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Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français: Exemple de la limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes

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par Lionel Dupuy
Université de Pau et des Pays de l'Adour - DEA Géographie - Aménagement 1998
  

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III - Inadaptation et remises en cause.

Avant de procéder aux remises en causes qui nous intéressent, il nous faut définir quels sont les objectifs, actuellement, que doit atteindre le maillage politico-administratif français, compte-tenu des différentes évolutions que nous avons décrites auparavant.

A) - Quelle doit être la pertinence et la validité d'un cadre territorial actuel ?

A la lecture de nombreux ouvrages, et par l'observation des changements qui s'opèrent autour de nous, il est évident, a priori, que la pertinence et la validité actuelle d'un cadre territorial (commune, département, région, etc...) est de bien correspondre aux territoires pratiqués par la société civile, c'est-à-dire d'accompagner et de favoriser les dynamiques et les logiques de cette dernière. Il faut que ces cadres territoriaux (ou mailles politico-administratives) correspondent au mieux aux multiples territoires développés par les hommes, les biens et les informations, tout en tenant compte de leurs échelles géographiques respectives, afin qu'une large majorité d'entre eux s'identifient à un espace commun, facilement repérable (dans la mesure du possible).

Jean-Louis Guigou partage ce point de vue, surtout lorsqu'il déclare : "Les communes, les départements, les régions, les nations... sont des institutions qui "normalement" régissent des espaces géographiquement, économiquement et historiquement pertinents. Il devrait donc y avoir, dans un souci d'efficacité, adéquation entre la "superstructure" (l'institution) et "l'infrastructure" (l'économie réelle et l'histoire vécue des territoires). Pour construire la France de 2015, on peut retenir l'hypothèse que les circonscriptions établies en 1789 ne coïncident plus, ni avec l'histoire longue du Moyen-Age que les révolutionnaires ont voulu détruire, ni avec les bouleversements consécutifs à deux siècles de développement économique".

Partant de là, le maillage politico-administratif français est donc inadapté par rapport aux nouvelles compétences de l'État et aux processus de redistribution du pouvoir entre le national et les collectivités locales (et territoriales). Les critiques et les remises en cause que

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

nous allons développer maintenant sont ainsi significatives de cet état de fait.

B) - Trois échelles territoriales remises en cause.

"La France, qui a toujours révéré ses découpages internes historiques, constate aujourd'hui qu'ils s'adaptent de plus en plus mal aux exigences économiques, sociales, voire administratives. On déplore, selon les sensibilités et les enjeux, un découpage communal archaïque, des départements devenus trop petits et trop grands, des régions parfois sans logique, la difficulté à faire entrer dans la réalité institutionnelle des concepts tels que le "bassin de vie", les réticences à créer des territoires transfrontaliers, en un mot une forme d'exception française comme toujours aussi attachante qu'exaspérante".

Les différents reproches formulés dans ce passage soulignent bien le fait qu'ils sont issus de causes très différentes : les échelles territoriales concernées étant au nombre de trois, il est impossible d'aborder leur résolution de la même manière d'un niveau scalaire à un autre (effet d'échelle). En effet, ces trois niveaux territoriaux (ou échelles territoriales) sont maintenant chargés d'avoir une pertinence pour le citoyen, censé participer à sa gestion (cf les lois de décentralisation), dans le cadre d'une perte de pertinence (redistribution du pouvoir) du niveau national au profit des trois niveaux inférieurs. Est-ce raisonnable alors de vouloir impliquer le citoyen dans quatre niveaux à la fois (en comptant le niveau national) ?

1 - Les communes françaises.

Ainsi, par exemple, au Recensement Général de la Population de 1990 (R.G.P. I.N.S.E.E.), les communes françaises sont au nombre de 36551, ce qui faisait de la France en 1994 le pays qui possédait à lui seul autant de communes que les 11 autres pays alors constitutifs de l'Union Européenne. Ce "monument d'archéologie administrative" constitue un record qui est souvent critiqué, de nombreux pays européens ayant déjà procédé à des regroupements de leurs unités locales de base (le premier échelon de l'administration locale), le surnombre devenant ingérable.

En effet, si au 18° siècle la majorité des communes étaient polarisées par le chef-lieu, aujourd'hui ce sont, entre autres, les nouveaux équipements qui polarisent l'espace et remettent ainsi en cause les limites spatiales communales (il s'agit donc des mailles communales), qui n'ont souvent plus de sens. Ainsi, certaines d'entre elles coupent les tissus urbains d'importantes agglomérations urbaines françaises, introduisant une discontinuité là où au contraire une continuité (du bâti, par exemple) s'est développée et établie. Les communes françaises, considérées dans leur configuration actuelle, présentent ainsi aujourd'hui un maillage anachronique, où le peuplement, réduit à moins de 10 habitants parfois, leur ôte une grande partie de leur signification.

Dans cette perspective, la pertinence des cantons est elle aussi remise en cause. Ces derniers ne restent perçus qu'en milieu rural, et la représentation des conseillers généraux favorise surtout les cantons ruraux.

"Ni personnes morales, ni collectivités locales, les cantons et arrondissements n'ont pas d'assemblée et d'administration propres. Ils ont beaucoup perdu de leur importance. (...) Ces

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départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

deux unités semblent moribondes, vestiges de l'organisation de la III ème République".

2 - Les départements français.

Les départements, quant à eux, sont accusés d'être trop petits, compte-tenu notamment de la révolution des transports, ainsi que d'être trop nombreux (pour les mêmes raisons). A l'inverse, "laissant à la région son rôle régional, il peut se consacrer pleinement à son rôle de mise en solidarité des villes et des campagnes. Il doit pour cela avoir une taille plus proche

de celle de nos 329 arrondissements métropolitains. Bien des départements sont des rings ou des ménages à trois. Pau et Bayonne, Rouen et le Havre qui ont déjà chacune leur évêque, Montluçon, Moulins et Vichy et bien d'autres villes peuvent devenir le coeur d'un petit département. Après tout, le département de Belfort fonctionne très bien, et une communauté urbaine ferait double emploi avec lui".

Jean-Pierre Worms, quant à lui, cite quelques exemples qui remettent en cause la pertinence des découpages départementaux (donc des mailles départementales) : "pur artifice institutionnel de la Révolution, il ne correspond ni dans son découpage, ni dans son mode de représentation, aux réalités d'aujourd'hui. On ne compte plus les agglomérations ou les "pays" qui se sont développés à cheval sur plusieurs départements, voire sur plusieurs régions, et dont les projets de développement posent d'inextricables problèmes de coordination entre ces incontournables partenaires. Parmi beaucoup d'autres, deux exemples d'inadéquation du découpage départemental aux réalités socio-économiques du terrain :

* le "pays de Redon" est à cheval sur trois départements (Morbihan, Ille-et-Vilaine, Loire- Atlantique) et sur deux régions (Bretagne et Pays de Loire) ;

* l'agglomération de Mâcon, en traversant la Saône, passe du département de Saône-et-Loire à celui de l'Ain et de la région Bourgogne à la région Rhône-Alpes".

Dans la même logique, la banlieue (ou l'agglomération) d'Avignon se développe à cheval sur
le Vaucluse et le Gard, sur les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Roussillon.

3 - Les régions françaises.

Enfin, les régions, d'essence récente, sont souvent opposées aux autres régions européennes (cf les länder allemands) ; elles sont souvent critiquées au niveau de leur taille (trop petite parfois), d'être peu peuplées et arbitraires dans leurs regroupements de départements ainsi que dans leurs limites (leurs mailles, cf les remarques faites à l'encontre des départements). Ainsi, le Morbihan, rattaché à Rennes, regarde surtout vers Nantes ; à l'inverse, la Mayenne, rattachée aux Pays de la Loire regarde vers la Bretagne. Dans la même idée, comment se sentir appartenir à la région Centre, dont le nom et la formation ne désigne que la position géographique de cette dernière dans l'hexagone ? !!!

Ainsi, les nombreuses remises en cause du maillage politico-administratif français résultent à la fois de la modification des conceptions de l'État (et donc du pouvoir) dans la manière de gérer et de contrôler l'ensemble du territoire national, donc de l'espace socio-économique, et des modifications même de ce dernier. Les années 1960 constituent par conséquent un tournant majeur dans la logique établie depuis la Révolution Française (et même avant), où le

"Pour une remise en cause du maillage politico-administratif français ? - Exemple de la limite
départementale et régionale entre Pau et Tarbes."- Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.

développement, la gestion et le contrôle du territoire part maintenant presqu'autant du bas (du local) que du haut (de l'État). Il s'agit pour l'État (le pouvoir en place) de concilier deux logiques a priori antinomiques, celle du jacobinisme (du centre vers la périphérie) et celle du fédéralisme (de la périphérie vers le centre). Nous assistons ainsi aujourd'hui à une transition de l'une vers l'autre, transition qui s'est amorcée dans les années 1960 et qui se poursuit actuellement. L'objectif consiste donc à conjuguer (toujours a priori) ces deux formes de contrôle et de gestion de l'espace socio-économique français, et ce de la meilleure manière possible.

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