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Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français: Exemple de la limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes

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par Lionel Dupuy
Université de Pau et des Pays de l'Adour - DEA Géographie - Aménagement 1998
  

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"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

"Pour une remise en cause du maillage politico-
administratif français ?

Exemple de la limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."

INTRODUCTION GÉNÉRALE.

"La France, qui a toujours révéré ses découpages internes historiques, constate aujourd'hui qu'ils s'adaptent de plus en plus mal aux exigences économiques, sociales, voire administratives. On déplore, selon les sensibilités et les enjeux, un découpage communal archaïque, des départements devenus trop petits et trop grands, des régions parfois sans logique, la difficulté à faire entrer dans la réalité institutionnelle des concepts tels que le "bassin de vie", les réticences à créer des territoires transfrontaliers, en un mot une forme d'exception française comme toujours aussi attachante qu'exaspérante".

Cette citation de Jean-Marc et Philippe Benoit et de Daniel Pucci écrite au début de la conclusion de leur ouvrage sur la "France redécoupée", fait état d'une situation qui en France pose aujourd'hui évidemment de nombreux problèmes. En effet, si en 1789 le maillage politico-administratif français constituait un outil du pouvoir central lui permettant d'assurer correctement ses fonctions régaliennes de base (la justice, la police et l'armée), 200 ans plus tard, ce même maillage politico-administratif français doit faire face à une double évolution. D'une part, la mise en oeuvre des nouvelles compétences de l'État (dans le domaine économique et social notamment, et ce depuis un siècle environ : 1914, 1929, 1936, 1946, etc...) à partir d'un maillage ancien génère des difficultés : la création des 22 régions de programme en 1956, et leur renforcement les décennies suivantes, procède ainsi de cette évolution qui oblige le pouvoir central à créer de nouveaux points de repères (donc de mettre en place de nouvelles mailles, dont la géométrie est discutable). D'autre part, nous assistons à une modification dans la répartition des pouvoirs depuis les lois de décentralisation de 1982- 1983. Dans ce dernier cas, la redistribution du pouvoir entre le local et le national nécessite que chaque maille politico-administrative soit pertinente pour le citoyen et l'acteur socio- économique ; or cela est quasiment impossible, car une dispersion des compétences survient et que les limites (les mailles donc) ne collent pas avec les territoires des hommes qui ont fortement évolué, surtout depuis les années 1960. Il faudrait ainsi un niveau (voire deux) de participation locale avec des limites dans lesquelles le citoyen et l'acteur socio-économique se retrouvent, ce qui n'est actuellement pas le cas.

Comme nous l'avons dit auparavant, le maillage politico-administratif français est ancien, mais il est surtout inadapté aux logiques actuelles de gestion et de contrôle de l'ensemble du territoire national qui sont celles développées par l'État (le pouvoir centralisé). Cette inadaptation conduit à de nombreuses remises en cause, à de nombreuses critiques : ces dernières sont parfois directes ou indirectes, longuement développées ou allusives, mais de plus en plus prégnantes dans les discours, qu'ils soient ceux de géographes, d'économistes de politiciens, de politistes, ou d'autres personnes intéressées par la question.

L'objet de notre réflexion consiste donc à réfléchir sur les rapports (et plus précisément sur l'inadaptation qui existe en France) entre le maillage politico-administratif et l'espace socio- économique, en se focalisant particulièrement sur la pertinence et la validité des mailles départementales et régionales, utilisées comme outil dans la gestion et le contrôle de ce même

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

espace socio-économique. En effet, si ce dernier a évolué et évolue constamment, le maillage politico-administratif français, quant à lui, est le même depuis 200 ans. Certes, il fût établi, en partie, pour ne pas correspondre aux nombreux territoires pratiqués par la société civile de cette fin de 18° siècle, or aujourd'hui, les rapports de l'État et de l'homme à l'espace ne sont plus les mêmes, comme nous l'avons expliqué auparavant.

De même, dans ce mémoire, nous nous focaliserons essentiellement sur les circonscriptions administratives, tout en sachant que certaines sont aussi des circonscriptions électorales. Notre but n'est pas en effet de remettre ici en cause les modalités d'élection des représentants politiques français.

Finalement, les anciens cadres territoriaux (communes, cantons, arrondissements, départements et régions) et leurs mailles respectives, constituent-ils une entrave au développement des nouvelles logiques d'organisation de l'espace socio-économique français (liées, par exemple, aux nombreuses mobilités géographiques) ? Autrement dit, ces anciens cadres territoriaux sont-ils toujours pertinents et valides, sachant que les rapports de l'État et de l'homme à l'espace ont profondément évolué ?

De tout ce développement, découle notre problématique, formulée sous forme interrogative : le maillage politico-administratif français correspond-il aux logiques actuelles d'organisation, de gestion et de contrôle de l'espace socio-économique ?

Autrement dit, en quoi ce maillage politico-administratif ancien nuit-il aux

recompositions territoriales qui se développent actuellement sur l'ensemble du territoire national français ?

Pour nous aider dans cette réflexion, nous posons ici deux hypothèses, en partie déjà évoquées précédemment, qui représenteront en quelque sorte dans ce mémoire notre fil directeur :

* Le maillage politico-administratif français actuel est inadapté à une gestion et un contrôle performant et objectif de l'espace socio-économique.

* Il y a par conséquent nécessité de procéder à une réforme, une refonte de ce maillage, ou du moins de certaines mailles politico-administratives, afin de rétablir la cohérence dans l'articulation et l'adaptation des différentes logiques en présence.

Dans cette perspective, le plan que nous avons retenu s'articule ainsi en trois parties :

* La première partie développe les concepts, la problématique et la méthodologie : "Maillage politico-administratif et espace socio-économique : une adaptation en France de plus en plus difficile".

Nous expliquerons ainsi ce qu'est un maillage, nous développerons aussi la formation des communes, des départements et des régions, pour terminer par la mise en évidence des nombreuses modifications et évolution de l'espace socio-économique, ainsi que les remises en causes auxquelles nous faisions allusion auparavant.

* La seconde partie est constituée d'une étude de cas : "Le contact Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées : recompositions territoriales et discontinuités géographiques entre Pau et Tarbes".

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Ce terrain d'enquête, ou étude de cas, du fait de sa proximité et de son caractère original, constitue pour nous un support nécessaire mais non suffisant d'argumentation et de recherche. Ainsi, à partir de cet exemple, nous analyserons plus finement certains phénomènes qui remettent en cause actuellement le maillage politico-administratif français.

* La troisième partie est une ouverture du sujet : "Les solutions à envisager : une réforme française est-elle nécessaire ?".

En partant des recompositions territoriales mises en évidence dans la seconde partie, nous montrerons quelles sont les perspectives d'avenir et les avantages qu'apporteraient un développement plus général et global des espaces projet français, tels que les "réseaux de villes" ou encore les "pays".

Sans vouloir nous enfermer dans une théorie bien précise, notre démarche sera dans ce mémoire essentiellement dialectique, tant cette théorie peut nous permettre de comprendre, d'analyser et de dépasser les paradoxes et les contradictions qu'offre la problématique qui nous intéresse. Il s'agit pour nous de soulever ici une problématique que nous aimerions développer plus longuement dans le cadre d'une thèse de Doctorat, à savoir celle de l'avenir du maillage politico-administratif français, ainsi que celle (la problématique) des échelles politico-administratives et géographiques pertinentes pour l'aménagement du territoire, face aux différentes dynamiques (géographiques, économiques, sociales,...) auxquelles nous assistons quotidiennement.

Ainsi, et compte-tenu des exigences inhérentes à la rédaction d'un mémoire de D.E.A., nous soulèverons ici beaucoup d'interrogations auxquelles nous apporterons peu de réponses, ou alors de manière très imprécise. Cependant, les contraintes temporelles et matérielles rencontrées cette année ne sont pas totalement étrangères à cet état de fait...

Première Partie :

Maillage politico-administratif et espace socio-économique : une adaptation en France de plus en plus difficile.

Procéder à une remise en cause du maillage politico-administratif français, nécessite auparavant d'expliquer (dans la mesure du possible) les finalités de ce dernier, de le définir et de décrire sa formation. De même, il est nécessaire aussi de décrire et d'étudier l'évolution des rapports (de force) qui se sont établis entre ce dernier et l'espace socio-économique, ainsi que d'analyser, toujours dans la mesure du possible, les différentes logiques qui sont à l'origine de l'évolution de ces différents ensembles. Il apparaît ainsi que les années 1960 constituent un tournant majeur dans les rapports de force ainsi établis. Cette césure traduit une inversion des tendances dans les logiques de contrôle et de gestion de l'ensemble du territoire national, ainsi qu'une modification majeure dans l'organisation et la structuration de l'espace socio-économique. La perspective historique permet en effet un éclairage très intéressant des problèmes que soulève l'évolution des rapports de l'homme à l'espace, notamment ces dernières décennies. L'articulation de nos deux sous-parties selon une structuration "avant" et "après" la décennie 1960, participe ainsi de cette logique.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Les rapports dialectiques qui découlent de la confrontation des différentes logiques en présence s'inversent eux aussi avec la décennie 1960, d'où les remises en cause (actuelles) que ce mémoire se propose d'étudier.

Compte-tenu de notre choix et de notre terrain d'étude, notre développement insistera surtout sur les circonscriptions administratives (et peu sur les circonscriptions électorales, quand l'espace étudié associe directement les deux) que constituent les départements et les régions. Ces deux entités, l'une ancienne et l'autre récente, sont très étroitement liées. Leurs mailles respectives sont aujourd'hui criticables autant dans leur processus de mise en place et d'évolution que dans leur forme, ce qui constitue une autre forme de dialectique (celle du processus et de la forme) qui sera abordée dans le développement qui suit.

A) - Le maillage politico-administratif français : définition, formation et rôle jusqu'aux années 1960.

I - Qu'est-ce qu'un maillage ? Pourquoi mailler l'espace ?

Le terme de maillage est une notion polysémique : polysémique car il présente plusieurs acceptions selon les auteurs, et c'est une notion par conséquent (et non pas un concept) puisqu'il est difficile de lui donner une définition unique admise par tous. Dans le développement qui suit, nous allons tenter de mieux le définir, afin de préciser quel sens nous lui donnons dans ce mémoire.

Le maillage est donc l' "ensemble des filets qui situent les lieux dans les mailles de l'appropriation et la gestion du territoire" ; c'est aussi un "principe de partition opératoire et socialisé de l'espace".

Cette définition de Roger Brunet (et des co-auteurs), qui sous-tend de nombreuses implications et interrogations, est essentielle dans le cadre de notre travail. Ainsi (et a fortiori aujourd'hui), l'espace est fondamentalement maillé ou"parti". De ce fait, les processus d'appropriation conduisent à une partition de l'espace qui fait apparaître des mailles (maille :"espace délimité, base d'un découpage du territoire pour l'appropriation ou pour la gestion"). Le maillage constitue par conséquent un relais et un outil du pouvoir dont le but est de maîtriser une étendue donnée. Quand cette dernière est de grande taille, l'État procède à une délégation de pouvoir qui engendre une organisation hiérarchique permettant le contrôle et la gestion du territoire par et pour le pouvoir. Il s'agit donc tout simplement "de diviser pour régner et pour coexister".

Dans cette perspective, nous traitons ici du maillage au sens général du terme, sans procéder à des distinctions. Or, il en est une fondamentale pour nous : celle qui distingue les logiques politico-administratives des logiques socio-économiques.

Les premières engendrent un maillage (politico-administratif) dont le but est de diviser et d'organiser l'espace, de contrôler ce dernier ainsi que les hommes qui le peuplent, et cela de la manière la plus optimale possible. Les mailles qui en résultent sont ainsi nettes et claires, objectives et objectivées, et bien définies dans l'espace. Elles sont aussi relativement statiques, notamment à l'échelle d'une vie humaine (cf par exemple les limites qui sont

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

dessinées sur les cartes topographiques, et que nous retrouvons d'une édition à l'autre, alors que de par et d'autre de ces mêmes limites la physionomie d'ensemble a parfois fortement évolué).

Les secondes, à l'inverse, engendrent plus de gradients que de mailles. En effet, la partition de l'espace qui résulte des logiques socio-économiques entre pôles (de part et d'autre d'axes, de frontières, etc...), met en évidence des mailles floues, incertaines, évanescentes (nous avons donc plutôt affaire à des gradients, à des formes transitionnelles, et non pas à des discontinuités ou des mailles bien affirmées), difficilement objectivables, mais pourtant réelles et objectives. Ces gradients, quant à eux, sont essentiellement dynamiques, à la fois dans l'espace et dans le temps (cf par exemple la difficulté à définir les limites des espaces urbains, celles des espaces périurbains et celles des espace ruraux ; il en est de même pour les aires d'influences des villes : jusqu'où s'étendent-elles réellement, quelles sont leurs formes précises ?...).

Les relations qui s'établissent entre le maillage (en général), les mailles qui le constituent, et les gradients résultant des logiques développées précédemment, sont de type dialectique, les uns influençant les autres, et inversement. De même, il ne faut pas perdre de vue qu'une maille (et ce, quelle que soit la logique qui en est à l'origine) est à la fois un contenant et un contenu. Partant de là, d'autres relations dialectiques s'établissent ici, en l'occurrence entre le processus et la forme des mailles considérées.

Plus largement, il s'agit ainsi de la dialectique de la forme et du fond, de la forme et du processus (donc de celle du contenant et du contenu) : "il ne s'agit pas (...) de concevoir l'espace comme un contenant (un cadre statique) à l'intérieur duquel gigoteraient des hommes contenus, comme des mouches dans un bocal. La dialectique du contenant et du contenu est plus riche. C'est le rapport du fond et de la forme".

Si les espaces et les gradients socio-économiques sont dynamiques dans l'espace et dans le temps, le maillage et les mailles politico-administratives ne sont pas cependant complètement statiques, figés pour toujours. En effet, il arrive parfois à ces derniers d'évoluer, même de disparaître, quand le pouvoir en place le décide et que les dynamiques socio-économiques mettent en évidence la nécessité d'une réforme, d'une révision ou au moins d'une modification (comme dans le cadre d'un Plan d'Occupation des Sols, par exemple).

Le maillage constitue donc un des éléments clé de l'organisation de l'espace géographique, espace sur lequel se confrontent de nombreuses logiques telles que celles que nous venons de développer et de mettre en évidence. Jusqu'aux années 1960, et depuis plusieurs siècles, le maillage politico-administratif français n'existait que par et pour le pouvoir en place (l'État), dont le but était de gérer, de contrôler et d'organiser l'espace (français). Instrument et outil donc du pouvoir, il se décomposait en quatre niveaux hiérarchiques (avant que ne soit formée la région) emboîtés dont nous allons décrire maintenant la formation.

II - La formation des communes, des cantons, des arrondissements et des départements.

La formation des communes, des cantons, des arrondissements et des départements, tels que nous les connaissons actuellement, est le fruit de la Révolution Française. Reprenant les anciens cadres territoriaux en les modifiant plus ou moins selon leurs volontés et leurs idéaux, les constituants ont d'abord créé les départements et les communes, les cantons et les

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arrondissements constituant les divisions ultérieures du département.

A) - La formation des départements français.

Succédant plus ou moins aux vieilles provinces de la France d'Ancien Régime qui constituaient les divisions essentielles du royaume depuis l'époque féodale, les départements sont créés par l'Assemblée Constituante en 1789-1790. Ils résultent de la volonté de redécouper l'espace national sur des bases plus égalitaires, c'est-à-dire de mettre fin aux privilèges (des différents territoires présents en France), auxquelles s'ajoute aussi une volonté d'unification et de centralisation. Il s'agit donc, pour les Constituants, de briser les anciens cadres de vie établis depuis de nombreux siècles, formant de véritables territoires géohistoriques.

Le support de l'élaboration de la carte de ces départements est principalement la carte de Cassini au 1/86400 ème (de la dynastie Cassini en réalité), et qui constitue le document cartographique de référence en cette période de Révolution Française.

A l'origine, le nouveau maillage administratif devait être purement géométrique et égalitaire. Les circonscriptions ainsi obtenues "devaient être les ressorts d'un système d'assemblées emboîtées suivant une hiérarchie à trois degrés (départements, districts et cantons) et suivant une progression par multiple de 9 (81 départements, 9 districts par département, 9 cantons par district), chaque instance inférieure étant étroitement subordonnée à l'instance supérieure. Chaque département devait être un carré de 18 lieues de côté, contenant 9 districts carrés de 6 lieues de côté chacun, ceux-ci étant eux-mêmes composés de 9 cantons de 2 lieues sur 2 chacun".

Ce découpage géométrique s'oppose ainsi radicalement aux anciens pays et provinces géohistoriques, dont les limites (ou frontières), plus ou moins floues, étaient le résultat d'une lente évolution qui s'était opérée au fils des siècles. Sieyès est d'ailleurs l'un de ce hommes pour qui "la France ne doit point être un assemblage de petites nations qui se gouverneraient séparément en démocraties".

Finalement, les Constituants décident "d'accorder un assez large respect aux convenances locales, aux anciennes limites et réalités géographiques (topographie, répartition de population, moeurs, etc...) dans les délimitations nouvelles ; cependant, la nécessité de fractionner les provinces en circonscriptions de moindre étendue et à peu près égales est maintenue. La rigidité du modèle géométrique se trouve donc nuancé sur le plan des tracés, mais non pour ce qui est de l'extension des circonscriptions".

Cependant, l'Assemblée Constituante et le Comité de Constitution (des départements) posent une règle importante et à respecter, celle de l'accessibilité aux chefs-lieux : chaque chef-lieu de département doit être accessible de n'importe quel point de ce département, et cela en moins d'une journée de voyage. Or cette règle ne tient pas compte du réseau urbain préexistant. En effet, à l'époque considérée, la ville inspirait de la méfiance et de l'hostilité, d'où le faible intérêt qu'on lui a d'abord porté dans le découpage des départements. Finalement, l'afflux massif de revendications urbaines pour tenir compte du rôle des villes dans la polarisation de ces (futurs) espaces départementaux, contrebalance alors l'idée de départ. D'une géométrie absolue nous passons ainsi à une géométrie relative, plus respectueuse des pratiques socio-spatiales en vigueur, de la mobilité des hommes et des biens.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

"La départementalisation apparaît finalement comme le résultat d'un compromis entre plusieurs logiques, ce qui conduit à reconsidérer le reproche d'arbitraire qui lui a souvent été adressé". La part du local a donc été aussi importante que celle du national dans la mise en place de ces découpages. Les mailles de ces nouveaux départements (83 en 1790, et 96 aujourd'hui) retrouvent ainsi souvent celles des anciennes provinces auxquelles ils succèdent, d'où une appropriation et une légitimation relativement rapide de ces espaces, autant par les populations locales que par le pouvoir désormais centralisé.

Par la suite, deux lois de l'an VIII (1799) et l'an IX créent les arrondissements et les cantons. L'arrondissement est ainsi une division du département, sans budget ni assemblée élue, mais dans laquelle l'État est représenté par un sous-préfet (il y en a 329 actuellement). Quant au canton (il y en a 3828 en 1990, selon le R.G.P. de 1990), il constitue une division de l'arrondissement créée notamment en vue des élections à l'assemblée départementale, et aussi un niveau organisationnel de base destiné à la gestion du département (gendarmerie, collège, E.D.F., etc...). Pour chaque canton un conseiller général est élu pour six ans. Le canton est généralement un regroupement de plusieurs communes entières, mais il y a parfois des exceptions (par exemple, les communes urbaines et les grandes villes sont souvent découpées en plusieurs cantons).

B) - La formations des communes françaises.

Le maillage communal français date légalement du 22 décembre 1789. L'Assemblée Constituante créa 44000 communes, premier niveau de l'administration locale française, qui reprennent pour l'essentiel les limites des paroisses d'Ancien Régime et même parfois celles des grands domaines gallo-romains. Succédant ainsi aux paroisses de la période médiévale et moderne, les communes forment la plus petite division administrative française, possédant un budget et étant administrée par un conseil municipal élu pour six ans qui désigne en son sein le maire et ses adjoints. Elles sont aujourd'hui, au recensement I.N.S.E.E. de 1990, au nombre de 36551.

L'institution des communes est donc révolutionnaire. Ainsi, comme le fait remarquer Jean- Louis Guigou, "nation, départements, communes sont des institutions à "sang chaud" qui ont été instituées en période révolutionnaire. Elles renvoient à des territoires historiques, là où il y a eu des morts, de la vie et des traditions. C'est surtout vrai pour la nation et les communes. Les départements apparaissent plus comme des déclinaisons arbitraires de l 'Etat, mais ils sont riches de traditions forgées par deux siècles d'histoire".

Le second Empire et le début de la III ème République parachèvent la définition des pouvoirs et de l'organisation des communes et des départements, qui resteront pratiquement identiques jusqu'aux lois de décentralisation de 1982. De même, les découpages (le maillage donc) des départements et des communes ont peu varié depuis la Révolution Française. C'est d'ailleurs ce maillage qui a permis, jusqu'aux années 1960, au pouvoir central de contrôler et de gérer la quasi-totalité du territoire national, cela en pratiquant une politique où l'essentiel des décisions partaient du centre pour se diriger vers la périphérie.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

III - Pour une gestion et un contrôle optimaux du territoire national par le pouvoir central.

Jusqu'aux années 1960, période où de nombreuses remises en cause se manifestent (politiques, administratives, économiques, sociaux), le maillage politico-administratif français constitue un relais et un instrument au service du pouvoir (centralisé à Paris), permettant ainsi une gestion et un contrôle optimaux (et/ou quasi-absolus) du territoire national.

Fruit de la Monarchie et de plusieurs siècles d'évolution, le centralisme parisien se caractérise par une concentration accrue du pouvoir politique, administratif et de décision, par un poids démographique et économique sans commune mesure avec le reste de la France. Modèle monocentrique (du pouvoir) par excellence, forte hiérarchie et armature urbaine, le pouvoir central et centralisé "a façonné son territoire pour l'adapter à ses modes d'organisation administrative, politique et économique".

Durant cette période, les trois niveaux d'administration (commune, département, État) ont pour but, parmi d'autres, de résoudre les conflits et de créer l'unité, sachant que les relations verticales (ou inter-actions) sont prédominantes, suivant une logique descendante hiérarchique, allant donc de Paris vers le reste de la France. En effet, les relations horizontales (ou inter-relations) sont peu favorisées, l'organisation fonctionnelle du territoire étant dominée par quatre types de hiérarchies :

* hiérarchie urbaine (cf l'étoile de Legrand, 1831), * jacobinisme industriel,

* centralisme administratif,

* élitisme culturel.

Ces hiérarchies, ce jacobinisme, organisent et structurent ainsi l'espace français suivant un autre modèle théorique géographique, aussi de type dialectique, à savoir celui du "centre" et de la "périphérie", mais avec des rapports de force très inégaux. Partant de cette logique, l'État jacobin est "le type même d'un État à forte cohésion et à faible cohérence : deux départements voisins n 'y avaient (n 'y ont) strictement rien d'autre en commun que le fait d'envoyer chacun leurs représentants à une même assemblée et d'être soumis aux même lois que cette assemblée aurait votées".

Dans cette perspective, la fonction de préfet (de département, sans oublier les sous-préfets qui représentent l'État dans le cadre des arrondissements), créée en 1800 par Bonaparte et qui fait suite à celle des intendants de la royauté, est le symbole le plus évident du principe centralisateur qui motive l'État, puisqu'elle se maintiendra avec le pouvoir impérial, royal puis républicain, au cours du XIX° siècle, comme pendant la quasi-totalité du XX° siècle. Le maillage politico-administratif constitue donc, durant la période considérée (grosso-modo de 1789, et même avant, jusqu'aux années 1960), le support de base et l'instrument de l'application du pouvoir de gestion, de contrôle et de décision de l'État français.

Ainsi, "cette organisation spatiale répondait à la volonté politique d'organiser la nation en un État unitaire promoteur du développement économique. On retrouve ici l'idée d'une adéquation entre le fond (le marché, l'administration, les frontières) et la forme

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

(l'architecture du territoire), qui a montré son efficacité en faisant de la France une grande puissance économique et politique". De même, comme le fait remarquer Violette Rey, "toute organisation politico-territoriale sur une base étendue doit, en effet, répondre à une double nécessité : découper le tout en parties, "diviser pour gérer... et régner" ; rassembler des parties pour créer un tout, coordonner d'authentiques forces territoriales pour construire l'entité d'un État durable. De cette dialectique émerge un équilibre dynamique qui asseoit la base spatiale de l'État, avec un partage des compétences et des pouvoirs entre chaque niveau".

Or actuellement, et depuis les années 1960, l'équilibre dynamique émergeant de la dialectique développée par l'auteur n'est plus équilibré du tout (la contradiction sémantique de notre part est volontaire). De nombreux éléments remettent en cause l'autoritarisme et le centralisme parisien (l'État français ayant maintenant des bases spatiales très solides, pour reprendre les termes de Violette Rey), tels que l'émergence des revendications régionales (les volontés d'un État plus girondin, décentralisé et d'esprit plus fédéral) et la régionalisation elle même, le début de la décentralisation qui accompagne cette dernière, ainsi que les nombreuses modifications et évolutions de l'espace socio-économique français avec lequel le maillage politico-administratif s'adapte (ou s'articule) de plus en plus mal. En effet, quand le pouvoir central ne s'occupait que de la justice, de la police et de l'armée, le maillage politicoadministratif s'adaptait relativement bien aux prérogatives, aux compétences dévolues à

l'État. Mais aujourd'hui, les compétences de l'État sont plus nombreuses et diverses (avec une intrusion dans le domaine de l'économique et du social, il s'agit du passage de l'Étatgendarme à l'État-providence). Nous assistons alors à un renversement de tendance dans lequel le maillage politico-administratif doit tendre vers un compromis, un nouvel équilibre, ici entre les réalités factuelles de l'espace socio-économique (le terrain) et les prérogatives, les devoirs du pouvoir central (donc de l'État). Le décalage volontaire entre le maillage (ainsi que le nombre important de mailles) que nous étudions et les nouvelles dynamiques géographiques, est à partir des années 1960 de plus en plus controversé, ce dernier ne permettant plus une gestion et un contrôle objectif, cohérent et correct de l'ensemble du territoire national français.

Alors que les finalités du maillage départemental et communal étaient essentiellement politiques et administratives, celles qui découlent de la régionalisation et de la décentralisation (qui touche donc les départements et les communes), bien qu'étant aussi politiques et administratives, sont en plus économiques et sociales. Ainsi, le passage d'une logique à une autre permettra plus tard, peut-être, la mise en place d'un compromis durable entre les forces centripètes (centralisme, jacobinisme) et les forces centrifuges (régionalisme, girondins), en espérant que nous ne passerons pas d'un extrême à l'autre.

B) - A partir des années 1960, une adaptation de plus en plus difficile qui engendre de nombreuses remises en cause.

I - Régionalisation, aménagement du territoire et décentralisation.

Les régions sont des circonscriptions de l'administration nationale et territoriale. De création récente, leur légitimité est donc fragile. L'historique de la région peut se diviser en trois étapes.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

A) - De la Révolution Française jusqu'à l'orée de la V° République.

C'est une période d'hostilité politique, il y a un refus explicite de créer des circonscriptions de trop grande dimension, même si elles ont des avantages. C'est aussi la peur permanente (de la part du pouvoir en place) de voir resurgir en France, derrière la région, le spectre de l'Ancien Régime (la Monarchie, c'est-à-dire la revendication de privilèges ou de pouvoirs forts capables de contester Paris et son influence). De plus, en cette période, il y a toujours le souci de favoriser le centralisme français (parisien), donc de ne pas remettre en cause la République.

Pendant le régime de Vichy, 19 préfectures régionales sont nées. Elles ont des attributions dans le domaine de l'ordre et de la police, et aussi une vocation dans le domaine économique : il s'agit d'organiser la distribution des subsistances.

Après la 2° Guerre Mondiale, différents mouvements régionalistes (exemple, en 1952, le C.E.L.I.B. est le Comité d'Étude et de Liaison des Intérêts Bretons) manifestent des volontés régionalistes.

B) - De 1956 aux lois de décentralisation (1982-1983).

L'idée de région s'impose ainsi petit à petit en France, la nécessité économique faisant loi. La volonté des milieux d'affaire est de délimiter des territoires offrant une capacité d'intervention plus grande, et permettant aussi de nouvelles stratégies pour les entreprises. Il s'agit aussi de réduire l'influence parisienne et de créer un nouveau cadre approprié à la mobilité des hommes (due à la civilisation automobile). Un arrêté du 28 octobre 1956 crée ainsi 22 régions de programme. Ces dernières constituent cependant des regroupements de départements, afin de conserver le même nombre d'élus. Ainsi, "La nécessité de créer des régions apparaît d'abord liée à la volonté de planifier et d'aménager le développement économique", ce qui correspond bien à l'évolution des compétences de l'État que nous évoquions précédemment.

En 1964, le 14 mars, une réforme régionale est mise en place. Les C.O.D.E.R. sont créées (COmmissions de Développement Économique Régional). Elles ont un pouvoir limité et un but essentiellement consultatif. Les préfets de région, quant à eux, ont pour mission de coordonner l'administration et de mettre en oeuvre la politique du gouvernement en matière d'aménagement du territoire et de développement économique. La région est alors une circonscription territoriale de l'État.

"La France de 1964 reste donc directement administrée par le pouvoir central, elle reste jacobine". Dans la même période, la création de la D.A.T.A.R. en 1963 (Délégation à l'Aménagement du Territoire et à l'Action Régionale) constitue aussi une émanation du pouvoir central. Cette période 1956-1964 apparaît donc comme un aménagement du territoire par le centre. La période suivante, de 1968 à 1972 s'apparente cependant plus à une phase d'hésitations, entre les manifestations de mai 1968 et la réforme de Pompidou.

En 1972, le 5 juillet, sous Pompidou, on procède à une nouvelle réforme régionale (très timide, compte-tenu de ce qui s'est passé auparavant avec De Gaulle). La région change de statut juridique. Les E.P.R. apparaissent (Établissements Publics Régionaux). Ils sont au nombre de 22. Le Conseil Économique et Social reproduit en quelque sorte les anciennes

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

C.O.D.E.R.. Les régions restent toujours cependant des régions croupions, placées sous la tutelle de l'État.

Si la loi de 1972 correspond à une phase de déconcentration des pouvoirs de décision et de contrôle, la loi de 1982 constitue au contraire une véritable phase de décentralisation.

C) - De 1982-1983 à nos jours.

Cette troisième étape constitue ainsi le passage de la déconcentration à la décentralisation, et la mise en place de l'aménagement du territoire par la régionalisation, sous l'impulsion de la Gauche, arrivée au pouvoir lors des élections présidentielles de mai 1981 (avec François Mitterrand).

La région devient une collectivité territoriale où siègent deux assemblées :

* le Conseil Régional (les conseillers généraux sont élus au suffrage universel dans le cadre des départements),

* le C.E.S. (Comité Économique et Social).

Quant aux préfets, ils deviennent les commissaires de la République : ils "ont charge de garantir la cohérence des décisions régionales par rapport à la politique nationale".

Les compétences des régions demeurent encore faibles, en rapport avec des budgets limités. Elles concernent l'action économique, l'aménagement du territoire, la formation professionnelle et le développement des universités. Par contre, les départements et les communes (qui deviennent aussi des collectivités territoriales décentralisées) voient leurs pouvoirs et leurs compétences augmenter sensiblement (plus que la région qui est naissante) : les élus locaux gèrent des services départementaux et des budgets de plus en plus importants. Les maires, par exemple, ont désormais le pouvoir de délivrer les permis de construire.

Nous assistons ainsi à un affaiblissement du pouvoir central et à un rééquilibrage des rapports de force entre les collectivités territoriales et l'État, où la région constitue un espace stratégique, un espace fonctionnel. De création récente (la région est peu vécue, perçue et représentée), la région a essentiellement une dimension économique, politique et administrative (mais dans une perspective inverse à celle développée lors de la création des départements et des communes). Elle est un espace en devenir, objectif et objectivée, une future maille de l'articulation européenne.

La région est donc aujourd'hui une division administrative de la France regroupant plusieurs départements. On y retrouve un budget et une assemblée élue, le conseil régional, qui regroupe des parlementaires de la circonscription et des représentants des collectivités locales et territoriales (départements, communes, communautés urbaines). Le président du conseil régional assure le pouvoir exécutif, il est élu par l'assemblée régionale au moment de son renouvellement. L'État est donc représenté par un commissaire de le République (anciennement le préfet de région) qui reste à la tête de l'administration centralisée et qui gère aussi les services extérieurs de l'État.

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Circonscription administrative d'aménagement par excellence, la région, instituée donc dès 1956 et effective à partir des lois de décentralisation de 1982-1983, procède ainsi d'une triple volonté :

* mettre en place un support territorial susceptible de favoriser, via les lois de décentralisation, un développement plus harmonieux et plus homogène de l'ensemble du territoire national français, ce dernier souffrant en ces années après la 2° Guerre Mondiale de l'hypertrophie politico-démographico-économique parisienne,

* donner de la matière à polariser aux métropoles d'équilibre que l'État cherche à favoriser, * mettre en place un interlocuteur entre le département et la région.

Le maillage régional, regroupant les unités départementales, offre cependant des disproportions dans la taille des régions ainsi établies, l'espace socio-économique étant en évolution constante et étant très hétérogène. Il existe ainsi de grosses disparités démographiques et économiques entre certaines régions, comme par exemple entre le Limousin et Rhône-Alpes.

Avec la mise en place des régions et de leur renforcement via les lois de décentralisation (ainsi que l'aménagement du territoire qui les accompagne), nous assistons donc depuis une quarantaine d'années à une extension des compétences de l'État qui pose des problèmes : comment gérer ces nouvelles compétences en gardant un maillage politico-administratif ancien mis en place pour des compétences beaucoup plus précise et surtout plus réduites (les trois fonctions régaliennes de l'État étant la justice, la police et l'armée). Car en même temps, et surtout depuis les années 1960, l'espace socio-économique français s'est fortement modifié et a connu de nombreuses évolutions. Comment alors un maillage établi voilà 200 ans peut-il s'adapter à de nouvelles compétences qui concernent un espace socio-économique en évolution constante ?...

II - Les modifications de l'espace socio-économique.

Les remises en cause du maillage politico-administratif français actuel sont ainsi liées aussi aux nombreuses modifications de l'espace socio-économique de ces dernières décennies. Parmi celles-ci, évoquons :

* l'urbanisation croissante : d'une répartition relativement homogène de la population il y a plus d'un demi-siècle, et même avant, nous passons progressivement à une répartition hétérogène (concentration, exode rural), privilégiant les villes, les espaces urbains, périurbains et rurbains. Il y a ainsi aujourd'hui 73% de citadins,

* les transformations profondes de l'agriculture et du monde rural,

* une mobilité accrue des hommes, des biens, des marchandises, des capitaux, des échanges, des informations... Grâce aux nouvelles infrastructures de transports, à la démocratisation de l'automobile, aux Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (N.T.I.C.), et aux progrès techniques, les distances ne jouent plus le même rôle qu'auparavant,

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* les nouveaux comportements des populations, des entreprises, des industries, liés à la prise en compte des loisirs, du cadre de vie, de l'environnement.

C'est ainsi qu'une cartographie des densités actuelles de population en France met en évidence l'intensité du mouvement de contraction de la population. Si au siècle dernier la population était relativement diffuse sur l'ensemble du territoire national, aujourd'hui elle est concentrée sur des espaces restreints. Ainsi, alors que 1/10 ème de la population française est répartie sur 60% du territoire, 4/10 ème est répartie sur 1% du territoire seulement. Ce faisant, aujourd'hui 80% environ des communes en France ont moins de 1000 habitants : les densités de population sont donc très inégales sur l'ensemble du territoire.

Autrefois, le temps nécessaire à l'acheminement des biens, des hommes et de l'information sur de longues distances, constituait des territoires plus petits et des territorialisations différentes que ceux que nous connaissons actuellement. Les progrès scientifiques et techniques (automobile, train, avion, téléphone,...) ont aboli les frontières de ces anciens territoires, de même que les distances ne jouent plus le même rôle. Les hommes sont ainsi très mobiles en cette fin de siècle : en 1789, l'aller-retour au chef lieu de département se faisait en cheval et en une journée, en 1998, l'aller-retour au chef lieu de région se fait en voiture et parfois en une matinée...

L'espace socio-économique s'est aussi spécialisé avec le temps et les relations entre les différents pôles urbains constituant l'armature urbaine française se sont densifiées. De nombreuses mutations qualitatives se sont donc opérées, à la fois au niveau des villes et de la campagne.

Ainsi, depuis le 19° siècle, le changement a été un facteur accru d'inégalités ente les départements. Deux facteurs sont fondamentaux :

* la Révolution industrielle et urbaine,

* la Révolution tertiaire (services, administration,...).

De ces révolutions s'est opérée une transformation de la configuration géographique de la France ainsi qu'un bouleversement de l'équilibre traditionnel entre les villes et les campagnes. La géographie des villes s'est remodelée en fonction d'un double processus :

* le développement de certaines villes plus important que d'autres, * la complexification de la hiérarchie du réseau urbain.

Tout cela, auquel il faut ajouter le rôle de la position des villes à l'échelle nationale et européenne, a conduit et conduit encore à une différenciation entre les départements, certains étant plus dynamiques que d'autres (peut-on comparer le Gers, le département le plus rural de france dont la population totale est d'environ 175.000 habitants, avec, par exemple, le département du Nord, ouvert sur l'europe du Nord et ayant une population totale de 2.500.000 habitants ?).

Le maillage politico-administratif français s'adapte donc de plus en plus mal avec la mise en place des nouvelles prérogatives de l'État. Le premier, statique, semble immuable ; les secondes concernent un espace socio-économique dynamique qui évolue continuellement.

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Cette inadaptation croissante entre l'un et l'autre conduit à de nombreuses remises en cause, le maillage politico-administratif ayant de moins en moins comme objectif d'asseoir le pouvoir central (en train de se décentraliser) et par conséquent d'être volontairement décalé et contradictoire avec les réalités diverses, observables sur le territoire national. Finalement, seules les fonctions régaliennes peuvent être remplies correctement sur ces bases territoriales.

Ainsi, les logiques qui ont présidé à l'organisation et à la mise en place du maillage politicoadministratif français (que nous connaissons actuellement), ne sont plus celles qui se développent aujourd'hui (même pour les régions, pourtant d'essence récente). De même, il n'existe pas qu'un seul type d'espace politico-administratif et/ou socio-économique (dans une perspective qualitative), ni même une seule échelle correspondante à ces différents types d'espaces (donc dans une perspective quantitative). Par conséquent, l'articulation et l'imbrication de ces deux espaces est tellement difficile de nos jours qu'il est évident d'assister à de nombreuses remises en cause. Ce faisant, dans la partie suivante, nous allons faire un état des lieux des différentes critiques émises à l'encontre de ce maillage politicoadministratif.

III - Inadaptation et remises en cause.

Avant de procéder aux remises en causes qui nous intéressent, il nous faut définir quels sont les objectifs, actuellement, que doit atteindre le maillage politico-administratif français, compte-tenu des différentes évolutions que nous avons décrites auparavant.

A) - Quelle doit être la pertinence et la validité d'un cadre territorial actuel ?

A la lecture de nombreux ouvrages, et par l'observation des changements qui s'opèrent autour de nous, il est évident, a priori, que la pertinence et la validité actuelle d'un cadre territorial (commune, département, région, etc...) est de bien correspondre aux territoires pratiqués par la société civile, c'est-à-dire d'accompagner et de favoriser les dynamiques et les logiques de cette dernière. Il faut que ces cadres territoriaux (ou mailles politico-administratives) correspondent au mieux aux multiples territoires développés par les hommes, les biens et les informations, tout en tenant compte de leurs échelles géographiques respectives, afin qu'une large majorité d'entre eux s'identifient à un espace commun, facilement repérable (dans la mesure du possible).

Jean-Louis Guigou partage ce point de vue, surtout lorsqu'il déclare : "Les communes, les départements, les régions, les nations... sont des institutions qui "normalement" régissent des espaces géographiquement, économiquement et historiquement pertinents. Il devrait donc y avoir, dans un souci d'efficacité, adéquation entre la "superstructure" (l'institution) et "l'infrastructure" (l'économie réelle et l'histoire vécue des territoires). Pour construire la France de 2015, on peut retenir l'hypothèse que les circonscriptions établies en 1789 ne coïncident plus, ni avec l'histoire longue du Moyen-Age que les révolutionnaires ont voulu détruire, ni avec les bouleversements consécutifs à deux siècles de développement économique".

Partant de là, le maillage politico-administratif français est donc inadapté par rapport aux nouvelles compétences de l'État et aux processus de redistribution du pouvoir entre le national et les collectivités locales (et territoriales). Les critiques et les remises en cause que

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

nous allons développer maintenant sont ainsi significatives de cet état de fait.

B) - Trois échelles territoriales remises en cause.

"La France, qui a toujours révéré ses découpages internes historiques, constate aujourd'hui qu'ils s'adaptent de plus en plus mal aux exigences économiques, sociales, voire administratives. On déplore, selon les sensibilités et les enjeux, un découpage communal archaïque, des départements devenus trop petits et trop grands, des régions parfois sans logique, la difficulté à faire entrer dans la réalité institutionnelle des concepts tels que le "bassin de vie", les réticences à créer des territoires transfrontaliers, en un mot une forme d'exception française comme toujours aussi attachante qu'exaspérante".

Les différents reproches formulés dans ce passage soulignent bien le fait qu'ils sont issus de causes très différentes : les échelles territoriales concernées étant au nombre de trois, il est impossible d'aborder leur résolution de la même manière d'un niveau scalaire à un autre (effet d'échelle). En effet, ces trois niveaux territoriaux (ou échelles territoriales) sont maintenant chargés d'avoir une pertinence pour le citoyen, censé participer à sa gestion (cf les lois de décentralisation), dans le cadre d'une perte de pertinence (redistribution du pouvoir) du niveau national au profit des trois niveaux inférieurs. Est-ce raisonnable alors de vouloir impliquer le citoyen dans quatre niveaux à la fois (en comptant le niveau national) ?

1 - Les communes françaises.

Ainsi, par exemple, au Recensement Général de la Population de 1990 (R.G.P. I.N.S.E.E.), les communes françaises sont au nombre de 36551, ce qui faisait de la France en 1994 le pays qui possédait à lui seul autant de communes que les 11 autres pays alors constitutifs de l'Union Européenne. Ce "monument d'archéologie administrative" constitue un record qui est souvent critiqué, de nombreux pays européens ayant déjà procédé à des regroupements de leurs unités locales de base (le premier échelon de l'administration locale), le surnombre devenant ingérable.

En effet, si au 18° siècle la majorité des communes étaient polarisées par le chef-lieu, aujourd'hui ce sont, entre autres, les nouveaux équipements qui polarisent l'espace et remettent ainsi en cause les limites spatiales communales (il s'agit donc des mailles communales), qui n'ont souvent plus de sens. Ainsi, certaines d'entre elles coupent les tissus urbains d'importantes agglomérations urbaines françaises, introduisant une discontinuité là où au contraire une continuité (du bâti, par exemple) s'est développée et établie. Les communes françaises, considérées dans leur configuration actuelle, présentent ainsi aujourd'hui un maillage anachronique, où le peuplement, réduit à moins de 10 habitants parfois, leur ôte une grande partie de leur signification.

Dans cette perspective, la pertinence des cantons est elle aussi remise en cause. Ces derniers ne restent perçus qu'en milieu rural, et la représentation des conseillers généraux favorise surtout les cantons ruraux.

"Ni personnes morales, ni collectivités locales, les cantons et arrondissements n'ont pas d'assemblée et d'administration propres. Ils ont beaucoup perdu de leur importance. (...) Ces

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

deux unités semblent moribondes, vestiges de l'organisation de la III ème République".

2 - Les départements français.

Les départements, quant à eux, sont accusés d'être trop petits, compte-tenu notamment de la révolution des transports, ainsi que d'être trop nombreux (pour les mêmes raisons). A l'inverse, "laissant à la région son rôle régional, il peut se consacrer pleinement à son rôle de mise en solidarité des villes et des campagnes. Il doit pour cela avoir une taille plus proche

de celle de nos 329 arrondissements métropolitains. Bien des départements sont des rings ou des ménages à trois. Pau et Bayonne, Rouen et le Havre qui ont déjà chacune leur évêque, Montluçon, Moulins et Vichy et bien d'autres villes peuvent devenir le coeur d'un petit département. Après tout, le département de Belfort fonctionne très bien, et une communauté urbaine ferait double emploi avec lui".

Jean-Pierre Worms, quant à lui, cite quelques exemples qui remettent en cause la pertinence des découpages départementaux (donc des mailles départementales) : "pur artifice institutionnel de la Révolution, il ne correspond ni dans son découpage, ni dans son mode de représentation, aux réalités d'aujourd'hui. On ne compte plus les agglomérations ou les "pays" qui se sont développés à cheval sur plusieurs départements, voire sur plusieurs régions, et dont les projets de développement posent d'inextricables problèmes de coordination entre ces incontournables partenaires. Parmi beaucoup d'autres, deux exemples d'inadéquation du découpage départemental aux réalités socio-économiques du terrain :

* le "pays de Redon" est à cheval sur trois départements (Morbihan, Ille-et-Vilaine, Loire- Atlantique) et sur deux régions (Bretagne et Pays de Loire) ;

* l'agglomération de Mâcon, en traversant la Saône, passe du département de Saône-et-Loire à celui de l'Ain et de la région Bourgogne à la région Rhône-Alpes".

Dans la même logique, la banlieue (ou l'agglomération) d'Avignon se développe à cheval sur
le Vaucluse et le Gard, sur les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Roussillon.

3 - Les régions françaises.

Enfin, les régions, d'essence récente, sont souvent opposées aux autres régions européennes (cf les länder allemands) ; elles sont souvent critiquées au niveau de leur taille (trop petite parfois), d'être peu peuplées et arbitraires dans leurs regroupements de départements ainsi que dans leurs limites (leurs mailles, cf les remarques faites à l'encontre des départements). Ainsi, le Morbihan, rattaché à Rennes, regarde surtout vers Nantes ; à l'inverse, la Mayenne, rattachée aux Pays de la Loire regarde vers la Bretagne. Dans la même idée, comment se sentir appartenir à la région Centre, dont le nom et la formation ne désigne que la position géographique de cette dernière dans l'hexagone ? !!!

Ainsi, les nombreuses remises en cause du maillage politico-administratif français résultent à la fois de la modification des conceptions de l'État (et donc du pouvoir) dans la manière de gérer et de contrôler l'ensemble du territoire national, donc de l'espace socio-économique, et des modifications même de ce dernier. Les années 1960 constituent par conséquent un tournant majeur dans la logique établie depuis la Révolution Française (et même avant), où le

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développement, la gestion et le contrôle du territoire part maintenant presqu'autant du bas (du local) que du haut (de l'État). Il s'agit pour l'État (le pouvoir en place) de concilier deux logiques a priori antinomiques, celle du jacobinisme (du centre vers la périphérie) et celle du fédéralisme (de la périphérie vers le centre). Nous assistons ainsi aujourd'hui à une transition de l'une vers l'autre, transition qui s'est amorcée dans les années 1960 et qui se poursuit actuellement. L'objectif consiste donc à conjuguer (toujours a priori) ces deux formes de contrôle et de gestion de l'espace socio-économique français, et ce de la meilleure manière possible.

CONCLUSION de la première Partie.

Les remises en cause du maillage politico-administratif français procèdent donc d'une double logique. D'abord, les rapports de pouvoir, de contrôle et de gestion émanant de l'État sur l'espace socio-économique ont subi une inversion de tendance au cours de la décennies 1960, notamment avec la mise en place des régions, de la politique de l'aménagement du territoire (pour contrebalancer le poids politico-administratif et démographico-économique de Paris et sa région), et des lois de décentralisation, permettant aux collectivités territoriales de gérer leur propre budget et de prendre en main leur avenir.

Ensuite, et parallèlement, ce même espace socio-économique à connu des mutations et des bouleversements profonds dans sa structure, dans son organisation interne, ce qui s'est traduit par des modifications spatiales très importantes remettant elles aussi en cause la pertinence actuelle du maillage politico-administratif français.

Les deux logiques évoquées précédemment mettent en évidence des rapports dialectiques, l'une étant à la fois à l'origine et le résultat de l'autre, et inversement (malgré parfois des rapports de force inégaux). Ainsi, en 1789-1790, les départements français ont été créés en tenant compte, en partie, des réalités de l'espace socio-économique considéré. Par la suite, ces nouvelles mailles politico-administratives ont influencé à leur tour l'évolution de l'espace socio-économique sur lequel les départements ont été délimités (par exemple le recours au chef-lieu du département pour des documents administratifs). Ce va-et-vient incessant entre infrastructure et superstructure (=> praxis) a assuré donc l'unité, la cohésion et la survie du système ainsi établi pendant près de deux siècles. Cependant, depuis un quarantaine d'années, ce fonctionnement s'affaiblit de plus en plus (il s'inverse même, cf remarques précédentes), les logiques qui prévalaient à la mise en place du fonctionnement de ce système il y a 200 ans n'étant plus celles qui se développent aujourd'hui (ou qui veulent se développer aujourd'hui).

Ainsi, dans le cadre de la théorie dialectique, l'infrastructure (ou espace, instance socio- économique : celle de l'habitus) et la superstructure (ou espace, instance politicoadministrative) forment ensemble la topique (territoriale). Ce faisant, les recompositions territoriales et les inter-relations actuelles se développant entre différents pôles urbains (ou d'autres types d'espaces) appartenant à des départements ou des régions différentes, traduisent, à notre sens, l'inadaptation du maillage politico-administratif français à l'espace socio-économique avec lequel il se développe.

De la même sorte, la dialectique régissant les rapports entre le maillage politico-administratif et l'espace socio-économique est aussi la dialectique de l'espace de légitimité (de l'administrateur) et de l'espace d'action (des hommes, des biens et de l'information). Cette

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

dernière met en évidence le rôle de l'horizontal et du vertical, où aujourd'hui l'horizontal (les relations et proximités fonctionnelles entre pôles urbains, par exemple) a plus de poids qu'il y a quelques décennies, ce que nous allons étudier dans cette deuxième partie.

Deuxième Partie :

Le contact Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées : recompositions territoriales et discontinuités géographiques entre Pau et Tarbes.

Le contact Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées constitue pour nous un exemple concret d'analyse et de remise en cause de la pertinence du maillage politico-administratif français, et plus précisemment des mailles départementales et régionales. L'observation, la mise en perspective et l'étude de quelques exemples de recompositions territoriales entre Pau et Tarbes, vont nous permettre, après cette première partie essentiellement théorique, de voir comment sur le terrain s'organisent les logiques et les faits que nous avons développés auparavant.

Nous avons choisi cet exemple de par sa proximité et son originalité. De même, il nous semble, a priori, représentatif d'un bon nombre de situations similaires dans l'hexagone (ne serait-ce que par l'observation des densités de population à l'échelle de la France entière), situations qui participent ainsi aux nombreuses remises en cause que ce mémoire se propose d'étudier. En effet, d'autres exemples auraient pu être étudiés dans ce cadre. Citons, entre autres, Béziers et Narbonne (respectivement dans l'Hérault et dans l'Aude, et distantes d'une trentaine de kilomètres), de même certaines villes se sont associées en réseau de villes : par exemple, Bar-le-Duc / Saint-Dizier / Vitry-le-François (respectivement dans la Meuse, la Haute-Marne et la Marne). Enfin, nous pouvons rappeler que certaines grosses agglomérations françaises ont des limites qui dépassent facilement celles de leur département d'appartenance (Paris et Lyon, pour ne citer qu'elles).

Partant de là, le secteur d'étude que nous avons retenu semble pertinent et représentatif des différentes logiques retenues. Ce faisant, les deux sous-parties constituant cette étude de cas s'organisent en fonction de la cartographie de quelques indicateurs statistiques, et d'une enquête de terrain dont les modalités de construction et de traitement seront exposées plus loin dans ce mémoire. Il apparaît ainsi que le constat de l'I.N.S.E.E. (celui d'un "espace urbain" entre Pau et Tarbes) est objectif et représentatif de la réalité (compte-tenu des recherches que nous avons effectuées).

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

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L'objectif de cette seconde partie consiste donc à vérifier certaines de nos hypothèses de départ, et d'analyser plus finement, à travers cet exemple de Pau-Tarbes, les transgressions des limites politico-administratives. Il s'agit aussi, dans le cadre de la méthode hypothético- déductive, de vérifier le bien-fondé des remises en causes développées en première partie.

A) - Pau-Tarbes : une limite politico-administrative majeure transgressée par un "espace urbain".

I - Des Z.P.I.U. au Z.A.U. : le constat de l'I.N.S.E.E.

Le Zonage en Aires Urbaines.

Issu des nouveaux découpages réalisés par l'I.N.S.E.E. pour permettre notamment une meilleure différenciation entre l'espace rural et l'espace urbain, le Zonage en Aires Urbaines (Z.A.U.) associe Pau et Tarbes dans le cadre d'un "espace urbain" qui transgresse donc parfaitement la limite politico-administrative. Ainsi, récemment (1996-1997), l'I.N.S.E.E. a proposé de remplacer les Zones de Peuplement Industriel ou Urbain (Z.P.I.U.) par le Z.A.U., les Z.P.I.U. étant trop étendues. "L'obsolescence de la définition des Z.P.I. U. et l'aspect limitatif de celles des unités urbaines on incité l'I.N.S.E.E. à définir une nouvelle classification du territoire : le Zonage en Aires Urbaines (Z.A. U.). Basé sur la notion de pôle urbain et de couronne périurbaine, ce nouveau zonage permettra d'analyser, à l'aide d'un outil plus adapté, une grande partie des problèmes liés à l'emploi et à la métropolisation. Utiles pour les analyses structurelles, les aires urbaines devraient se révéler précieuses pour les réflexions sur les politiques de développement local".

Pour permettre une meilleure compréhension des objectif visés par l'I.N.S.E.E., une définition rapide des principaux découpages évoqués précédemment s'impose.

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Par Unité Urbaine, l'I.N.S.E.E. entend une ou plusieurs communes sur le territoire desquelles se trouve un ensemble d'habitations qui présentent entre elles une continuité et qui comportent au moins 2000 habitants. Une unité urbaine constituée de plusieurs communes est dénommée "agglomération multicommunale". Une unité urbaine constituée d'une seule commune est dénommée "ville isolée".

Les Z.P.I.U., quant à elles, sont les Zones de Peuplement Industriel ou Urbain. Elles sont constituées des unités urbaines, des communes dites industrielles (c'est-à-dire non urbaines, mais offrant des emplois dans de grands établissements) et des communes dortoirs.

Enfin, le Z.A.U. est donc le Zonage en Aires Urbaines. Il permet la distinction de deux grands types d'espaces : l'espace à dominante rurale et l'espace à dominante urbaine. L'espace à dominante urbaine est constitué de trois types de communes : les pôles urbains, les couronnes périurbaines et les communes multipolarisées. Les communes n'appartenant à aucune de ces catégories sont dites rurales.

* le pôle urbain est une unité urbaine offrant au moins 5000 emplois sur son territoire, sous réserve qu'elle ne soit pas sous la dépendance directe d'un pôle urbain voisin plus important.

* la couronne périurbaine est obtenue par un processus itératif. Sont agrégées au pôle urbain toutes les communes qui envoient plus de 40% de leur population active résidente travailler dans un pôle urbain. Puis, toutes les communes envoyant plus de 40% de leurs actifs dans la zone ainsi créée sont également intégrées dans le périurbain, et ainsi de suite jusqu'à l'arrêt du processus.

* l'aire urbaine est l'addition d'un pôle urbain et de sa couronne périurbaine.

* les communes multipolarisées sont les communes rurales et les petites unités urbaines envoyant 40% de leurs actifs ayant un emploi vers plusieurs aires urbaines, sans atteindre ce seuil avec une seule d'entre elles, et qui forment avec elles un espace connexe.

Les pôles urbains, les couronnes périurbaines et les communes multipolarisées forment l'espace à dominante urbaine.

L'espace à dominante rurale est l'ensemble des communes n'appartenant pas aux catégories précédemment définies.

Ainsi :

Pôle urbain + Couronne périurbaine = Aire urbaine.

Aire urbaine + Communes multipolarisées = Espace urbain.

=> Espace national français - Espace urbain = Espace à dominante rurale.

Ainsi, l'I.N.S.E.E. dans le cadre de ses découpages, montre clairement que l'espace socio- économique s'organise aussi indépendamment des mailles politico-administratives. Les phénomènes de mobilités géographiques (relations domicile-travail, par exemple) sont ainsi mis en évidence, et s'appuient donc sur la proximité des principaux pôles urbains.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Cependant, nous pouvons nous interroger sur la pertinence et la validité du seuil retenu dans le cadre du Z.A.U. : ce seuil de 40% abaissé à 35% ou 30% offre-t-il une cartographie comparable à celle liée aux 40%. Pourquoi d'ailleurs 40% ?

Malgré tout, l' "espace urbain" Pau-Tarbes représente le 20° "espace urbain" le plus peuplé de France (= 348000 habitants en 1990), le 18° le plus dynamique (= 0,39% de taux annuel de variation de la population entre 1982 et 1990), et le 12° le plus attractif (= 0,18% de taux annuel de variation dû au solde migratoire entre 1982 et 1990).

D'ailleurs, "l'intensification des liens inter-régionaux dans cette zone est clairement démontrée par le repositionnement de l'aire urbaine de Pau vers Tarbes entre 1982 et 1990, au détriment de la partie ouest de l'aire".

Cette typologie de la dynamique géo-démographique de l'"espace urbain" Pau-Tarbes n'a pas pour but de classer ce dernier dans un "hit-parade" des espaces urbains les plus dynamiques (attractifs ou peuplés) en France, mais de montrer comment les pôles urbains français entretiennent des relations (de tous ordres) qui se développent indépendamment du maillage politico-administratif.

Cet "espace urbain" Pau-Tarbes nous interroge ainsi une fois de plus sur la pertinence des mailles départementales et régionales, dont nous allons décrire maintenant l'établissement entre les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées.

II - Pourquoi une limite politico-administrative majeure ?

Pau et Tarbes, respectivement préfectures des Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées, et distantes seulement de 35 kilomètres environ, sont ainsi séparées par une double limite politico-administrative, départementale et régionale. Or, actuellement de nombreuses relations s'établissent entre les deux villes moyennes, formant ainsi pour l'I.N.S.E.E. un "espace urbain" (cf commentaire précédent).

La limite politico-administrative qui sépare le département des Hautes-Pyrénées de celui des Pyrénées-Atlantiques correspond parfaitement à la frontière ancienne entre le Béarn et la Bigorre. D'ailleurs, la cartographie que présentent Pierre Tucoo-Chala et Christian Desplat le précise bien : le même trait noir correspond à la "frontière ancienne Béarn-Bigorre" et à la "limite départementale actuelle". Remarquons d'autre part que le tracé de la limite semble indifférent à la topographie, même si parfois cette dernière épouse plus ou moins fidèlement la ligne de rupture de pente formée par le plateau de Ger et son talus oriental (donc faisant face à la plaine de Tarbes).

Or, cette même cartographie révèle aussi l'existence de deux enclaves bigourdanes dans le département des Pyrénées-Atlantiques. "Ce découpage remonte à l'époque lointaine où les vicomtes de Béarn annexèrent le Montanérès ; au sein de cette petite vicomté quelques paroisses étaient propriété directe des comtes de Bigorre qui les conservèrent jalousement. Les "enclavés", ainsi qu'aiment à s'appeler les habitants de ces villages, ont traversé les siècles, et la Constituante respecta scrupuleusement cet héritage de ce monde féodal dont elle voulait pourtant abolir tous les vestiges".

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Par contre, les anciennes limites occidentales du Béarn n'ont joué aucun rôle dans le nouveau maillage proposé, les trois provinces basques étant rattachées au Béarn pour former le département des Basses-Pyrénées (renommé Pyrénées-Atlantiques en 1969). Cet assemblage surprenant répond ici au désir d'uniformisation du territoire national de l'Assemblée Constituante, qui ne voulait pas faire du Pays Basque un département à part entière.

Comme nous pouvons le constater, le processus de départementalisation a procédé d'une double volonté : celle du niveau national (la Révolution Française), et celle du niveau local (les revendications locales ayant été prises en compte). Si ce nouveau maillage politicoadministratif offrait une certaine cohérence en cette fin de 18° siècle, eu égard aux logiques prises en compte, aujourd'hui il est souvent remis en cause, soit de manière ponctuelle et indirecte, soit de manière plus systématique et directe : l'observation actuelle des nombreuses relations fonctionnelles (dues notamment à la proximité géographique) entre Pau et Tarbes reflète en partie cet état de fait.

Par la suite, la régionalisation a renforcé cette rupture politico-administrative entre les deux pôles urbains, donc entre le Béarn et la Bigorre. En effet, de même qu'en 1790 la départementalisation sépare administrativement ces anciennes provinces, en 1961, la régionalisation accentue la scission. Les Pyrénées-Atlantiques (alors Basses-Pyrénées) s'inscrivent alors dans la région Aquitaine, les Hautes-Pyrénées dans la région Midi-Pyrénées. Bien que se sentant plus proche de Toulouse que de Bordeaux, Pau (et le département des Pyrénées-Atlantiques) est quand-même rattaché à l'Aquitaine, la région Midi-Pyrénées comptant déjà huit départements.

III - Des cartographies d'indicateurs statistiques qui confortent le constat de l'I.N.S.E.E.

A) - Les densités de population en 1990.

A travers cette cartographie, nous allons vérifier le principe évoqué en première partie, selon lequel la population française est actuellement concentrée sur des espaces relativement restreints, notamment dans le cadre d'une urbanisation et d'une périurbanisation croissantes, générant ainsi un mouvement de contraction de cette population.

L'observation attentive de la cartographie présentée ici montre qu'il y a bien un rapprochement entre Pau et Tarbes, rapprochement qui s'effectue par la coalescence de leurs couronnes périurbaines et rurbaines respectives. Le phénomène est d'autant plus flagrant que pour Tarbes (et ses différentes couronnes), les densités de population sont plus fortes à l'ouest qu'à l'est, ainsi que le long de l'Adour.

Le rapprochement entre Pau et Tarbes est favorisé par plusieurs facteurs. Ne pouvant pas tous les énumérer (car tous ne sont pas connus, et parce que nous n'avons pas procédé à un recensement exhaustif de ces derniers), nous citerons seulement les plus connus et les plus importants à nos yeux. Ainsi, la faible distance entre les deux villes joue un rôle fondamental et majeur dans la formation de cet "espace urbain" (35 kilomètres séparent seulement les deux préfectures), ce qui est renforcé par la présence d'infrastructures routières, favorisant le développement des espaces interstitiels (logique aréolaire ; la R.N. 117, par exemple) et autoroutières, favorisant surtout les espaces inter-urbains (logique réticulaire ; l'A. 64, par exemple). De même, les processus de périurbanisation et de rurbanisation évoqués auparavant

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

ont aussi participé (et participent encore) à cette logique de mise en place d'une (relative) continuité urbaine entre Pau et Tarbes. En effet, la périurbanisation (et la rurbanisation) joue ici un rôle important. "Désormais, l'originalité du processus réside moins dans sa nouveauté que dans généralisation à tous les espaces compris dans un périmètre dont les contours s'éloignent sans cesse de la limite traditionnelle des villes, quelle que soit leur taille et quelle que soit leur rang dans la hiérarchie urbaine".

Enfin, les zones d'emplois de Pau et de Tarbes sont étendues et contiguës (ce qui favorise encore plus les rapprochements), quant aux bassins de vie (toujours de Pau et de Tarbes), ils forment, pour l'I.N.S.E.E., un réseau de villes (ce qui constitue un autre exemple de relations inter-départementales et inter-régionales).

Or, nous n'observons pas le même phénomène entre Pau et le district Bayonne-AngletBiarritz (B .A.B.), ce dernier étant pourtant inscrit dans le département des Pyrénées- Atlantiques. La distance plus importante entre les deux pôles (un peu moins d'une centaine de kilomètres) est à l'origine de cette situation, où à partir d'Orthez (un peu après en fait) les densités de population sont inférieures à 40 habitants par kilomètre carré, et ce sur une dizaine de kilomètres environ. Certes, cette situation peut être imputable en partie aux effets de seuil liés à la discrétisation des données cartographiées en quatre classes, mais cependant il est évident que la distance joue un rôle essentiel.

Ainsi, à travers cet exemple, nous vérifions (en partie) le phénomène de concentration de la population sur des espaces relativement restreints, notamment au niveau des principaux pôles urbains (français), ce qui contribue à créer des agglomérations multipolaires quand ces dernières sont proches les unes des autres.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

B) - L'évolution de la population entre 1962 et 1990.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

L'analyse de ces quatres cartographies, dans une perspective diachronique, montre relativement bien le rapprochement démographique (ou la synchronie dans l'évolution de la population) entre Pau et Tarbes, et ce sur une période de 28 ans. En effet, nous observons sur les deux premières cartographies, l'existence d'une "vallée bleue" entre ces deux villes moyennes, le bleu traduisant une évolution négative de la population entre les deux périodes considérées. Le phénomène est surtout perceptible dans la deuxième cartographie, où se dégage un cordon (de quelques kilomètres) plus ou moins rectiligne de communes subissant un baisse de population ; il est à remarquer d'ailleurs que ce cordon se situe à-peu-près à mi- chemin de Pau et de Tarbes, sa partie est retrouvant localement la double limite départementale et régionale, cette dernière épousant plus ou moins fidèlement le rebord oriental du plateau de Ger.

A partir de la période 1975-1982 et surtout 1982-1990, la tendance s'inverse. La "vallée bleue" évoquée précédemment se comble progressivement, ce que la discrétisation des données en six classes traduit bien. En effet, à partir de ces deux périodes, la majorité des communes connaissent une évolution positive de leur population. Nous n'observons alors plus de vide entre Pau et Tarbes, mais au contraire une continuité urbaine (ou connurbation), favorisée, semble-t-il, par les mêmes raisons avancées pour le la cartographie précédente. Démographiquement ces deux villes moyennes se sont donc rapprochées depuis 1975, ce que la cartographie des densités de population analysée auparavant souligne bien.

Or, si à partir de 1975 nous observons un rapprochement (dans les comportements démographiques) entre Pau et Tarbes, les quatres cartographies que nous présentons ici ne montrent pas de phénomène similaire entre Pau et le district Bayonne-Anglet-Biarritz. En effet, toujours à partir d'Orthez il demeure sur une douzaine de kilomètres une bande où l'évolution de la population entre chaque période de recensement est constamment négative (d'où une densité de population beaucoup plus faible qu'entre Pau et Tarbes). Une fois de plus nous estimons que le rôle de la distance est fondamental dans la compréhension du phénomène analysé. Cette dernière, quand elle est trop importante, limite les processus de périurbanisation et de rurbanisation liés au développement des principaux pôles urbains que constituent respectivement Pau, Bayonne-Anglet-Biarritz et Tarbes. En effet, les aires d'influences de chacun de ces pôles sont sensiblement les mêmes, mais la distance importante entre Pau et le district B .A.B. ne permet pas la coalescence et le rapprochement que nous observons entre Pau et Tarbes. Il y a donc un effet de seuil lié à la distance qui rend ainsi impossible la répétition du même phénomène Pau-Tarbes entre Pau et le B.A.B.

A travers cet autre exemple, nous vérifions (toujours en partie, notre analyse se focalisant volontairement sur un secteur d'étude précis) que les processus d'urbanisation et de périurbanisation (de rurbanisation aussi, mais dans une moindre mesure) tendent à accentuer le caractère hétérogène de la répartition de la population sur l'ensemble du territoire national français.

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

C) - Les migrations domicile-travail hors de la région en 1990.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

A l'inverse des deux cartographies concernant l'évolution de la population entre 1962 et 1975, la cartographie présentée ici met en évidence un "plateau rouge-marron" qui témoigne

de déplacements domicile-travail hors de la région d'appartenance relativement élevés. Le fait majeur à souligner est que la majorité des communes concernées par ces migrations se situent surtout dans le département des Pyrénées-Atlantiques. L'explication est relativement simple : la limite régionale passe beaucoup plus près de Tarbes et de Lourdes que de Pau. Ce faisant, les habitants des communes limitrophes ont tendance à travailler dans la zone d'emploi la plus proche (Tarbes, associée à celle de Lourdes). Le plateau de Ger traduit donc ici physiquement, du moins dans sa partie centrale et orientale, l'augmentation du nombre de communes connaissant un pourcentage relativement élevé de personnes travaillant dans la région voisine (ne serait-ce que par rapport aux communes voisines).

Cette dernière cartographie constitue un élément supplémentaire de mise en évidence des relations de complémentarité et de proximité s'établissant entre Pau et Tarbes, entre le Béarn et la Bigorre. Elle est ainsi complémentaire du constat établi par l'I.N.S.E.E. (le Z.A.U.).

De même, elle souligne bien que la mobilité des hommes génère des territorialisations différentes de celles qui se développaient avant que l'automobile ne se démocratise (et que les emplois ne deviennent de plus en plus en rares).

Ainsi, de nombreuses dynamiques géographiques se développent indépendamment du maillage politico-administratif (en l'occurrence ce sont ici des mailles départementales et régionales), ce dernier constituant une discontinuité statique majeure. Les processus d'expansion urbaine graduelle (périurbanisation et rurbanisation), de mobilité géographique croissante (de type domicile-travail, qui génèrent des mouvements pendulaires journaliers), et les relations de proximités fonctionnelles et d'échanges (entre pôles urbains), mettent en évidence un espace socio-économique dont les logiques d'organisation et de structuration (toujours dans le secteur d'étude qui nous intéresse) sont relativement indifférentes aux logiques politico-administratives de gestion et de contrôle du territoire. Dans cette perspective, la limite politico-administrative majeure entre Pau et Tarbes semble a priori obsolète, en séparant deux agglomérations que les pratiques spatiales des habitants tendent à réunir.

Finalement, au regard des nouvelles cartographies présentées précédemment, le constat de l'I.N.S.E.E. paraît pertinent et objectif. Entre Pau et Tarbes s'opére donc un rapprochement résultant de causes locales, par rapport au secteur d'étude considéré (proximité géographique et spatiale, rôle des infrastructures de transport, par exemple), et aussi de causes générales (phénomène de périurbanisation et de rurbanisation favorisées, entre autres, par la démocratisation de l'automobile).

Cette transgression croissante de la limite soulignée par l'I.N.S.E.E. ("espace urbain") est donc le fruit de la logique qui veut que la proximité géographique favorise les proximités fonctionnelles et les stratégies d'alliances territoriales (bien entendu, il y a des exceptions à la règle...). Les mailles départementales et régionales sont donc ici inadaptées aux réalités (factuelles) du terrain. Ces quelques cartographies témoignent de logiques qui transgressent ces limites politico-administratives, posant ainsi le problème de la pertinence de ces dernières qui ne sont plus cohérentes par rapport aux nouvelles compétences dévolues à l'État.

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

La deuxième sous-partie, en l'occurrence, va montrer comment cette règle s'applique relativement bien au secteur d'étude qui nous intéresse.

B) - De la proximité géographique aux proximités fonctionnelles : exemples de recompositions territoriales entre Pau et Tarbes.

Dans le cadre d'une enquête effectuée cette année, nous nous sommes intéressés aux recompositions territoriales qui s'opérent actuellement, ou qui se sont déjà opérées, entre Pau et Tarbes. Nous avons ainsi procédé à quelques entretiens avec les personnes responsables des services de communication des entreprises et des organismes retenus, en leur posant des questions sur différents points concernant la structure de l'entreprise ou l'organisme auquel ils appartiennent.

Cependant, notre enquête est loin d'être exhaustive : en tout, 26 structures (ou organismes) ont été enquêtées et étudiées. Ces quelques recompositions territoriales, que nous estimons pour autant représentatives d'un plus large phénomène se développant à différentes échelles géographiques entre les principaux pôles urbains français, nous permet ainsi d'étudier et de comprendre de plus près les logiques d'organisation et de structuration de l'espace socio- économique entre deux préfectures de département, très proches spatialement, mais qui sont séparées par une limite politico-administrative majeure.

I - Exemples de recompositions territoriales entre Pau et Tarbes.

Les recompositions territoriales de développant entre Pau et Tarbes que nous allons étudier ici, constituent un exemple supplémentaire de mise en évidence de l'évolution des rapports de l'homme à l'espace, soulignant une fois de plus que l'espace socio-économique s'organise aussi (et souvent) indépendamment du maillage politico-administratif français. Ces entreprises et ces organismes, par leur structure et par leurs pratiques quotidiennes, confortent leur constat de l'I.N.S.E.E. selon lequel entre Pau et Tarbes s'opère un phénomène d'intégration (de rapprochement), tendant à créer (ou créant déjà) un "espace urbain". Les transgressions nombreuses de la limite départementale et régionale posent directement le problème de la coordination des différentes forces en présence, tant la frontière politicoadministrative entre les deux pôles urbains peu parfois inférer lourdement sur les structures en place (surtout pour les entreprises et les services publics). Il s'agit ainsi de vérifier ici en partie notre hypothèse de départ, selon laquelle le maillage politico-administratif français est inadapté à une gestion et un contrôle performant et objectif de l'espace socio-économique.

Ce faisant, trois échelles géographiques de recompositions territoriales émergent de cette enquête, mais souvent, bien que transgressée facilement, la limite politico-administrative constitue parfois et encore un élément de rupture. Ces trois échelles d'analyse soulignent des logiques différentes dans le développement des recompositions territoriales, mais qui toutes s'inscrivent dans une remise en cause plus générale des limites politico-administratives.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

A) - Les recompositions territoriales qui transgressent localement la limite politicoadministrative.

Entre le Béarn et la Bigorre (donc entre les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées), il y a peu de collectivités locales dont les limites transgressent la limite politico-administrative. Voici celles qui nous ont été communiquées par la "Direction des collectivités locales" de la Préfecture de Pau (avec une confirmation au siège des collectivités locales concernées) :

* la communauté de communes du "pays de Vic-Bigorre - Montaner" (1993), * le S.I.Vo.S. du "C.E.G. de Maubourguet" (date de création inconnue),

* le syndicat d'adduction en eau potable (S.A.E.P.) "des enclaves" (1975),

* le syndicat intercommunal des transports scolaires de l'ensemble "Vic-Bigorre" (1984).

Toutes ces collectivités locales sont d'essence bigourdane et relativement récentes (maximum 20 ans d'ancienneté), quelques communes béarnaises rejoignant par la suite le groupe ainsi formé (quand elles n'en font pas partie dés le début). Ce faisant, les transgressions locales auxquelles nous assistons sont récentes, les maires des communes béarnaises souhaitant adhérer à une structure intercommunale leur permettant, via le regroupement de communes qu'elle implique, de faciliter la gestion de telles ou telles compétences que seuls ils ne pourraient assumer.

L'explication la plus simple de ces rapprochements est incontestablement la proximité géographique. Mais la limite départementale et régionale constitue encore une barrière à la mise en place de telles structures intercommunales, car les communes concernées appartiennent à des régions différentes, et qu'il est plus facile (institutionnellement) de se rattacher à un structure intercommunale mais d'inscription intra-départementale.

B) - Les recompositions territoriales associant les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes- Pyrénées.

Quatre entreprises et organismes ont été retenus dans ce cadre, les deux premiers sont des services publics nationaux (Le centre E.D.F. - G.D.F. services "Béarn-Bigorre" et les ASSEDIC des "Pays de l'Adour"), les derniers étant des mutuelles (s'inscrivant dans le domaine privé). Ces quatres ensembles associent dans leur structure les deux départements qui nous intéressent (Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées), soit depuis quelques décennies, soit de manière plus récente. Ils traduisent ainsi, par leur fonctionnement, la nécessité de dépasser le cadre politico-administratif actuel afin d'optimiser les moyens disponibles et de procéder à une meilleure gestion des forces en présence.

- Le centre E.D.F. - G.D.F. services "Béarn-Bigorre".

L'appellation services "Béarn-Bigorre" est récente (1992), mais le fonctionnement est plus ancien (1946) ; il s'agit ici des entités historiques que constituent le Béarn et la Bigorre). Le fait exceptionnel ici est que généralement il y a un centre par département, ce qui ne

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

correspond pas avec ce que nous observons actuellement entre les 2B (2B = Béarn + Bigorre). Pau gère ainsi le Béarn et Tarbes la Bigorre.

La proximité géographique entre Pau et Tarbes, d'une part, les proximités fonctionnelles entre les deux préfectures départementales, d'autre part, et enfin la volonté de rapprochement entre le Béarn et la Bigorre sont à l'origine de cette association ancienne entre les 2B.

C'est ainsi que le centre de Billère (avant il s'agissait de celui de Pau) gère l'ensemble Béarn- Bigorre, Tarbes étant donc sous la tutelle de ce dernier. Cependant, les communes de Ger et de Pontacq sont dépendantes de Tarbes en raison de leur proximité avec cette dernière ville moyenne, alors qu'en réalité elles appartiennent au département des Pyrénées-Atlantiques. Le rôle de la distance est donc ici important (effet de seuil).

Depuis juin 1998, la gestion des services aux particuliers est dissociée de celle des services aux gros consommateurs (entreprises, industries par exemple). La direction régionale est ainsi localisée à Toulouse (effet d'échelle), ce qui ne change rien pour les petits consommateurs comme nous : nous dépendons en effet toujours du centre E.D.F. - G.D.F. services "Béarn- Bigorre".

- Les ASSEDIC des "Pays de l'Adour".

Les ASSEDIC des "Pays de l'Adour" associent le département des Pyrénées-Atlantiques à celui des Hautes-Pyrénées depuis le 1er janvier 1959, date de leur création. Cette structure traduit ainsi "le refus commun des organisations syndicales et patronales de se placer dans la dépendance des métropoles régionales. Il est vrai que leur création, en 1959, coïncidait avec la période d'incertitude d'une région "Adour"".

La faible distance et les proximités fonctionnelles entre Pau et Tarbes sont aussi et toujours à l'origine de cette union décidée au niveau national, et qui cristallise en 1959 des complémentarités déjà nombreuses entre les deux départements.

Le siège principal de l'ensemble ainsi formé est à Pau (qui s'occupe des Pyrénées- Atlantiques), Tarbes constituant donc une sous-direction (s'occupant ainsi des Hautes- Pyrénées). De même, cette union entre les deux départements appartenant actuellement à deux régions différentes, ne représente pas en France un cas particulier. En effet, il existe d'autres associations (ou unions) comparables dans le territoire national (toujours au niveau des ASSEDIC) qui résultent des mêmes logiques évoquées auparavant.

Ces deux exemples de services publics nationaux traduisent, par leur inscription spatiale, la nécessité et la volonté de s'émanciper des cadres territoriaux établis par le pouvoir, afin d'optimiser les moyens mis à leur disposition, cela en tenant compte des réalités (démographique, par exemple) de l'espace socio-économique. La complémentarité entre Pau et Tarbes et plus largement entre les deux départements, permet ainsi un meilleur fonctionnement des services fournis à la population.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

- Adour Mutualité.

L'appellation date de 1987, avant il s'agissait de la "Caisse Chirurgicale du Bassin de l'Adour", datant de 1933. Cette "Caisse Chirurgicale du Bassin de l'Adour" s'inscrivait à la fois dans les départements 64 et 65, car les personnalités politiques, les initiateurs de cette caisse étaient originaires des deux départements. Cependant l'implantation est plus forte en Béarn (Pyrénées-Atlantiques) qu'en Bigorre (Hautes-Pyrénées), du fait même que les adhérents étaient (et sont encore pour certains) plus souvent implantés dans les Pyrénées- Atlantiques que dans les Hautes- Pyrénées.

Cependant, l'aire d'influence d'Adour Mutualité ne se limite pas qu'aux deux départements précédemment cités. En effet, Adour Mutualité gère aussi des porte-feuilles de clients situés dans les autres départements limitrophes. Malgré cela, l'implantation de cette dernière est surtout béarnaise (corrélativement au nombre de clients concernés), P.A.M. (Pyrénées- Atlantiques Mutualité) s'occupant plutôt de la partie ouest (Pays Basque) du département.

Le siège central est ainsi à Pau. Le développement récent (et son renforcement) en Bigorre, par l'implantation à Tarbes en 1992 d'une agence, puis à Lourdes en 1997 d'une autre agence, a pour but de répondre aux besoins des adhérents, de mieux satisfaire leurs demandes, d'être plus proches d'eux. De ce fait, la proximité géographique entre Pau et Tarbes et leurs proximités fonctionnelles, constituent un plus et l'une des raisons à ce rapprochement renforcé récemment entre les deux départements. Il se crée ainsi une "synergie" entre les différents ensembles.

- Sud-Ouest Mutualité.

A l'origine, le groupe est implanté à Tarbes depuis 1948 sous le nom de "Pyrénées- Bigorre". L'implantation d'un autre siège à Pau (le seul ici) remonte à 1994. En effet, le développement récent sur les deux départements de leur concurrent direct Adour Mutualité, a incité les dirigeants de Sud-Ouest Mutualité a créer sur Pau un nouveau siège. De plus il faut souligner aussi "la volonté d'apprendre à vendre en dehors de son département d'action". Les proximités géographiques et fonctionnelles entre Pau et Tarbes jouent elles aussi encore une fois un rôle très important, associées au phénomène de concurrence qui se développe dans le cadre des mutualités.

Le siège central est à Tarbes, et actuellement, il y a quelques accords de partenariat et de principe avec les Landes. Cependant, malgré un rapprochement favorable avec ce département, rien de très important n'a été réalisé à ce moment.

Les deux derniers exemples que nous venons de développer mettent en avant le rôle primordial de la faible distance entre Pau et Tarbes, la nécessité d'agréger des ensembles de grande taille (en l'occurrence des départements) pour permettre un développement plus large de l'organisme ou de l'entreprise concernés, et surtout les effets de la concurrence qui poussent ici les mutualités à s'implanter de l'autre côté de la limite régionale, afin que le concurrent direct ne prennent pas une avance trop importante.

Ainsi, la proximité géographique entre Pau et Tarbes favorise les rapprochements fonctionnels, que les nécessités économiques, sociales encouragent de plus en plus. L'association Béarn-Bigorre dans le cadre du centre E.D.F.-G.D.F. services "Béarn-

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Bigorre" et Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées dans celui des ASSEDIC des "Pays de l'Adour" (rôle de services publics nationaux), traduit donc une intégration Pau-Tarbes relativement ancienne. Il s'agit donc d'un héritage historique dû à des rapprochements plus anciens, de quelques décennies. Concernant Adour Mutualité et Sud-Ouest Mutualité, c'est la nécessité économique qui fait loi, la concurrence (et toujours la proximité géographique) obligeant des implantations en dehors de son département d'appartenance (cf le rôle aussi des économies d'échelles).

Dans ces deux derniers cas, ce sont donc à des recompositions territoriales que nous assistons, mais qui ne traduisent pas ici de véritables rapprochements entre Pau et Tarbes. Il s'agit plus d'une logique de marché (perspective économique) que d'une logique d'intégration des deux villes moyennes, qui traduirait ainsi une véritable remise en cause de la limite politicoadministrative.

Ces recompositions territoriales, qui remettent en cause indirectement la pertinence et la validité de la limite politico-administrative, en l'occurrence départementale et régionale, soulignent aussi l'importance de la métropolisation et de la polarisation de Pau sur Tarbes, les sièges de direction étant le plus souvent implantés à Pau. De même, ces rapprochements, en rapport avec les structures des entreprises et des organismes concernés, ont des origines très diverses et une ancienneté plus ou moins accentuée.

Ainsi, le centre E.D.F.-G.D.F. services "Béarn-Bigorre" et les ASSEDIC des "Pays de l'Adour" témoignent d'une articulation inter-départementale et inter-régionale relativement ancienne (respectivement 1946 et 1959), et traduisent par conséquent une intégration Pau- Tarbes beaucoup plus affirmée que pour les autres ensembles d'essence plus récente. Le fait est cependant qu'à l'époque, les régions de programmes n'étaient pas encore mises en place, la limite politico-administrative à franchir n'étant alors que départementale. Pour les mutuelles, il s'agit d'une intégration plus récente mais qui s'appuie des bases plus anciennes.

C) - Les entreprises et les organismes engendrant des aires d'influences.

Quatre autres exemples sont développés ici, ils vont nous permettre de montrer que la polarisation et la métropolisation des villes (des pôles urbains) remet en cause fortement la taille et la pertinence des mailles départementales (et régionales, dans une moindre mesure). Les aires d'influences qui se dégagent, se développent souvent (eu égard à l'entreprise où à l'organisme pris en compte) très largement en dehors du département où s'inscrit le centre à partir duquel la polarisation s'amorce.

- Le Parvis d'Ibos : "Scène National Tarbes-Pyrénées".

La mission du Parvis d'Ibos est double : diffusion de spectacles et animation culturelle. Depuis 1993 (date du 20° anniversaire du Parvis), le taux de fréquentation et la qualité des spectacles sont constants, sachant que l'année 1993 a constitué une forte et bonne saison, en raison même de l'anniversaire. De plus, depuis 1996, il n'y a plus de concurrence avec le théâtre de Tarbes, le Parvis d'Ibos assurant aussi depuis cette date les représentations à Tarbes. 50 à 60 spectacles sont ainsi proposés chaque année, ce qui représente environ plus de 70 représentations par an.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Sur les 2000 abonnés du Parvis d'Ibos (1996-1997), 25% viennent de Tarbes (la ville- centre), 25% du bassin de population de Tarbes, 25% du reste du département des Hautes- Pyrénées, 20% des Pyrénées-Atlantiques (à l'est d'une ligne passant par Orthez-Oloron). Quant au pourcentage restant (5%), il correspond aux individus venant du sud du Gers et de l'ouest de la Haute-Garonne.

- Le Parvis de Pau.

Le Parvis de Pau étant géré par celui de Tarbes, il entre par conséquent dans l'aire d'influence de ce dernier. Entre ce dernier et celui d'Ibos, il s'agit donc plus d'une "situation de complémentarité que de concurrence".

- l'Élan Béarnais Pau-Orthez (E.B.P.O.).

Ayant déménagé d'Orthez pour s'installer à Pau le 12 janvier 1991, le club de Basket-Ball de Pau-Orthez évolue en Pro. A, nom du championnat de première division nationale. Chaque année (en 1995 ici) le club attire environ 6500 spectateurs en moyenne par match, dans l'enceinte du Palais des Sports de Pau, construit à cet effet. "La zone de chalandise du club (selon les dirigeants) recouvre les Pyrénées-Atlantiques, la moitié ouest des Hautes-Pyrénées et la moitié sud des Landes, auquel on peut ajouter un potentiel ponctuel dans les agglomérations de Bordeaux et de Toulouse". De même, "la portée de l 'E.B. P. O. pour les abonnements, va du gave d'Oloron et de l'Adour à l'ouest, à la limite est du département à l'est, Bordeaux, Toulouse et la Côte Basque ne sont que des points détachés. Dans la mesure où un match est important, l'aire d'attraction du public se développe surtout en direction de la Côte Basque, vers le sud des landes et englobe, dans une moindre mesure, Bordeaux et Toulouse".

- l'Aéroport "Pau-Pyrénées".

L'aire d'influence (ou la zone de chalandise) de l'Aéroport "Pau-Pyrénées" (anciennement Pau-Uzein) correspond, grosso-modo, à un cercle dont le rayon est constitué des espaces situés à moins d' 1 heure 30 minutes de l'aéroport (il s'agit ici du temps de trajet maximum pour accéder à l'aéroport). A l'intérieur de cercle, 75% des gens concernées sont à moins de 45 minutes de l'aéroport, les 25% restants à plus de 45 minutes et moins d' 1 heure 30 minutes.

600000 personnes par an (590000 exactement pour 1997) prennent l'avion à l'Aéroport "Pau-Pyrénées". D'années en années, nous observons une progression des effectifs, qui se décomposent ainsi :

* 76% sont des Pyrénées-Atlantiques, * 17% sont des Hautes-Pyrénées,

* 5% sont du Gers,

* 2% sont des Landes.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Entre l'aéroport de Pau et celui de Tarbes-Ossun-Lourdes, il s'agit plus actuellement d'un rapport de complémentarité que de concurrence. Cependant il est difficile de prévoir les rapports futurs... Le fait est que la clientèle n'est pas la même entre les deux aéroports (elle est à 80% internationale et à 20% nationale à Tarbes-Ossun-Lourdes, du fait de la proximité de Lourdes).

Ce qu'il est intéressant de remarquer aussi, c'est que l'aire d'influence de l'aéroport de PauUzein retrouve presque parfaitement le cadre des Pays de l'Adour. En effet, elle s'étend jusqu'à Tarbes (même un peu plus loin), dans les Landes, jusqu'à Dax, Mont-de-Marsan et Aire-sur-l'Adour, dans le Gers, jusqu'à Eauze. Enfin, les Pyrénées-Atlantiques appartiennent complètement à l'aire d'influence ainsi dégagée.

- l'Université de Pau et des Pays de l'Adour.

L'aire de recrutement de l'Université de Pau et des Pays de l'Adour (U.P.P.A.) témoigne de l'articulation aturienne de ce service public national. En effet, il apparaît clairement que l'U.P.P.A. développe son aire d'influence dans les Pays de l'Adour, ce qui justifie d'autant plus son appellation. De même, elle entretient des relations avec Tarbes, qui, bien que dépendant d'une autre académie (celle de la région Midi-Pyrénées) constitue une extension de cette dernière (antennes paloises à Tarbes).

En 1996-1997, le recrutement de l'Université est ainsi le suivant :

* 59,2% des étudiants inscrits viennent des Pyrénées-Atlantiques (8646), * 14,9% des Landes (2172),

* 10% des Hautes-Pyrénées (1475),

* 2% du Gers (292),

* 2% de la Gironde (287).

L'aire de recrutement de l'Université de Pau et des Pays de l'Adour s'inscrit donc parfaitement dans le cadre territorial des Pays de l'Adour, tout comme l'aire d'influence de l'Aéroport "Pau-Pyrénées" ou encore celle de E.B.P.O. Notre but ici n'est pas de montrer une régionalisation du type "Pays de l'Adour", mais plutôt d'insister le rôle de la polarisation des pôles urbains (et de la métropolisation dans le cadre de Pau qui, a priori, concentre beaucoup plus de services polarisant que Tarbes) dans la mise en évidence du manque de pertinence des mailles départementales et régionales.

La domination de Pau sur Tarbes (le noyau urbain le plus proche) s'accentue donc encore plus avec ces trois derniers exemples : Pau polarise et métropolise donc un ensemble régional qui s'apparente très fortement aux Pays de l'Adour. Cette logique de polarisation et de métropolisation observe cependant quelques éléments de rupture, liés notamment (et encore) à la limite politico-administrative majeure.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

II - La persistance d'éléments de rupture.

Si de nombreuses recompositions territoriales se développent à cheval sur les deux départements retenus pour notre étude, il n'en demeurent pas moins des éléments de rupture à l'intérieur même de ces structures et organismes, éléments de rupture que souvent la limite politico-administrative cristallise fort bien. Ainsi, peu de collectivités locales transgressent localement cette limite régionale, le poids de cette dernière étant relativement encore important à ce niveau scalaire. Dans nos enquêtes, nombreuses sont les structures intercommunales qui ne prévoient pas d'évolution en faveur de futurs rapprochements avec le Béarn.

De même, concernant les entreprises et les organismes associant les deux départements, il nous a souvent été fait remarquer le rôle des fortes identités culturelles et des mentalités différentes entre béarnais et bigourdans, leur confrontation aboutissant parfois à des difficultés majeures dans l'élaboration d'un projet commun. Pour les mêmes raisons, à l'intérieur du centre E.D.F.-G.D.F. services "Béarn-Bigorre" "il est ainsi parfois difficile de travailler ensemble".

La limite départementale (et surtout régionale ici) pose des problèmes importants de coopération entre l'U.P.P.A. et l'agglomération tarbaise. Comme le font remarquer les auteurs du rapport T.A.D., "la coupure entre deux départements, et surtout deux régions distinctes, avec leur propre recteur et leur propre politique, rend difficile une meilleure coopération entre le pôle universitaire et le pôle tarbais (l'I. U. T. de Tarbes dépend de l'Université de Toulouse - Paul Sabatier) : actuellement les relations sont fondées sur des rapports humains, qui peuvent être remis en cause à chaque nouveau recteur ou nouveau Président, entraînant ainsi la réorientation des politiques menées".

Ainsi, il va de soi que les recompositions territoriales auxquelles nous assistons sont encore dépendantes en partie des effets inhérents à la présence de cette limite politico-administrative majeure, relativement pesante pour les collectivités locales tels que les S.I.V.O.M., Communautés de Communes et autres regroupements intercommunaux.

Des éléments de rupture persistent encore, soulignés par la limite politico-administrative qui cristallise donc des mentalités et des comportements différents de part et d'autre de cette dernière. Ils rendent ainsi souvent difficiles des rapprochements qui pourtant seraient beaucoup plus bénéfiques que les situations de concurrences auxquelles nous assistons régulièrement. Certes, il y a bien des rapprochements et des recompositions territoriales entre Pau et Tarbes, et qui remettent en cause la limite politico-administrative, mais il demeure encore des éléments de différenciation entre ces deux départements...

CONCLUSION de la seconde Partie.

Le constat de l'I.N.S.E.E. unissant Pau et Tarbes dans le cadre d'un "espace urbain" est donc relativement confirmé par les cartographies d'indicateurs statistiques tels que les densités de population, l'évolution de la population sur les 28 dernières années, ou encore par les migrations (journalières) domicile-travail hors de la région. La limite politico-administrative majeure entre les préfectures de département est souvent transgressée dans ces nombreux cas

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

de figure, ce que l'enquête de terrain, par les recompositions territoriales qu'elle met en évidence, souligne relativement bien.

Cette dernière met aussi en évidence trois niveaux scalaires de recompositions territoriales, la première étant la transgression locale de la limite politico-administrative, la seconde étant l'association Béarn-Bigorre et/ou Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées, la troisième faisant souvent référence au cadre territorial des Pays de l'Adour. Ces deux derniers niveaux

scalaires sont ceux où la limite politico-administrative majeure est la plus souvent remise en cause, avec une métropolisation et une polarisation paloise de plus en plus accentuée (avec une influence particulièrement forte sur Tarbes, le noyau urbain le plus proche). En effet, dans la majeure partie des cas, Pau et son agglomération constituent le site où le plus grande nombre de sièges centraux de direction sont implantés, Tarbes constituant souvent une antenne bigourdane des différents ensembles ainsi enquêtés et étudiés.

De même, rares sont les unions anciennes entre les deux départements, qui traduisent ainsi un héritage historique que les processus de recompositions territoriales actuelles (à l'inverse beaucoup plus nombreuses) confortent et légitiment de plus en plus. Nous avons donc affaire à des processus récents, issus de la proximité géographique et des rapprochements fonctionnels nombreux entre Pau et Tarbes.

Les aires d'influences (ou de chalandises), quant à elles, mettent en avant une régionalisation de type "Pays de l'Adour", mais nous n'avons pas la prétention de discuter ici de la pertinence et de la validité de cette région géographique. Remarquons cependant qu'il est souvent fait référence à ce cadre territorial. Ces aires d'influences sont aussi essentiellement liées à la présence de l'Autoroute 64.

De tout cela, il semble que le seuil de 3 0-35 kilomètres représente une limite au-delà de laquelle les phénomènes d'intégration et de rapprochements semblent beaucoup plus difficiles (distance de proximité géographique et fonctionnelle), mais ce constat nécessite toutes les réserves que nous pouvons apporter, tant ce dernier est simplement le fruit d'une déduction fondée sur un travail de terrain somme toute très modeste. Remarquons cependant que ce seuil de 30-3 5 kilomètres correspond relativement bien aux auréoles périurbaines (et même rurbaines) habituelles des villes moyennes, ce qui signifie que l'exemple que nous avons étudié n'est pas l'exception qui confirme la règle. Par conséquent, les autres résultats obtenus (de l'enquête, par exemple) peuvent alors être extrapolés aux autres pôles urbains français de niveau hiérarchique équivalent (même supérieur), nous permettant ainsi de remettre en cause la pertinence de l'ensemble du maillage politico-administratif français, et non pas uniquement la maille départementale et régionale qui sépare Pau et Tarbes.

Certes, il nous est difficile de dire si tous les éléments sont réunis pour faire de Pau-Tarbes une agglomération bipolaire, car, comme le fait remarquer une partie de notre travail, de nombreux éléments de rupture persistent encore, malgré une domination paloise de plus en plus soulignée.

La question qui se pose maintenant consiste donc à savoir si une réforme française est nécessaire (au moins au niveaux scalaires qui nous intéressent), ce que la troisième partie va s'efforcer de développer.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Troisième Partie :

Les solutions à envisager : une réforme française est-elle nécessaire ?

"Il faut clarifier à la fois les compétences, les moyens financiers, les rôles de l'État, des régions, des départements, des communes et des différentes formes d'intercommunalité. Une tâche difficile quand de nombreux élus ont plusieurs casquettes sur la tête du fait du cumul des mandats. L'État doit assurer une répartition équitable des charges et des moyens. Nous avons souhaité renforcer le rôle des régions parce qu'elles se trouvent à l'interface entre le processus ascendant, qui émane des mobilisations locales, et le processus descendant, qui équilibre et intègre au nom de l'intérêt général". (...) "Le débat porte moins sur les principes et la place des différents niveaux que sur l'articulation très concrète des compétences et des financements des différentes instances. Un débat très complexe et qui demeure non tranché à bien des égards".

Cette citation de Dominique Voynet faite dans le cadre de la présentation de son avant-projet de Loi d'Aménagement (et de Développement) Durable du Territoire (L.A.D.T. du 11 juin 1998), souligne la nécessité de procéder à une réflexion profonde et à un rééquilibrage (une meilleure répartition) des différentes compétences dévolues aux principales mailles politicoadministratives actuelles, ainsi que de mettre en place et de favoriser les espaces projet que proposent les lois de 1990, 1992, 1995 (et de 1998).

Cette troisième partie constitue en quelque sorte la synthèse des deux premières parties développées dans ce mémoire. Elle va nous aider, dans le cadre de la théorie dialectique, à dépasser les paradoxes apparents qu'offre le développement d'espaces projet, des espaces de gestion et d'organisation de l'espace pour l'avenir, en parallèle, et parfois sur, des mailles politico-administratives anciennes, souvent inadaptées aux réalités factuelles du terrain socio- économique. Il s'agit donc pour nous de vérifier la deuxième hypothèse de notre mémoire, celle de la nécessité de procéder en France à une réforme du maillage politico-administratif.

Ce faisant, et en partant aussi des solutions proposées dans le cadre du secteur d'étude qui nous intéresse, plutôt que d'envisager une réforme globale du maillage politico-administratif français, nous nous intéresserons à certaines mailles précises (départementales, et régionales dans une moindre mesure), en nous demandant aussi quel est l'avenir de ces espaces projet. Sont-ils des solutions de transition, de vagues embryons sans avenir, ou alors les prémices d'une réforme plus globale et plus générale ?

Le problème est que la multiplication des niveaux politico-administratifs augmente les coûts de fonctionnement et allonge les délais de décision, ce qui n'est pas fait pour satisfaire le "simple" citoyen qui est souvent perdu dans cet ensemble complexe. Comme le disait Dominique Voynet dans sa citation, nous avons en réalité affaire à un problème de décalage et non pas de hiérarchie.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

A) - Les espaces projet français de la L.O.A.D.T. de 1995 : exemples d'application entre Pau et Tarbes.

La Loi d'Orientation pour l'Aménagement et le Développement du Territoire (L.O.A.D.T. du 4 février 1995), définit (et renforce) deux instruments en vue de la recomposition du territoire national dans l'optique de la France de 2015. Ces deux instruments, ou espaces projet, s'inscrivent donc sur une période de 20 ans : il s'agit d'abord des réseaux de villes, et ensuite des "pays".

I - Les réseaux de villes : le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" ou "Pyrénées Métropole".

Après avoir retracé la genèse et les objectifs, les nouveaux rapports de l'élu local à l'espace, et apporté quelques critiques et limites à la notion de réseaux de villes, nous nous intéresserons à "Pyrénées Métropole", le réseau de villes qui associe Pau, Tarbes et Lourdes, en retraçant ainsi les objectifs poursuivis et les résultats obtenus.

A) - Les réseaux de villes définis par le C.I.A.T. et la L.O.A.D.T.

- Les objectifs des réseaux de villes : possibilités et avantages.

Définis lors du Comité Interministériel d'Aménagement du Territoire du 5 novembre 1990 (C.I.A.T.), renforcés et consacrés par la L.O.A.D.T., les réseaux de villes font l'objet en France d'une politique d'État menée par la Délégation à l'Aménagement du Territoire et à l'Action Régionale (D.A.T.A.R.) depuis la fin des années 1980. "Le C.I.A.T. décide que seront élaborés : des programmes de réseaux de villes destinés à concrétiser le rapprochement des villes décidées, pour valoriser leurs atouts européens, à mettre en commun leurs complémentarités pour :

-> renforcer la compétitivité économique des territoires qu'elles irriguent, -> favoriser leur ouverture vers l'Europe".

Les réseaux de villes s'inscrivent donc fondamentalement dans une logique réticulaire d'organisation de l'espace, où sont favorisées les relations et les inter-relations entre les points et les lieux constituant cet espace. Les distances séparant les villes constitutives des réseaux en question sont généralement proportionnelles aux poids démographiques de ces mêmes villes, ce qui explique que des villes parfois distantes de plusieurs dizaines de kilomètres s'intègrent pourtant dans un tel projet.

Ce faisant, les réseaux de villes s'inscrivent aussi dans la discontinuité géographique : "un réseau de villes (...) peut être défini comme une alliance, sur des projets de développement, entre des maires urbains dans une discontinuité géographique". Le mot-clef ici est donc la complémentarité, complémentarité qui doit permettre aux villes "moyennes" (dans une perspective démographique, c'est-à-dire dont la population est comprise entre 20.000 et 200.000 habitants), "intermédiaires" (par rapport aux échelons de la hiérarchie urbaine européenne), et situées en périphérie des grands pôles ou axes de développement, de franchir un seuil de lisibilité, de monter dans la hiérarchie urbaine française, et de mettre en place une

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

forme de "gouvernance locale". Les réseaux de villes constituent ainsi une solution pour les espaces intermédiaires qui veulent contrebalancer les poids de leurs métropoles régionales respectives ; ils sont ainsi des leviers qui poussent à l'alliance.

- Les nouveaux rapports de l'élu local à l'espace.

Lors de la mise en place des réseaux de villes, le rapport de l'élu local à l'espace (d'action et de légitimité) s'en retrouve modifié : Frédéric Tesson, dans sa thèse sur "les réseaux de villes en France : recherche sur les rapports de l'élu local à l'espace"pose comme postulat de départ que "le rapport de l'élu local à l'espace est un rapport lié au territoire, dans sa dimension institutionnelle (politique, administrative, juridique et électorale)". Son hypothèse (ou plus exactement sa thèse) consiste à démontrer que ce rapport est en train d'évoluer, compte-tenu notamment de la mondialisation des échanges, des entreprises qui développent leurs stratégies d'implantation et de développement en dehors des cadres politicoadministratifs existants, et aussi pour les autres raisons que nous avons développées dans les deux premières parties de ce mémoire. Enfin, son hypothèse de terrain suppose que les réseaux de villes peuvent nous montrer que ces relations évoluent. Son travail lui a ainsi permis d'aboutir à plusieurs conclusions, dont celle, primordiale, que les réseaux de villes bougent beaucoup plus dans le discours que dans la pratique.

En effet, le discours constitue un rapport à l'espace pour l'élu qui doit rapporter des voix en vue des futures échéances électorales, le mode de fonctionnement de l'élu étant conditionné par son espace de légitimité, et non pas par l'espace d'action sur lequel repose un réseau de villes, a fortiori quand il se développe à cheval sur plusieurs départements ou régions (ce qui d'ailleurs est souvent le cas). De même, le problème de l'information (des citoyens et des habitants des villes concernées) et la difficulté à rassembler en un lieu commun et à une date commune des élus et des responsables dont les emplois du temps ne coïncident pas toujours, constituent une conclusion supplémentaire à laquelle aboutit l'auteur. Cette dernière permet d'expliquer en partie l'échec des réseaux de villes en France, huit ans après leur mise en place par le C.I.A.T. Car sur les 63 villes qui s'étaient associées en 19 réseaux de villes différents (certaines appartenant même à deux réseaux de villes contigus et/ou connexes), seule une petite moitié fonctionne encore actuellement.

Néanmoins, "ce dernier (en parlant de l'élu local) semble prendre conscience que l'avenir de sa commune et, plus largement de l'agglomération que celle-ci dynamise, se joue dans un territoire plus vaste et en tout cas non directement superposable aux limites du territoire politico-administratif dans lequel elle s'insère. Cette attitude le pousse à reconsidérer sa vision du territoire pour se diriger vers une définition plus fonctionnelle, plus proche des réalités de développement".

- Inconvénients et limites des réseaux de villes.

Si le réseau de villes constitue un instrument, a priori, efficace d'aménagement du territoire, il n'en pose pas moins certains problèmes, surtout quand il se développe à cheval sur plusieurs départements et/ou régions. Le premier problème est directement lié à la conception même du réseau de villes qui associe uniquement des lieux entre eux (des villes, des agglomérations,...) : qu'en est-il alors des espaces interstitiels, qui eux, au contraire, supposent une organisation aréolaire de l'espace. Il ne faut pas oublier qu'en dehors des réseaux de villes, ces dernières

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

polarisent et animent normalement une région (un espace géographique périphérique) composée de petites villes, de bourgs plus ou moins ruraux, d'espaces marginalisés,... Comment concilier alors ces deux problématiques, a priori contradictoires ?

Ensuite, il ne faut pas négliger non plus les problèmes d'interférences avec les compétences des départements et des régions. Un maire faisant partie d'un réseau de villes interdépartemental ou inter-régional doit faire face à de nouvelles compétences : "Ainsi, lorsque les maires en réseau évoquent des dossiers tels que le tourisme ou l'action économique, ils franchissent le cadre de leurs compétences légales pour se positionner sur des sujets dévolus à d'autres niveaux de la "hiérarchie territoriale tacite" (département, région). De même, le fait de se positionner clairement dans une problématique d'aménagement du territoire, en s'adressant directement à l'État et à la D.A. T.A.R., pose la question du rôle de la région, court-circuitée ici, dans une de ses compétences majeures".

Enfin, et cela constitue notre dernière limite, les réseaux de villes en France n'intéressent (ou n'ont intéressé) au maximum qu'une soixantaine de maires. Faible proportion rapportée aux 36551 communes présentent sur l'ensemble du territoire. Ces réseaux de villes ne sont-ils alors que le "jouet" de quelques privilégiés, ou alors les prémices d'un futur instrument plus large et plus global d'aménagement du territoire ?

En fait, si de nombreux maires se sont engagés il y a quelques années dans une démarche de réseau de villes, c'est beaucoup plus pour les apports financiers non négligeables (émanant de la D.A.T.A.R., et utilisés par la suite à des fins totalement étrangères au supposé réseau de villes pour lesquels ils étaient normalement consacrés), que par un véritable désir de s'associer à une structure dont les objectifs (et les résultats) n'étaient alors qu'incertitudes et suppositions. "Pyrénées Métropole" ou le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" constitue à nos yeux un exemple qui confirme cet état de fait.

B) - "Pyrénées Métropole" ou le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes".

Se développant à cheval sur la région Aquitaine et Midi-Pyrénées, le réseau de villes PauTarbes-Lourdes (ou Pyrénées Métropole) est né en 1991. Son objectif est le suivant : "Intensifier les échanges entre les trois villes pour l'intégration progressive des bassins d'emplois dans la perspective de l'émergence d'une métropole des pyrénées au sein des Pays de l'Adour". Deux ans plus tard (en juin 1993), une étude de faisabilité montre qu'il peut s'appuyer sur des réseaux sociaux et économiques préexistants, et met en évidence une complémentarité possible entre ces trois villes.

Le niveau scalaire retenu et la position géographique des trois villes à l'échelle du Sud-Ouest Français, justifient d'autant les rapprochements et la mise en place de ce réseau de villes. En effet, "à près de 200 kilomètres de leurs métropoles régionales respectives, ces trois villes jouent clairement la coopération dans une perspective aménagiste", ce que l'on conçoit clairement au regard des densités de relations qui s'établissent entre les trois villes. La limite des aires d'influences de Bordeaux et de Toulouse étant prégnante, la logique de la constitution du réseau de villes est relativement simple : combler le vide dans l'armature urbaine de la France entre les deux métropoles, en partant du principe que l'union, mais aussi la complémentarité, fait la force.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

L'idée d'un réseau de villes Pau-Tarbes-Lourdes est une idée endogène au secteur d'étude considéré, à l'inverse de nombreux autres réseaux de villes dont la paternité et la genèse reviennent à la D.A.T.A.R. Cette volonté d'aménagement du territoire est sous-tendue par l'ambition d'animer une région, celle des Pays de l'Adour. Cependant, le réseau de villes s'excentre largement vers le sud-est dans le cadre géographique ainsi défini, ce qui pose des problèmes, outre ceux de sa pérennité et de sa survie. Car aujourd'hui, ce réseau de villes ne fonctionne plus. André Labarrère (député-maire de Pau) déclarait il y a peu de temps : "le réseau de villes Pau-Tarbes-Lourdes est un échec". Les mêmes propos nous ont été tenus récemment par Xavier Piolle, bien qu'il y ait actuellement un essai de relance...

II - Les "pays" : le "Pays de Béarn" ou "Béarn XXI° siècle".

Deuxième espace projet issu de la L.O.A.D.T., les "pays" constituent une deuxième forme possible (et non contradictoire avec celle des réseaux de villes, au contraire) d'aménagement, de développement et de recomposition du territoire national. Le développement qui suit s'articule à l'identique de celui concernant les réseaux de villes ; nous nous intéresserons ensuite au "Pays de Béarn" ou "Béarn XXI° siècle"

A) - Les "pays" définis par la loi A.T.R. et la L.O.A.D.T.

- Les objectifs des "pays" : possibilités et avantages.

La loi d'Administration Territoriale de la République (loi A.T.R. du 8 février 1992, ou loi "Joxe"), renforcée par la L.O.A.D.T., met en place, en France, la politique de "pays". Réactivant et renforçant l'échelle micro-régionale, le pays suppose pour se mettre en place "une communauté locale d'intérêts économiques et sociaux ainsi que, le cas échéant, les solidarités réciproques entre la ville et l'espace rural". Polysémique par essence, la notion de pays pourrait réanimer à l'avenir les 329 arrondissements métropolitains actuels, ce qui n'est pas sans rappeler aussi les quelques 300 pays géo-historiques formés depuis l'époque gallo- romaine (les pagi gallo-romains) ou médiévale.

Sans être pour autant un nouvel échelon politico-administratif, de taille infra-départementale mais supra-cantonale, les pays recouvrent donc grosso-modo les mailles politicoadministratives des arrondissements, ces derniers correspondant souvent aux bassins d'emploi définis par l'I.N.S.E.E. Le pays s'appuie ainsi finalement sur les logiques fonctionnelles des territoires et sur les solidarités de voisinage qui s'y développent. L'article 2 de la L.O.A.D.T. d'ailleurs nous le confirme : les bases politiques d'un pays peuvent être les suivantes : "un projet commun de développement, une organisation du territoire fondée sur les notions de bassin de vie, une constitution d'espaces cohérents et homogènes".

Le pays, dans ses différentes configurations spatiales, se développe parfois (mais rarement) à cheval sur plusieurs départements (ce que n'interdit pas la loi). Citons par exemple :

-> le pays de "Redon et de Vilaine" se développe à cheval sur l'Ille-et-Vilaine, le Morbihan et la Loire-Atlantique (région Bretagne). Ses bases reposent sur des logiques géo-historiques, d'où sa configuration actuelle.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

-> le pays du "Plateau de Millevaches" se développe à cheval sur la Corrèze, la Creuse et la Haute-Vienne (Région Limousin). Il correspond en partie à une réalité topographique (cf la géographie physique) associée aussi à des réalités géo-historiques.

-> le pays des "Cévennes viganaises" se développe à cheval sur le Gard et l'Hérault (région Languedoc-Roussillon). Il s'agit d'un espace ayant connu la reconversion des industries du textile et la désertification rurale.

Le pays, espace d'identité, doit permettre, entre autres, d'optimiser la gestion des services publics sur un espace homogène et cohérent (relativement), et de permettre un développement local tenant compte des gens et des élus concernés par la mise en place du projet en question. Il s'agit donc d'articuler deux logiques complémentaires, l'une venant d'en "haut", l'autre venant d'en "bas" (démocratie participative).

- Des territoires à "mémoire de forme".

Cependant une question se pose : la maille du pays constitue-t-elle une maille parfaite ? Autrement dit, existe-t-il un optimum dimensionnel pour le pays, un idéal scalaire permettant d'appréhender au mieux les questions de développement local et territorial ? Il existe en fait une multitude de tailles, mais toutes se rapprochent plus ou moins des arrondissements précédemment cités.

Or, il ne faut pas oublier que ces territoires sont, certes, à "géométrie variable" (ou configuration variable), mais qu'ils sont aussi, pour reprendre un phénomène de physique appliquée, à "mémoire de forme". Ainsi, si la politique des pays semble, a priori, relativement bien fonctionner, c'est aussi parce qu'elle s'appuie sur d'anciens territoires qui sont légitimés et vécus depuis longtemps, et qui reprennent souvent d'anciennes limites provinciales (devenues départementales pour la plupart avec la Révolution). En conséquence, ces territoires, dans la mesure où ils ont été objectifs et objectivés durant des siècles, contiennent en eux les germes de leur future renaissance. Ces territoires à "mémoire de forme" sont donc réactivés en cette fin de XX° siècle, à travers certains territoires "projets" comme le pays. Actuellement, le "Pays Basque", le "Pays de Béarn" et le "Pays de Bigorre" réactivent ainsi les mailles des provinces et des pays d'Ancien Régime auxquelles ils correspondaient.

Certains pays développent donc actuellement des limites qui se développent à cheval sur plusieurs départements, eu égard aux découpages départementaux qui dans certains cas ont eu pour but de diviser les territoires auxquels nous faisons allusion (la Bretagne a été, par exemple, découpée en cinq départements). Il n'est donc pas incohérent de voir se former aujourd'hui de nouvelles entités territoriales, de taille infra-départementale, mais d'essence inter-départementale, compte-tenu des limites qu'ils présentaient avant la Révolution Française. Il en est de même pour les provinces (principautés, pays, etc...) qui ont été regroupées à la Révolution Française pour former des départements : le pays basque et le béarn formèrent ainsi le département des Basses-Pyrénées. Or aujourd'hui, nous les retrouvons sous la forme d'espaces projet, des espaces de gestion pour l'avenir.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

- Inconvénients et limites des "pays".

Les pays recouvrent donc normalement des espaces polarisés (pour la majorité d'entre eux), ce qui correspond bien aux arrondissements sur lesquels ils se développent parfois. Ces derniers sont aussi des territoires polarisés, reposant sur des bassins d'emplois traduisant ainsi des relations de type "centre" et "périphérie", d'où les réalités fonctionnelles que nous observons.

Malgré tout, il n'en demeure pas moins certains problèmes :

D'abord, comment articuler les pays (qui privilégient une logique aréolaire) avec les réseaux de villes (qui privilégient, au contraire, une logique réticulaire) ? Avons-nous affaire ici à une contradiction (dialectique) supplémentaire, ou au contraire à deux logiques, deux espaces projet complémentaires ? Dans ce dernier cas, comment mettre en place et développer cette complémentarité ?

Ensuite, qu'en est-il des futures compétences dévolues aux pays ? Se superposent-elles, ou autrement dit, y-a-t'il interférence avec les compétences des principales mailles politicoadministratives françaises, ainsi qu'avec les structures intercommunales actuellement en place, ou y-a-t'il ici aussi complémentarité ?

Enfin, remarquons que malgré les dispositions de la loi à cet égard, les limites départementales et régionales constituent encore une barrière difficile à franchir dans le mise en place des pays ; sur les 42 pays test retenus, seuls cinq se développent à cheval sur plusieurs départements, alors qu'en réalité ils pourraient être plus nombreux.

Le "Pays de Béarn", que nous allons étudier maintenant, est un projet en cours d'élaboration, ce qui suppose de notre part et de celle du lecteur toutes les précautions nécessaires quant à l'analyse et à l'interprétation du développement qui suit. Néanmoins, il semble constituer, toujours pour nous, un bon exemple de mise en évidence des possibilités d'évolution et de modifications qu'offrent indirectement les lois de 1992 et de 1995.

B) - "Béarn XXI° siècle" ou le "Pays de Béarn".

Dans les Pyrénées-Atlantiques, et à l'initiative du Conseil Général (depuis 1995-1996), une démarche du type des pays vise à faire émerger "de nouveaux projets sur la base d'un découpage territorial susceptible, d'une part, de mettre en évidence les points forts et les lacunes des différents types "d'espaces départementaux", d'autre part de favoriser les collaborations locales en utilisant les périmètres d'intervention comme autant d'outils d'incitation et de développement".

L'ambition avouée des responsables est de "retrouver et dépasser les territoires", en s'appuyant sur la base territoriale que constitue le Béarn, dans ses limites historiques. L'objectif est de proposer une organisation territoriale multi-scalaire, l'agglomération paloise polarisant la quasi-totalité de l'espace béarnais. Le pays (au sens de la loi de 1995), dans ce cadre, "pourrait s'organiser sur la base d'un réseau de bassins de vie ".

Deux après, les initiateurs de Béarn XXI° siècle se détournent du projet initial d'un "Pays de
Béarn"
pour s'orienter plus vers un projet de "Cité Béarn et Adour-Pyrénées", aux frontières

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

floues, à géométrie variable (les Pays de l'Adour, par exemple), dont le but est de permettre de meilleures relations et plus de contacts entre les acteurs locaux (idée de synergie). Ainsi, il s'agit plus de favoriser l'organisation que la décision.

Cependant, cette idée nouvelle ne connait aucune existence juridique et institutionnelle comme le pays. Son but est de permettre le renforcement de la légitimité des acteurs locaux tels que les maires, les conseillers généraux, les présidents de syndicats intercommunaux..., plus que de renforcer celle des élus comme François Bayrou ou André Labarrère. La difficulté est de montrer que cette idée de "cité Béarn et Adour-Pyrénées" est tout aussi intéressante pour ces deux derniers que le projet de "Pays de Béarn" qu'ils veulent mettre en place. En fait, nous avons affaire ici à un problème de communication et d'intérêts, François Bayrou et André Labarrère désirant surtout renforcer leur influence et leur pouvoir dans le cadre d'un projet qui se développerait à l'intérieur de leurs espaces respectifs de légitimité. C'est d'ailleurs pour cette raison que François Bayrou déclare lors de la conférence (en parlant du projet en question) : "Il faut un cadre politique clair" (...) "pour savoir ce que l'on veut faire, il faut d'abord savoir qui on est" (ce qui est incompatible avec un projet de "cité Béarn et Adour-Pyrénées" aux frontières floues, à géométrie variable !! !). Le projet en cours, quant à lui, devrait se terminer d'ici fin 1998, mais compte-tenu du retard accumulé, une prolongation est envisagée.

Si les deux exemples que nous venons de développer constituent des espaces projet émanant d'en "haut", celui des Pays de l'Adour procède de la logique inverse, à savoir qu'il tire essentiellement son origine d'en "bas". De même, le niveau scalaire retenu franchi ici un seuil par rapport à celui des pays, nous avons ainsi affaire dans ce cadre à un méso-espace qui éprouve de nombreuses difficultés à affirmer son existence, sa légitimité et surtout sa reconnaissance. Peut-être est-ce dû au simple fait que justement il émane d'en "bas" (?). Pour autant, le "Pays de Béarn" et le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" sont aussi nés dans l'ambition d'animer cette région des Pays de l'Adour...

III - Les Pays de l'Adour : espace en devenir ?

A) - Les Pays de l'Adour : entre mythe et réalité.

Les Pays de l'Adour constituent un espace géographique vaste de 15200 km2 qui se développe entre la boucle de l'Adour au nord, les Pyrénées au sud, l'Océan Atlantique à l'ouest et le plateau de Lannemezan à l'est. La région ainsi formée, au sens géographique du terme, repose comme l'indique l'intitulé, sur l'association de plusieurs pays qui cohabitent tous dans le bassin hydrographique de l'Adour. Quatre pays principaux composent cet ensemble :

* Le Béarn

* Le Pays-Basque

* La Bigorre

* La Gascogne de l'Adour

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Le Béarn est un État ancien, une principauté qui fut indépendante politiquement et juridictionnellement à l'intérieur du royaume de France, du X° siècle jusqu'en 1620, date de son incorporation définitive au sein du domaine royal. Les limites du Béarn sont restées intangibles durant cette période.

Le Pays-Basque (Français) est composé de trois provinces, la Basse-Navarre, le Labourd et la Soule. Ces trois dernières n'ont jamais constitué un État à part entière comme le Béarn. En fait c'est la pratique d'une langue commune, des coutumes et une architecture particulières qui donnent à cette micro-région une unité culturelle forte.

"Le comté de Bigorre apparaît en 820 avec l'organisation féodale". Ce pays ne présente pas cependant de véritable unité, qu'elle soit culturelle, linguistique ou autre... En fait dans l'Histoire, la Bigorre est souvent associée au Béarn, d'où la difficulté d'individualiser facilement cette troisième micro-région. Mais depuis la Révolution Française, la Bigorre fait partie d'un autre département, et récemment d'une autre région, avec une ville-centre qui lui est propre : Tarbes.

La Gascogne de l'Adour se développe à l'intérieur de la boucle de l'Adour, le Pays Basque, le Béarn et la Bigorre constituant la frontière méridionale. Respectivement d'est en ouest, le Bas-Armagnac, le Tursan, la Chalosse et le Bas-Adour forment cet ensemble de terres gasconnes que l'on qualifie Gascogne de l'Adour.

Ainsi, alors qu'il est relativement aisé de dégager les Pays de l'Adour de l'ensemble plus vaste dans lequel ils s'inscrivent (le grand sud-ouest de la France ou l'Aquitaine par exemple), notamment parce que le fleuve Adour est une limite naturelle très visible et bien marquée, il est cependant plus difficile de déceler une véritable unité dans cette région, tant la diversité des ensembles (ou pays) présentés est forte. L'unité des Pays de l'Adour dépend donc plus de ses limites (extérieures) que de la forte cohésion de ces mêmes pays au sein de l'ensemble préalablement défini. "Ce qui fonde les Pays de l'Adour, c'est leur situation périphérique,

leur marginalité par rapport à l'espace national et aux deux grandes métropoles voisines, Toulouse et Bordeaux".

En effet, sur une carte des densités de population, les Pays de l'Adour se manifestent par une densification propre au piémont pyrénéen qui s'oppose aux déserts landais et gersois. Autrement dit, c'est la Haute-Lande, entre autres, qui fait émerger l'identité aturienne.

Réalité naturelle mais non historique, les Pays de l'Adour émergent dans les discours (de politiques, universitaires, etc...) à partir des années 1960. Construction sociale et intellectuelle de cette réalité naturelle, les Pays de l'Adour constituent aujourd'hui, pour certains, un véritable territoire, territoire que d'autres voudraient régionaliser administrativement (et politiquement).

B) - Les tentatives de création d'une région "Pyrénées-Adour".

En 1994-1995, Michel Inchauspé, député basque R.P.R., propose de découper le département des Pyrénées-Atlantiques en deux départements, créant ainsi un département "Béarn" et un autre "Pays Basque-Adour", et d'associer ces deux derniers aux Hautes-Pyrénées pour former une nouvelle région politico-administrative, appelée alors "Pyrénées-Adour".

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Cette idée datant des années 1960 (cf les Pays de l'Adour) repose sur le fait que cet espace tendant à se régionaliser (géographiquement et économiquement) est marginal et marginalisé par rapport aux deux grandes métropoles du sud-ouest de la France que sont Bordeaux et Toulouse. S'appuyant sur des arguments physiques (des "barrières naturelles" telles que le plateau de Lannemezan ou encore "le désert landais"), des infrastructures de transports déficientes (l'absence, alors, d'un véritable tronçon autoroutier entre Pau et Toulouse, ou encore d'une bonne liaison routière entre Pau et Bordeaux), sur une (pseudo ?) identité des Pays de l'Adour, etc... le député profite aussi d'un référendum effectué à ses frais pour remettre sur la scène ce projet dont il est le seul à vouloir réellement voir le jour. Finalement, et sans surprise, l'Assemblée Nationale rejette en bloc peu de temps après ce projet, qui aura eu au moins pour mérite de relancer le débat sur la pertinence des mailles départementales et régionales. De même, et indépendamment des querelles politiques sous-jacentes (François Bayrou et André Labarrère s'étaient alors associés contre ce projet), le projet met aussi en évidence les nombreuses complémentarités entre Pau et Tarbes que la région ainsi formée aurait, normalement, pu accroître et favoriser.

Il n'en demeure pas moins que "la région des Pays de l'Adour semble adopter une géoconfiguration située entre le réseau, composé de lieux inter-reliés, et le territoire homogène". Ainsi, si un réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" et un "Pays de Béarn" se développent actuellement, même avec certaines difficultés, c'est aussi parce que les Pays de l'Adour s'articulent donc selon une logique de réseau (organisation réticulaire de l'espace) et une logique de territoire, plus ou moins polarisé (organisation aréolaire de l'espace).

Les deux premiers espaces projet que nous avons décrits constituent ainsi des instruments complémentaires d'aménagement et de développement de l'ensemble du territoire national. Ils sont complémentaires car ils procèdent de deux logiques différentes d'organisation de l'espace, l'une aréolaire (pour les pays), l'autre réticulaire (pour les réseaux de villes), et c'est peut-être là que résident leur force et leur capacité à durer sur une longue période. Le troisième exemple, celui des Pays de l'Adour, est aussi un espace projet, mais sa régionalisation (politico-administrative) se heurte à des conflits d'intérêts, ce qui lui confère une place à part dans les processus de recompositions territoriales. Le niveau scalaire appréhendé précédemment est essentiellement infra-départemental (pour les réseaux de villes et les pays, notamment dans le secteur d'étude qui nous intéresse), sauf pour les Pays de l'Adour où il devient largement supra-départemental.

Pour qu'un espace projet émanant d'en "haut" soit efficace et qu'il dure, il faut qu'il convienne aussi aux différents gouvernements succédant celui qui en est l'initiateur, ce qui malheureusement difficile en France, compte-tenu des nombreux changements de majorité. A priori, Dominique Voynet semble vouloir conserver les propositions faites par Charles Pasqua dans le cadre de sa L.O.A.D.T., ce qui laisse présager de bonnes augures quant à l'évolution future et à l'utilisation de ces espaces projet (réseaux de villes, pays et agglomérations) d'ici les années à venir.

Il n'en demeure pas moins que ces derniers, aussi bons soient-ils, ne constituent pas la panacée en la matière. En effet, d'autres propositions peuvent être faites, sans pour autant être contradictoires et antinomiques avec les propositions de 1995.

La deuxième sous-partie va s'efforcer de retranscrire quelques unes de ces propositions, en analysant les avantages et les inconvénients qu'elles apportent, ainsi que les possibilités

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

supplémentaires qu'elles offrent aux espaces projet de la L. O.A.D.T.

B) - La nécessité d'une véritable réforme.

La nécessité de recomposer le territoire national est incontestable. Ce faisant, il faut alors associer à la rationalité économique et sociale la représentation politique, ce que malheureusement l'inertie des grands corps d'État et le poids du maillage politicoadministratif actuel ne permettent pas facilement.

L'objectif visé est de couvrir l'ensemble du territoire de pays et d'agglomérations (ainsi que de réseaux de villes, tout ces instruments étant complémentaires). En effet, "ceux qui s'organisent en pays ou en agglomération seront des partenaires reconnus de l'État et des régions dans les procédures de contrat de plan". Ces espaces de développement doivent ainsi organiser les milieux ruraux (pour les pays) et les milieux urbains (pour les agglomérations ; une agglomération = une ville-centre, la banlieue et les communes rurales qui gravitent autour). Au nombre de 400 environ pour les premiers et d'une centaine pour les seconds, ces espaces de développement doivent favoriser la gouvernance, avoir un pouvoir élu au suffrage universel direct (un maire d'agglomération par exemple, le conseil général devenant le Sénat des pays et des agglomérations), et doivent enfin favoriser la consultation directe locale.

Comme nous l'avons indirectement souligné auparavant, l'idée est aussi de faire coexister et coopérer ces espaces de développement (pays, agglomérations, quartiers...) avec les espaces d'autorité que constituent les communes, les cantons, les départements et l'État français.

De nombreux auteurs (autres que les politiques) proposent des découpages tenant compte aussi des nombreux espaces que pratiquent quotidiennement les hommes, les biens et les informations. Après avoir retranscrit leurs souhaits (nous avons retenu ici quatre auteurs parmi tant d'autres, car leurs propositions représentent à nos yeux une bonne synthèse de ce que nous pouvons lire actuellement dans la littérature relative à ce sujet), nous montrerons les points de convergence et de divergence avec les propositions de la L.O.A.D.T., et nous conclurons sur les éventuelles possibilités qu'offre la conjugaison de ces différentes propositions avec celles de la loi de 1995.

I - Les propositions de Jean-louis GUIGOU.

Jean-Louis Guigou propose quatre niveaux de recomposition des territoires, qui pourraient ainsi organiser l'espace français d'ici à 2015 : "cette recomposition des territoires en quatre niveaux - européen, systèmes urbains, pays et quartiers - est admise pour la majorité des pays européens. Une dernière question se pose : quand et comment institutionnaliser ces niveaux, compte-tenu de la présence, voire de la résistance des niveaux antérieurs, la nation, les départements, les communes ? En particulier, on ne saurait délibérément ignorer une excessive vision hexagonale et continentale même revue à l'aube de l'Europe".

Par exemple, en Angleterre il y a ainsi 36 agglomérations et 325 pays, en Allemagne, 86 agglomérations et 426 pays. Ce qui signifie donc, compte-tenu du niveau scalaire retenu, que le principe d'organisation de l'espace en pays et en agglomération est un principe qui a fait ses preuves.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

De même, il propose de transformer les 22 régions actuelles en cinq ou sept grandes régions (correspondant aux grands bassins de peuplement français) et de clarifier les compétences des communes et des départements, ces derniers ayant alors pour objectif de mettre en solidarité les villes et les campagnes (ce qui correspond ainsi à une bonne articulation entre les pays et les agglomérations).

Ses propositions reprennent ainsi en partie celles faites par la L.O.A.D.T., la seule différence c'est qu'il introduit deux niveaux scalaires supplémentaires de recompositions territoriales, celui des systèmes urbains et le niveau européen. Une question se pose cependant : le niveau des systèmes urbains est-il le même que celui des réseaux de villes ? Il s'agit en fait d'appréhender la métropolisation des villes françaises dans sa globalité (dans la mesure du possible), d'accompagner cette dernière, et de permettre une meilleure gestion des zones de fortes densités de population en France.

Il s'agit donc de tenir compte des espaces et des territoires pratiqués par les hommes, les biens et les informations, ce qui revient à retenir trois types de bassins, comme le suggère l'auteur :

* les bassins de vie quotidienne. Au nombre de 4000 environ, leur taille correspond grosso- modo aux cantons français, mais leurs limites ne se superposent pas toujours,

* les bassins d'emplois. Au nombre de 350 environ, leur taille correspond grosso-modo aux arrondissements français, mais là aussi leurs limites ne superposent toujours pas les unes aux autres. Ce sont sur ces bases là que se forment normalement les pays,

* les bassins de peuplement. Il y en a cinq ou sept en France. Ils correspondent aux grandes zones de peuplement observables sur une carte "qui décrit le dynamisme des communes françaises depuis 40 ans". C'est à partir de ces bassins de peuplement que pourraient se construire les grandes (ou super) régions que nous évoquions auparavant. Ces dernières pourraient ainsi rivaliser économiquement et démographiquement avec les länder allemands, avec lesquels elles ont souvent été comparées.

Les propositions de Jean-Louis Guigou sont donc complémentaires de celles de la L.O.A.D.T., et comme nous pouvons le constater, l'auteur tient compte surtout des réalités factuelles de l'espace socio-économique, privilégiant ainsi et aussi une démarche empirique.

II - Les propositions de Jean-Pierre WORMS et de Roger BRUNET.

Jean-Pierre Worms, quant à lui, propose de renforcer les compétences et la taille de des budgets régionaux, ce qui n'est pas antinomique, au contraire, avec un éventuel regroupement des régions actuelles. L'objectif visé est le même que celui de Jean-Louis Guigou, c'est-àdire de permettre à ces dernières une meilleure intégration compétitive au sein de l'Europe des 15.

En effet, les régions doivent être appréhendées doublement. D'une part, dans une perspective uniquement française : elles constituent ainsi la maille permettant l'articulation entre le local et le national. D'autre part, dans une perspective européenne : elles constituent dans ce cas la maille permettant l'articulation entre le national (le régional) et l'européen, ce qui leur permet indirectement de faire face à la concurrence internationale.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Cette dualité (et/ou ambivalence due à un effet d'échelle) des régions françaises est avantageuse mais aussi source d'inconvénients. Avantageuse car elle renforce et légitime encore plus la place de celles-ci dans le maillage politico-administratif français. Leur utilité s'en retrouve renforcée. Mais elle est aussi source d'inconvénients, car ce rôle d'interface pose des problèmes de gestion et de compétences, ainsi que des problèmes sur le modèle de gouvernement à adopter finalement : devons-nous alors nous diriger vers un modèle fédéral et laisser ainsi beaucoup plus d'autonomie aux régions ? Dans cette dernière perspective, il faut alors complètement repenser les compétences et la taille des régions. Mais, comme le fait remarquer justement Roger Brunet, additionner des petites régions peu puissantes donne pour résultat des grandes régions peu puissantes, ce qui au bout du compte ne sert à rien... Il reste à modifier maintenant la culture politique dominante, celle-là même qui est aussi à l'origine de l'inertie que nous remettons en cause.

Car pour Jean-Pierre Worms, "plus que l'inadaptation des limites géographiques, c'est la culture politique qui retient les collectivités territoriales d'évoluer : des siècles de soumission à l'autorité centrale et l'attrait des pouvoirs (cumulés !) freinent, mais n'empêcheront pas, l'apprentissage de nouveaux projets et de nouvelles pratiques politiques".

Il considère ainsi que le problème réside plus dans les comportements des hommes politiques (quels que soient leur parti politique et leurs responsabilités) que dans l'inadaptation entre le maillage politico-administratif et l'espace socio-économique. Néanmoins, les deux problèmes sont liés, l'inadaptation des limites géographiques conditionnant indirectement un comportement "passéiste" des hommes politiques, comportement leur apportant beaucoup d'avantages, et qu'une éventuelle réforme pourrait abolir (un peu comme en 1789...). Paradoxalement, ce n'est pas tant le citoyen et/ou l'acteur socio-économique qu'il faudrait (ré)éduquer, mais plutôt les hommes et les acteurs politico-administratifs... Il s'agit là d'un autre type de réforme, tout aussi dure à mener que celle que nous étudions.

Dans un autre registre, et à un autre niveau scalaire, les propositions de Jean-Pierre Sueur confirme la nécessité de repenser le paysage politico-administratif français, et plus précisément de reconsidérer autrement le fait urbain.

III - Les propositions de Jean-Pierre SUEUR.

Jean-Pierre Sueur, dans son rapport sur "50 propositions pour l'avenir des villes" conforte l'idée qu'une véritable réforme est nécessaire, et que celle-ci doit prendre aussi et surtout prendre en compte l'avenir des villes. D'ailleurs, ces propositions n°4, 5 et 6 sont explicites et renforcent ce qui a été dit auparavant :

* proposition n°4 : "le niveau pertinent pour les décisions structurantes concernant les espaces urbains est celui de l'agglomération. Il est proposé de s'orienter vers l'élection au suffrage universel direct d'une assemblée d'agglomération",

* proposition n°5 : "l'organisation territoriale et administrative de la France doit être revue de manière à mieux prendre en compte le fait urbain. Cela concerne notamment la représentation des agglomérations urbaines au sein des départements",

* proposition n°6 : "la mise en oeuvre de réseaux de villes doit constituer l'un des objectifs majeurs de la politique d'aménagement du territoire. Des rapports contractuels devront être

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

établis entre les conseils régionaux et les conférences des maires des grandes villes (ou des présidents d'agglomération) de chaque région".

Il s'agit donc de reconsidérer le fait urbain (les villes en général) afin de l'intégrer plus amplement dans le cadre des espaces projet prévus pour organiser le territoire français d'ici 2015. En effet, compte-tenu que la population française est (presque) à 80% urbaine, la prise en compte des villes dans leur globalité est d'autant plus justifiée. Anticiper et prévoir la France de 2015, c'est aussi et surtout anticiper et prévoir l'évolution des villes, la résolution des problèmes qu'elles posent constituant une condition nécessaire (mais non suffisante) pour aménager la France du XXI° siècle.

Des propositions de la L.O.A.D.T. et de celles qui découlent des auteurs cités précédemment, nous pouvons déduire que la recomposition du territoire national français dans l'optique de 2015 ne nécessite pas forcément d'effacer totalement le maillage politico-administratif actuel, pour le remplacer directement par des espaces projet qui en sont encore à leurs balbutiements. Au contraire, il s'agit (a priori) de mettre en place une forme de transition qui permette la coexistence et la coopération entre les formes anciennes d'organisation et de gestion du territoire et les formes nouvelles, les premières servant de point d'ancrage et de départ aux secondes.

La difficulté réside donc dans la mise en place d'un espace projet sur un espace-substrat qui compte déjà beaucoup de mailles politico-administratives. En fait, actuellement il s'agit plus d'organiser le territoire que de l'administrer.

Les quatres niveaux de recomposition des territoires proposés par Jean-Louis Guigou procèdent de la dialectique du local et du mondial. Il s'agit d'abord d'observer ces territoires, ensuite de les structurer et enfin de les institutionnaliser, ce qui justifie d'autant mieux la période de 20 ans que s'est fixée la L.O.A.D.T.

De même, aux quatres niveaux ainsi définis correspondent quatres types d'espaces qui leur sont propres :

* au niveau européen correspond l'espace d'intégration,

* au niveau des systèmes urbains organisés et des grandes régions de niveau européen correspond l'espace d'intervention,

* au niveau des districts, des pays, des bassins d'emplois et des agglomérations correspond l'espace de développement,

* au niveau des quartiers correspond l'espace de vie.

De même, cette dialectique du local et du mondial est aussi celle de l'espace projet et de l'espace substrat, la difficulté étant de savoir comment adapter le plus efficacement possible l'un à l'autre.

Quant aux propositions de Jean-Pierre Worms, de Roger Brunet et de Jean-Pierre Sueur, elles confortent et complètent les points de vue développés précédemment, comme nous avons pu le constater jusqu'à présent.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

CONCLUSION de la troisième Partie.

Cette troisième partie nous a permis de mettre en évidence la nécessité d'une véritable réforme du maillage politico-administratif français, ce qui en outre vérifie aussi la deuxième hypothèse que nous avons posée dans le cadre de ce mémoire. Les solutions proposées, eu égard au niveau scalaire retenu (celui des départements, et dans une moindre mesure celui des régions), que ce soient celles de la L.O.A.D.T. ou des différents auteurs que nous avons cités, permettent donc de dépasser les différents paradoxes dialectiques résultant de la situation initialement établie.

L'inadaptation et le décalage entre le maillage politico-administratif français, la mise en oeuvre des nouvelles compétences de l'État et la modification dans la répartition des pouvoirs depuis les lois de décentralisation de 1982-1983, peuvent se résorber par une meilleure répartition des compétences, la création d'un ou de deux niveaux de participation locale (ne serait-ce que celui des pays ou des agglomérations, les réseaux de villes procédant d'une autre logique), et par la coexistence et la coopération des espaces projet français avec le maillage politico-administratif actuel.

Les espaces projet français sont ainsi des solutions de transition (sur une période de 20 ans, depuis la L.O.A.D.T. de 1995) qui constituent les prémices, a priori, d'une réforme plus globale et plus générale. Reste cependant qu'ils doivent encore faire leurs preuves :

* dans le secteur d'étude qui nous intéresse, le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" est un échec. Il s'agit actuellement de diagnostiquer les faiblesses et les problèmes pour aboutir rapidement à un espace solution, puis à un espace validation.

* le "Pays de Béarn" se détourne de son projet initial pour tenter de réanimer les Pays de l'Adour, à la recherche d'un second souffle.

Car les instruments d'aménagement et de développement du territoire proposés par la L.O.A.D.T. sont complémentaires, les réseaux de villes devant permettre (directement ou indirectement) une articulation cohérente de l'ensemble des pays (et des agglomérations, pour les milieux urbains) se répartissant sur le territoire national français d'ici 2015.

De même, les propositions des auteurs que nous avons cités sont aussi complémentaires de celles de la L.O.A.D.T. : il s'agit aussi de faire preuve de pragmatisme, en associant ce qui est "ancien" (le maillage politico-administratif) avec ce qui est récent (les espaces projet français). Dans cette perspective, la prise en compte du phénomène urbain est fondamentale, sachant que l'urbanisation croissante rassemble de plus en plus de gens sur des espaces restreints. Deux niveaux de participation locale peuvent ainsi être appréhendés, avec des limites où le citoyen et l'acteur socio-économique se retrouvent :

* celui des quartiers (espace de vie),

* celui des pays et des agglomérations (espace de développement).

Finalement, au lieu d'envisager tout d'abord une réforme globale, ne vaudrait-il pas mieux commencer par certains niveaux, certaines compétences, comme celles, par exemple, que nous avons étudiés ?

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

CONCLUSION GÉNÉRALE.

Le maillage politico-administratif français, élaboré il y a 200 ans, est donc inadapté aux nouvelles logiques (politiques, administratives, économiques, sociales, etc...) qui se développent actuellement dans l'hexagone. Il doit ainsi faire face aujourd'hui, grosso-modo, à trois évolutions et changements majeurs pour lesquels il n'est ni prévu, ni adapté :

* d'abord, la prise en compte par l'État de nouvelles compétences, dans le domaine économique et social, et ce depuis un siècle environ,

* ensuite, les modifications dans la répartition de ces compétences entre l'État (dont le pouvoir jusqu'alors était centralisé), les citoyens et les acteurs socio-économiques, notamment depuis les lois de décentralisation de 1982-1983,

* enfin, les modifications et les changements de l'espace socio-économique, avec, entre autres, une urbanisation croissante.

Ce faisant, les deux hypothèses que nous avons posées dans le cadre de ce mémoire sont en partie vérifiées :

* Le maillage politico-administratif français actuel est donc inadapté à une gestion et un contrôle performant et objectif de l'espace socio-économique.

* Il y a par conséquent nécessité de procéder à une réforme, une refonte de ce maillage, ou du moins de certaines mailles politico-administratives, afin de rétablir la cohérence dans l'articulation et l'adaptation des différentes logiques en présence.

Néanmoins, et a posteriori, il semble que nous n'avons pas posé les hypothèses les plus pertinentes, ce qui est relativement compréhensible, compte-tenu du caractère obligatoirement incertain de telles hypothèses. Finalement, le problème n'est pas tant dans les mailles, les limites (aussi importantes soient-elles, comme nous le pensions au début de ce mémoire), mais plutôt dans la clarification des compétences à mieux répartir dans les différents niveaux politico-administratifs présents actuellement, ainsi que dans la mise en place d'un niveau (ou deux) de participation locale, compte-tenu de la décentralisation qui est en vigueur : à ce titre, les pays et les agglomérations (avec les quartiers, à un niveau inférieur) constituent une solution somme toute très intéressante.

Dépassant la simple démarche analytique, l'utilisation de la méthode dialectique nous a permis de comprendre et d'appréhender autrement les paradoxes soulevés par la problématique retenue. Cependant, nous avons conscience de ne pas l'avoir utilisé dans toute sa richesse. D'une part, cela est dû à notre relative inexpérience face à l'utilisation de cette théorie dont nous ne possédons pas encore toutes les subtilités ; d'autre part, parce que l'orientation finale et définitive de notre travail n'a été fixée que tardivement, ce qui est normal dans le cadre de la rédaction d'un mémoire de D.E.A.

Pourtant, et malgré les quelques limites que nous apportons ici à notre travail, nous estimons avoir rempli notre contrat, en répondant (tant bien que mal) aux objectifs fixés dans l'introduction.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

Ainsi, dans la première partie, la dimension historique nous a été d'un grand secours pour l'analyse et l'explication de certains faits, de certaines situations, ainsi que de leurs évolutions. Il s'est agi pour nous d'étudier des faits inscrits à la fois dans l'espace mais aussi dans le temps.

Dans la seconde partie, nous sommes partis de l'idée que l'analyse de l' "espace urbain" Pau- Tarbes constituait un bon exemple de remise en cause des mailles départementales et régionales. Certes, nous n'avons abordé que certains aspects (des contraintes temporelles et matérielles ne sont pas étrangères à cet état de fait) ; il n'en demeure pas moins que cet exemple est représentatif d'un plus vaste phénomène se développant à l'intérieur du territoire national français.

Dans la troisième partie, nous nous sommes efforcés de faire une synthèse (modeste en non exhaustive) des alternatives possibles face au problème retenu. Nous avons ainsi privilégié l'analyse des réseaux de villes, des pays, dans une moindre mesure celle des agglomérations et des quartiers, compte-tenu du niveau scalaire qui nous intéresse, car ces instruments constituent à nos yeux des espaces projet pertinents pour l'aménagement et le développement du territoire dans l'optique de 2015.

Cependant, les espaces projet que nous évoquons ici n'en sont encore qu'à leur phase prospective, ce qui mérite de notre part et de celle du lecteur beaucoup de réserve et de prudence quant à l'analyse des véritables résultats qu'offrent réellement ces derniers. Nous avons juste voulus faire un état des lieux des différentes propositions, qu'elles soient celles de la L.O.A.D.T. ou des auteurs que nous avons retenus, afin de montrer ce qui pourrait organiser l'espace français dans les 15 ans à venir.

Quant au titre du mémoire, formulé sous forme interrogative, il mérite par conséquent une réponse. "Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ?" Effectivement, ce dernier est à remettre en cause, mais cela ne signifie par pour autant, compte-tenu du travail que nous avons mené cette année, qu'il faille faire obligatoirement table-rase de celui-ci pour le remplacer par un autre. Au contraire, les solutions proposées s'orientent plus, du moins pour le début, vers une phase de transition permettant la coexistence et la coopération de l'un (le maillage actuel) avec les espaces projet qui plus tard seront peut-être institutionnalisés.

Pour les poursuites de la recherche menée cette année, si les moyens nous en sont donnés, nous aimerions ouvrir la problématique sur l'ensemble des niveaux scalaires remis en cause (commune, canton, arrondissement, département, région et même la nation), étudier avec plus de profondeur les apports et les limites des espaces projet français (sans se focaliser essentiellement sur les pays, les agglomérations ou encore les réseaux de villes), et enfin aborder la dimension européenne dans une démarche comparative, ce que nous aurions aimés faire cette année. Mais malheureusement, l'absence de données relatives à ce thème nous a restreint dans une dimension uniquement française, ce qui constitue à nos yeux une limite supplémentaire à notre travail.

Pour autant, nous espérons que ce mémoire, un modeste travail d'étude et de recherche mené pendant un an, outre les réponses qu'il apporte a nos hypothèses de départ, puisse constituer aussi un état des lieux de ce qui se fait et de ce qui se dit en matière d'aménagement du territoire et de géographie, par rapport à la recomposition du territoire national français dans l'optique de 2015. Nous espérons ainsi pouvoir poursuivre cette recherche dans le cadre plus

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

large que constitue la thèse de doctorat, notamment en nous intéressant toujours au maillage politico-administratif français, mais dans la perspective d'une comparaison européenne, eu égard à la construction de la Communauté Économique Européenne qui est en cours, et aux solutions développées en dehors des frontières françaises.

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