WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Populations et aires protégées en Afrique de l'Est

( Télécharger le fichier original )
par Gaspard RWANYIZIRI
Université Michel de Montaigne-Bordeaux III - DEA Géographie 2002
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Deuxième partie

AIRES PROTEGEES EN AFRIQUE DE L'EST: TERRITOIRES PROTEGES, TERRITOIRES CONVOITES

Lors de l'époque des indépendances en Afrique orientale, les populations victimes de la politique coloniale de conservation croyaient avoir trouvé une grosse occasion de récupérer leurs anciens territoires ou du moins de bénéficier un certain nombre d'avantages à l'intérieur des espaces protégés. Mais comme nous allons le voir dans les paragraphes suivants, la période d'après les indépendances aura été plus difficile que la précédente.

Chapitre I

LE DEVELOPPEMENT DE LA CONSERVATION DANS LES ETATS NOUVELLEMENT INDEPENDANTS: L'HERITAGE COLONIAL BIEN ASSUME

Le passage du pouvoir entre l'administration coloniale belge ou britannique aux nouvelles autorités des Etats indépendants de l'Afrique de l'Est n'a rien changé en faveur des populations locales. Par contre, l'héritage colonial a été bien assumé soit en renforçant des mesures de protection laissées par les colonisateurs, soit en créant de nouvelles aires protégées au détriment de ces populations. C'est ce qu'affirme d'ailleurs E. Fall ( repris par

G. Sournia, op. cit.) en ces mots: « L 'Etat post- colonial a simplement hérité des attributs du pouvoir précédent. Les populations continuent à le percevoir comme elles percevaient hier la puissance coloniale. »

Ce qu'il faut constater, comme nous allons le voir, c'est que la mise en oeuvre de ces nouvelles mesures de conservation est différente selon les politiques environnementales de chaque Etat indépendant et surtout de celles de leurs anciens maîtres.

1.1 Le renforcement de la législation en matière de conservation: le cas du Rwanda et du Burundi

Au regard de leurs superficies nationales très petites, 26.336Km2 et 27.834 Km2, respectivement pour le Rwanda et le Burundi, et surtout de leurs densités moyennes de populations ( 230 habitants/Km2 en 1995 pour le Burundi et 307 en 1997 pour le Rwanda) qui étaient déjà considérées comme élevées au début des années 60, on aurait dû penser que les autorités de deux Etats nouvellement indépendants auraient pu envisager la suppression de toutes les aires protégées créées par les colonisateurs en vue d'installer les populations en quête de nouvelles terres. Par contre, elles ont procédé au renforcement des mesures de leur protection.

1.1.1 Juin 1973: date de création de l'Office Rwandais du Tourisme et des Parcs Nationaux (ORTPN)

Avec l'avènement de l'indépendance rwandaise, les acteurs locaux, espéraient enfin obtenir l'accès libre aux forêts. Cependant, ils furent surpris par l'acte honteux d'expulsion des Batwa dans les réserves forestières de Gishwati et de Nyungwe où ils ont pourtant vécu pendant de milliers d'années. Dès lors, leur situation se dégrada à tel point que le décideur de cet acte lui-même, le Président de la République à cette époque, en fut ému (Mbuzehose, J.B., 1999).

En effet, il est clair que cette expulsion des Batwa forestiers coïncide bien avec le succès de la théorie de la « Tragédie des communaux » (The Tragedy of the Commons) dans tous les milieux politiques et centres des bailleurs de fonds comme nous l'avons vu dans les paragraphes précédents. Il s'ensuit que voulant sans doute des fonds nécessaires pour la mise en oeuvre de leur plan de développement, les autorités rwandaises avaient répondu favorablement aux exigences des bailleurs de fonds tout en négligeant sciemment de considérer la pertinence du mode de vie des acteurs locaux. De ce fait, ce n'est pas surprenant de constater que la loi du 26 avril 1974 abonde dans le sens du lobby international au

détriment des Batwa. Ainsi, la décision en matière de gestion de l'environnement fut prise sous l'influence de l'extérieur.

D'ailleurs, les articles 31, 42, 55 (voir annexe n° 3) de ce décret-loi en expliquent davantage puisqu'ils confèrent à l'Office Rwandais du Tourisme et des Parcs Nationaux (O.R.T.P.N.) le droit d'interdiction de la chasse sur toute l'étendue du territoire de la République Rwandaise. Ce qui signifie que les Batwa forestiers sont devenus des victimes d'une logique mondialiste là où les intérêts de l'Etat et ceux des ONG de protection de la nature écrasent ceux des populations locales.

Pour ce qui est de la domination de l'Etat, il convient de signaler que les zones des marges constituent un enjeu économique de taille dans ce sens que plusieurs acteurs publics ont été autorisés à valoriser ces régions grâce à l'exploitation forestière. Le cas de la forêt naturelle de Gishwati constitue un cas d'école depuis les années 1970. En premier lieu, une grande partie de cette forêt a été attribuée à l'O.R.T.P.N. et transformée en zones touristiques. Grâce à ses projets touristiques, toute la faune, la flore ainsi que les produits dérivés sont devenus propriétés et patrimoine de l'Etat. En second lieu, le reste de la forêt fut officiellement réservé, d'abord, pour l'extension des zones de culture de rente de l'Office des Cultures Industrielles au Rwanda (O.C.I.R.) et ses projets d'installation d'usines à thé, par exemple les usines à thé de Rubaya et de Nyabihu au Nord-Ouest en Préfecture de Gisenyi; puis, d'autres activités du Ministère de l'agriculture, notamment les projets de valorisation du bois dans les scieries de Kamatsira et de Wisumo. Enfin, le défrichement de la forêt effectué à travers le projet agro-sylvo-pastoral dans les régions de Giswati-Butare-Kigali (G.B.K.) pour la mise en oeuvre de son programme de réserve naturelle intégrale (tourisme), de reboisement, de « pâturages coopératifs » et des zones de production de pommes de terre.

En définitive, on peut dire qu'avec la mise en vigueur de la loi du 26 Avril 1974 relative aux parcs nationaux et réserves forestières, les intérêts de survie des Batwa entrèrent en collision avec les intérêts économiques de l'Etat. De là, la confiscation de la forêt, qui constitue un acte officiel de légitimation de l'O.R.T.P.N., a acculé les acteurs forestiers locaux dans une situation de double contrainte et de risques. D'un coté, les Batwa sont implicitement contraints à briser les règles formelles en pratiquant leurs activités forestières pour survivre; et de l'autre côté, ils sont contraints à respecter les lois forestières de l'O.R.T.P.N. mais en acceptant de mourir de faim (Mbuzehose J.B., 1995).

En dehors de ces enjeux, le Rwanda a, depuis la création de l'ORTPN, fourni des efforts appréciables de valorisation des ressources touristiques. Les principales d'entre elles comme le Parc National de l'Akagera, celui des Volcans, la forêt de Nyungwe (devenue Parc National en avril 2001), les forêts de Gishwati et Bigogwe, ont été aménagées pour attirer le plus grand nombre de touristes. En outre, le pays s'est doté d'une infrastructure d'hébergement qui totalisait 1370 lits fin 1988 dont 51% dans la seule ville de Kigali (Nduwayezu J.D., 1990). Dans la même année, un réseau routier permettait d'atteindre aisément depuis Kigali les sites touristiques majeurs du pays.

Selon toujours J. D. Nduwayezu (idem), les recettes en droit d'entrée dans les parcs nationaux s'élevaient à 93,2 millions francs rwandais en 1987 contre les dépenses de 49,5 millions francs. Mais, si l'on soustraie la consommation interne, la valeur ajoutée du tourisme représentait, à la même époque, 0,5 % du PNB, ce qui était faible par rapport à la situation des pays africains à vocation touristique ( Kenya 24%, Maroc 7%, Sénégal 4%).

Cependant, malgré ce succès dans le domaine touristique des années 70 et 80, les espaces protégés du Rwanda connaissaient beaucoup de menaces liées en général à la pression démographique que connaît le pays depuis les années 1950. En effet, la densité physiologique qui, en 1950, était de 104 habitants/km2, est passée à 367 en 1988 (Nduwayezu J.D., op. cit.), ce qui a provoqué, au cours de cet intervalle, un grignotage de certaines parties des aires protégées du pays.

De 1990 à nos jours, les menaces de ce genre sont d'une grande ampleur suite aux événements politico-sociaux qui se sont succédés; il faut citer d'abord l'attaque du Front Patriotique Rwandais (F.P.R) contre le gouvernement de Kigali au mois d'octobre 1990; ensuite il faut penser au lancement du multipartisme au mois de Juin 1991, une période qui a marqué le début des menaces de grande envergure sur les superficies des aires protégées étant donné que les militants de l'opposition se sentaient capables de violer toute loi élaborée par le pouvoir en place. Enfin, la période la plus difficile a commencé juste au lendemain du Génocide rwandais d'avril-juillet 1994, au moment où un laisser-aller assez généralisé a eu des conséquences graves sur la quasi-totalité des aires protégées du pays.

A l'heure actuelle, malgré quelques infiltrations sporadiques localisées dans le Parc National des Birunga, au Nord-Ouest, et dans le Parc National de Nyungwe (l'ex-Forêt Naturelle du même nom), sans oublier bien sûr les 2/3 et la quasi-totalité des superficies amputées, respectivement du Parc National de l'Akagera et de la Forêt naturelle de Gishwati, le reste des aires protégées du pays est bien contrôlé et les mesures de protection très renforcées.

Tableau n° II: Situation actuelle des aires protégées au Rwanda

Désignation

Superficie en Ha

Localisation

Objectif

Parc National de Nyungwe

97000

Sud-Ouest

Parc touristique

Forêt de Gishwati

2000

Nord-Ouest

Réserve forestière

Forêt de Mukura

2000

Ouest

Réserve forestière

Parc National de l'Akagera

90000

Est

Parc touristique

Parc National des Birunga

15000

Nord-Ouest

Parc touristique

TOTAL

206.000

 
 

Source: Nduwayezu J.D (1990); Imbs F.(1997), Nos estimations

D'après ce tableau, on constate que la superficie totale des aires protégées du pays est réduite de moitié, 206.000 ha en 2002 contre 402.000 ha en janvier 1994, ce qui pousse les associations de protection de la nature à s'investir davantage dans le pays afin que ces mesures soient rigoureusement respectées. Notons que c'est grâce à leur pressing que les éleveurs du gros bétail avaient quitté le Parc National de l'Akagera entre 1998 et l'an 2000 et que le nom de ce dernier apparaît encore sur la carte rwandaise.

Carte n° 5: Situation actuelle des aires protégées au Rwanda

Tableau n°III: Les partenaires en coopération avec les principaux parcs nationaux du Rwanda

Nom du parc

Partenaire en coopération

Parc National de l'Akagera

-Deutsche Gelleschaft Fur Technische Zusammenarseit (G.T.Z.)

-World Wildlife Fund for nature

(W.W.F.)

- Coopération belge

Parc National des Volcans

- African Wildlife Cooperation (A.W.F) - W.W.F

- Fauna and Flora Preservation Society (F.F.P. S)

- United States Agency for the International Development (USAID) - Dian Fossey Gorilla Fund

Parc National de Nyungwe

- Coopération suisse

- Banque Mondiale

- Union mondiale de la Nature (UICN) - W.W.F.

- New York Zoological Society

- USAID

- Wildlife Conservation International (WCI)

Source: -Twarabemenye E.; Karibana, M. (op. cit.) - Sournia G. (op. cit.)

A travers ce tableau, on constate que le Parc National des Volcans et celui de Nyungwe ont plus de partenaires que celui de l'Akagera suite sans doute aux intérêts scientifiques que représentent les deux parcs. En effet, le premier abrite les derniers spécimens des Gorilles des montagnes, tandis que l'autre est considérée comme la plus vaste forêt primaire d'altitude de toute l'Afrique.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle