Cédric Lavérie
D.E.A. de Droit des Relations Economiques Internationales et
Communautaires
Année universitaire 2000-2001
La cohérence de la double conditionnalité
des institutions de Bretton Woods
Mémoire réalisé sous la direction de M.
Alain Pellet
INTRODUCTION
4
PREMIÈRE PARTIE : LA COHÉRENCE INTERNE
DE LA DOUBLE CONDITIONNALITÉ
10
CHAPITRE I : LA COHÉRENCE INSTITUTIONNELLE
12
Section 1 : Des institutions
indépendantes
13
Paragraphe 1 : Des évolutions
différentes
13
A. L'évolution du rôle du Fonds Monétaire
Internationale
14
B. L'évolution du rôle de la Banque Mondiale
18
Paragraphe 2 : La convergence des objectifs
21
A. L'ajustement structurel comme apogée
21
B. Des divergences dans la convergence ?
24
Section 2 : Les relations entre les institutions
de Bretton-Woods
27
Paragraphe 1 : La collaboration entre les institutions de
Bretton-Woods
27
A. La relation structurelle
28
B. Une collaboration progressive
31
Paragraphe 2 : Une relation
déséquilibrée
34
A. La domination programmatique du FMI
34
B. La présence matérielle de la Banque
37
CHAPITRE 2 : LA COHÉRENCE DES
CONDITIONNALITÉS
40
Section 1 : La conditionnalité en tant
qu'instrument juridique
41
Paragraphe 1 : La création de la
conditionnalité par le FMI
41
A. La création conceptuelle de la conditionnalité
42
B. La mise en forme de la conditionnalité
45
Paragraphe 2 : La consolidation des
conditionnalités
48
A. La forme actuelle de la conditionnalité du FMI
48
B. La propagation à la Banque Mondiale
52
Section 2 : La conditionnalité en tant
qu'instrument de politique économique
55
Paragraphe 1 : L'idéologie commune des
institutions de Bretton-Woods
55
A. L'orthodoxie néo-libérale : le consensus de
Washington
56
B. Le modèle de développement par
l'intégration aux marchés mondiaux
60
Paragraphe 2 : Les différences de mise en oeuvre
de la double conditionnalité
63
A. Le FMI et la conditionnalité macro-économique
63
B. La Banque Mondiale et les conditionnalités
micro-économiques et sectorielles
67
DEUXIÈME PARTIE : LA COHÉRENCE EXTERNE
DE LA DOUBLE CONDITIONNALITÉ 71
CHAPITRE I : LA COHÉRENCE PAR RAPPORT AUX
PRINCIPES DU «DROIT DU DÉVELOPPEMENT»
73
Section 1 : La protection de la
souveraineté étatique
74
Paragraphe 1 : La création des principes
75
A. Le principe de non-discrimination
75
B. Le principe de non-intervention
78
Paragraphe 2 : La prise en compte des principes par les
institutions de Bretton Woods
80
A. L'affirmation du respect des principes par les institutions de
Bretton Woods
80
B. Un respect biaisé par l'hégémonie de la
doctrine économique dominante
83
Section 2 : La réalité des
atteintes à la souveraineté
86
Paragraphe1 : Les atteintes au libre choix d'un
régime
86
A. Intervention et discrimination dans le choix d'un
régime politique
87
B. Intervention et discrimination dans le choix d'un
régime économique et social
90
Paragraphe 2 : Les atteintes au libre choix des
politiques
93
A. L'intervention dans les politiques économiques
93
B. L'intervention dans les politiques sociales et culturelles
96
CHAPITRE 2 : LA COHÉRENCE PAR RAPPORT AUX
PRINCIPES DES DROITS DE L'HOMME
99
Section 1 : La double conditionnalité et
les droits économiques, sociaux et culturels
100
Paragraphe 1 : L'impact de la double
conditionalité sur l'économie
100
A. L'impact sur la croissance
101
B. L'impact sur la pauvreté
104
Paragraphe 2 : La dimension sociale des
conséquences de la double conditionnalité
107
A. L'impact social
107
B. L'impact sur le secteur social
111
Section 2 : Vers de nouvelles
conditionnalités « humanisées » ?
114
Paragraphe 1 : Des avancées pour les droits de
l'homme
114
A. Un nouveau modèle de développement
économique
115
B. La prise en compte du développement social
118
Paragraphe 2 : De nouveaux risques pour la
souveraineté ?
121
A. Vers un principe de discrimination dans l'attribution de
l'assistance financière ?
121
B. Vers un principe d'ingérence pour le
développement ?
126
CONCLUSION : L'AVENIR DE LA CONDITIONNALITÉ,
DES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS ET DE LA SOUVERAINETÉ
129
Sigles utilisés
BAfD : Banque africaine de développement
BERD : Banque européenne pour la reconstruction et le
développement
BIRD : Banque internationale pour la reconstruction et le
développement
CIJ : Cour internationale de justice
CSCE : Conférence sur la sécurité et la
coopération en Europe
CSLP : Cadre stratégiques de lutte contre la
pauvreté
DCPE : Documents-cadres de politique économique
DSRP : Document stratégique de réduction de la
pauvreté
FAS : Facilité d'ajustement structurel
FASR : Facilité d'ajustement structurel
renforcée
FMI : Fonds Monétaire International
FRPC : Facilité pour la réduction de la
pauvreté et la croissance
GATT : General Agreement on Tariffs and Trade
OCDE : Organisation de coopération et de
développement économiques
OMC : Organisation Mondiale du commerce
OMS : Organisation mondiale de la santé
ONU : Organisation des Nations Unies
OTAN : Organisation du traité de l'Atlantique nord
PECO : Pays d'Europe centrale et orientale
PESF : Programme pilote d'évaluation du secteur
financier
PPTE : Pays pauvres très endettés
SDN : Société des Nations
UE : Union européenne
UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'enfance
UNESCO : Organisation des Nations Unies pour
l'éducation, la science et la culture
Introduction
Le terme double conditionalité est apparu au milieu des
années quatre-vingt avec la création de la facilité
d'ajustement structurel par le Fonds Monétaire International. En effet
cette dernière a marqué un nouveau pas dans la relation entre les
institutions de Bretton-Woods puisque qu'elle officialise leur collaboration
dans l'élaboration et le suivi de ces programmes.
Cette avancée institutionnelle pose néanmoins la
question d'un double contrôle sur les pays qui bénéficient
de la FAS, de la FASR ou de l'initiative PPTE. La conditionalité des
institutions de Bretton-Woods, et notamment celle du FMI, avait
déjà été l'objet de multiples critiques concernant
les objectifs, les méthodes et surtout l'ingérence dans les
affaires intérieures des pays concernés. La double
conditionalité pose non seulement les mêmes problèmes
« en double » mais aussi ceux de l'adéquation entre
les objectifs et de méthodes du FMI et de la Banque Mondiale.
C'est pourquoi cette double conditionalité
mérite d'être analysée sous l'angle de sa cohérence,
et tout d'abord de façon interne à la relation entre les deux
organisations..
Il faut en effet comprendre comment deux institutions
indépendantes, aux objectifs distincts, se retrouvent impliquées
dans les mêmes programmes avec chacune leur propre
conditionnalité. Depuis leur création, ces institutions ont bien
sûr évoluées dans leurs attributions, se rapprochant
progressivement, si bien que certains auteurs, comme D.Carreau1(*), ont pensé à leur
fusion.
Sans aller jusque là, on peut néanmoins
constater que leurs évolutions ont conduit à un certain
chevauchement de compétences qui est à l'origine de l'ajustement
structurel et de ses avatars. Ce chevauchement est aussi à l'origine de
la collaboration croissante entre les deux institutions.
Mais le rapprochement n'étant pas total, il peut
exister encore des divergences d'objectifs, et donc de conditionnalité,
dans ces programmes.
De plus, les spécificités de chacune des
organisations font qu'il existe un risque de déséquilibre dans la
relation entre un FMI faible en personnel et en présence sur le terrain
et une Banque Mondiale dont l'influence conceptuelle, au moins sur
l'ajustement structurel, reste à la traîne du FMI.
En effet, le concept même de conditionalité a
été inventé par le FMI. Sa justification juridique et sa
définition «Le mot conditionalité se rapporte aux
politiques économiques que le Fonds souhaite voir suivre par les pays
membres pour qu'ils puissent utiliser les ressources du Fonds
conformément aux objectifs et aux dispositions des statuts.2(*)» ont été
théorisé par les services du FMI et notamment par J.Gold.
Mais la conditionalité reste quand même, à
l'image des outils du Fonds, un concept évolutif. Il a
évolué en fonction de l'environnement économique et
financier international mais aussi en fonction des destinataires de la
conditionalité.
Le vecteur de cette conditionalité a trouvé sa
consécration dans les accords de confirmation qui permet cette
adaptabilité au travers de trois phases que sont «les
critères de réalisation, l'échelonnement et l'adaptation
continu3(*)».
La forme actuelle de la conditionalité du FMI a
été reprise par de nombreuses organisations internationales, dont
la Banque Mondiale, ceci afin d'assurer une garantie dans le succès de
leurs opérations particulièrement dans le passage d'une logique
projet à une logique programme ainsi que pour se donner une
crédibilité vis à vis des bailleurs de fonds.
Le terme conditionalité, si l'on suit la
définition, se rapporte aux politiques économiques que les
organisations souhaitent voir suivre. Là aussi, il faut voir quel est le
degré de cohérence entre le FMI et la Banque Mondiale. Au niveau
de l'idéologie économique, il ne semble pas se poser trop de
problèmes en apparence puisque les deux institutions se sentent les
garantes d'une orthodoxie néo-libérale et ont longtemps suivies
toutes deux un modèle de développement basé sur les
exportations.
La question de la cohérence se pose surtout sur des
points plus précis des conditionalités. En effet, le FMI de par
sa magistrature d'influence dans le domaine idéologique s'occupe
essentiellement des grands agrégats macro-économiques tandis que
la Banque Mondiale, de par sa forte connaissance du terrain, s'attache plus aux
problèmes micro-économiques. Le problème qui peut se poser
est l'existence d'un niveau méso-economique, à la fois
influencé par les décisions macro-économiques et
micro-économiques , qui peut devenir le concentré des
divergences des politiques économiques en place.
L'analyse de la cohérence de la double
conditionalité n'a abordé, pour l'instant, que les question
d'ordre interne. Il faut considérer que la double conditionalité,
au travers de l'ajustement structurel, pose aussi des problèmes en terme
de cohérence externe c'est à dire au niveau de sa relation avec
d'autres concepts du droit international.
Les institutions de Bretton Woods ont, en effet,
été largement critiquées pour leurs actions envers les
pays en développement. Un argument récurrent est la
véritable tutelle imposée aux Etats par le FMI et la Banque
Mondiale.
Ce risque a pourtant été pris en compte,
à la demande des pays en développement, par l'ONU qui a
généré des principes pour l'aide au développement.
Deux de ces principes sont la non discrimination et la non intervention. Le
premier assure que l'aide ne sera pas subordonnée à un
régime politique économique ou social particulier. Le second
empêche toute ingérence dans les politiques ou les structures
socio-économiques.
Ces principes sont intégrés, plus ou moins
directement, dans les statuts des institutions de Bretton Woods et sont
réaffirmés continuellement par ces mêmes organisations.
Cependant à la vue des critiques concernant les
programmes d'ajustement structurels, on ne peut que s'interroger sur
l'étendu réelle du respect de ces principes.
En effet, si l'on regarde de plus près les
modalités d'attribution de l'aide, on remarque que le choix d'un
régime politique économique ou social influence
généralement l'obtention de l'aide.
De même, malgré l'opacité des institutions
de Bretton Woods, on peut constater de nombreuses contradictions entre la
thérapeutique du FMI ou de la Banque Mondiale et les politiques
volontaristes de certains états. Bien qu'accuser le FMI ou la Banque
d'être à l'origine de tous les maux puisse être une
facilité pour certains gouvernements, il convient néanmoins de
réaliser que ces états perdent une grande marge de manoeuvre dans
l'élaboration et la conduite de leurs politiques économiques et
sociales.
Les critiques adressées aux institutions de Bretton
Woods ne seraient pas si répandues si l'action de ces dernières
avait produit des résultats importants en terme de développement.
On peut donc tenter d'évaluer juridiquement ces
résultats au travers du respect des droits économiques, sociaux
et culturels.
Pour cela, il faut s'attacher à l'évolution des
conséquences de la double conditionalité à la fois sur les
domaines économiques, sociaux et culturels. Au niveau économique,
il faut dissocier deux facteurs que sont la croissance et la pauvreté.
En effet, la croissance seule n'est pas un bon indice de développement.
Il faut lui rattacher la notion de pauvreté ou de répartition de
revenus pour en analyser les conséquences en terme de
développement humain.
Ce dernier dépend aussi des conséquences
sociétales de la double conditionalité. Là encore, on peut
distinguer deux facteurs. Le premier est direct et correspond à
l'orientation de la double conditionalité concernant le secteur social.
Mais il existe aussi un effet indirect, consécutif aux mesures à
priori uniquement économiques, sur la structure sociale et culturelle du
pays.
Le flux incessant d'attaques contre le Fonds et la Banque dans
les domaines sociaux et politiques laisse à penser que l'impact de
l'ajustement structurel n'est pas neutre dans ces secteurs. Bien qu'elles aient
été assez longtemps insensibles à ces critiques, ces
institutions ont récemment commencé à développer
des modèles alternatifs de conditionalité. D'un coté, on
assiste à une remise en question non pas de l'idéologie
libérale mais du modèle de développement par les
exportations et de ses corollaires. D'un autre coté, on peut aussi
déceler une prise en compte grandissante des facteurs sociaux et
culturels au travers, entre autres, de ce que l'on appelle la
conditionalité sociale ou la conditionalité
démocratique.
Ces avancées vers un plus grand respect des droits
économiques, sociaux et culturels sont applaudies dans le milieu des
ONG. Cependant les états concernés leur réservent un
accueil plus distant. Bien qu'une plus grande démocratie ou une
meilleure répartition des revenus puissent faire peur à certains
régimes peu fréquentables, il semble que la crainte de la plupart
de ces états soit l'accroissement exponentiel des attributions des
organisations internationales d'aide au développement et en particulier
de « l'hydre à deux tètes » de Bretton
Woods.
En effet, la prise en compte du niveau de démocratie ou
des structures socio-économiques par le Fonds et la Banque leur
donnerait à la fois un pouvoir de discrimination en fonction des
régimes en place. De plus, une fois un régime
déclaré fréquentable, cela permettrait d'établir
une tutelle complète sur presque l'ensemble des politiques nationales
des états concernés. On se trouve donc devant un risque de
disparition des principes de non discrimination et de non ingérence. On
peut même aller plus loin en imaginant, vu que la souveraineté des
états n'est plus tellement à la mode, à la création
d'un principe de discrimination et d'un principe d'intervention (ou
d'ingérence).
La double conditionalité des programmes d'ajustement
structurel peut donc trouver ses limites au niveau de sa cohérence tant
interne qu'externe.
Première partie : La cohérence interne de la
double conditionnalité
Par cohérence interne de la double
conditionnalité, il faut entendre le processus de coexistence de deux
conditionnalités au sein de programmes communs de la part
d'organisations distinctes. Pour cela, il faut, avant d'aborder la question
même de la coexistence des conditionnalités, s'attacher à
analyser comment et pourquoi ces deux institutions indépendantes que
sont le FMI et la Banque Mondiale ont pu se retrouver dans ces programmes
communs. Deux facteurs principaux semblent être la solution de ce
problème. D'un coté, un facteur externe qui est
l'évolution de l'environnement économique et politique qui a
largement modifié les possibilités d'actions de ces institutions
et entraîné donc une redéfinition de leur champ d'action
(qui s'est trouvé être le même). D'un autre coté, un
facteur interne qui est la connotation idéologique des principaux
membres de ces organisations. Ce facteur a en effet abouti à une
convergence des modèles économiques utilisés par ces deux
institutions et donc à un rapprochement des techniques employées.
Cette convergence générale s'est traduite par un plus grand
besoin de collaboration de la part des institutions de Bretton-Woods tant pour
préserver leur existence que pour assurer la cohérence et
l'efficacité de leurs actions. Cette collaboration progressive, au fur
et à mesure de leur convergence, a abouti à la mise en place de
l'ajustement structurel, tout d'abord de façon séparée
puis commune. Cependant, même si cette collaboration est
indéniablement un point positif, elle a aussi engendré un
déséquilibre dans la relation entre les deux organisations et
donc un biais dans la cohérence des programmes.
Une fois cette dimension institutionnelle
appréhendée, il faut étudier la coexistence des deux
conditionnalités au sein des programmes communs. Pour cela, il faut
s'intéresser tout d'abord à leurs différences et
similitudes tant juridiques qu'économiques. Au niveau juridique, la
différence marquante est le cheminement des historiques de chacune des
conditionnalités. C'est en effet le FMI qui est à l'origine du
concept de conditionnalité et qui l'a formalisé depuis les
années 50. La Banque, par contre, n'a utilisé cette technique que
beaucoup plus tard quand elle est passée d'une logique projet à
une logique programme notamment avec l'ajustement structurel. Il faut donc
étudier la création de la conditionnalité dans le FMI et
analyser comment elle a pu se propager à la Banque Mondiale et comment
les deux conditionnalités s'articulent entre elles. Ensuite, au niveau
économique, les conditionnalités sont les vecteurs d'une
même idéologie néo-libérale qui est la base de
l'ajustement structurel et de son modèle de développement.
Cependant, c'est concernant l'application de ce modèle qu'apparaissent
les différences. Deux des conséquences de la collaboration ont
été le partage des tâches et le déséquilibre
dans la relation. Cela a abouti à des différences de mise en
oeuvre des conditionnalités en tant qu'instruments de politique
économique. Il faut donc étudier l'adéquation de cette
séparation des tâches et son influence sur l'efficacité
globale du programme, et donc sur la cohérence interne de la double
conditionnalité.
Chapitre I : La
cohérence institutionnelle
La question de la cohérence interne passe
inévitablement par l'analyse de la relation entre les deux institutions
de Bretton-Woods. Comment, en effet, des organisations distinctes aux objectifs
séparés ont pu se retrouver engagées dans le même
champ d'action, puis dans des programmes communs, tout en gardant chacune
leurs spécificités et en assurant la cohérence de ces
programmes ? L'étude des évolutions du Fonds et de la Banque
permet d'expliquer, en partie, la convergence du champ d'action. Le cheminement
chaotique de l'économie et des relations politiques au cours du dernier
demi-siècle a achevé l'ordre de Bretton-Woods et
entraîné une auto-redéfinition des compétences de
chacune des organisations. C'est cette redéfinition sous contrainte de
disparition qui a amené le Fonds comme la Banque a s'orienter vers les
seuls pays qui pouvaient avoir besoin de leur aide, c'est à dire les
pays en développement. C'est ensuite l'idéologie dominante du
néolibéralisme, consolidée dans les années 80 par
les changements de gouvernements anglais et américain, qui a aboutit
à une convergence en termes de technique d'aide à ces pays au
travers du développement de la doctrine de l'ajustement structurel. Ce
rapprochement s'est traduit par une plus grande relation entre les institutions
de Bretton-Woods afin à la fois de préserver leur rôle et
d'assurer une certaine cohérence à leur action.
C'est ce cheminement qui est à l'origine de
l'apparition de la double conditionnalité. En effet, le Fonds et la
Banque étaient déjà liés structurellement depuis
leur création mais leur convergence a entraîné un
approfondissement de ces liens. Afin d'éviter un doublon intégral
et la possibilité d'une fusion, les deux organisations ont
néanmoins cherché à garder une certaine
spécificité en tentant de définir leurs compétences
propres et de créer une complémentarité de façade
au travers d'un processus de collaboration. Mais aucune relation
n'étant parfaite, il est apparu assez vite une sorte de
déséquilibre dans la collaboration. Le FMI a, en effet,
profité de sa magistrature d'influence pour prendre le "leadership" de
l'ajustement structurel au niveau de la définition des programmes
plaçant ainsi la Banque dans un carcan programmatique tout en profitant
de sa puissance matérielle.
Section 1 : Des
institutions indépendantes
La conférence internationale monétaire de
Bretton-Woods en 1944 a donné naissance à deux organisations aux
objectifs distincts. Le FMI était en charge de la mise en place et du
contrôle d'un ordre monétaire stable alors que la BIRD devait
financer la reconstruction de l'Europe d'après guerre et aider au
développement. Les aléas de l'environnement économique et
politique ont entraînés une évolution du rôle de ces
deux institutions qui a abouti à un entrelacement de leurs domaines de
compétences. L'apogée de cette convergence des champs d`action et
des objectifs s'est traduit par la mise en place des programmes d'ajustement
structurel. Les institutions de Bretton-Woods se sont donc trouvées, au
travers de ces programmes, dans une même logique d'aide par la
modification des structures économiques et sociales et à
destination des mêmes pays. Cela a entraîné une plus grande
collaboration entre le Fonds et la Banque mais a aussi laissé
apparaître des divergences quant aux priorités de l'ajustement
structurel et des conditionnalités qui y sont attachées. En
effet, l'économie est un tout et il est impossible de séparer les
différents niveaux d'actions. Le Fonds et la Banque ont donc
été confrontées aux divergences consécutives aux
interactions réciproques de leurs programmes.
Paragraphe 1 : Des
évolutions différentes
Les institutions de Bretton-Woods ont nettement
évolué dans leur rôle depuis la conférence
internationale de 1944. De leurs objectifs initiaux, certains ont disparu,
comme la fixité des parités pour le FMI ou le rôle de
reconstruction de la Banque Mondiale, en raison des évolutions de
l'environnement économique et politique. Chaque organisation s'est
adaptée pour conserver son rôle dans l'ordre économique
international et a modifié son champ de compétence en fonction de
la situation. C'est en raison de cette flexibilité aux changements
permanents de l'économie et de la politique que les deux institutions,
initialement aux objectifs distincts, se sont retrouvées à devoir
oeuvrer dans le même secteur de l'aide aux pays en
développement.
A. L'évolution du
rôle du Fonds Monétaire Internationale
Le Fonds Monétaire International a été
fondé officiellement le 27 décembre 1945, après que 29
pays eurent ratifiés ses Statuts, qui avaient été
adoptés à la conférence monétaire internationale
tenue à Bretton-Woods (New Hampshire, Etats-Unis) du 1er au
22 juillet 1944. Ses activités opérationnelles ont
débuté le 1er mars 1947.
A l'origine, le FMI a été crée pour
mettre en place un ordre monétaire international stable pour
l'après guerre. Pour cela, il a été doté de deux
séries d'objectifs que sont la stabilité des changes
«Promouvoir la stabilité des changes, maintenir entre les Etats
membres des régimes de change ordonnés et éviter les
dépréciations concurrentielles des changes4(*)» et la
convertibilité des monnaies et la liberté des changes
«Aider à établir un système multilatéral
de règlement des transactions courantes entre les Etats membres et
à éliminer les restrictions de change qui entravent le
développement du commerce mondial5(*) ». . Concernant la
stabilité des changes, pendant les premières années
d'existence du FMI, tous les Etats membres s'engageaient, au moment de leur
adhésion, à utiliser la même méthode pour calculer
la valeur de change de leur monnaie; à savoir le système dit des
parités fixes. Les pays membres maintenaient la valeur de leur monnaie
à l'intérieur d'une marge de 1 % de part et d'autre de la
parité et, s'ils estimaient qu'une modification du régime de
change pouvait être profitable à leur économie, ils
étaient tenus d'en discuter avec les autres pays membres par
l'intermédiaire du FMI et d'obtenir leur consentement avant d'agir. De
plus, les Etats devaient maintenir l'unicité de ce taux.
Pour ce qui est de la convertibilité des monnaies, les
Etats membres s'engageaient à assurer la libre convertibilité de
leur monnaie dans les autres monnaies et à éliminer
progressivement les restrictions de change.
Le système fonctionna correctement jusqu'au
début des années 70. Mais, lorsque le système
d'étalon de change-or théorique, que les pays avaient
adopté suite à Bretton-Woods, trouva sa limite dans le
déficit constant de la balance des paiements des Etats-Unis
conjugué au prix fixe de l'or, il commença à vaciller. Le
point d'équilibre or-dollar fut atteint en 1959. Si l'on rajoute
à cela la guerre du Vietnam, le choc pétrolier et l'inconstance
monétaire américaine, on arrive à la déclaration de
Nixon du 15 août 1971 mettant fin au régime d'étalon de
change-or.
La disparition de ce système entraîna dans les
années qui suivirent des vagues de spéculation qui
provoquèrent un flottement généralisé des monnaies
et donc la fin du régime de parité. Cette situation
monétaire allait être avalisée lors du second amendement
aux statuts de FMI qui laisse un très large choix aux pays de leur
système de change et donc, indirectement, autorise les changes
flottants.
Les années 70 ont marqué aussi une
deuxième déconvenue pour le FMI en ce qui concerne son rôle
d'assistance financière dans la poursuite de ses objectifs. En effet,
l'afflux massif de pétrodollars a permis aux pays qui désiraient
rétablir leur balance des paiements de trouver des financements plus
importants et à de moindres conditions auprès des marchés
financiers internationaux. Cependant, il faut bien voir que les marchés
ne prêtent pas à tout le monde et le FMI s'est retrouvé
dans un processus de sélection adverse où il a "perdu" les pays
développés et conservé uniquement le tiers monde. Les
années 70 ont donc marqué un effondrement progressif de la
capacité du FMI à remplir son rôle originel. Mais au lieu
de dépérir et disparaître, ce dernier, grâce à
des interprétations de ses statuts, a réussi à se reforger
une crédibilité et un rôle important dans la
communauté financière internationale.
Déjà, à partir de 1963, le Fond a
commencé à créer des facilités spécifiques
pour répondre aux difficultés de ses Etats-membres. Certaines
sont déjà entièrement destinées aux pays en
développement de par leurs objectifs, comme par exemple la
facilité de financement compensatoire qui s'adresse aux pays dont la
balance des paiements dépend fortement de l'exportation d'une
matière première.
Cette utilisation de la théorie des pouvoirs implicites
par le Fonds a même été officialisée lors des
amendements des statuts qui désormais lui permettent d'adopter
« des politiques d'utilisation de ses ressources
générales, notamment en matière d'accords de confirmation
ou d'arrangements similaires et peut adopter, pour des problèmes
spéciaux de balance des paiements, des politiques spécifiques qui
aident les Etats membres à surmonter les difficultés qu'ils ont
à équilibrer leur balance des paiements, conformément aux
dispositions des présents Statuts, et qui garantissent de manière
adéquate le caractère temporaire de l'utilisation des ressources
générales du Fonds6(*). ».
La réorientation du Fonds vers les pays en
développement ainsi que ses nouveaux mécanismes se sont
dirigés vers «les créneaux financiers laissés
inoccupés par la Banque Mondiale7(*)».
Le Fonds s'est même spécialisé plus tard
sur certaines régions (bien qu'il ne le reconnaisse pas en tant que tel)
comme les PECO avec la facilité de transformation systémique. Ce
créneau pose potentiellement des problèmes de coexistence avec la
BERD dont le rôle est d'aider à la transition économique et
démocratique de cette région.
Le FMI a aussi regagné de l'influence grâce
à son pouvoir de contrôle. En effet, la surface financière
du Fonds devenant de plus en plus limitée en comparaison des
transactions économiques internationales, il a su, en quelque sorte,
vendre son pouvoir de contrôle aux institutions bancaires
internationales. En effet, les prêts bancaires internationaux aux pays en
développement dépendent de plus en plus souvent de la mise en
place de programmes de stabilisation du FMI8(*).
Le Fonds s'est donc transformé passant d'une
organisation monétaire internationale garante de la stabilité des
changes à une organisation d'assistance financière aux pays en
voie de développement ce qui va influencer le fonds et la forme de sa
conditionnalité
B. L'évolution du
rôle de la Banque Mondiale
Le Banque Internationale pour la Reconstruction et le
Développement (BIRD), tout comme le Fonds, a été
fondée à la conférence monétaire internationale
tenue à Bretton-Woods (New Hampshire, Etats-Unis) du 1er au
22 juillet 1944. Ses activités opérationnelles ont
débuté le 25 juin 1946.
Destinée par Keynes, dans son aspect reconstruction,
à être l'institution en mesure de prêter des capitaux aux
pays qui avaient été dévastés par la guerre pour
leur permettre de relever leurs économies, la Banque, du moins au
début, aurait dû se concentrer sur la reconstruction
européenne. Mais la Banque n'a en fait pratiquement pas participé
à la reconstruction de l'Europe d'après-guerre. C'est le plan
Marshall, mis sur pied par les Etats-Unis seuls, qui a rempli ce rôle. La
Banque a destiné seulement quatre prêts à la reconstruction
pour un total de 497 millions de dollars tandis que le plan Marshall avait
transféré 41,3 milliards de dollars. En tant qu'organisation
internationale pour la reconstruction, la Banque n'a donc quasiment pas
existé.
Concernant l'aspect développement, la Banque est
chargée d'assurer le «développement des ressources
productives des Etats membres, contribuant par-là à
améliorer, sur leurs territoires, la productivité, le niveau de
vie et la condition des travailleurs9(*).».
Les économistes de la Banque mondiale des années
60 appartenaient au même milieu et partageaient le même credo
réformiste que les gouvernements de J.F. Kennedy et L. Johnson. Et ce,
non seulement parce que l'économie du développement était
une ramification de l'économie keynésienne, mais aussi parce que
le keynésianisme servait de base idéologique à ces
économistes qui voyaient dans l'intervention administrative dans
l'économie la solution aux problèmes économiques. Jusqu'en
1973, le raisonnement de la Banque a été que les pays en
développement devaient être soutenus dans leurs efforts de
croissance. Or l'aide publique au développement (APD) accordée
par les pays développés était (et est encore) totalement
insuffisante. La Banque devait donc intervenir dans cette situation pour
prêter des sommes importantes aux pays en développement pour
qu'ils atteignent un rythme de croissance et des revenus suffisants pour
rembourser leurs dettes.
A partir de 1973, suite à l'augmentation du prix des
produits pétroliers, le raisonnement tenu par la Banque peut être
résumé de la manière suivante : en empruntant, les pays en
développement vont pouvoir développer leurs infrastructures,
augmenter leur production d'énergie et accroître leur production
destinée à l'exportation. Prenant comme hypothèse que les
prix des produits exportés par ces pays sur le marché mondial
allaient augmenter, les recettes d'exportation allaient donc croître de
façon importante grâce à l'augmentation cumulée des
quantités et des prix. Cela devait permettre aux pays en
développement de payer le service de la dette et de réinvestir
une partie de leurs revenus dans l'amélioration de leur industrie
d'exportation. Ce raisonnement a été contredit par la
réalité avec la chute importante des prix des produits
exportés dans les années 80 conjuguée à la
progression exponentielle des taux d'intérêt dans la même
période
Cette stratégie prit donc fin avec l'explosion de la
crise de la dette mais aussi avec l'arrivée de R. Reagan au pouvoir en
1981. L'arrivée d'une équipe néo-conservatrice à la
Maison Blanche plaça la Banque mondiale en porte-à-faux
idéologique avec Washington, à un moment où l'endettement
du tiers monde remettait en cause ses pratiques expansionnistes. Elle fut alors
perçue comme une bureaucratie dépensière désireuse
de se substituer au secteur privé et fut donc « remise sur le
droit chemin ».
L'économie restant la science majeure du
développement, une nouvelle génération
d'économistes, proches de l'école de Chicago, prit la
relève. Les concepts libéraux, qui voient dans les acteurs
publics des parasites attachés à leurs privilèges et
entravant le fonctionnement harmonieux des marchés, deviennent la ligne
officielle. Les équipes d'économistes furent changées et
les anciennes considérées comme
«manquant des compétences économiques et
techniques appropriées et restant attaché aux pratiques
étatistes du passé 10(*) ».
La révolution libérale de la Banque se
caractérisa aussi par un changement dans les techniques
employées. En effet, la Banque va aller au-delà de son approche
traditionnelle, qui était auparavant essentiellement basée sur le
financement de projets, pour se diriger vers une approche de financements de
programmes.
Ce qu'on a appelé le consensus de Washington, et qui va
orienter l'ensemble des politiques économiques mondiales vers les
objectifs d'austérité budgétaire et de
libéralisation du commerce et des capitaux, refléta la
convergence des stratégies adoptées par ces nouveaux
économistes, les néo-conservateurs, et les milieux financiers. La
nouvelle idéologie de la Banque et les politiques d'ajustement
structurel traduiront ces intérêts en termes de
développement. De plus, après 1982, avec le tarissement total des
prêts des banques commerciales aux pays en développement, la
Banque se retrouve en position de force, celle du prêteur
préférentiel et donc capable d'imposer ces nouvelles conditions
qui vont au-delà de son champ d'action précédent. La
Banque va donc utiliser cette nouvelle position afin de mettre en place sa
propre conditionnalité qui va alors s'ajouter à celle du FMI pour
créer la double conditionnalité.
Paragraphe 2 : La
convergence des objectifs
L'évolution des rôles des deux institutions de
Bretton-Woods a donc abouti à ce qu'elles jouent plus ou moins sur le
même terrain de l'aide aux pays en développement. Cette
convergence des rôles sur la scène internationale conjuguée
à la mise en place dans les années 80, avec les arrivées
de M. Thatcher et R. Reagan, d'une idéologie axée sur le
néolibéralisme, a entraîné l'utilisation de la seule
théorie du développement compatible, c'est à dire
l'ajustement structurel. Cette technique d'aide va vite devenir la
panacée car, au surplus, elle déresponsabilise les deux
organisations de leurs résultats médiocres antérieurs
(voire de leurs erreurs grossières d'appréciation) en affirmant
que seul le structurel aurait pu empêcher la crise. Mais derrière
l'appellation commune de l'ajustement structurel, il semble persister des
différences notables dans les visions qu'a chaque organisation des
priorités structurelles des pays concernés, notamment au niveau
de la coordination micro-macroéconomique.
A. L'ajustement structurel
comme apogée
Il n'y a pas de définition officielle de l'ajustement
structurel mais on peut le définir par son objectif qui est de
rétablir à court terme l'équilibre entre les revenus et
les dépenses d'un pays par des mesures économiques au niveau
national. À plus long terme, ces programmes doivent également
aboutir à une restructuration économique telle que les secteurs
à potentiel soient renforcés. Certaines mesures se situent au
niveau macro-économique: rétablissement de l'équilibre de
la balance des paiements, ajustement des cours de change, limitation du
déficit budgétaire, stimulation des investissements productifs,
amélioration de l'environnement d'investissement, suppression des
obstacles au libre marché, etc. D'autres se situent au niveau
micro-économique ou sectoriel avec le développement de
l'infrastructure pour les secteurs prometteurs, l'aide à la gestion,
l'optimisation des débouchés, etc.
C'est la Banque Mondiale qui a, en premier, mis en place
l'ajustement structurel. En 1979 R. McNamara, alors président de la
Banque, proposa l'ajustement structurel comme voie de développement
dans un discours devant les Nations Unies. En 1980, la BIRD créa les
prêts à l'ajustement structurel avec un prêt de 200 millions
de dollars à la Turquie.
Le FMI la suivit quelques années plus tard, en 1986,
avec sa facilité d'ajustement structurel destinée à ses
«pays membres à faible revenu qui connaissent des
difficultés persistantes de balance des paiements ne pouvant être
corrigées que par des programmes d'ajustement macro-économique
à moyen terme.11(*)». Cependant, dès 1974, le FMI avait mis
en place le mécanisme élargi de crédit qui devait aider
les pays membres qui rencontraient des problèmes structurels de balance
des paiements. C'est donc en quelque sorte l'ancêtre de l'ajustement
structurel.
Mais c'est la crise de l'endettement qui a donné son
véritable envol à l'ajustement structurel. En effet, la dette est
un phénomène structurel puisqu'elle résulte de l'addition
des déficits budgétaires. Les deux institutions de Bretton-Woods
ont été quelque peu responsable de cet état de par leurs
politiques mais surtout n'ont pas su prévoir l'éclatement de
cette crise.
La Banque dans son rapport annuel sur le développement
dans le monde de 1981 expliquait que « Ces tendances indiquent
qu'il sera plus difficile pour les pays en voie de développement de
gérer leur dette, mais elles n'annoncent pas de problème
généralisé, ce que confirment les projections de balance
des paiements établies pour les années 1980 en fonction des
scénarios probables12(*)» et garda son optimisme en 1982 et
même en 1983 alors que la crise mexicaine avait déjà
éclaté.
Le Fonds, lui aussi, a connu les mêmes problèmes
d'interprétation des signes avant-coureurs de la crise de la dette.
Cette responsabilité indirecte, conjuguée au
fait que la crise remettait en cause leurs politiques précédentes
et même leurs légitimités respectives, a fait que les
institutions soeurs ont opté pour l'ajustement structurel. Son double
avantage était de les dédouaner de la situation puisque cela
relevait de problèmes structurels dont elles ne s'étaient pas
occupées jusqu'alors mais aussi de leur donner un nouvel outil les
mettant en position de force dans la poursuite de leurs objectifs
respectifs.
En effet, la Banque disposait ainsi d'un formidable outil de
développement tant dans sa nouvelle orientation de financement de
programmes puisqu'elle pouvait ainsi influer sur la structure même du
système socio-économique, que dans son ancienne orientation
financement de projets puisqu'elle pouvait modifier plus facilement
l'environnement des projets. Le Fonds, quant à lui, disposait ainsi d'un
formidable outil de régulation des problèmes structurels de
balance des paiements.
De plus, l'ajustement structurel va se révéler
être également un formidable vecteur de la nouvelle
idéologie économique des institutions de Bretton-Woods.
Les programmes d'ajustement structurels vont donc se
développer au sein du Fonds et de la Banque à partir des
années 80 et 90. La FAS qui impliquait déjà les deux
institutions va se transformer en Facilité d'Ajustement Structurel
Renforcée (FASR) dès 1987 puis va s'orienter
spécifiquement vers la dette avec l'initiative en faveur des pays
pauvres très endettés (PPTE) de 1997 prononcée
conjointement par les directeurs du Fonds et de la Banque.
On assiste donc, au travers de l'ajustement structurel,
à une véritable convergence des politiques des institutions de
Bretton-Woods. On pourrait même aller plus loin en parlant de convergence
des objectifs pour ces deux institutions. Et cela va se traduire par le fait
que l'ajustement structurel va devenir le terrain privilégié de
la double conditionnalité. Cependant, l'ajustement structurel peut
cacher dans une même politique des divergences d'objectifs.
B. Des divergences dans la
convergence ?
L'ajustement structurel a été vu comme la
panacée, du moins jusqu'au début des années 90. Il est
apparu à cette période que les objectifs propres des deux
institutions n'étaient pas forcément réalisables au niveau
d'une politique commune.
Un premier biais se trouve au niveau du manque d'harmonisation
qui provient pour une large part de ce que l'adéquation entre la
politique au niveau macro-économique et la politique au niveau
micro-économique est difficilement réalisable à cause de
la connaissance insuffisante des rapports socio-économiques. En effet,
la prévisibilité des conséquences macro-économiques
sur les objectifs micro-économiques est très imparfaite (et
inversement). Cela est dû à l'utilisation, par le Fonds et la
Banque, de modèles mathématiques trop généraux et
donc trop restrictifs dans leurs hypothèses qui entraînent souvent
des corrélations erronées. De plus, l'information sur la
structure socio-économique des pays en développement,
indispensable à l'alimentation de ces modèles, est souvent
limitée du fait du manque de moyens de ces pays.
Il existe quelques exemples simples de ce
phénomène. Le FMI demande souvent la dévaluation de la
monnaie des pays en ajustement pour favoriser la compétitivité
des entreprises exportatrices. Cela semble être une mesure de bon sens
économique mais les résultats peuvent être contraire en
fonction de la structure socio-économique. En effet, la
dévaluation aboutit aussi à une augmentation des prix de produits
d'importation essentiels, pour l'agriculture par exemple, tels que les
pièces de rechange, les engrais et le matériel agricole, ce qui
peut porter un coup à la production locale et au développement
des capacités productives de ces secteurs qui peuvent être
prometteur pour l'action de la Banque. Il faut donc au préalable
connaître la structure du secteur et sa dépendance aux
importations, ce qui semble difficile à établir notamment dans
des systèmes d'agriculture familiale. Un autre exemple concerne la
privatisation des entreprises d'Etat ou parapubliques pour accroître leur
efficience et leur compétitivité. En effet, certains secteurs
(para)publics peuvent être gangrenés par une nomenklatura locale
proche du pouvoir dont les salaires ne sont en fait qu'une rente et où
l'entreprise n'a pas besoin d'être productive. Ces mesures sont donc
théoriquement souhaitables. Mais cette politique de privatisation peut
connaître des résultats inverses en remplaçant seulement le
monopole étatique par des monopoles privés. En effet, un certain
manque de transparence, que connaissent certains pays en développement,
peut aboutir à prendre des nouveaux investisseurs privés locaux
qui ne sont que la partie privée du pouvoir public en place. Il faut
donc ici connaître la structure socio-économique de la relation
entre le pouvoir politique et économique, ce qui semble également
difficile en raison du manque de transparence des organisations
hiérarchiques de certains pays en développement.
Ce biais pose des problèmes importants mais il
résulte uniquement d'imprécisions dans la programmation et ne
remet pas vraiment en cause la poursuite commune de l'ajustement structurel.
Un deuxième biais dans la convergence des objectifs des
deux institutions de Bretton-Woods est plus grave car il concerne des
divergences d'objectifs court terme - long terme.
Le démantèlement des services publics et de
l'investissement public par le FMI pour réduire les déficits
budgétaires (donc à court terme) peut entraîner des
conséquences négatives sur le développement de certains
secteurs économiques à potentiel (donc à moyen/long terme)
pour la Banque.
Par exemple, la privatisation des banques publiques
spécialisées dans certains secteurs et offrant des prêts
préférentiels ou encore le dégraissage dans les services
publics destinés à l'éducation ou à
l'investissement dans certaines structures peut amener à compromettre le
potentiel de ces secteurs.
Un autre exemple dans le sens inverse est la politique
productiviste basée sur les secteurs exportateurs prônés
par la Banque. En effet, de nombreux pays en développement sont
concurrents sur les mêmes secteurs de matières premières.
Et donc la logique productiviste de la Banque et la volonté de
conquérir des parts de marché incitent à une concurrence
internationale féroce qui amène inexorablement à des
baisses de cours de ces matières. Lorsque la baisse de cours est
proportionnellement plus grande que la hausse de production, ce qui arrive
souvent, les revenus d'exportations du pays diminuent et de là
même, la balance des paiements du pays se retrouve touchée.
On se retrouve donc ici devant une divergence grave entre les
objectifs des deux institutions.
La logique de développement de la Banque et la logique
de stabilité financière du Fonds, même
insérées dans l'idéologie commune du libéralisme ou
dans l'objectif commun de la réduction de la dette, montrent leurs
limites en terme de compatibilité. En tant que vecteur de ces objectifs,
les conditionnalités vont se trouver elles aussi tiraillées par
ces divergences ce qui explique que il existe vraiment une double
conditionnalité dans les programmes et non pas simplement une
conditionnalité conjointe.
Une solution à ce problème peut être bien
entendu une plus grande collaboration mais cela est il suffisant ?
Section 2 : Les relations
entre les institutions de Bretton-Woods
La relation entre les institutions de Bretton-Woods est
caractérisée par une grande proximité. Elles sont en effet
issues de la même conférence, ont leur siège dans la
même ville, organisent leur assemblée annuelle ensemble et ont un
modèle d'organisation assez proche. Cette dimension structurelle est
renforcée par les liens statutaires qui les lient et par la mise en
place de comités communs. Mais c'est la convergence des objectifs de ces
organisations qui va être le déclencheur de l'approfondissement de
la relation. L'apogée de l'ajustement structurel va se traduire par une
véritable collaboration dans la gestion des programmes et des
compétences respectives. Mais cette dimension commune va aussi
entraîner une définition du rôle de chacune au sein du
couple. Et c'est à ce niveau que s'est créée une autre
limite dans la relation du fait du déséquilibre dans le
leadership de l'ajustement structurel. Il semble, en effet, que le FMI ait
réussi à asseoir une certaine domination sur la conception des
programmes laissant la Banque uniquement s'exprimer dans un carcan
prédéfini. Ce leadership ne tient pas compte, en outre, du fait
que c'est la Banque qui a la puissance matérielle nécessaire au
succès de ces programmes notamment grâce à sa
présence sur le terrain.
Paragraphe 1 : La
collaboration entre les institutions de Bretton-Woods
L'historique de la collaboration entre le FMI et la Banque
Mondiale montre une certaine irrégularité dans
l'approfondissement des relations entre les institutions de Bretton-Woods. En
effet, leur relation est immédiate du fait de leur création
commune lors de la conférence monétaire internationale de juillet
1944. Il existe donc une part structurelle dans leur relation dont une grande
partie est inhérente aux liens juridiques issus de Bretton-Woods que ce
soit au travers des statuts les liant ou encore de la similitude dans leur mode
de fonctionnement.
Ce caractère structurel s'est ensuite approfondi
légèrement au cours de leur histoire par la mise en place de
divers organes conjoints. Mais l'essentiel de l'avancée de la relation
repose sur une collaboration progressive dont l'ajustement structurel a
été un formidable accélérateur. La mise en place de
programmes communs a en effet «forcé» ces institutions
à développer une véritable collaboration afin, notamment,
de se répartir les compétences et donc, par ce processus, de
différencier leur conditionnalité..
A. La relation
structurelle
La relation structurelle entre les deux institutions remonte
bien évidemment à leur création commune lors de la
conférence de Bretton-Woods. Les statuts des deux institutions sont les
parties d'un même plan global de reconstruction d'un ordre
économique et financier international. La troisième partie de ce
plan était la création d'une Organisation Internationale du
Commerce qui finalement ne vit pas le jour et aboutit au GATT.
Le Fonds et la Banque sont des organisations internationales
distinctes avec chacune un statut juridique propre, bien que certaines
dispositions négociées pour les statuts du Fonds lors de
Bretton-Woods aient été incorporées à ceux de la
Banque13(*). De plus, une
autre similitude est que les organes directeurs des deux institutions ont
été crées sur le même modèle14(*) et tiennent leur
assemblée annuelle ensemble.
De plus, il existe des liens juridiques entre les deux
institutions. En effet, l'appartenance à la Banque Mondiale n'est
possible statutairement que pour les pays déjà membres du
FMI15(*). De plus si un
pays membre de la Banque quitte le FMI, son appartenance cesse dans les trois
mois à moins d'un vote avec majorité des ¾ lui permettant
de rester16(*).
Les statuts du FMI contiennent aussi un principe de
collaboration avec les autres organisations internationales : «Le
Fonds collabore, dans le cadre des présents Statuts, avec les
organisations internationales de caractère général ainsi
qu'avec tout organisme international public ayant des fonctions
spécialisées dans des domaines connexes. 17(*)». Les statuts de la
Banque comprennent aussi un principe identique18(*). La notion de domaine connexe renvoie explicitement
à la relation entre les institutions de Bretton-Woods.
Au-delà de ces liens juridiques initiaux, la relation
structurelle s'est développée aussi grâce à la mise
en place de comités conjoints ou «joint committees»
sur des questions spécifiques.
En 1974 fut crée le Comité ministériel
conjoint des Conseils des gouverneurs de la Banque et du Fonds sur le transfert
de ressources réelles aux pays en développement pour conseiller
les conseils des gouverneurs des deux institutions sur les questions de
développement. Ce comité conjoint est devenu le Comité du
Développement. Les deux institutions de Bretton-Woods ont aussi
crée l'Institut multilatéral d'Afrique (avec la BAfD).
Il existe aussi d'autres comités plus administratifs
comme le comité mixte ad hoc chargé des dispositions
pour l'Assemblée annuelle des Conseils des gouverneurs de la Banque et
du Fonds, le comité mixte de la procédure et le
secrétariat commun (pour les assemblées) ou encore le
comité conjoint chargé d'examiner la rémunération
des administrateurs et des administrateurs suppléants.
Un dernier point intéressant de la relation
structurelle entre les institutions soeurs a été la
définition des attributions de chacune sur les problèmes communs
avec les mémorandums parallèles de la Banque et du Fonds de 1966.
Ces derniers établissent les règles de coopération et de
responsabilité des deux institutions afin de garantir une certaine
cohérence entre elles. Les paragraphes 4 et 5 définissent les
responsabilités premières de chaque institution19(*). Le Fonds est responsable des
taux de change, des déséquilibres de balance des paiements et de
l'évaluation et de l'assistance dans les programmes de stabilisation. La
Banque, quant à elle, est responsable de l'élaboration des
programmes et projets de développement. Chaque institution s'engage
à ne pas critiquer les positions de sa consoeur sur ses
responsabilités premières. Ce mémorandum fut
complété par le premier mémorandum conjoint du Fonds et de
la Banque en février 1970.
Ces principes furent développés dans le
concordat de 198920(*) et
dans le «Report of the Managing Director and the President on Bank-Fund
Collaboration» de 1998.
Il existe donc bien une relation structurelle entre ces deux
institutions, seulement on peut se sentir déçu de son manque de
développement avec la convergence croissante des objectifs et des
politiques des deux institutions. En effet, les deux institutions semblent
être en conflit pour maintenir leurs attributions et même les
accroître. Une trop grande relation structurelle semble en effet
être une menace de fusion des institutions comme cela avait
déjà été proposé lors de la
conférence de Bretton-Woods puis plus récemment par le rapport
Meltzer21(*) ou par
D.Carreau22(*). C'est donc
pourquoi le Fonds et la Banque se sont engagées dans une collaboration
progressive plus informelle et plus flexible.
B. Une collaboration
progressive
Après les mémorandums de 1966 et 1970 qui
reconnaissaient le besoin de collaboration pour gérer les
enchevêtrements de compétences, les institutions de Bretton-Woods
ont dû mettre en application cette collaboration de façon
progressive, pour répondre à l'accroissement de leurs
chevauchements.
Le véritable chevauchement, et donc la véritable
collaboration, arrive avec l'ajustement structurel. Le premier mouvement
significatif vient du FMI avec la création en 1974 du mécanisme
élargi de crédit qui place les pays en développement comme
premiers "clients". Le second mouvement vient de la Banque qui en 1979
crée les prêts à l'ajustement structurel et se lance donc
dans l'approche programmatique. Ce chevauchement aboutit en 1986 à ce
que le FMI crée la FAS dont l'élaboration des programmes et leur
évaluation sont mises en place par collaboration entre les services du
FMI et de la Banque Mondiale. Cet aspect de la FAS est novateur car il
«officialise la collaboration des deux institutions de
Bretton-Woods23(*)».
La collaboration entre les deux institutions va se poursuivre dans la mise
en place des documents-cadres de politique économique (DCPE) avec la
création de la Facilité d'Ajustement Structurel Renforcé
(FASR) en 1987. C'est cette programmation commune qui va être la base de
la mise en place de la double conditionnalité.
Dans le secteur financier et bancaire qui est un secteur de
compétences partagées, la collaboration est passée par la
création, en septembre 1998, d'un comité de liaison chargé
d'accroître les échanges d'informations entre les deux
institutions et d'assurer une meilleure coordination de leurs programmes pour
optimiser l'utilisation des ressources. En mai 1999, le comité a
lancé un programme pilote d'évaluation du secteur financier
(PESF) dont l'objectif est d'améliorer la couverture et l'analyse des
systèmes financiers des pays membres par une collaboration plus
étroite entre la Banque mondiale et le FMI.
Mais l'apogée de la collaboration va se trouver dans le
redéploiement de la FASR vers la réduction de la dette avec
l'initiative PPTE. Cette dernière a été prise
conjointement par le Directeur Général du FMI et le
Président de la Banque Mondiale en 1996.
Son objectif est « de ramener l'endettement de
ceux qui poursuivent de bonnes politiques économiques à un niveau
soutenable, afin d'éviter que le poids élevé de leur dette
et des charges de services excessives ne compromettent leurs efforts
d'ajustement et de réformes24(*)» et va marquer un nouveau pas dans la
relation entre les institutions de Bretton-Woods, puisqu'il s'agit d'une
collaboration pour l'ensemble du programme en non plus seulement pour le DCPE.
On passe donc à un stade supérieur pour la double
conditionnalité car cette dernière s'élargit donc à
l'ensemble de la programmation.
Cette collaboration a été renforcée avec
l'instauration d'un comité de coordination chargé de s'assurer de
la prise en compte, dans les programmes du FMI, des conséquences
sociales des programmes d'ajustement et, dans les programmes de la Banque, de
leur cohérence avec le cadre macro-économique.
En septembre 1999, le Comité du développement a
mis en place un programme plus large visant à renforcer l'initiative. La
base de ce nouveau programme est la réduction de la pauvreté sous
la forme de Cadre Stratégiques de Lutte contre la Pauvreté
(CSLP). Ce programme a entraîné la transformation de la FASR en
Facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance
(FRPC). Ce cadre est de nouveau commun aux deux institutions.
En effet, dans l'élaboration des CSLP «les
services du FMI et de la Banque mondiale devront agir en étroite
concertation pour présenter aux autorités nationales une approche
globale cohérente, en se concentrant respectivement sur leur domaine de
compétence traditionnel25(*)».
La répartition des compétences est la
suivante : la Banque prend l'initiative pour tout ce qui a trait aux
problèmes de pauvreté, tandis que le Fonds se concentre sur les
aspects macro-économiques. Cependant, le risque de chevauchement ou
même de compétition entre les organisations est abordé
même dans les documents officiels prouvant que cette collaboration n'est
pas entièrement naturelle. En effet, dans un document sur les questions
opérationnelles précisant les attributions de chacun, il est
précisé que « cependant, conformément aux
points de vue exprimés par le Conseil, les services du FMI ne
chercheront pas à ajouter ou à substituer leurs travaux à
ceux la Banque en matière d'analyse de la pauvreté ou
d'élaboration des politiques sociales26(*) ».
Et c'est cette différenciation partielle des objectifs
et des rôles qui explique l'existence d'une double conditionnalité
en lieu et place d'une conditionnalité commune.
Cependant, la collaboration entre les deux institutions est
indéniablement une avancée positive, mais il reste à
analyser si la balance de pouvoir dans cette relation est
équilibrée et permet à chacune d'atteindre ses
objectifs.
Paragraphe 2 : Une
relation déséquilibrée
La collaboration entre les institutions de Bretton-Woods, en
dépit de ses limites, est une avancée non négligeable.
Cependant, les relations équilibrées sont parfois les plus dures
à mettre en oeuvre. Ceci n'implique pas forcément un jugement de
valeur mais plutôt une prise en compte des spécificités de
chacune. En effet, de par leurs objectifs respectifs et comme
conséquence de l'approfondissement de leur collaboration, chaque
institution s'est trouvée une place. Le problème ici est qu'il
semble plus que la Banque ait pris la place qui lui restait dans la le champ de
la relation qu'elle n'ait elle-même déterminé son
rôle dans le couple. Le FMI a, en effet, grâce à sa plus
grande influence auprès des pays développés et des grands
bailleurs de fonds, pris une certaine ascendance au niveau de la
détermination des programmes. Cette domination sur l'approche globale
lui a, de plus, conféré une sorte de droit de regard sur la
partie de la Banque sous prétexte de mieux prévoir les
interactions ou divergences possibles. Par contre, le FMI n'ayant pas les
moyens matériels, financiers et humains, d'assurer la mise en oeuvre et
le suivi de ces programmes, il a laissé à la Banque une grande
partie de l'analyse et du contrôle des programmes sur le terrain.
A. La domination
programmatique du FMI
Sur l'exemple de la lutte contre la pauvreté, la
répartition théorique des compétences est clairement
établie. «Les services du FMI auront l'initiative dans les
domaines qui relèvent traditionnellement de leur compétence. Cela
comprend les efforts visant à promouvoir l'adoption de politiques
macro-économiques prudentes, les réformes structurelles connexes,
portant par exemple sur le taux de change et la politique fiscale, et les
questions relatives à la gestion des finances publiques, à
l'exécution du budget, à la transparence des finances publiques
ainsi qu'à l'administration fiscale et douanière. Les services de
la Banque seront en première ligne pour conseiller les pouvoirs publics
dans l'élaboration des stratégies de lutte contre la
pauvreté, notamment en ce qui concerne le nécessaire travail de
diagnostic sous forme d'évaluations de la pauvreté et de suivi
des indicateurs pertinents, la mise au point de stratégies sectorielles,
les réformes visant à renforcer l'efficacité et la
capacité de réaction des institutions ainsi que la mise en place
de dispositifs de protection sociale; ils devront aussi aider les
autorités à évaluer les dépenses prioritaires
visant à produire des résultats précis en matière
de lutte contre la pauvreté27(*)». Cette répartition peut sembler,
à première vue acceptable et représentant les attributions
de chacun. Cependant, il faut s'attacher aux interactions possibles entre les
deux domaines de compétences. En effet, si la Banque doit donc mettre en
place des politiques sectorielles, améliorer le fonctionnement des
institutions publiques ou encore créer une protection sociale, comment
peut elle le faire quand c'est le FMI qui dicte la gestion des dépenses
publiques ou la politique fiscale ?
La Banque se retrouve donc dépendante des mesures
macro-économiques du FMI ce qui a crée des dissensions dans la
collaboration des deux institutions.
En effet, M. James Wolfensohn, président de la Banque a
déclaré dans un discours en 1998 : «Nous avons appris
que, s'il est essentiel à tous égards d'élaborer des plans
macro-économiques bien adaptés, assortis de politiques
budgétaires et monétaires efficaces, les plans financiers ne
suffisent pas (...), le développement n'est pas simplement une question
de budget et de saine gestion financière. (...) Le développement
n'est pas simplement une question de remèdes de technocrates (...),
combien de fois avons-nous adopté un point de vue trop étroit des
transformations économiques nécessaires, pour nous concentrer sur
les résultats macro-économiques ou sur les grandes
réformes telles que la privatisation, sans prêter attention
à l'infrastructure institutionnelle fondamentale sans laquelle aucune
économie de marché ne peut fonctionner ? (...) combien de fois
avons-nous poursuivi un objectif purement économique, sans nous
arrêter suffisamment sur les aspects sociaux, politiques,
environnementaux et culturels ?28(*) ». Ceci ressemble à une
critique peu déguisée de l'action du FMI pour le
développement et contre la pauvreté. Il semble donc que ce soit
l'aspect macro-économique qui prime sur le micro-économique et le
sectoriel.
La Banque doit donc «opérer dans les limites
d'un ensemble de paramètres devant satisfaire le FMI29(*)». Le FMI
possède donc, au travers de son objectif de stabilisation
macro-économique, un outil de contrôle des politiques de la
Banque. Il existe donc une sorte de priorité idéologique et
programmatique donnée au Fonds. De plus, la magistrature d'influence du
FMI lui donne un autre avantage dans la conception des programmes puisque de
plus en plus de programmes font intervenir d'autres bailleurs de fonds
internationaux et c'est sa validation qui sera aussi suivi par ces derniers.
Les banques privées30(*), les Etats et les autres organisations
internationales31(*)
posent en effet souvent comme pre-requis à leur aide ou à leur
participation dans un programme la mise en place d'un plan de stabilisation
établi par le FMI.
B. La présence
matérielle de la Banque
Une simple comparaison de chiffres peut rendre compte du
déséquilibre qui existe dans la présence matérielle
des deux institutions de Bretton-Woods. En effet, au 31 décembre 1999,
le FMI32(*) comptait 2.297
employés: 693 agents auxiliaires et 1.604 cadres (dont deux tiers
d'économistes) reparti dans 4 pays alors que la Banque33(*) avait des bureaux dans 67 pays
et employait environ 10 600 personnes.
De plus l'implication financière des deux institutions
dans les projets communs est inégale.
Pour l'initiative PPTE34(*), la Banque assure un financement de 6.3 milliards de
dollar alors que le FMI seulement de 2.3.
Sur l'ensemble de ces activités pour l`année
2000, le Fonds a autorisé l'utilisation de 6.3 milliards de DTS alors
que la Banque en a prêté plus de 15 milliards.
Toujours à la fin de l'exercice 2000, l'ensemble des
engagements en cours pour la Banque était de 118 milliards de dollars
pour un portefeuille de 1608 opérations alors que le Fonds ne totalisait
qu'un peu moins du quart (58.9 milliards de DTS) mais pour seulement une
cinquantaine d'accords.
A la lumière de ces chiffres, on peut donc se demander
comment fait le FMI pour exercer une domination programmatique alors que c'est
la Banque Mondiale qui est présente sur le terrain et qui a le pouvoir
financier. C'est effectivement la magistrature d'influence du FMI et la
répartition des tâches qui entraînent ce
résultat . Il faut donc regarder de plus près cette
répartition aussi bien au travers de l'exemple de la FRPC citée
précédemment que des CSLP. «Le personnel du Fonds
s'occupera surtout des questions relevant de ses responsabilités de son
mandat et traditionnels, s'efforçant de promouvoir des politiques
macro-économiques prudentes ; des réformes structurelles dans les
domaines connexes, tels que le régime des changes et la politique
fiscale ; et l'amélioration de la gestion des finances publiques, de
l'exécution du budget, de la transparence budgétaire et de
l'administration fiscale et douanière. Le personnel de la Banque
s'occupera des activités de diagnostic, telles que les
évaluations de la pauvreté et leur suivi, la formulation de
stratégies sectorielles, les réformes visant à mettre en
place des institutions plus efficaces et plus en phase avec les besoins de la
population, et l'établissement de filets de protection sociale. Enfin,
il aidera les autorités à estimer le coût des
dépenses prioritaires de réduction de la pauvreté
axées sur des objectifs particuliers. Il donnera également des
conseils sur la manière d'améliorer l'efficacité des
dépenses publiques et leur utilité pour les pauvres (au moyen
d'examens des dépenses publiques, par exemple) et sur d'autres
réformes structurelles, telles que la privatisation et la réforme
de la réglementation35(*)». On remarque effectivement que les
tâches de la Banque sont conditionnées aux reformes du FMI comme
vu précédemment mais aussi qu'elles demandent un plus grand
investissement, tant au niveau de la présence sur le terrain (au travers
de la réalisation des évaluations et du conseil auprès des
autorités) que financièrement au travers de l'ampleur de son
secteur d'expertise. La relation entre les deux institutions de Bretton-Woods
est donc, bien que déséquilibrée, un reflet des
potentialités de chaque organisation. En effet, la Banque n'aurait pas
la crédibilité suffisante auprès des marchés
financiers pour mettre en place des réformes de politique
économique au niveau macro-économique et ainsi assurer une
certaine stabilité des changes et de la balance des paiements. De
même, le Fonds n'aurait pas les moyens ni l'expertise pour assurer une
présence sur le terrain au niveau des reformes micro-économiques
et sectorielles. Enfin, la répartition représente
déjà une extrapolation large des statuts et objectifs des deux
organisations (surtout pour le FMI). Le rapport Metzler a justement largement
critiqué cet élargissement du champ d'action. Le
déséquilibre n'est donc que la conséquence du
chevauchement de compétences entre les deux institutions. On peut
toutefois remarquer que c'est l'institution qui a le plus élargi ses
compétences qui a pris le leadership. Toutefois cela n'a pas que des
avantages puisque c'est justement le FMI qui est le plus critiqué dans
son action justement, entre autres, du fait de son manque de connaissance du
terrain. Sa conditionnalité est considérée par certains
auteurs36(*), comme
étant pire en raison de cet argument. Pour aller plus loin, il faut donc
analyser quelles sont les conditionnalités des deux organisations et
comment se différencient elles tant du point de vue juridique
qu'économique.
Chapitre 2 : La
cohérence des conditionnalités
La question de la cohérence des conditionnalités
du Fonds et de la Banque se pose en termes de compatibilité et
d'efficacité de l'agrégation de ces deux instruments au sein de
la double conditionnalité des programmes communs. La cohérence
institutionnelle à travers la collaboration ne pouvant être
considérée comme un gage de complémentarité ou
même de compatibilité, il semble légitime de s`interroger
sur la coexistence de deux instruments distincts au sein de programmes communs
et de leurs interactions réciproques. Pour cela, il faut
déterminer quelles sont les différences entre ces deux
conditionnalités tant au niveau de leur construction juridique qu'en
tant qu'outil de politique économique. L'historique de la
conditionnalité de chacune des deux institutions de Bretton-Woods est
très différente puisque c'est le FMI qui a la paternité du
concept et que la Banque ne l'a adopté que beaucoup plus tard par
nécessité ou suivisme avec l'arrivée de l'ajustement
structurel. Et c'est justement au niveau de ces différences, tant
temporelle que factuelles, que pourraient apparaître des
incohérences.
Parallèlement, la conditionnalité est aussi (ou
surtout) un instrument de politique économique et donc un
deuxième niveau d'incohérence pourrait apparaître au
travers des politiques que ces institutions souhaitent voir suivre. La
compréhension de cette cohérence politique passe par plusieurs
niveaux d'analyse. Il faut, en effet, la mettre en perspective dans une
idéologie plus globale de construction sociétale pour
déterminer son application en tant que modèle de
développement économique et social. A partir de là, il
sera plus facile de déterminer quelles sont les différences entre
chaque conditionnalité tant au niveau de leurs applications en fonction
des objectifs et compétences de chacune des organisations qu'au niveau
de leur coexistence et leurs interactions réciproques. Cette analyse
tant juridique qu'économique est aussi en quelque sorte une illustration
du résultat de la collaboration entre ces institutions.
Section 1 : La
conditionnalité en tant qu'instrument juridique
La conditionnalité est avant tout un instrument
juridique créé de toutes pièces par le FMI pour pouvoir
exercer un pouvoir de contrôle sur l'utilisation de ses ressources au
regard de ses objectifs. Le concept en lui-même ne remonte pas à
la création de l'institution. Il est le fruit d'un long débat qui
a commencé avant la conférence de Bretton-Woods et qui continue
encore. L'émergence de la notion de conditionnalité a
été progressive au sein du FMI tout comme sa formalisation au
travers d'instruments juridiques. Et même une fois le concept
ancré, l'instrument est resté très évolutif
grâce aux techniques qui le composent et dont les combinaisons permettent
l'application d'une conditionnalité graduée. La force de cet
instrument a entraîné son utilisation par d'autres organisations
comme la Banque Mondiale. Elle a dû néanmoins l'adapter au regard
de ses statuts et de ses objectifs et ainsi créer sa propre
conditionnalité avec son propre vecteur juridique et ses techniques
spécifiques.
Paragraphe 1 : La
création de la conditionnalité par le FMI
La conditionnalité a été engendrée
par le débat qui régna à la création du FMI sur
l'utilisation conditionnelle ou inconditionnelle de ses ressources. La position
américaine de la conditionnalité a lentement pris le dessus. Ce
processus s'est traduit d'abord par une interprétation restrictive des
statuts du Fonds puis par une introduction implicite pour finalement aboutir
à la véritable création du concept de
conditionnalité. Une fois ce processus achevé, il a fallu mettre
en forme le concept afin qu'il devienne un véritable instrument
juridique. Sa formalisation a trouvé son aboutissement dans l'accord de
confirmation qui a donné à la conditionnalité sa force au
travers de ses éléments constitutifs comme les critères de
réalisation, l'échelonnement ou l'adaptabilité.
A. La création
conceptuelle de la conditionnalité
Le problème de l'utilisation conditionnelle ou
inconditionnelle des ressources du Fonds est un débat qui remonte
à la conférence de Bretton-Woods. Le plan Keynes penchait en
faveur d'une logique inconditionnelle pour favoriser la croissance et le plan
White favorisait l'approche conditionnelle pour préserver les ressources
du Fonds. Le débat n'a pas été tranché directement.
«La première pierre effective à l'édifice de la
conditionnalité37(*)» fut la décision du 10 mars 1948 qui
donne une interprétation de l'article V section 3 a) qui
établissait la déclaration du pays qui avait besoin de fonds.
Cette décision permet la contestation de cette déclaration de
besoin et elle sera suivie le 17 mars 1948 par une autre décision qui
précise l'article I v) et énonce que le terme garanties
adéquates utilisé dans cet article peut être une condition
à l'obtention de l'aide. A ce stade, la notion de conditionnalité
reste encore floue mais la seconde pierre à l'édifice arriva
quatre ans plus tard. Le principe de conditionnalité fut, en effet,
introduit implicitement dans les politiques du FMI par la décision du
Conseil d'Administration du 13 février 195238(*). Cette dernière
établit le tirage inconditionnel sur la tranche-or et donc,
implicitement, établit aussi le tirage inconditionnel sur les autres
tranches. De plus cette décision créa l'assurement de tirage (qui
deviendra l'accord de confirmation) qui sera le «principal vecteur de
la conditionnalité39(*)»
Le FMI officialisa cette pratique par la décision du
Conseil d'Administration du 20 septembre 1968 puis l'intégrât en
1969, grâce au premier amendement, à ses statuts. Les
modifications apportées établirent clairement que l'utilisation
des ressources du Fonds (en dehors de la tranche-or) étaient soumises
à conditions comme le montre l'ajout du point (d) à l'article V
section 3 des statuts du Fonds lors du premier amendement :
« A representation of a member under (a) above shall be examined
by the Fund to determine whether the proposed purchase would be consistent with
the provisions of this Agreement and with the policies adopted under them, with
the exception that proposed gold tranche purchases shall not be subject to
challenge. ».
Le second amendement aux statuts du Fonds ne modifie pas la
notion de conditionnalité mais l'étend indirectement avec
l'officialisation de politiques spécifiques à certains
problèmes de balance des paiements. L'article V section 3 a) fait
désormais référence aussi aux assurements de tirages.
La troisième pierre à l'édifice fut la
décision du 2 mars 197940(*) sur l'utilisation des ressources
générales du Fonds et les assurements de tirage. Cette
décision explicite les moyens de la conditionnalité. Le
paragraphe 1 établit que les membres doivent prendre des mesures
correctives au commencement de leurs problèmes de balance des paiements
ou pour les prévenir. Les consultations prévues à
l'article IV seront l'occasion pour le FMI de vérifier leur concordance
avec ses objectifs et ainsi lui donner la possibilité de mettre en place
un assurement de tirage. Le paragraphe 7, quant à lui, établit
que le Fonds approuvera une demande d'utilisation de ses ressources quand il
jugera que le programme du pays est en accord avec ses statuts et objectifs et
que le pays doit prendre des mesures correctives avant l'assurement de tirage.
Ces préconditions établissent donc la conditionnalité
initiale du Fonds.
Le paragraphe 6 définit la conditionnalité
effective durant le programme. Il établit les clauses de performance et
d'échelonnement pour les tranches de crédit au-delà de la
première.
Le paragraphe 11 établit la conditionnalité
a posteriori pour les utilisations ultérieures de ses
ressources avec l'analyse et l'évaluation de performance.
La décision du 20 mars 1979 établit aussi la
portée de la conditionnalité. Le paragraphe 9
définît l'encadrement des critères de performance et les
limites aux variables macro-économiques et à ceux
nécessaires à la mise en place de provisions spécifiques
des statuts ou des politiques qui s'y rattachent. La portée de la
conditionnalité semble déjà être assez
étendue mais le Fonds a rajouté dans le paragraphe 4 un droit de
regard sur les objectifs sociaux et politiques intérieurs, les
priorités économiques ainsi que sur les causes des
problèmes de balance des paiements. Ceci élargit
considérablement le pouvoir de contrôle du FMI dans l'approbation
de l'utilisation de ses ressources. Mais J.Gold reconnaît que les termes
utilisés dans ce paragraphe sont larges et peuvent prêter à
débat41(*).
La décision du 20 mars 1979 pose donc la base formelle
de la conditionnalité et de son utilisation et c'est pourquoi elle est
aussi appelée directive sur la conditionnalité. Elle est
d'ailleurs toujours appliquée ce qui prouve, du fait des changements
fondamentaux d'orientation du FMI dans les quinze dernières
années, qu'elle était très large et flexible.
Elle a cependant été améliorée par
des décisions additionnelles en particulier au niveau
procédural42(*).
B. La mise en forme de la
conditionnalité
Jusqu'en 1952, le Fonds pratiquait une seule technique, celle
de la vente à réméré, c'est-à-dire la vente
au comptant contre un rachat à terme. Il s'agissait d'une technique
assez rigide qui ne permettait pas au Fonds de réagir de manière
suffisamment flexible pour faire face aux besoins d'un Etat. C'est pour pallier
ce défaut que la technique des accords de confirmation fut mise en
place. L'expression accord de confirmation provient de son appellation anglaise
: stand by arrangement qui fut traduite au début par assurement
de tirage avant que l'expression accord de confirmation ne l'emporte dans le
langage du Fonds. On trouve la définition de l'accord de confirmation
dans les statuts du Fonds « Par accord de confirmation, il faut
entendre une décision par laquelle le Fonds donne à un Etat
membre l'assurance qu'il pourra, conformément à ladite
décision, effectuer des achats au Compte des ressources
générales pendant une période spécifiée et
jusqu'à concurrence d'un montant spécifié43(*)».
Le Fonds affirme qu'il ne s'agit pas d'un accord international
ni même d'un document contractuel dans le paragraphe 3 de la
décision de 1979. Au contraire, D. Carreau estime qu' «il
s'agit là de véritables accords internationaux, et non
seulement de simples décisions internes du F.M.I., dont les termes lient
et le Fonds et l'Etat membre intéressé44(*)».
Ce caractère apporte de nombreux avantages au Fonds.
Les accords n'ont pas à être enregistrés auprès des
Nations-Unies comme prévu à l'article 102 de la Charte45(*) ce qui préserve leur
confidentialité.
Ces accords ne sont pas soumis aux procédures
constitutionnelles des Etats membres46(*), ce qui signifie une absence contrôle
parlementaire et évite ainsi des problèmes pour le gouvernement.
Enfin, ni les Etats ni le Fonds47(*) n'engagent leur responsabilité internationale
si ils ne respectent pas leurs engagements.
L'accord de confirmation est composé par «la
combinaison de trois techniques : les critères de réalisation,
l'échelonnement et l'adaptation continue48(*)».
La première phase est la lettre d'intention
énonçant les objectifs et politiques suivies par le pays pour
obtenir l'aide du Fonds. Cette lettre est le plus souvent rédigée
en collaboration avec les services du FMI lors des périodes de
consultations et d'établissement des préconditions. Le Fonds
reprend alors les objectifs de la lettre et les transforme en critère de
réalisation dans l'accord de confirmation. Il n'y a donc pas de lien
direct entre la lettre et l'accord. Ces critères de réalisation
ont été définis dans la décision du 20 mars 1979
dans les paragraphes 6 et 9.
De plus, l'intégralité de la somme prévue
dans l'accord de confirmation n'est pas versée en une fois. C'est
l'échelonnement selon un calendrier prévu par le Fonds qui
détermine les versements et permet ainsi de faire respecter la
conditionnalité tout au long du programme en fonction du respect des
critères de réalisation. Le Fonds peut suspendre les versements
en cas de non-réalisation.
Et c'est dans ce cas qu'apparaît, entre autres, la
technique de l'adaptation continue. En effet, le Fonds et le pays entrent alors
en consultation pour redéfinir les critères de
réalisation. Mais cette technique s'est aussi développée
avec l'apparition des nouvelles politiques du Fonds. En effet, l'allongement de
la durée des programmes a entraîné l'allongement de la
durée de l'accord de confirmation. Ce dernier, selon la décision
du 20 mars 1979, a une durée normale de un an qui peut être
étendue à trois ans. Mais l'arrivée de l'ajustement
structurel a aboutit à ce que tous les accords aient une durée de
trois ans (renouvelable) et donc il semblait difficile d'établir des
critères de réalisation pour une période aussi longue. Les
critères sont donc établis annuellement ce qui permet une
adaptation des programmes chaque année mais aussi de maintenir et de
faire évoluer la conditionnalité sur toute la longueur du
programme.
La conditionnalité a donc trouvé son vecteur et
sa forme dans l'accord de confirmation. De plus, le caractère souple et
évolutif de l'accord a permis à la conditionnalité de se
consolider non seulement pour atteindre sa forme actuelle mais aussi pour se
propager dans d'autres organisations internationales.
Paragraphe 2 : La
consolidation des conditionnalités
Une fois la conditionnalité structurée
juridiquement par le FMI, ce dernier a amélioré sa forme pour
répondre aux besoins de plus en plus importants de contrôle et de
flexibilité avec l'arrivée de l'ajustement structurel. Il a donc
créé de nouvelles variantes de vecteurs de conditionnalité
que ce soit au niveau des accords eux-mêmes ou des outils de gestion et
de suivi de la mise en oeuvre des conditions. La force de la
conditionnalité du FMI et son caractère évolutif et
flexible ont donné des idées aux autres organisations
internationales à vocation économique. La Banque Mondiale, mais
aussi la BERD ou l'UE, se sont engouffrées dans le créneau de la
conditionnalité. C'est ainsi qu'avec la mise en place de programmes
communs, principalement entre la Banque et le Fonds, on arrive à la
notion de double conditionnalité. Cependant, il faut s'intéresser
à l'adaptation qu'a fait la Banque de la conditionnalité du FMI
et analyser comment elle a intégré ce concept dans ses
procédures de prêts et de contrôle.
A. La forme actuelle de la
conditionnalité du FMI
Le champ de la conditionnalité du FMI s'est nettement
étendu avec l'arrivée des programmes d'ajustement structurel. Il
est, en effet, passé d'une simple conditionnalité
macro-économique chargée de rétablir la balance des
paiements, à une conditionnalité chargée de
résoudre des problèmes structurels.
L'accord de confirmation a donc aussi connu certaines
modifications avec l'apparition de l'ajustement structurel et a connu de
nouveaux avatars.
Le premier fut le mécanisme élargi de
crédit, établi en 1974, pour assurer une assistance à
moyen terme. Il diffère peu de l'accord de confirmation pour la
conditionnalité et l'échelonnement.
Les seconds furent la facilité d'ajustement structurel
et la facilité d'ajustement structurel renforcée, mises en place
respectivement en mars 1986 et decembre1987 pour répondre aux
problèmes d'ajustement structurel macro-économique. La principale
différence est que la lettre d'intention est ici accompagnée d'un
DCPE et que la conditionnalité est plus forte notamment dans la
facilité renforcée avec des révisions semestrielles.
La dernière forme d'accord de confirmation est la
facilité pour la réduction de la pauvreté et la
croissance, établie en 1999 et qui a remplacé la facilité
renforcée. Le DCPE est remplacé par Document stratégique
de réduction de la pauvreté (DSRP).
La conditionnalité est encore renforcée avec la
possibilité de révisions trimestrielles.
L'évolution de la conditionnalité passe aussi
par le développement des outils de contrôle. En effet, la mise en
oeuvre de la conditionnalité repose sur le lien entre le contrôle
de la mise en place des politiques souhaitées et les paiements des
sommes prévues.
Ce contrôle passe en premier lieu par les
critères de réalisation prévus dans l'accord et qui
permettent au Fonds d'observer si le pays peut recevoir le prochain paiement
échelonné. Ces critères sont soit des limites
quantitatives soit des mesures spécifiques. Cet outil correspond aux
préconditions prévues au paragraphe 6 de la directive sur la
conditionnalité de 1979.
Un autre outil de la conditionnalité sont les mesures
préalables (prior actions) qui se sont largement
développées dans les années 90. Ces mesures sont celles
que le pays accepte de mettre en oeuvre avant la décision du Fonds
d'approuver l'utilisation des ressources ou la mise en place d'un programme.
Cet outil correspond aux préconditions prévues au paragraphe 7 de
la directive sur la conditionnalité de 1979.
Un outil, qui lui n'est pas mentionné dans la
directive de 1979, est le repère structurel (structural
benchmark) qui a été introduit dans les années 80
avec l'ajustement structurel. Ces repères précisent les
différentes étapes dans la mise en oeuvre d'une mesure. Leur
réalisation est un indicateur pour le Fonds. Le fait qu'un repère
ne soit pas atteint ne signifiera pas l'arrêt du programme, mais si
plusieurs repères considérés comme importants ne sont pas
réalisés, on peut arriver à un processus de
révision.
Le dernier outil est donc la révision de programme
(program review) qui fournit un cadre pour l'évaluation de
l'ensemble du programme au-delà des seuls critères. Cela permet
d'analyser le degré d'évolution des repères et des mesures
dont le déroulement n'a pas pu être entièrement
défini ex ante et de mettre en place la prochaine étape
du programme.
C'est donc l'ensemble de ces outils au sein de l'accord de
confirmation qui forme la conditionnalité. Le jeu entre les
différents outils permet de modifier le degré de
conditionnalité d'une mesure.
L'encadré suivant montre un exemple de l'association
des ces outils dans un programme.
Box 12. Monitoring the
Introduction of a VAT in Mauritania 49(*)
In Mauritania the introduction of a value added tax (VAT) was
one of the pillars of the 1995-98 ESAF-supported program. 1/ The process of
making the VAT operational was monitored through a series of detailed steps,
most of which were prior actions or structural benchmarks. In addition, the
letter of intent for the second annual arrangement contained a list of, and
timetable for 23 specific actions for strengthening the tax administration and
the operation of VAT (EBS/96/60); the status of these measures was discussed in
the subsequent letter of intent (EBS/96/171).
VAT-Related Structural Conditions During the 1995-98 ESAF
Arrangement
Measure
|
Condition
|
Arrangement
|
1. Introduction of VAT
|
SB
|
First
|
2. Request IMF technical assistance to evaluate the
implementation and administration of VAT
|
PA
|
First, midterm review
|
3. Provide information on VAT to the 50 largest taxpayers through
individual visit
|
PA
|
Second
|
4. Start refunds of VAT credits and establish procedures and
choose the forms needed for the refunds
|
PA
|
Second
|
5. Establish a monthly statement of VAT data (assessment,
collection, arrears, and credits) and provide monthly to the IMF
|
PA
|
Second
|
6. Harmonize the taxpayer identification codes
|
SB
|
Second
|
7. Shorten the procedures for pursuit of delinquent taxpayers
|
SB
|
Second
|
8. Adopt an investment tax credit system SB Second
|
SB
|
Second
|
9. Communication of definitive VAT statements for January-August
1996
|
|
Second, midterm review
|
10. Regular communication of monthly VAT data to the IMF
|
PA
|
Third
|
11. Appointment of the VAT audit team
|
PA
|
Third
|
12. Approval of an annual program of targeted VAT audits and
specification of monthly audits arrears
|
PA
|
Third
|
13. Establishment of a list of VAT arrears to be written off
|
PA
|
Third
|
14. Establishment of a monthly schedule for collection of
recoverable VAT
|
PA
|
Third
|
15. Initiate drafting of legislation on the transfer of
collection function to the General Directorate of Taxation
|
SB
|
Third
|
16. Produce final version of legislation on the transfer of
collection function to the General Directorate of Taxation for incorporation in
the Budget Law
|
PC
|
Third
|
17. Collection of amounts from the first VAT audits
|
SB
|
Third
|
18. Strict implementation of the schedule for monthly collection
of recoverable arrears
|
|
|
19. Regular reporting to the IMF of monthly VAT data, including
the results of on-site audits and collections based on these results
|
SB
|
Third midterm review
|
Notes: Structural benchmarks, prior actions, and performance
criteria are abbreviated as SB, PA, and PC, respectively.
B. La propagation à
la Banque Mondiale
La création conceptuelle et la formalisation de la
conditionnalité est l'oeuvre du FMI. Cependant, les avantages de ce
modèle ont rapidement intéressé d'autres organisations
internationales économiques dont notamment la Banque Mondiale. Cette
dernière a commencé à appliquer une certaine
conditionnalité à partir de son passage à une logique
programme. La première esquisse de conditionnalité arriva avec la
facilité de financement supplémentaire proposée par la
Banque dans les années 60 mais qui ne connut pas une grande
réussite en raison du manque de soutien des principaux bailleurs de la
Banque. La conditionnalité de la Banque commença donc
réellement en 1979 avec l'initiative des programmes de prêts
à l'ajustement structurel.
Le passage d'une logique projet à une logique programme
a demandé à la Banque d'atteindre un plus grand niveau de
contrôle sur les actions des Etats au sein des programmes afin de
spécifier les étapes des programmes et leur contrôle. Cela
s'est traduit par la pratique de la lettre de politiques de
développement (Letter of Development Policies) ou sectorielles
(Letter of Sectorial Policies) dans laquelle la structure et les
étapes du programme sont détaillées. Les accords de
prêt de la Banque font explicitement référence à ces
lettres. La Banque définit ces lettres dans son manuel des politiques
opérationnelles comme ceci « For a structural adjustment
loan or sector adjustment loan, the Letter of Development (or Sectoral) Policy
sets out the salient elements of the proposed adjustment program and the
borrower's commitment to carry out the program. The contents of this letter are
defined as "the Program" and are incorporated by reference in the Loan
Agreement. Receipt by the Bank of this letter, duly executed, constitutes a
condition of Board presentation of the loan50(*)»
Le parallèle avec la lettre d'intention des accords de
confirmation du Fonds semble donc assez évidente. De plus, la Banque
pratique aussi l'échelonnement en fonction de la réalisation d'un
certain nombre d'indicateurs qui sont les préconditions au
déboursement suivant51(*). On retrouve donc déjà ici deux des
trois techniques de l'accord de confirmation du Fonds. La troisième, qui
est «l'adaptation continue», existe aussi dans les
techniques de la Banque. En effet, elle prévoit aussi le cadre des
modifications et des dispenses pour la réalisation de la
conditionnalité52(*).
Au niveau des outils, on retrouve les mêmes types
d'indicateurs mais avec des noms différents. La Banque définit
ces catégories d'indicateurs comme suit53(*): «on peut classer les indicateurs dans deux
grandes catégories : intermédiaires et finaux. Lorsqu'un
indicateur mesure un but final ou l'effet d'une intervention sur le
bien-être des personnes, on l'appelle un indicateur "d'impact" ou "de
résultat" -- en un mot, un indicateur "final". Par exemple,
l'alphabétisme peut être considéré comme un but
final, de sorte qu'un indicateur servant à le mesurer -- disons la
proportion de personnes d'un certain âge qui peuvent lire un texte simple
et écrire leur nom -- serait un indicateur final. Lorsqu'un indicateur
mesure un facteur qui détermine un résultat ou contribue au
processus menant à un résultat, il est qualifié
"d'intrant" ou "d'extrant", en fonction de l'étape à laquelle se
trouve le processus -- en un mot, un indicateur "intermédiaire". Par
exemple, il faut beaucoup de choses pour accroître les niveaux
d'alphabétisation : davantage d'écoles et d'enseignants,
davantage de personnes qui suivent les cours, et ainsi de suite. La mesure des
dépenses publiques consacrées aux salles de classe et aux
enseignants pourrait être un indicateur d'intrant, alors que celle du
nombre de classes construites et d'enseignants formés serait un
indicateur d'extrant.»
On retrouve donc une très grande similitude dans la
forme de la conditionnalité entre le Fonds et la Banque.
Certains auteurs54(*) ont cependant vu une grande différence quant
aux fondements de la conditionnalité. En effet, la
conditionnalité de la Banque Mondiale peut être
considérée comme se rapprochant plus de celle d'une banque
privée que celle du FMI. La Banque n'est pas, au contraire du Fonds, la
garante d'un code de conduite. Sa conditionnalité est plus régie
par des considérations pratiques car avant d'être prêteuse
elle est aussi emprunteuse.
La Banque doit donc s'assurer une certaine
crédibilité au travers de ses actions et notamment au travers des
remboursements pour préserver sa capacité d'emprunt auprès
des investisseurs publics et privés. La conditionnalité peut
être donc vue ici comme un moyen d'optimiser ses ressources tant par sa
capacité à emprunter que par le choix de l'utilisation de ses
ressources limitées.
Néanmoins, vu le développement croissant des
programmes où les deux institutions collaborent, il semble que cette
vision soit dépassée et que tant la Banque que le Fonds utilisent
la conditionnalité à la fois pour assurer leur
crédibilité vis à vis de leurs bailleurs et pour assurer
un code de conduite pour le développement économique.
La conditionnalité s'est donc propagée à
la Banque Mondiale sur modèle formel assez proche. Les
différences existantes tiennent en effet plus au mode de fonctionnement
de ces institutions qu'à de réelles différences de
conception de la conditionnalité en tant qu'instrument juridique pour
assurer la réalisation de leurs objectifs respectifs.
Cette similitude est un avantage dans le rapprochement des
activités des deux institutions puisqu'il permet à la double
conditionnalité de s'exprimer dans un vecteur semblable, et donc de
permettre l'établissement de conditions sous la même forme pour
les pays soumis aux programmes conjoints.
Section 2 : La
conditionnalité en tant qu'instrument de politique économique
La conditionnalité en tant qu'instrument juridique,
n'est qu'un moyen tandis que dès que l'on déplace sur le terrain
de la politique économique, elle devient un véritable vecteur
d'une idéologie. En effet, la conditionnalité de chacune des
organisations et donc plus encore la double conditionnalité des
programmes communs représente une réelle volonté
d'uniformisation des structures économiques mondiales. L'environnement
idéologique des institutions de Bretton-Woods est celui des ses membres
les plus importants et donc il se caractérise par un fort
néolibéralisme. Cet environnement se traduit donc dans les
modèles de développement proposés aux pays
concernés. La voie vers le rattrapage économique passe donc par
une plus grande place donnée aux mécanismes de marchés.
Il n'est donc pas étonnant que l'on retrouve souvent
les mêmes mesures dans la plupart des programmes d'ajustement. Seulement,
les deux organisations soeurs gardent encore des attributions distinctes et
doivent donc se partager la tâche. Le FMI va donc, en toute logique,
s'occuper des programmes de réformes macro-économiques voire
même un peu plus, en raison de sa fâcheuse tendance à
élargir son champ d'action pour prendre en compte les interactions
micros. La Banque se concentre donc plus sur les réformes des structures
socio-économiques en mettant en place les réformes
micro-économiques et sectorielles.
Paragraphe 1 :
L'idéologie commune des institutions de Bretton-Woods
En tant qu'instrument de politique économique, la
conditionnalité des institutions de Bretton-Woods est
caractérisée par une grande cohérence idéologique.
En dépit de certains errements de la Banque Mondiale avant les
années 80, les deux organisations soeurs partagent un modèle
unique de pensée (voire un modèle de pensée unique). Cette
idéologie commune a été caractérisée au
niveau de la politique économique par ce qu'on appelle le consensus de
Washington. Cette idéologie n'est qu'une partie du programme global
néo-libéral. Ceci n'est en rien étonnant puisque parmi les
pays qui suivent cette idéologie se trouvent les plus gros membres des
institutions de Bretton-Woods.
Une autre aspect du néolibéralisme et du
consensus de Washington se situe au niveau du modèle économique
de développement employé par le Fonds et la Banque. Ce dernier se
caractérise par la croyance en l'omnipotence du marché comme
unique facteur de développement. Les pays en développement ne
pourront donc améliorer leur situation que par une plus grande
intégration aux systèmes mondiaux des marchés. C'est ce
dogme qui domine les programmes communs d'ajustement structurel des deux
organisations.
A. L'orthodoxie
néo-libérale : le consensus de Washington
L'ensemble du fonds politico-économique du FMI et de la
Banque est mieux connu sous le terme de «consensus de Washington».
L'expression est née, au début des années 90, sous la
plume de l'économiste britannique John Williamson, pour définir
le modèle économique libéral prôné par M.
Thatcher et R. Reagan. Le consensus est résumé par cet auteur en
une série de dix principes de base55(*) :
1. Discipline fiscale ;
2. Réorientation des dépenses publiques vers
l'éducation, la santé et les infrastructures ;
3. Réforme fiscale caractérisée par un
élargissement de l'assiette et une réduction des taux marginaux
d'imposition ;
4. Taux d'intérêt déterminés par le
marché et positifs (mais modérés) en termes réels ;
5. Taux de change compétitifs ;
6. Libéralisation commerciale avec remplacement des
restrictions quantitatives par des droits de douanes faibles et uniformes ;
7. Ouverture de l'économie à l'investissement
direct étranger ;
8. Privatisations ;
9. Dérégulation, c'est-à-dire, d'une
part, abolition des obstacles à l'introduction de la concurrence
à l'exception de ceux qui sont justifiées par la
sécurité, l'environnement et la protection des consommateurs, et,
d'autre part, mise en place d'une surveillance prudentielle des institutions
financières ;
10. Protection légale des droits de la
propriété.
Si l'on étudie les conditions les plus
fréquentes imposées par l'ajustement structurel, on
retrouve56(*) :
· Lever les quotas à l'importation qui correspond
au principe 6 et 9 du consensus
· Améliorer les stimulants à l'exportation
qui correspond aux principes 5, 6,7 et 9
· Réformer le budget ou le système fiscal
qui correspond aux principes 1 et 3 (voir 8)
· Revoir les priorités d'investissement public
qui correspond au principe 2
· Réduction radicale ou élimination des
subventions et des mesures de contrôle des prix qui aboutissaient
à des distorsions des prix intérieurs d'un certain nombre de
biens et de services qui correspond aux principes 6 et 9
· Taux d'intérêt élevés pour
combattre l'inflation, encourager l'épargne et allouer les capitaux aux
plus offrants qui correspond aux principes 4 et 7
· Privatisation des entreprises d'État qui
correspond au principe 8
· Promotion tous azimuts des exportations par la
dévaluation de la monnaie qui correspond au principe 5
· Réduction du rôle de l'Etat, non seulement
dans l'économie, mais aussi pour la fourniture de services sociaux comme
la santé, l'éducation et la sécurité sociale ce qui
par contre contredit en partie le principe 2
Mais l'ajustement structurel est plus qu'une simple
combinaison de mesures macro-économiques au niveau interne. Il est pour
certains la «"courroie de transmission" pour faciliter le processus de
mondialisation qui passe par la libéralisation, la
déréglementation et la réduction du rôle de
l'État dans le développement national57(*)». Il est par contre
pour les équipes des institutions de Bretton-Woods, et plus
particulièrement celles du FMI, le seul modèle de
développement viable et souhaitable pour ces pays.
Le consensus de Washington a cependant connu récemment
de sévères critiques suite aux crises asiatiques et russes et au
mécontentement latent consécutif aux piètres
résultats de l'ajustement structurel. Les critiques
répétées de J. Sachs et M. Friedman, la démission
de J. Stiglitz, économiste en chef de la Banque et de R. Kanbur,
coordinateur du rapport de la Banque sur le développement, le rapport
Metzler ou encore les manifestations anti-mondialisation ont
sérieusement entaché la crédibilité de cette
doctrine. Seulement, les alternatives proposées par les contestataires
ne vont pas dans le même sens. Certains critiquent le manque de
libéralisme et l'interventionnisme, d'autres le trop plein de
libéralisme et le laisser-aller économique. Le consensus de
Washington n'est donc pas encore mort et il tente même de revivre sous
d'autres appellations plus neutres. De plus son vecteur d'application existe
toujours au sein de l'ajustement structurel avec le modèle de
développement par l'intégration aux marchés mondiaux.
B. Le modèle de
développement par l'intégration aux marchés mondiaux
Le corollaire des principes du consensus de Washington est le
modèle de développement par le libre-échange. Il peut
être résumé par le slogan «trade not
aid». Son attrait est d'autant plus fort qu'il est en théorie
la solution aux problèmes de la dette car les revenus d'exportations
permettront de payer le service de la dette et d'améliorer la balance
des paiements.
L'idée fondamentale des programmes d'ajustement est
donc de sortir de la crise grâce à une intégration plus
étroite aux marchés mondiaux, en accordant moins d'attention aux
productions nationales destinées aux besoins intérieurs, en
réduisant le rôle de l'État et de la planification et en
permettant aux forces du marché de jouer un rôle accru dans le
développement.
L'ouverture de l'économie sur l'extérieur
serait, du moins pour les institutions de Bretton-Woods, le meilleur gage de
capacité à tirer parti des progrès technologiques
réalisés dans les pays développés, que ce soit
à travers l'importation ou à travers la connaissance des nouveaux
produits et techniques offerts sur les marchés internationaux.
L'exemple de l'Egypte et de son secteur agricole est
caractéristique de cette pensée : « These
external forces must carry out not simply adjustments to the existing system
but what the World Bank in 1980 called a "qualitative transformation" of
Egyptian agriculture. New capital investment, new irrigation methods, improved
seed varieties, mechanization, and the switch to export crops such as
vegetables and cut flowers to bring in the foreign capital required to finance
such technologies were the principal means to achieve this
transformation. 58(*)».
L'ouverture extérieure semble être aussi le seul
moyen pour les entreprises d'accéder aux marchés avec des
débouchés importants, c'est à dire ceux des pays
développés, ce qui est une nécessité pour
améliorer l'efficacité de la production en
bénéficiant des économies d'échelle. Dans le
même ordre d'idées, l'ouverture extérieure est
également indispensable pour assurer le développement de
comportements concurrentiels de la part des entreprises59(*).
L'ouverture extérieure doit cependant être
complétée par un ensemble d'autres mesures de politique
économique qui assurent un environnement propice à une croissance
fondée sur l'intégration à l'économie mondiale. En
particulier, l'ouverture extérieure doit s'accompagner de politiques qui
assurent la compétitivité de l'industrie.
La première phase de ce modèle d'accompagnement
de l'ouverture est la dévaluation qui permettra de rendre plus
compétitive les exportations du pays en renchérissant les
importations créant ainsi une contraction de la demande.
Ensuite, il faut améliorer la
compétitivité même des entreprises nationales.
L'investissement prive étant considéré comme la meilleure
solution, il faut améliorer l'environnement d'investissement. Cette
approche nécessite donc l'élimination des obstacles par la
dérégulation des législations sur le travail,
l'environnement, les mouvements de capitaux et la réduction du
rôle de l'Etat.
Cela passe donc par les privatisations des entreprises
nationales qui s'inscrivent aussi dans le cadre d'un
rééquilibrage entre le secteur public et le secteur privé.
Ce processus s'inscrit dans un cadre plus large qui vise à
réformer le fonctionnement du système économique dans une
optique de transition vers l'économie de marché et d'application
de politiques conformes aux objectifs de la stratégie de
développement par l'intégration à l'économie
mondiale.
De plus, il faut bien voir que ces entreprises nationales sont
le plus souvent de véritables "mines d'or" pour les investisseurs
étrangers, notamment dans les domaines des matières
premières, des «utilities» (eau, électricité) ou
des télécommunications.
Mais pour attirer l'investissement étranger, il faut,
au préalable, déréguler les mouvements de capitaux. En
principe, la suppression des contrôles des mouvements de capitaux est
censée procurer des avantages économiques. Ces derniers doivent
provenir d'une augmentation des opportunités d'arbitrages intertemporels
(les préférences pour le présent et pour la
liquidité diffèrent d'un pays à l'autre) et de
diversification des portefeuilles vers ces pays (coûts de financement
plus bas pour ces pays et perspective de rendements plus élevés
pour les épargnants donc incitation à l'investissement)60(*).
Un autre point connexe est le développement du
système financier car plus une économie est
développée et dynamique, plus la demande de services
d'intermédiation financière est forte. De plus, la structure du
système financier peut exercer également un impact direct non
négligeable sur l'accumulation du capital. C'est en effet au travers du
système financier que l'épargne se forme, et que celle-ci est
allouée de manière plus ou moins efficace aux différents
projets d'investissement.
Enfin, le système financier est une autre mine d'or
pour les investisseurs lors des privatisations.
Pour finir, il existe aussi une multitude de mesures pouvant
améliorer l'intégration aux marchés mondiaux qui vont de
la libéralisation des prix intérieurs (pour accroître les
revenus des entreprises privatisées) à la mise en place de taux
d'intérêt élevés (pour attirer les capitaux,
encourager l'épargne et engraisser le secteur financier) en passant par
la réduction des impôts (pour attirer les entreprises et
investissements).
On retrouve donc, dans les grandes lignes, les points de
consensus de Washington. Les deux institutions de Bretton-Woods appliquent
toutes deux ce modèle de développement. Mais du fait de leurs
spécificités et objectifs propres, elles ne le mettent pas
forcement en place de la même façon. De plus, en raison de leur
collaboration progressive elles ont dû se répartir les taches.
Paragraphe 2 : Les
différences de mise en oeuvre de la double conditionnalité
Même si elles partagent une idéologie commune,
les institutions de Bretton-Woods ont dû opérer une
répartition du champ de la conditionnalité en raison de leurs
objectifs respectifs, de leurs domaines d'expertise et de leur présence
matérielle. La répartition qui a été faite et qui a
été détaillée précédemment revient
grossièrement à donner la partie macro-économique au FMI
et les parties micro-économiques et sectorielles à la Banque
Mondiale. Même si l'on a déjà étudié que
cette répartition était déséquilibrée et
pouvait mener à des divergences entre ces deux organisations, il faut
maintenant s'intéresser à la réalité des champs
d'application de la conditionnalité pour chacune des institutions. Il
faut étudier quels sont les secteurs macro-économiques dont le
FMI s'occupe et par le biais de quelles mesures. Il faut aussi étudier
comment le FMI gère les répercussions possibles des actions
micro-économiques et sectorielles de la Banque Mondiale sur ses
objectifs. Ensuite il convient de s'attarder sur l'immensité du champ
d'application de la conditionnalité de la Banque. Cela permet de voir
à quel point l'ajustement structurel est vraiment structurel. Au travers
d'une base d'exemples de secteurs de conditions, on pourra mieux
appréhender l'ampleur des réformes engagées mais aussi
leur intrusivité.
A. Le FMI et la
conditionnalité macro-économique
Le FMI est principalement responsable des conditions
macro-économiques. Les secteurs de compétences où il
intervient le plus souvent sont les suivants.
· Le système de change par le biais de la
dévaluation et de l'unification des taux de change.
· Le régime du commerce par l'abaissement des
obstacles tarifaires et quantitatifs
· Le régime des mouvements de capitaux avec
l'élimination des restrictions à certains types de capitaux et
les mesures favorisant l'investissement direct notamment par le biais des taux
d'intérêt.
· Le système de prix interne en
libéralisant la fixation des prix, en supprimant les subventions et
ouvrant les monopoles et les filières de distribution
étatiques.
· La réforme et la restructuration du secteur
public en rationalisant leur fonctionnement
· Les privatisations
· Le système fiscal en réformant à
la fois l'impôt et la dépense publique. Cela passe par la
modification de la structure de l'impôt et sa réduction. La
réforme des dépenses publiques passe par la réduction de
l'emploi public
· Le système de sécurité sociale
est réformé pour en théorie assurer sa viabilité ce
qui passe le plus souvent par la baisse des prestations, la reforme du
système de couverture-santé, la rationalisation de la protection
sociale et par la mise en place de fonds de pension
· Le secteur financier est réformé par la
restructuration du secteur par des fusions et privatisations, des changements
de régulation, la réforme de la banque centrale et
l'amélioration des marchés financiers.
· Le secteur agricole passe par la suppression des
subventions, l'arrêt des réformes agraires et la
libéralisation des prix
· Le marché du travail est reformé par
l'abaissement des obstacles à sa flexibilité comme la reforme des
législations sur le travail, le rôle des syndicats et les normes
sociales.
· L'aide au calcul statistique
· Les reformes systémiques comprennent tout ce
qui touche le cadre institutionnel comme la reforme des législations sur
le commerce, la faillite, la concurrence mais aussi la bonne gestion et la
transparence.
Le graphique ci-dessous montre que la plupart de ces secteurs
de conditionnalité sont partagés avec la Banque (ou d'autres
institutions de développement) voire pour certains entièrement
dominés par la Banque.
Cependant cela n'empêche pas le Fonds de poser des
conditions. Malgré l'intensification de la collaboration entre les
institutions, le Fonds n'a pas limité l'étendue de sa
conditionalité.
Le FMI explique cela lui-même61(*) et le justifie par l'absence
d'un cadre formel pour la double conditionnalité. Pour cela il impose
une conditionnalité pour certains points qui sont en dehors de son aire
d'expertise mais qui représentent un intérêt majeur pour
son programme macro-économique car il considère que la
conditionnalité de la Banque est trop faible et n'apporte pas les
mêmes garanties que la sienne. C'est pourquoi le Fonds maintient une
conditionnalité sur des secteurs comme les privatisations ou le
système de sécurité sociale pour protéger sa
politique fiscale ou encore sur les fixations des prix et le commerce pour
assurer l'amélioration de la balance des paiements.
B. La Banque Mondiale et
les conditionnalités micro-économiques et sectorielles
La Banque s'occupe donc principalement des conditions
micro-économiques et sectorielles dans les programmes. Le FMI ayant
tissé le cadre macro-économique et même un peu plus
parfois, la Banque superpose sa conditionalité sur ses
thèmes de compétences. Les conditions imposées par la
Banque sont plus nombreuses et plus spécifiques car elles couvrent un
à un l'ensemble des secteurs de compétence. Outre les
thèmes de compétences «partagées» vues
précédemment, on trouve entre autres62(*) :
· La décentralisation et le développement
local c'est à dire le transfert d'autorité et de
responsabilités de fonctions publiques, de l'administration centrale,
vers les organisations gouvernementales subordonnées ou quasi autonomes
et/ou vers le secteur privé. On en trouve plusieurs types dont la
décentralisation politique, administrative, la décentralisation
des finances et la décentralisation du marché.
· Le développement du secteur privé est
pris en compte par la Banque au travers de l'amélioration de
l'environnement économique, la gestion et la réforme
d'entreprises, l'accès aux capitaux internationaux et le
développement de l'infrastructure.
· Le développement rural et agricole qui
comprend, entre autres, la gestion des ressources naturelles, la
compétitivité du secteur, l'autosuffisance, ou encore
l'infrastructure rurale.
· Le secteur de l'électricité et autres
énergies par biais de la dérégulation des marchés,
l'amélioration des économies d'énergies et le
développement d'énergies renouvelables.
· La gestion et réforme de l'éducation
pour assurer une éducation plus large à moindres coûts par
le biais de la décentralisation et de l'implication du secteur
privé.
· La gouvernance et gestion du secteur public
· La promotion des marchés de capitaux,
· La protection sociale avec une attention
particulière pour la pauvreté, l'éducation, la
santé, l'emploi et le milieu rural.
· La gestion des terres et de l'immobilier
· Les transports (en tant qu'infrastructure pour le
commerce)
· Les réformes sectorielles et cross-sectorielles
· La participation des ONG et de la
société civile
Ceci n'est qu'un petit aperçu de l'étendu de
l'action de la Banque. Mais il prouve déjà la portée
immense du champ de la conditionnalité. Certains auteurs comme
Loxley63(*) la
considèrent même comme plus pénétrante,
envahissante, et soutenable sur le long terme que celle du FMI en raison de son
enracinement dans les structures socio-économiques du pays.
Afin de mieux appréhender la conditionnalité de
la Banque, il faudrait se pencher sur un contrat de prêt. Seulement, ces
documents étant pour la plupart secrets, il semble plus facile de se
servir des documents des pays comme les lettres de politique de
développement ou comme ici un document intérimaire de
stratégie de réduction de la pauvreté64(*) auxquels il est fait
référence dans les véritables contrats
DOCUMENT INTÉRIMAIRE DE STRATÉGIE DE
RÉDUCTION DE LA PAUVRETÉ PRÉPARÉ PAR LE
GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE DE GUINÉE
Matrice des stratégies et politiques de
réduction de la pauvreté (document reproduit
partiellement)
|
OBJECTIF GENERAL
|
OBJECTIFS DETAILLES
|
STRATEGIES /
ACTIVITES
|
INDICATEURS
ET BUTS
|
Politique budgétaire
|
Améliorer la gestion
des finances
publiques
|
Amélioration du niveau des recettes,
en
particulier les recettes non
minières
Améliorer l'efficience de
l'allocation
des ressources publiques
Assurer la discipline
budgétaire
Renforcer le cadre de contrôle
des
dépenses
Améliorer l'efficacité et la
compétitivité de la passation des marchés
|
Améliorer l'administration de l'impôt en
restructurant les services fiscaux de Conakry et de l'intérieur /
Renforcer la gestion de la TVA en particulier par le transfert
systématique des informations de la DND à la DNI.
Contrôler plus efficacement le recouvrement de
l'impôt par la mise en place d'indicateurs et
d'incitations pour les agents de recouvrement.
Améliorer le recouvrement des recettes douanières
par (i) le renforcement de la coordination entre les
services des Douanes et la SGS, (ii) le redéploiement et
formation du personnel, et (iii) la réduction et le renforcement du
suivi des exonérations.
Renforcer le cadre de dépense à moyen terme (CDMT)
en mettant l'accent sur : (i) la mise à jour régulière des
stratégies et des objectifs sectoriels, (ii) le renforcement de la
capacité d'exécution et de suivi du CDMT, (iii) la décent.
de la gestion des ressources
budgétaires, et (iv) l'application à tous les
secteurs.
Produire les données détaillées sur l'impact
desnouveaux projets sur les dépenses récurrentes.
Améliorer les prévisions à moyen terme des
dépenses et allocations intersectorielles en assurant la
compatibilité avec le cadrage macro-économique.
Produire pour chaque exercice des comptes
budgétaires définitifs vérifiés (loi
de règlement) au plus tard dans les 6 mois suivant la fin de
l'exercice.
Mettre en place une base de données sur les coûts
unitaires pour les catégories courantes de matériels et de
travaux.
Renforcer la préparation, l'exécution et le suivi
des projets.
Adopter un nouveau système pour la gestion des
contributions locales relatives aux projets financés par l'IDA. / Faire
préparer des audits indépendants des passations de marché
de chaque ministère sectoriel.
Suivre les dépassements de délai au stade de la
signature des marchés et des paiements y afférents.
Appliquer les procédures budgétaires et
réglementaires et harmoniser textes y afférent
Réorganiser la Direction nationale du Trésor.
|
Réaliser un excédent brut intérieur de 3% du
PIB en 2002
Faire passer les recettes non minières de
l'équivalent de 7,8% en 99 à 10% en 2002
|
Développement rural
|
1. Améliorer
l'alimentation et la
sécurité alimentaire.
2. Augmenter les
revenus des
populations en milieu
rural
|
Agriculture
Augmenter la production et la productivité
agricole et permettre la
transformation et la
commercialisation
des produits
|
Promotion de techniques améliorées de production et
de conservation.
Développement des infrastructures de base : transport,
eau, etc.
Amélioration du cadre institutionnel juridique et
réglementaire : code foncier et domanial, en
particulier, améliorer l'accès à la terre
des groupes défavorisés ou fragilisés.
Augmenter l'accès au micro- crédit.
Protection de l'environnement et gestion rationnelle et durable
des ressources naturelles : réglementation, amélioration des
connaissances (ex : foyers améliorés).
Renforcement de l'organisation paysanne pour consolider les
capacités des agriculteurs.
|
Taux de croissance du PIB agricole de 10% par an en 2010.
Taux d'accroissement des rendements et des récoltes des
différentes cultures.
Quantité de calories disponibles
par habitant.
Volume d'importations de riz.
Superficie mise en défense.
Nombre de groupements créés et
encadrés.
|
|
Pêche
1. Maximiser les
bénéfices
économiques de l'exploitation
rationnelle des ressources halieutiques et aquacoles
et augmenter la production
piscicole
2. Augmentation des revenus des pêcheurs et
création d'emplois
|
Participation des communautés (création et soutien
comités de développement des débarcadères),
Amélioration des installations (débarcadères
et pistes rurales).
Approvisionnement en équipement (moteurs, filets
pièces détachées) grâce à la réduction
des taxes à l'importation du matériel de pêche et à
des avantages fiscaux.
Traitement et mise en valeur des produits.
Facilitation de l'accès au crédit.
Protection des ressources halieutiques et exploitation
rationnelle et durable des ressources.
Appui à la pêche artisanale.
Gestion rationnelle de la flotte industrielle
Gestion des pêcheries continentales
Promotion de la crevetticulture
Gestion des ressources humaines
|
Taux de croissance du PIB du
sous- secteur.
Consommation annuelle par
habitant de 13 kg en 1997 à 17 kg en 2007.
Quantité de poisson capturé.
Recettes d'exportation tirées des produits de la mer.
Le nombre d'emplois créés et le revenu
distribué
|
Secteur minier
|
Accélérer la
croissance
économique par
l'exploitation du
potentiel minier du
pays.
|
1. Réduire les charges et
améliorer
la compétitivité du
secteur
2. Promouvoir les investissements
privés et mieux valoriser les
produits du secteur
|
Poursuivre les plans de réduction des coûts pour
CBG, Friguia et SBK,.
Adopter les nouvelles mesures de restructuration pour SBK.
Réduire la part de l'Etat dans le capital de Friguia et/
ou recourir à une concession privée.
Promulguer les décrets d'application qui permettront
d'harmoniser les dispositions du code minier avec celles des autres textes
législatifs.
Améliorer le dispositif institutionnel et mettre en place
une politique de développement intégré en vue de la
transformation de la bauxite en aluminium.
Associer le secteur privé à la gestion des services
géologiques, et restructurer ces services.
|
Taux de croissance du secteur
(en % par an)
|
CDMT et Secteurs prioritaires
|
Augmenter l'impact
des dépenses
publiques sur la
réduction de la
pauvreté grâce à une
meilleure allocation
des ressources.
|
1. Améliorer l'efficience de
l'allocation
des ressources publiques.
2. Amélioration de la qualité des
prestations par les services publics
3. Renforcer la transparence dans la gestion des
dépenses
|
Renforcer le cadre de dépense à moyen terme(CDMT)
en mettant l'accent sur la mise à jour
Revue des stratégies et des objectifs sectoriels,
amélioration des prévisions à moyen terme des
dépenses, allocations prioritaires des dépenses, renforcement de
la capacité d'exécution et de suivi du CDMT ,
Adoption du CDMT par tous les secteurs.
Renforcer les ressources humaines et le cadre institutionnel pour
améliorer la prestation du service public.
Améliorer la communication entre prestataires et
bénéficiaires des services.
Mettre en place des systèmes d'incitation
appropriés et axés sur les résultats et instituer les
sanctions.
Adopter un système d'audit des marchés publics et
des projets d'investissement
Elaborer et diffuser les indicateurs de performance
Elaborer les lois de règlement sur base annuelle pour
revue par l'Assemblée
|
Part du budget alloué aux
secteurs prioritaires
Part des dépenses de réduction
de la pauvreté / total dépenses
Part des dépenses allouées aux
structures déconcentrées
|
On peut donc supposer qu'une partie des mesures
proposées ici par le gouvernement de Guinée (en collaboration
avec les services de la Banque bien évidemment) seront reprises par la
Banque Mondiale sous forme de conditionnalité que ce soit en tant
qu'indicateurs intermédiaires ou finaux, d'intrants ou d'extrants, dans
le contrats de prêt.
Les institutions de Bretton Woods ont donc tenté de
séparer leurs domaine d'intervention au sein de l'ajustement structurel.
Cependant, cette dichotomie macro-économie/micro-économie reste
artificielle car elle en tient pas compte des vastes interactions entre les
deux niveaux ou même de l'existence d'un niveau
méso-économique. Si la double conditionnalité, dans sa
forme juridique, a réussi à assurer une cohérence des
méthodes, elle a ,par contre, été à l'origine
d'incohérences et de chevauchements en tant qu'instrument de politique
économique. Cela s'explique notamment par le déséquilibre
de la relation entre les deux institutions. Et ce dernier est la
conséquence directe de la réorientation du Fonds vers
l'assistance financière au développement consécutive
à la crise monétaire et économique des années
70.
Il reste maintenant à analyser la cohérence
externe de la double conditionnalité.
Deuxième Partie : La cohérence
externe de la double conditionnalité
Par cohérence externe de la double
conditionnalité, il faut entendre le processus de coexistence entre les
conditionnalités du FMI et de la Banque dans les programmes communs et
leur environnement juridique international. En effet, le modus operandi
et les conséquences des programmes et de leur
conditionnalité, notamment pour l'ajustement structurel, peuvent entrer
en contradiction avec certains principes du droit international.
Concernant le mode de fonctionnement de ces programmes, la
conditionalité a été fortement critiquée comme
portant atteinte à la souveraineté des pays
bénéficiaires des programmes. Il faut donc s'attacher à
démontrer en quoi la double conditionnalité est un facteur
restrictif pour la souveraineté. Pour cela, il faut déterminer
son adéquation vis à vis des règles internationales
régissant la coopération économique entre Etats et en
particulier l'assistance au développement. C'est notamment dans le cadre
de l'ONU qu'a été formé, au travers d'une série de
résolutions pour protéger la souveraineté, ce cadre
spécifique des relations économiques internationales.
L'aboutissement de ce cadre a été l'apparition de principes
définissant les limites de la relation entre le
bénéficiaire de l'aide et le
« créancier ». Les lignes directrices des ces
principes sont que l'aide ne doit pas être liée à
l'existence de certains régimes politiques, économiques ou
sociaux dans le pays ni que la fourniture de l'aide soit le prétexte
à une intervention dans les affaires internes de l'Etat
bénéficiaire. Il faut donc déterminer comment les
institutions de Bretton Woods ont intégré ces principes et
comment leur conditionnalité peut y porter atteinte.
Au niveau des conséquences, les principales critiques
ont porté sur la détérioration du respect des principes
des droits de l'homme dans les pays soumis à la double
conditionnalité des institutions de Bretton Woods. Il faut donc
s'attacher à comprendre en quoi le FMI et la Banque sont responsable de
cette situation et en quoi l'impact de leurs programmes porte atteinte à
la réalisation des droits de l'homme particulièrement dans leur
dimension économique, sociale et culturelle. La prise de conscience
croissante de cette situation par le FMI et la Banque a amené à
une considération progressive des droits de l'homme, d'abord en tant
qu'externalités des programmes à gérer puis en tant que
part intégrante de la réalisation des programmes. Il faut
néanmoins aussi se demander si cette prise en compte,
considérée comme une avancée, n'est pas en fait, dans le
même temps, une nouvelle atteinte à la souveraineté des
Etats bénéficiaires.
Chapitre I : La
cohérence par rapport aux principes du «droit du
développement»
La double conditionnalité, en tant que conditions
« posées » par le FMI et la Banque en contrepartie
de leur aide au développement, est en relation directe avec le droit du
développement (si il en existe réellement un). Les pays en voie
de développement ont souvent eu une attitude contradictoire vis à
vis des institutions de Bretton Woods et de l'aide au développement plus
généralement. D'un coté, ces pays ont voulu un
véritable droit au développement qui prenne en compte leurs
spécificités, d'un autre coté ces pays ont toujours voulu
protéger leur souveraineté (souvent acquise depuis peu). Ce
système dans une optique d'aide inconditionnelle est réalisable
mais dès que l'on entre dans la mise en place de conditions, la
contradiction apparaît. En effet, la prise en compte des
spécificités dans la conditionnalité entraîne
inévitablement un lien avec la situation intérieure du pays et
donc de son régime et de ses politiques. Et c'est à ce niveau que
se trouve la base de l'intervention ou de la discrimination. Une partie de ce
combat contradictoire a été la pression de ces pays au sein de
l'ONU pour mettre en place des règles protégeant leur
souveraineté dans le cadre de l'assistance au développement et
plus largement dans la coopération financière internationale.
Cette demande a abouti à la création des principes de
non-discrimination et de non-intervention.
Le FMI et la Banque conscients de cette contradiction et des
risques qu'elle entraînait pour eux ont mis en place un schéma de
pensée neutraliste les dédouanant de toute volonté
d'ingérence ou de discrimination mais leur donnant la possibilité
de prendre en compte les spécificités du pays. Mais sortir d'une
contradiction pareille n'a pu se faire qu'au prix de l'établissement
d'un biais dans ce schéma. La base de ce solution
«tronquée» est la neutralité de l'approche
économique et sa séparation de toute considération
politique. Et c'est à partir de là que les institutions de
Bretton Woods vont justifier leurs atteintes à la souveraineté.
De par l `étendue de ces conditionnalités économiques
« neutres » , elles vont exercer un véritable
"diktat" sur la mise en place de régimes ou de politiques purement
indépendantes au plan national que ce soit au niveau politique,
économique, ou social.
Section 1 : La protection
de la souveraineté étatique
La souveraineté étatique est un pilier du droit
international. Son importance dans l'aide au développement a
été soulignée par la création de principes afin de
la protéger des tentations interventionnistes ou discriminatoires
liées à l'obtention de l'aide. Ce sont les Nations Unies,
à la demande des pays en développement, qui ont
développé ces barrières pour éviter que
l'assistance au développement ne se transforme en
néocolonialisme. Les institutions de Bretton Woods sont bien
évidemment un des récipiendaires de ces principes et elles ne
s'en cachent pas, réaffirmant constamment leur respect. Cependant, la
rhétorique utilisée par le FMI et la Banque ne suffit pas
à cacher la réalité des atteintes à la
souveraineté consécutives à la mise en place des
programmes d'ajustement structurels et de la double conditionnalité
inhérente à ce processus.
Paragraphe 1 : La
création des principes
Le doit international s'est préoccupé de
l'asymétrie de pouvoir qui existe entre le donneur et le receveur de
l'assistance financière. Afin d'assurer une certaine
équité dans les règles de la coopération
économique internationale, des principes ont été
établis pour rétablir l'équilibre et préserver la
souveraineté des Etats bénéficiaires. Les Nations Unies
ont alors progressivement mis en place des principes gérant l'aide
économique internationale. Les deux principes les plus importants sont
la non-discrimination qui empêche de lier l'obtention de l'aide à
l'existence d'un type de régime précis et la non-intervention qui
empêche que l'obtention de l'aide soit le prétexte à la
modification de politiques nationales.
A. Le principe de
non-discrimination
Ce principe énonce que l'aide doit être
accordée sans discrimination politique, économique ou sociale. Ce
principe est «le corollaire du principe d'autonomie constitutionnelle
, en vertu duquel chaque Etat est libre de choisir son régime politique,
économique et social 65(*)» et ce principe d'autonomie
constitutionnelle est «le résultat de l'indifférence du
droit international à l'égard des formes politiques
internes 66(*)».
La Déclaration relative aux principes du droit
international touchant les relations amicales et la coopération entre
les Etats conformément à la Charte des Nations Unies
(résolution 2625 (XXV)) énonce que « chaque Etat a
le droit de choisir et de développer librement son système
politique, social, économique et culturel ».
De même la CIJ affirme clairement ce principe du libre
choix du régime dans l'affaire du Sahara Occidental
« Aucune règle de droit international n'exige que l'Etat
ait une structure déterminée67(*) » et du Nicaragua
« L'adhésion d'un Etat à une doctrine
particulière ne constitue pas une violation du droit international
coutumier ; conclure autrement reviendrait à priver de son sens le
principe fondamental de la souveraineté des Etats sur lequel repose tout
le droit international, et la liberté qu'un Etat a de choisir son
système politique, social, économique et culturel68(*) ».
La non-discrimination implique donc pour les deux institutions
de Bretton Woods l'impossibilité de lier leur aide à l'existence
dans un pays d'un régime défini. Cependant « il
paraît assez évident que l'octroi ou le refus d'une assistance
financière est politique par nature et que l'appréciation de la
situation économique d'un pays et du bien fondé des mesures
économiques qu'il envisage est forcément fonction de
critères politiques et idéologiques 69(*) ». C'est sur un
postulat identique que l'Assemblée Générale des Nations
Unies a voté la résolution 31/91 qui considère le refus ou
la menace de refus d'assistance au développement économique comme
une forme d'intervention indirecte.
Cependant, auparavant, la CIJ dans l'affaire du
Nicaragua, sur la question de la suppression de l'aide
économique des Etats-Unis au Nicaragua comme étant une sorte
d'intervention, avait conclu que « En ce qui concerne la forme
d'intervention indirecte que constituerait selon le Nicaragua l'adoption de
certaines mesures de caractère économique à son encontre
par les Etats-Unis, la Cour dit ne pas pouvoir, en l'espèce,
considérer ces mesures comme des violations du principe coutumier de
non-intervention70(*)».
Néanmoins, il semble probable, notamment concernant
l'aide bilatérale pour laquelle certains pays affichent clairement la
menace de suppression de leur aide économique si un changement de
système politique dans un pays ne leur convient pas, que des
considérations d'ordre politique entrent en compte dans la mise à
disposition de l'assistance financière. Le problème de la
discrimination au niveau des organisations internationales est plus
difficilement décelable notamment pour les institutions de Bretton Woods
en raison de leur opacité et de leur apolitisme de façade.
Cependant on peut noter un certain développement d'une nouvelle doctrine
qui accepterait la discrimination en fonction de critères
démocratiques ou de respect des droits de l'homme qui remettrait en
cause la non-discrimination.
B. Le principe de
non-intervention
La base du principe de non-intervention est l'article 2,
paragraphe 7, de la Charte de Nations Unies (successeur de l'article 15,
paragraphe 8, du Pacte de la SDN) qui prévoit que « Aucune
disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à
intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la
compétence nationale d'un Etat ni n'oblige les Membres à
soumettre des affaires de ce genre à une procédure de
règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce
principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de
coercition prévues au Chapitre VII ».
Ce paragraphe 7 de l'article 2 qui est relativement vague a
été précisé par des résolutions des Nations
Unies. On peut citer la Déclaration de l'inadmissibilité de
l'intervention dans les affaires intérieures des Etats et la protection
de leur indépendance et de leur souveraineté (résolution
2131(XX)) et la Déclaration relative aux principes du droit
international touchant les relations amicales et la coopération entre
les Etats conformément à la charte des Nations Unies
(résolution 2625 (XXV)) qui proscrivent sous le même
énoncé « toute forme d'ingérence ou toute
menace dirigée contre la personnalité d'un Etat ou contre ses
éléments politiques, économiques et
culturels 71(*)». On peut citer aussi la Déclaration
d'inadmissibilité de l'intervention et de l'ingérence dans les
affaires intérieures des Etats (résolution 36/103)
Il existe aussi une série de textes onusiens
proscrivant l'intervention indirecte comme les résolutions 1803 (XVII),
2158 (XXI), 2542 (XXIV) sur l'intervention indirecte au travers de
sociétés étrangères ou de mouvements de
capitaux72(*) ou encore la
résolution 31/91 qui considère le refus ou la menace de refus
d'assistance au développement économique comme une forme
d'intervention indirecte.
Ce principe a été réaffirmé par la
CIJ dans l'affaire du Nicaragua73(*) où elle énonce que
« L'importante doctrine de la non-intervention dans les affaires
des Etats est tout aussi essentielle pour la paix et le progrès de
l'humanité puisqu'elle est indispensable au bien-être de la
communauté internationale. Le principe de la non-intervention doit
être considéré comme une règle de droit absolue et
sacrée» et précise ses éléments
constitutifs74(*)
« L'intervention interdite doit donc porter sur des
matières à propos desquelles le principe de souveraineté
des Etats permet à chacun d'entre eux de se décider librement
(choix du système politique, économique, social et culturel et
formulation des relations extérieures, par exemple). L'intervention est
illicite lorsque à propos de ces choix, qui doivent demeurer libres,
elle utilise des moyens de contrainte,... ».
Toutefois, malgré sa réaffirmation et ces
précisions, ce principe reste difficile à apprécier. En
effet, en particulier dans le domaine de l'aide, la séparation entre la
coopération et l'interventionnisme semble assez mince. Et c'est cette
mince séparation qui donne au principe de non-intervention
lui-même une dimension politique et idéologique. En effet,
l'interventionnisme peut être vu soit comme une excuse facile pour
certains gouvernement pour faire « passer la pilule »
à la population pour des mesures impopulaires ou au contraire utiliser
la coopération comme un moyen d'ingérence.
Paragraphe 2 : La
prise en compte des principes par les institutions de Bretton Woods
Ces principes de protection de la souveraineté dans le
cadre de l'obtention de l'assistance financière concerne en premier lieu
les relations bilatérales mais il s'applique aussi aux organisations
internationales. Les pays fournisseurs d'aide ne les respectent que très
peu mais le FMI et la Banque, en tant qu'organisations internationales se
doivent de s'y conformer. Elles ont pour cela mis en place une
rhétorique basée sur le consensus et la neutralité afin
d'échapper à toute attaque contre elles au niveau de
l'intervention et de la discrimination. Mais cette rhétorique est
biaisée dans sa conception par le postulat de neutralité de
l'économie et de l'expertise fournie par ces institutions.
A. L'affirmation du respect
des principes par les institutions de Bretton Woods
Les institutions de Bretton Woods se doivent elles aussi de
respecter ces principes, car en tant qu'organisations internationales elles
sont soumises au droit international comme l'a rappelé la CIJ dans
l'affaire de l'Interprétation de l'accord du 25 mars 1951 entre
l'OMS et l'Egypte.
D'ailleurs, elles affirment au travers de leur
littérature le respect de ces principes et la protection de la
souveraineté de leurs Etats membres.
Le Statut de la Banque comporte même un article75(*) de son statut qui lui interdit
de se laisser influencer dans ses décisions par l'orientation politique
de ses Etats membres.
Le Statut du FMI n'interdit pas explicitement la prise en
compte de considérations politiques mais néanmoins son analyse
par J. Gold76(*) conclut
à leur interdiction pour l'accès aux ressources du Fonds.
La conditionnalité est au centre du débat sur le
respect par les institutions de Bretton Woods de la souveraineté des
Etats concernés par leurs programmes. Le Fonds et la Banque voient dans
la conditionnalité un instrument consensuel mais elle peut être
vue comme un instrument d'ingérence comme dans la définition
donnée par Killick77(*) qui la perçoit comme un élément
coercitif et non pas consensuel qui consiste en l'usage du pouvoir financier
pour promouvoir les objectifs du donneur. C'est à dire que la
conditionnalité impose une action de la part des gouvernements sans
laquelle l'aide ne sera pas donnée ou renouvelée ce qui peut
aboutir à des actions faites uniquement pour satisfaire les
volontés du prêteur.
Pour P. Dhonte78(*), la conditionnalité a été
à ses origines le fruit d'un consensus entre les membres du FMI sur les
problèmes de balance des paiements et les moyens d'y remédier. La
conditionnalité reflétait uniquement ce consensus et donc ne
portait en aucun cas atteinte à la souveraineté des membres. Il
conçoit cependant que, à partir des années 70, le
consensus s'est effrité et la conditionnalité a commencé
à apparaître comme une imposition. Mais la perception de la
conditionnalité a de nouveau changé dans les années 90
avec le développement de l'économie de marché dans la
plupart des pays réconciliant les modèles économiques des
pays et le contenu de la conditionnalité. La conclusion de P.Dhonte est
que la conditionnalité est redevenue consensuelle car elle est redevenue
une volonté partagée et représente un
élément important de la crédibilité de ces pays vis
à vis des marchés financiers.
La Banque79(*), quant à elle voit la conditionnalité
comme « an evolving process in support of a policy compact based
on mutual commitment » et elle doit donc être
considérée comme « a credible indicator of
commitment by the Bank and its partners to support a mutually agreed reform
process, not an attempt to force externally designed policy changes on
unwilling governments». La conditionnalité n'est donc en rien
coercitive et ne représente que le soutien de la Banque aux reformes
engagées par les pays. On retrouve aussi le concept de
crédibilité vis à vis de l'extérieur que donne la
conditionnalité au travers du support de la Banque. La
conditionnalité est donc la base d'une solution gagnant-gagnant pour la
Banque et le pays (bien que des auteurs comme Killick la perçoive comme
une solution gagnant-perdant au profit des prêteurs).
La vision des institutions de Bretton Woods de la
conditionnalité est donc consensuelle. Le pays désire mettre en
oeuvre des reformes et il est soutenu financièrement, techniquement et
en terme de crédibilité par le Fonds et/ou la Banque.
Le coté technique est aussi assez important dans
l'affirmation du respect des principes de la souveraineté. Il
représente, en effet, les moyens pour arriver à l'objectif
« consensuellement » défini. Le coté
technique est un élément central de la défense des
institutions de Bretton Woods, il leur permet d'utiliser la neutralité
de ce terme pour justifier le contenu de la conditionnalité. J.M.Sorel
définit ainsi la rhétorique de l'action du Fonds:
« Le Fonds se cantonne à des règles d'action
(« policies») sans se préoccuper de l'aspect
«politique» de celles ci («political») ou de son essence
«politique» (« politics ») 80(*)».
L'action se différencie donc de son but, tout comme
l'élément économique se différencie de son origine
politique. C'est cette séparation qui permet aux institutions de Bretton
Woods de justifier la neutralité de leurs conditions.
C'est donc la combinaison du consensus et de la
neutralité qui doit empêcher les institutions de Bretton Woods de
sombrer dans l'interventionnisme et la discrimination.
B. Un respect biaisé
par l'hégémonie de la doctrine économique dominante
Le Fonds, tout comme la Banque, dissimule ses atteintes
à ces principes derrière la pseudo-neutralité d'une
vérité économique absolue. Un exemple frappant en est la
remarque de M.Guitian81(*), membre éminent du Secrétariat du
Fonds, que « coincidence of ideas and policy augurs well for ...
the acceptance of conditionality »
On peut expliquer le biais dans leur approche grâce au
concept d'hégémonie de l'idéologie dominante (notamment
l'approche gramscienne). En effet, « le cercle des idées
dominantes accumule un pouvoir symbolique qui décrit et classifie le
monde pour les autres. Cette classification se fait non seulement au travers de
la contrainte du pouvoir dominant sur les autres modes de pensée mais
aussi du pouvoir passif qu'il acquiert en créant des habitudes. Elle
devient l'horizon du réel c'est à dire ce qu'est le monde est et
comment il fonctionne, dans toutes se formes applicables. Ces idées
dominantes peuvent supplanter les autres conceptions en posant la limite de ce
qui peut apparaître comme rationnel, raisonnable et crédible mais
aussi exprimable et pensable, au travers d'une rhétorique donnée
des motifs et opportunités offerts à tous 82(*)».
La doctrine néo-libérale et monétariste
est devenue ce cercle des idées dominantes qui donne au monde son
explication. Tout étudiant en économie sera
imprégné de cette théorie et la perpétuera au
travers d'un mode pensée habituel qu'il aura internalisé. La
littérature des institutions de Bretton Woods tout comme l'essentiel de
la vulgarisation économique au travers des médias présente
la doctrine libérale comme étant la seule approche rationnelle et
donc crédible des relations économiques et qui de plus donne
à tout être l'opportunité d'y participer à son plus
grand profit. Cette doctrine devient donc neutre au travers de son
hégémonie. Les institutions de Bretton Woods ne se sentent donc
pas coupables d'interventionnisme en la mettant en place, tout pays critiquant
cette approche ne pouvant être que rétrograde et irrationnel. On
retrouve cette analyse, entre autres, chez C.Castoriadis pour qui l'unification
des modes de consommation « est la traduction concrète,
visuelle d'une homogénéisation internationale des critères
de décision et de jugement sous l'égide d'une rationalité
universelle qui est celle de l'économie et que le Fonds s'emploie
précisément à promouvoir dans les pays en
développement 83(*)».
Et cette stratégie semble avoir fonctionné
puisque les pays en développement eux même remettent en question
leur ordre social face à la vérité absolue
économique. P.Bennefont souligne cette homogénéisation des
critères au niveau du développement de l'Afrique en remarquant
que « trop rarement, les facteurs culturels ont été
pris en compte par les experts occidentaux tandis que trop souvent, les
dirigeants africains les ont occultés, comme si leurs traditions leur
paraissaient surannées 84(*)». On retrouve cette même soumission dans
la plupart des déclarations remettant en cause les effets de
l'ajustement structurel. Ces critiques ne porteront pas sur la doctrine
dominante elle même et son remplacement mais plutôt sur la mise en
place de structures diminuant les effets négatifs. Ce qui finalement ne
fait que renforcer la dimension unique et universelle de
« l'économique ». Un exemple frappant est la
déclaration de Copenhague sur le développement social qui peut
paraître au premier abord comme une véritable critique de l'action
pour le développement des institutions de Bretton Woods mais qui se
révèle être, en fait, une énième
réaffirmation de l'hégémonie économique. En effet
l'engagement 3 paragraphe k) n'est que la perpétuation du système
actuel qui prône «la coopération internationale dans le
domaine des politiques macro-économiques, nous
accélérerons la libéralisation du commerce et de
l'investissement en vue de favoriser la réalisation d'une croissance
économique durable ...85(*) ». La libéralisation, thème
central de la doctrine néo-libérale, fait partie ici de l'horizon
réel. Elle entre dans ce que P.Bourdieu considère faisant partie
de l'hégémonie car consistant en des choses qui vont sans
être dites car étant axiomatiques, et ces choses, étant
des présupposés partagés, n'ont normalement pas à
être le sujet d'explication ou d'argumentation86(*).
Le vecteur principal de cette hégémonie de
l'économique et de sa doctrine est « l'expert » et
son expertise dont les institutions de Bretton Woods se targuent d'être
remplies. L'expert est un personnage a priori neutre en raison de son
expertise « scientifique ». Mais le travail des experts est
l'origine du biais puisqu'ils « essaient de limiter toute
rupture, d'encadrer et de définir le monde qu'ils espèrent
mesurer et analyser. Mais dans l'acte même d'encadrer, ils sont
confrontés à la difficulté de tracer des limites et de
transférer avec succès les conflits politiques vers l'emplacement
limité des calculs qu'ils ont réalisés 87(*)». L'expert,
notamment l'économiste, réduit le champ explicatif des
phénomènes qu'il traite et en même temps le transforme en
fonction de son présupposé doctrinal. C'est à ce niveau
que se développe l'hégémonie puisque l'appréhension
de nombreux facteurs passe désormais au travers de ce filtre. C'est ce
que T.Mitchell critique aussi dans le rôle de l'expert et son rôle
vis à vis du pouvoir en remarquant que « les sciences
sociales, en reliant des événements particuliers à une
raison universelle, et en considérant les interactions humaines comme
données imitent et renforcent cette forme de pouvoir 88(*)».
Le filtre de l'économie représente donc en
quelque sorte « l'arme absolue » des institutions de
Bretton Woods puisqu'elle leur permet donc de justifier, en partie, tout ce qui
pourrait paraître être un atteinte aux principes qui
protègent la souveraineté des Etats.
Section 2 : La
réalité des atteintes à la souveraineté
C'est au travers du biais de l'économisme que les
institutions de Bretton Woods portent atteinte au respect de la
souveraineté des Etats qui demandent leur aide. Et ces atteintes se
situent à la fois dans le libre choix d'un régime et dans le
libre choix de politiques. On se trouve donc dans le cadre d'un non respect des
principes de non-discrimination et non-intervention. Mais ces deux dimensions
sont liées car la double conditionnalité de par son
étendue induit forcément une modification des structures du
régime en place et crée en même temps un carcan dans lequel
les politiques nationales doivent se placer. Il faut donc s'attacher à
démontrer le processus par lequel l'économisme du Fonds et de la
Banque est en fait une pression illégitime sur les gouvernements pour
qu'ils modifient leur régime et adaptent leurs politiques selon les
critères du consensus de Washington en échange de l'aide.
Paragraphe1 : Les
atteintes au libre choix d'un régime
Les institutions de Bretton Woods se veulent neutres quant au
régime intérieur des pays qui demandent leur aide. Cependant,
l'ensemble des conditions que l'on retrouve le plus souvent dans les programmes
d'ajustement structurel représente un véritable modèle de
gouvernance économique. Un pays soumis à l'ajustement sera donc
obligé d'adapter les structures de son régime au modèle du
consensus de Washington. Cela revient, en fait, à conditionner l'aide
à la modification du régime ce qui est en contradiction avec le
principe de non-discrimination. Il faut donc déterminer comment, dans la
pratique, la conditionnalité dans son ensemble permet sous couvert de
technicité et de neutralité économique de forcer les pays
à modifier leur régime politique, économique et social.
A. Intervention et
discrimination dans le choix d'un régime politique
Comme on l'a vu précédemment, l'ajustement
structurel est essentiellement composé d'un panier de mesures que l'on
retrouve toujours et dont on a établi les liens avec le consensus de
Washington. Il faut donc déterminer quels sont les systèmes
politiques compatibles avec ces mesures. Au niveau du contenu
démocratique du système, les institutions de Bretton Woods ont
été et restent encore très tolérantes.
La Banque a, par exemple, continué à
prêter à l'Afrique du Sud sous l'apartheid. De plus, on peut
remarquer que ses prêts pour le Chili de Pinochet ont été
assez importants alors qu'elle n'avait rien prêté sous la
période d'Allende. Le même processus est visible au Brésil
si l'on compare les prêts au gouvernement démocratiquement
élu de Goulart et la période de dictature militaire qui lui a
succédé.
Le Fonds, quant à lui, a suivi plus ou moins la
même vision neutraliste en accordant son aide à des nombreuses
dictatures tant en Afrique qu'en Asie ou qu'en Amérique Latine tout en
oubliant parfois certains régimes jugés non acceptables par ses
principaux bailleurs.
Il a, de même, continué à fournir une
assistance financière (notamment en 1982) à l'Afrique du sud
malgré la résolution de l'ONU. Il a cependant modifié sa
vision en 1983 sous la pression des Etats-Unis en considérant que
l'apartheid avait des conséquences économiques. En effet
« the practice of apartheid results in severe constraints on
labor and capital mobility and other highly inefficient labor and capital
supply rigidities which contribute to balance-of-payments deficits in direct
contradiction of the goals of the International Monetary Fund89(*) ».
On peut néanmoins remarquer que « seuls
les pays jugés "politiquement corrects" par les créanciers sont
admis pour un allégement. Cela signifie que des pays de la liste PPTE,
comme par exemple le Soudan, n'auront pas accès à l'initiative
(car il n'est pas un pays "ami") ... l'Ouganda, allié stratégique
des Etats-Unis en Afrique, est le pays recevant les meilleures conditions
d'allégement (c'est d'ailleurs le seul pays à être
arrivé au terme de l'initiative début 2001) 90(*)».
Cette toute relative neutralité sur la dimension
démocratique du système politique s'explique facilement par le
fait qu'aucune des deux institutions de Bretton Woods n'a de compétences
dans ce domaine. Cependant, il semble que cela soit aussi dû au fait que
la démocratie ne soit pas encore un concept économique (bien
qu'il tende à le devenir). En effet, Le Fonds exerce des atteintes au
libre choix politique sur d'autres dimensions du systèmes qu'il proclame
être économiques. Le FMI et la Banque, sous couvert de
technicité économique, proposent des mesures qui prisent
individuellement peuvent être justifiées par un certaine
rationalité économique mais qui dans leur ensemble
représentent une véritable orientation du système
politique.
Les atteintes les plus flagrantes au libre choix d'un
système politique sous couvert d'efficience économique sont les
notions de décentralisation, de gouvernance et de lutte contre la
corruption fréquemment employées par les institutions de Bretton
Woods. Une dimension de la bonne gouvernance est le besoin d'un environnement
économique sûr. Sous couvert de cette appellation
économique, le FMI91(*) propose la remise en forme du système
juridique (notamment sur la propriété et les contrats),
l'amélioration de l'ordre c'est à dire la protection contre des
menaces extérieures mais pas seulement vis à vis d'une possible
menace militaire ou de racket mais aussi des menaces économiques et
sociales. De même, il faut renforcer la crédibilité du
gouvernement ce qui peut être traduit par le fait que le gouvernement
doit instaurer les structures voulues par les investisseurs (Banque Centrale
indépendante, signature d'accords sur la protection de
l'investissement...). La modification du système juridique ou de
structures comme la banque centrale est bien directement liée au
régime politique choisi par l'Etat. Des pressions pour modifier ces
aspects peuvent donc bien être considérées comme des
atteintes au libre choix d'un régime politique et la réalisation
de ces modifications comme un préliminaire à l'obtention de
l'aide une atteinte au principe de non-discrimination.
On retrouve la même volonté de modification du
système politique dans les documents de la Banque Mondiale. Cette
dernière va même plus loin puisqu'on trouve dans ses thèmes
officiels d'intervention92(*) : l'architecture du secteur public (allant de la
structure du gouvernement et des attributions des ministères ou la
reforme des législations sur les services publics), la corruption, la
décentralisation, le fonctionnement des services publics.
B. Intervention et
discrimination dans le choix d'un régime économique et social
Les institutions de Bretton Woods, si elles n'ont pas de prise
directe sur le système politique, ont par contre des compétences
importantes en ce qui concerne le régime économique.
J.M. Sorel énonce que « l'intervention -
ou son degré supérieur : l'ingérence - découle
d'un modèle économique que le Fonds cherche à imposer pour
intégrer (ou réintégrer) les économies des pays en
développement dans un schéma libéral 93(*)». Les termes
schéma et modèle économique démontrent que
l'intervention ne porte pas ici sur telle ou telle politique économique
mais sur un ensemble qui n'est en fait que le choix d'un régime
économique.
Un régime économique est l'ensemble des
structures dont dépend la distribution des richesses. Le système
politique joue un rôle indirect dans le régime économique
ce qui permet aux institutions de Bretton Woods d'y exercer une influence comme
on vient de le voir. Mais il a aussi un rôle direct dans
l'économie sur lequel les programmes d'ajustement structurels peuvent
faire peser une menace. Au niveau du régime économique et social,
c'est à dire sans parler des politiques qui seront traitées plus
loin, l'Etat a pu mettre en place des structures de gestion, de contrôle
voire même d'administration de l'économie qui peuvent se
révéler en contradiction avec les objectifs affichés de
l'ajustement structurel. Si la modification de ces structures est requise comme
un présupposé à l'obtention de l'aide par les institutions
de Bretton Woods, que ce soit au travers des mesures préalables aux
programmes d'ajustement structurel ou encore lors de la première
étape de l'initiative PPTE ou bien même lors d'une révision
de programme, on se retrouve dans une situation de discrimination.
On peut déterminer dans les grandes lignes quels sont
les secteurs où les atteintes au libre choix d'un régime
économique et social peuvent se produire.
Un premier secteur est celui des entreprises publiques. De
nombreux pays en développement (mais aussi développés mais
ces derniers ne craignent pas la conditionnalité) ont mis en place une
gestion publique de certains biens et services. On peut penser notamment
à la gestion de la distribution de l'eau, de l'électricité
ou encore à la production de certaines matières premières.
L'existence de telles entreprises peut se justifier par une volonté de
contrôle sur les ressources naturelles ou bien à des fins de
redistribution économique et sociale. Cependant, le grand credo
des institutions de Bretton Woods est la privatisation qu'elles justifient
par la plus grande efficience du secteur privé et par l'avantage de la
régulation par les règles de marché et de concurrence. Si
l'on prend l'exemple du Cameroun et des mesures dans ce secteur qu'il a
dû prendre pour accéder au bénéfice de l'initiative
PPTE94(*), on trouve la
libéralisation complète des secteurs du cacao, du café, du
pétrole, de la foret et du transport maritime et ferroviaire et la
privatisation des entreprises publiques de cuivre, de sucre, d'eau,
d'électricité, de téléphone et de transport.
Un deuxième aspect est celui de la régulation et
de l'administration des prix par l'Etat afin de permettre à la
population l'accès à certains biens et services
considérés comme importants. Là encore, les services du
Fonds et de la Banque y voit une contradiction avec leurs principes du
développement par l'intégration aux marchés. Si l'on prend
encore l'exemple du Cameroun et des mesures qu'il a du prendre pour être
considéré pour l'initiative PPTE, on trouve l'élimination
du contrôle des prix pour la plupart des produits mais aussi ce qui
semble un peu plus surprenant dans le même paragraphe la
libéralisation du code du travail (peut être une sorte
d'élimination du contrôle des prix sur les salaires et
licenciements).
Un troisième aspect possible des atteintes au
régime économique et social se situe au niveau du secteur
bancaire et financier. Ce dernier est d'un importance stratégique pour
un Etat puisqu'il permet de réguler l'épargne et
l'investissement et c'est pourquoi il mérite d'être
considéré comme un aspect à part. Toujours dans le cas du
Cameroun, on trouve la suppression de la législation qui imposait que un
tiers du capital des banques soit détenu par des intérêts
nationaux, la libéralisation de la concurrence entre les banques et
l'élimination du contrôle des prix sur les transactions bancaires,
la privatisation des banques détenues par l'Etat et la refonte de la
législation bancaire et financière.
On voit bien, au travers de ces trois aspects qui ne
représentent en rien une liste exhaustives des atteintes possibles, que
les institutions de Bretton Woods ont les moyens de faire modifier son
régime économique et social à un pays que ce soit de son
plein gré ou sous la contrainte de l'obtention d'une aide
financière.
Paragraphe 2 : Les
atteintes au libre choix des politiques
Les programmes des institutions de Bretton Woods au travers
de la double conditionnalité impose un véritable carcan à
la mise en place de politiques nationales. La restriction du libre choix des
autorités nationales quant aux politiques internes revient à
imposer une série de politiques desquelles le pays ne peut pas sortir.
La conditionnalité, en conditionnant les politiques futures
représente un véritable outil interventionniste. Son champ
d'action ne se limite pas uniquement aux politiques économiques mais a
tendance à s'étendre de plus en plus aux politiques sociales que
ce soit indirectement par le biais de conditions économiques ou
même, depuis peu, en conditionnalisant certaines parties des politiques
sociales.
A. L'intervention dans les
politiques économiques
L'orthodoxie néo-libérale et
l'austérité des programmes d'ajustement structurel peut
être assimilée à une intervention car elle empêche
toute politique tant économique que sociale en contradiction avec ces
principes.
Il devient impossible de protéger sa production
nationale contre les produits importés car il faut lever les quotas
à l'importation et de plus les taux d'intérêt
élevés (pour combattre l'inflation) vont rendre plus difficile
toute expansion de la production interne en renchérissant le coût
de l'investissement.
De même il devient impossible de protéger sa
consommation intérieure puisque le but des programmes est
d'améliorer les stimulants à l'exportation et donc de
détourner de la consommation intérieure ce qui peut être
exporté.
Il est tout aussi impossible de mettre en place une politique
de relance puisqu'elle ne pourra être financé par le budget de
l'Etat qui doit être reformé tout comme le système fiscal
et de plus l'Etat doit revoir ses priorités d'investissement public ce
qui empêche toute politique de « grands travaux » que
l'on pourrait trouver dans un modèle de relance keynésienne.
Le rapport Metzler dénonce cette attitude
« The IMF wields too much power over developing countries'
economic policies. The use of IMF resources and conditionality to control the
economies of developing nations often undermines the sovereignty and democratic
processes of member governments receiving assistance. IMF staff often admit
(with pride) that the executive branch of borrowing nations likes to use IMF
conditions to exact concessions from their legislatures. While this mechanism
may sometimes work to achieve desirable reforms, it often does so by shifting
the balance of power within countries in ways that distort the constitutionally
established system of checks and balances. A related complaint, often voiced by
union advocates, is that the IMF's policies interfere with the rights of
workers in developing countries by promoting "labor-market flexibility" as a
condition for assistance. The critics regard these policies as inimical to the
growth of trade unions in developing nations95(*) »
Ce carcan idéologique imposé aux
économies des pays bénéficiaires fonctionne car la double
conditionnalité crée le cadre de toute politique
économique future. Sous couvert de la neutralité des instruments
économiques et de leur technicité, les institutions de Bretton
Woods agissent comme « juge et partie » dans la conception des
programmes économiques et dans leur appréhension par
l'extérieur en terme de crédibilité, notamment
auprès des marchés. Toute tentative de sortie du carcan
établi par la double conditionnalité est sanctionnée soit
par la non réalisation des critères qui entraîne la
révision de l'aide soit par l'impact sur la crédibilité du
pays par le biais des communications du FMI, et dans une moindre mesure de la
Banque, qui servent de référence aux marchés et aux autres
bailleurs de fonds résultant ainsi en une détérioration
des anticipations des agents économiques qui influence directement les
indicateurs économiques et de la même la réalisation des
critères de réalisation.
Les pays concernés n'ont donc plus le libre choix de
leurs politiques économiques, et cela bien au delà du simple
respect des limites posées par la conditionnalité.
Il y a donc bien une véritable atteinte au principe de
non-intervention. On peut même aller plus loin en caractérisant
cette situation comme étant une sorte de condominium économique
des institutions de Bretton Woods sur les pays soumis à l'ajustement
structurel.
B. L'intervention dans les
politiques sociales et culturelles
L'intervention des institutions de Bretton Woods dans les
secteurs sociaux et culturels se fait principalement par le biais de la
considération économique de ces secteurs. On peut aussi noter les
différences d'appréciation entre le Fonds et la Banque. Le FMI a
longtemps rejeté toute responsabilité sociale et refusait
d'introduire des objectifs sociaux dans ses programmes. Il a ensuite revu
légèrement sa position en acceptant de prendre en compte les
conséquences sociales de sa conditionnalité
macro-économique mais tout en continuant de refuser l'introduction de
critères sociaux dans la conditionnalité même, c'est
à dire les critères de réalisation. Cependant cette
neutralité sociale n'est que factice car les conditionnalités
macro-économiques du Fonds visent souvent les politiques sous couvert
d'efficacité économique globale. Les réductions
imposées du budget de l'Etat pour parvenir à la stabilisation de
la balance des paiements remettent forcément en cause la continuation de
politiques sociales ou culturelles coûteuses comme l'accès gratuit
à la santé ou à l'éducation ou encore le maintien
de protections sociales pour le chômage ou la vieillesse. Tout comme
l'introduction de l'économie de marché peut remettre en cause un
système culturel (donc de choix de valeurs) non adapté à
la logique d'entreprise et de profit.
Mais le Fonds se refusait a en entendre parler puisque
« c'est aux pays membres qu'il appartient de décider des
choix sociaux qu'impliquent l'ajustement96(*) ». Cependant un changement de cap va
s'opérer à partir de 1986 avec l'intensification de la
collaboration avec la Banque au travers de l'élaboration commune des
programmes avec les DCPE. Le Fonds va accepter la prise en compte de
critères sociaux mais ne pouvant statutairement l'intégrer dans
ses programmes, il va « opérer un report sur la Banque
Mondiale ou d'autres organisations qui ne possèdent pas les mêmes
limites statutaires 97(*)». On trouve donc désormais dans les
programmes conjoints des préoccupations sociales dès la
conception du programme. En avril 1997 dans le document préparé
par le Fonds et la Banque "Cap Paper for the Preliminary HIPC Initiative
Documents for Bolivia, Burkina Faso, Côte d'Ivoire and Uganda" on peut
lire que "While it had originally been thought that social sector issues
and possible monitoring criteria would be treated more extensively in the final
HIPC document, in view of the strong interest in these issues, staff now intend
to present a fuller treatment of these points in future preliminary HIPC
documents." Cela semble même ouvrir la porte à une
véritable conditionnalité sociale.
C'est donc principalement au travers de l'action de la Banque
que la double conditionnalité va exercer directement son pouvoir sur les
politiques sociales et culturelles. La Banque s'est occupée assez
tôt des secteurs sociaux après l'échec relatif du
rattrapage et des grands projets et la mise en oeuvre de la lutte contre la
pauvreté. Mais sa conception des secteurs sociaux a elle aussi
évolué. Elle se contentait au départ de construire les
structures (écoles et hôpitaux) puis elle s'est progressivement
dirigée dans ce qu'elle a qualifiée d'assistance technique c'est
à dire la réalisation même des programmes, la formation des
enseignants et médecins et leur contrôle c'est à dire plus
la gestion du service public. Cette gestion du service public s'est
caractérisée par une approche principalement économique
des secteurs sociaux en terme d'efficacité et de rentabilité
(financière mais aussi du capital humain). Cela est assez
réducteur car « the rhetoric of management, financial
soundness, and market forces depoliticized these complex issues. Programs for
decentralization and cost recovery transformed questions of social inequality
and powerlessness into issues of efficiency and control.98(*) ».
Mais c'est encore ce type d'approche biaisé par la
« rationalité » économique
omniprésente qui fait que l'action de la Banque représente une
véritable intervention dans les politiques sociales et culturelles. En
effet, dans ses projets et ses conditions, la Banque ne laisse plus au pays la
latitude suffisante pour prendre en compte ses aspects sociaux et culturels
propres et mettre en place son véritable secteur social. C'est par
exemple au travers d'exemple comme « la
Banque démontrant que l'éducation privée ou en tout
cas payante est plus « efficace » l'éducation
publique gratuite , on a le sentiment très clair qu'un grand nombre
de données politiques et sociales (sinon culturelles) sont
ignorées99(*)».
On peut donc dire qu'il y a une véritable intervention
des institutions de Bretton Woods dans le libre choix des politiques sociales
et culturelles que ce soit directement par le rôle de la Banque dans la
double conditionnalité ou indirectement par le biais de la gestion des
services publics ou du budget et de la balance des paiements.
Chapitre 2 : La
cohérence par rapport aux principes des droits de l'homme
Au niveau de la cohérence externe de la double
conditionnalité, il faut aussi s'intéresser à la relation
qui existe entre les conditionnalités en tant qu'instruments de
politiques économiques et le respect des droits de l'homme. Cette
analyse se scinde en deux tendances qu'ont connues les institutions de Bretton
Woods. Jusqu'à une période récente, le FMI, et la Banque
dans une moindre mesure, ont ignoré les conséquences sur les
droits de l'homme de leurs programmes. Elles considéraient, en effet,
qu'elles n'étaient responsables que de ce qui rentrait directement dans
leurs programmes, et qu'il était du ressort des pays
bénéficiaires d'étudier l'impact des mesures soutenues et
de mettre en place les structures nécessaires pour limiter les
externalités négatives. Toutefois, l'augmentation du nombre des
pays sous ajustement structurel conjugué à la diffusion
progressive des résultats de ces programmes, par des ONG, des
universitaires et même les institutions de Bretton Woods elles
même, ont entraîné des critiques insistantes demandant la
prise en compte des droits de l'homme dans ces programmes. Face à
l'ampleur de la critique et à la dégradation de leur image qui en
a découlé, les instituions de Bretton Woods ont commencé
à se préoccuper des dimensions humaines dans leur programme avec
l'apparition de la lutte contre la pauvreté et des nouvelles
conditionnalités qui s'y rattachent.
On se situe donc maintenant dans une phase transitoire de
prise en compte progressive des droits de l'homme dans les programmes des
institutions de Bretton Woods. Les concepts de développement social et
de bonne gouvernance sont les prémisses d'une nouvelle tendance qui
aboutira à l'intégration des droits de l'homme dans la
conditionnalité. On entend déjà parler de
conditionnalité sociale et démocratique. Mais cette
avancée n'est pas sans risque pour les institutions de Bretton Woods. En
effet, il semble que ces nouveaux principes soient difficilement conciliables
avec le respect de la souveraineté des pays concernés et que de
plus le FMI et la Banque ne pourront plus se cacher derrière la
« neutralité » de l'approche économique pour
justifier cette nouvelle tendance.
Section 1 : La double
conditionnalité et les droits économiques, sociaux et
culturels
La double conditionnalité a un impact direct sur le
respect des droite économiques, sociaux et culturels. En effet, les
conséquences des programmes d'ajustement structurel (et de leur
conditionnalité) modifient directement et indirectement les conditions
économiques, sociales et culturelles de la vie des habitants des pays
concernés. L'amélioration des conditions économiques est
un objectif statutaire des institutions de Bretton Woods et devrait donc
être en conformité avec le respect des droits économiques.
Cependant, il faut constater que l'amélioration globale de
l'activité économique ne se traduit pas forcément par une
amélioration proportionnelle des conditions économiques de
tourtes les classes de la population. Et c'est à ces deux niveaux qu'il
faut étudier l'impact des conditionnalités. Mais ces mesures
économiques ont aussi, bien souvent, des répercussions sur les
conditions sociales et culturelles de la population. Et là encore, il
faut s'attacher à déterminer quel est le rôle des
institutions de Bretton Woods dans le respect des droits de la population bien
que certaines de ces considérations aient été
ignorées par les instituions de Bretton Woods, et en particulier par le
FMI, jusqu'à une période récente
Paragraphe 1 :
L'impact de la double conditionalité sur l'économie
Le but premier des institutions de Bretton Woods est
l'amélioration des conditions économiques des pays qui demandent
leur assistance. On pourrait s'attendre au moins dans ce domaine à une
réussite de la double conditionnalité. L'impact des programmes
sur le développement économique peut être
appréhendé sous plusieurs aspects. Le premier est l'impact sur la
croissance économique du pays. Cet indicateur est basé sur
l'évolution du PNB (voir du PIB) et donne un indicateur de
l'évolution globale de l'économie sans tenir compte de la
répartition sectorielle ou sociale de cette amélioration des
conditions économiques. Un second aspect peut être
l'évolution de la répartition de la richesse nationale entre les
diverses composantes humaines du pays. Cet indicateur a l'avantage de pouvoir
déterminer à qui profite de la croissance (ou qui est
touché par la récession). Il permet de mieux analyser l'impact du
développement au niveau de la répartition des revenus et donc des
possibilités économiques offertes aux différentes couches
de la population.
A. L'impact sur la
croissance
La croissance est un objectif indirect du FMI inscrit dans ses
statuts. Il doit en effet « faciliter l'expansion et
l'accroissement harmonieux du commerce international et contribuer ainsi
à l'instauration et au maintien de niveaux élevés d'emploi
et de revenu réel et au développement des ressources productives
de tous les Etats membres, objectifs premiers de la politique
économique100(*) ». C'est par contre un des objectifs
direct de la Banque Mondiale101(*).
Il semblerait donc logique que sur ce point, les deux
institutions de Bretton Woods soient en parfaite harmonie et donc on pourrait
s'attendre à des résultats probants.
Il n'en est rien, dans une étude de 1992
intitulée « Les prêts de la Banque Mondiale à
l'ajustement et les performances économiques de l'Afrique subsaharienne
dans les années 80 : Comparaison avec d'autres pays à faible
revenu », La Banque admet que sur six pays présentés
comme des exemples de réussite des politiques d'ajustement, quatre ont
enregistré une détérioration de leur taux d'investissement
et deux ont affiché des taux de croissance négative du PIB dans
les périodes où ils ont appliqué des programmes
d'ajustement102(*).
En 2000, dans son rapport sur l'Afrique intitulé
« L'Afrique peut-elle revendiquer sa place dans le
XXIème siècle ? », la Banque admet que:
« Il faut reconnaître que l'ajustement en Afrique a
été fortement contesté et que les réformes restent
incomplètes. (...) Plusieurs études ont trouvé un rapport
limité, voire inexistant, entre les réformes et la
réussite tant sur le plan de la croissance que de la réduction de
la pauvreté. Puisque la conception des réformes était
laissée aux conseillers extérieurs, on a assisté à
une érosion de la capacité interne de gestion économique
et la responsabilisation des gouvernements africains à l'égard
des résultats économiques s'en est trouvée amoindrie
103(*)».
Le Fonds est lui aussi montré du doigt pour son manque
de résultat dans sa part des programmes d'ajustement. Le rapport Meltzer
dénonce ce résultat « IMF interventions---both
long-term structural assistance and short-term crisis management---have not
been associated, on average, with any clear economic gains to recipient
countries. Numerous studies of the effects of IMF lending have failed to find
any significant link between IMF involvement and increases in wealth or
income104(*) ».
De même, une étude de 1990105(*) portant sur la
période 1973-1988 montre que le taux de croissance est significativement
plus faible dans les pays adoptant un programme du Fonds. Cette diminution est
évaluée à 0.7% du PNB par an ce qui représente par
exemple une baisse de 6% du PNB pour un pays qui aurait été
pendant 6 ans sous un programme du Fonds.
Il faut cependant prendre ces chiffres avec des
précautions puisque d'autres études commandées par le FMI
comme le « Report of the Group of Independent Persons Appointed to
Conduct an Evaluation of Certain Aspects of the Enhanced Structural Adjustment
Facility » montrent qu'au contraire il y a une augmentation du
PNB pour les pays sous programmes d'ajustement structurel en comparaison aux
autres pays. Cependant, ces études reconnaissent un échec relatif
sur certains programmes au niveau de la croissance mais qui est compensé
par l `amélioration d'autres indicateurs macro-économiques
comme le montre le tableau suivant :
Table 1. Bangladesh: Comparison of Pre-Adjustment and
Mid- and Post-Adjustment by Macro Key Indicators106(*)
|
Pre-Adjustment
|
Mid- and Post-Adjustment
|
|
Sample
|
Mean (in percent)
|
Standard
Deviation
|
Sample
|
Mean (in percent)
|
Standard
Deviation
|
Real GDP growth rate Current account/GDP
Investment/GDP Exports/GDP
Inflation(CPI) Government
deficit/GDP
|
11
11
11
11
11
6
|
4.5
-4.1
11.7
5.7
10.1
-8.9
|
0.03
0.018 0.019 0.007 0.043
--
|
9
9
9
9
9
9
|
4.0
-1.1
15.2
9.6
6.4
-6.7
|
0.01
0.022
0.023
0.023
0.033
--
|
Note: All the above figures are calculated based upon the data
from the IMF's International Financial Statistics.
Malgré le doute qui plane sur la véracité
des chiffres fournis par les différentes études, on peut quand
même conclure que les programmes d'ajustement structurels mis en place
par le Fonds et la Banque se sont assez peu efficaces au niveau de
l'amélioration de la croissance dans les pays en développement
concernés.
B. L'impact sur la
pauvreté
Le Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels a été adopté le 16 décembre
1966, il est entré en vigueur le 3 janvier 1976. Ce texte pose plusieurs
principes relatifs à la pauvreté.
L'article 11 reste général sur les attributs de
la pauvreté en reconnaissant « le droit de toute
personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa
famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants,
ainsi qu'à une amélioration constante de ses conditions
d'existence ».
Au niveau du droit au travail dans son article 6, il expose
que « Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le
droit au travail, qui comprend le droit qu'a toute personne d'obtenir la
possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou
accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce
droit »
Au niveau de la rétribution du travail son article 7 a)
ii) prévoit que
« Les Etats parties au présent Pacte
reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir de conditions de travail
justes et favorables, qui assurent notamment:
a) La rémunération qui procure, au minimum,
à tous les travailleurs: ;
ii) Une existence décente pour eux et leur famille
conformément aux dispositions du présent
Pacte »
On retrouve la même préoccupation dans l'article
23 de la déclaration universelle des droits de l'homme qui énonce
que « 1. Toute personne a droit au travail, au libre choix de son
travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail
et à la protection contre le chômage. 3. Quiconque travaille a
droit à une rémunération équitable et satisfaisante
lui assurant ainsi qu'à sa famille une existence conforme à la
dignité humaine et complétée, s'il y a lieu, par tous
autres moyens de protection sociale.».
L'accès au travail et à sa
rémunération est un problème essentiel de la lutte contre
la pauvreté car il représente l'essentiel du pouvoir d'achat des
pauvres. Mais l'ajustement structurel remise cette considération au
second plan derrière des objectifs plus
« prioritaires ».
En effet, pour réduire l'inflation les institutions de
Bretton Woods préconisent la déflation salariale. Cet effet est
accru par un deuxième objectif qui est d'attirer l'investissement
étranger par le biais de salaires toujours plus bas et par la
détérioration de la protection du travail.
Ces conséquences sur la pauvreté ont
été étudiées par un rapport de l'UNICEF qui en
donne quelques exemples intéressants. Un d'entre eux est que, pendant la
période 1981-83 au Chili alors sous programme d'ajustement, la part des
revenus des revenus des 40% les plus pauvres de la population a
baissé107(*). Au
delà de cet exemple, Cette étude établit que les
programmes d'ajustement structurel ont augmenté la pauvreté,
c'est à dire le nombre de personnes vivant au dessous du seuil de
pauvreté108(*)
De même, J.M. Sorel109(*) note qu'au Mexique, le peuple et les classes
moyennes souffrent de paupérisation et que les revenus salariaux ont
chuté de 50 % en 7 ans.
Selon l'OIT, dans la plupart des pays d'Afrique, par exemple,
les salaires réels ont baissé de 50 à 60 % depuis le
début des années 80 et, alors que le pourcentage de pauvres a
pratiquement doublé dans plusieurs pays appliquant des PAS, la part du
revenu national allant à la couche la plus riche de la population a
nettement augmenté au cours des 15 dernières
années110(*).
Entre 1978 et 1995, 72% des pays sur lesquels l'OIT a
publié des statistiques ont vu leur chômage augmenter pendant les
années où ils ont reçu des financements du FMI111(*).
De même, une étude empirique de F. Stewart montre
que les programmes d'ajustement des années 80 ont contracté le
revenu par habitant (70% des pays d'Afrique et d'Amérique Latine sous
ajustement), augmenté le chômage et la pauvreté
urbaine112(*).
Plus généralement, l'ajustement a eu un impact
négatif sur la pauvreté comme le note le rapport E/1990/81 du
Secrétariat Général des Nations Unies
« adjustment policies in many cases have aggravated the situation
of the poor. Real wages have dropped, access to health and to education has
been reduced, and in some countries the decline in infant mortality has slowed
down or has stopped entirely 113(*)».
De même, au début des années 2000,
« une étude de l'économiste de la Banque mondiale
William Easterly a montré que les pays n'ayant pas suivi les programmes
d'ajustement ont obtenu de meilleurs résultats en matière de
lutte contre la pauvreté que ceux ayant appliqué les
réformes du FMI et de la Banque mondiale 114(*)».
Il semble donc assez évident que la
conditionnalité en tant que vecteur de politique économique a
été à l'origine d'un impact négatif sur
l'état de la pauvreté dans les pays qui ont
bénéficié des programmes d'ajustement structurels des
institutions de Bretton Woods.
Ces conséquences sont en complète opposition
avec les principes du Pacte des droits économiques, sociaux et culturels
de 1966 (bien que cela ne leur soit pas opposable vu qu'elles ne sont pas
signataires du Pacte).
Paragraphe 2 : La
dimension sociale des conséquences de la double conditionnalité
Les conditionnalités ou la double
conditionnalité dans la plupart des programmes d'ajustement structurel
des institutions de Bretton Woods ont eu un impact négatif non
négligeable sur le domaine social. Pourtant, les composantes
essentielles de ce domaine font partie des droits sociaux défendus par
les droits de l'homme. L'impact des programmes du FMI et de la Banque Mondiale
peut être subdivisé en deux catégories que sont l'impact
indirect des mesures sur les conditions sociales des habitants des pays
concernés et l'impact direct qu'ont ces programmes sur le secteur social
en lui-même. Les conséquences sociales de l'ajustement structurel
ont été longtemps négligées par les institutions de
Bretton Woods mais l'ampleur des dommages causés à ces pays et
les répercussions de ces détresses sociales ne peut être
ignorée.
A. L'impact social
Les conditions sociales sont aussi largement défendues
au travers de différents textes des droits de l'homme et notamment par
le Pacte de 1966.
On trouve dans ce dernier plusieurs articles avec lesquels la
double conditionnalité peut notamment entrer en conflit. L'article 11
précité sur les attributs de la pauvreté reconnaît
un droit à la nourriture et au logement.
L'article 12 traite de la dimension sanitaire et
énonce
« Les Etats parties au présent Pacte
reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de
santé physique et mentale qu'elle soit capable
d'atteindre »
On retrouve la même préoccupation dans l'article
25 de la déclaration universelle des droits de l'homme qui énonce
que «Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour
assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment
pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux
ainsi que pour les services sociaux nécessaires »
Concernant la malnutrition, la Commission des droits de
l'homme montre par exemple que « Des faits probants montrent que
le niveau nutritionnel a baissé dans les couches
défavorisées de la population par suite de la suppression des
subventions alimentaires. La montée du chômage a des
conséquences analogues. La réorientation des politiques
agricoles, qui consiste essentiellement à remplacer des productions
vivrières destinées à la consommation intérieure
par des cultures de café, de tabac ou de coton afin de
générer des ressources en devises, a entraîné, avec
le recul considérable des disponibilités alimentaires, une baisse
des niveaux nutritionnels et la malnutrition ».
L'UNICEF115(*) a aussi
étudié cette composante des conséquences de l'ajustement
structurel et a démontré que sur dix nations
étudiées, huit d'entre elles avaient connu une hausse de la
malnutrition. Et cet état s'explique par l'élimination des
subventions alimentaires, la baisse du pouvoir d'achat et la hausse des prix
des produits alimentaires qui a crée une baisse de l'apport alimentaire
touchant 20 à 40% de la population selon les pays.
Le droit au logement est aussi touché par l'ajustement
structurel. En effet, la baisse du pouvoir d'achat ou même des salaires
conjuguée à la montée du chômage pose le
problème du maintient d'un logement décent pour les classes les
plus touchées de la population.
La Commission des Droits de l'Homme précise qu'en plus
« le niveau élevé des taux d'intérêt
met définitivement fin au rêve de ceux qui auraient
souhaité être propriétaires d'un logement, et la
dévaluation de la monnaie entraîne un renchérissement des
matériaux de construction. Comme l'État cesse de fournir
directement des logements ou des allocations de logement aux pauvres et que le
marché de l'immobilier locatif n'est plus réglementé, les
pauvres sont exploités par les propriétaires de logements
privés et le loyer absorbe souvent plus de la moitié de leurs
maigres ressource 116(*)».
L'aggravation des conditions sociales cumulée à
l'augmentation de la pauvreté crée par le respect de la
double conditionnalité des institutions de Bretton Woods a
été à l'origine de nombreux troubles sociaux dans les pays
soumis à l'ajustement dans de nombreux pays117(*).
Au Soudan , en octobre-novembre 1987 , la dévaluation
de la monnaie et la hausse des prix résultant des programmes du FMI et
de la Banque mondiale ont conduit à des manifestations d'environ 15000
personnes à Khartoum, dénonçant les conséquences de
l`ajustement structurel et ses initiateurs.
En Algérie , en octobre 1988 , plus de 200 personnes on
été tuées dans des manifestations contre le niveau des
prix et le chômage à la suite des programmes des institutions de
Bretton Woods.
En Jordanie , en Avril 1989 , des manifestations contre
l'augmentation du prix des denrées alimentaires ont commencé dans
le sud de la Jordanie peu de temps après l'approbation d'un PAS par le
FMI. Cinq manifestants au moins ont été tués par la
police. Et en Août 1996 , des manifestations ont éclaté
à Karak et dans le sud du pays après que le FMI ait
demandé un arrêt des subventions, triplant en cela le prix du
pain.
Mais cela peut même aller plus loin que de simples
troubles. Certain auteurs comme Michel Chossudovsky118(*) voient une relation entre
l'ajustement et la déclenchement des conflits. Au travers de l'exemple
du Rwanda, il explique cette relation par la suppression des filets de
protection relevant de l'Etat et les politique économiques du Fonds et
de la Banque qui ont laissé l'économie rwandaise en ruine
après l'effondrement du marché international du café et
les dévaluations successives. L'aggravation de la misère
consécutive aux PAS, d'après Chossudovsky, a
préparé le terrain sur lequel a pu germé la guerre civile
et le génocide.
B. L'impact sur le secteur
social
Au delà des simples conditions sociales, le Pacte de
1966 reconnaît un droit à l'existence de structures afin d'assurer
un niveau minimum de prestations sociales.
Son Article 9 traite de ce que les institutions de Bretton
Woods appellent les « filets sociaux » et énonce le
droit de toute personne à la sécurité sociale, y compris
les assurances sociales.
L'article 13 reconnaît un droit à l'enseignement
et notamment :
« a) L'enseignement primaire doit être
obligatoire et accessible gratuitement à tous;
b) L'enseignement secondaire, sous ses différentes
formes, y compris l'enseignement secondaire technique et professionnel, doit
être généralisé et rendu accessible à tous
par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration
progressive de la gratuité;
c) L'enseignement supérieur doit être rendu
accessible à tous en pleine égalité, en fonction des
capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment
par l'instauration progressive de la gratuité;
d) L'éducation de base doit être
encouragée ou intensifiée, dans toute la mesure possible, pour
les personnes qui n'ont pas reçu d'instruction primaire ou qui ne l'ont
pas reçue jusqu'à son terme »
L'article 12 sur les conditions sanitaires, déjà
cité, traite dans son paragraphe d) des structures
médicales : « d) La création de conditions
propres à assurer à tous des services médicaux et une aide
médicale en cas de maladie »
L'austérité budgétaire imposée au
travers de la conditionnalité des politiques d'ajustement structurel a
porté un coup sévère aux services sociaux de base et par
là même au respect des droits économiques, sociaux et
culturels des citoyens des pays concernés.
Au niveau de l'éducation, l'UNESCO a fait
étudier ce phénomène et l'enseignement primaire a
été le plus durement touché et de graves dérapages
se sont produits en Afrique subsaharienne. Le pourcentage d'enfants de 6
à 11 ans scolarisés est tombé de 55 % en 1979 à 45
% en 1995119(*).
En Amérique Latine, on a assisté à une
baisse cumulée de 40% des dépenses de santé par habitant
entre 1980 et 1984 en Bolivie, Guatemala, République Dominicaine et
entre 15% et 40% au Salvador, Chili, Barbade, Jamaïque, Costa Rica,
Honduras, Argentine et Uruguay. Tous ces pays étaient sous programme
d'ajustement durant cette période120(*).
L'étude de l'UNICEF sur l'ajustement structurel a
démontré, de manière identique, que dans les 42 pays les
plus pauvres, les dépenses de santé avaient chuté de plus
de 50% dans les années 80 et que les dépenses d'éducation
avait baissé de plus de 25%121(*).
La chute des dépenses de santé a des
conséquences importantes comme au Vietnam où
« désormais, en zone rurale, la moitié des
dépenses de santé doivent être supportées par le
patient. A Hanoi, des coupes sévères sont effectuées dans
les dépenses de santé : l'utilisation de produits anti-moustiques
a été arrêtée, le programme d'amélioration
des hôpitaux est stoppé... Ainsi, des maladies qu'on pensait
éradiquées réapparaissent : le typhus, la dengue, le
choléra, la malaria... De même, les salaires du personnel de
santé sont faibles. Celui-ci doit donc exercer une double
activité ou part travailler dans le secteur privé122(*) »
La chute des dépenses d'éducation a aussi
été à l'origine de troubles comme au
Bénin123(*), en
janvier-juin 1989 , où les étudiants de l'Université de
Cotonou ont fait la grève pendant six mois afin de protester contre le
non-paiement des bourses depuis plusieurs mois et l'intention du gouvernement
d'arrêter de les payer entièrement en 1989 en raison des
réformes préconisées par le PAS. Une grève des
professeurs s'est ajoutée en avril avec comme revendications le paiement
de leurs arriérés de salaires et l'annulation de la baisse de
leurs salaires de 50% prévue par le PAS.
Section 2 : Vers de
nouvelles conditionnalités
« humanisées » ?
L'échec relatif de l'assistance fournie par les
institutions de Bretton Woods a entraîné de nombreuses critiques
de leur action et a conduit à une vague de propositions soit pour
limiter les conséquences négatives soit pour proposer un
véritable cadre alternatif de développement. Le FMI, et la Banque
Mondiale dans une moindre mesure, sont longtemps restés sourds à
ces appels. Cependant, ils ont du admettre au bout d'un moment que leurs
résultats étaient insuffisants et que cela représentait
une menace pour leur crédibilité et donc pour la subsistance de
leurs rôles. La conditionnalité a été un
élément central de ces critiques. Les institutions de Bretton
Woods se sont alors engagées dans un processus de modification de leur
modèle initial de développement. Mais ce processus
présente de nouveaux risques pour la Banque et le Fonds car il remet en
cause les principes de souveraineté, dont le respect était
déjà difficilement justifié par les institutions de
Bretton Woods. Cette nouvelle tendance, même si elle n'est pas encore
considérée comme une norme, commence à faire son
apparition dans certaines organisations internationales et fait l'objet d'un
grand intérêt de la part des milieux académiques et de la
société civile. Cette tendance est bien évidemment le
droit d'ingérence appliqué à l'aide au
développement et ses corollaires que sont les conditionnalités
sociales et démocratiques.
Paragraphe 1 : Des
avancées pour les droits de l'homme
Au regard des résultats au niveau du respect des droits
de l'homme de l'ajustement structurel, les institutions de Bretton Woods ont
modifié quelque peu leur modèle tant au niveau économique
que dans la prise en compte des facteurs sociaux. L'élargissement de
l'action de la Banque et du Fonds tente de répondre aux critiques
répétées quant aux conséquences de leurs actions.
Cependant, il semble que cette évolution ne soit pas encore
achevée et que de nouvelles tendances qui sont apparues dans la
société civile sont en phase d'être intégrées
au modèle de développement proposé par les institutions de
Bretton Woods. Ce mouvement est amplifié aussi par les prises de
position successives d'Etats et d'organisations internationales pour
remédier aux problèmes du développement. Le Fonds et la
Banque sont donc sur la voie de la construction d'un nouveau modèle
d'assistance pour leurs membres qui prend en compte les erreurs passées
et qui recentre son intérêt sur l'homme en tant que principal
acteur et bénéficiaire du développement.
A. Un nouveau modèle
de développement économique
Depuis quelques années, on peut noter un certain
infléchissement, en particulier de la part du FMI, quant au
modèle de développement économique de
référence. La stratégie du tout-libéral et du
tout-exportation semble remise en cause et on assiste à une
réorientation progressive par le biais de l'introduction de nouveaux
critères économiques. Les résultats catastrophiques des
années 80 et 90 en terme de développement et même de
stabilité monétaire ne sont pas pour rien dans cette
réorientation.
La caractérisation de ce changement s'est
manifestée par le remplacement, le 26 septembre 1999, de la
Facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR) par une
facilité nouvelle, la Facilité pour la réduction de la
pauvreté et la croissance (FRPC). La nouvelle facilité a pour
objectif de «soutenir les programmes destinés à
renforcer de manière substantielle et continue la position de la balance
des paiements et de contribuer à une croissance durable, qui conduise
à des niveaux de vie plus élevés et à une
réduction de la pauvreté124(*)». Cela implique une nouvelle stratégie,
notamment pour le FMI qui devra prendre en compte que « les
politiques macro-économiques devront être mieux
intégrées aux objectifs sociaux et sectoriels, afin de garantir
que les plans se renforceront mutuellement et qu'ils seront conformes à
un ensemble commun d'objectifs d'accélération de la croissance et
de réduction de la pauvreté 125(*)».
La double conditionnalité sera donc modifiée
dans ses objectifs mais aussi dans sa forme et sa répartition entre les
deux institutions de Bretton Woods. En effet, le passage à la FRPC
prévoit aussi « Une étroite coordination avec la
Banque dans un contexte où toutes les opérations de prêt
découleront du CSLP est de nature à éviter un
chevauchement de la conditionnalité et du suivi des opérations de
prêt du FMI et de la Banque, le but étant de rendre le suivi du
programme réalisé par les deux institutions plus transparent,
plus responsable et plus efficace 126(*)».
Néanmoins cette «étroite coordination»
semble être encore plus factice que réelle. Si l'on prend le cas
du Cameroun , on remarque toujours un décalage entre les documents issus
soit du CLSP soit de l'initiative PPTE et les lettres d'intentions fournies au
FMI (en particulier celles du 6/12/2000 et 28/06/2001). Ces dernières
traitent presque uniquement des réformes macro-économiques
« habituelles » et ne font que des référence
à ces programmes sans développer leur contenu et leur
cohérence avec les réformes macro-économiques
envisagées. Le processus de réorientation des objectifs et de la
conditionnalité n'en est qu'à son début, il faudra
sûrement attendre un peu plus longtemps pour voir apparaître les
premiers résultats des nouveaux programmes des institutions de Bretton
Woods.
Cependant, le nouveau cadre n'est peut être pas
suffisant car il repose encore en partie sur l'ancien modèle. Pour
répondre véritablement aux problèmes des pays
concernés, la double conditionnalité devrait entrer dans un
nouveau modèle alternatif dont les éléments pourraient
être127(*)
:
· Un nouveau cadre théorique qui romprait avec le
monétarisme néoclassique
· La conditionnalité devrait être
spécifique a chaque pays pour prendre en compte les
réalités sociales et politiques
· Les politiques à court terme devraient
être cohérentes avec celles à moyen et long terme
· Des politiques meso-économiques devraient
être incorporées au cade macro-économique afin d'assurer la
croissance et la protection des groupes vulnérables
· La conditionnalité devrait se concentrer sur
l'amélioration des liens inter et intra sectoriels
· Les politiques sectorielles devraient se recentrer sur
la restructuration des secteurs productifs qui renforcent l'emploi, la
création de revenus et la productivité dans les secteurs à
faible revenu.
· Le secteur social devrait être
restructuré afin d'augmenter son équité et son
efficacité
De même, elle pourrait s'inspirer des recommandations de
la commission des droits de l'homme qui sont entre autres128(*) :
· L'investissement accru dans les infrastructures
rurales et un plus large accès des groupes défavorisés aux
actifs productifs tels que la terre et le crédit
· La restructuration de l'activité
économique de façon à privilégier une
transformation de l'agriculture paysanne, en transférant vers ce secteur
une part suffisante des ressources nationales
· Accorder la priorité à la production et
à la distribution de vivres et de produits d'origine animale (y compris
pour l'exportation) et veiller non seulement à ce que des aliments
soient disponibles, mais également à ce que la population ait les
moyens de se les procurer
· L'appui au secteur non structuré
B. La prise en compte du
développement social
Parallèlement à l'infléchissement du
modèle économique de référence, on assiste aussi
à une plus grande prise en compte des facteurs sociaux au sens large.
Les institutions de Bretton Woods se retrouvent prise dans le flot
récent de déclarations concernant le développement social.
Elles sont, par exemple visées dans l'article 92 de la
Déclaration de Copenhague sur le développement social de 1995.
92. Les institutions financières internationales
devraient contribuer à la mobilisation des ressources nécessaires
à l'application de la Déclaration et du Programme d'action.
À cet effet, les institutions compétentes sont instamment
invitées à prendre les mesures ci-après :
a) La Banque mondiale, le Fonds monétaire
international, les banques et fonds régionaux et sous-régionaux
de développement et toutes les autres organisations financières
internationales devraient intégrer davantage les objectifs du
développement social dans leurs politiques, programmes et
opérations, notamment en donnant un rang de priorité plus
élevé, s'il y a lieu, aux prêts destinés au secteur
social dans leurs programmes de prêt;
b) Les institutions de Bretton Woods et autres organisations
et organismes des Nations Unies devraient collaborer davantage avec les pays
intéressés pour étudier avec eux la politique à
suivre et trouver des solutions nouvelles pour que les programmes d'ajustement
structurel favorisent un développement économique et social
soutenu, une attention particulière étant accordée
à l'incidence de ces programmes sur les populations pauvres et les
groupes vulnérables;
c) L'Organisation des Nations Unies, agissant en
coopération avec la Banque mondiale, le Fonds monétaire
international et d'autres institutions multilatérales de
développement, devrait étudier les incidences des programmes
d'ajustement structurel sur le développement économique et social
et aider les pays qui procèdent à un ajustement structurel
à créer des conditions propices à la croissance
économique, à la création d'emplois, à
l'élimination de la pauvreté et au développement social.
Cette même déclaration insiste sur les
modifications suivantes de l'action du Fonds et de la Banque en
proposant :
À cette fin, au niveau national :
a) Nous encouragerons les dépenses et programmes
sociaux de base, en particulier les dépenses et programmes en faveur des
pauvres et des groupes vulnérables de la société, et les
protégerons des réductions budgétaires tout en augmentant
la qualité et l'efficacité des dépenses sociales;
b) Nous examinerons les incidences des programmes d'ajustement
structurel sur le développement social, y compris, le cas
échéant, en réalisant des études d'impact social
selon le sexe ou en ayant recours à d'autres méthodes
pertinentes, afin d'élaborer des politiques visant à
atténuer les effets pervers de ces programmes et à en
accroître les effets positifs; les pays intéressés
pourraient demander la coopération des institutions financières
internationales pour cet examen;
c) Nous encouragerons, dans les pays en transition, une
approche intégrée du processus de transformation tenant compte
des conséquences sociales des réformes et des besoins concernant
la mise en valeur des ressources humaines;
d) Nous renforcerons les composantes relatives au
développement social de tous les programmes et politiques d'ajustement,
y compris ceux liés à la mondialisation des marchés et au
progrès technologique rapide, en élaborant des politiques visant
à ouvrir plus largement et plus équitablement l'accès aux
revenus et aux ressources;
e) Nous veillerons à ce que le coût de ces
processus de transition ne pénalise pas les femmes de façon
disproportionnée.
Le Fonds et la Banque ont pris en compte, en partie, certains
aspects du développement social. Le passage de l'ajustement structurel
à la lutte contre la pauvreté est le symbole majeur de cette
prise en compte. De plus, consécutivement au sommet du G-7 de Halifax en
juin 1995, les principaux membres des institutions de Bretton Woods ont
poussé à la prise en compte de reformes de
« deuxième génération » censées
répondre aux critiques sur concernent la protection de l'environnement,
les aspects sociaux et les conditions politiques de l'ajustement.
Un document conjoint des deux institutions concernant la
modification de l'initiative PPTE prévoit l'introduction de
critères sociaux pour déterminer l'accès aux phases
avancées du programme : « Les services
identifieraient avec le gouvernement les réformes ou mesures
structurelles et sociales -- y compris dans le domaine macro-économique
-- qui témoigneraient de progrès importants vers un
développement durable. De la date d'application de ces réformes,
dont la mise en oeuvre serait suivie de manière transparente,
dépendrait celle du point d'achèvement 129(*)».
Ces réformes concernent, par exemple, les filets
sociaux car « Si les politiques qui encouragent la croissance
économique sont un pilier central de l'allégement de la
pauvreté, les mesures de protection sociale ont un rôle à
jouer dans l'atténuation de la vulnérabilité et la
protection du bien-être des pauvres 130(*)» comme les
interventions liées au marché du travail (retraite,
chômage, droit du travail), les dispositifs de sécurité
sociale, les programmes de réduction du travail des enfants et la
création de fonds sociaux:
Ou encore de la santé particulièrement au niveau
des dépenses publiques (niveau macro), de l'amélioration du
fonctionnement du système de santé (niveau sectoriel) et de
diverses interventions ciblées(niveau de l'action)
Et aussi l'éducation qui a « une double
importance dans l'analyse de la pauvreté :
· L'absence d'enseignement est un déterminant
premier de la pauvreté dans les revenus.
· L'enseignement en lui-même est une dimension
importante de la pauvreté, dans l'acception large du terme qui comprend
la pénurie de capacités 131(*)»
On commence aussi à percevoir des conceptions
démocratiques au travers de la gouvernance comme :
· « Règles concernant la recherche et
la tenue d'office public
· Procédés d'élections nationales
transparents et justes,
· Partage du pouvoir pour assurer la stabilité
dans des sociétés hétérogènes,
· Surveillance par les adversaires politiques,
· Surveillance parlementaire au moyen d'institutions
suprêmes de contrôle,
· Institutions saines de représentation
locale 132(*)»
Et aussi sur l'environnement car « les
conditions de l'environnement produisent des effets majeurs sur le
santé, la vie et la sécurité des populations pauvres
133(*)» et les
femmes car « Il est de plus en plus évident que des
stratégies de développement de sensibilisation envers les
distinctions entre les sexes contribuent en grande partie à la
croissance économique et à l'efficacité ainsi qu'aux
objectifs égalitaires en assurant que tous les secteurs du monde de la
pauvreté reçoivent les bienfaits du programme sans aucune
distinction 134(*)»
Paragraphe 2 : De
nouveaux risques pour la souveraineté ?
La nouvelle tendance vers des conditionnalités
humanisées par l'intégration des droits de l'homme ne va pas sans
poser de problèmes. En effet, la « sanctification »
de ces nouvelles valeurs ouvre la porte à l'apparition de nouveaux
principes et à la remise en cause d'anciens. Une première
tendance, qui est déjà apparue dans certaines organisations, est
la prise en compte de ces valeurs pour déterminer
l'éligibilité des pays à l'assistance financière au
développement. La seconde est l'extension du principe d'ingérence
humanitaire au développement par la création d'une sorte de droit
d'ingérence pour le développement. Ces deux tendances ne sont pas
sans risque pour le respect de la souveraineté des Etats
concernés car, au delà de leur application théorique qui
touche déjà la souveraineté, apparaît le spectre de
l'utilisation de ces principes à des fins détournées.
A. Vers un principe de
discrimination dans l'attribution de l'assistance financière ?
La tendance actuelle d'une demande de prise en compte plus
importante au niveau international de facteurs internes aux pays que ce soit au
niveau des conditions politiques ou économiques représentent un
élément de risque pour le maintien du principe de non
discrimination. Bien que le libre choix d'un régime politique,
économique et social reste encore pour le droit international une
attribution souveraine des Etats, on assiste progressivement à une
volonté d'incorporation de valeurs soi-disant universelles qui
remettraient en cause ce principe. Déjà certaines organisations
internationales ont intégré certaines de ces valeurs (la
démocratie et/ou l'économie de marché) en tant que
principes comme la BERD, la CSCE, l'OTAN (dans son acte fondateur sur ses
relations avec la Russie) ou encore l'Union Européenne135(*).
Les institutions de Bretton Woods n'ont pas franchi le pas
mais la même tendance se fait sentir dans certaines de leurs
déclarations et de leurs documents sous couvert de considérations
économiques. La bonne gouvernance partait du constat qu'un environnement
favorable au marché n'était pas une condition suffisante du
développement et qu'il fallait aussi prendre en compte le mauvais
fonctionnement des administrations, la corruption, le laxisme dans la gestion
des affaires publiques et l'existence de certains types de régimes
clientélistes.
Comme le montre un rapport du Conseil d'Analyse Economique,
« la Banque mondiale a d'abord pris la voie d'une vision
minimaliste s'appuyant sur la recherche d'un ordre juridique pouvant
accompagner la promotion du secteur privé devenue l'objectif premier du
développement 136(*)».
De ces considérations à dominante
économique, en termes de réformes du secteur public, de
crédibilité et d'organisation institutionnelle, les institutions
de Bretton Woods sont passées à l'importance de la dimension
politique notamment sous couvert de participation et de décentralisation
(et d'une sorte d'efficience du marché politique).
La tendance vers une conditionnalité politique se fait
de plus en plus présente : « In a recent World Bank
paper, Richard Feinberg, of the Oversees Development Council, expects these
elements of political conditionality to spill over to other multilateral
lending institutions. Citing both the 1990 World Development Report and the
Managing Director of the Fund, he foresees that in the 1990s both institutions
will be under pressure to incorporate into their conditionality considerations
of social equity as well as political variables such as the quality of economic
governance, the avoidance of corruption and the observance of human
rights. 137(*)»
Le rapport précité du Conseil d'Analyse
Economique, analysant le World Development Report de 1997, remarque
que la Banque « ne se prive pas de s'interroger également sur
les processus de légitimation politique des États. Le choix est
clairement indiqué en faveur de la démocratie politique dont il
est de la responsabilité de l'État d'assurer les conditions
d'établissement et de bon fonctionnement138(*)» et tente de
« donner une dimension politique à sa mission de
développement» par son rapprochement avec l'ONU.
L'introduction de principes de gestion politique
(« démocratiques » et respect des droits de l'homme)
au travers de la gouvernance pourra aboutir à la possibilité de
décider de l'éligibilité d'un pays à un programme
ou de sa reconduction en fonction de son système politique,
économique et social. Cette solution est soutenue par certaines ONG qui
proposent que « First, in the evaluation of eligibility, it has
been argued repeatedly that consideration be given to measurements of poverty,
education, health, and other factors that provide an indication of the quality
of life in a country139(*)».
Et la Banque a commencé à envisager ce
cheminement comme le montre l'extrait de ce mémorandum : «
violation of political rights may (...) reach such proportions as to become a
Bank concern, either due to significant direct economic effects or if it
results in international obligations relevant to the Bank, such as those
mandated by binding decisions of the United Nations Security
Councils 140(*)»
On pourrait même penser a l'introduction du respect de
la démocratie et des droits de l'homme dans les statuts du Fonds et de
la Banque afin qu'ils puissent choisir a quel type de régime doivent
être accordées les aides. On a déjà aperçu ce
phénomène avec la Yougoslavie qui ne s'est vu accorder des aides
de l'UE, de la Banque et du FMI qu'après le départ de
Milosevic141(*).
La démocratie n'est pas le seul principe
« universel » qui semble en voie de sanctification, il y a
aussi l'économie de marché. Là encore, on se retrouve dans
le processus hégémonique de la pensée dominante. Tout
comme la démocratie, l'économie de marché semble en passe
de devenir un concept universel duquel on ne peut sortir, tout autre
système économique acquérant par de la même une
connotation négative.
La justification juridique de ces principes va se faire autour
du même biais que les institutions de Bretton Woods ont utilisé
pour justifier leurs précédentes atteintes à la
souveraineté, c'est à dire la neutralité de ces concepts.
M.F. L'Heriteau142(*)
parlait de « rupture analytique » pour qualifier la
différenciation faite entre l'élément économique et
l'élément politique (qui lui est inférieur). La même
rupture va s'effectuer entre les concepts de démocratie et
d'économie de marché qui vont sortir de la sphère de
l'appréciation politique pour devenir des principes uniquement
justifiés par la raison. Une fois cette qualification acquise, ces deux
concepts vont pouvoir être intégrés à l'action des
institutions de Bretton Woods qui pourront alors s'en prévaloir dans la
conception de leurs programmes sans risque d'atteinte à la
souveraineté de leurs Etats membres. L'étape supérieure
sera bien évidemment la mise en place d'un principe de discrimination
vis à vis des pays qui ne respecteraient pas ces concepts neutres et
rationnels. Ce cheminement se fait progressivement par le biais
d'études, réalisées notamment par la Banque143(*) sous couvert
d'améliorer l'efficacité de l'aide, qui prônent la mise en
place du concept de sélectivité qui est de réserver l'aide
aux pays qui souhaitent l'utiliser à bon escient.
Mais déjà, des critiques apparaissent quant
à l'idée même ces expérimentations conceptuelles.
W. Oyatambwe, dans un article sur la bonne gouvernance et la
conditionnalité démocratique en Afrique, « invite
les bailleurs des fonds internationaux à adopter une ligne de conduite
moins hypocrite dans leurs relations avec l'Afrique. De cette manière,
ils pourraient contribuer à promouvoir en Afrique un
développement effectif, plutôt que de procéder sans cesse
à des hasardeuses expérimentations idéologiques ou autres.
Car, avant qu'il n'existe un marché, il y a d'abord des êtres
humains 144(*)».
B. Vers un principe
d'ingérence pour le développement ?
La notion devoir d'ingérence est apparue à la
fin des années 80 sous la plume de Mario Bettati et de Bernard
Kouchner145(*) et
s'appliquait uniquement au domaine humanitaire pour les pays sortant d'une
catastrophe naturelle ou en guerre. Cette notion semble bien entendu contraire
au principe de souveraineté. Mais le droit international évolue
et a commencé à tenir compte de cette possibilité
d'intervention dans des cas extrêmes de détresse des populations.
Des exemples146(*) de
cette avancée sont la résolution 688 de l'ONU qui insiste
« pour que l'Irak permette un accès immédiat des
organisations humanitaires internationales à tous ceux qui ont besoin
d'assistance » ou encore l'arrêt de la CIJ dans l'affaire
du Nicaragua qui énonce que « la fourniture d'aide
strictement humanitaire à des personnes ou à des forces se
trouvant dans un autre pays ... ne saurait être considérée
comme une intervention illicite ». Cependant, le principe n'est
pas accepté par tous. De nombreux pays refusent encore cette idée
d'intervention humanitaire et veulent continuer a se référer
à la Charte des Nations-Unies uniquement, sentiment qui a
été renforcé par la récente intervention
humanitaire au Kosovo147(*).
Néanmoins, parmi les pays occidentaux,
« la formule a vite fait recette, particulièrement avec
l'avènement d'un nouvel ordre mondial sensé replacer au premier
rang des priorités des valeurs comme la démocratie, l'Etat de
droit et le respect des droits de la personne humaine148(*) ». Ces
valeurs ressemblent étrangement à celles que les institutions de
Bretton Woods commencent à intégrer dans leurs programmes. On
peut donc se demander si, au delà de leur inclusion comme critère
d `éligibilité à l'assistance financière que
l'on a vu précédemment, le FMI et la Banque ne vont pas se servir
de cette notion de devoir d'ingérence pour justifier leur action future
pour les pays en développement. L'arrivée de la bonne gouvernance
dans la rhétorique des institutions de Bretton Woods conjuguée
à la demande pressante des organisations des droits de l'homme pour que
le FMI et la Banque prenne en compte les droits de l'homme dans leurs
programmes fait que l'utilisation d'un droit d'ingérence pour le
développement ne semble pas exclu. La bonne gouvernance qui est
déjà intégrée dans la double conditionnalité
pourrait s'étendre et dépasser alors la limite actuelle de sa
justification économique. On se trouverait alors dans un cadre où
les institutions de Bretton Woods aurait un contrôle complet sur la
sphère politique, sociale et culturelle. La progression des idées
de conditionnalité sociale ou démocratique ne fait que renforcer
la probabilité de cette nouvelle tendance. De plus, l'opposition entre
la souveraineté et l'ingérence ne fait que renforcer
l'intérêt de ce principe pour les institutions de Bretton Woods
pour qui, selon le dogme du consensus de Washington, la souveraineté de
l'Etat représente un frein au développement. Le
développement ne passe plus par l'Etat mais par les
« droits » des populations et leur défense. Cette
théorie est défendue par le prix Nobel d'économie Amartya
Sen149(*).
Malgré l'attrait évident de cette théorie
au niveau de la prise en compte des droits politiques, sociaux et culturels des
populations, elle présente le même risque de dérapage que
l'ingérence humanitaire. Tous deux peuvent apparaître comme une
simple couverture à des formes cyniques de volonté
hégémonique. Le risque le plus grand de la part des institutions
de Bretton Woods (comme de la part de l'OTAN pour l'ingérence
humanitaire) serait l'utilisation de ce concept contre la souveraineté
dans son sens politique c'est à dire contre la nation et la politique en
tant que tels et cela au profit du marché. Cela ne résoudrait en
rien le problème du développement ou plus
généralement les problèmes contre les quels est
censé lutter ce devoir d'ingérence. La souveraineté de
l'Etat n'est pas un concept dépassé même si il a beaucoup
souffert depuis la deuxième guerre mondiale. Mais comme Hannah
Arendt150(*) le
rappelle, ce n'est pas l'Etat-nation qui est à l'origine des guerres et
des haines mais au contraire le dépérissement de cet Etat-nation
et la diminution de sa sphère d'influence au profit
d'intérêts privés. Il ne faudrait donc pas que ce droit
d'ingérence ne soit que le prétexte à une opération
idéologique visant dessaisissement du citoyen de ses droits politiques
fondamentaux au profit de la régulation économique.
Le droit d'ingérence pour le développement et
ses corollaires que sont les conditionnalités sociales ou
démocratiques pose donc de larges problèmes au niveau du respect
de la souveraineté tant dans sa conception juridique que politique. Le
même problème se pose pour l'introduction d'une clause sociale
à l'OMC. Il reste à voir comment les institutions de Bretton
Woods vont gérer cette nouvelle tendance et comment l'ONU va tenter de
délimiter la portée de ces nouveaux principes.
Conclusion : L'avenir
de la conditionnalité, des institutions de Bretton Woods et de la
souveraineté
La double conditionnalité, tant dans sa dimension
interne qu'externe, semble ne pas avoir atteint les objectifs pour lesquels
elle avait été élaborée. Cela s'explique en partie
par le fait que ces objectifs n'ont été que des
« déclaration-écrans » censées
dissimuler les véritables buts des institutions de Bretton Woods.
L'objectif d'une plus grande coopération entre le Fonds et la Banque
cache en fait une recherche de légitimité de la part du FMI. Ce
dernier en effet, après l'effondrement du système
monétaire au début des années 70 et le
développement des marchés internationaux de capitaux qui ont
permis aux pays développés de trouver une source de financement
alternative pour leurs déséquilibres de balance des paiements, a
du reconcevoir son rôle afin de préserver sa place dans le
système économique et financier international. La
sélection adverse due au développement des marchés
financiers a entraîné, pour le Fonds, une limitation des ses
«clients» potentiels aux pays en développement. Mais sa marge
de manoeuvre était alors réduite car il risquait
d'empiéter sur les compétences de la Banque qui, à
l'époque, fonctionnait encore sur des postulats keynésiens qui
semblaient incompatibles avec l'idéologie du Fonds. La solution est
arrivée au début des années 80 avec la crise de la dette
et la remise dans le «droit chemin» néo-libéral de la
Banque après l'arrivée du gouvernement Reagan aux Etats-Unis.
Cette nouvelle compatibilité idéologique a permis au FMI de
commencer à intervenir dans les domaines réservés de la
Banque, notamment grâce à l'apparition de l'ajustement structurel.
Mais ce chevauchement s'est fait au détriment de la Banque dont
l'influence a été limitée par la magistrature d'influence
du FMI qui lui a fait perdre une grande partie de son contrôle sur les
mesures économiques. Cet empiétement correspond à
« une stratégie hégémonique qui consiste
à élargir le plus possible son champ d'intervention au
détriment de celui des autres institutions
internationales 151(*)».
Cette coopération déséquilibrée a
entraîné la propagation du concept de conditionnalité
à la Banque, ce qui simplifiait la répartition des tâches
dans l'élaboration des programmes communs. Néanmoins, les risques
de chevauchement et de divergences entre les deux institutions n'ont pas
été totalement éliminé par la mise en place de
cette double conditionnalité. Et les conséquences de la
persistance de cet état ont induit un manque de cohérence de
l'action pour le développement des institutions de Bretton Woods. Le
même constat a été fait par les auteurs du rapport Metzler
qui réclament un recentrage du Fonds sur ces activités
originelles et donc l'arrêt de tout chevauchement de son action avec
celles des institutions de développement : « The IMF
should cease lending to countries for long-term development assistance (as in
sub-Saharan Africa) and for long-term structural transformation (as in the
post-Communist transition economies). The Enhanced Structural Adjustment
Facility and its successor, the Poverty Reduction and Growth Facility, should
be eliminated. The IMF should write-off in entirety its claims against all
heavily indebted poor countries (HIPCs) that implement an effective economic
development strategy in conjunction with the World Bank and the regional
development institutions152(*)».
De même, dans son nouveau rôle réduit, le
Fonds devra renoncer à l'utilisation de la conditionnalité :
« there would be no need for detailed conditionality (often
including dozens of conditions) that has burdened IMF programs in recent years
and made such programs unwieldy, highly conflictive, time consuming to
negotiate, and often ineffectual 153(*)».
Ce rapport remet aussi en question le rôle de la Banque
qui doit s'orienter vers les pays les plus pauvres n'ayant pas accès aux
capitaux du secteur privé et sur la production des biens publics globaux
(santé, environnement, infrastructures...) et non plus essayer d'imposer
(par le biais de la conditionnalité) des mesures économiques
inefficaces.
Il semble donc, en effet, qu'un recentrage des
compétences de chacune des institutions de Bretton Woods soit le premier
pas vers une action plus cohérente à la fois pour le
développement et pour la stabilité du système financier
international.
La double conditionnalité a été aussi
mise en cause. Si le FMI se recentre sur ses fonctions premières de
prêteur de dernier ressort à court terme, de statisticien mondial
et de conseil en politique économique, il ne restera plus à
priori de conditionnalité qu'à la Banque Mondiale. Mais cette
dernière, ayant constaté l'inefficacité de la
conditionnalité dans ses derniers rapports d'évaluation154(*), tente de trouver de
nouvelles méthodes d'attribution de son aide. Une idée de
remplacement est le concept de sélectivité :
« Le thème de la sélectivité de l'aide a
été mis en avant dans une étude préparée
dès 1997 par David Dollar pour la Banque mondiale et qui a abouti
à la diffusion d'un rapport au message politique fort en novembre 1998.
Sous la problématique d'une évaluation de l'efficacité de
l'aide internationale, le document propose de réserver les financements
publics aux pays qui entreprennent des réformes et de seulement
disséminer des idées et de stimuler le débat dans la
société civile dans les autres pays, sans leur fournir d'apport
financier. Le rapport préconise ainsi rien de moins que de supprimer
toute aide financière aux gouvernements qui n'essaient pas
véritablement de développer leur pays 155(*)».
Mais la simple modification de l'instrument qu'est la
conditionnalité ne résout pas entièrement les
incohérences. En effet, le contenu de la double conditionnalité
peut être transférer vers d'autres vecteurs, et notamment dans ce
nouveau concept de sélectivité. Ce dernier peut même se
révéler encore plus incompatible avec les principes de protection
de la souveraineté car il établit un véritable principe de
discrimination. Néanmoins la détermination des critères de
cette sélectivité reste à faire et ouvre la porte à
l'introduction des droits de l'homme dans l'attribution de l'aide.
Andrea Koulaïmah-Gabriel a identifié dans un
article sur le Niger et l'aide de l'Union Européenne quelques principes
de cette sélectivité au niveau du contenu démocratique
:
· Ne pas prendre des processus démocratiques
naissants pour des faits accomplis
· Identifier en commun les éléments
essentiels d'un «contrat de démocratie»
· Combiner les critères de besoin et les
critères de mérites
· Appliquer les critères de performance de
manière flexible
· Adopter une attitude plus cohérente et
responsable de la part des bailleurs de fonds
· Clarifier les modalités de suspension de
l'aide
· Impliquer les partenaires dans la définition
et le suivi des critères de performance156(*)
Ce nouveau concept peut apparaître néanmoins
aussi comme un recyclage grossier d'une conditionnalité de moyens en une
conditionnalité de résultat/performance. On retrouve ici aussi la
combinaison des trois techniques que J.M. Sorel avait défini pour
caractérisé la conditionnalité du FMI : les
critères de réalisation, l'échelonnement et l'adaptation
continue157(*).
De plus, on finit aussi par retrouver le dilemme sur
l'ingérence et la souveraineté au travers du choix de ces
critères et des risques qu'ils induisent. En effet, cette
sélectivité devra être faite sur des critères
« universels » et « rationnels » qui,
comme on l'a vu, sont la base de l'hégémonie. On peut aussi
entrevoir le problème de la hiérarchisation des critères
entre les domaines économiques, sociaux et politiques pour
déterminer l'attribution, la continuation ou la suspension de l'aide.
Comme au niveau de la cohérence interne de la double
conditionnalité où le problème ne réside pas
effectivement dans la forme de la conditionnalité mais plutôt dans
le combat d'influence entre les institutions de Bretton-Woods quant à
l'étendu du contenu de leurs conditionnalités respectives, le
problème de la cohérence externe de la double
conditionnalité ne réside pas non plus dans sa forme mais
plutôt dans le contenu qui lui est donné. En effet, le
problème actuel de l'aide au développement réside plus
dans la prioritarisation des objectifs des bailleurs de fonds que dans le choix
des vecteurs d'attribution de l'aide. Les conséquences
économiques et sociales de la conditionnalité traditionnelle ne
sont que le reflet du choix fait par les institutions de Bretton Woods de
privilégier l'amélioration des grands équilibres
macro-économiques et l'insertion des pays en développement dans
le schéma néo-libéral du marché mondial.
Le dernier problème à résoudre est celui
du dilemme intervention/souveraineté. L'attribution conditionnelle de
l'aide est la base de ce débat car quel que soit le vecteur choisi, il
existera toujours la question de l'influence des conditions sur la
souveraineté du pays. Mais comme l'aide inconditionnelle ne semble pas
avoir de très nombreux partisans, le dilemme n'a pas de solutions. Il
faut donc faire un choix entre respect de la souveraineté et aide au
développement interventionniste. Les pays en développement ayant
besoin de cette assistance financière et les pays-bailleurs étant
attachés à l'efficacité de leur aide (pour des raisons
plus ou moins nobles), il semble que la souveraineté soit en passe,
comme l'annonce B. Badie, de devoir modifier son contour, comme elle l'a
déjà fait à travers l'histoire, afin que
l'ingérence ne soit « plus en contradiction avec
l'idée de souveraineté, dès lors qu'elle vise à
restaurer les droits de l'homme ou à satisfaire les besoins fondamentaux
de l'humanité 158(*)».
Bibliographie
OUVRAGES, THESES
· Scandinavian Institute of African Studies, The IMF
and the World Bank in Africa : conditionality, impact, and alternatives,
Almquist & Wiksell International, Stockholm, 1987, 177p.
· Institute for International Economics, IMF
conditionality, MIT, Cambridge, 1983, 679p.
· International Monetary Fund, IMF conditionality :
experience under stand-by and extended arrangement, 1995, 2v.
· Erik Denters, Law and policy of IMF
conditionality, Kluwer Law International, Boston, 1996, 291p.
· Joseph Gold, Conditionality, International
Monetary Fund, Washington D.C., 1979, 51p.
· Manuel Guitián, Fund conditionality :
evolution of principles and practices, International Monetary Fund,
Washington D.C., 1981, 50p.
· Iqbal Singh Gulati, IMF conditionality and low income
countries, Orient Longman, Bombay, 1982, 16p.
· Jean-Yves Moisseron, Marc Raffinot, Dette et
pauvreté : solvabilité et allègement de la dette des pays
à faible revenu, Economica, Paris, 1999, 225p.
· Bruno Sarrasin, Ajustement structurel et lutte contre
la pauvreté en Afrique : la Banque Mondiale face à la
critique, l'Harmattan, 1999, Paris, 114p.
· Shahrukh Rafi Khan, Do World Bank and IMF policies
work?, St. Martin's Press, New York, 1999, 197p.
· Dominique Carreau, Bernard Shaw, La Dette
Exterieure, Academie de Droit International de La Haye, Matinus Nijhoff
Publishers, 1995, 752p.
· Seminar on "The Role of the International Monetary Fund
in the Adjustment Process" ; (1983 ; Viäna del Mar, Chile) Adjustment,
conditionality, and international financing : papers presented at the Seminar
on "The Role of the International Monetary Fund in the Adjustment Process" held
in Viäna del Mar, Chile, April 5-8, 1983., IMF, Washington D.C, 1984,
214p.
· G.A.Carnia, R.Joly, F.Stewart, L'ajustement à
visage humain, UNICEF, Economica, Paris, 1987, 373p.
· A.Dauvergne, Le Fonds Monétaire
International : un monde sous influences, Ed. Alain Moreau, Paris,
1988, 236p.
· J.M.Sorel, Les aspects juridiques de la
conditionalité du Fonds Monétaire International,
Thèse de Droit Public, Université Paris 13, 13 septembre 1990,
1529p.
· A. Sen, Development as freedom, Oford University
Press, Oxford, 1999, 366p
· H. Arendt, The origins of totalitarism, World
Publishing Company, Cleveland, 1962, 520p.
· M. Bettati and B. Kouchner (eds.), Le devoir
d'ingérence, Denoël, Paris, 1987, 300 p
· N. Chomsky, Le nouvel humanisme militaire,
Editions Page deux, Lausanne, 2000, 293p
DOCUMENTS OFFICIELS
· Assemblée Nationale,. Rapport d'information
N° 1963 de la commission des affaires étrangères sur la
mondialisation, 24 novembre 1999, 113p.
· Assemblée Nationale,. Rapport d'information
N° 2476 de la commission des finances de l'économie
générale et du plan sur la régulation de la mondialisation
financière, 14 juin 2000, 89p.
· Assemblée Nationale,. Rapport d'information
N° 2801 de la commission des finances de l'économie
générale et du plan sur les activités et le contrôle
du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, 13
décembre 2000, 273p.
· Assemblée Générale des Nations
Unies, Rapport préliminaire du Secrétaire général,
« La mondialisation et son incidence sur le plein exercice des droits
de l'homme », A/55/342, 31 aout 2000, 50p.
· Sub-Commission on Prevention of Discrimination and
Protection of Minorities, Second progress report prepared by Mr. Danilo
Türk, Special Rapporteur, «Realization of economic, social and
cultural rights», E/CN.4/Sub.2/1991/17, 18 July 1991, 236p.
· COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME, Rapport de l'expert
indépendant, M. Fantu Cheru, «DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET
CULTURELS : Effets des politiques d'ajustement structurel sur la
jouissance effective des droits de l'homme», E/CN.4/1999/50, 24
février 1999, 134p.
· Sous-Commission de la promotion et de la protection des
droits de l'homme, Rapport préliminaire présenté par J.
Oloka-Onyango et Deepika Udagama, «LA RÉALISATION DES DROITS
ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS : La mondialisation et ses effets sur
la pleine jouissance de tous les droits de l'homme»,
E/CN.4/Sub.2/2000/13,15 juin 2000, 68p.
ARTICLES
· Robert Powell, « Debt Relief for Poor
Countrie », December 2000, Volume 37, Number 4,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/fandd/2000/12/powell.htm,
22 février 2001
· «Supporting Poverty Reduction in Low-Income
Developing Countries: The International Community's Response » ,
December 2000, Volume 37, Number 4,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/fandd/2000/12/ahmed.htm,
22 février 2001
· Proposal for Streamlining Preliminary Heavily Indebted
Poor Countries (HIPC) Initiative Documents, Prepared by the Staffs of the IMF
and the World Bank, October 24, 2000,
http://www.imf.org/external/np/hipc/2000/102400.htm,
22 février 2001
· Paul Collier, «For a New Relationship between Donors
and Recipients: The End of Conditionality?»,
http://www.worldbank.org/html/prddr/trans/marapr00/pgs6-8.htm,
22 février 2001
· «Le Fonds monétaire international : Il est
nécessaire de reconcilier les principes du développement durable
avec les politiques macro-économiques»,
http://www.amisdelaterre.org/economie/FMI2.html,
22 février 2001
· «Déclaration de Lusaka : vers un" Concensus
Africain" pour des solutions durables au problème de la dette»
19-21 MAI 1999,
http://www.users.skynet.be/cadtm/fralusak.htm,
22 février 2001
· Assessment of Washington and Cologne HIPC Initiative,
Paper Presented by Dr. Magda Shahin, Deputy Assistant Minister for
International Economic Relations. International Policy Dialogue. Berlin: June
15-16, 2000,
http://www.mfa.gov.eg/getdoc.asp?id=1022&cat=030317,
22 février 2001
· «Debt relief moves at a snail's pace :
conflicts and poverty-reduction negotiations slow HIPC implementation»,
http://www.un.org/ecosocdev/geninfo/afrec/vol14no2/hipcdebt.htm,
22 février 2001
· «Growth May Be Good for the Poor-- But are IMF and
World Bank Policies Good for Growth? A Closer Look at the World Bank's Most
Recent Defense of Its Policies»,
http://www.cepr.net/response_to_dollar_kraay.htm,
22 février 2001
· «HIPC Initiative Update: World Bank and IMF
Proposals on Debt-relief for Post-Conflict Countries»,
http://www.oneworld.org/eurodad/hipcupd.htm,
22 février 2001
· «In Defense of World Bank and IMF Conditionality in
Structural Adjustment Programs»,
http://internet.ggu.edu/jbdn/jbdnv202.htm,
22 février 2001
· «Social conditionality and the HIPC Debt
Initiative»,
http://www.s-j-c.net/new_page_44.htm,
22 février 2001
· «Conditionality, ownership and international
aid»,
http://ekeko1.rcp.net.pe/cti/conditionality-vianna.htm,
22 février 2001
· «Debt Relief for Low-Income Countries The Enhanced
HIPC Initiative»,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/pam/pam51/contents.htm,
22 février 2001
· «When Will Economics Guide IMF and World Bank
Reforms?»,
http://www.aei.org/ct/ctcalomiris.htm,
22 février 2001
· J.M.Sorel, «Sur quelques aspects juridiques de la
conditionnalité du F.M.I. et leurs conséquences»,
European Journal of International Law,
http://www.ejil.org/journal/Vol7/No1/art3.html, 22 février 2001
· J.J. Polak, "The Changing Nature of IMF Conditionality",
OECD Technical Paper No. 41, août 1991,
http://www1.oecd.org/dev/PUBLICATION/tp/tp41.pdf,
15 avril 2001
· « Y a-t-il des pouvoirs au dessus des
Etats », http://www.oboulo.com/RAS.htm, 22 février 2001
· « IMF programs : is there a
conditionality ?»,
http://spe.cgu.edu/institutes/conference/Laffer%20Curve.htm,
22 février 2001
· «Résoudre le problème de la dette : de
l'initiative PPTE à Cologne»,
http://www.oecd.org/dev/PUBLICATION/tp/TP163.pdf, 22 février 2001
· Elliott Harris, Sharon White, «Atténuation de
la pauvreté: L'allégement de la pauvreté peut-il
être la force motrice?», http://www.dse.de/ef/debtrlf/rep3000f.htm,
22 février 2001
· Agir ici pour un monde solidaire, « Ajustement
structurel et santé»,
http://www.globenet.org/ifi/savoir/ajustement/sante.htm
· Agir ici pour un monde solidaire, «Brève
histoire des résistances à l'ajustement structurel»,
http://www.globenet.org/ifi/savoir/ajustement/histoire.htm
· «Propagande autour de la stratégie de
réduction de la pauvreté»,
http://www.foei.org/LINK/LINK94/link94french/prspfrench.htm, 22 février
2001
· C. Chavagneux et L. Tubiana, « Quel avenir pour les
institutions de Bretton-Woods ? Les transformations de la
conditionnalité », Développement, Rapports
du Conseil d'Analyse économique, 2000,
http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/BRP/004001728/0000.pdf, 01/11/2001
· A.Koulaïmah-Gabriel, « La suspension de
l'aide comme sanction de la non-performance: L'Europe et les leçons de
la crise nigérienne »,
http://www.oneworld.org/ecdpm/pubs/wp56_fr.htm,
01/11/2001
· O. Corten, « Les ambiguïtés du
droit d'ingérence humanitaire »,
http://www.unesco.org/courier/1999_08/fr/ethique/txt1.htm,
15/09/2001
SITES INTERNET
· FMI :
http://www.imf.org
· Banque Mondiale : http://www.banquemondiale.org
* 1 D.Carreau, Why Not Merge
the International Monetary Funds (IMF) with the International Bank for
Reconstruction and Development (World Bank) ?, Fordham Law Review, 1989,
62
* 2 J. Gold, Conditionality,
International Monetary Fund, Washington D.C., 1979, p 1
* 3 J.M.Sorel, Sur quelques
aspects juridiques de la conditionnalité du F.M.I. et leurs
conséquences, European Journal of International Law,
http://www.ejil.org/journal/Vol7/No1/art3.html, 22 février 2001
* 4 Article I iii) des statuts
du FMI
* 5 Article I iv) des statuts du
FMI
* 6 Article V section 3 a) des
statuts du FMI
* 7 D.Carreau, P.Juillard,
Droit international économique, LGDJ, 1998, p 634
* 8 Dominique Carreau, Bernard
Shaw, dirs., La Dette Extérieure, Académie de Droit
International de La Haye, Matinus Nijhoff Publishers, 1995, p 217-313
J.Gold, «Relations between banks, loan agreements and Fund
Stand-by arrangements», International Financial Law Report,
September 1981
* 9 Article I (ii) des statuts
de la BIRD
* 10 Devesh Kapur, John P.
Lewis et Richard Webb, The World Bank. Its First Half Century, The
Brookings Institution, Washington, D.C., 1997, p1193
* 11 D.Carreau, P.Juillard,
Droit international économique, LGDJ, Paris, 1998, p 622
* 12 Cité dans, Eric
Toussaint, «Banque Mondiale et FMI : Des origines à
aujourd'hui », www.lagauche.com/lghebdo/2000/2000-45-01.html ,
16/04/2001
* 13 J. Gold, «The
relationship between the International Monetary Fund and the World Bank»,
Creighton Law Review, Volume 15, 1981-1982, Number 2, p 506
* 14 Article V section 5 a)
des statuts de la BIRD et Article XII section 2 a) des statuts du FMI
* 15 Article II section 1
des statuts de la BIRD
* 16 Article VI section 3
des statuts de la BIRD
* 17 Article X des statuts
du FMI
* 18 Article V section 8 a)
de la BIRD
* 19 J. Gold,
« The relationship between the International Monetary Fund and the
World Bank », Creighton Law Review, Volume 15, 1981-1982,
Number 2, p 514
* 20 Mémorandum from the
Managing Director and the President on Bank-Fund Collaboration in Assisting
Member Countries, March 30, 1989.
* 21 Rapport Meltzer,
http://www.house.gov/jec/imf/meltzer.htm, 24/05/01
* 22 D.Carreau, «Why
Not Merge the International Monetary Funds (IMF) with the International Bank
for Reconstruction and Development (World Bank) ?», Fordham Law
Review, 1989, 62
* 23 D.Carreau, P.Juillard,
Droit international économique, LGDJ, Paris, 1998, p 623
* 24Banque Mondiale,
« L'Initiative PPTE: Objectifs et principaux
éléments »,
http://www.worldbank.org/hipc/french/fr-overview/fr-overview.html,
27/07/2001
* 25 FMI,
« Facilité pour la réduction de la pauvreté et
la croissance (FRPC) - Questions d'ordre opérationnel »,
http://www.imf.org/external/np/pdr/prsp/fre/poverty2.htm#IIB,
27/07/2001
* 26 FMI,
« Facilité pour la réduction de la pauvreté et
la croissance (FRPC) - Questions d'ordre opérationnel »,
http://www.imf.org/external/np/pdr/prsp/fre/poverty2.htm#IIB,
27/07/01
* 27FMI,
« Facilité pour la réduction de la pauvreté et
la croissance (FRPC) - Questions d'ordre opérationnel »,
http://www.imf.org/external/np/pdr/prsp/fre/poverty2.htm#IIB,
27/07/2001
* 28 Cité dans le
rapport d'information de la Commission des finances de l'Assemblée
nationale sur les activités et le contrôle du Fonds
monétaire international et de la Banque mondiale, p 124
* 29 Bruno Sarrasin,
Ajustement structurel et lutte contre la pauvreté en Afrique : la
Banque Mondiale face à la critique, l'Harmattan, 1999, Paris, p
47
* 30 J.Gold,
« Relations between banks, loan agreements and Fund Stand-by
arrangements », International Financial Law Report,
September 1981
J.D Guenther, « The role of Commercial Banks in the
Adjustment Process », dans Adjustment, Conditionality and
International Financing dirigé par J.Muns, IMF, 1984, p 184-214
* 31 Dominique Carreau,
Bernard Shaw, dirs., La Dette Extérieure, Académie de
Droit International de La Haye, Matinus Nijhoff Publishers, 1995, p 217-313
* 32 Rapport annuelle 2000 du
FMI,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/ar/2000/fra/index.htm,
13/08/01
* 33 Rapport annuelle 2000 de
la Banque Mondiale,
http://www.worldbank.org/html/extpb/annrep/content.htm,
13/08/2001
* 34 FMI, « Debt
Relief for Poverty Reduction: The Role of the Enhanced HIPC
Initiative », August 2, 2001,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/exrp/debt/eng/index.htm#2,
13/08/2001
* 35 Banque Mondiale,
« Rapports d'avancement sur l'Initiative en faveur des pays pauvres
très endettés (PPTE) et les Cadres Stratégiques de Lutte
contre la Pauvreté (CSLP) », 15/04/2000,
http://wbln0018.worldbank.org/DCS/devcom.nsf/(documentsattachmentsweb)/April2000FrenchDC200010(F)/$FILE/DC-2000-10F-HIPC-PRSPs.pdf,
13/08/2001
* 36 Scandinavian Institute of
African Studies, The IMF and the World Bank in Africa : Conditionality,
Impact, and Alternatives, Almquist & Wiksell International, Stockholm,
1987, p 15-16
* 37 J.M Sorel, Les
aspects juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire
International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13,
13 septembre 1990, p 166
* 38 Manuel Guitián,
Fund conditionality : evolution of principles and practices,
International Monetary Fund, Washington D.C., 1981, p 13-14
* 39 J.M Sorel, Les
aspects juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire
International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13,
13 septembre 1990, p 173
* 40 Décision reproduite
dans J. Gold, Conditionality, International Monetary Fund,
Washington D.C., 1979, p 39-48
* 41 J. Gold,
Conditionality, International Monetary Fund, Washington D.C., 1979, p
23
* 42 «Misreporting and
non complying purchases under Fund arrangements - Guideline on corrective
action» ou encore «Relationship between performance criteria and
phasing of purchases under Fund arrangements - Operational
guidelines », cités dans E. Denters, Law and Policy of IMF
conditionality, Kluwer Law International, Boston, 1996, p 103
* 43 Article XXX b) des
Statuts du FMI
* 44 D.Carreau, P.Juillard,
Droit international économique, LGDJ, Paris, 1998, p 612
* 45 J. Gold,
Conditionality, International Monetary Fund, Washington D.C., 1979, p
19-20
* 46 J.M.Sorel, « Sur
quelques aspects juridiques de la conditionnalité du F.M.I. et leurs
conséquences », European Journal of International
Law, http://www.ejil.org/journal/Vol7/No1/art3.html, 22 février
2001
* 47 J.M Sorel, Les aspects
juridiques de la conditionnalité du Fonds Monétaire
International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13,
13 septembre 1990, p 932-959
* 48 J.M.Sorel, « Sur
quelques aspects juridiques de la conditionnalité du F.M.I. et leurs
conséquences », European Journal of International
Law, http://www.ejil.org/journal/Vol7/No1/art3.html, 22 février
2001
* 49 IMF Policy Development
and Review Department, « Structural Conditionality in Fund-Supported
Programs », IMF, February 16, 2001, p 67
* 50 The World Bank operational
manual, Lending Operations: Choice of Borrower and Contractual Agreements,
article 16
* 51 «The proceeds
of structural adjustment loans (SALs) and of rehabilitation loans are disbursed
to borrowers deposit accounts upon compliance with effectiveness and tranche
release conditions set out in the legal agreements », The World
Bank operational manual, Disbursement, article 6
* 52
«Conditionality should refer to reforms that are within the competence
of the borrower to bring about, and not to economic performance as outcome of
policy changes. If circumstances beyond the control of the borrower compliance
with a condition unreasonable, Bank staff should propose appropriate amendments
or waivers on the basis of midcourse reviews before tranche releases. Such
midcourse adjustments are normally expected to apply only to macroeconomic
conditionality. », The World Bank operational manual, Adjustment
lending policies, article 48
* 53 World
Bank, Poverty Reduction Strategy Sourcebook, Monitoring and
Evaluation,
http://www.worldbank.org/poverty/french/strategies/srcbook/m&e1nov.pdf,
13/08/2001
* 54 Irving Friedman dans
Scandinavian Institute of African Studies, The IMF and the World Bank in
Africa : conditionality, impact, and alternatives, Almquist & Wiksell
International, Stockholm, 1987, p 115-120
* 55 Rapport d'information
de la commission des finances de l'assemblée nationale sur les
activités et le contrôle du Fonds monétaire international
et de la Banque mondiale, p 238
* 56 Bruno Sarrasin,
Ajustement structurel et lutte contre la pauvreté en Afrique : la
Banque Mondiale face à la critique, l'Harmattan, 1999, Paris, p 58
et Commission des droits de l'homme, Rapport de l'expert indépendant M.
Fantu Cheru, « Effets des politiques d'ajustement structurel sur la
jouissance effective des droits de l'homme » , p 40
* 57 Robert W. Cox,
Production, Power, and World Order, Columbia University Press, New
York, 1998; James Mittelman, Globalization Critical Reflections, Lynne
Reinner Publishers, Boulder, 1996 cité dans Commission des droits de
l'homme, Rapport de l'expert indépendant M. Fantu Cheru, Effets des
politiques d'ajustement structurel sur la jouissance effective des droits de
l'homme, p 31
* 58 T. Mirchell, The Rule
of Experts, ouvrage non encore paru
* 59 OCDE, «Quelles
politiques pour un décollage économique ? »,
Cahiers de politique économique n°12,
1996, http://www.oecd.org/dev/PUBLICATION/cahiers/cahier12.pdf, 28/08/2001
* 60 OCDE, « Vers la
liberté des mouvements de capitaux », Cahiers de politique
économique n°4, 1992,
http://www.oecd.org/dev/PUBLICATION/cahiers/cahier4.pdf,
28/08/2001
* 61 Policy Development and
Review Department, « Structural Conditionality in Fund-Supported
Programs », IMF, February 16, 2001, p 84
* 62 Site de la Banque
Mondiale, Secteurs et Thèmes,
http://www.banquemondiale.org/secteurs.htm
* 63 Scandinavian Institute
of African Studies, The IMF and the World Bank in Africa : conditionality,
impact, and alternatives, Almquist & Wiksell International, Stockholm,
1987, p 15
* 64 Reproduction partielle de
la matrice des stratégies de « Guinea: Interim Poverty
Reduction Strategy Paper »,
http://poverty.worldbank.org/files/guinea_iprsp_fr.pdf,
28/08/01
* 65 P. Daillier et A. Pellet,
Droit International Public (Nguyen Quoc Dinh), LGDJ, Paris, 1999, p
1024
* 66 P. Dailler et A. Pellet,
Droit International Public (Nguyen Quoc Dinh), LGDJ, Paris,
1999, p 428
* 67 Affaire du Sahara
occidental, Avis consultatif du 16 octobre 1975,
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdecisions/csummaries/csasommaire751016.htm,
01/11/2001
* 68 Affaire des
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique) [fond] , Arrêt
du 27 juin 1986,
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdecisions/csummaries/cnussommaire860627.htm,
01/11/2001
* 69 A. Pellet cité dans
J.M Sorel, Les aspects juridiques de la conditionalité du Fonds
Monétaire International, Thèse de Droit Public,
Université Paris 13, 13 septembre 1990, p 39
* 70 Affaire des
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique) [fond] , Arrêt
du 27 juin 1986,
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdecisions/csummaries/cnussommaire860627.htm,
01/11/2001
* 71 Paragraphe 1 de la
résolution 2131 (XX) et troisième principe alinéa 1 de la
résolution 2625 (XXV)
* 72 J.M Sorel, Les aspects
juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire
International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13,
13 septembre 1990, p 996
* 73 Affaire des
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique) [fond] , Arrêt
du 27 juin 1986,
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdecisions/csummaries/cnussommaire860627.htm,
01/11/2001
* 74 P. Dailler et A. Pellet,
Droit International Public (Nguyen Quoc Dinh), LGDJ, Paris, 1999, p
439
* 75 Article IV section 10 des
statuts de la BIRD : « The Bank and its officers shall not
interfere in the political affairs of any member; nor shall they be influenced
in their decisions by the political character of the member or members
concerned. Only economic considerations shall be relevant to their decisions,
and these considerations shall be weighed impartially in order to achieve the
purposes stated in Article I. »
* 76 J. Gold,
« Political Considerations are prohibited by Articles of Agreement
when the Fund considers requests for the use of resources », IMF
Survey, 1983
* 77 T.Killick, R.Gunatilaka
and A.Marr. Aid and the Political Economy of Policy Change. Overseas
Development Institute, London, 1998, p10-11
* 78 P. Dhonte,
« Conditionality as an Instrument of Borrower
Credibility », FMI, février 1997,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/ppaa/ppaa9702.pdf, 15/08/2001
* 79 W.Branson, N.Hanna,
« Ownership and Conditionality », OED Working Paper Series
No. 8, World Bank, summer 2000,
http://www-wds.worldbank.org/pdf_content/00009494600101105374280/multi_page.pdf
* 80 J.M Sorel, Les aspects
juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire
International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13,
13 septembre 1990, p 973-74
* 81 Cité dans P.
Dhonte, « Conditionality as an Instrument of Borrower
Credibility », FMI, février 1997,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/ppaa/ppaa9702.pdf
* 82 Stuart Hall, Marxism
and interpretation of culture, ed. Cary Nelson and Lawrence Grossberg,
University of Illinois Press, Urbana, 1988, p44 (traduction personnelle)
* 83 Cité dans Le
Droit International du Développement Social et Culturel, sous la
direction de A. Pellet et J.M. Sorel, L'Hermes, Paris, 2000, p199
* 84 Ibid., p. 199
* 85 Engagement 3 k) de la
Déclaration de Copenhague sur le développement social,
http://www.agora21.org/smds/smds06.html
* 86 P. Bourdieu, Outline
of a Theory of Practice, Cambridge University Press, Cambridge, 1977, p
94
* 87 Michel Callon, "An Essay
on Framing and Overflowing: Economic Externalities Revisited By Sociology," in
The Laws of the Markets, ed. Michel Callon, Blackwell, Oxford, 1998,
p 244
* 88 T. Mitchell, The Rule
of Experts, ouvrage non encore paru
* 89 J.J. Polak, "The Changing
Nature of IMF Conditionality", OECD Technical Paper No. 41, août 1991,
p29
* 90 A. Zacharie,
« Les dix limites de l'initiative PPTE »,
http://users.skynet.be/cadtm/pages/francais/limitesppte.htm
* 91 FMI, « Toward a
market economy : structure of governance », Working Paper
WP/97/11, http://www.imf.org/external/pubs/ft/wp/wp9711.pdf
* 92 World Bank's
Administrative and Civil Service Reform Website,
http://www1.worldbank.org/publicsector/civilservice/index.html
* 93 J.M Sorel, Les aspects
juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire
International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13,
13 septembre 1990, p 1099
* 94 IDA/IMF,
« CAMEROON : Preliminary Document on the Enhanced Initiative for
Heavily Indebted Poor Countries », 23 mai 2000,
http://www.worldbank.org/hipc/country-cases/cameroon/Revised_CMR_Prel.pdf
* 95 Rapport Meltzer,
http://www.house.gov/jec/imf/meltzer.htm, 24/05/01
* 96 Rapport Annuel pour
1989 du FMI, p 47, cité dans J.M. Sorel, « Les
conséquences sociales et culturelles des activités
opérationnelles du FMI » dans Le Droit International du
Développement Social et Culturel, sous la direction de A. Pellet et
J.M. Sorel, L'Hermes, Paris, 2000, p189
* 97 Ibid., p190
* 98 T. Mitchell, The Rule
of Experts, ouvrage non encore paru
* 99 A.A. Fatouros,
« Les incidences sociales et culturelles des activités de la
Banque Mondiale » dans Le Droit International du
Développement Social et Culturel, sous la direction de A. Pellet et
J.M. Sorel, L'Hermes, Paris, 2000, p210
* 100 Article I (ii) du FMI
* 101 Article I (iii) de la
BIRD, « To promote the long-range balanced growth of international
trade and the maintenance of equilibrium in balances of payments by encouraging
international investment for the development of the productive resources of
members, thereby assisting in raising productivity, the standard of living and
conditions of labor in their territories. »
* 102 Exemple cité dans
Commission des Droits de l'homme, Rapport de l'expert indépendant
M. Fantu Cheru, «Effets des politiques d'ajustement structurel sur la
jouissance effective des droits de l'homme», p16
* 103 Exemple cité dans
Rapport d'information de la Commission des finances de l'Assemblée
nationale sur les activités et le contrôle du Fonds
monétaire international et de la Banque mondiale, par 198,
http://www.assemblee-nat.fr/rap-info/i2801.asp,
01/11/2001
* 104 Rapport Meltzer,
http://www.house.gov/jec/imf/meltzer.htm, 24/05/01
* 105 Exemple cité dans
J.J. Polak, "The Changing Nature of IMF Conditionality", OECD Technical Paper
No. 41, août 1991, p50
* 106 IMF, « Report
of the Group of Independent Persons Appointed to Conduct an Evaluation of
Certain Aspects of the Enhanced Structural Adjustment Facility »,
June 1998, p42,
http://www.imf.org/external/pubs/ft/extev/esaf2.pdf,
16/05/2001
* 107 G.A. Cornia, R.
Jolly, F. Stewart, L'ajustement à visage humain, Economica,
Paris, 1987, p135
* 108 Ibid., p66
* 109 J.M. Sorel,
« Les conséquences sociales et culturelles des
activités opérationnelles du FMI » dans Le Droit
International du Développement Social et Culturel, sous la
direction de A. Pellet et J.M. Sorel, L'Hermes, Paris, 2000, p194
* 110 Commission des Droits de
l'homme, Rapport de l'expert indépendant M. Fantu Cheru,
«Effets des politiques d'ajustement structurel sur la jouissance effective
des droits de l'homme», paragraphes 63/71
* 111 Ibid., par
59
* 112 Scandinavian
Institute of African Studies, The IMF and the World Bank in Africa :
conditionality, impact, and alternatives, Almquist & Wiksell
International, Stockholm, 1987, p 19 et 33
* 113 Cité dans
Commission des Droits de l'Homme, « Realization of economic,
social and cultural rights », Second progress report prepared by Mr.
Danilo Türk, Special Rapporteur, 18 July 1991, par 92
* 114 A. Zacharie,
« Vers quelles institutions financières internationales
? »,
http://users.skynet.be/cadtm/pages/francais/quellesifi.htm,
01/11/2001
* 115 G.A. Cornia, R. Jolly,
F. Stewart, L'ajustement à visage humain, Economica, Paris,
1987, p25-28
* 116 Commission des Droits de
l'Homme, Rapport de l'expert indépendant M. Fantu Cheru,
«Effets des politiques d'ajustement structurel sur la jouissance effective
des droits de l'homme»,24 février 1999, para 65 c),
http://www.unhchr.ch/Huridocda/Huridoca.nsf/0811fcbd0b9f6bd58025667300306dea/03e75916da6d5a298025675100387ea6?OpenDocument#Introduction,
01/11/2001
* 117 Agir ici pour un monde
solidaire, «Brève histoire des résistances à
l'ajustement structurel»,
http://www.globenet.org/ifi/savoir/ajustement/histoire.htm
* 118 Cité dans
Commission des Droits de l'Homme, Rapport de l'expert indépendant
M. Fantu Cheru, «Effets des politiques d'ajustement structurel sur la
jouissance effective des droits de l'homme», par 83
* 119 Commission des Droits de
l'Homme, Rapport de l'expert indépendant M. Fantu Cheru,
«Effets des politiques d'ajustement structurel sur la jouissance effective
des droits de l'homme», para 65 b)
* 120 Scandinavian Institute
of African Studies, The IMF and the World Bank in Africa : conditionality,
impact, and alternatives, Almquist & Wiksell International, Stockholm,
1987, p33
* 121 G.A. Cornia, R. Jolly,
F. Stewart, L'ajustement à visage humain, Economica, Paris,
1987, p30
* 122 Agir ici pour un monde
solidaire, « Ajustement structurel et santé»,
http://www.globenet.org/ifi/savoir/ajustement/sante.htm
* 123 Agir ici pour un monde
solidaire, «Brève histoire des résistances à
l'ajustement structurel»,
http://www.globenet.org/ifi/savoir/ajustement/histoire.htm
* 124 FMI/Banque Mondiale,
« Facilité pour la réduction de la pauvreté et
la croissance (FRPC) -- Questions d'ordre opérationnel »,
http://www.imf.org/external/np/pdr/prsp/fre/poverty2.htm
* 125 Ibid.
* 126 Ibid.
* 127 Scandinavian Institute
of African Studies, The IMF and the World Bank in Africa : conditionality,
impact, and alternatives, Almquist & Wiksell International, Stockholm,
1987, p20
* 128 Commission des Droits de
l'Homme, Rapport de l'expert indépendant M. Fantu Cheru,
«Effets des politiques d'ajustement structurel sur la jouissance effective
des droits de l'homme», par 131
* 129 Development Committee,
« Modification de l'initiative en faveur des pays pauvres tres
endettés (PPTE) »,
http://www.worldbank.org/hipc/Modification_French.pdf,
28/10/2001
* 130 Banque Mondiale, Recueil
de références sur les stratégies de réduction de la
pauvreté,
http://www.worldbank.org/poverty/french/strategies/frtoc.htm
* 131 Ibid.
* 132 Ibid.
* 133 Ibid.
* 134 Ibid.
* 135 P. Dailler et A. Pellet,
Droit International Public (Nguyen Quoc Dinh), LGDJ, Paris, 1999, p
430
* 136 C. Chavagneux et L.
Tubiana, « Quel avenir pour les institutions de Bretton Woods ? Les
transformations de la conditionnalité »,
Développement, Rapports du Conseil d'Analyse
économique, 2000,
http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/BRP/004001728/0000.pdf,
01/11/2001
* 137 J.J. Polak, "The
Changing Nature of IMF Conditionality", OECD Technical Paper No. 41, août
1991, p 60
* 138 Ibid.
* 139 Social Justice Committee
, « Social conditionality and the HIPC Debt Initiative »,
http://www.s-j-c.net/new_page_44.htm,
25/04/2001
* 140 Memorandum of the legal
counsel of the World Bank of 21 December 1990, Sec. M91-131.
* 141 Le Monde, « La
communauté internationale accorde une large aide financière
à Belgrade », 30/06/2001,
http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3214-3783-203752-VT,00.html,
01/11/2001
* 142 Cité dans J.M
Sorel, Les aspects juridiques de la conditionalité du Fonds
Monétaire International, Thèse de Droit Public,
Université Paris 13, 13 septembre 1990, p 974
* 143 Etudes citées
dans C. Chavagneux et L. Tubiana, « Quel avenir pour les institutions de
Bretton-Woods ? Les transformations de la conditionnalité »,
Développement, Rapports du Conseil d'Analyse
économique, 2000,
http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/BRP/004001728/0000.pdf,
01/11/2001
* 144 W. Oyatambwe,
« Implications et ambiguïtés de la « bonne
gouvernance » en Afrique », Demain Le Monde n°47,
octobre 2000,
http://www.congonline.com/Forum1/Forum08/Oyatambwe03.htm,
25/08/2001
* 145 M. Bettati and B.
Kouchner (eds.), Le devoir d'ingérence, Denoël, Paris,
1987, 300 p
* 146 Exemples cités
dans P. Dailler et A. Pellet, Droit International Public (Nguyen Quoc
Dinh), LGDJ, Paris, 1999, p 445
* 147 Voir N. Chomsky, Le
nouvel humanisme militaire, Editions Page deux, Lausanne, 2000, 293p
* 148 O. Corten,
« Les ambiguïtés du droit d'ingérence
humanitaire »,
http://www.unesco.org/courier/1999_08/fr/ethique/txt1.htm,
15/09/2001
* 149 A. Sen, Development
as freedom, Oford University Press, Oxford, 1999, 366p
* 150 H. Arendt, The
origins of totalitarism, World Publishing Company, Cleveland, 1962, 520
p.
* 151 C. Chavagneux et L.
Tubiana, « Quel avenir pour les institutions de Bretton-Woods ? Les
transformations de la conditionnalité »,
Développement, Rapports du Conseil d'Analyse
économique, 2000,
http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/BRP/004001728/0000.pdf,
01/11/2001
* 152 Rapport Meltzer,
http://www.house.gov/jec/imf/meltzer.htm, 24/05/01
* 153 Ibid.
* 154 World Bank Operation
Evaluation Department, «1999 Annual Review of Development
Effectiveness: Toward a Comprehensive Development Strategy »,
http://wbln0018.worldbank.org/oed/oeddoclib.nsf/11d38e62c269811285256808006a0022/0bd1230e97bb5505852568420056a30f/$FILE/99ARDE.pdf,
01/11/01
* 155 C. Chavagneux et L.
Tubiana, « Quel avenir pour les institutions de Bretton-Woods ? Les
transformations de la conditionnalité »,
Développement, Rapports du Conseil d'Analyse
économique, 2000, http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/BRP/004001728/0000.pdf, 01/11/2001
* 156 A.
Koulaïmah-Gabriel, « La suspension de l'aide comme sanction de
la non-performance: L'Europe et les leçons de la crise
nigérienne »,
http://www.oneworld.org/ecdpm/pubs/wp56_fr.htm,
01/11/2001
* 157 J.M.Sorel,
« Sur quelques aspects juridiques de la conditionnalité du
F.M.I. et leurs conséquences », European Journal of
International Law, http://www.ejil.org/journal/Vol7/No1/art3.html,
22/02/2001
* 158 B. Badie, Un monde
sans souveraineté. Les États entre ruse et
responsabilité, Fayard, Paris, 1999, p107-08
|