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Les troubles cognitifs au cours de l'infection par le VIH-1

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par Sandra Suarez
Université Paris VI - Doctorat 2000
  

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3.5. Les troubles mnésiques

3.5.1. Cadre théorique des différents troubles mnésiques

La psychologie cognitive a permis, au cours de la dernière décennie, de mettre en évidence l'existence d'un polymorphisme de la mémoire. Des formes variées de mémoire se différentient par le mode de stockage, de codage et de rappel de l'information, ainsi que par les structures cérébrales qu'elles mettent en jeu144. Nous allons très brièvement en donner un aperçu (pour revue, voir le livre de Tulving traduit par B. Deweer145). La première grande distinction observée est celle d'une différence de durée de conservation de l'information à laquelle s'ajoute une différence de capacité de stockage. On observe sur ce critère la mémoire à court terme et la mémoire à long terme (modèle d'Atkinson et Shiffrin), ces deux stocks de mémoire fonctionnant probablement en parallèle. On distingue actuellement la mémoire de travail qui stocke des informations qui ne sont valables que pour l'activité en cours, est sensible aux interférences et est régulièrement remise à zéro. On fait aussi la distinction entre la nature et le type de traitement qu'impliquent le stockage des informations reçues. Sur ce mode, on a pu différencier la mémoire déclarative et la mémoire procédurale146 et, dans la première, la mémoire épisodique et la mémoire sémantique147.

Chez les patients séropositifs pour le VIH-1, la plainte mnésique est fréquente et pose souvent la question d'une dépression sous-jacente. Il est important de déterminer précocement si un déficit mnésique réel existe afin d'évaluer le handicap que cela représente pour le patient dans sa vie courante. Nous ne développerons dans ce chapitre que les troubles mnésiques ayant été reportés dans la littérature comme liés à la pathologie VIH-1, c'est à dire ceux concernant principalement la mémoire de travail, la mémoire épisodique verbale et la métamémoire.

3.5.2. La mémoire de travail

La mémoire de travail a été définie par Baddeley148 comme un ensemble de processus dans lequel un centre de gestion alloue les ressources attentionnelles nécessaires à la manipulation et au traitement des informations dans deux stocks de mémoire tampon : la «boucle phonologique» et le «calepin visuo-spatial». Cette mémoire active, aussi appelée «mémoire représentationnelle»149, met ainsi en jeu d'une part des caractéristiques verbales et d'autre part, la manipulation mentale d'items visuo-spatiaux.

L'infection VIH est associée à un déclin de certaines fonctions exécutives et attentionnelles qui sont en connexion étroite avec les capacités de mémoire de travail. Stout et collaborateurs111 ont mis en évidence un déficit des patients séropositifs symptomatiques (non déments) dans des tests d'empan de lecture et d'empan chiffré inversé. Les patients asymptomatiques montrent une tendance (non significative) à être déficitaires dans ces tests, suggérant ainsi que ce type d'atteinte de mémoire de travail puisse débuter aux stades asymptomatiques. Ces résultats suggèrent en outre que la progression de la maladie est sensible à des tâches de mémoire de travail impliquant une manipulation des informations temporairement stockées mais préserve la mémoire à court terme «non active», évaluée dans des tâches impliquant un simple stockage des informations - empan chiffré en ordre direct, par exemple.

Les résultats obtenus par Sahakian et collaborateurs108 portent principalement sur la capacité d'utilisation de la mémoire de travail spatiale. Le test consistait à retrouver des objets virtuels (sur écran d'ordinateur) cachés dans des boîtes que l'on peut visiter au cours d'essais successifs. Le test est conçu de telle manière qu'on évalue les performances en fonction de la difficulté de la tâche en présentant au sujet un nombre plus ou moins grand de boîtes (de 3 à 8) et qu'on estime, outre le temps d'exécution, la stratégie développée par les sujets. Les résultats à ce test montrent que les patients symptomatiques et asymptomatiques ne diffèrent pas entre eux. Ces deux populations sont nettement déficitaires par rapport aux sujets séronégatifs, uniquement lorsque la difficulté de la tâche est accrue (8 boîtes). De même, la stratégie développée par les sujets, qui est corrélée positivement au nombre de bonnes réponses, est significativement réduite chez les deux groupes de patients par rapport aux témoins. Ce résultat est retrouvé par ces mêmes auteurs avec la tâche de la «Nouvelle Tour de Londres» qui met en jeu la mémoire de travail et la capacité à planifier des mouvements : cette tâche requière d'imaginer des déplacements de billes de couleur de façon à copier un modèle d'arrangement spatial de ces billes. La tâche sera d'autant plus complexe en terme d'attention soutenue et de mémoire de travail que le nombre de mouvements nécessaire est grand. Les patients, là encore, ne sont déficitaires que lorsque le nombre de mouvements à imaginer est important.

Ce profil (mauvais scores aux tests de mémoire de travail spatiale étroitement corrélés à la complexité et l'utilisation de stratégies autosuggérées) est typique d'un déficit préfrontal150 et suggère que les déficits de mémoire de travail interviennent indépendamment du stade CDC sans prédire l'évolution de la maladie. Par ailleurs, ce type de déficit montre qu'il est possible d'observer un dysfonctionnement du cortex préfrontal aux stades CDC II et III108.

Le déficit au test de fluence verbale, caractéristique des fonctions frontales151, est fréquent bien que non systématique chez les sujets présentant des troubles cognitifs modérés. En effet, la réalisation de ce test, qui met en jeu la manipulation en mémoire de travail de mots répondant à une consigne (début du mot par une lettre ou appartenance à une catégorie) n'est pas toujours affectée108, 119. Il a été récemment montré, grâce à l'imagerie cérébrale par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) que la réalisation de cette tâche requière l'activation de structures frontales : le sillon frontal inférieur gauche, le cingulaire antérieur et le sillon frontal supérieur152. L'activation et l'intégrité de ces structures frontales sont également nécessaires à la réalisation des tâches de mémoire de travail décrites plus haut mais il semble que ce soit l'hémisphère droit qui soit recruté153 lors de l'exécution d'un plan d'action (planification, organisation temporelle). On ignore cependant si les déficits des patients peuvent être liés, non à des lésions du cortex préfrontal droit (nous avons vu plus haut qu'il n'y avait pas de corrélation à ce niveau) mais à des dysfonctionnements (potentiellement réversibles) de ces structures.

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