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La cohérence de la double conditionnalité des institutions de Bretton Woods

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par Cédric LAVERIE
Université Paris X - D.E.A. de Droit des Relations Economiques Internationales et Communautaires 2001
  

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Chapitre 2 : La cohérence des conditionnalités

La question de la cohérence des conditionnalités du Fonds et de la Banque se pose en termes de compatibilité et d'efficacité de l'agrégation de ces deux instruments au sein de la double conditionnalité des programmes communs. La cohérence institutionnelle à travers la collaboration ne pouvant être considérée comme un gage de complémentarité ou même de compatibilité, il semble légitime de s`interroger sur la coexistence de deux instruments distincts au sein de programmes communs et de leurs interactions réciproques. Pour cela, il faut déterminer quelles sont les différences entre ces deux conditionnalités tant au niveau de leur construction juridique qu'en tant qu'outil de politique économique. L'historique de la conditionnalité de chacune des deux institutions de Bretton-Woods est très différente puisque c'est le FMI qui a la paternité du concept et que la Banque ne l'a adopté que beaucoup plus tard par nécessité ou suivisme avec l'arrivée de l'ajustement structurel. Et c'est justement au niveau de ces différences, tant temporelle que factuelles, que pourraient apparaître des incohérences.

Parallèlement, la conditionnalité est aussi (ou surtout) un instrument de politique économique et donc un deuxième niveau d'incohérence pourrait apparaître au travers des politiques que ces institutions souhaitent voir suivre. La compréhension de cette cohérence politique passe par plusieurs niveaux d'analyse. Il faut, en effet, la mettre en perspective dans une idéologie plus globale de construction sociétale pour déterminer son application en tant que modèle de développement économique et social. A partir de là, il sera plus facile de déterminer quelles sont les différences entre chaque conditionnalité tant au niveau de leurs applications en fonction des objectifs et compétences de chacune des organisations qu'au niveau de leur coexistence et leurs interactions réciproques. Cette analyse tant juridique qu'économique est aussi en quelque sorte une illustration du résultat de la collaboration entre ces institutions.

Section 1 : La conditionnalité en tant qu'instrument juridique

La conditionnalité est avant tout un instrument juridique créé de toutes pièces par le FMI pour pouvoir exercer un pouvoir de contrôle sur l'utilisation de ses ressources au regard de ses objectifs. Le concept en lui-même ne remonte pas à la création de l'institution. Il est le fruit d'un long débat qui a commencé avant la conférence de Bretton-Woods et qui continue encore. L'émergence de la notion de conditionnalité a été progressive au sein du FMI tout comme sa formalisation au travers d'instruments juridiques. Et même une fois le concept ancré, l'instrument est resté très évolutif grâce aux techniques qui le composent et dont les combinaisons permettent l'application d'une conditionnalité graduée. La force de cet instrument a entraîné son utilisation par d'autres organisations comme la Banque Mondiale. Elle a dû néanmoins l'adapter au regard de ses statuts et de ses objectifs et ainsi créer sa propre conditionnalité avec son propre vecteur juridique et ses techniques spécifiques.

Paragraphe 1 : La création de la conditionnalité par le FMI

La conditionnalité a été engendrée par le débat qui régna à la création du FMI sur l'utilisation conditionnelle ou inconditionnelle de ses ressources. La position américaine de la conditionnalité a lentement pris le dessus. Ce processus s'est traduit d'abord par une interprétation restrictive des statuts du Fonds puis par une introduction implicite pour finalement aboutir à la véritable création du concept de conditionnalité. Une fois ce processus achevé, il a fallu mettre en forme le concept afin qu'il devienne un véritable instrument juridique. Sa formalisation a trouvé son aboutissement dans l'accord de confirmation qui a donné à la conditionnalité sa force au travers de ses éléments constitutifs comme les critères de réalisation, l'échelonnement ou l'adaptabilité.

A. La création conceptuelle de la conditionnalité

Le problème de l'utilisation conditionnelle ou inconditionnelle des ressources du Fonds est un débat qui remonte à la conférence de Bretton-Woods. Le plan Keynes penchait en faveur d'une logique inconditionnelle pour favoriser la croissance et le plan White favorisait l'approche conditionnelle pour préserver les ressources du Fonds. Le débat n'a pas été tranché directement. «La première pierre effective à l'édifice de la conditionnalité37(*)» fut la décision du 10 mars 1948 qui donne une interprétation de l'article V section 3 a) qui établissait la déclaration du pays qui avait besoin de fonds. Cette décision permet la contestation de cette déclaration de besoin et elle sera suivie le 17 mars 1948 par une autre décision qui précise l'article I v) et énonce que le terme garanties adéquates utilisé dans cet article peut être une condition à l'obtention de l'aide. A ce stade, la notion de conditionnalité reste encore floue mais la seconde pierre à l'édifice arriva quatre ans plus tard. Le principe de conditionnalité fut, en effet, introduit implicitement dans les politiques du FMI par la décision du Conseil d'Administration du 13 février 195238(*). Cette dernière établit le tirage inconditionnel sur la tranche-or et donc, implicitement, établit aussi le tirage inconditionnel sur les autres tranches. De plus cette décision créa l'assurement de tirage (qui deviendra l'accord de confirmation) qui sera le «principal vecteur de la conditionnalité39(*)»

Le FMI officialisa cette pratique par la décision du Conseil d'Administration du 20 septembre 1968 puis l'intégrât en 1969, grâce au premier amendement, à ses statuts. Les modifications apportées établirent clairement que l'utilisation des ressources du Fonds (en dehors de la tranche-or) étaient soumises à conditions comme le montre l'ajout du point (d) à l'article V section 3 des statuts du Fonds lors du premier amendement : « A representation of a member under (a) above shall be examined by the Fund to determine whether the proposed purchase would be consistent with the provisions of this Agreement and with the policies adopted under them, with the exception that proposed gold tranche purchases shall not be subject to challenge. ».

Le second amendement aux statuts du Fonds ne modifie pas la notion de conditionnalité mais l'étend indirectement avec l'officialisation de politiques spécifiques à certains problèmes de balance des paiements. L'article V section 3 a) fait désormais référence aussi aux assurements de tirages.

La troisième pierre à l'édifice fut la décision du 2 mars 197940(*) sur l'utilisation des ressources générales du Fonds et les assurements de tirage. Cette décision explicite les moyens de la conditionnalité. Le paragraphe 1 établit que les membres doivent prendre des mesures correctives au commencement de leurs problèmes de balance des paiements ou pour les prévenir. Les consultations prévues à l'article IV seront l'occasion pour le FMI de vérifier leur concordance avec ses objectifs et ainsi lui donner la possibilité de mettre en place un assurement de tirage. Le paragraphe 7, quant à lui, établit que le Fonds approuvera une demande d'utilisation de ses ressources quand il jugera que le programme du pays est en accord avec ses statuts et objectifs et que le pays doit prendre des mesures correctives avant l'assurement de tirage. Ces préconditions établissent donc la conditionnalité initiale du Fonds.

Le paragraphe 6 définit la conditionnalité effective durant le programme. Il établit les clauses de performance et d'échelonnement pour les tranches de crédit au-delà de la première.

Le paragraphe 11 établit la conditionnalité a posteriori pour les utilisations ultérieures de ses ressources avec l'analyse et l'évaluation de performance.

La décision du 20 mars 1979 établit aussi la portée de la conditionnalité. Le paragraphe 9 définît l'encadrement des critères de performance et les limites aux variables macro-économiques et à ceux nécessaires à la mise en place de provisions spécifiques des statuts ou des politiques qui s'y rattachent. La portée de la conditionnalité semble déjà être assez étendue mais le Fonds a rajouté dans le paragraphe 4 un droit de regard sur les objectifs sociaux et politiques intérieurs, les priorités économiques ainsi que sur les causes des problèmes de balance des paiements. Ceci élargit considérablement le pouvoir de contrôle du FMI dans l'approbation de l'utilisation de ses ressources. Mais J.Gold reconnaît que les termes utilisés dans ce paragraphe sont larges et peuvent prêter à débat41(*).

La décision du 20 mars 1979 pose donc la base formelle de la conditionnalité et de son utilisation et c'est pourquoi elle est aussi appelée directive sur la conditionnalité. Elle est d'ailleurs toujours appliquée ce qui prouve, du fait des changements fondamentaux d'orientation du FMI dans les quinze dernières années, qu'elle était très large et flexible.

Elle a cependant été améliorée par des décisions additionnelles en particulier au niveau procédural42(*).

* 37 J.M Sorel, Les aspects juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13, 13 septembre 1990, p 166

* 38 Manuel Guitián, Fund conditionality : evolution of principles and practices, International Monetary Fund, Washington D.C., 1981, p 13-14

* 39 J.M Sorel, Les aspects juridiques de la conditionalité du Fonds Monétaire International, Thèse de Droit Public, Université Paris 13, 13 septembre 1990, p 173

* 40 Décision reproduite dans J. Gold, Conditionality, International Monetary Fund, Washington D.C., 1979, p 39-48

* 41 J. Gold, Conditionality, International Monetary Fund, Washington D.C., 1979, p 23

* 42 «Misreporting and non complying purchases under Fund arrangements - Guideline on corrective action» ou encore «Relationship between performance criteria and phasing of purchases under Fund arrangements - Operational guidelines », cités dans E. Denters, Law and Policy of IMF conditionality, Kluwer Law International, Boston, 1996, p 103

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo