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La cohérence de la double conditionnalité des institutions de Bretton Woods

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par Cédric LAVERIE
Université Paris X - D.E.A. de Droit des Relations Economiques Internationales et Communautaires 2001
  

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Chapitre 2 : La cohérence par rapport aux principes des droits de l'homme

Au niveau de la cohérence externe de la double conditionnalité, il faut aussi s'intéresser à la relation qui existe entre les conditionnalités en tant qu'instruments de politiques économiques et le respect des droits de l'homme. Cette analyse se scinde en deux tendances qu'ont connues les institutions de Bretton Woods. Jusqu'à une période récente, le FMI, et la Banque dans une moindre mesure, ont ignoré les conséquences sur les droits de l'homme de leurs programmes. Elles considéraient, en effet, qu'elles n'étaient responsables que de ce qui rentrait directement dans leurs programmes, et qu'il était du ressort des pays bénéficiaires d'étudier l'impact des mesures soutenues et de mettre en place les structures nécessaires pour limiter les externalités négatives. Toutefois, l'augmentation du nombre des pays sous ajustement structurel conjugué à la diffusion progressive des résultats de ces programmes, par des ONG, des universitaires et même les institutions de Bretton Woods elles même, ont entraîné des critiques insistantes demandant la prise en compte des droits de l'homme dans ces programmes. Face à l'ampleur de la critique et à la dégradation de leur image qui en a découlé, les instituions de Bretton Woods ont commencé à se préoccuper des dimensions humaines dans leur programme avec l'apparition de la lutte contre la pauvreté et des nouvelles conditionnalités qui s'y rattachent.

On se situe donc maintenant dans une phase transitoire de prise en compte progressive des droits de l'homme dans les programmes des institutions de Bretton Woods. Les concepts de développement social et de bonne gouvernance sont les prémisses d'une nouvelle tendance qui aboutira à l'intégration des droits de l'homme dans la conditionnalité. On entend déjà parler de conditionnalité sociale et démocratique. Mais cette avancée n'est pas sans risque pour les institutions de Bretton Woods. En effet, il semble que ces nouveaux principes soient difficilement conciliables avec le respect de la souveraineté des pays concernés et que de plus le FMI et la Banque ne pourront plus se cacher derrière la « neutralité » de l'approche économique pour justifier cette nouvelle tendance.

Section 1 : La double conditionnalité et les droits économiques, sociaux et culturels

La double conditionnalité a un impact direct sur le respect des droite économiques, sociaux et culturels. En effet, les conséquences des programmes d'ajustement structurel (et de leur conditionnalité) modifient directement et indirectement les conditions économiques, sociales et culturelles de la vie des habitants des pays concernés. L'amélioration des conditions économiques est un objectif statutaire des institutions de Bretton Woods et devrait donc être en conformité avec le respect des droits économiques. Cependant, il faut constater que l'amélioration globale de l'activité économique ne se traduit pas forcément par une amélioration proportionnelle des conditions économiques de tourtes les classes de la population. Et c'est à ces deux niveaux qu'il faut étudier l'impact des conditionnalités. Mais ces mesures économiques ont aussi, bien souvent, des répercussions sur les conditions sociales et culturelles de la population. Et là encore, il faut s'attacher à déterminer quel est le rôle des institutions de Bretton Woods dans le respect des droits de la population bien que certaines de ces considérations aient été ignorées par les instituions de Bretton Woods, et en particulier par le FMI, jusqu'à une période récente

Paragraphe 1 : L'impact de la double conditionalité sur l'économie

Le but premier des institutions de Bretton Woods est l'amélioration des conditions économiques des pays qui demandent leur assistance. On pourrait s'attendre au moins dans ce domaine à une réussite de la double conditionnalité. L'impact des programmes sur le développement économique peut être appréhendé sous plusieurs aspects. Le premier est l'impact sur la croissance économique du pays. Cet indicateur est basé sur l'évolution du PNB (voir du PIB) et donne un indicateur de l'évolution globale de l'économie sans tenir compte de la répartition sectorielle ou sociale de cette amélioration des conditions économiques. Un second aspect peut être l'évolution de la répartition de la richesse nationale entre les diverses composantes humaines du pays. Cet indicateur a l'avantage de pouvoir déterminer à qui profite de la croissance (ou qui est touché par la récession). Il permet de mieux analyser l'impact du développement au niveau de la répartition des revenus et donc des possibilités économiques offertes aux différentes couches de la population.

A. L'impact sur la croissance

La croissance est un objectif indirect du FMI inscrit dans ses statuts. Il doit en effet « faciliter l'expansion et l'accroissement harmonieux du commerce international et contribuer ainsi à l'instauration et au maintien de niveaux élevés d'emploi et de revenu réel et au développement des ressources productives de tous les Etats membres, objectifs premiers de la politique économique100(*) ». C'est par contre un des objectifs direct de la Banque Mondiale101(*).

Il semblerait donc logique que sur ce point, les deux institutions de Bretton Woods soient en parfaite harmonie et donc on pourrait s'attendre à des résultats probants.

Il n'en est rien, dans une étude de 1992 intitulée « Les prêts de la Banque Mondiale à l'ajustement et les performances économiques de l'Afrique subsaharienne dans les années 80 : Comparaison avec d'autres pays à faible revenu », La Banque admet que sur six pays présentés comme des exemples de réussite des politiques d'ajustement, quatre ont enregistré une détérioration de leur taux d'investissement et deux ont affiché des taux de croissance négative du PIB dans les périodes où ils ont appliqué des programmes d'ajustement102(*).

En 2000, dans son rapport sur l'Afrique intitulé « L'Afrique peut-elle revendiquer sa place dans le XXIème siècle ? », la Banque admet que: « Il faut reconnaître que l'ajustement en Afrique a été fortement contesté et que les réformes restent incomplètes. (...) Plusieurs études ont trouvé un rapport limité, voire inexistant, entre les réformes et la réussite tant sur le plan de la croissance que de la réduction de la pauvreté. Puisque la conception des réformes était laissée aux conseillers extérieurs, on a assisté à une érosion de la capacité interne de gestion économique et la responsabilisation des gouvernements africains à l'égard des résultats économiques s'en est trouvée amoindrie 103(*)».

Le Fonds est lui aussi montré du doigt pour son manque de résultat dans sa part des programmes d'ajustement. Le rapport Meltzer dénonce ce résultat « IMF interventions---both long-term structural assistance and short-term crisis management---have not been associated, on average, with any clear economic gains to recipient countries. Numerous studies of the effects of IMF lending have failed to find any significant link between IMF involvement and increases in wealth or income104(*) ».

De même, une étude de 1990105(*) portant sur la période 1973-1988 montre que le taux de croissance est significativement plus faible dans les pays adoptant un programme du Fonds. Cette diminution est évaluée à 0.7% du PNB par an ce qui représente par exemple une baisse de 6% du PNB pour un pays qui aurait été pendant 6 ans sous un programme du Fonds.

Il faut cependant prendre ces chiffres avec des précautions puisque d'autres études commandées par le FMI comme le « Report of the Group of Independent Persons Appointed to Conduct an Evaluation of Certain Aspects of the Enhanced Structural Adjustment Facility »  montrent qu'au contraire il y a une augmentation du PNB pour les pays sous programmes d'ajustement structurel en comparaison aux autres pays. Cependant, ces études reconnaissent un échec relatif sur certains programmes au niveau de la croissance mais qui est compensé par l `amélioration d'autres indicateurs macro-économiques comme le montre le tableau suivant :

Table 1. Bangladesh: Comparison of Pre-Adjustment and Mid- and Post-Adjustment by Macro Key Indicators106(*)

 

Pre-Adjustment

Mid- and Post-Adjustment

 

Sample

Mean (in percent)

Standard

Deviation

Sample

Mean (in percent)

Standard

Deviation

Real GDP growth rate Current account/GDP Investment/GDP Exports/GDP

Inflation(CPI) Government deficit/GDP

11

11

11

11

11

6

4.5

-4.1

11.7

5.7

10.1

-8.9

0.03

0.018 0.019 0.007 0.043

--

9

9

9

9

9

9

4.0

-1.1

15.2

9.6

6.4

-6.7

0.01

0.022

0.023

0.023

0.033

--

Note: All the above figures are calculated based upon the data from the IMF's International Financial Statistics.

Malgré le doute qui plane sur la véracité des chiffres fournis par les différentes études, on peut quand même conclure que les programmes d'ajustement structurels mis en place par le Fonds et la Banque se sont assez peu efficaces au niveau de l'amélioration de la croissance dans les pays en développement concernés.

* 100 Article I (ii) du FMI

* 101 Article I (iii) de la BIRD, « To promote the long-range balanced growth of international trade and the maintenance of equilibrium in balances of payments by encouraging international investment for the development of the productive resources of members, thereby assisting in raising productivity, the standard of living and conditions of labor in their territories. »

* 102 Exemple cité dans Commission des Droits de l'homme,  Rapport de l'expert indépendant M. Fantu Cheru, «Effets des politiques d'ajustement structurel sur la jouissance effective des droits de l'homme», p16

* 103 Exemple cité dans Rapport d'information de la Commission des finances de l'Assemblée nationale sur les activités et le contrôle du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, par 198, http://www.assemblee-nat.fr/rap-info/i2801.asp, 01/11/2001

* 104 Rapport Meltzer, http://www.house.gov/jec/imf/meltzer.htm, 24/05/01

* 105 Exemple cité dans J.J. Polak, "The Changing Nature of IMF Conditionality", OECD Technical Paper No. 41, août 1991, p50

* 106 IMF, « Report of the Group of Independent Persons Appointed to Conduct an Evaluation of Certain Aspects of the Enhanced Structural Adjustment Facility », June 1998, p42, http://www.imf.org/external/pubs/ft/extev/esaf2.pdf, 16/05/2001

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand