souple » de circulation entre les deux villes voisines 63

c )Essa d'identification du contenu des échanges 65

DEUXIEME PARTIE : L'organisation du système des échanges transfrontaliers 69

CHAPITRE I: LES ACTEURS INTERVENANTS DANS LES ECHANGES TRANSFRONTALIERS 70

1. Le rôle de l'Etat, de ses agents déconcentrés et de la collectivité locale. 70

a) La douanes : un rôle d'encadrement, de surveillance et de contrôle 71

b) La police et la gendarmerie 72

c) La commune : un acteur comme les autres 73

2. Le rôle du secteur privé 74

a) Les agences de transit (sociétés et particuliers) 75

b) Les sociétés d'assurance 76

c) Les agents transporteurs 77

3. Les commerçants transfrontaliers. 83

a) Rosso Sénégal : une ville de transit plus qu'un marché 83

b) Les commerçants fixés à Rosso Sénégal. 84

c) Les commerçants itinérants ou « banas-banas » 85

CHAPITRE II : UNE ECONOMIE URBAINE SOUTENDUE PAR LES ACTIVITES DU SECTEUR INFORMEL 87

1. Un secteur intermédiaire dynamique 87

a) Les travailleurs transfrontaliers. 88

b) Les agents de change ou « trafiquants » 89

c) Les prestations de services marchands 91

2. Atténuation de la crise sociale urbaine 93

a) La participation des femmes aux activités frontalières. 94

b) Les mouvements pendulaires 95

CHAPITRE III : LA RENTE FRONTALIERE COMME SOURCE DE REVENU POUR LA MUNICIPALITE 97

1. Un budget communal essentiellement dépendant de la rente frontalière. 97

2. Des obstacles à la collecte des revenus 100

3. Les défis posés par les impératifs de développement municipal. 101

CONCLUSION GENERALE 104

BIBLIOGRAPHIE 106

LISTE DES TABLEAUX 111

LISTE DES FIGURES 111

TABLE DES MATIERES 112

ANNEXES 113

ANNEXES

QUESTIONNAIRE

L'impact des échanges transfrontaliers dans l'économie des ménages dans la ville de Rosso Sénégal.

I. Identification du ménage :

1.1. Taille du ménage (nombre de personnes) : 2 3 4 5 6 7 8 9 10 +10

1.2. Répartition par âge des membres :

- entre 0 et 10 ans

- entre 11 et 15 ans

- entre 16 et 20 ans

-entre 21 et 25 ans

-entre 26 et 30 ans

- plus de 30 ans

II. Identification du chef de ménage :

2.1. Age.........

2.2. Sexe...

Masculin Féminin

2.3. Religion

Musulmane Chrétienne Autres

2.4. Ethnie...

Haalpoular wolof maure soninké autre à préciser......

2.5. Langues parlées...........................

2.6. Origine..............................

III. Situation matrimoniale du chef de ménage :

3.1. Marié (e)

- Monogame Polygame

3.2. Divorcé (e)

3.3. Célibataire

3.4. Veuf ou Veuve

IV. Situation professionnelle du chef de ménage :

4.1. Occupé (e) préciser le travail ...........................

4.2. Chômeur

4.3. Retraités

V. Situation économique du ménage

5.1. Nombre de personnes en activité dans le ménage:

1 2 3 4 5 6 7 8 9 1 0 +10

5.2. Revenu mensuel moyen du ménage 

-moins de 30 000f CFA

-entre 30 000f CFA et 50 000f CFA

-entre 50 000f CFA et 75 000f CFA

- entre 75 000f CFA et 100 000f CFA

- plus de 100 000f CFA

VI Rapports du ménage avec la ville voisine

6.1 Y a t- il un ou des membres du ménage qui travaille (ent) en Mauritanie ?

OUI NON

6.2. Si oui, combien sont - ils ?

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 +10

6.3. 1.Quelle profession y exercent t- ils ? (Préciser la profession)

................................................................................................

................................................................................................

.................................................................................................

6.4. 2. Font t-ils des mouvements pendulaires :

Une fois par jour,

Plusieurs fois par jour

Une fois par semaine,

Plusieurs fois par semaine

6.5 En dehors du travail allez vous à Rosso ?

6.6 Pourquoi ?

.......................................................................................................................................................................................

Guide d'entretien destiné à l'administration des douanes

1. Quand est ce que la brigade des douanes de Rosso a- t- elle été, mise en place ?

2. Combien d'éléments sont ils en poste dans cette brigade ?

3. Quelle est la mission de l'administration douanière au sein de l'espace frontalier ?

4. Quelles catégories de personnes se présentent-elles le plus au poste de contrôle douanier ? (Pouvons avoir des statistiques qui pourront nous le montrer plus clairement ?)

5. Quelles sont les dispositifs réglementaires qui régissent actuellement le commerce frontalier dans son ensemble ?

6. Quelles catégories de marchandises sont les plus déclarées au niveau de la douane ?

7. Y a-t-il des produits dont l'importation est systématiquement prohibée ?

8. Si oui : les quelles et pourquoi ?

9. Comment s'effectue la taxation des produits importés ?

10. Les commerçants s'acquittent ils du devoir de payement des taxes ?

11. Quelle est la destination des droits et taxes prélevés sur les personnes et les biens sur l'espace frontalier ?

12. Selon votre appréciation de professionnelle les populations sont ils au fait des droits qui régissent le commerce transfrontalier ?

13. Quelles sont les mesures prises pour faire connaître le rôle de la douane aux acteurs transfrontaliers ?

Guide d'entretien destiné à la police :

1. En quelle année le poste frontalier de Rosso a t- il été mis en place ?

2. Combien d'éléments sont ils en poste à Rosso ?

3. Quelle est la fonction spécifique de la police au sein de lé espace frontalier ?

4. Quel est l'état de la législation sur les mouvements de population entre les deux rives ?

5. D' après vous les conditions de traversée sont elles rigides ou bien au contraire sont elles faciles ?

6. Disposez vous de statistiques qui puissent nous fournir une idée précise de la densité des flux entrants et sortants ?

7. Pouvons nous avoir une idée du profil des personnes qui traversent le fleuve ?

8. Les étrangers payent ils une taxe spéciale pour fouler le sol sénégalais ?

Figure 1 :: Scène de débarquement de voyageurs

Figure 2 : Piroguiers sur le Quai de Rosso Sénégal

Figure 3 : Le Bac s'approchant du débarcadère

Figure 4 : File de camion attendant leur tour pour traverser

PLANCHE N° 1

Figure 5 : Hangar central du marché de Rosso Sénégal

Figure 6 : Un restaurant et Un télé centre à Rosso Sénégal

Figure 7 : Une unité de transformation de riz

Figure 8  s Le ciment sénégalais se vend bien à Rosso Mauritanie

PLANCHE N° 2

* 1 Frédéric GIRAUT, 1997 : Les petites et moyennes villes d'Afrique noire in Les petites et moyennes villes d'Afrique noire, Paris, Karthala, pp. 17 à 37.

* 2 Jaqueline Beaujeu GARNIER (1997) « géographie urbaine »,4ème édition Paris, 349 p.

* 3 OMVS (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal). Créé conjointement par les Etats du Sénégal, du Mali, et de la Mauritanie en 1971. Sa mission consiste à «  la promotion et la coordination des études et des travaux de mise en valeur des ressources du Bassin du fleuve Sénégal sur les territoires des Etats membres. » 

* 4 Max DURRUAU, (1995,1996) « Géographie Humaine », ed. Armand COLIN/Masson, col. U Géographie, Paris, 468 p.

* 5 Henri NOON, (2001), « Régions et Nations »  in «Les concepts de la géographie Humaine », Armand COLIN/VUEF, Paris, 333p.

* 6 Henri NOON, (2001), idem.

* 7Roger BURNET, (2001), « L déchiffrement du monde : théories et pratiques de la géographie », Belin, Paris,

* 8 Max DURRUAU, (2002), « Géographie Humaine », Armand COLIN, /VUEF, Paris, 447p.

* 9 Gabriel WACKERMANN, (2000), « Géographie Humaine », ellipse Marketing SA, Paris, 352p.

* 10 Gabriel WACKERMANN, (2000) idem.

* 11 Karine BENNAFLA, (1999), « La fin des territoires nationaux ? Etat et commerce transfrontalier en Afrique Centrale », Politique africaine N° 73

* 12 Pape Demba FALL, 2004, Etats-Nations et migrations en Afrique de l' Ouest : le défi de la mondialisation, UNESCO , 22p.

* 13 Bruno STARY, (1997), « De la rente agricole à la rente frontalière : Niablé une petite ville ivoirienne à la frontière du Ghana » in « petites et moyennes villes d'Afrique noire », Karthala, Paris, pp.61-85

* 14 D. BRAND et M. DURASSET, (1999) « Dictionnaire thématique d'histoire et de géographie », Paris, Dalloz, 444p.

* 15 CLUB DU SAHEL / OCDE, 1998 : L'économie local de Saint- Louis et du Delta du Fleuve Sénégal : Etude de cas du programme « Relance des économies locales en Afrique de l'Ouest ». (Résumé).

* 16 La majeure partie des chiffres que nous utilisons dans cette partie sont tirées de l' étude ECOLOC sur le Delta en 1998.

* 17 PLB (produit local Brut) signifie l'ensemble des richesses produites au cours d'une année dans une localité donnée : ici dans le Delta. Définition retenue par les chercheurs du programme Relance des économies locales en Afrique de l' Ouest. (OCDE/ CLUB DU SAHEL).

* 18 CLUB DU SAHEL / OCDE, 1998 : L'économie local de Saint- Louis et du Delta du Fleuve Sénégal : Etude de cas du programme « Relance des économies locales en Afrique de l'Ouest ». (Résumé).

* 19 Bouna WARR, 1997, « Relance des économies locales en Afrique de l'ouest : cas du département de Dagana, Région de Saint-Louis (Sénégal) », CLUB DU SAHEL, OCDE.

* 20 Bouna WARR, 1997, op. cit.

* 21 CLUB DU SAHEL / OCDE, 1998, op.cit

* 22 CLUB DU SAHEL/ OCDE, 1998 : op. cit.

* 23 CLUB DU SAHEL / OCDE, 1998: op. cit.

* 24 Recensement Général de la population (RGPH 2002). Donnés recueillies au prés du service régional des statistiques à Saint-Louis.

* 25 Cheikh SARR, 1997, le peuplement, l'occupation de l'espace et l'aménagement du territoire du Delta, CLUB DU SAHEL/ OCDE, 90pages.

* 26 Le produit local brut renvoie à l'ensemble des richesses produites dans la commune de Rosso Sénégal au cours de l'année.

* 27 Mahamadou MAIGA, (1995), « le Bassin du Fleuve Sénégal : de la traite négrière au développement sous régional autocentré », Paris, l' Harmattan, 321 pages.

* 28 Boubacar BARRI, 1985, « Le royaume du Walo : le Sénégal avant la conquête » Paris, Karthala, 421 pages.

* 29 LERICOLLAIS André, 2002: « L'aménagement de la vallée du Sénégal : logiques nationales et coopération entre les Etats riverains ».

* 30 LERICOLLAIS André. Idem

* 31 BONARDEL Régine, 1992:« Saint Louis du Sénégal : mort ou renaissance », Paris, l' Harmattan,

* 32Régine BONARDEL, 1992, idem

* 33 Confréries religieuses que l'on retrouve aussi bien au Sénégal qu'en Mauritanie.

* 34 Khadissatou SAM, 1996-1997, «  Situation et intégration socioéconomique au Sénégal : le cas des du département de Matam », Mémoire de maîtrise, section de sociologie UGB Saint-Louis,

* 35 SAM cite ici l'ouvrage de ces deux auteurs intitulé : « Le Sénégal sous Abdou Diouf ».

* 36 Décret cité par MAIGA, 1995, p 110

* 37En 1984, trois parties de cadres et d'intellectuels noirs fusionnent pour créer le FLAM. Mouvement politique clandestin en majorité composé de Haalpoulars. Ce mouvement fut accusé de plusieurs actions jugés porter atteinte à l'Etat mauritanien. C'est le cas de la tentative de Coup d' Etat du 28 octobre1987.

* 38 Mahamadou MAIGA, 1992, « l'intégration de l'Afrique de l'Ouest en 2011 », CODESRIA, Dakar.

* 39 Mahamadou MAIGA., 1995, idem, p 216

* 40 Union regroupant les pays ouest africains utilisant le franc CFA.

* 41 Mahamadou MAIGA, (1992), ibid. p113

* 42 Les termes de l'accord d' Aleg signé le 28 Août 1988 repris ici pour avoir une ide de l'esprit dans lequel le conflit a été gr en amont. Cité par Mahamadou MAIGA, 1995, ibid. p 115.

* 43 120 à 160 000 mauritaniens qui vivaient au Sénégal 76 000sénégalais habitants en Mauritanie, 25 à 45 000 Mauritaniens noirs.

* 44 Khadissatou SAM, (1996-1997), Mémoire déjà cité.

* 45 Termes désignait les populations qui ont été victimes du conflit sénégalo-mauritanien. Jusqu' à présent le statut d'une partie de ces populations n'est pas clair. L'association des réfugiés aux Sénégal lutte depuis 1989 pour régulariser cette situation. La question est aussi délicat pour les dirigeants des deux pays tant elle est sensible.

* 46 Principe retenu par l'Organisation de l'unité Africain et reconnu par l'ensemble des Etats membres pour prévenir les risques de conflits pouvant découler de la question des frontières. C'est aussi un moyen d'annihiler toutes les velléités de conquête ou d'invasion d'un pays membre à un autre. Selon ce principe, les frontières héritées de la colonisation sont accepté et maintenus.

* 47 Emmanuel GREGOIRE, 1992 : Quelques aspects des échanges transfrontaliers entre le Niger et le Nigeria in les terrains du développement, approche disciplinaire des économies du Sud, ORSTOM, pp.153-160.

* 48 Luc SINJOUN, (2002), « Les relations internationales africaines : entre Etats en crise et flux transnationaux », CODESRIA, Dakar, 95p.

* 49 M.DIOP, conseiller municipal à Rosso Sénégal.

* 50 Entretient que nous avons eu avec un conseiller municipal de Rosso Sénégal que nous avons trouvé dans le bureau du maire. Nous avons pris en compte ces propos car nous considérons un conseiller municipal comme pouvant être une personne ressource. Il y' a aussi l'âge et le lieu de la conversation qui sont pour nous des gages de crédibilité des propos.

* 51 John. O. IGUE, (1985), idem

* 52 Kate MEAHGER, 1996, « Le commerce parallèle  en Afrique de l'ouest : intégration informelle ou subvention économique. » in Réal LAVERGNE (sous la direction de), 1996, intégration et coopération régionale en Afrique de l'Ouest. pp. 197-222.

* 53 STRYKER J. D., METZEL J. C. et SALINGER B., 1996 : «Une stratégie pour les échanges et la croissance Afrique de l'Ouest : analyse sectorielle et plan d'action » in Intégration et coopération régionale en Afrique de l' Ouest., Paris Karthala- CRDI, pp.223-250.

Ces in jonctions sont prises dans le cadre des programmes d' justement structurels initié en Afrique dans le milieu des années 1980 par la FMI et la Banque mondiale. Elles visaient une stabilisation macro économique des Etats. Elle aussi permis une amélioration des échanges entre pays africains.

* 54 Emmanuel GREGOIRE, (1992), « Quelques aspects des échanges entre le Niger et le Nigeria » in « les terrains du développement, approche disciplinaire des économies du Sud », ORSTOM, PARIS, pp 153-160

* 55 Karine BENNAFLA, (1999), idem.

* 56 Karine BENNAFLA, (1999), op. Cit.

* 57 Propos recueillis au cours des discussions que nous avons eu avec les acteurs sur le quais de d'embarquement et de débarquement.

* 58Ousmane Sène : C'est le président de l'association des commerçants de Rosso- Sénégal affilié à la chambre de commerce de saint-louis. Nous avons eu un entretien avec lui. L'entretien s'étant déroulé en wolof, nous avons reformulé les propos en français en essayant de d'être le plus fidèle possible. Voir guide d'entretien à la partie annexe du document.

* 59 Y. DIALLO, ancien étudiant, opérateur économique et gérant du Complexe Tel Plus à Rosso.

* 60 Nous avons eu un entretien avec lui dans ses locaux. Les séances se sont tenues lors des heures de pause du bac qui occasionne la diminution des clients.

* 61 CESTI et FONDATION KONRAD, 2002 : Les cahiers de l'alternance : élection locales 2002, questions et réponses. Page 31.






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