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L'optimisation de la création de valeur dans la firme bancaire : approche par les Free Cash Flow

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par Aubin Martial KENGNE ASSOMO
Université de Douala - DESS en Gestion Financière et Bancaire 2001
  

Disponible en mode multipage

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier ma famille pour son soutien indéfectible,

Mes amis pour leurs aides et encouragements renouvelés,

Mon encadreur pour la rigueur scientifique et les orientations qu'il a su donner à ce travail.

Que tous, ici trouvent l'expression de ma gratitude

RESUME

L'objet de ce mémoire est d'examiner les adaptations de la méthode FCF (Free Cash- Flow) au secteur bancaire comme instrument de mesure de création de valeur. Après avoir précisé le contexte théorique et empirique de l'évolution de la notion de maximisation de la valeur à celle de création de valeur, Il est expliqué comment se détermine le FCF, avec une extension à la firme bancaire. Ensuite à travers un test empirique, il est établi un lien entre la capitalisation boursière et le FCF grâce à la méthode de la SV (Shareholder Value). Enfin nous constatons les enseignements d'une telle méthode pour la gestion interne d'une banque.

The purpose of this paper is to apply the FCF (Free Cash Flow) method to the banking sector. After disserting on how we evolved both, theoretically and practically from the maximization of the corporate value to the concept of value seeking, we set out the FCF approach, with a particular accent on banking sector. Then throughout an empirical test, we demonstrate the link between FCF and the market value of a bank with the SV (shareholder value) method. Finally, this paper explains how this method can be used as a corporate decision making tool inside a bank.

AVANT - PROPOS

Depuis cinq ans environ, la FSEGA (Faculté des Sciences Economiques et de Gestion appliquée) de l'université de Douala a connu une réelle mutation avec la promotion de la formation professionnelle de ses étudiants, qui après leur cursus classique ont très souvent de la peine à se frayer un chemin dans le monde du travail très concurrentiel, et au demeurant assez friand de diplômes professionnels les uns plus spécialisés que les autres. Les jeunes diplômés de la FSEGA, Tous bien formés, avaient précisément du fil à retordre face à leurs camarades de L'ESSEC (Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales) tout proche ou mieux, de l'Université Catholique d'Afrique Centrale dont le profil et les diplômes étaient et restent encore préférés par les recruteurs. C'est donc dans ce contexte qu'est né le cycle de formation du DESS (Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées) en Gestion Financière et bancaire de l'université de Douala, parmi d'autres plates-formes de formation professionnelle à l'instar de la MSTCF (Maîtrise en Sciences et Techniques Comptables et Financières).

Sont admis à s'inscrire les titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur de type « Bac + 4 » dans le vaste domaine des sciences de gestion et des sciences économiques. A l'issue de la formation qui dure un an, y compris la période de stage académique, l'apprenant doit appréhender et capitaliser un savoir-faire professionnel au delà bien sûr, de la dimension strictement théorique et proactive des enseignements reçus, car il doit pouvoir cibler dans le panier des différentes disciplines techniques celle qu'il fera son métier de demain. C'est là assurément, que se trouve la plus-value du DESS en Gestion Financière et Bancaire en regard des autres formations spécialisées.  

INTRODUCTION

Pour la majorité des entreprises modernes, l'accès au capital est devenu un enjeu stratégique majeur. Cette règle est tout particulièrement applicable aux banques dans la mesure où l'accès au capital conditionne leur solidité financière et l'extension de leurs activités.

Les banques sont en effet de grandes consommatrices de fonds propres, en raison notamment des règles prudentielles issues des travaux du comité de Bâle1(*) imposant un rapport fonds propres durs sur actifs pondérés en fonction des risques encourus égal à 4 % au minimum.

En même temps que leurs besoins financiers augmentent, en raison des sollicitations plus nombreuses des entreprises, la mondialisation financière rend l'accès aux capitaux de plus en plus concurrentiel. Dans ce contexte, il est donc primordial pour les banques de rechercher un positionnement leur permettant d'apparaître performantes par rapport aux autres secteurs de l'économie. Ainsi, les actionnaires tout comme les bailleurs de fonds exercent une pression croissante pour que les banques soient gouvernées de façon optimum.

Traditionnellement, les actionnaires des banques pouvaient se limiter aux seuls critères comptables de rentabilité, en conformité avec le paradigme dominant d'alors, de maximisation de la valeur pour s'assurer que leurs intérêts étaient bien sauvegardés. Mais, de plus en plus aujourd'hui avec les phénomènes de fusions, d'acquisitions, d'offre publique d'achat (OPA), d'offre publique d'échange (OPE), les actionnaires (mandants) des banques comme ceux des autres entreprises sont plus regardant sur la qualité de leur rendement global moyen. Le dividende seul ne suffirait plus à mesurer leur enrichissement, il y a également les plus values, les revenus des rachats d'actions, etc. Au mieux, et en réaction à cette nouvelle donne, les dirigeants optent généralement pour des stratégies de développement ou de diversification parfois ruineuses pour les actionnaires, et au pire cherchent à conforter la logique de maximisation de leurs intérêts ( investissements de prestiges , délit d'initié, etc.) au détriment des pourvoyeurs de fonds, des actionnaires en particulier (Jensen, 1986) Parallèlement, les exigences des dirigeants (mandataires) en terme de rémunération, de pouvoir sont de plus en plus élevées. D'où la nécessité de trouver une solution d'équilibre pour faire converger les intérêts des deux parties, et ainsi éviter éventuellement un cycle chronique de relations conflictuelles. A partir de là, la question de recherche qui se dégage est celle de savoir quelle est le critère le mieux à même de fournir à l'actionnaire le maximum de garanties dans l'appréciation et l'optimisation de sa richesse. Notre objectif consiste à montrer que le critère du free cash flow (FCF), c'est-à-dire, du flux de trésorerie libéré du financement de l'investissement et de la variation du besoin en fonds de roulement (BFR) semble de ce point de vue, récolter tout nos suffrages pour optimiser la création de valeur dans la firme bancaire. En outre, il prend en compte le risque dans l'appréhension technique de ce rendement et permet d'affranchir l'information financière des conventions juridiques et comptables pour refléter la réalité économique. Notre souci est de proposer une méthode qui offre de meilleures chances d'approximation de la valeur boursière de l'entreprise, mais surtout qui apporte une solution raisonnable, pratique au problème de divergence d'intérêts entre les actionnaires et les dirigeants.

Notre souhait aurait été d'appliquer ce concept nouveau aux banques camerounaises, mais, en raison de l'absence de données boursières, nous avons jeté notre dévolu sur les banques tunisiennes. En effet, elles se rapprochent par leur nombre (11 contre 10) aux banques camerounaises, mais surtout évoluent dans un marché financier dont l'architecture a servi de modèle au marché financier camerounais. Pour cela, nous partons de quatre hypothèses :

- Le montant des capitaux « historiques » est égal au montant du capital économique ;

- La création de valeur est positivement corrélée au résultat économique ;

- La performance des valeurs bancaires tunisiennes est inférieure aux standards internationaux ;

- Le niveau des frais généraux grève substantiellement la rentabilité des banques tunisiennes.

A cet égard, notre analyse comportera deux parties. Dans un premier temps, nous disserterons sur la relation entre le free cash flow et la création de valeur, avec une forte allusion à la firme bancaire et dans un second temps, nous proposerons un test empirique tenant compte de la création de valeur applicable aux banques tunisiennes. Pour simplifier notre étude empirique, nous supposerons que les banques tunisiennes sont en contexte de marché des capitaux émergents (MCE). En mettant en exergue le lancinant problème de la liquidité du marché, les résultats escomptés de ce test enseigne implicitement qu'une gestion rigoureuse des fonds propres et une politique suffisamment incitative en direction du management sont le gage de la création de valeur dans la firme bancaire en tunisie.

PREMIERE PARTIE : LA METHODE FREE CASH FLOW ET CREATION DE VALEUR AU SEIN DE L'ENTREPRISE

Dans une conception plus simple, mais non moins importante, une société crée de la valeur pour l'actionnaire dès lors que les fonds propres marchands augmentent plus vite que les fonds propres comptables. Cela signifie donc simplement qu'un actionnaire s'est enrichi durant une période si la valeur de sortie de son investissement est supérieure à ce qu'il a initialement immobilisé. La création de valeur pour l'actionnaire est également connue sous le concept anglo-saxon de Shareholder Value Added (SVA).

Le chapitre I de notre étude va circonscrire le concept de valeur, tant au plan théorique que technique, relativement au critère de Free cash flow avec un accent marqué sur la firme bancaire. Le chapitre II quant à lui exposera les conditions de gestion orientée sur la création de valeur.

CHAPITRE I : LES FONDEMENTS THEORIQUES DE LA CREATION DE VALEUR 

Section 1 : De la maximisation à la création de valeur

A) Analyse critique de l'hypothèse de maximisation de la richesse des actionnaires comme objectif de l'entreprise
1. L'objectif fondamental en finance d'entreprise : la maximisation de la valeur de l'entreprise

Dans la mesure où l'approche moderne de la finance étudie l'optimisation des décisions financières, il importe de se donner un critère d'optimisation. La théorie microéconomique traditionnelle nous en propose un, le critère de maximisation des profits. « Le profit maximum est atteint par une entreprise lorsque l'accroissement de ses recettes provenant de la vente sur le marché d'une unité de produit supplémentaire est juste suffisant pour couvrir ses frais supplémentaires engagés lors de la fabrication de cette unité produite, ou en d'autres termes lors de l'égalisation du coût marginal et de la recette marginale de l'entreprise2(*) ». Toutefois, ce principe de maximisation des profits a fait l'objet de bien des critiques notamment, la fonction d'utilité du chef d'entreprise qui ne se limite pas au seul profit, la séparation entre la propriété et la gérance (T.scitovsky)3(*) donnant lieu à un certain nombre de solutions de remplacement formulées aux cours des dernières années, au rang des quelles le principe de la maximisation de la valeur. Ce principe qui en réalité n'est pas fondamentalement différent du précédent, fait sien les hypothèses d'efficience informationnelle, d'absence des coûts transactionnels et de rationalité illimité des décideurs, et l'entreprise y est perçue comme une boite noire4(*) dans un contexte de marché financier.

2. La contestation du principe de maximisation de la valeur

Si le principe de la maximisation de la valeur de l'entreprise a semblé une alternative acceptable au principe traditionnel de maximisation des profits dans le domaine de la finance d'entreprise, il n'en demeure pas moins vrai que «  le concept de valeur ne fait pas l'unanimité ; il s'est métamorphosé au fil des ans. En effet, l'entreprise a successivement été assimilée à une boite noire, à une entité de type contractuel et enfin à une organisation partenariale. Parallèlement, sa valeur a correspondu respectivement au profit, à la valeur actionnariale et à la valeur partenariale5(*) ».

Les tenants de l'analyse traditionnelle à savoir, Graham et Dodds6(*) abordent la question de la maximisation de la valeur de l'entreprise à travers sa structure financière.

Il est question ici de dire s'il existe une combinaison d'endettement net et de capitaux propres qui permettent de maximiser la valeur de l'actif économique. Autrement dit, une structure financière telle que le coût moyen pondéré du capital défini ci-dessous soit le plus faible.

Le coût moyen pondéré du capital (ou coût du capital), noté k, est le taux de rentabilité exigé par l'ensemble des pourvoyeurs de fonds de l'entreprise pour accepter de la financer « acheter les titres ou les conserver7(*) ». C'est le coût de financement de l'entreprise et c'est le taux de rentabilité minimum que doivent dégager ses investissements sur moyenne période.

En effet, la dette est moins onéreuse que les capitaux propres, car elle est moins risquée. Dès lors, tout accroissement modéré de l'endettement permet de réduire k puisqu'il y a substitution d'une ressource peu onéreuse, la dette, à une ressource plus coûteuse, les capitaux propres. C'est la justification de l'utilisation de l'effet de levier.

Toutefois, tout accroissement de la dette augmente le risque de l'action pour son détenteur. Le marché exige alors un taux de rendement des fonds propres plus élevé. Cette augmentation du taux de rentabilité requis sur les capitaux propres annule donc une partie de la diminution de coût entraînée par le recours à l'endettement.

Et plus la part relative de l'endettement augmente, plus le risque couru par les actionnaires s'accroît, et plus le marché exige un taux de rentabilité des capitaux propres élevé, jusqu'à annuler l'effet positif du recours à l'endettement. A ce niveau de levier financier, l'entreprise a atteint sa structure financière optimale qui lui assure le coût moyen pondéré du capital le plus faible et donc la valeur de l'actif économique la plus élevée.

En effet, si l'entreprise continue à s'endetter, le gain qu'elle en retire est insuffisant désormais pour compenser le renchérissement du rendement exigé par le marché.

Par ailleurs, à partir d'un certain seuil d'endettement, le coût de celui-ci augmente, car il devient beaucoup plus risqué. A un coût des capitaux propres plus élevé, vient donc s'ajouter un coût de l'endettement en augmentation. Cette situation pourrait être préjudiciable pour l'entreprise comme l'ont si bien démontré Baxter (1967) et Stiglitz8(*).

Pour eux, un endettement excessif de l'entreprise entraînerait un risque de faillite auxquels sont associés des coûts qui devraient venir diminuer la valeur nette des actifs et partant du revenu qui devrait échoir aux actionnaires de l'entreprise en faillite. Cela justifierait malgré tout, l'existence d'une structure financière optimale qui maximiserait la valeur de la firme. Mais quel est donc ce niveau optimum d'endettement ?

Par ailleurs, Leland H., Pyle D., (1997) montrent que la valeur d'une entreprise est plus corrélée avec la part du capital détenue par l'actionnaire dirigeant9(*)et de ce fait elle est en liaison avec la structure financière. Ce constat conduit à considérer dans la structure financière, outre la dette et les fonds propres, la structure de propriété en terme de concentration du capital. Le lien structure de propriété-performance, analysé dans les études empiriques, n'est pas univoque : si certaines soutiennent la neutralité (Demsetz H., Lehn K., 1995, Charreaux G., 1991, Jacquemin A., Ghelin E., 1978...), d'autres sont, au contraire, favorables à la thèse de la non neutralité (Djelassi M., 1996, Mourgues N., 1987, Leech D., Leahy J., 1991...). Cette thèse de la non neutralité corrobore les prévisions pessimistes de la relation d'agence sur la performance que soutiennent Adam Smith (1776), Berle A.A., Means G., (1932), et Jensen M.C., Meckling W.H. (1976).

3. Les modèles de compromis : création de valeur et théories des organisations

Comme la théorie des marchés en équilibre démontre que la finance ne peut pas modifier la taille du gâteau (la valeur de l'actif économique), mais seulement son partage, il résulte que bon nombre de problèmes financiers naissent de la lutte entre les différentes parties prenantes de la sphère financière. Dans cette brèche, d'autres tentatives d'appréhension de la maximisation de la valeur de l'entreprise ont évidemment pris corps.

i- La théorie de l'agence et la création de valeur de l'entreprise

La théorie de l'agence (ou théorie des mandats) apporte un éclairage nouveau sur les relations entre les acteurs de l'entreprise. Concrètement, les actionnaires mandatent les dirigeants pour gérer au mieux les fonds qu'ils leurs ont confiés. Or la crainte des actionnaires est forte de voir les dirigeants viser d'autres objectifs que la maximisation de la valeur des capitaux propres qui leur ont été confiés : accroître la taille de l'entreprise (groupe) au détriment de sa rentabilité, minimiser le risque de l'actif économique en écartant certaines opportunités créatrices de valeur mais qui pourraient exposer l'entreprise si elles échouaient, etc. La divergence d'intérêt entre les différentes parties10(*) fait naître un certain nombre de coûts liés à des dispositions à mettre en place pour réduire ces divergences : surveillance par les actionnaires, dédouanement des dirigeants. La différence entre les coûts engagés par les mandants (actionnaires) et les mandataires (dirigeants) et leur espérance de perte constitue les coûts résiduels. Ces trois types de coûts sont appelés coûts d'agence. Notons qu'en présence de coûts d'agence croissant, il devrait y avoir une structure financière optimale à choisir, car elle permettrait de maîtriser les coûts de faillite, aussi bien dans un univers exempt d'impôts que dans un univers d'imposition, c'est du moins ce que suggèrent Jensen et Meckling dans leur article11(*) de 1976.

Désormais, l'entreprise n'est plus « une fiction légale qui sert de point focal à un processus complexe dans lequel les conflits entre les objectifs des individus (dont certains peuvent représenter d'autres organisations) sont résolus par la mise en place d'un réseau de relations contractuelles. Le comportement de la firme est dès lors comparable à celui d'un marché, en ce sens qu'il est la résultante d'un processus complexe d'équilibrage12(*) ». Ou comme l'écrit A. Quintard « La théorie de l'agence est bâtie sur une réflexion réaliste. Les différents partenaires à la vie de l'entreprise (en l'occurrence, les dirigeants, les actionnaires et les créanciers « financiers »), pris séparément, ont des objectifs et des intérêts spécifiques qui ne sont pas nécessairement conciliables d'une manière spontanée. Il y a en conséquence des occasions de conflits entre eux, d'autant plus que le fonctionnement de l'entreprise moderne, fondé sur la séparation entre la propriété et le pouvoir, requiert que la gestion soit confiée aux dirigeants par les fournisseurs de fonds13(*) ». Il s'ensuit en toute logique que l'existence des divergences d'intérêts sera alimentée par la possession et le contrôle de la meilleure information aux fins justement de maximiser sa propre fonction d'utilité. Exit donc, l'hypothèse d'efficience informationnelle qui fonde en partie la théorie des marchés en équilibre.

ii- L'asymétrie informationnelle et la création de valeur de l'entreprise

La théorie des signaux se fonde sur l'hypothèse forte que les dirigeants d'une entreprise disposent d'une meilleure information que les investisseurs de cette entreprise. En d'autres termes les dirigeants sont mieux à même de prévoir les flux avenirs de l'entreprise ; ils savent dans quel état de la nature l'entreprise se situe. Dans cette optique, tout signal, émis par les dirigeants d'une entreprise tendant à faire croire que les flux seront meilleurs que prévus ou que le risque sera moindre, permettra une création de valeur pour l'investisseur. Celui-ci sera donc toujours à la quête d'un signal lui permettant d'espérer une rentabilité supérieure ou un risque minime. Cependant, pour que la signalisation soit crédible, le signal doit comporter sa propre sanction s'il est biaisé afin de décourager la propension à l'émission de faux signaux.

La politique d'endettement est l'instrument privilégié du signal et par suite de la valeur de l'entreprise.

En effet, dans l'optique d'une asymétrie informationnelle, on comprend difficilement qu'un dirigeant, sachant qu'un projet est très risqué, s'endette pour le financer ; il perdrait la confiance de son employeur, pis encore si l'échec du projet conduisait l'entreprise à la faillite. L'endettement est donc un signal fort sur le rendement anticipé, mais c'est un signal plus fort encore sur le risque. On voit mal en effet un dirigeant recourir à l'endettement, s'il sait que dans l'hypothèse pessimiste, il ne pourra pas honorer ses engagements. De ce qui précède, il découle donc que c'est beaucoup moins la structure financière d'une entreprise qui représente un signal que sa modification, S. Ross14(*) l'a d'ailleurs mis en évidence.

Par ailleurs, l'annonce d'une augmentation de capital conduit la plupart de temps à une baisse des cours de l'action. En effet, les pourvoyeurs de fonds pensent en général que les dirigeants ne procèdent pas à des augmentations de capital lorsque la valeur de l'entreprise leur paraît sous-évaluée (compte tenu de la qualité supérieure de leurs informations) afin de circonvenir à une dilution de capital dans de mauvaises conditions, au détriment des actionnaires actuels. S'il y a augmentation de capital inopportune, l'investisseur en déduira que les dirigeants pensent que le cours boursier est surévalué (compte tenue de la qualité supérieure de leurs informations) et que c'est fort de cela que les actionnaires actuels acceptent l'augmentation de capital. En revanche l'annonce d'une émission de dettes n'a pas d'impact significatif sur la valeur de l'action et par suite sur la valeur de l'entreprise. Il nous semble évident que la  lutte  pour la possession de la meilleure information aux fins justement d'en tirer le plus grand profit pose un autre problème : celui du contrôle de la propriété et donc de la richesse générée au sein de l'entreprise par ses principaux acteurs (actionnaires et dirigeants). Il est dès lors, impérieux d'imaginer un cadre dans lequel les objectifs des dirigeants et des autres acteurs, en particulier les actionnaires pourraient converger. Ce cadre doit non seulement permettre d'éviter les gaspillages mais aussi et surtout, restituer la réalité économique de l'entreprise autant que possible afin de servir aux investisseurs, en particulier l'actionnaire, les données réelles pour lui permettre de gérer son portefeuille de manière optimum .

B- Les mutations de la sphère économico financière
1. Le comportement des indicateurs financiers de la performance

Les entreprises au début de la décennie 80, soucieuses d'effacer le souvenir de la période trouble des années 70 ont mis un accent tout particulier sur la croissance du chiffre d'affaires et surtout, du résultat net.

« Jusqu'au milieu des années 80, l'entreprise communiquait essentiellement sur le résultat net ou le bénéfice par action (BPA), paramètre éminent de la comptabilité mais aussi éminemment sujet à window dressing (opération faites en fin d'année pour embellir les résultats) ». Par la suite nous avons découvert, le raisonnement en terme de rentabilité, c'est-à-dire d'efficacité, qui rapporte les résultas dégagés aux capitaux mobilisés pour les atteindre. On parle alors de rentabilité des capitaux propres, critère soumis néanmoins à l'effet de levier : une hausse judicieuse de l'endettement accroît le plus souvent cet indicateur sans que la valeur n'en soit pour autant augmentée, l'accroissement du risque annihilant celui de la rentabilité. Vernimmen15(*) nous met d'ailleurs en garde en rappelant que « le taux de rentabilité comptable est dangereux pour le financier d'entreprise. Il s'agit d'un taux comptable et en aucune manière externe : tout se passe comme si l'entreprise était dans un système clos ! Seule la rentabilité externe exigée par le système financier doit être utilisée comme minimum requis ».

La rentabilité de l'actif économique (ou des capitaux investis ou employés, ou encore return on capital employed, ROCE) évite ce biais, ce qui explique que mis à part certains secteurs où elle n'a pas de sens (banque, assurance,...), elle tend à s'imposer comme indicateur de performance économique. Mais le problème demeure car, la rentabilité dégagée est, en tant que telle, un critère insuffisant en matière de valeur puisqu'elle ne prend pas en compte la notion de risque. Elle doit être rapporter au coût des capitaux employés, pour mesurer si de la valeur a été créée (rentabilité de l'actif économique supérieure au coût des capitaux employés) ou détruite (l'inverse).

En effet, le contexte qui suscite cette nouvelle donne est celui des années 90 caractérisé par une vague d'opérations relevant de la stratégie d'entreprise et de l'ingénierie financière : fusion, scission, offre publique d'achat (OPA), offre publique de vente (OPV), offre publique d'échange (OPE), etc. Elles se traduisent toutes en terme de création de valeur ou valeur actionnariale16(*). Parmi les causes fondamentales, il y a en premier lieu le « vieillissement des populations, le niveau d'information croissant des épargnants et leur plus grande capacité à prendre des risques financiers17(*) ». Il est dès lors inéluctable que l'actionnaire prenne une place grandissante, en termes de rémunération (dividende et plus-value sur titre) comme de pouvoir, dans les systèmes économiques contemporains.

Du côté de la gestion des entreprises, la prise en compte du coût global des fonds propres dans les critères de gestion constitue également une donnée durable. Il paraît même surprenant que cet impératif, pourtant en ligne avec une théorie micro-économique standard déjà ancienne, ne se soit pas généralisé plus tôt. Le calcul économique change de nature dès lors qu'on est passé d'un univers où les fonds propres avaient un coût faible ou aléatoire (les dividendes) à celui où il représente la ressource la plus coûteuse. En effet, l'introduction du risque conduit à distinguer deux catégories d'apporteurs de capitaux : les créanciers, censés ne supporter aucun risque et les actionnaires qui exigent une prime de risque pour assumer le risque de variabilité de la rente. Les actionnaires sont dans ce cas, les seuls « créanciers résiduels ». C'est fort de cette réalité, que les actionnaires ont adopté une relative flexibilité dans l'appréhension de leur rendement. Par ailleurs, cette perception évolutive de leur richesse n'est pas le fruit du hasard, elle se fait au gré des mutations qui ont cours au sein même de l'entreprise quant aux rôle et pouvoir des dirigeants, dont au demeurant les actions ont une certaine influence sur l'environnement financier des affaires. Aussi, les ratios financiers prennent-ils en compte non seulement la valeur intrinsèque, mais aussi et davantage la valeur additionnelle créée sur le marché boursier.

Evolution des indicateurs financiers18(*)

Fort potentiel

De manipulation

Résultat BPA Croissance du BPA Rentabilité des

Net Résultat capitauxpropres

D'exploitation Excédent brut (ROE)

(EBIT) d'exploitation Rentabilité de

(EBITDA) l'actif économique

(ROCE)

Faible Flux de trésorerie Cash-flow return Renta.Actif-Coût du

D'exploitation on investment eco (ROCE) CAPITAL (WACC)

EVA

MVA TSR

Forte influence

Des marchés Profit Rentabilité Valeur Période

Financiers 1985 1995 2000

Comme le montre ce graphique, les indicateurs financiers permettant de saisir la création de richesse pour l'actionnaire se sont multipliés à travers le temps. Ils se subdivisent en trois grands groupes suivant le critère de la manipulation et le critère de la dépendance au marché financier. Tout compte fait, les années 2000 font la part belle aux indicateurs de création de valeur, qui laissent imaginer que les actionnaires souhaitent avoir une idée précise de leur rendement global, dans un contexte risqué et volatile.

2. La genèse et l'enrichissement du concept de valeur

La notion de valeur est issue, historiquement, des théories économiques. Celles-ci se sont d'abord appuyées sur une approche « objective », en comparant la valeur aux coûts (Smith, Ricardo, Mill).Les marginalistes (Walras, Mayer, ...) ont ensuite développé une approche « subjective », marginaliste fondée sur l'utilité du bien. Aujourd'hui, dans les sciences de gestion, il existe différentes notions de « valeur » :

i- La valeur « commerciale »

Elle se rapproche de la valeur d'utilité ; elle est, selon les analyses stratégiques de Porter19(*), « ce que les clients sont prêts à payer : la valeur s'obtient en pratiquant des prix inférieurs à ceux des concurrents (stratégie de domination par les coûts) ou en fournissant des avantages uniques qui font plus que compenser un prix plus élevé (stratégie de différenciation)».

ii- La valeur ajoutée

Elle représente la valeur créée par l'entreprise dans le cadre de son activité de transformation des matières premières et produits semi finis de production en biens ou services économiques ; le Conseil Supérieur de l'Ordre des Experts-comptables définit la valeur ajoutée comme étant la « différence entre le prix de vente et la somme des ressources externes à l'entreprise mises en oeuvre pour réaliser la vente ».

iii- La valeur comptable

Elle représente la valorisation de l'entreprise (immobilisations, capital, ...), après retraitement du bilan et du compte de résultat ; de nombreuse méthodes existent pour valoriser une entreprise (méthodes patrimoniales, méthodes de rendement, etc.)20(*).

iv- La valeur boursière

Elle est observée sur le marché boursier et est supposée refléter à tout moment toute l'information pertinente disponible sur le titre. La valeur boursière est enrichie en intégrant la notion de risque : le modèle de Modigliani et Miller21(*) valorise un bénéfice espéré au taux reflétant ce risque encouru sur les flux financiers attendus. De ce fait, il faut que les capitaux (et donc leur contrepartie, les actifs), obtiennent un rendement supérieur au taux minimal requis pour couvrir le risque.

La détermination de la valeur de l'entreprise et l'appréciation des facteurs qui contribuent à son accroissement est au coeur de la question. Les théories sur la valeur sont nombreuses; elles ont évolué dans le temps, passant d'approches fondées sur les constats du passé à des approches visant à privilégier les résultats futurs et à reposer, en conséquence, sur des données prévisionnelles.

Rarement abordée dans le passé par les entreprises, la «création de valeur» est devenue un thème plus largement évoqué dans les rapports annuels et surtout un axe privilégié de la communication financière des sociétés22(*). Les méthodes d'analyse financière de la valeur créée dans les entreprises se sont développées dans les cabinets de conseil, les banques et chez les émetteurs eux-mêmes. Elles tentent de répondre aux questions posées par un environnement économique et social en évolution perpétuelle. « Elles ne peuvent faire l'objet d'une normalisation et il n'est pas souhaitable de s'orienter dans cette voie, sauf à brider l'innovation financière et comptable »23(*)

Que recouvre précisément cette notion ? Quelle différence présente-t-elle avec les concepts plus traditionnels de rentabilité et de performance ? Comment se mesure-t-elle ?

3. La signification du concept de création de la valeur dans l'entreprise

Le bénéfice net comptable passé et actuel ne peut être considéré comme un indicateur suffisant pour approcher la valeur d'une entreprise, parce qu'il est la résultante de données comptables non représentatives de la réalité économique d'une part, et qu'il peut masquer une insuffisance d'investissements matériels ou immatériels générateurs de productivité, d'innovation et donc in fine de valeur d'autre part. C'est pour cela que certains analystes et praticiens ont cherché à développer des méthodes palliant de telles défaillances. L'objectif était de trouver des indicateurs pertinents, qui tiennent compte notamment du risque, de la croissance et de la pérennité des résultats et qui retraitent les données comptables non conformes à la réalité économique. C'est ainsi que, dès les années 20, est apparue aux USA l'idée de « création de valeur ».

La question de la mesure de création de valeur s'inscrit dans le contexte de la gouvernance, c'est-à-dire dans une « perspective d'incitation-contrôle, la performance étant définie en termes de richesse des actionnaires »24(*) .

Cette notion a été conceptualisée par de nombreux auteurs à travers nombre de méthodes : economic value added (EVA), critère opérationnel de mesure de la création de valeur, l'EVA est un outil de gestion financière décentralisé car elle permet à tous les niveaux de l'entreprise de mesurer la performance d'une unité en lui appliquant un taux de rentabilité exigé individuel ; market value added (MVA), elle est égale à la somme de la capitalisation boursière de la valeur de l'endettement net diminuée du montant comptable de l'actif économique, sa variation est un critère plus pertinent que la seule évolution du cours de bourse puisqu'il met en regard l'augmentation de la valeur et les capitaux investis pour y parvenir ; total shareholder value (TSR), correspond au taux de rendement d'une action sur plusieurs années par rapport à une période donnée et intègre les dividendes reçus et la plus- value réalisée, etc.

Celle qui nous intéresse dans le cadre du présent mémoire est la méthode du free cash flow (FCF), c'est-à-dire du flux de trésorerie disponible après impôt. Il s'agit des « flux de trésorerie disponibles pour les ayants droit de la firme : les créanciers et les actionnaires »25(*). Ce flux naît du résultat minoré de l'impôt corrigé26(*) (REMIC), auxquels sont retranchés les fonds nécessaires pour assurer la poursuite de l'activité de l'entreprise et sa croissance, c'est-à-dire l'investissement.

La pratique de cette approche s'est développée avec la finance moderne des années 1950 et 1960 sous la houlette de F. Modigliani et M. Miller (1961)27(*). Sa forme la plus précise peut être rattachée à l'article célèbre de Michael. C. Jensen (1986)28(*)

Si une entreprise n'a pas d'emplois dont le rendement soit supérieur au coût des ressources (fonds propres et dettes), il ne faut pas q'elle cherche à investir ou à se diversifier de façon non optimale. Elle doit utiliser le cash flow disponible en remboursant l'actionnaire, sous forme de dividendes exceptionnels ou de rachat d'actions. Ces principes visent ainsi à fournir ex ante un critère d'évaluation de l'opportunité des investissements et ex post une mesure de la performance financière. Qu'en est-il justement relativement à l'approche que nous mettons en oeuvre ?

Section 2 : La méthode Free Cash Flow : une réponse critique au critère du Return on Equity

La communication financière des entreprises modernes est en effet, dominée par le compte rendu de la rentabilité dans un contexte plus ou moins risqué et marqué par le caractère discriminant de l'accès au capital. La globalisation financière en marche et l'inter sensibilité des marchés financiers qui en résulte, conduit les milieux financiers à conserver au final un indicateur traditionnel de la bonne santé financière des entreprises, qui ne soit pas sujet aux fluctuations du marché boursier. Dans ce souci de conservatisme et de réalisme financier somme toute discutable, un critère semble prendre le pas sur les autres.

Le Return on Equity29(*) (ROE) est devenu un ratio de communication financière pour attirer les investisseurs. Au numérateur, nous avons le résultat net comptable, c'est-à-dire la part du bénéfice de l'exercice qui revient aux actionnaires de l'entreprise et qui est susceptible d'être entièrement distribué ou non. Au dénominateur, il reprend les fonds propres, c'est-à-dire les ressources apportées à l'entreprise par les actionnaires. Ce ratio financier traduit à la fois la somme de la rentabilité économique et de l'effet de levier, il représente théoriquement le taux d'enrichissement (ou d'appauvrissement) de l'actionnaire au cours de l'exercice considéré ; il relève donc d'un concept patrimonial et non de trésorerie.

Le ROE se définit de manière très simple.

ROE =

Selon G-Bennet Stewart30(*), ce critère de sélection n'est pas pertinent et doit être abandonné pour trois raisons principales : le critère du ROE peut être l'objet de distorsions économiques dues à l'application de règles exclusivement comptables, il ne prend pas en compte la structure capitalistique de l'entreprise et enfin il n'est pas homogène (A).

C'est pourquoi il est utile de mettre en oeuvre un critère qui aille au-delà des insuffisances sus évoquées en rapprochant les intérêts des dirigeants et des actionnaires (B).

A  - Les insuffisances du critère ROE.

Le critère du ROE a, en effet, été l'objet de nombreuses critiques tenant essentiellement sur une bonne restitution de la réalité économique (1), de la structure de capital (2), son caractère peu homogène (3) et son contenu informationnel (4).

1. Le ROE ne rend pas compte de la réalité économique 

Beaucoup de dirigeants pensent que le marché exige des bénéfices, et les veut immédiatement, bien qu'il n'y ait pas la moindre preuve de cette présomption. C'est notamment le cas de plusieurs start-up31(*) informatiques qui, malgré des pertes annuelles, ont reçus la faveur des investisseurs ; en réalité, le bénéfice comptable ou le bénéfice par action (BPA) peut s'avérer un très mauvais indicateur de la capacité bénéficiaire réelle de l'entreprise. 

Il peut subir l'influence de pratique ou politique comptable appropriée destinée à favoriser une présentation avantageuse ; par exemple, la date de clôture d'un exercice comptable étant purement arbitraire par rapport aux mobiles des dirigeants, l'entreprise pourra avancer ou retarder la comptabilisation de certaines charges ou produits pour modifier le niveau de résultat. Il est évident que le résultat n'est que déplacé dans le temps et en aucun cas globalement modifié. Ces charges et produits constatés d'avance constituent également une source d'ajustement : une appréciation plus ou moins restrictive a des conséquences directes sur le résultat de l'exercice. De même l'entreprise pourra se désendetter entre le 30 décembre et le 2 janvier pour présenter un niveau de dettes plus léger. Les Anglo-saxons parlent ainsi de window-dressing32(*)

Il est affecté des éléments que les règles comptables ou la pratique des entreprises traite comme des charges de période, alors qu'ils sont plus représentatifs d'un investissement dont la rentabilité future constitue l'enjeu majeur. Tel est le cas des frais de recherche et développement, par exemple, qui peuvent grever les résultats passés alors qu'ils sont destinés à contribuer à la valeur future de l'entreprise. C'est le cas également des opportunités d'acquisitions qui ne se réaliseraient pas sous le seul prétexte qu'une part importante d'amortissement du goodwill33(*) viendrait grever le résultat net comptable.

Le FCF34(*) apparaît être une méthode plus fiable, au regard de la création de valeur, dans la mesure où le résultat économique va chercher à corriger la réglementation comptable afin de ne prendre en compte que la réalité économique. C'est ce que résume la formule d'Alfred Rappaport35(*) : « la trésorerie est une réalité, le résultat net une opinion. »

2. Le ROE ne rend pas compte de la structure financière de l'entreprise

Un autre problème est que le ROE réagit aux changements de structure de capital (c'est-à-dire aux changement entre le niveau des fonds propres et des dettes) et au niveau du taux d'intérêt des dettes.

Ainsi le levier financier36(*) influence en permanence le ROE. Il est donc difficile de savoir si une hausse ou une baisse du ROE est due à un changement des taux d'intérêts ou à l'évolution des conditions d'exploitation, etc.

En outre, avec le ROE comme seul standard, les organes dirigeants peuvent écarter un projet qui nécessiterait une augmentation des fonds propres, bien que créateur de valeur (en ce qu'il génère un Cash-flow return on investment CFROI37(*) supérieur aux coûts des capitaux qui ont dus être mobilisés pour le financement du projet.).

Le FCF répond à ces deux critiques de manière assez immédiate. Selon cette méthode une fois le résultat économique et le coût du capital. (Dettes et fonds propres) déterminés, quel que soit le résultat net comptable, il y aura création de valeur si le différentiel entre le CFROI et le coût réel du financement est positif. Au contraire, il y aura destruction de valeur si ce différentiel est négatif.

Le Free Cash-flow augmentera si le résultat économique augmente sans utiliser de capitaux supplémentaires.

Félix BOGLIOLO38(*) soutient d'ailleurs que cette contribution à la création de valeur revient aux opérationnels de l'entreprise : achats, production, ventes, etc.

En effet, si le capital est investi dans des projets qui rapportant plus d'argent que le coût total du capital le FCF va croître. De même si les activités dont le CFROI est insuffisant (par rapport au coût moyen pondéré du capital) sont cédées, le FCF va augmenter.

En revanche, le FCF diminuera si les investissements se font par des projets qui rapportent moins que le coût du capital ou si les dirigeants laissent passer des projets dont les gains potentiels sont supérieurs au coût du capital (il s'agit dans ce dernier cas d'un manque à gagner).

Selon Denis Neveu39(*), le principal mérite de la méthode du FCF est d'obliger les dirigeants à surveiller de près la liquidité et l'accès au financement. De plus, c'est une mesure de performance qui conduit directement à la valeur marchande intrinsèque d'une entreprise.

3. Le ROE n'est pas une mesure homogène

Dans tout ratio, le numérateur et le dénominateur doivent être homogènes. En l'espèce, le numérateur mesure un flux de période (en général l'année), tandis que le dénominateur mesure un stock à une date donnée : à quel stock est-il pertinent de ramener le flux annuel ? Ce flux est dégagé tout au long de la période, il serait logique de le rapporter à un niveau de stock représentatif de la période. Pour approcher ce niveau, il convient en toute rigueur de retenir la moyenne du stock initial et du stock final.

4. Le ROE aggrave l'asymétrie informationnelle

Les capitaux propres sont la composante de la structure financière qui concerne directement les actionnaires, leur proportion dans cette structure ne modifie en rien la valeur de l'entreprise40(*). Ainsi, lorsque les dirigeants optent pour une politique d'endettement plutôt active aux fins notamment de fixer le montant des fonds propres, ils envoient certes, un signal fort sur l'espérance de rentabilité, mais c'est un signal plus fort encore sur le risque qui accroît d'autant l'exigence des actionnaires. En effet, si cette propension à l'endettement ne repose pas sur des projets suffisamment rentables et telles que les performances de l'entreprise leur permettront de payer des charges financières supplémentaires et de rembourser cet endettement nouveau sans difficultés, une telle exigence serait artificielle. Il convient donc de se méfier quelque peu de ce ratio à défaut de l'ignorer complètement, car les dirigeants en voulant ménager les actionnaires pour préserver leurs intérêts risquent d'entraîner l'entreprise vers un seuil de dettes sans rapport raisonnable avec ses perspectives réelles d'efficiences opérationnelles dont le marché aurait fait une interprétation erronée. Notons tout de même avec Vernimmen, que ces « taux ne relèvent pas du domaine de la finance, car ils ne prennent en compte ni le risque ni la valorisation : il s'agit de critères comptables ». Même si ce signal comporte sa propre sanction pour rester crédible, il sera néanmoins trop tard pour annuler ses effets : l'émission de faux signaux sur le marché est généralement de courte durée, car la situation opérationnelle de l'entreprise aura vite fait de dévoiler son vrai visage, mais entre temps nombre d'investisseurs (surtout les petits épargnants) se seront fier aux informations du marché pour prendre ou faire prendre des décisions malheureuses pour leur compte (achat massif de titres ).

Au vu de ce qui précède, les limites du ROE justifient-elles le recours à la méthode du FCF comme alternative plus à même de saisir l'idée de création de valeur par l'entreprise ?

 B- La justification et le contenu de la méthode FCF

Le modèle des « Free Cash Flows » constitue une des méthodes modernes les plus usitées de détermination normative de valeur actionnariale. Cette approche relève de la famille des modèles qui déterminent directement la valeur de marché des entreprises et en déduisent la création de valeur par solde avec le coût de remplacement des actifs. Elle s'appuie sur un très grand scepticisme à l'égard des soldes de gestion traditionnellement utilisés pour valoriser les entreprises .C'est, en particulier, le cas du bénéfice net (numérateur dans le ratio du ROE) : il relèverait d'un arbitraire comptable, variable selon les législations nationales et rendant difficiles les comparaisons. Ses liens avec le cours de bourse apparaissent au demeurant tenus. C'est enfin un mauvais indicateur de gestion dont la croissance n'est pas synonyme de rentabilité. D'autre part, le concept utilisé pour l'actualisation n'est plus le coût actuariel de la dette, mais plutôt le coût moyen pondéré du capital, c'est-à-dire de l'ensemble des ressources : endettement et fonds propres.

Le FCF mesure la valeur de l'entreprise indépendamment de la structure financière et de la politique de distribution, car le concept fondamental ici est bien celui du cash-flow donc, les problèmes d'effet de levier et de payout (taux de distribution de dividendes) s'en trouvent considérablement résolus. « Par ailleurs, cette méthode permet de garder une grande sérénité face à des périodes d'euphorie, de surévaluations boursières et de fascination de multiples élevés. Elle ramène en effet à la réalité des performances économiques de l'entreprise41(*) »

Comme cela a été évoqué plus haut, le FCF est la différence entre le résultat économique minoré de l'impôt corrigé42(*) et l'investissement de la période.

FCF = EBE - investissement de la période - impôt normatif sur le résultat d'exploitation

43(*)

44(*)

Nous allons pour mieux cerner la méthode du FCF, aborder son étude en trois parties en reprenant dans une première phase les deux termes de cette différence : Le résultat économique (1) et l'investissement (2). Et dans une deuxième phase le coût du capital, car les flux de trésorerie après impôt dégagés par l'actif économique doivent être actualisés à l'infini au coût moyen pondéré du capital (3). Enfin, nous présenterons le rôle du FCF dans la détermination de la valeur de l'entreprise (4).

1. Le résultat économique

Le résultat économique peut être assimilé au « Net operating profit after tax44(*) (NOPAT) dont fait état le concepteur du FCF (M.C Jensen). Le NOPAT= Résultat d'exploitation hors impôt et charges financières - impôts théoriques.

Adapté au cadre comptable francophone, il s'agit de l'excédent brut exploitation net d'impôt, mais avant frais financiers, ces derniers étant appréciés dans le coût des capitaux investis.

Afin de coller à la réalité économique, le résultat d'exploitation nécessite des retraitements. Deux grands types de retraitements peuvent être distingués : ceux permettant de passer d'une logique comptable à une logique économique, et ceux destinés à corriger les distorsions liées à la fiscalité différée.

i- Les Corrections permettant de passer d'une logique comptable à une logique économique.

De prime abord, il convient de distinguer la notion de cash-flow et la notion de résultat économique. Traditionnellement, le cash-flow se définit comme étant le flux de trésorerie généré pour un investissement. Dans une telle optique, le cash-flow sera déterminé en ne retenant pour son calcul, que les comptes de flux. Aussi, si le cash-flow est déterminé à partir du résultat net on aura :

Cash-flow = résultat net + dotations aux amortissements + dotations aux provisions

La notion de résultat économique ne se confond guère avec le flux de trésorerie généré par un investissement dans la mesure ou toutes les dotations aux amortissements et aux provisions ne sont pas ajoutées au résultat net.

Si l'on part du résultat net comptable, en plus des dotations aux amortissements d'exploitation et des dotations aux provisions d'exploitation, seront ajoutés au résultat net :

- Les dotations aux provisions qui ont un caractère de réserve ou qui anticipent des charges futures.

En effet, concernant les provisions à caractère de réserve, elles peuvent être considérées comme du résultat « mis de côté ». Ces provisions sont : les provisions pour litige, pour garantie donnée aux clients pour créances douteuses, pour dépréciation45(*), les amortissements dérogatoires, elles ne doivent pas être ajoutées au résultat net, dans la mesure où le FCF est une méthode de mesure de performance transitoire.

Ces provisions qui, anticipent les charges futures sont les provisions pour impôts, les provisions pour grosses réparations, les provisions pour charges sociales et fiscales sur congés à payer.

- Les dotations à l'amortissement des survaleurs46(*) (goodwill)

Pour bien comprendre la logique de la méthode FCF, il est nécessaire de rappeler la définition du goodwill.

Une entreprise peut avoir une valeur supérieure à son actif net comptable corrigé. Le fait que l'entreprise vaille plus que la somme des éléments qui la compose est dû à différents facteurs comme par exemple le Know-how, l'image de marque, la clientèle ...Chacun de ces facteurs est malaisé à évaluer en soit. Par contre, chacun apporte une valeur additionnelle à l'entreprise si bien que l'on puisse écrire l'égalité suivante :

Valeur de l'entreprise = actif net corrigé + goodwill

Comme l'affirme Emmanuel Tchémeni47(*) « Ainsi une synergie positive entre les différentes activités, une bonne ambiance sur le plan social, une activité de recherche et développement productive, une bonne stratégie, sont à l'origine de bénéfices supplémentaires qui augmentent la valeur de l'entreprise : de façon générale le supplément de rentabilité par rapport à la valeur patrimoniale constitue le goodwill. »

Il est à noter que la valeur d'une entreprise peut être inférieure à son actif net comptable corrigé, auquel cas on parlera de badwill.

Avec badwill = valeur de l'entreprise - actif net comptable (actif net comptable > valeur de l'entreprise.)

En cas de rachat d'une entreprise par une autre entreprise, les montants de goodwill apparaîtront au bilan de la société acquéreuse sous le compte d'écart d'acquisition soit à l'actif s'il s'agit d'un goodwill (écart d'acquisition positif), soit au passif s'il s'agit d'un badwill (ce qui est beaucoup plus rare en pratique). Les écarts d'acquisition positifs feront l'objet d'un amortissement sur une période n'excédant pas 40 ans48(*).

Sur le plan comptable, cette dotation à l'amortissement du goodwill viendra minorer le résultat net, pourtant d'un point de vue économique, il ne s'agit guère d'une dépréciation, mais au contraire d'un supplément de valeur. Il convient dès lors d'ajouter au résultat net comptable les dotations aux amortissements de ces survaleurs.

Les dotations à l'amortissement des éléments immatériels comme les frais de recherche et développement (à l'exclusion des frais entrés dans le coût de production des commandes passées par des tiers ainsi que des frais de recherche fondamentale), pour les mêmes raisons que celles évoquées pour le goodwill seront ajoutées au résultat net comptable.

Les amortissements cumulés des frais de recherche et développement, de la même façon que le goodwill et suivant le même raisonnement, seront intégrés au capitaux propres dans le but de le corrigé.

ii- Les corrections relatives à la fiscalité différée

Le FCF, en tant que méthode transitoire de création de valeur tient compte des distorsions liées aux effets de calendrier de manière à ne pas imputer rigoureusement les dépenses sur la période analysée.

C'est la raison pour laquelle les amortissements pour impôts différés (qui se rapportent aux périodes antérieures d'exploitation et sont, par conséquent dus) ne doivent pas être réintégrés dans le calcul du résultat économique.

En résumé, le résultat économique est donc déterminé de la manière suivante :

Résultat économique = EBE -Impôt théorique sur les sociétés

+ Dotations aux provisions à caractère de réserve ou anticipant des charges

+ Dotations à l'amortissement du goodwill

Par impôt théorique sur les sociétés, il faut comprendre le produit entre le résultat d'exploitation et le taux de l'impôt sur les sociétés.

Il convient de noter que le résultat économique peut se déterminer également à partir du résultat net.

Auquel cas il faut éliminer :

- Les dotations aux amortissements et provisions d'exploitation ;

- Le résultat financier car le résultat économique est déterminé avant frais financiers, qui sont appréhendés dans les coûts des capitaux investis ;

- Le résultat hors activité ordinaire (HAO) dans la mesure où le résultat économique est un résultat récurrent ;

- La participation des travailleurs ;

- L'impôt sur le bénéfice global de l'entreprise étant donné qu'il ne s'applique pour la détermination du résultat économique que sur le résultat d'exploitation.

Bien entendu, il faudra également appliquer les retraitements mentionnés ci-dessus. Dans une telle hypothèse, on a :

Résultat net

+ IS

+ Participation des travailleurs

+ ou - résultat HAO (+ s'il s'agit d'une perte et - s'il s'agit d'un gain)

+ ou - résultat financier

+ ou - amortissement pour L'exploitation

- EBE

- impôt sur le résultat d'exploitation

+ Dotation aux provisions ayant caractère de réserve ou anticipant des charges futures

+ Dotation à l'amortissement du goodwill

+ Dotation à l'amortissement des frais de R&D.

= Résultat Economique

Il est à préciser que cette formule est la résultante des différents retraitements faits pour reconstituer le résultat économique.

2. La détermination de l'investissement de la période.

L'investissement de la période comprend à la fois la variation des immobilisations nettes et la variation du besoin en fonds de roulement. Ainsi, l'investissent est constitué de tous les éléments requis pour l'exploitation. Ainsi, on y retrouve les éléments du fonds de roulement lié à l'exploitation49(*) ainsi que les immobilisations nettes. C'est ce mariage que Barnay et Calba50(*) , désignent sous les termes de capitaux permanents nécessaires à l'exploitation (CPNE).

De manière schématique, la variation des immobilisations nettes est la résultante d'un ensemble de flux comme nous le montre le tableau ci-dessous51(*) :

Cycle d'Investissement

- acquisition d'immobilisation incorporelle

- acquisition d'immobilisation corporelle

- acquisition d'immobilisation financière

- prêts

+ cession

+ remboursement de créances longues

+ subventions d'investissement reçues

+ variation dettes sur immobilisation

= Flux de trésorerie d'investissement

Quant à la variation du BFR de la période le tableau ci-dessous nous en donne un aperçu.

Cycle d'Exploitation

+ variation stocks

+ variation avances et acomptes versés

+ variation clients

+ variation des EENE

+ variation des autres créances

+ charges constatées d'avance

- variation avances et acomptes reçus

- variation fournisseurs

- variation dettes fiscales et sociales

- variation des autres dettes

-variation des produits constatés d'avance

=Variation du BFR

3. La détermination du coût des capitaux investis 

La structure de financement comprend à la fois les dettes financières nettes 52(*) (par opposition aux dettes d'exploitation qui se noient dans le BFR) et les fonds propres comptables retraités suivant les mêmes modalités que le résultat économique.

Ainsi, le coût des capitaux investis est égal au coût moyen pondéré de chacune des composantes.

Soit :

CP la valeur économique des capitaux propres dont le coût est ka ;

D la valeur économique des dettes financières dont le coût est kd ;

T, le taux de l'impôt sur les sociétés (IS) ;

Km= CMPC, le coût moyen pondéré du capital

Km = ka[ + kd(1-T)()]

La formule du coût moyen pondéré du capital suppose que les capitaux propres et la dette sont retenus pour leur valeur de marché. En réalité dans la pratique, la valeur de marché de la dette est très souvent supposée égale à sa valeur comptable.

La valeur économique des capitaux propres à utiliser dans la formule du CMPC est précisément le résultat de la valorisation par Discounted Cash Flow53(*) (DCF) ou en français flux de trésorerie actualisé. Il s'agit donc d'une approche itérative qui « boucle sur la valeur des capitaux propres ».

Pour une société cotée, une approximation consiste à retenir la capitalisation boursière dans la formule du CMPC.

On calcule le coût de la dette avant impôts par la méthode d'essai et erreurs (en d'autres termes Kd est déterminé par approximations successives), pour trouver kd dans

NPo=

Où NPo = le prix du marché de la dette, les coûts de flottements (coûts relatifs à l'émission d'une valeur) ;

It = Le montant d'intérêt payé annuellement à l'investisseur ;

Dm = la valeur de la dette à maturité ;

kd = coût de la dette avant impôt (le taux de rendement de la dette avant impôt requis) ;

n = nombre d'années jusqu'à maturité ;
 

Le coût de la dette après impôts égale : kd (1 - T)

L'entreprise doit tenir compte dans la mesure de sa performance et dans la création de valeur du coût de ses fonds propres, considérés pendant longtemps abusivement ou de façon erronée comme, par essence, gratuite. Or pour un actionnaire une entreprise ne crée de la valeur que si le rendement que lui procure son action (soit en dividende soit en plus-value), est supérieur à celui qu'il peut escompter du marché en général. Ainsi, le coût des fonds propres peut s'analyser comme une exigence de rentabilité minimum des actionnaires qui, si cette condition n'est pas satisfaite se désengagent.

Le rendement attendu par les actionnaires peut être évalué principalement de deux manières :

Soit par référence au taux des emprunts sans risque : obligations assimilables du trésor (OAT), bon du trésor, majoré d'une prime de risque spécifique à l'entreprise ;

Soit sur la base du modèle d'évaluation des actifs financiers (MEDAF) qui mesure statistiquement le degré de volatilité de la valeur de l'entreprise par rapport à la volatilité du marché, et calcule une prime de risque sur le titre de l'entreprise. Selon ce modèle, la rentabilité requise E (Rj) des actionnaires qui investissement dans le titre j est donnée par la relation suivante :

E(Rj) = Rf + B(E(Rm) - Rf)

Avec:

Rf = rentabilité de l'actif sans risque (comme le rendement de l'OAT à 10 ans par exemple)

E (Rm) = est l'espérance de la rentabilité du marché ;

B est un coefficient estimé selon une régression statistique, qui exprime la sensibilité du titre aux conditions générales du marché des actions. Lorsqu'il est égal à 1, le titre se comporte comme le marché. Au-dessus de 1 il amplifie (à la hausse comme à la baisse) l'évolution globale. Sous l'unité, c'est une valeur qui « sous-réagit » aux mouvements de la conjoncture boursière (exemple : les valeurs dites  « défensives » des gérants de portefeuille) ;

La quantité (E (Rm) - Rf) représente la prime de risque du marché. Elle est constatée historiquement : différence de rendement entre les actions et les emprunts d'Etat. Toutefois, cette prime peut différer selon que l'on retient une période d'observation de 10, 20 ans ou 50 ans entre 4% et 8%. La conséquence majeure est que, cette libéralité peut être exploitée par ceux des entreprises qui souhaitent présenter un différentiel de rendement entre leurs titres et l'actif sans risque plus flatteur, dans le but d'attirer les investisseurs. Mais l'approche par le FCF s'en préoccupe t-elle ?

4. La détermination du FCF et la valeur de l'entreprise

La méthode FCF consiste à appliquer, pour le calcul de la valeur de l'actif économique, les techniques de choix des investissements. Comme nous l'avons vu, les flux qui doivent être retenus sont les flux de trésorerie après impôt dégagés par l'actif économique (en d'autres termes, il s'agit des flux de trésorerie libérés du financement du besoin en fonds de roulements et de l'investissement). Ils doivent être actualisés à l'infini au coût moyen pondéré du capital.

Plus précisément, on procède à la prévision de flux de trésorerie que l'on actualise pendant un certain nombre d'années appelé horizon explicite variable selon les secteurs et on borne l'horizon par une valeur terminale. Cette valeur est, en fait, le dernier « cash flow » de l'horizon prévisionnel. Il représente la situation d'équilibre de la société et est actualisé sur une période infinie. Rappelons que le FCF se détermine comme suit :

Free Cash Flow = + Résultat d'exploitation

- IS calculé sur la base du Résultat d'exploitation (X% de RE)

- Variation du BFR

- Investissements [Acquisitions - Cessions]

+ Amortissements

Une fois que le FCF est déterminé, la valeur des actifs opérationnels (V par la suite) correspondant à la somme des FCF futurs actualisés, on peut écrire :

V = (1)

Or, le plan d'affaires de la société à valoriser fournit seulement des prévisions sur n années. Par conséquent on décompose la formule ci-dessus en 2 éléments :

V = + (2)

On appelle Valeur Terminale (VT) la somme :

= + + ... (3)

Pour calculer cette somme, on suppose que les FCF ont, au delà de n années, un taux de croissance annuel égal à g.

Dans ce cas :

VT = + + ... = [ + +...] (4)

VT = (5)

Pour calculer cette somme, on se réfère à la formule de la série géométrique :

=

Dès lors, en remplaçant « q » par, la formule de la valeur terminale devient :

VT = = (6)

Il est alors possible de simplifier par 1+K et d'annuler 1-1 ce qui permet d'aboutir à :

(7)

VT =

Finalement : V54(*) = + (8)

 

Après avoir essayé de montrer dans un premier temps les limites du critère traditionnel du taux de rentabilité des capitaux propres (ROE), notamment le fait qu'il soit peu conforme à la réalité économique, sa dépendance à la structure de capital, son hétérogénéité, et enfin sa propension à faciliter la diffusion d'informations asymétriques, nous avons dans un deuxième temps présenter la méthode FCF non pas sans avoir fait état du contexte qui l'a suscité, il importe maintenant de préciser les conditions qui fondent la réussite de cette approche au sein de l'entreprise, pour l'intérêt premier des apporteurs de fonds en général et de l'actionnaire en particulier. Comme on a pu s'en rendre compte au vu de ce qui précède, la méthode FCF appelle à la plus grande discipline dans l'utilisation des ressources.

CHAPITRE II: LA GESTION PAR LA VALEUR

La création de valeur obéit naturellement à un système organisationnel et de gestion qui rompt de manière significative avec les formes plus connues d'organisations traditionnelles. Il s'agit davantage d'intégrer une nouvelle attitude de gestion centrée sur la performance financière, mieux la création de richesse du point de vue de l'actionnaire et partant de tous les autres acteurs de la vie de l'entreprise. Mais auparavant, nous allons présenter les sources de valeurs, auxquelles prennent naissances les cash-flows de l'entreprise (Section 1) et enfin la gestion par la valeur (Section 2).

Section I : Les sources de cash-flow

Un flux de trésorerie est un mouvement, entrée ou sortie, de liquidités. L'ensemble des flux d'une entreprise peut être rattaché à l'un des trois cycles suivants : l'exploitation (A), l'investissement (B) et le financement (C).

A. Le cash-flow du cycle d'exploitation

Les cash-flow du cycle d'exploitation correspondent à ceux générés par l'activité de l'entreprise : Consommation, transformation, vente. Il traduit d'une part la création de richesse (EBE) et d'autre part la trésorerie (ETE).

A ce niveau, la contribution à la création de valeur revient aux opérationnels de l'entreprise. Il s'agit d'augmenter les produits et diminuer les charges de l'entreprise sans investissement ni désinvestissement. Cette amélioration de l'efficience de l'entreprise qui peut sembler une lapalissade est plus vite dite que faite. En effet, le plus souvent les opérationnels auront tendance à considérer des investissements implicites pour répondre à cette préoccupation (nouvelles machines, formation du personnel, licenciement, etc.) En fait, ils doivent plutôt repenser entièrement le métier exercé et la manière de l'exercer. Il importe donc que les opérationnels soient impliqués au plus bas de l'organigramme possible. Une telle démarche permet d'analyser, pour chaque décision opérationnelle, ses conséquences multiples et leurs interdépendances, et de calculer la création de valeur générée.

B. Le cash-flow du cycle d'investissement.

Le cash-flow d'investissement apparaît comme le solde entre les acquisitions d'immobilisations et les désinvestissements. Cette différence fait généralement apparaître un besoin de financement. Investir revient en effet pour l'entreprise à renoncer à une consommation immédiate pour accroître ses recettes futures. Bien entendu, le surcroît de recettes occasionnées par cet investissement devra être suffisant pour assurer sa rentabilité prévisionnelle. L'investissement est donc un processus fondamental dans la vie de l'entreprise, qui engage durablement celle-ci. Si dans un premier temps, il grève fréquemment les comptes et états financiers de l'entreprise, lui seul, permet d'assurer sa croissance à long terme. De plus c'est en choisissant judicieusement ses investissements, et non ses financements, que l'entreprise créée de la valeur. Le critère de la valeur actuelle nette de l'investissement d'un investissement (différence entre sa valeur actuelle et son coût) est à ce titre fondamental. « Le seul outil pour mesurer la création de valeur potentielle.»55(*) De fait, un investissement dont la VAN est positive mérite d'être réalisé, puisqu'il créera normalement (si la réalité est conforme aux prévisions faites) de la valeur. A l'inverse, un investissement dont la VAN est négative ne doit pas être réalisé puisqu'il va normalement détruire de la valeur. Pourtant parfois, des investissements à la VAN négative seront réalisés car ils apparaissent comme stratégiques pour protéger une position, ouvrir de nouveaux marchés à fort potentiels difficiles à quantifier de nos jours, etc. Pour autant, ne nous leurrons pas, si leur VAN est effectivement négative, il faudra que tôt ou tard d'autres investissements ayant une VAN positive viennent compenser la destruction de valeur qu'ils auront causées, sinon l'entreprise court à sa perte.

De ce point de vue, le financier a une place importante, mais indirecte ; la définition de la procédure de sélection des investissements, et la mise en place d'outils d'analyse et de contrôle. Peut-il agir plus directement grâce à l'une de ses compétences clés. La politique de financement ? Peut-il adopter une structure financière qui minimiserait la valeur globale de celle-ci ?

B. Le cash-flow du cycle de financement

Le flux de financement apparaît comme l'excédent des ressources financières (endettement nouveaux, augmentation de capital) sur les emplois financiers (remboursement d'emprunt, distribution de dividendes).

Les opérations de financement jouent un rôle d'équilibrage, dans le cas où les variations de trésorerie induites par les opérations d'exploitation et d'investissement ne seraient pas assurables par l'entreprise. Si le financier peut difficilement espérer diminuer le coût du capital en imaginant une politique financière audacieuse, quelle peut être alors sa contribution à la création de valeur ?

La politique de financement peut participer à la création de valeur en répondant à trois exigences. Elle doit accroître la flexibilité stratégique de l'entreprise, respecter sa situation opérationnelle et concourir au marketing du titre. Il est également impérieux de bien identifier les flux financiers

1. La Flexibilité stratégique

L'entreprise doit donc se ménager des degrés de liberté financière afin de pouvoir profiter des occasions d'investissement futures. Le financier d'entreprise est garant de cette flexibilité stratégique. Dans une économie où la rapidité est l'une des clés du succès, l'entreprise doit pouvoir mobiliser des ressources plus rapidement que ses concurrents. Un endettement trop important la contraindrait à recourir aux actionnaires, ce qui est difficile. L'on sait qu'une augmentation de capital est non seulement lourde à mettre en oeuvre, mais aussi qu'elle constitue un signal négatif envoyé aux actionnaires (l'opération est souvent déclenchée lorsque le cours est surévalué).Elle se traduit donc généralement par une chute du cours (aux Etats-Unis, celle-ci s'établit en moyenne à 3% induisant une perte d'un tiers du montant des fonds levés).

2. Politique financière et contexte opérationnel

La politique financière doit être alignée sur la situation opérationnelle de l'entreprise. L'endettement minimal doit être choisi soigneusement en fonction de plusieurs critères. L'impact des économies fiscales est certes important, mais il ne doit pas être surestimé. La prise en compte de la fiscalité personnelle des investisseurs et les spécificités de telle ou telle législation fiscale ont vite fait de réduire cet avantage supposé, et il existe par ailleurs d'autres moyens d'alléger sa charge fiscale (politique d'amortissement ou de provisions par exemple).

Il est surtout essentiel de bien mesurer les risques d'exploitation engendrés par les investissements sélectionnés. Au-delà d'un calcul de rentabilité classique, quelle est la probabilité d'occurrence de situations extrêmes qui rendraient nécessaire le recours à un financement externe ? Il existe aujourd'hui des techniques d'analyse de sensibilité particulièrement fines ( reposant par exemple sur des simulations probabilistes ) qui permettent au directeur financier de mieux anticiper la génération de flux de liquidités futurs, et leur probabilité d'occurrence, et, ainsi, d'affiner sa politique financière ( niveau et conditions de l'endettement financier ).

Enfin, il est impérieux de tenir compte de la nature des actifs de l'entreprise. Celle dont les actifs sont essentiellement intangibles (pharmacie, industrie de biens de grande consommation...) pourra moins recourir à l'endettement que celle qui met en oeuvre des actifs tangibles (industries lourdes, transport aérien...). En effet en cas de difficultés financières, la première serait contrainte d'abandonner à jamais des projets de croissance ( suppression des dépenses de R&D ou marketing...) qui conditionnent son avenir, alors que la seconde peut se permettre d'arrêter d'investir momentanément, cet arrêt ne la mettant pas en péril. Les coûts de faillite sont donc plus importants, et l'impact sur la valeur plus négatif pour la première que pour la seconde.

3. Le marketing du titre

La troisième exigence d'une politique de financement veut qu'elle participe à l'émission de signaux positifs à l'égard du marché.

C'est ainsi qu'il faut interpréter les réactions positives du marché à l'égard des rachats d'actions, ou bien des scissions d'entreprises. Dans le premier cas, outre le fait qu'un rachat d'actions s'accompagne souvent du paiement d'une prime, l'entreprise signale au marché qu'en l'absence d'opportunités d'investissement, elle a choisi de faire une opération similaire à celle d'une distribution exceptionnelle de dividendes. Quant à la scission, elle permet d'afficher plus clairement l'importance des actifs disponibles, et surtout la façon dont ils pourront être découpés entre les actionnaires et les créanciers. Dans les deux cas, le rôle du directeur financier est d'aider le marché à construire ses anticipations de rentabilité future. De même, toutes les décisions visant à imposer des contrôles (gouvernement d'entreprise) ou une politique de la valeur (Value Based Management) permettent de rassurer les pourvoyeurs de fonds sur l'utilisation des ressources internes de l'entreprise.

4. L'identification des flux financiers

Pour identifier les flux, un moyen simple est d'observer le bilan financier. Celui-ci est fait de grandes masses. Les flux expliquent les variations de ces masses et la somme algébrique de tous ces flux explique la variation de trésorerie nette (TN).

Ces flux qui affectent chaque masse du bilan sont inscrits à côté de celle-ci. Ainsi, les types de flux qui concernent l'entreprise sont au nombre de huit :

- L'autofinancement courant (CAF) ;

- Les investissements (ACQ) et les désinvestissements (CES) en immobilisations ;

- L'investissement ou le désinvestissement en BFR ;

- Les augmentations (EMP) et les diminutions (REMB) de dettes financières ;

- Les variations financières de capitaux propres, CAF, dividendes (DIV) et l'augmentation de capital (? CAP) ;

+ CAF

- Dividendes DIV

- + augmentation de capital AUG CAPAUAAADCAP

Tableau 1 : La représentation des flux à partir du bilan

+ Cessions CES

- Acquisition ACQ

Actif immobilisé

 

Capitaux propres

Dettes financières

+ Baisse de BFR ou

- Trésorerie nette

+ Emprunt

- Remboursement REMB

Dettes financières

 
 

Besoin en fonds de roulement (BFR)

Le signe + et - correspond au sens de la variation de la trésorerie

Section II : La gestion par la valeur (ou en anglais Value Based Management).
A- Une nouvelle mesure des performances

La conception de la performance qui prévaut encore de nos jours place au centre de ses préoccupations l'aptitude d'une entreprise à dégager des produits qui compensent les charges qu'elle supporte. Lorsque les produits dépassent les charges, l'entreprise dégage un bénéfice, elle justifie alors l'utilisation efficace des ressources qui lui sont confiées et apparaît comme créatrice d'un surplus économique. En revanche, lorsque les produits dégagés demeurent insuffisants pour absorber l'ensemble des charges supportées, une perte doit être constatée, dans ce cas, l'entreprise apparaît comme destructrice de richesse puisqu'elle ne se montre pas en mesure de justifier l'usage productif des ressources qu'elle combine.

L'approche par la création de valeur ou par la valeur actionnariale introduit un renouvellement fondamental dans la perception de la performance. A l'évidence, nous reconnaissons que la rémunération des fonds propres ne fait peser sur l'entreprise aucune contrainte formelle. Les actionnaires ne peuvent invoquer aucun engagement contractuel souscrit à leur égard pour exiger une rémunération. Mais s'ils ne peuvent faire jouer cette contrainte de nature juridique, ils ont la possibilité d'exercer sur l'entreprise une contrainte économique à l'efficacité redoutable.

Si l'entreprise ne leur assure pas une rémunération conforme à leurs espérances, les actionnaires ont le pouvoir des sanctions significatives par leurs attitudes sur le marché des capitaux. D'une part les actionnaires mécontents risquent de se retirer de l'affaire, en cédant leurs parts, de se tourner vers des entreprises dont ils jugent la politique de dividende plus généreuse et dont ils escomptent une rémunération plus substantielle de leurs investissements.

Le retrait d'un nombre significatif d'actionnaires se traduit alors par une dépréciation du titre et par l'accroissement de la vulnérabilité de l'entreprise dont la structure de contrôle devient plus fragile.

Une analyse détaillée pouvant permettre de ressortir les centres de valeur de l'entreprise est un préalable, elle vise à identifier les leviers de création de valeur et les traduire en indicateurs pour faire descendre sur « le terrain » cette notion financière souvent perçue comme un concept abstrait. D'une manière schématique, et d'après Laurent Marx associé et Jean-François Kroonen56(*) directeur « Corporate Finance » chez Pricewaterhousecoopers, on identifie sept paramètres qui influencent le processus de création de valeur, ce sont les inducteurs de valeur (ou « value drivers »). Il s'agit des éléments suivants :

- le taux de croissance du chiffre d'affaires ;

- la marge opérationnelle ;

- la variation du besoin en fonds de roulement ;

- le montant des investissements en actifs immobilisés ;

- le taux de taxation effectif ;

- le coût moyen pondéré du capital ;

- l'horizon de prévision.

Par exemple, les indicateurs suivants peuvent être utilisés pour saisir concrètement le processus de création de valeur :

Pour le chiffre d'affaires : (CA /visite), (prix : marge nette /famille d'articles), (service : indice de satisfaction client) ;

Coûts (consommation de matière : rendement matière), (productivité : nombre de personnes/ unité produite dans l'industrie ou vendue dans le négoce, les services) ;

Recherche et développement (délai de développement)

Pour le BFR (niveau stock rotation par article), (en cours clients) crédit clients en jours), (en cours fournisseurs : crédits fournisseurs en jours).

Par ailleurs, l'entreprise doit être organisée de manière à ce que toutes ses composantes participent activement au processus qui vise à l'implémentation de ces critères de mesure. Ainsi, elle doit pouvoir distribuer les rôles des principaux acteurs tout en leur laissant une marge de manoeuvre raisonnable en vu de les y impliquer véritablement. Cette façon de faire, n'a l'extrême avantage que de responsabiliser tout le personnel de l'entreprise sans distinction aucune ; chaque poste de travail devant se comporter comme un centre de profit en soit. L'objectif est, on s'en doute, de préparer la plate-forme d'analyse de la performance, mieux de la création de valeur. Nous avons dans le tableau ci-dessous un aperçu de ce qui précède :

Implication de l'entreprise dans la démarche de mesure et d'analyse57(*)

Top management

Définition des centres de valeurs (1)

Allouer des ressources (7)

Département

Mesure la valeur créée/détruite (2)

Oriente et chiffrer les orientation stratégiques possibles (8)

 

Identifier des axes de développement internes et externes créateurs de valeur (3)

Mettre en oeuvre les indicateurs de performance (6)

Service opérationnel

Mesurer l'attractivité des marchés (4)

Identifier les vecteurs de compétitivité (5)

Figure1 : Démarche de mesure de l'analyse de la valeur

TOP management

Département

Service Opérationnel

(1)

Y

(7)

(2)

(8)

(6)

(3)

(5)

(4)

X

L'axe des abscisses (X) correspond aux différentes phases de l'analyse de la valeur, tandis que L'axe des ordonnées (Y) correspond à la hiérarchie des décisions.

B- Nouvelle forme organisationnelle

Frank Ostroff, consultant du cabinet Deloitte-touche, est à l'origine du concept « d'entreprise horizontale » « modèle d'entreprise des cinquante années à venir » selon Business Week58(*). Ce modèle a dopé les résultats de Ford, Xerox, General Electric,  Barclays. L'idée force est que, trop d'entreprises « verticales » regroupent leurs collaborateurs en services fonctionnels hiérarchisés. Cette fragmentation entrave les relations des entreprises avec leurs clients. Il est nécessaire de s'appuyer sur les concepts de re-engineering59(*), de responsabilisation, de travail en équipe et en réseau, de gestion des connaissances et valorisation des talents. Le but étant de reconfigurer l'organisation pour créer l'entreprise allégée « d'étapes hiérarchiques. »

Bâtir l'entreprise de la valeur60(*) c'est-à-dire l'organisation capable de satisfaire aussi bien les actionnaires que les salariées requiert de mettre à l'unisson stratégie marketing et management, l'entreprise doit être capable de révéler et de mettre en musique les formidables gisement d'intelligence qu'elle recèle. Dirigeants, managers et salariés deviennent partenaires au sein d'une « organisation apprenante clarifiée et pratique qui ne succombe pas aux effets de mode. » Aussi, pour participer directement à la création de valeur, le financier doit-il plutôt articuler ses choix autour de la stratégie de l'entreprise, et les enserrer dans un marketing efficace à l'égard des investisseurs.

C- Le développement du gouvernement d'entreprise

La volonté de promouvoir la création de valeur actionnariale s'affirme en parallèle avec celle d'implanter un gouvernement d'entreprise transparent et efficient. Les préoccupations sont en effet convergentes. Dans les deux cas, il s'agit de faire en sorte que le jeu des pouvoirs au sein des organisations délibérants et exécutifs des entreprises favorise d'abord ceux qui en sont les propriétaires : les actionnaires. Les dirigeants ne sauraient poursuivre d'autres objectifs (prestige, diversification non rentables, stratégies d'enracinement, instrument anti-OPA, dissociation entre droits de vote et détention d'actions, opérations dilutives ...)

Pour cela, les actionnaires doivent être informés complètement et en temps opportun, confortés dans leurs pouvoirs (en particulier ceux de participer effectivement aux décisions et de déléguer à des administrateurs ayant les moyens d'exercer pleinement leurs missions). Des structures de contrôle effectif des dirigeants doivent être mises en oeuvre. La technostructure, dont Kenneth Galbraith61(*) célébrait encore au début des années 60 dans « le Nouvel Etat Industriel » le rôle central, entretien de ce fait avec les détenteurs du capital des relations plus équilibrées.

Bien sûr tout cela n'est efficace que s'il est mis en place un système d'intéressement qui incite les dirigeants et les salariés.

D- Les modalités de Rémunération

Pendant longtemps on a considéré l'hypothèse selon laquelle les dirigeants agissaient toujours dans l'intérêt des actionnaires : maximiser la richesse des actionnaires. Pourtant, la réalité serait toute autre.

En effet, J. Edwards (1987)62(*) met bien en évidence le changement fondamental survenu dans la littérature théorique : la firme n'y est plus considérée comme une boîte noire dirigée par les managers dans l'intérêt clairement défini des actionnaires ; au contraire, l'entreprise est perçue comme une organisation où les différents acteurs peuvent avoir des intérêts divergents63(*).

Supposons maintenant que les dirigeants définissent leurs objectifs dans le souci premier de maximiser leur propre fonction d'utilité, considérons le fait que les dirigeants disposent d'informations plus complètes que les actionnaires. Du coup l'un des défis auxquels sont confrontés les actionnaires consiste à mettre au point des systèmes d'intéressement qui font que les dirigeants ont le même objectif qu'eux, à savoir l'optimisation du cours boursier des titres de l'entreprise. Dès lors, la sensibilisation des dirigeants et des salariés aux impératifs de la création de valeur entraîne le dépassement des formes traditionnelles de la relation salariale. La distribution de stock-options, les plans d'épargne, l'actionnariat direct des salariés dans leur entreprise ou l'épargne retraite constituent à la fois des moyens de réduction d'antagonismes traditionnels entre les apporteurs de facteurs de production. A côté donc d'une rémunération traditionnelle sous forme de salaire, il y a dorénavant une rémunération complémentaire assez incitative. Concrètement, la rémunération globale des dirigeants comporte généralement une part variable basée sur les performances, telles une prime déterminée en fonction des résultats de l'entreprise ou des options de souscription d'actions. C'est d'ailleurs ainsi que, les grands groupes mondiaux comme Coca Cola, Microsoft, Boeing et bien d'autres, ont réduit ces antagonismes en instaurant dans les années 1980 et 1990 un système de stock-options qui obligent leurs cadres dirigeants à faire en sorte que le cours des actions monte en bourse. Contrairement aux actionnaires, qui possèdent des portefeuilles diversifiés et peuvent donc être traités comme s'ils n'attachaient pas d'importance aux risques, les dirigeants se sont investis personnellement dans l'entreprise. En conséquence, l'aversion des dirigeants pour la prise de risque constitue un élément important de toute évaluation de l'efficacité des systèmes de rémunération à la performance et justifie les opérations de couverture au niveau de l'entreprise.

Après avoir examiné en détail la méthode FCF pour les entreprises industrielles et commerciales, en essayant d'avoir bien compris la logique des différents retraitements, sa signification dans l'optique de la gestion par la valeur, il est maintenant possible d'examiner son application au secteur bancaire.

Section III : L'extension de l'approche FCF à la firme bancaire

En raison des spécificités de l'activité bancaire, et plus exactement de la composition des actifs bancaires gérés qui sont quasi exclusivement financiers, la transposition de la méthode FCF à ce secteur d'activité nécessite des adaptations.

A- Le résultat économique bancaire

Entre les activités industrielles et commerciales et l'activité bancaire on recense des différences de traitement majeures dans la détermination du résultat économique concernant d'une part la prise en compte du résultat financier (1), la prise en compte de certaines dotations et reprises sur provisions (2).

1. L'incorporation du résultat financier dans le résultat économique bancaire

Le résultat financier est la résultante des produits et charges financières.

Pour les entreprises industrielles et commerciales, le résultat économique n'inclut pas le résultat financier pour deux raisons :

D'une part, les produits générés par les actifs financiers ne sont pas des produits récurrents et sont hors de l'activité principale des entreprises industrielles et commerciales. Or, le résultat économique est le résultat de l'activité principale de l'entreprise ;

D'autre part, les charges financières sont incluses dans le coût des capitaux investis et ne doivent donc pas être comptabilisées une seconde fois dans le résultat économique, ce qui aurait comme conséquence de minorer injustement le résultat économique de l'entreprise étudiée.

De ce point de vue, l'activité bancaire est totalement différente car, la marge d'intérêt est la principale composante du « chiffre d'affaires » bancaire, c'est-à-dire le produit net bancaire. Or le produit net bancaire inclut l'ensemble des produits et les charges, par nature financière, puisqu'une grande partie du capital utilisé par les banques est de la dette. C'est la raison pour laquelle le résultat économique d'une banque comprendra les frais financiers.

2. Le traitement des dotations et reprises sur provisions

Si l'intégration au résultat économique des dotations aux fonds pour risques bancaires généraux et celles concernant les provisions réglementées apparaît certaine, tel n'est pas le cas des dotations aux autres provisions pour risques et charges.

i- L'intégration des dotations aux fonds pour risques bancaires généraux et provisions réglementées.

Le fonds pour risques bancaires généraux (FRBG) couvre des risques potentiels permanents inhérents à l'activité bancaire elle-même. Ces fonds ne doivent pas avoir été constitués en vue de faire face à des charges diverses ou à des risques probables ou clairement identifiés. En pratique, ce poste est destiné notamment à recevoir la partie des provisions pour risque-pays permettant d'assurer la couverture des encours correspondants supérieure à 50%.

Ces caractéristiques spécifiques, qui rendent le FRBG très proche des réserves, permettent de l'inclure dans le résultat économique. Ces dotations et reprises correspondent le plus souvent à une pré-affectation du résultat.

Tel est le cas également des provisions réglementées.

Les provisions réglementées sont celles qui ont été dotées en application des textes législatifs ou réglementaires, et tout particulièrement en matière fiscale.

En effet, l'administration fiscale ne permet la déductibilité de certaines charges que si elles ont effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. Pour les banques, il s'agit également de la provision pour crédit à moyen et long terme. Ces provisions représentent en fait l'équivalent de réserves non libérées d'impôts. Il s'agit donc également ici d'une pré-affectation du résultat. Elles doivent par conséquent être comptabilisées dans le résultat économique.

ii- Traitement des dotations aux autres provisions pour risques et charges.

Les provisions pour risques et charges sont destinées à couvrir des risques et charges que des évènements survenus ou en cours rendent probables, nettement précisés quant à leur objet, mais dont la réalisation est incertaine. On y trouve notamment, les provisions générales à caractère prudentiel.

Ces provisions suscitent des interrogations dans la mesure où elles peuvent couvrir des charges futures, qui ne naîtront pas pendant la période d'étude.

Bien que le critère du FCF soit une mesure transitoire de la création (ou destruction) de valeur, ces provisions censées couvrir des risques futurs, viennent grever le résultat net. Il convient donc de les réintégrer dans le résultat économique. Etant donné que le résultat économique d'une banque comprend les « frais financiers », il sera équivalent au résultat net sur lequel seront pratiqués les retraitements ci-dessus examinés dans la présente section, ainsi que tous les autres retraitements évoqués dans la section 3 du chapitre 1 pour les entreprises industrielles et commerciales, qui restent valable pour la banque.

En résumé, le résultat économique bancaire pourra être déterminé de la manière suivante :

Résultat Economique

=

Résultat Net

Elimination du Résultat Exceptionnel :

-Produits Exceptionnels

+ Charges Exceptionnelles

Retraitements Comptables Bancaires :

+ Dotations aux Provisions pour Fonds pour Risques Bancaires Généraux

-Reprises de Provisions pour Fonds pour Risques bancaires Généraux

+ Dotations aux Provisions Réglementées

-Reprises sur Provisions Réglementées

+ Dotations aux Provisions pour Risques et Charges

-Reprises sur Provisions pour Risques et Charges

+ Profits latents sur portefeuille de placement

- pertes latentes sur portefeuille de placement

- impôt sur plus-values latentes

+ Économie d'impôt sur moins-values latentes

Retraitements Communs avec les Autres Entreprises Industrielles et Commerciales :

+ Dotations aux amortissements du Goodwill

Après avoir examiné la composition du résultat économique, il convient maintenant d'étudier le coût des capitaux.

B- Le coût des capitaux investis

Pour calculer le coût des capitaux investis, il suffit de déterminer ce coût en pourcentage, ainsi que le montant des capitaux investis.

1. Le coût des fonds propres durs

En matière bancaire, le coût des capitaux investis est le coût des fonds propres durs64(*). Deux grands types de fonds propres peuvent êtres distingués :

- les fonds propres durs ou fonds propres « Tier1 »65(*) qui comprennent les actions, les primes liées au capital, les fonds pour risques bancaires généraux ...

- les fonds propres complémentaires66(*) qui comprennent, entre autres les titres subordonnés à durée indéterminée, les obligations subordonnées convertibles en actions...

A la différence des entreprises industrielles et commerciales, le coût du capital investi n'est pas ici le coût moyen pondéré du capital (entre les dettes et les fonds propres), mais uniquement le coût des fonds propres nets. Cette différence notoire s'explique simplement par le fait que le coût de la dette a déjà été comptabilisé dans le résultat économique, et que le coût des fonds propres « Tier 2 »67(*) est compris dans le coût de la dette. Il serait donc injuste de soustraire une seconde fois les frais financiers du résultat économique.

Le coût des capitaux propres est, comme cela a été dit dans le chapitre 1er, une exigence de rentabilité des actionnaires. Des doutes peuvent subsister quant à savoir si ces exigences sont arbitraires ou s'appuient sur des données rationnelles.

Dans un contexte de compétition intersectorielle, où les investisseurs ont un large éventail de choix entre les différentes branches de l'économie, il serait possible de déterminer le coût des fonds propres bancaires en utilisant le MEDAF, en comparant la volatilité d'une valeur bancaire donnée par rapport à la volatilité du marché en général.

Cependant, sans faire de calcul, on s'aperçoit rapidement que sur le marché tunisien, pour l'exercice boursier 1999 par exemple, l'indice de capitalisation TUNINDEX (indice pondéré) a enregistré une hausse d'environ 30% pour clôturer à 1193 contre 917 à la fin de l'exercice 1998.De même, l'indice général BVMT a de son côté progressé de 74% à 810 contre 465 points à la fin de l'année 1998(voir ci-dessous).

Figure 2 : Les indices de la bourse en 1999

1300 1000

TUNINDEX : 1192.6 (+30%)

800

1100

600

BVMT : 810.24 (+74%)

900 400

Par conséquent, l'application d'une telle méthode donnerait des résultats absurdes. L'hypothèse d'un modèle rationnel tel que celui du MEDAF semble à priori à écarter.

L'exigence consensuelle de la rentabilité des investisseurs semble donc à retenir pour déterminer le coût des fonds propres. Cette exigence est très élevée puisqu'elle est actuellement de 15% après impôts (mais ce taux n'a pas été toujours aussi élevé).De prime abord, cette exigence peut sembler exorbitante. En effet, si l'OAT à 10 ans est prise comme l'actif sans risque de base, cela établit la prime de risque à 10% aujourd'hui. Il est vrai que ces dernières années on a assisté à une baisse conséquente des taux d'OAT, augmentant par la même la prime de risque.

Cependant le niveau de rentabilité requise peut s'expliquer par deux principaux facteurs :

- D'une part, les investisseurs sont conscients que si le loyer de l'argent baisse, le coût de la dette augmente, à un niveau de prix des prestations bancaires à peu près constants, la capacité bénéficiaire des banques ;

D'autre part, l'activité bancaire est une activité par nature risquée : outre le risque de crédit, une banque est exposée au risque de liquidité, au risque des taux, au risque de change, au risque d'insolvabilité et au risque pays. Ces risques sont d'autant plus difficiles à maîtriser qu'ils sont aggravés ces dernières années du fait de la volatilité des conjonctures nationales ou internationales. Cette notion de risque conduit à s'interroger sur la signification des capitaux investis en matière bancaire.

2. La notion de capital investi en matière bancaire

A la différence du secteur industriel et commercial, la principale contrainte des banques n'est pas de financer leur exploitation mais de disposer d'un niveau suffisant de fonds propres pour absorber des pertes potentielles.

En effet, la quasi totalité des actifs et passifs des banques sont de nature financières et donc porteurs de risque. C'est la raison pour laquelle les organes de surveillance ont établi des règles prudentielles de solvabilité en exigeant que soit établi un lien entre les risques encourus par les banques et le montant de leur fonds propres. Il est donc nécessaire de reprendre la distinction établie entre le « capital historique » qui correspond aux sommes investies dans l'entreprise dans le passé, et le capital « économique » qui est un concept « probabiliste » et qui est le capital minimum nécessaire pour couvrir le montant de la valeur de marché susceptible d'être perdue en cas d'évènements adverses. Il convient de noter à cet égard que les ratios établis par la réglementation prudentielle apprécient le risque de façon approximative, voire grossière. Les banques ont donc développé des méthodes d'allocation des fonds propres beaucoup plus fine parmi lesquelles on peut citer la méthode Raroc ou la méthode dites des Scénarii. Pour l'utilisation de l'approche FCF, il convient donc de se baser sur le niveau des fonds propres déterminés selon ces méthodes pour mesurer à la fois la rentabilité économique et le coût du capital économique.

Ainsi le FCF apparaît être, de prime abord un instrument relativement simple de mesure de la performance des entreprises. Mais il requiert de nombreux retraitements comptables, tout particulièrement pour les banques pour deux raisons :

-D'une part, à cause du caractère risqué inhérent à l'activité bancaire qui aboutit à des notions de résultat économique et de coût du capital différentes des entreprises industrielles et commerciales ;

-D'autre part, la comptabilité bancaire ne répond guère à certaines règles de la comptabilité générale (notamment en ce qui concerne les FRBG). Des corrections spécifiques sont donc nécessaires. Après avoir exposé le contenu de cette méthode et son application aux banques, il est maintenant possible, de jeter les bases de l'analyse empirique de notre étude.

DEUXIEME PARTIE : LE TEST EMPIRIQUE DE LA METHODE FREE CASH FLOW APPLIQUEE A LA FIRME BANCAIRE

Notre étude empirique va cibler les banques tunisiennes, pour essayer de dresser à travers le FCF leur comportement relativement à la création de valeur. Pour ce faire, nous allons successivement préciser la taille de notre échantillon, la démarche privilégiée pour enfin, parvenir aux résultats qui seront les nôtres au terme de cette étude.

CHAPITRE III : PRESENTATION DE L'ECHANTILLON ET METHODOLOGIE

Nous avons conduit notre travail sur la base de certaines hypothèses à savoir :

- Le montant des capitaux « historiques » est égal au montant du capital économique ;

- La création de valeur est positivement corrélée au résultat économique ;

- La performance des valeurs bancaires tunisiennes est inférieure aux standards internationaux ;

- Le niveau des frais généraux grève substantiellement la rentabilité des banques tunisiennes.

Mais, auparavant il importe de définir et de justifier l'étendue de notre échantillon d'analyse, tout en décrivant la spécificité du contexte à la fois économique et financier dans lequel les individus de notre échantillon évoluent.

Section I : Analyse de l'environnement bancaire tunisien et échantillon
A- Le cadre institutionnel

Pour bien comprendre la problématique de la création de valeur dans le système financier tunisien, il est dans un premier temps, essentiel d'être informé du cadre institutionnel de cette création de valeur ainsi que du contexte international dans lequel elle s'inscrit .Or, pour bien saisir ce cadre, il est absolument nécessaire de se donner une idée juste et claire de la situation actuelle et passée de l'industrie financière tunisienne.

1. Historique du système bancaire tunisien

Après l'indépendance (1956), le système bancaire tunisien s'est retrouvé avec la lourde responsabilité de soutenir et de renforcer le mécanisme de restriction et de financement du développement économique du pays. Son propre développement s'est opéré en étroite relation avec l'orientation générale de la politique. Il a hérité les forces, mais aussi les faiblesses.

Le système bancaire tunisien se compose aujourd'hui de la banque centrale, de 12 banques de dépôt, de 8 banques de développement, de 8 banques « Offshore » et d'une banque d'affaire, en plus des institutions financières non bancaires et du trésor public.

Les banques de dépôt, qui représentent la principale composante de ce système, sont dotées de plus de 750 agences sur l'ensemble du territoire tunisien. Par la collecte de l'épargne des entreprises d'une part et des particuliers d'autre part, le système bancaire a joué un rôle éminent dans la dynamisation de l'économie tunisienne, dans la mesure où il contribue annuellement au financement des investissements pour environ 3 milliards de $USD68(*),soit plus des deux tiers du coût global des projets réalisés ( 4 milliards de $USD),et participe au financement des besoins de fonctionnement des entreprises pour environ 6 milliards de dinars, soit près du tires du PIB(20 milliards $USD).

Les banques de dépôt collectent l'épargne liquide (dépôts à vue) ou quasi-liquide (comptes d'épargne et dépôts à terme) qui constituent leurs principales ressources. Les dépôts à vue des résidents tunisiens ont totalisé en décembre 1994,2.291millions DNT69(*), augmentant ainsi leur volume de 16.4%contre 7.2% en 1993.

Cette augmentation en 1994 est due essentiellement aux recettes accrues du tourisme (1.499 millions de $USD en 1994 contre 1.230 millions de $USD en 1993) et du revenu du travail (696 millions de $ en 1994 contre 600 millions en 1993).

En 1995,les banques de dépôts ont enregistré en terme d'encourus moyens :Un fort déclin du rythme de progression des dépôts de la clientèle (+4.5%contre +12.3% en 1994) qui a concerné principalement les comptes spéciaux d'épargne(+1.1% contre +8.3%en 1994)et à un degré moindre, les dépôts à vue .Un changement de cette tendance a cependant été observé au niveau des dépôts à terme(+2.35 en 1995 contre une baisse de 2.3% EN 1994).Le ralentissement du rythme de progression des dépôts à vue ainsi que des comptes spéciaux d'épargne s'explique par le fait que ces dépôts ont été canalisés vers le marché financier à travers les sociétés d'investissement et particulièrement les SICAV.

Pour mieux cerner l'évaluation du système bancaire tunisien, nous allons d'abord choisir deux périodes significatives :

La première période précédant la mise en place du programme d'Ajustement Structurel (le PAS), allant de 1973 à 1985.

La deuxième période correspondant à la mise en oeuvre du programme d'Ajustement Structurel allant de 1986 à 1994.

On peut constater durant ces deux périodes un changement radical du comportement du système bancaire tunisien dans le financement des investissements.

En effet, la période qui a précédé le PAS (1973-1985) se caractérise par un emploi imprudent des investisseurs couplé à un laxisme monétaire de la part des banques .A cette époque, les banques se sont effectivement parfois engagées, sans analyse du risque, dans certains projets à rentabilité douteuse. Ayant ainsi accumulé d'importants impayés, certaines de ces banques sont devenues réticentes quand à l'octroi de nouveaux crédits dans certains secteurs d'activités.

Ce comportement ne peut en aucune manière s'expliquer par le manque de liquidités, les avoirs en comptes spéciaux d'épargne ayant progressé au cours de la période du PAS allant de 1986 à 1994 de plus de 18.6% par an, alors que les crédits à moyen et à long terme n'ont augmenté que de 11.2% par an. Le tableau ci-dessous résume cette situation :

Tableau 1 : Récapitulation de la situation du système bancaire tunisien avant et pendant le PAS70(*)

 

Période avant la mise en oeuvre du PAS (1973-1985)

Economie assistée et bureaucratique

Période du PAS (1986-1994)

Economie dynamique et libéralisée

Progression moyenne des crédits à moyen et long terme

24.7%

11.2%

Progression moyenne des crédits à moyen et long terme en Dinars constants

12.5%

3.5%

Répartition des crédits sur les divers secteurs de l'économie :

Industries manufacturières

Tourisme

Promotion

Immobilière

Agriculture

Divers

41.2%

12.4%

13.3%

11.35%

21.75%

19.4%

31.0%

21.0%

18.0%

10.6%

Objectifs de la politique monétaire

Maximisation du taux de croissance du PIB

Maximisation des créations d'emplois

Stabilisation des prix

Réalisation de l'équilibre extérieur (réduction du déficit de la balance commerciale)

Taux directeur

Taux de réescompte

D'où

Une amélioration du pouvoir d'achat

Un protectionnisme excessif qui a favorisé la prolifération des industries locales dites de substitution à l'importation.

Taux du marché monétaire

D'où

Des reformes monétaires engagées a partir de 1987,

L'abandon progressif du taux de réescompte,

La renonciation à la fixation directe des niveaux de taux d'intérêt.

Caractérisation de la politique monétaire

Laxiste

Taux d'intérêts standardisés et relativement bas

Plus de responsabilités aux banques dans la collecte de liquidité ainsi que dans l'octroi des crédits

Réaction des banques

Neutre

Baisse de leurs engagements

Déploiement sur les activités à risque minimal

Cas significatifs

Industries manufacturières qui ont absorbé presque la moitié des crédits bancaires : 42.1%

Tourisme et promotion immobilière qui ont absorbé 52.8%du total des crédits bancaires.

Devant cette libéralisation des marchés commerciaux, le système bancaire tunisien s'est trouvé dans l'obligation de remettre en cause ses mécanismes de fonctionnement et son organisation pour relever ces nouveaux défis, s'adapter à son nouvel environnement et s'assurer ainsi une totale satisfaction des crédits et la prospérité de l'économie. Notons également et surtout, que cette phase coïncide avec celle de la re dynamisation de toute la filière financière à travers le marché boursier qui laisse entrevoir pour les actionnaires des banques tunisiennes en particulier, une plus grande consistance de leurs rémunérations annuelles.

2. Réglementation de la profession bancaire71(*)

L'exercice de la profession bancaire est soumis à l'agrément du Ministère des Finances .Les demandes d'agrément sont adressées à la Banque Centrale de Tunisie qui procède à leur instruction .l'agrément est accordé compte tenu du programme d'activité de la banque projetée, des moyens techniques et financiers à mettre en oeuvre, de la qualité des apporteurs de capitaux ,de la compétence et de l'honorabilité de ses dirigeants ainsi que de son aptitude à réaliser ses objectifs de développement dans des conditions comptables avec le bon fonctionnement du système bancaire et l'impératif d'assurer la sécurité des dépôts

L'ouverture et la fermeture des bureaux de représentation requièrent l'autorisation conjointe du Ministère des Finances et de la Banque Centrale de Tunisie.

L'agrément de ces deux autorités est également requis dans les cas suivants :

.fusion de banques,

.réduction du capital social d'une banque,

.acquisition d'une part du capital d'une banque susceptible d'entraîner le contrôle de celle-ci,

.tout acte dont peut résulter la cession d'une part importante de l'actif d'une banque susceptible d'entraîner un changement dans sa structure financière ou dans l'orientation de son activité.

La banque Centrale de Tunisie édite des règles de gestion comptable et les normes prudentielles applicables aux banques et aux établissements financiers .Ces normes concernent :

.L'usage des fonds propres,

.Les ratios entre les fonds propres et les engagements,

.Les ratios entre les fonds propres et les concours accordés à chaque débiteur,

.Les ratios de liquidités,

.Les risques en général.

Ratio entre les fonds propres et les engagements de la banque

Ratio de couverture des risques (ratio de solvabilité)

Fonds propres nets/total des actifs pondérés en fonction des risques encourus > ou = 8% (*)72(*)

Ratios entre les fonds propres et les concours à chaque débiteur

Ratio de concentration des risques : Risques encourus sur un même bénéficiaire/fonds propres nets< ou = 25%

Ratio de division des risques : Total des risques encourus sur les bénéficiaires dont les risques pour chacun d'entre eux sont supérieurs ou égaux à 5% des Fonds Propres nets (FPN) < ou = 10 fois les FPN

Limite des concours accordés aux actionnaires, dirigeants et administrateurs < ou = 3 fois les FPN

i-Surveillance bancaire

La loi n° 94-25 du 7 février 1994 a confié à la Banque Centrale de Tunisie le pouvoir de contrôler les banques et les établissements financiers .Elle la dote, à cet effet, des instruments de surveillance suivants :

· Droit d'être informée

Les banques sont tenues de fournir à la Banque Centrale de Tunisie tous documents, renseignements, éclaircissements et justifications nécessaires à l'examen de leurs situations et permettant de s'assurer qu'elles font une application correcte de la réglementation édictée en matière de contrôle des changes et de contrôles des banques et du crédits.

Les commissaires aux comptes des banques sont tenus de remettre à la Banque Centrale de Tunisie, dans les six mois suivant la clôture de chaque exercice, un rapport destiné à l'assemblée générale et aux organes qu`ils contrôlent.

Ils sont également tenus de signaler immédiatement à la Banque Centrale de Tunisie tout fait de nature à mettre en péril les intérêts de la banque ou des déposants.

· Contrôle sur pièces

Il est exercé sur la base des documents comptables et financiers et des données statistiques communiquées périodiquement par les banques.

· Contrôle sur place

Il est effectué par des missions d'inspection globale inscrites dans le cadre d'un programme annuel établi par la Banque Centrale de Tunisie .Il constitue un moyen de vérification de l'exactitude des informations transmises et d'appréciation de l'organisation et du fonctionnement interne de la banque.

L'objectif de ces missions est de faire un diagnostic financier et organisationnel de la banque ou de l'établissement inspecté, afin de prévenir les différents risques inhérents à son activité.

En plus de ces vérifications périodiques, le contrôle sur place peut revêtir la forme d'une mission d'inspection ponctuelle, ayant l'aspect d'une enquête de courte durée et portant sur des opérations particulières.

ii- Mesures préventives et répressives

La surveillance peut déboucher sur des mesures à caractère préventif ou répressif.

· Mesures préventives

Pouvoir d'injonction à l'égard des banques à l'effet notamment :

. D'augmenter le capital,

. D'interdire toute distribution de dividendes,

. De constituer des provisions.

Lorsque la situation d'une banque le justifie, la Banque Centrale peut également désigner un administrateur provisoire auquel sont transférés les pouvoirs nécessaires à la direction de la banque et qui peut en déclarer la cessation des paiements.

Pouvoir d'intervention :

Lorsque la situation d'une banque le justifie, le gouverneur peut faire appel aux actionnaires pour soutenir leur banque et recourir, le cas échéant, à la solidarité en organisant le concours de l'ensemble des banques pour assister l'établissement bancaire en difficulté, protéger les intérêts des déposants et préserver le renom de place.

· Mesures répressives

La Banque Centrale de Tunisie dispose d'un pouvoir disciplinaire qu'elle partage avec la Commission bancaire, à l'effet de sanctionner les manquements commis par les banques et leurs dirigeants à la législation bancaire. Ces sanctions sont de différentes catégories :

Avertissement,

Blâme,

Amende pouvant atteindre cinq fois le montant de l'infraction

Suspension de tout concours de la Banque Centrale de Tunisie,

Mise en garde adressée aux dirigeants d'une banque qui ont manqué aux règles de bonne conduite de la profession.

La Banque Centrale de Tunisie peut, en outre, prononcer contre tout commissaire aux comptes qui manque aux obligations mises à sa charge par la loi bancaire, une interdiction d'exercer ses fonctions auprès des banques, à titre provisoire ou à titre définitif.

D'autres sanctions peuvent être prononcées sur l'initiative du Gouverneur de la Banque Centrale, par une instance collégiale de nature juridictionnelle appelée "Commission bancaire", présidée par un magistrat et qui comprend les représentants de la Banque Centrale, du Ministère des Finances et de l'Association Professionnelle des Banques de Tunisie .ces sanctions sont les suivantes :

Interdiction d'effectuer certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de l'activité,

Retrait de la qualité d'intermédiaire agrée,

Retrait de l'agrément.

Cette Commission, dont les décisions sont susceptibles de recours devant le Tribunal Administratif, peut également prononcer contre les dirigeants des banques coupables d'infractions à la législation et à la réglementation bancaires, les sanctions suivantes :

Suspension temporaire de toute fonction avec ou sans nomination d'administrateur provisoire,

Amande pouvant atteindre cinq fois le montant de l'infraction.

B- Présentation de l'échantillon

L'échantillon est formé des trois banques qui représentent 30% du nombre des banques cotées sur la place de Tunis au 31 décembre 2002. Ces banques sont :

· La Banque de Tunisie (BT)

Elle a été admise en bourse le 27 septembre 1990, avec 1 000 000 actions. Son introduction s'est faite suivant la procédure ordinaire, le 03 octobre de la même année à un cours de 35 000 dinars tunisiens. Son transfert sur le NSC (équivalent du premier marché tunisien) s'est fait le 31 janvier 1997, à un cours de 73 100 dinars tunisiens. Le premier cours de négociation était de 72 000 dinars tunisiens, le 03 février 1997. La participation étrangère y est relativement importante, soit 24.65% au 31 décembre 2002.

· La Banque Internationale Arabe de Tunisie (BIAT)

Elle a été introduite en bourse suivant la procédure ordinaire en septembre 1990 à un cours de 19 000. Son transfert sur le NSC s'est opéré le 06 juin 1996 à un cours de 58 020. Le premier cours de négociation était de 33 000.La participation étrangère y est relativement importante, soit 24.51% au 31 décembre 2002.

· La Banque de Tunisie et des Emirats d'Investissement (BTEI)

Elle a été introduite en bourse par offre publique de vente (OPV) portant sur 900 000 action à dividendes prioritaires (ADP), du 09 août au 18 août 1995, le prix est de 20 dinars par ADP ; le taux de rémunération est de 9% par an. Son transfert sur le NSC est intervenu le 25 octobre 1996 à un cours de 27 780. Le premier cours de négociation est 2 032 dinars tunisiens le 04 novembre 1996. La participation étrangère y est très faible, soit 1.35% au 31 décembre 2002.

Section II : Méthodologie de recherche

La démarche adoptée dans le cadre de cette étude est une démarche rétrospective : elle consiste à supposer que si un analyste ait été capable de prévoir exactement, dès la fin 98, les données comptables telles qu'elles figurent dans les états financiers publiés sur la période étudiée, à quelles valorisation aurait-il abouti par l'application du FCF ?

Il faut noter que la méthode FCF, en tant que système de mesure interne avant tout de la création de valeur, nécessite des données précises qu'il n'est pas toujours possible d'obtenir à partir des états financiers communiqués au public. C'est la raison pour laquelle on ne peut pas prétendre que les résultats obtenus ci-dessous soient les résultats exacts, mais il s'agit seulement d'approximations.

Parmi les approximations, il faut mentionner par exemple celle des capitaux investis. En effet, comme cela déjà été mentionné, en matière bancaire il faut distinguer les capitaux "historiques" et le "capital économique". Seul ce dernier devant être pris en compte pour le calcul du coût du capital. Cependant, pour un membre externe d'une banque, il est strictement impossible de connaître le montant de ce capital économique investi.

A- Explication des hypothèses

Pour les besoins de la présente étude, le montant des capitaux "historiques" est égal au montant du capital économique (hypothèse 1).

Mais une telle approximation ne semble pas a priori altérer significativement la réalité des résultats dans la mesure où les banques étudiées n'ont procédé ni à des augmentations ni à des diminutions de capital, laissant supposer que les fonds propres initiaux dont elles disposaient sont utilisés en totalité.

La création de valeur est positivement corrélée avec le résultat (hypothèse 2). En effet, l'efficience opérationnelle d'une institution bancaire comme de toute entreprise se mesure avant tout par la rentabilité de l'actif économique. C'est donc de manière primordiale sur cette base que le marché bâti ses anticipations, ensuite seulement viennent tout un ensemble de facteurs, les uns liés à l'environnement, les autres plus ou moins spéculatifs. Nous allons tester cette hypothèse à travers : le taux du résultat d'intermédiation par rapport au produit net bancaire (R1) et le taux des gains nets par rapport au produit net bancaire (R2).

La performance des valeurs bancaires tunisiennes est inférieure aux standards internationaux (hypothèse 3). Pour mesurer la disparité de cette performance, nous allons utiliser le ratio suivant : MBR = Capitalisation boursière/Valeur nette comptable (R3)

La maîtrise difficile des charges générales d'exploitation est une menace pour la rentabilité des banques tunisiennes (hypothèse 4). Pour tester cette hypothèse, nous allons utiliser le ratio suivant : R4 = Frais généraux/PNB.

B- Comparaison entre les résultats théoriques obtenus par le FCF et la capitalisation boursière historique des banques

Il est bien évident qu'une banque cotée qui créé de la valeur va logiquement voir sa capitalisation boursière augmenter grâce à l'augmentation du cours de bourse des actions qui la représente. Donc, bien entendu, à partir de la méthode FCF, il sera possible d'établir un lien entre la création de valeur économique d'une banque et sa capitalisation boursière.

Il convient donc d'établir le lien théorique qui existe entre le FCF et la valeur de marché d'une banque, afin de pouvoir confronter ces résultats théoriques avec les résultats historiques entre 1998 et 2002.

1. Liens théoriques entre le FCF et la valeur de marché d'une banque : la Shareholder Value

La SV, qui pourrait se traduire par création de valeur de marché pour l'actionnaire, permet d'établir le lien direct entre les montants de FCF et la capitalisation boursière de toute entreprise.

La SV mesure la différence absolue qui existe entre la valeur de marché d'une entreprise, c'est-à-dire sa capitalisation boursière, et le capital qui lui a été apporté ou confié par ses actionnaires pour une période donnée.

A la différence d'un ratio, la SV est une mesure cumulative des performances boursières d'une entreprise. Ainsi entendu, la SV est donc définie par la formule suivante

SV = valeur de marché - capital apporté par les actionnaires (1)

Mais la SV peut également être établie à partir des montants de FCF. Les prévisions de FCF sont actualisées, et vont être comptabilisées pour déterminer la valeur de marché que l'entreprise a créée ou détruite avec le capital employé. La SV pourra donc être également déterminée de la manière suivante :

SV = valeur actuelle de la somme des FCF futures (2)

En effet, le FCF est l'essence qui fait tourner la SV. Le FCF est la mesure interne qui a comme conséquence externe la création ou destruction de valeur de marché d'une entreprise.

Les FCF prévisionnelles seront actualisées au coût du capital, qui est, pour le cas particulier des banques, le coût des fonds propres.

On peut donc représenter la SV comme dans le schéma suivant :

 
 

Share

Holder

Value

 

FCF1/(1 + c) + FCF2/(1 + c)2 +

 
 
 
 
 

Market

Value

 

Valeur nette

Comptable

 
 

Maintenant que les rapports entre le FCF et la SV sont établis, il convient de confronter les résultats théoriques avec les données historiques pour les trois banques étudiées.

2. Comparaisons entre résultats théoriques et données historiques sur la période 1998 - 2002

A partir des formules (1) et (2) définissant le FCF, on obtient :

Valeur actuelle de la sommes des FCF futures = valeur de marché - capital apporté par les actionnaires

Donc

Valeur de marché = capital apporté par les actionnaires + valeur actuelle de la somme des FCF futures. (3)

Il est dès lors possible à partir de la formule (3) de déterminer une valeur de marché théorique des banques.

C'est sur cette formule que reposera toute la base de la présente étude. Ainsi, l'on va mesurer les écarts entre la capitalisation théorique telle qu'elle résulte de l'application de la méthode FCF et la valeur réelle de marché des différentes banques étudiées.

CHAPITRE IV : PRESENTATION DES RESULTATS

Le FCF, en tant que méthode de mesure transitoire de création de valeur (ou destruction de valeur), peut, comme cela a été déjà dit, être utilisée également comme méthode d'évaluation de création actionnariale de valeur. L'objet de ce chapitre est donc d'apprécier la fiabilité de cette méthode en tant que mode d'évaluation de création actionnariale de valeur pour les banques tunisiennes en adoptant une démarche rétrospective.

Cette démarche rétrospective consiste à comparer les données boursières réelles relatives aux banques tunisiennes et les résultats théoriques trouvés sur la période s'étendant de 1998 à 2002. Le choix de cette période peut être motivée par deux raisons essentielles :

- tout d'abord, 1998 est la date de l'uniformisation du format des renseignements financiers des sociétés cotées sur la place de Tunis ;

- ensuite, bien qu'un petit peu trop restreint, une période de cinq exercices permet de tirer les premiers enseignements de l'évolution "normale" des données boursières en faisant abstraction des éléments exogènes à la pure situation économique d'une banque. En effet, des rumeurs de lancement d'une OPA, ou le lancement effectif d'une OPA viennent perturber l'évolution "normale" des cours boursiers,

Cependant, cette étude comporte certaines limites, en raison de la singularité de la place boursière, du nombre restreint de banques étudiées, de la durée de la période considérée (10 ans aurait été préférable), et faute de moyens suffisants quant aux informations disponibles. Mais, elle devrait pouvoir donner un aperçu de l'évolution des grandes banques tunisiennes en matière de création économique et actionnariale de valeur et pourquoi pas constituer un spécimen qui préfigurera le comportement des banques camerounaises en l'espèce, en supposant qu'elles seront cotées à la Douala Stock Exchange73(*) .

Pour pouvoir établir le rapport entre la création économique et la création actionnariale de valeur, il est nécessaire d'exposer le lien théorique qui existe entre la méthode FCF et la capitalisation boursière des banques et de comparer ces résultats théoriques obtenus avec les résultats historiques relatifs à la vie boursière des différentes banques entre 1998 et 2002 (Section 1). Une fois ces valeurs confrontées, il faudra tenter d'expliquer les différences (si différences il y a) entre les résultats théoriques et les données historiques et essayer de dégager les grandes tendances de l'évolution du système bancaire tunisien en matière de création de valeur (Section 2).

Section I : Capitalisation théorique versus capitalisation historique des banques tunisiennes
A- Analyse comparative des données théoriques et des données réelles

Il est donc possible d'établir le tableau suivant pour confronter les données théoriques et les données réelles (exemple du BTEI, pour les autres banques étudiées cf. annexes 3) :

Avec :

K : capital apporté

V.m.th. valeur de marché théorique

V.m : valeur de marché réelle

L'erreur mesure la différence relative entre la capitalisation théorique par rapport à la capitalisation réelle

BTEI (en MD)

exercice

(n)

K (1)

FCF (2)

SV (3)

(3)(n) = (2)(n) + (3)(n-1)

v.m.th (4)

(4) = (1) + (3)

v.m. (5)

erreur %(6)

(6) = ((4) - (5)) / (5))*100

1998

1999

2000

2001

2002

110 683

119 928

125 792

125 807

125 354

9 185

128 94

13 380

8 080

20 541

7 986

9 750

8 798

4 620

10 213

118 669

129 678

134 590

130 427

135 567

95 265

95 220

91 710

89 550

84 510

24.5

36.18

46.75

45.64

60.41

BIAT (en MD)

exercice

(n)

K (1)

FCF (2)

SV (3)

(3)(n) = (2)(n) + (3)(n-1)

v.m.th (4)

(4) = (1) + (3)

v.m. (5)

erreur %(6)

(6) = ((4) - (5)) / (5))*100

1998

1999

2000

2001

2002

157 047

211 015

228 731

229 362

237 157

408 661

29 585

-18 736

95 322

5 401

355 357

22 371

-12 319

54 500

2 685

512 404

233 386

216 412

283 862

239 842

216 800

263 500

239 400

221 500

263 000

136.35

-11.42

-9.6

28.15

-8.8

BT ( en MD )

exercice

(n)

K (1)

FCF(2)

SV (3)

(3)(n) = (2)(n) + (3)(n-1)

v.m.th (4)

(4) = (1) + (3)

v.m. (5)

erreur %(6)

(6) = ((4) - (5)) / (5))*100

1998

1999

2000

2001

2002

112 893

135 756

159 520

179 698

230 431

30 234

37 247

37 915

67 014

52 983

26 290

28 164

24 930

38 315

26 343

139 183

163 920

184 450

218 013

256 774

187 125

267 890

226 485

271 720

271 150

-25.6

-38.81

-18.56

-19.76

-5.30

A partir des résultats obtenus, plusieurs constats immédiats communs aux différentes banques étudiées s'imposent :

- en l'espace d'un seul exercice, il est rare que la méthode FCF permette de déterminer un cours de bourse avec une marge d'erreur acceptable (- de 5%);

- au regard du résultat final de 2002, la méthode FCF semble montrer ses limites en tant qu'instrument de prédiction de mesure de création actionnariale de valeur même sur une période de temps relativement longue (5 exercices), donc significative en principe, puisque son application aboutit à une sous-évaluation conséquente des valeurs bancaires (entre - 5.3 et - 8.8 %) exceptée la valeur BTEI;

Mais avant de tirer des conclusions hâtives sur la qualité de cette méthode en tant que méthode d'évaluation boursière, il convient d'examiner plus en profondeur les raisons qui expliquent une telle différence entre ces résultats théoriques et ces données historiques et de tenter de dégager les enseignements qui peuvent être tirés de ce système de mesure.

B-  L'évolution du système bancaire tunisien en matière de création de valeur

Au regard des résultats obtenus en annexe 4, on peut se demander si la méthode FCF, en tant que système d'évaluation boursière des banques tunisiennes peut trouver une certaine légitimité. A contrario, le bien-fondé économique de la régression des cours boursiers peut également être mis en doute sur les deux derniers exercices étudiés, où les trois valeurs BTEI, BIAT et BT ont affiché une baisse entre le 31 décembre 2001 et le 31 décembre 2002, respectivement de -8.26%, de -10.71% et de -12.06%.

Il convient dès lors d'essayer d'expliquer les limites de la validité économique tant de la méthode FCF que de l'évolution des cours eux même (1). Enfin, la création de valeur étant étroitement corrélée avec l'amélioration de la rentabilité, il serait intéressant de faire un bilan sur l'évolution du ratio Nopat/ Capitaux Investis des banques étudiées entre 1998 et 2002 et de tenter de déterminer les causes de cette évolution défavorable (2), et enfin, dans le cadre d'une analyse interne, d'identifier les déterminants de la création de la valeur (3).

1. Sous-évaluation boursière des valeurs bancaires ou remise en cause de la méthode FCF ?

Après avoir exposé les raisons qui expliquent les faiblesses de la méthode FCF en tant que mode d'évaluation, il conviendra de s'interroger également sur le bien-fondé économique de l'évolution des cours de bourse sur les cinq (05) exercices considérés.

i- Les faiblesses du FCF en tant qu'instrument d'analyse boursière.

Le résultat économique, comme le résultat comptable d'ailleurs, ne fait que retracer les performances économiques d'une entreprise sur une période donnée, indépendamment du contexte dans lequel cette entreprise évolue. L'établissement du résultat économique relève donc d'une approche rétrospective.

Le marché boursier, lui, tient compte à la fois :

- des performances économiques aussi bien sur la période considérée mais également et surtout sur les périodes à venir ;

- de la conjoncture dans laquelle se situe l'entreprise. Cela est particulièrement vérifiable dans le secteur bancaire tunisien, où entre 2001 et 2002 le rendement global moyen74(*)des banques étudiées a connu un recul de -6.74%.

Malgré ces faiblesses réelles et tout à fait significatives dans une optique boursière, on peut cependant remettre en cause le bien-fondé économique de l'évolution baissière des cours des valeurs bancaires dans la mesure où des considérations spéculatives ont pu influencer les cours.

ii- Sous-évaluation boursière des valeurs bancaire ?

Comme cela a été mentionné dans la section précédente, l'année 2001 apparaît être l'année charnière concernant la dépréciation des valeurs bancaires. Cela peut s'expliquer pour deux grandes raisons :

- une raison purement économique avec un effritement constant de la rentabilité des banques sur la période, excepté la BTEI qui présente une situation relativement contrastée (cf. annexe 4) ;

- une raison conjoncturelle, car les valeurs étudiées l'ont été dans un contexte où pratiquement toutes les places boursières internationales était en net recul suite à la crise philippine de 1998 qui a « embrasé » tout le sud-est asiatique, et par effet de contagion les autres places internationales y compris Tunis, même si le phénomène ne fut pas de même amplitude. Le recul du rendement global moyen ci-dessus évoqué est du reste conforme à celui de l'indice BVMT qui est de -21.4% sur la même période. Il s'explique principalement par la mauvaise tenue des droits d'attribution et de souscription, puisque les banques étudiées ont, néanmoins servi des dividendes75(*) à leurs actionnaires à un pay-out ratio76(*) relativement constant sur la période, comme le montre le tableau ci-dessous :

Tableau 3 : Politique de distribution de dividendes de l'échantillon

En MD

 

1998

1998

2000

2001

2002

BTEI

1.800

1.800

1.800

 

2.500

Date de distribution

15/09/99

23/08/00

28/09/01

 

15/05/03

En MD

 

1998

1998

2000

2001

2002

BIAT

1.200

1.200

1.500

1.500

1.400

Date de distribution

20/04/99

02/05/00

07/05/01

13/05/02

12/05/03

En MD

 

1998

1998

2000

2001

2002

BT

1.800

2.000

2.400

2.400

2.400

Date de distribution

29/04/99

10/04/00

06/04/01

10/04/02

10/04/03

Les chiffres clés de l'année 2002 publiés par la bourse de Tunis sont au demeurant assez éloquents. De fait, le nombre de titres traités a reculé de -19% de même qu'évidemment l'encours des capitaux traités qui, lui, a connu une baisse de -31%. Cela dénote assurément de l'étroitesse du marché qui ne semble pas encore à même d'apporter la plus-value escomptée par les établissements bancaires en vue de soutenir leur efficience opérationnelle. C'est donc compte tenu de ce qui précède qu'on peut comprendre pourquoi les valeurs bancaires « sous performent ».

En outre, l'évolution défavorable des cours de bourse des valeurs bancaires semble contradictoire, en regard des exigences des actionnaires, diminuant par la même les valeurs du FCF. En effet, les actionnaires avaient fixé (arbitrairement) un taux de rentabilité de l'ordre de 15%. Il est même possible que ce niveau soit encore plus fort au regard des objectifs de rentabilité avenirs annoncés par les grandes banques tunisiennes. Mais cette espérance de rendement de 15% est maintenant dans bien des cas dépassée, et il est donc plausible de penser que les banques tunisiennes rejoignent leurs maîtresses européennes en matière de performance économique et ont, de ce fait, un retard à rattraper sur leurs valorisations boursières respectives par rapport aux « standards » boursiers européens pour les valeurs bancaires. En effet, alors que la valorisation boursière moyenne des banque tunisiennes est de 1.46 fois sa valeur nette comptable (MBR77(*)), la moyenne est de 2.7 fois pour les banques de la zone Euro.

Tableau 4 : La performance boursière

 

Capitalisation boursière (MD) en 2002

valeur nette comptable (MD) en 2002

MBR=R3

BTEI

84 510

121160

0.4

BIAT

263 000

131 072

2

BT

271 150

159 337

1.7

Au regard de ces constats boursiers, il est donc difficile de soutenir que les banques tunisiennes soient sous-évaluées, surtout compte tenu de la dépréciation de leurs performances en matière de rentabilité.

Il convient donc d'analyser les facteurs déterminants de l'amélioration de la rentabilité des banques tunisiennes.

2. Les facteurs déterminants de la dépréciation de la rentabilité des banques tunisiennes

Même si la méthode FCF peut apparaître douteuse comme mode d'évaluation boursière, elle traduit néanmoins une dépréciation significative de la rentabilité des banques tunisiennes entre 1998 et 2000, mis à part le cas de la BTEI qui sur le dernier exercice améliore sa rentabilité économique suite à une dotation conséquente aux « provisions et résultat de corrections de valeurs sur créances hors bilan et passif » (la rentabilité étant mesurée par le ratio Nopat / Capital apporté).

Cette dépréciation de la rentabilité semble d'une part due à la rigueur de l'environnement économique dont les banques ont souffert, d'autre part à l'augmentation des charges d'exploitation.

i- Un environnement économique difficile

Le résultat économique d'une banque se fonde avant tout sur son résultat net comptable, sur lequel sont opérés ensuite des retraitements. Il convient donc de séparer le résultat net des retraitements, et plus particulièrement les dotations aux amortissements et provisions pour tenter d'expliquer la dépréciation du résultat économique et donc la rentabilité des banques.

· Les facteurs ayant contribué à la détérioration du résultat net comptable :

Le résultat net comptable dépend en grande partie du PNB réalisé par la banque, qui représente en quelque sorte le "chiffre d'affaires" bancaire.

Or, malgré la progression constante du PNB des trois banques étudiées, qui selon le cas peut s'expliquer, en partie par la croissance des opérations génératrices de commissions (cas BIAT) et ou par un bon comportement de la marge globale d'intermédiation (cas BT), le taux de rentabilité financière se dégrade et pour cause, les capitaux propres (dénominateur) progressent à un rythme supérieur à celui du résultat net comptable (numérateur). C'est dire, si l'effort additionnel déployé par les actionnaires sur la période étudiée, n'est pas tout simplement insuffisamment récompensé par les résultats, compte tenu de leurs anticipations.

Tableau 5 : la part du résultat d'intermédiation (résultat intérêts et produits assimilés (intermédiation) dans la formation du PNB (en %) : R1

 

2002

2000

2000

BTEI

98.43

97.20

98.23

BIAT

75.6

77.82

79.28

BT

83.86

86.13

83.21

Tableau 6 : la part des gains nets sur opérations financières dans la formation du PNB (en %) : R2

 

2002

2000

2000

BTEI

74.45

63.85

65.28

BIAT

25.34

34.35

38.5

BT

36.4

35.87

40.9

Les fruits de la bonne tenue des activités d'intermédiation ont particulièrement profité à la BTEI.

En effet, cela peut s'expliquer par le fait que cette institution dont l'objet social est précisément l'investissement (le crédit, la prise de participation et les opérations de bourse) a davantage mis l'accent sur ce segment où, au demeurant elle possède un avantage comparatif, car tout à l'opposé des autres banques, ses gains nets ont augmenté de 10 points de base environ entre 2000 et 2002.

Quant à la BIAT et à la BT (toutes les deux des banques de dépôts), les gains nets sur opérations financières ont connu un recul entre 2000 et 2002, respectivement de 13 points de base et de 5 points de base. Cet effritement de la marge nette bancaire traduit à l'évidence le caractère vivace de la concurrence sur cette frange de marché. En effet, le segment banque de dépôt auquel appartient ces dernières est relativement homogène en termes de conditions applicables à la clientèle, si bien qu'il serait malaisé d'espérer « jouer » sur un différentiel de taux meilleur que celui de son concurrent direct ou pas.

· La contribution des dotations aux amortissements et provisions 

Les dotations aux provisions et amortissements d'exploitations ont contribuées d'une manière générale à renforcer la formation des résultats économiques des différentes banques, surtout des banques dépôts. En effet, celles-ci semblent avoir joué sur ce levier pour accroître le niveau de leurs résultats. Mais, comme nous pouvons le constater, cela ne traduit aucunement le dynamisme de leur efficience réelle.

S'il semble concevable que l'environnement financier particulièrement frileux sur les places africaines a joué un rôle non négligeable dans la détérioration de la rentabilité des banques tunisiennes, les frais généraux, quant à eux, ne sont pas en reste.

ii -Des frais généraux à un niveau élevé 

Le ratio d'exploitation78(*) donne une bonne idée de la rigueur de la gestion puisqu'il indique la part du PNB absorbé par les frais généraux.

Or sur les cinq exercices étudiés, on ne constate pas de diminution significative des frais généraux, mais au contraire une stagnation des frais généraux :

Tableau 7 : l'évolution du coefficient d'exploitation79(*)des banques (en %) : R4

 

2002

2001

2000

1999

1998

BEIT

14.65

30.2

30.67

19.41

28.66

BIAT

53.9

49.96

49.52

50.34

54.41

BT

56.29

49.54

56.79

63.58

51.64

Ces résultats sont à comparer avec ceux des banques anglo-saxonnes qui ont des ratios bien moins élevés même pour les banques d'investissement.

Même si on assiste depuis trois ans à une amélioration significative et récurrente de la marge bancaire, élément capital s'il en est, de la rentabilité des banques tunisiennes, la pérennité de cette amélioration peut être remise en cause par la difficulté des banques tunisiennes à maîtriser leurs charges générales d'exploitation. En effet, si l'environnement économique venait à connaître une embellie, il est peu probable qu'elles cherchent à réduire leurs charges générales d'exploitation et, de là à prédire qu'elles maintiendraient le même niveau, nous n'en sommes pas loin...

Cependant, si les opérations de concentration du secteur bancaire80(*)déjà entamées partout ailleurs en Europe occidentale et Outre-atlantique venaient à gagner le paysage financier tunisien, il sera alors possible d'envisager une meilleure maîtrise de la progression de ces charges grâce à des économies d'échelle.

Il apparaît que le FCF fournit des indications intéressantes à l'analyste quant à l'évolution de la rentabilité des banques, et traduit l'attraction croissante du marché pour les valeurs bancaires depuis 2001 au vu du nombre moyen de titres traités, et ce, en regard des autres secteurs de l'économie tunisienne (cf. annexe 4).

Section II : La traduction de la méthode FCF dans la Gestion interne des banques

Le FCF est à une technique d'analyse de performance externe mais, davantage, une technique d'analyse interne des performances. Il s'agit avant tout d'une technique d'assistance destinée aux managers pour sélectionner les projets les plus créateurs de valeur, et qui mécaniquement, à condition que la méthode soit correctement utilisée sera profitable aux actionnaires. Pour qu'il y ait création de valeur, il faut maximiser le résultat économique (A), diminuer le coût du capital (B).

A- Comment augmenter le résultat économique d'une banque ?

Le résultat économique d'une banque est déterminé à partir du résultat net comptable, sur lequel sont effectués plusieurs retraitements. Or, le résultat net comptable est lui même déterminé en grande partie par le produit net bancaire (PNB). Ainsi l'amélioration du résultat économique d'une banque passera par un accroissement du produit net bancaire (PNB) et une diminution des charges d'exploitation faisant l'objet de développements ultérieurs81(*), cette sous-section sera consacrée uniquement à la majoration du PNB.

Cette hausse du PNB se fera par une amélioration du taux de la valeur ajoutée par rapport aux fonds propres consommés, ce qui se traduira , notamment par une part croissante des commissions dans le PNB.

1. La nécessité d'améliorer le taux de valeur ajoutée.

La notion de valeur ajoutée n'est pas ici à comprendre comme un solde intermédiaire de gestion.

En effet, le taux de valeur ajoutée par rapport aux fonds propres consommés peut se calculer de différentes manières :

- Soit par le ratio PNB/Engagements pondérés. Une telle approche prudentielle, malgré sa qualification, semble pour l'heure insuffisante pour assurer une couverture satisfaisante des risques, en particulier parce que les ratios réglementaires ne couvrent guère tous les risques ;

- Soit par un ratio économique type RAROC (Risk Ajusted Return on Capital82(*)) qui pallie les insuffisances de la méthode prudentielle (non prise en compte des corrélations, analyse économique et non juridique du risque) et à tenir compte des spécificités de l'établissement (nature des risques, niveau d'aversion au risque...).

C'est la raison pour laquelle le ratio économique apparaît préférable pour déterminer le taux de valeur ajoutée par rapport au fonds propres consommés, dans la mesure où les fonds propres consommés seront ici des fonds propres économiques, eux même calculés d'après une valeur en risque. Les fonds propres économiques seront donc les fonds propres que la banque doit réellement mobiliser pour être capable de couvrir des pertes exceptionnelles, en s'appuyant sur des données statistiques. Il sera souhaitable de provisionner ce risque statistique par prélèvement (et donc une correction) de la marge brute. Ainsi, l'approche RAROC permet de définir un taux de rentabilité par opération :

(Marge brute- prime de risque moyen)

RAROC =

Fonds propres économiques

Le taux de valeur ajoutée par rapport aux fonds propres consommés (dans le cas de l'application du RAROC, les fonds propres économiques) augmentera de manière plus substantielle que le surcroît de fonds propres consommés.

Concrètement, un des moyens de bonifier ce taux est le recours des banques aux activités génératrices de commissions.

2. L'augmentation de la part des commissions dans l'augmentation du résultat économique.

Parmi les opérations contribuant à la formation du PNB, il est possible d'isoler deux grands types :

-Les opérations d'intermédiation ;

-Les opérations génératrices de commissions.

En analysant ces deux catégories d'opérations, il sera possible de savoir sur quelle(s) type(s) d'opérations les banques doivent porter leurs efforts.

Concernant les opérations d'intermédiation, leur résultat et leur contribution à la création de valeur sera fonction de la marge entre les produits et charges d'intérêts. Or le banquier ne semble pas pouvoir maîtriser cette marge en raison de la vive concurrence.

Il est possible de déterminer un taux minimum pour lequel il y aura création de valeur. En effet, pour qu'une opération d'intermédiation soit rentable, il est nécessaire que le rendement, net d'impôts, des actifs à risque excède le coût des ressources empruntées au taux du marché interbancaire et des ressources propres pour lesquelles les actionnaires attendent une rémunération suffisante. La marge rendement des actifs - rendement des ressources empruntées doit assurer, aux conditions attendues par les actionnaires, la rentabilité des fonds propres imposée par l'inégalité suivante :

r (1 - k) rf + kpf

Ce qui donne après impôt :

[r - (1 - k)rf] (1 - t) kpf

(r - rf) k. [(pf / (1 - t)) - rf]

Avec : r : rendement des actifs à risques

rf : taux du marché interbancaire

k : ratio de solvabilité soit 5%

pf : rendement des fonds propres attendu par les actionnaires (le coût des fonds propres)

t : taux de l'impôt sur les sociétés

Or, si pf = 15%, t = 33% et rf = 3% (qui correspond à peu près à l'Euribor 3 mois), on doit avoir une marge d'intermédiation (r - rf) minimum, pour une opération de crédit pondérée à 100% selon les règles prudentielles, de :

r - rf = 5%*1*[(15% / 66,67 %) - 3%] = 0,97 %

Cet exemple montre que l'application d'une telle marge à une grande banque ne sera pas praticable pour une opération de crédit. Et encore, il n'a pas été pris en compte la rémunération du risque et le coût de gestion.

C'est la raison pour laquelle, les banques ont tendance à privilégier la seconde composante du produit net bancaire qui est les commissions. Le recours aux commissions présente en outre l'avantage d'être moins sensibles aux variations de taux.

Il conviendra donc de développer les services tels que le conseil ou l'ingénierie financière.

La création de valeur passe également par la diminution du coût du capital investi.

B- La diminution du coût du capital investi 

Il a été dit qu'en matière bancaire, le coût du capital investi est celui des fonds propres. Or, ce coût des fonds propres est élevé. Il serait donc tentant pour les banques d'avoir un niveau minimum de fonds propres en satisfaisant les minima prudentiels.

Cependant, en pratique, une telle démarche serait pénalisante pour une banque car bien que la norme réglementaire pour le ratio Tier 1 soit de 5%, les agences de notation portent cette exigence à un niveau minimum de 6%, voire 8%. Ce ratio est d'ailleurs devenu la norme internationale pour accéder au marché financier à un coût acceptable.

Les banques se trouvent donc face à deux exigences contradictoires pour évaluer le niveau des fonds propres optimum :

- d'une part, elles doivent faire preuve de solidité financière en ayant un niveau de fonds propres élevé et allant bien au-delà de la contrainte prudentielle, afin que la notation soit suffisamment bonne pour favoriser un accès au marché financier dans les meilleures conditions, et de pouvoir améliorer ainsi leurs marges d'intermédiation ou d'avoir des tarifs plus compétitifs par rapport à leurs concurrents ;

- d'autre part, l'objectif de rentabilité des fonds propres investis conduit, à contrario à ce que les banques aient un niveau minimal de fonds propres pour augmenter la rentabilité de leurs activités en diminuant le coût total de leur capital. En outre des fonds propres surdimensionnés sont la preuve que le capital n'est pas utilisé de manière optimale.

Il semblerait qu'aujourd'hui, dès lors que le ratio Tier 1 est aux alentours de 6%, il ne soit plus nécessaire à l'établissement d'augmenter son niveau de fonds propres. Si ce ratio est nettement supérieur à 6%, la banque aura au contraire intérêt à diminuer le montant de ses fonds propres à l'image du conseil d'administration de la Société Générale83(*) qui, avec un ratio des fonds propres nets supérieur à 7%, a approuvé le principe d'un rachat d'actions en vue de leur annulation pour un montant représentant 10 % de sa capitalisation boursière début Septembre 1999 (soit 2 milliards d'Euros).

En somme, la méthode FCF, en tenant compte des notions de résultat économique et du coût du capital permet aux managements des banques de se servir de cet instrument comme un système de pilotage de gestion.

La recherche de la rentabilité économique qu'impose le FCF incitera les banques à élaborer et appliquer des méthodes performantes de tarification des produits et services, à instaurer une gestion efficiente des risques, améliorant ainsi leur assise financière.

CONCLUSION

Notre propos tout au long de ce mémoire, a été de démontrer dans quelle mesure l'approche FCF pouvait être adaptée à la firme bancaire, aux fins d'optimiser sa création de valeur et surtout, constituer un outil interne de gestion au service des décideurs de la firme bancaire. L'analyse que nous avons menée nous a permis d'observer un certain nombre de tendances au sujet des banques tunisiennes.

Elles connaissent il est vrai, une progression de leur produit net bancaire (PNB), mais celle-ci semble insuffisante pour freiner l'érosion de la rentabilité de leurs fonds propres, tant et si bien qu'ils progressent à un rythme plus soutenu que le rythme de progression du résultat net. L'efficience opérationnelle est en deçà des anticipations des actionnaires. Ce test nous a permis de vérifier l'hypothèse suivant laquelle la valeur de la firme bancaire est corrélée au résultat économique. S'agissant de la performance boursière des banques tunisiennes au regard des standards internationaux, il nous est apparu que les banques tunisiennes sont en moyenne sous valorisées. Pour cause, la faible liquidité du marché, et la perte de confiance des investisseurs, dont il faut rappeler qu'ils sortent d'une période d'euphorie de 1993-199584(*)pendant laquelle les cours étaient trop élevés sans que ce ne soit la traduction de la valeur réelle de l'entreprise émettrice, le marché semblait déconnecté de toute réalité économique. Mais leur valorisation boursière moyenne en 2002 semble anodine car, les banques étudiées connaissent un réel problème de rentabilité, ce qui affaiblit partiellement l'hypothèse de sous valorisation des titres bancaires. Pour ce qui est de la rigueur dans la gestion, les banques tunisiennes semblent à la traîne en dépit de la détérioration de leur rentabilité économique, car elles n'ont guère réagi en conséquence par une bonne maîtrise de leurs frais généraux. Au vu de ce qui précède et compte tenu du niveau en 2001 et 2002 du rendement global moyen des banques tunisiennes, il n'y a pas eu création de valeur.

Par delà les résultats de la présente étude grâce à la méthode du FCF appliquée à la firme bancaire tunisienne, force est de constater que ce critère conserve tout son intérêt. En effet, dans un contexte de répression financière85(*)où plane une atmosphère de déréglementation86(*), par conséquent une plus grande tentation par des investissements risqués, le FCF permet d'accorder une attention particulière à la liquidité, en suivant son évolution sur une période raisonnable. En outre, il apparaît clairement que la création de valeur ne se fait pas au détriment des autres partenaires (Stakeholders) de l'entreprise, puisque la maximisation de la richesse des actionnaires est moins un choix relatif au partage de la valeur ajoutée entre la rémunération des différents facteurs de production qu'un principe de management des organisations qui souligne que la poursuite simultanée et mal hiérarchisée de plusieurs objectifs constitue un moyen assez sûr de n'en atteindre aucun. Dans un marché émergent tout comme dans une économie de marché, tous les acteurs tirent bénéfice de ce que l'entreprise cherche en priorité à maximiser la valeur actionnariale.

Un autre enseignement est que le FCF fait prendre conscience que le coût du capital ne se limite guère au coût de la dette, mais que les fonds propres ont un prix. La course à la rentabilité pour séduire les investisseurs va bien au-delà du cadre intra sectoriel, voire international. Si un investisseur n'est pas satisfait de la rentabilité offerte par les valeurs bancaires, il pourra placer son argent dans d'autres secteurs d'activité.

L'évaluateur, doit avoir une connaissance des facteurs clés qui contribuent à la création de valeur. Dans la banque, il s'agit d'une part, des deux composantes du produit net bancaire (les intérêts et les commissions), avec en toile de mire le niveau des frais généraux et d'autre part du coût du capital c'est-à-dire des fonds propres.

Cependant, le FCF en tant que pure approche économique, montre des limites à un double point de vue :

En premier lieu, les prévisions à mener en vue d'établir les flux de trésorerie futurs semblent difficiles. Elles doivent se fonder sur des hypothèses réalistes en terme de croissance, d'amélioration de marge etc. En l'espèce, elles seront étroitement corrélées à la détermination précise du coût des fonds propres, c'est-à-dire de l'exigence de rentabilité des actionnaires. Or, il a été vu qu'une telle exigence ne semble pas pouvoir être appréhendée en dehors des données empiriques reposant sur un consensus des investisseurs, les modèles du type MEDAF ont vite fait de montrer leurs limites en cas de forte fluctuation du marché boursier.

En second lieu, pour les investisseurs, le FCF ne peut pas prendre en compte le côté spéculatif d'une valeur. Même si, elle a le mérite de pouvoir faire apparaître la part spéculative dans l'évaluation d'une valeur bancaire ou la progression (régression) de l'attrait des investisseurs pour ce type de valeur. Si certaines critiques faites à la création de valeur, quel que soit l'approche utilisée, semblent difficiles à justifier, c'est peut-être dans le domaine de la communication financière que les plus grands progrès restent à accomplir.

Les conclusions aux quelles nous sommes parvenus dans ce mémoire pourraient être enrichies sur une séquence de temps plus longue parce que certainement plus probante et, généralisées à d'autres banques africaines. A conditions de jouir de moyens suffisants et d'informations disponibles.

ANNEXE 1 : composition des fonds propres de base

Les fonds propres de base, aussi appelés "Tier 1" ou "noyau dur" sont déterminés de la manière suivante :

1) Eléments à ajouter :

- le capital social et assimilé (actions ordinaires, actions à dividendes prioritaires, certificats d'investissements, et actions de préférence perpétuelle à dividende non cumulatif)

- les réserves consolidées, à l'exclusion des réserves de réévaluation

- les primes d'émission ou de fusion

- le résultat non distribué de l'exercice (y compris intermédiaire)

- les fonds pour risques bancaires généraux

- les différences de première consolidation créditrices (badwill)

- les différences sur titres mis en équivalence

- les intérêts minoritaires créditeurs

- les écarts de conversion créditeurs

2) Les éléments à déduire :

- la fraction non libérée du capital

- les actions propres détenues (à leur valeur comptable)

- le report à nouveau débiteur

- les frais d'établissement

- les immobilisations incorporelles hors droit au bail

- les différences de première consolidation débitrices (goodwill)

- les intérêts minoritaires débiteurs

- les écarts de conversion débiteurs

ANNEXE 2 : composition des fonds propres complémentaires

Les fonds propres complémentaires sont divisés en deux niveaux : le premier niveau "Upper tier 2" et les fonds propres complémentaires de deuxième niveau ou "lower tier 2".

1 Les fonds propres complémentaires de premier niveau (Upper Tier 2) :

Ces fonds propres sont constitués des éléments suivants :

-les réserves et écart de réévaluation

-les plus-values latentes sur titres de placement après décote de 55% (Ratio Cooke uniquement)

-les provisions générales

-les fonds de garantie intégralement mutualisés

-les fonds de garantie à caractère mutuel ou public (dans la limite de 8% des risques couverts)

-les titres hybrides vérifiant certaines conditions :

*subordination en capital et intérêt ;

*durée indéterminée ;

*remboursable par initiative de l'émetteur et après accord de la Commission bancaire ;

*paiement des intérêts différables en cas de pertes ;

*disponibilités pour couvrir les pertes éventuelles, sans cessation de l'activité ;

*limites spécifiques de progressivité de la rémunération pour les titres subordonnés à intérêts progressifs. Cette catégorie comprend les titres participatifs, les titres subordonnés à durée indéterminée, les titres subordonnés à intérêts progressifs, les capital notes, les actions de préférences cumulatives hors échéance fixe, les obligations subordonnées convertibles ou remboursables uniquement en actions

les provisions d'ordre général, ne faisant pas partie du FRBG, et non affectées à un risque né et mesurable dont une partie des provisions-pays (tranche supérieure aux 30 premiers pour cent, plafonnée à 1,25% du total des risques pondérés).

2 -Fonds propres complémentaires de deuxième niveau (Lower Tier 2)

Ce sont les autres instruments de dette subordonnée à terme, dont la durée initiale est supérieure à 5 ans ou remboursables avec un délai de 5 ans.

Une décote est appliquée au cours des 5 dernières années de vie (en principe 20% par an, le reliquat étant à reprendre au dénominateur, puis ultérieurement dans le Tier 3).

Cette catégorie comprend notamment les actions de préférence cumulatives à échéance fixe, les obligations subordonnées convertibles en actions ou espèces, les titres subordonnés à durée indéterminée synthétiques.

ANNEXE 3 : données financières

BANQUE DE TUNISIE ET DES EMIRATS D'INVESTISSEMENT

BTEI (en MD)

31/12/98

31/12/99

31/12/00

31/12/01

31/12/02

résultat net

+dotations aux provisions & amortissements

+ dotations aux provisions et résultats de correction de valeurs sur créances H-B et passif

+ dotations aux provisions et résultat de corrections sur portefeuille d'investissement

9 276

291

11 044

192

265

9 499

227

2 468

37

260

7 844

341

388

232

18 936

985

RESULTATECONOMIQUE (RE)=NOPAT

9 567

11 501

12 194

8 482

20 541

Capitaux propres

+ résultat net

101 407

9 276

108 882

11 044

116 293

9 499

125 770

37

124 996

388

CAPITAL INVESTI (K)

110 683

119 928

125 792

125 807

125 354

COUT DES FONDS PROPRES TIER 1 ( c ) en %

15

15

15

15

15

r = NOPAT / K en %

8.64

9.59

9.69

6.74

16.38

FCF = NOPAT - ? ACTIF ECONOMIQUE

382

-1 393

1 186

402

0

cours moyen

21.17

21.16

20.38

19.9

18.78

BANQUE INTERNATIONALE ARABE DE TUNISIE

BIAT (en MD)

31/12/98

31/12/99

31/12/00

31/12/01

31/12/02

résultat net

+dotations aux provisions & amortissements

+ dotations aux provisions et résultats de correction de valeurs sur créances H-B et passif

+ dotations aux provisions et résultat de corrections sur portefeuille d'investissement

21 066

31 358

25 306

25 026

29 112

13 064

33 602

13 117

-23 268

2 291

22 418

13 987

-31 214

210

RESULTATECONOMIQUE (RE)=NOPAT

52 424

50 332

42 176

25 742

5 401

Capitaux propres

+ résultat net

135 981

21 066

185 709

25 306

199 619

29 112

195 760

33 602

214 739

22 418

CAPITAL INVESTI (K)

157 047

211 015

228 731

229 362

237 157

COUT DES FONDS PROPRES TIER 1 ( c ) en %

15

15

15

15

15

r = NOPAT / K en %

38.33

23.85

18.43

11.22

2.27

FCF = NOPAT - ? ACTIF ECONOMIQUE

408 661

29 585

-18 736

95 322

5 401

cours moyen

27.10

26.35

23.94

22.15

26.3

BANQUE DE TUNISIE

BT (en MD)

31/12/98

31/12/99

31/12/00

31/12/01

31/12/02

résultat net

+dotations aux provisions & amortissements

+ dotations aux provisions et résultats de correction de valeurs sur créances H-B et passif

+ dotations aux provisions et résultat de corrections sur portefeuille d'investissement

13 827

21 480

17 134

20 724

24 044

22 106

28 878

17 760

30 033

22 950

RESULTATECONOMIQUE (RE)=NOPAT

35 307

37 858

46 150

46 638

52 983

Capitaux propres

+ résultat net

99 066

13 827

118 622

17 134

135 476

24 044

150 820

28 878

200 398

30 033

CAPITAL INVESTI (K)

112 893

135 756

159 520

179 698

230 431

COUT DES FONDS PROPRES TIER 1 ( c ) en %

15

15

15

15

15

r = NOPAT / K en %

31.27

27.88

28.93

25.95

22.99

FCF = NOPAT - ? ACTIF ECONOMIQUE

30 234

37 247

37 915

67 014

52 983

cours moyen

74.85

76.54

64.71

67.93

54.23

ANNEXE 4 : les valeurs du marchés tunisiens

SECTEUR

VALEUR

TITRES ADMIS AU 31/12/03

NOMBRE D'ECHANGE

TITRES TRAITES

1

UIB

7,000,000

4337

788,534

2

UBCI

7,000,000

858

307,441

3

STB

24,860,000

2823

804,158

4

BTEI

1,000,000

1383

203,337

5

BT

5,000,000

3221

801,407

6

BS

20,000,000

1898

1,647,868

7

BNA

10,000,000

708

689,871

8

BIAT

10,000,000

1833

641,778

9

BH

15,000,000

1582

573,419

10

ATB

7,000,000

268

125,810

11

AB

7,000,000

600

182,945

TOTAL BANQUE

 

19511

6,766,568

 

 

 

 

 

1

AST

800,000

52

157,859

2

CARTE

100,000

32

1,919

3

STAR

1,500,000

68

20,756

TOTAL ASSURANCE

 

152

180,534

1

MAG

900,000

665

79,437

2

MGR

1,670,000

487

231,613

3

MNP

1,849,016

658

56,520

4

STEQ

1,400,000

3383

380,391

TOTAL COMMERCE

 

5193

928,495

1

PLTU

1,000,000

24

19,081

2

SPDIT

3,360,000

1814

228,421

3

TINV

1,000,000

486

63,428

TOTAL INVESTISSEMENT

 

2324

310,930

1

ALS

1,000,000

129

30,540

2

ATL

1,000,000

1484

167,484

4

CIL

1,000,000

545

111,001

5

GL

1,000,000

693

116,299

6

TLS

1,500,000

1003

450,888

TOTAL LEASING

 

3854

876,212

1

MAZ

2,900,000

501

58,649

2

SFBT

10,260,000

9275

1,763,656

3

STIL

3,400,000

74

9,172

4

TLAT

1,050,000

69

9,373

TOTAL AGRO ALIMENTAIRE

 

9919

1,840,850

1

STIP

3,825,294

17095

801,815

2

SOTUV

1,059,500

797

213,185

3

SOMOC

2,800,000

482

636,360

4

SIPHA

1,800,000

8807

257,732

5

SIAME

1,350,000

1913

314,165

6

LSTR

1,750,000

3131

948,475

8

ICF

900,000

126

22,567

9

AMS

1,613,456

355

106,630

10

ALKIM

1,770,230

175

16,233

11

AL

470,405

138

1,865

TOTAL INDUSTRIE

 

33019

3,319,027

1

TAIR

15,519,460

3561

538,036

2

STPIL

2,600,000

8477

817,619

TOTAL TRANSPORT

 

12038

1,355,655

1

PALMB

2,431,474

26

3,407

TOTAL TOURISME

 

26

3,407

1

SIMPA

600,000

89

24,562

TOTAL IMMOBILIER

 

89

24,562

1

SOTET

1,680,000

8427

478,481

TOTAL COMMUNICATION

 

8427

478,481

Source : extrait de STATISTIQUES PAR VALEUR COTATION ELECTRONIQUE de la BVMT, www.bvmt.org, mai 2004

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION 4

PREMIERE PARTIE:FREE CASH FLOW ET CREATION DE VALEUR AU SEIN DE L'ENTREPRISE.............................................................................................7

CHAPITRE I : LES FONDEMENTS THEORIQUES DE LA CREATION DE VALEUR 8

Section 1 : De la maximisation à la création de valeur 8

A) Analyse critique de l'hypothèse de maximisation de la richesse des actionnaires comme objectif de l'entreprise 8

1. L'objectif fondamental en finance d'entreprise : la maximisation de la valeur de l'entreprise 8

2. La contestation du principe de maximisation de la valeur 9

3. Les modèles de compromis : création de valeur et théories des organisations 11

B- Les mutations de la sphère économico-financière 14

1.Le comportement des indicateurs financiers de la performance 14

2.La genèse et l'enrichissement du concept de valeur 16

3.La signification du concept de création de la valeur dans l'entreprise 18

Section 2 : La méthode Free Cash Flow : une réponse critique au critère du Return on Equity 20

A  - Les insuffisances du critère ROE. 21

1.Le ROE ne rend pas compte de la réalité économique 21

2.Le ROE ne rend pas compte de la structure financière de l'entreprise 22

3.Le ROE n'est pas une mesure homogène 23

4.Le ROE aggrave l'asymétrie informationnelle 23

B- La justification et le contenu de la méthode FCF 24

1.Le résultat économique 26

2.La détermination de l'investissement de la période. 30

3.La détermination du coût des capitaux investis 32

4.La détermination du FCF et la valeur de l'entreprise 34

CHAPITRE II: LA GESTION PAR LA VALEUR 37

Section I : Les sources de cash-flow 37

A. Le cash-flow du cycle d'exploitation 37

B. Le cash-flow du cycle d'investissement. 38

B. Le cash-flow du cycle de financement 39

1.La Flexibilité stratégique 39

2.Politique financière et contexte opérationnel 40

3.Le marketing du titre 40

4.L'identification des flux financiers 41

Section II : La gestion par la valeur (ou en anglais Value Based Management). 42

A- Une nouvelle mesure des performances 42

B- Nouvelle forme organisationnelle 45

C- Le développement du gouvernement d'entreprise 46

D- Les modalités de Rémunération 47

Section III : L'extension de l'approche FCF à la firme bancaire 48

A- Le résultat économique bancaire 48

1.L'incorporation du résultat financier dans le résultat économique bancaire 48

2.Le traitement des dotations et reprises sur provisions 49

B- Le coût des capitaux investis 51

1.Le coût des fonds propres durs 51

2.La notion de capital investi en matière bancaire 54

DEUXIEME PARTIE:LE TEST DE LA EMPIRIQUE DE LA METHODE FREE CASH FLOW APPLIQUEE A LA FIRME BANCAIRE ................................................................................................56

CHAPITRE III : PRESENTATION DE L'ECHANTILLON ET METHODOLOGIE 56

Section I : Analyse de l'environnement bancaire tunisien et échantillon 56

A- Le cadre institutionnel 56

1.Historique du système bancaire tunisien 56

2.Réglementation de la profession bancaire 61

B- Présentation de l'échantillon 66

Section II : Méthodologie de recherche 67

A- Explication des hypothèses 67

B- Comparaison entre les résultats théoriques obtenus par le FCF et la capitalisation boursière historique des banques 68

1.Liens théoriques entre le FCF et la valeur de marché d'une banque : la Shareholder Value 68

2.Comparaisons entre résultats théoriques et données historiques sur la période 1998 - 2002 70

CHAPITRE IV : PRESENTATION DES RESULTATS 71

Section I : Capitalisation théorique versus capitalisation historique des banques tunisiennes 72

A- Analyse comparative des données théoriques et des données réelles 72

B-  L'évolution du système bancaire tunisien en matière de création de valeur 74

1.Sous-évaluation boursière des valeurs bancaires ou remise en cause de la méthode FCF ? 74

2.Les facteurs déterminants de la dépréciation de la rentabilité des banques tunisiennes 78

Section II : La traduction de la méthode FCF dans la Gestion interne des banques 81

A- Comment augmenter le résultat économique d'une banque ? 82

1.La nécessité d'améliorer le taux de valeur ajoutée. 82

2.L'augmentation de la part des commissions dans l'augmentation du résultat économique. 83

B- La diminution du coût du capital investi 85

CONCLUSION 87

ANNEXE 1 : composition des fonds propres de base 90

ANNEXE 2 : composition des fonds propres 91

ANNEXE 3 : données financières 93

ANNEXE 4 : les valeurs du marchés tunisiens 96

BIBLIOGRAPHIE : ............................................................................. 99

* 1 COMMISSION BANCAIRE, livre blanc sur la mesure de la rentabilité des activités bancaires, octobre 1998

* 2 Galesne A., Introduction à la fonction financière dans l'entreprise, Cerefia, Université de Rennes, pp12

* 3 Cité dans Introduction à la fonction financière dans l'entreprise

* 4 L'entreprise en tant que boite noire est celle à acteur unique de l'école classique recherchant, de façon mécanique, le maximum de profit de l'entrepreneur à partir d'une fonction de production.

* 5 Wanda R., «Structure financière et performance des entreprises dans un contexte sans marché financier:le cas du Cameroun» Octobre 2001

* 6 Graham B., Dodd L., Security analysis, 3e edition, 1951

* 7 Vernimmen P., Finance d'entreprise, Dalloz 4e édition, 2000, pp569

* 8 Stiglitz j., On the irrelevance of corporate financial policy, American Economic Review, vol LXIV, p.851 à,866, décembre 1974

* 9 Cette corrélation met en évidence la notion de gouvernance c'est à dire l'ensemble des mécanismes externes (marché du travail, des biens et services, financier, la COB,) et internes (conseil d'administration, structure de propriété) de contrôle des attitudes managériales dans une relation d'agence

* 10 Dans la littérature financière anglo-saxonne, on parle de Stakeholders pour désigner les différents acteurs de la firme

* 11 Jensen M., Meckling, Theory of firm : managerial behavior agency costs and ownership structure, journal of Financial Economics, vol 3, pages 305 à 360, octobre 1976

* 12 Jensen M., Meckling op cit.

* 13 Quintard A., La théorie financière néoclassique: application de la théorie des signaux et de la théorie de l'agence au problème de la structure financière de l'entreprise, Economica

* 14 Ross S., The determination of financial structure : the incentive signalling approach, Bell journal of Economics, vol 8, pages 23 à 40, 1977

* 15 Vernimmen P., Finance d'entreprise, Dalloz, 4e édition, 2000 p523

* 16 Caby J., Hirigoyen G., La creation de valeur de l'entreprise, 2e edition, Economica, 2001, Paris, 197 p

* 17 Bulletin COB N° 346, mai 2000 page 44

* 18La lettre Vernimmen.net, n°2, juillet 2001

* 19 -M. Porter, Competitive Strategy : Techniques for Analysing Industries and Competition, The Free Press, 1980, p13

* 20-M. Lebas, Glossaire de comptabilité de gestion, Paris, Expert-Compta Média, 1999, p. 226

* 21 -F.Modigliani , M.H.Miller : « The Cost of Capital, Corporate Finance and Theory of Investment», American Economic Review, vol.68, n°3, p.261-297

* 22 Bulletin COB N° 346, mai 2000, page 1

* 23 Bulletin COB N° 346, mai 2000, page 48

* 24 Charreaux G. et Desbrières P., Gouvernement des entreprises et création de valeur, Finance Contrôle, Stratégie, vol.1, N°2, p.57-88

* 25 - Prof Jacques Pasquier, « Valeur économique ajoutée ou flux de trésorerie libérés ? », article publié en ligne

* 26 Par impôt corrigé, on entend celui que paierait l'entreprise si elle ne déduisait pas les charges d'intérêt (Bulletin COB n°346 ? MAI 2000, p8)

* 27 - F.MODIGLIANI, M. MILLER «Corporate Income Taxes and the Cost of Capital: a correction»,

American Economic Review, vol.53, n°3, pp.433-443

* 28 - JENSEN.M, «The agency costs of free cash flow, corporate finance, and takeovers», American Economic Review, vol. 76, pp. 323-329, 1986.

* 29 Taux de rentabilité des capitaux propres

* 30 G.B.Steward, The Quest for Value, A Guide for Senior Managers, HerperBusiness, 1991.

* 31 - Sociétés relativement jeune des secteurs de la nouvelle économie

* 32 - Opérations faites en fin d'exercice pour embellir les comptes

* 33 - Survaleur résultant de la prise en compte d'éléments immatériels

* 34 - Termes utilisés pour la première fois en 1986 par le Prof Jensen.M.C

* 35 - A. Rappaport, Creating Shareholder Value, The Free Press, NEW-YORK, 1986.

* 36 - Ratio d'autonomie financière

* 37 -Bulletin COB, n°46, mai 2000

* 38 - Félix BOGLIOLO, « les clés opérationnelles de la création de valeur. », article publié en ligne

sur le site www.evafine.fr

* 39 - Denis NEVEU « La création de valeur, une nouvelle relation à l'actionnaire » in l'actualité fiduciaire, n°830, juin 1999 

* 40 - Modigliani F., Miller M ,«The cost of capital, corporation finance and the theory of investment» The American Economic Review, vol XLVII(3), p.261 à 297,1958

* 41 -Vernimmen P., Finance d'entreprise, Dalloz, 4e édition, 2000, p781

* 42 -Par impôt corrigé, on entend celui que paierait l'entreprise si elle ne déduisait pas les charges d'intérêt (Bulletin COB n°346, mai 2000, p8)

* 43 -Vernimmen P., Finance d'entreprise, Dalloz, 4e édition, 2000, p777

* 44- La littérature francophone assez abondante, consacre les terminologies suivantes : REMIC = résultat exploitation minoré de l'impôt corrigé. (Bulletin COB N°346, mai 2000, p11)

* 45 L'acte uniforme OHADA précise qu'il s'agit de la constatation comptable d'un amoindrissement de la valeur d'un élément d'actif résultant de causes dont les effets ne sont pas jugés irréversibles.

* 46 Acte uniforme OHADA, page 337

* 47 -E.TCHEMENI, Evaluation des Entreprises, Economica, 1993, pp. 88

* 48 - Chabaneix D., « La création de valeur : la spécificité des banques », COB, mai 1995

* 49- Ceci exclut, en général, les titres négociables, les emprunts à court terme et la partie courante des emprunts à long terme.

* 50- BARNAY A. et CALBA G, Combien vaut notre entreprise, Paris, entreprise Moderne d'Edition, 2e édition 1968

* 51 - L BATSCH, le Diagnostic Financier, Paris, Economica, 3e édition 2000, pp 99

* 52- Il s'agit du solde de dettes financières d'une part du disponible et des placements financiers d'autre part. Elle représente la situation nette position créditrice ou débitrice de l'entreprise vis à vis des tiers et hors cycle d'exploitation.

* 53 Vernimmen P., Finance d'entreprise, Dalloz, 4e édition, 2000, p776

* 54 Prof Jacques Pasquier, « Valeur économique ajoutée ou flux de trésorerie libérés ? », www.univfribourg.edu

* 55 - Denis NEUVEU « La création de valeur, une nouvelle relation à l'actionnaire » in l'actualité fiduciaire, n°830, juin 1999 

* 56 L MARX, JF KROONEN, « Fusions-acquisitions, quelle valeur pour l'entreprise ? », agefi, juillet-août 2001

* 57 - Tableau et graphique construit par nos soins

* 58 - Hebdomadaire économique américain

* 59 - Se conçoit tout simplement comme un processus de ré-apprentissage professionnel

* 60 Favry J., L'entreprise de la valeur, Economica, Paris, 2001

* 61 - Economiste contemporain américain, ancien conseiller du président J.K.Kennedy

* 62 -« Recents Developments in the Theory of Corporate Finance », Oxford Economic Review, vol.3, n°4, Automne, pp.1-12

* 63 M.C.Jensen et W.H.Meckling, « Theory of the Firm: Managerial Behaviour, Agency Cost and Ownership Structure », Journal of Financial Economics, octobre 1976. Rep. Dans The Theory of Business Finance, S.H Archer et C.A. d'Ambrosio (éd.), Macmillan 3e éd., 1983, pp.479-535 l'expriment sans ambiguïté: «Alors que la littérature économique est remplie de références à la théorie de la firme, le matériau généralement utilisé sous ce titre ne conduit pas à une théorie de la firme, mais en fait à une théorie des marchés dans laquelle les firmes sont des acteurs importants. La firme est une « boîte noire » qui opère de manière à remplir les conditions marginales relatives aux inputs et aux outputs, maximisant les profits ou, plus correctement leurs valeurs présente. »

* 64 - Egale aux fonds propres de base dans la littérature bancaire francophone

* 65 - Correspond aux fonds propres nets dans la littérature bancaire francophone

* 66 - Correspond aux quasi-fonds propres des entreprises industrielles et commerciales

* 67 - Egale aux fonds propres complémentaires

* 68 Chiffre tiré du rapport de la Banque Centrale de Tunisie 1995

* 69 DNT : Dinar tunisien

* 70 Ce tableau a été tiré d'une étude faite à l'institue de Financement et de l'Investissement et de Développement, Tunisie, 1996

* 71 http://www.bct.gov.tn/

* 72 (*) Avant le 31 décembre 1999, ce taux était de 5%

* 73 Bourse des Valeurs Mobilières de Douala

* 74 Rendement global ajusté des opérations sur le capital (droits d'attribution ; droits de souscription et dividendes).

* 75 Le dividende indiqué est propre à une action de pleine jouissance ; le montant revenant à une action nouvelle est fonction linéaire de sa date de jouissance et sa partie libérée.

* 76 Taux de distribution de dividende

* 77 -Market to Book Ratio est le rapport entre la capitalisation boursière et la valeur nette comptable

* 78 cf. 2ème partie chap. 3 section 1 paragraphe B

* 79Les diverses dotations aux amortissements sont comprises dans les frais généraux.

* 80 Sur les opérations de rapprochements bancaires, cf. : G. d'Angerville, "OPA - OPE : la création de valeur est le critère essentiel", Banque magazine n° 602 / Avril 1999.

* 81 cf. 2ème partie chap.4 section 2 paragraphe b

* 82 - Termes déposés par BANKERS TRUST &CO

* 83 - Deuxième groupe bancaire français par le TOTAL BILAN

* 84 « Libéralisation financière en Tunisie », http://skaclear.chez.tiscali.fr/skan/meme.htm

* 85 MC Kinnon et Shaw analysèrent en 1973 les situations financières des PVD, en insistant sur le concept de la manière suivante : ces pays ont des marchés financiers qui sont quasi inexistants ce qui a pour conséquence première de mettre le secteur bancaire au centre du système d'allocation des financements. Les gouvernements exercent un contrôle direct par des nationalisations au sein du secteur, ou indirect en maintenant les taux d'intérêt en deçà de leur niveau d'équilibre afin de diriger tel ou tel crédit à des taux décidés...

* 86Bulletin du FMI, « Une crise économique en trois temps », Problème économique n°2598 6 janvier 1999






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