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Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français: Exemple de la limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes

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par Lionel Dupuy
Université de Pau et des Pays de l'Adour - DEA Géographie - Aménagement 1998
  

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II - Les "pays" : le "Pays de Béarn" ou "Béarn XXI° siècle".

Deuxième espace projet issu de la L.O.A.D.T., les "pays" constituent une deuxième forme possible (et non contradictoire avec celle des réseaux de villes, au contraire) d'aménagement, de développement et de recomposition du territoire national. Le développement qui suit s'articule à l'identique de celui concernant les réseaux de villes ; nous nous intéresserons ensuite au "Pays de Béarn" ou "Béarn XXI° siècle"

A) - Les "pays" définis par la loi A.T.R. et la L.O.A.D.T.

- Les objectifs des "pays" : possibilités et avantages.

La loi d'Administration Territoriale de la République (loi A.T.R. du 8 février 1992, ou loi "Joxe"), renforcée par la L.O.A.D.T., met en place, en France, la politique de "pays". Réactivant et renforçant l'échelle micro-régionale, le pays suppose pour se mettre en place "une communauté locale d'intérêts économiques et sociaux ainsi que, le cas échéant, les solidarités réciproques entre la ville et l'espace rural". Polysémique par essence, la notion de pays pourrait réanimer à l'avenir les 329 arrondissements métropolitains actuels, ce qui n'est pas sans rappeler aussi les quelques 300 pays géo-historiques formés depuis l'époque gallo- romaine (les pagi gallo-romains) ou médiévale.

Sans être pour autant un nouvel échelon politico-administratif, de taille infra-départementale mais supra-cantonale, les pays recouvrent donc grosso-modo les mailles politicoadministratives des arrondissements, ces derniers correspondant souvent aux bassins d'emploi définis par l'I.N.S.E.E. Le pays s'appuie ainsi finalement sur les logiques fonctionnelles des territoires et sur les solidarités de voisinage qui s'y développent. L'article 2 de la L.O.A.D.T. d'ailleurs nous le confirme : les bases politiques d'un pays peuvent être les suivantes : "un projet commun de développement, une organisation du territoire fondée sur les notions de bassin de vie, une constitution d'espaces cohérents et homogènes".

Le pays, dans ses différentes configurations spatiales, se développe parfois (mais rarement) à cheval sur plusieurs départements (ce que n'interdit pas la loi). Citons par exemple :

-> le pays de "Redon et de Vilaine" se développe à cheval sur l'Ille-et-Vilaine, le Morbihan et la Loire-Atlantique (région Bretagne). Ses bases reposent sur des logiques géo-historiques, d'où sa configuration actuelle.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

-> le pays du "Plateau de Millevaches" se développe à cheval sur la Corrèze, la Creuse et la Haute-Vienne (Région Limousin). Il correspond en partie à une réalité topographique (cf la géographie physique) associée aussi à des réalités géo-historiques.

-> le pays des "Cévennes viganaises" se développe à cheval sur le Gard et l'Hérault (région Languedoc-Roussillon). Il s'agit d'un espace ayant connu la reconversion des industries du textile et la désertification rurale.

Le pays, espace d'identité, doit permettre, entre autres, d'optimiser la gestion des services publics sur un espace homogène et cohérent (relativement), et de permettre un développement local tenant compte des gens et des élus concernés par la mise en place du projet en question. Il s'agit donc d'articuler deux logiques complémentaires, l'une venant d'en "haut", l'autre venant d'en "bas" (démocratie participative).

- Des territoires à "mémoire de forme".

Cependant une question se pose : la maille du pays constitue-t-elle une maille parfaite ? Autrement dit, existe-t-il un optimum dimensionnel pour le pays, un idéal scalaire permettant d'appréhender au mieux les questions de développement local et territorial ? Il existe en fait une multitude de tailles, mais toutes se rapprochent plus ou moins des arrondissements précédemment cités.

Or, il ne faut pas oublier que ces territoires sont, certes, à "géométrie variable" (ou configuration variable), mais qu'ils sont aussi, pour reprendre un phénomène de physique appliquée, à "mémoire de forme". Ainsi, si la politique des pays semble, a priori, relativement bien fonctionner, c'est aussi parce qu'elle s'appuie sur d'anciens territoires qui sont légitimés et vécus depuis longtemps, et qui reprennent souvent d'anciennes limites provinciales (devenues départementales pour la plupart avec la Révolution). En conséquence, ces territoires, dans la mesure où ils ont été objectifs et objectivés durant des siècles, contiennent en eux les germes de leur future renaissance. Ces territoires à "mémoire de forme" sont donc réactivés en cette fin de XX° siècle, à travers certains territoires "projets" comme le pays. Actuellement, le "Pays Basque", le "Pays de Béarn" et le "Pays de Bigorre" réactivent ainsi les mailles des provinces et des pays d'Ancien Régime auxquelles ils correspondaient.

Certains pays développent donc actuellement des limites qui se développent à cheval sur plusieurs départements, eu égard aux découpages départementaux qui dans certains cas ont eu pour but de diviser les territoires auxquels nous faisons allusion (la Bretagne a été, par exemple, découpée en cinq départements). Il n'est donc pas incohérent de voir se former aujourd'hui de nouvelles entités territoriales, de taille infra-départementale, mais d'essence inter-départementale, compte-tenu des limites qu'ils présentaient avant la Révolution Française. Il en est de même pour les provinces (principautés, pays, etc...) qui ont été regroupées à la Révolution Française pour former des départements : le pays basque et le béarn formèrent ainsi le département des Basses-Pyrénées. Or aujourd'hui, nous les retrouvons sous la forme d'espaces projet, des espaces de gestion pour l'avenir.

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

- Inconvénients et limites des "pays".

Les pays recouvrent donc normalement des espaces polarisés (pour la majorité d'entre eux), ce qui correspond bien aux arrondissements sur lesquels ils se développent parfois. Ces derniers sont aussi des territoires polarisés, reposant sur des bassins d'emplois traduisant ainsi des relations de type "centre" et "périphérie", d'où les réalités fonctionnelles que nous observons.

Malgré tout, il n'en demeure pas moins certains problèmes :

D'abord, comment articuler les pays (qui privilégient une logique aréolaire) avec les réseaux de villes (qui privilégient, au contraire, une logique réticulaire) ? Avons-nous affaire ici à une contradiction (dialectique) supplémentaire, ou au contraire à deux logiques, deux espaces projet complémentaires ? Dans ce dernier cas, comment mettre en place et développer cette complémentarité ?

Ensuite, qu'en est-il des futures compétences dévolues aux pays ? Se superposent-elles, ou autrement dit, y-a-t'il interférence avec les compétences des principales mailles politicoadministratives françaises, ainsi qu'avec les structures intercommunales actuellement en place, ou y-a-t'il ici aussi complémentarité ?

Enfin, remarquons que malgré les dispositions de la loi à cet égard, les limites départementales et régionales constituent encore une barrière difficile à franchir dans le mise en place des pays ; sur les 42 pays test retenus, seuls cinq se développent à cheval sur plusieurs départements, alors qu'en réalité ils pourraient être plus nombreux.

Le "Pays de Béarn", que nous allons étudier maintenant, est un projet en cours d'élaboration, ce qui suppose de notre part et de celle du lecteur toutes les précautions nécessaires quant à l'analyse et à l'interprétation du développement qui suit. Néanmoins, il semble constituer, toujours pour nous, un bon exemple de mise en évidence des possibilités d'évolution et de modifications qu'offrent indirectement les lois de 1992 et de 1995.

B) - "Béarn XXI° siècle" ou le "Pays de Béarn".

Dans les Pyrénées-Atlantiques, et à l'initiative du Conseil Général (depuis 1995-1996), une démarche du type des pays vise à faire émerger "de nouveaux projets sur la base d'un découpage territorial susceptible, d'une part, de mettre en évidence les points forts et les lacunes des différents types "d'espaces départementaux", d'autre part de favoriser les collaborations locales en utilisant les périmètres d'intervention comme autant d'outils d'incitation et de développement".

L'ambition avouée des responsables est de "retrouver et dépasser les territoires", en s'appuyant sur la base territoriale que constitue le Béarn, dans ses limites historiques. L'objectif est de proposer une organisation territoriale multi-scalaire, l'agglomération paloise polarisant la quasi-totalité de l'espace béarnais. Le pays (au sens de la loi de 1995), dans ce cadre, "pourrait s'organiser sur la base d'un réseau de bassins de vie ".

Deux après, les initiateurs de Béarn XXI° siècle se détournent du projet initial d'un "Pays de
Béarn"
pour s'orienter plus vers un projet de "Cité Béarn et Adour-Pyrénées", aux frontières

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

floues, à géométrie variable (les Pays de l'Adour, par exemple), dont le but est de permettre de meilleures relations et plus de contacts entre les acteurs locaux (idée de synergie). Ainsi, il s'agit plus de favoriser l'organisation que la décision.

Cependant, cette idée nouvelle ne connait aucune existence juridique et institutionnelle comme le pays. Son but est de permettre le renforcement de la légitimité des acteurs locaux tels que les maires, les conseillers généraux, les présidents de syndicats intercommunaux..., plus que de renforcer celle des élus comme François Bayrou ou André Labarrère. La difficulté est de montrer que cette idée de "cité Béarn et Adour-Pyrénées" est tout aussi intéressante pour ces deux derniers que le projet de "Pays de Béarn" qu'ils veulent mettre en place. En fait, nous avons affaire ici à un problème de communication et d'intérêts, François Bayrou et André Labarrère désirant surtout renforcer leur influence et leur pouvoir dans le cadre d'un projet qui se développerait à l'intérieur de leurs espaces respectifs de légitimité. C'est d'ailleurs pour cette raison que François Bayrou déclare lors de la conférence (en parlant du projet en question) : "Il faut un cadre politique clair" (...) "pour savoir ce que l'on veut faire, il faut d'abord savoir qui on est" (ce qui est incompatible avec un projet de "cité Béarn et Adour-Pyrénées" aux frontières floues, à géométrie variable !! !). Le projet en cours, quant à lui, devrait se terminer d'ici fin 1998, mais compte-tenu du retard accumulé, une prolongation est envisagée.

Si les deux exemples que nous venons de développer constituent des espaces projet émanant d'en "haut", celui des Pays de l'Adour procède de la logique inverse, à savoir qu'il tire essentiellement son origine d'en "bas". De même, le niveau scalaire retenu franchi ici un seuil par rapport à celui des pays, nous avons ainsi affaire dans ce cadre à un méso-espace qui éprouve de nombreuses difficultés à affirmer son existence, sa légitimité et surtout sa reconnaissance. Peut-être est-ce dû au simple fait que justement il émane d'en "bas" (?). Pour autant, le "Pays de Béarn" et le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" sont aussi nés dans l'ambition d'animer cette région des Pays de l'Adour...

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo