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Réformes macroéconomique et intégration par le marché dans la CEMAC

( Télécharger le fichier original )
par Michel Dieudonné MIGNAMISSI
Université Yaoundé II - DEA 2008
  

Disponible en mode multipage

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    UNIVERSITE DE YAOUNDE II

    Faculté des Sciences

    Economiques et de Gestion

    B.P. 1365 Yaoundé

    Tél.: (237) 22 21 34 41

    www.univ-yaounde2.org

    THE UNIVERSITY OF YAOUNDE II

    Faculty of Economics

    And Management

    PO.BOX 1365 Yaoundé

    Fax: (237) 22 23 79 12

    fseg@univ-yde2.org

    PROGRAMME DE TROISIEME CYCLE INTERUNIVERSITAIRE (PTCI)

    12ième PROMOTION

    REFORMES MACROECONOMIQUES ET INTEGRATION PAR LE MARCHE DANS LA CEMAC

    Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA) en Sciences Economiques

    Option : Macroéconomie Appliquée

    Spécialité : Economie Internationale

    Par MIGNAMISSI Dieudonné

    Titulaire d'une Maîtrise en Sciences Economiques

    Sous la direction de Professeur AVOM Désiré

    Agrégé de Sciences Economiques

    Avril 2008

    SOMMAIRE

    SOMMAIRE 2

    AVERTISSEMENT 3

    DEDICACE 4

    REMERICIEMENTS 5

    RESUME 6

    ABSTRACT 6

    LISTE DES SIGLES 7

    LISTE DES GRAPHIQUES 9

    LISTE DES TABLEAUX 9

    LISTE DES ANNEXES 9

    INTRODUCTION GENERALE 10

    PREMIERE PARTIE. DE L'UDEAC A LA CEMAC : LES MUTATIONS DE L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE 19

    INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE 20

    CHAPITRE 1. LE CONTENU DES REFORMES MACROECONOMIQUES ET INSTITUTIONNELLES APPLIQUEES EN ZONE CEMAC 21

    SECTION 1. DES DIFFICULTES DE L'INTEGRATION ECONOMIQUE EN AFRIQUE CENTRALE ... 21

    SECTION 2. ... A LA NECESSITE DES REFORMES EN ZONE CEMAC 27

    CHAPITRE 2. LE BILAN DES REFORMES SUR L'INTEGRATION EN ZONE CEMAC 39

    SECTION 1. LE BILAN DES REFORMES DE LA PREMIERE GENERATION 39

    SECTION 2. LES RECENTS REAMENAGEMENTS DANS LA CEMAC : LA POURSUITE DES REFORMES DE LA DEUXIEME GENERATION 46

    CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 56

    DEUXIEME PARTIE. LA CEMAC, UNE UNION MONETAIRE ATYPIQUE : LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE 57

    INTRODUCTION DE LA DEUXIEME PARTIE 58

    CHAPITRE 3. LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE ENCOURAGE-T-ELLE LE COMMERCE DANS LA CEMAC ? 59

    SECTION 1. JUSTIFICATION THEORIQUE DU LIEN ENTRE MONNAIE ET COMMERCE 59

    SECTION 2. VERIFICATIONS EMPIRIQUES EN ZONE CEMAC 67

    CHAPITRE 4. LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE INFLUENCE-T-ELLE LA SPECIALISATION DANS LA CEMAC ? 79

    SECTION 1. LE POTENTIEL COMMERCIAL DES PAYS DE LA CEMAC 79

    SECTION 2. LE DEGRE ET LA NATURE DE LA SPECIALISATION DANS LA CEMAC, UN FREIN POUR LES ECHANGES INTRA-REGIONAUX 89

    CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 99

    CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS DE POLITIQUE ECONOMIQUE 100

    ANNEXES 104

    BIBLIOGRAPHIE 109

    RESSOURCES INTERNET (WEBLIOGRAPHIE) 114

    TABLE DES MATIERES 115

    AVERTISSEMENT

    « L'Université de Yaoundé II n'entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions contenues dans ce mémoire. Celles-ci doivent être considérées comme propres à l'auteur ».

    DEDICACE

    A la mémoire de mon père, Monsieur BILITIK BELOMBE Luc, décédé l'année où je faisais mes premiers pas à l'école,

    et

    A toute la famille BELOMBE.

    REMERICIEMENTS

    Je vais commencer par remercier le Professeur AVOM Désiré, qui a accepté la direction de ce mémoire. Sa rigueur, son suivi méticuleux, ses conseils et sa disponibilité m'ont beaucoup marqués.

    Je remercie aussi tous les Professeurs de l'Université de Yaoundé II-Soa, et tous ceux qui ont assuré ma formation pendant ma spécialisation au Campus Commun des Cours à Option (CCCO) du PTCI à Niamey (Niger). Je remercie particulièrement le Dr. Daniel GBTENKOM pour ses orientations et ses conseils.

    Je ne vais pas oublier la Direction du Programme de Troisième Cycle Interuniversitaire (PTCI), pour m'avoir sélectionné dans son programme d'excellence africaine.

    J'envoie de grandes amitiés à tous les aînés de la Faculté, ainsi qu'à tous les camarades de la 12ème promotion du PTCI du campus de Yaoundé II-Soa. Je joins également tous les camarades des autres campus du PTCI.

    Je remercie également M. MBOMPIEZE Jean René, Chargé d'Etudes à la BEAC pour ses conseils et sa générosité. Je n'oublie pas la Bureau Sous-Régional de la Commission Economique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA) pour l'accès qu'elle m'a accordé dans sa documentation.

    Grand merci à toute ma famille, qui a été d'un grand apport dans ma formation et dans la réalisation de ce mémoire.

    Je remercie enfin tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à mon édification et à la réalisation de ce document, et dont les noms ne figurent pas dans cette page, mais qui se reconnaîtront. Qu'ils trouvent dans ce travail un signe de ma reconnaissance.

    RESUME

    Deux conclusions sont admises de nos jours en ce qui concerne la problématique de l'optimalité monétaire d'une zone. Il s'agit de l'endogénéité et de la spécialisation des zones monétaires optimales. L'objectif de la présente étude est d'examiner cette problématique dans la CEMAC. Elle intègre pour cela le rôle des réformes macroéconomiques et institutionnelles de la décennie 90 sur la dynamique d'intégration dans cette Communauté. Après avoir dressé le bilan des réformes, l'estimation d'un modèle de gravité dans sa version augmentée et le calcul des indices de Herfindhal et de Grubel et Lloyd (1975) ont abouti à trois résultats. Le premier montre que les réformes ont eu un impact mitigé dans la Communauté. En effet, si elles ont permis des avancées significatives sur les plans macro-financier et institutionnel, notamment en confortant la suppression de l'effet frontière monétaire, elles n'ont pas eu un impact positif sur l'intégration par le marché. Le second dévoile que la suppression de l'effet frontière monétaire dans la CEMAC n'a pas joué le rôle attendu dans l'augmentation des flux commerciaux intra-régionaux. Le troisième résultat montre que les pays de la Zone CEMAC, en dehors du Cameroun, sont spécialisés dans un petit nombre de produits. Ainsi, Ces résultats appellent à plusieurs recommandations qui débouchent au renforcement de l'indépendance de la BEAC et au développement de véritables politiques nationales d'ouverture à vocation sous-régionale.

    Mots clés : effet frontière monétaire, endogénéité, équation de gravité, intégration par le marché, potentiel commercial, spécialisation, zone monétaire optimale.

    ABSTRACT

    Nowadays, it is admitted two issues about Optimum Currency Area (OCA), in relation with market integration. These issues are OCA endogeneity and specialisation. The present study, which is dealing with these issues, include the 90 decade macroeconomic and institutional reforms and try to explain the dynamic of market integration in the CEMAC Zone. After a balance sheet concerning reforms, an augmented gravity model was estimated, and Herfindhal and Grubel and Lloyd indexes were computed. They revealed three major results. First, the 90 decade reforms have a mixed impact. In fact, if they have permitted the reestablishment of macro-monetary and financial equilibriums and boosted the institutional sector, particularly in confirming the suppression of monetary border effect, their impact was insignificant in the market integration process. Secondly, the currency union variable or the suppression of monetary border effect is dealing with market destruction in the Community. The last result shows that, apart of Cameroon, the other countries of the CEMAC Zone are specialized in few products. These results indicate at the end that, to boost market integration in this Zone, the independence of BEAC is necessary in order to follow reforms, and countries must develop real sub-regional openness policies.

    Key words: monetary border effect, endogeneity, gravity equation, market integration, commercial potential, specialization, optimum currency area.

    LISTE DES SIGLES

    AEF : Afrique Equatoriale Française

    ALENA : Alliance de Libre Echange Nord Américain

    ANIF : Agence Nationale d'Investigation Financière

    APE : Accords de Partenariat Economiques

    APER : Accords de Partenariat Economiques Régionaux

    ASEAN : Association Economique des Nations d'Asie du Sud Est

    ASS : Afrique Sub-saharienne

    BC : Banque Centrale

    BCE : Banque Centrale Européenne

    BCEAO : Banque Centrale des Etats Ouest Africains

    BDEAC : Banque de Développement des Etats de l'Afrique Centrale

    BEAC : Banque des Etats de l'Afrique Centrale

    BVMAC : Bourse des Valeurs Mobilières D'Afrique Centrale

    CEA : Commission Economique des Nation Unies pour l'Afrique

    CEEAC : Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale

    CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

    CIDT : Compagnie Ivoirienne de Développement des Textiles

    CJCE : Cour de Justice des Communautés Européennes

    CMDT : Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles.

    CO : Compte d'Opération

    COBAC : Commission Bancaire de l'Afrique Centrale

    COMESA : Marché Commun de l'Afrique Orientale et Australe

    COPAX : Conseil de Paix, de Sécurité et de stabilité de l'Afrique centrale

    COTONTCHAD : Société Cotonnière du Tchad

    FECOM : Fond Européen de Coopération Monétaire

    FMI : Fonds Monétaire International

    FODEC : Fonds de Développement de la Communauté

    FCFA : Franc de la Coopération Financière d'Afrique

    GABAC : Groupe d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale

    ICC : Indice de Complémentarité Commerciale

    ICP : Indice de Complémentarité Productive

    IDE : Investissements Directs Etrangers

    IEC : Intégration Economique Complète

    IPPTE : Initiative Pays Pauvre Très Endettés

    MC : Marché Commun

    MERCOSUR : Marché Commun du Sud

    OCA: Optimum Currency Area

    OCAM : Organisation Commune Africaine et Malgache

    OMC : Organisation Mondiale du Commerce

    OUA : Organisation pour l'Unité Africaine

    PAS : Programme d'Ajustement Structurel

    PAZF : Pays Africains de la Zone Franc

    PEAC : Pool Energétique de l'Afrique centrale

    RCA : République Centrafricaine

    RO : Règle d'Origine

    SADC : Communauté du Développement de l'Afrique Australe

    SEBC : Système Européen des Banques Centrales

    SODECOTON : Société de Développement du Coton

    SODEFITEX : Société de Développement des Fibres Textiles

    SOFITEX : Société Burkinabé des Fibres Textiles

    TCI : Taxe Communautaire d'Intégration

    TEC : Tarif Extérieur Commun

    UA : Union Africaine

    UD : Union Douanière

    UDE : Union Douanière Equatoriale

    UDEAC : Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale

    UDE-Cam : Union Douanière Equatoriale et du Cameroun

    UEAC : Union Economique d'Afrique Centrale

    UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine.

    UM : Union Monétaire

    UMA : Union du Maghreb Arabe,

    UMAC : Union Monétaire d'Afrique Centrale

    ZEP : Zone d'Echange Partielle 

    ZF : Zone Franc

    ZLE : Zone de Libre Echange

    ZMO : Zones Monétaires Optimales

    ZPLE : Zone Partielle de Libre Echange

    LISTE DES GRAPHIQUES

    Graphique 1 : Evolution des dépôts et des créances de l'administration centrale de la

    CEMAC dans les banques commerciales........................................................26

    Graphique 2 : Niveau de liquidité des banques des pays de la CEMAC.............................30

    Graphique 3 : Evolution du carré magique de la surveillance multilatérale...................34

    Graphique 4 : Evolution de l'inflation annuelle moyenne des pays de la CEMAC............40

    Graphique 5 : évolution des exportations intra-régionales de la CEMAC.........................42

    Graphique 6 : Evolution du total et moyenne (%) par pays des exportations intra-CEMAC (1994-2003).............................................................................................60

    Graphique 7 : Niveau de diversification des économies de l'Afrique 2002.......................80

    Graphique 8 : Ventilation sectorielle du PIB dans la Zone CEMAC en 2005......................81

    LISTE DES TABLEAUX

    Tableau 1 : Quelques décisions importantes non appliquées ou projets en retard.........52

    Tableau 2 : Orientation géographique des échanges du Cameroun..................................60

    Tableau 3: Résultats des estimations du modèle de gravité.............................................75

    Tableau 4 : Dotation en principales ressources des pays de la CEMAC..............................82

    Tableau 5 : Excédents des produits exportables au sein des pays africains.....................83

    Tableau 6: Résultats du potentiel des exportations des pays de la CEMAC......................87

    Tableau 7 : Résultats de l'indice de Herfindhal .....................................................................94

    Tableau 8 : Résultat de l'indice de GL appliqué aux pays de la CEMAC............................96

    LISTE DES ANNEXES

    Annexe 1 : Répartition de la population en zone CEMAC EN 2003....................................104

    Annexe 2 : Evolution de la surveillance multilatérale en Zone CEMAC...........................104

    Annexe 3 a: La dynamique de la convergence en Zone CEMAC de 1985 à 2006............105

    Annexe 3 b : Vue synoptique des résultats prévisionnels de la Surveillance Multilatérale dans la CEMAC au 31 décembre 2006........................................................................................106

    Annexe 4 : Analyse graphique du résidu des pays de la CEMAC..........................................107

    Annexe 5 : Liste des 25 pays et capitales de l'échantillon................................................107

    Annexe 6 : Tableaux des estimations extraits du logiciel EViews 3.0..............................108

    INTRODUCTION GENERALE

    La décennie 90 a été marquée par des mutations macroéconomiques et institutionnelles importantes dans le monde, et à l'actif de ces mutations, le renforcement du régionalisme. L'Afrique en général et la Zone Franc (ZF) en particulier n'ont pas été épargnées. En effet, c'est depuis la Conférence de Lagos en 1980 qu'il est entrepris un découpage de l'Afrique en cinq pôles sous-régionaux (Afrique du Nord, Afrique Australe, Afrique Occidentale, Afrique Orientale et Afrique Centrale)1(*). L'un des objectifs assignés était le renforcement du commerce intra-zone, visant à terme la formation d'un Marché Commun (MC) africain.

    Contrastant avec la montée de la mondialisation, l'intégration régionale (ou régionalisme) s'est imposée de nos jours comme un projet sérieux dans presque toutes les régions du monde. Cette initiative est entreprise en fonction des objectifs visés et des motivations spécifiques (paix, politique, commerce), mais s'est enfin avérée comme un puissant outil économique et notamment commercial.

    La théorie économique a développé plusieurs facettes du régionalisme (réelle, monétaire, politique, etc.) et a privilégié deux principaux aspects dans sa définition : statique (Marshall, 1936 ; Myrdal, 1970) et dynamique (Viner, 1951 ; Bye, 1965). Mais une définition qui semble consensuelle est celle donnée par Balassa (1961) qui considère l'intégration régionale à la fois comme un processus et un état (ou une situation). En tant que processus, elle se « réfère à l'introduction des mesures telles qu'elles tendent à l'élimination de toute discrimination entre les unités économiques appartenant aux différents Etats nationaux ». Comme situation, « elle signifie l'absence de discrimination entre les économies nationales » (Gbetnkom, 1996).

    En outre, son implémentation peut prendre plusieurs formes : l'intégration par la production, la thèse du « protectionnisme minimum », la théorie de l'intégration par des règles d'harmonisation2(*), et enfin l'intégration par le marché.

    En effet, l'intégration par le marché se définit comme l'abolition des barrières nationales dans les transactions économiques entre les Etats membres d'un bloc, afin que les facteurs de production puissent circuler librement au sein de la zone.

    Ainsi défini, le concept d'intégration régionale n'est pas nouveau, mais a connu de nos jours un regain d'intérêt suite à la création de la monnaie unique européenne en 1999, aux projets entrepris en Afrique (UA), en Amérique latine (MERCOSUR), en Amérique du Nord (ALENA) et en Asie (ASEAN)3(*). En plus sur un plan empirique, il convient à travers des outils récemment développés (modèles qualitatifs, modèles de gravité, modèles calculables d'équilibre général), de tester la pertinence de cette théorie.

    Il convient tout de même de situer les premières idées de régionalisation en Afrique dans les années 60, notamment avec la volonté des jeunes Etats de s'insérer dans le sillage du panafricanisme. Mais très vite, une léthargie s'installe au courant des décennies 70 et 80, suite à la crise économique qui a frappé les pays, qui ont préféré des solutions nationales dans la recherche des grands équilibres économiques. Et c'est finalement au courant des années 90, suite aux faits cités ci-dessus et à la globalisation croissante (création de l'Organisation Mondiale du Commerce - OMC - en 1994), que ce processus prend une ampleur sérieuse. Au sein de la Zone Franc africaine, deux Unions Monétaires (UM) se sont formées : la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC) et l'Union Economique et Monétaire Ouest Africain (UEMOA). Ainsi pour comprendre les différentes motivations, il convient de s'attarder sur le processus d'intégration économique en Zone CEMAC4(*). Un intérêt particulier sera porté à l'intégration par le marché engendrée par l'intégration monétaire et en intégrant le rôle des réformes macroéconomiques (monétaires, financières et réelles) et institutionnelles de la décennie 90.

    Le caractère atypique de cette zone, dû au fait qu'elle n'a obéit à aucune logique théorique dans sa formation, a diversifié les études qui ont un tant soit peu facilité sa compréhension. Elles sont de nature historique, commerciale et enfin monétaire. Les études historiques ont surtout concerné le processus évolutif ou séquentiel de l'intégration et montrent que trois grands temps marquent le processus : le renforcement de l'économie coloniale (1910-1958) sous l'Afrique Equatoriale Française (AEF) ; la période panafricaniste (1963-1990) ; et enfin l'étape qui va de l'Ajustement Structurel à l'insertion à l'économie mondiale (depuis la décennie 90) (CEMAC, 2004). Les études ayant trait aux aspects commerciaux tentent de capter, et ce depuis la période de l'UDEAC, l'évolution du commerce intra-zone. Les résultats montrent que ce commerce est resté non significatif5(*). Des études empiriques confirment cette tendance et montrent que la part intra-régionale du commerce total fluctue entre 4% et 6%, et parfois moins (Yondo, 1970 ; Ndo Ndong, 2000 ; Ondo Ossa, 2000). Enfin, les aspects monétaires ont surtout concerné la mesure de l'optimalité monétaire6(*) ou le rôle de la monnaie commune (le franc CFA) sur l'augmentation des flux commerciaux. Une conclusion revient le plus souvent, à savoir la non optimalité monétaire, combinée au rôle insignifiant joué par la monnaie dans l'augmentation du commerce intra-régional (Mbompieze, 1997 ; Ondo Ossa, 2000 ; Carrere, 2002 ; Eboué, 2004 ; Avom, 2005).

    Il convient tout de même de noter que dans toutes ces études, l'aspect des réformes7(*) (macroéconomiques et institutionnelles) a été plus ou moins négligé. C'est en impliquant celles-ci que la présente étude se penche sur le volet monétaire de la Zone CEMAC en relation avec le commerce.

    Ainsi, les réformes entreprises en Zone CEMAC sont consécutives à la crise économique qui a sévèrement frappé les différents pays et accentué le développement de nombreux « effets frontière8(*) », surtout au niveau infrastructurel. Cette crise a affecté les secteurs monétaire, bancaire et surtout institutionnel. Ainsi, des solutions exogènes de sortie de crise ont été proposées (Programme d'Ajustement Structurel - PAS) par les bailleurs de fonds multilatéraux (FMI et Banque Mondiale), mais sans suite concluante. C'est ainsi que les réformes de la décennie 909(*) sont apparues comme une alternative, l'une des voies suivies étant le renforcement de l'intégration par le marché. Mais quelques années après les premières réformes, le Cameroun présente toujours une propension à échanger plus élevée avec le Nigeria qu'avec tous ses partenaires de la CEMAC10(*). En outre, le taux d'ouverture intra-zone est resté négligeable, le ratio des exportations intra-zone au PIB passant de 0,73% en 1995 à 0,71% en 1996. Pendant la même période, le ratio du commerce extérieur au PIB est passé de 61,24% à 65,71% (Ondo Ossa, 2000).

    Ainsi, il convient de partir du postulat selon lequel des institutions sous-régionales adaptées aux évolutions internationales renforcent le régionalisme. C'est cette idée qui justifie les réformes, car les institutions sont appelées à vieillir. Ce constat place au centre du débat les questions des réformes macro-monétaires et institutionnelles entreprises en Zone CEMAC au début des années 90, du degré d'optimalité monétaire de cette zone, et enfin, de son intégration monétaire et commerciale, mais surtout des liens existants.

    Dans la littérature économique, l'intégration monétaire, étape de l'intégration économique, est analysée à partir de la théorie des Zones Monétaires Optimales (ZMO), domaine privilégié de l'Economie Monétaire Internationale. C'est une théorie qui a été initiée pour la première fois au courant des années 60 par Mundell (1961), secondé par McKinnon (1963) et Kenen (1969). Ils cherchent à déterminer les critères d'optimalité monétaire d'une zone, engendrant un débat sur la nature du régime de change. Très vite, cette théorie manque de consensus, vu la multiplicité des critères11(*). Tout ce débat a finalement débouché sur une conclusion majeure, à savoir le statisme des critères et donc, leur caractère exogène.

    En outre, des auteurs tels que Ishiyama (1975), Bean (1992) et Tavlas (1994), tout en restant dans la problématique sur le régime de change, adoptent une approche coûts/bénéfices d'adhésion à une UM12(*).

    Mais au courant des années 90, de nouvelles études viennent dépasser cette conclusion d'exogénéité et de statisme, pour justifier le caractère endogène des critères des ZMO. Cette nouvelle caractéristique des critères implique que l'optimalité monétaire peut devenir une réalité ex post, même si ex ante, elle n'est pas respectée (Frankel et Rose, 1998). Trois ans avant et de façon controversée, une autre conclusion s'est développée, à savoir la spécialisation des ZMO (Krugman, 1993). Ce point de vue s'explique par le fait que l'UM entraîne des phénomènes d'agglomération, ce qui conduit à une spécialisation en fonction des avantages comparatifs. Cette divergence de vues, combinée à la récente expérience européenne et aux « futures » échéances africaine (UA) et asiatique (ASEAN), remet au goût du jour la problématique des UM.

    En plus, Rose (2000) a obtenu un résultat important qui a clos le débat sur la similitude entre le régime de change et les conditions d'optimalité. Il montre que la réduction de la volatilité du taux de change même à zéro conduit à un effet moindre que l'adoption d'une monnaie unique. Il est ainsi le premier à intégrer les effets macroéconomiques des UM, notamment le commerce, les autres étant les investissements directs étrangers (IDE) et la croissance (De Sousa et Lochard, 2004 ; Lochard, 2005).

    Cette multiplicité de problématiques autour des UM ne saurait constituer une limite, mais plutôt un atout en ce qui concerne la littérature et les pistes de recherche. Elles ont évoluées au cours du temps en changeant parfois de nature. Comme le souligne d'ailleurs Kenen (2003), les premières approches relatives aux UM ne développent pas suffisamment la manière dont celles-ci influencent le commerce. Ainsi il s'agit à la lumière de ces propos, de s'inscrire dans cette nouvelle logique pour capter l'effet du Franc CFA sur le potentiel commercial des pays de la Zone CEMAC, tout en mettant un accent particulier sur les réformes macro-monétaires et institutionnelles de la décennie 90. Quelques résultats existants convergent généralement et montrent que le commerce des pays membres d'une même UM qui ont un niveau de développement comparable augmente considérablement (Rose, 2000 ; Rose et van Wincoop, 2001 ; Nitsch, 2002). Mais en Afrique, si l'effet n'est pas significatif et substantiel, il existe quand même un potentiel productif et commercial relativement élevé (Carrere, 2002 ; Avom, 2005 ; Gbetnkom et Avom, 2005 ; Gbetnkom, 2006 ; Achy, 2006 ; Agbodji, 2007).

    Ainsi, pour lever les différents « effets frontière » qui freinent considérablement le processus d'intégration dans les pays de la Zone Franc, un réaménagement des institutions a été entrepris. C'est ainsi qu'à partir de 1990, la BEAC, sous l'initiative des chefs d'Etat de la zone, a initié d'importantes réformes sur les plans macro-monétaire et institutionnel. L'objectif de ces dernières était de préserver et de consolider l'UM existante mise à mal par la crise des années 80, et les soupçons spéculatifs d'éclatement qui planaient. Les raisons des réformes et les conséquences de la crise sont nombreuses (Bekolo-Ebe, 2001a ; COBAC, 2002 ; BEAC, 2005 ; Avom et Eyeffa, 2007).

    Mais au regard des développements et des différentes problématiques ci-dessus, le questionnement à se poser dans le cadre de cette étude est le suivant :

    l'utilisation d'une monnaie unique (le Franc CFA) par les pays de la CEMAC a-t-elle considérablement augmenté les flux commerciaux entre eux ? En d'autres termes, la monnaie unique renforce-t-elle l'intégration par le marché ou contribue-t-elle à la spécialisation des pays de la CEMAC, surtout lorsqu'on prend en compte les réformes macroéconomiques et institutionnelles de la décennie 90 ?

    Cette problématique posée revêt pour la Zone CEMAC un intérêt à trois niveaux :

    v sur le plan théorique, il s'agit de porter l'analyse au-delà de la pensée traditionnelle des ZMO. La présente étude, comme celle de Rose (2000) cherche plutôt à capter l'effet de l'UM sur le commerce. L'apport qui est fondamental ici est d'abord l'approche inverse du lien entre monnaie et commerce, et ensuite l'explication du commerce régional par de nouveaux facteurs (monnaie, frontière, distance, etc.) ;

    v sur le plan méthodologique, il s'agit à partir d'une approche économétrique (modèle de gravité) et statistique (analyse graphique et indiciaire), de tester les hypothèses ci-dessous. Il convient de noter que les modèles de gravité sont parmi les meilleurs outils empiriques, vu la robustesse de leurs résultats. L'originalité à ce niveau est l'utilisation de ce modèle dans sa version augmentée de variables sociologiques, historiques et géographiques ;

    v sur le plan pratique, il s'agira de prodiguer des recommandations pouvant aider à combler le gap entre les flux commerciaux potentiels et les flux observés. Ceci pourrait aider les autorités à mieux axer la politique commerciale. En plus, il s'agira d'insister davantage sur le rôle des institutions dans le renforcement des acquis en matière d'intégration et surtout de surveillance multilatérale, gage d'une convergence. Il s'agira enfin de pouvoir évaluer le potentiel productif et commercial des pays de la sous-région, afin de mieux piloter le dossier des Accords de Partenariat Economiques.

    Ainsi, à l'heure où le projet de création d'une monnaie unique pour l'Afrique (à l'horizon 2021)13(*) est plus que jamais à l'ordre du jour, la présente étude se charge de tester, à travers les réformes macro-monétaires et institutionnelles de la décennie 9014(*), la pertinence des deux conclusions majeures de la théorie des ZMO en Zone CEMAC (endogénéité et spécialisation des ZMO). Plus spécifiquement, il s'agit de :

    (1) dresser un bilan des réformes de la décennie 90 sur l'intégration en Zone CEMAC,

    (2) capter l'effet de l'Union Monétaire sur le commerce en Zone CEMAC ;

    (3) vérifier si l'utilisation du Franc CFA a plutôt spécialisée la Zone CEMAC.

    Pour atteindre l'objectif ci-dessus, une hypothèse principale a été émise : depuis la mise en oeuvre des réformes, la monnaie unique (le FCFA) a eu un impact positif sur le commerce intra-régional dans la CEMAC. Cette hypothèse principale est éclatée en trois hypothèses spécifiques à savoir :

    H1 : les réformes macro-institutionnelles ont favorisé l'intégration en Zone CEMAC ;

    H2 : l'utilisation du Franc CFA a significativement amélioré le commerce intra-CEMAC;

    H3 : la structure de production des pays de la CEMAC détermine leur spécialisation.

    Toutes ces hypothèses seront testées par une méthodologie qui prendra deux formes et utilisera principalement deux outils empiriques (statistique et économétrique).

    Tout d'abord, en ce qui concerne le bilan des réformes, il sera fait recours à l'analyse documentaire des publications de la CEMAC, de la BEAC, de la COBAC, de la CEA et d'autres organismes connexes. Il sera aussi fait recours à l'outil statistique (graphiques) et aux articles qui ont trait aux développements des réformes.

    La mesure de l'effet de l'UM sur le commerce se fera à partir de l'estimation d'une « équation de gravité », augmentée de variables historiques, sociologiques et géographiques. Il s'agit d'une équation inspirée de la physique newtonienne qui stipule que « deux corps sont attirés en raison proportionnelle de leur masse et en raison inverse du carré de la distance qui les sépare » (Combes et al, 2005). Les premiers à l'avoir transposé en économie sont Tinbergen (1961), Pöyhönen (1963) et Linnemann, (1966). L'estimation du modèle se fera selon une technique de panel (coupe transversale) et en deux sous-périodes (pré-réformes et post-réformes) pour cerner l'hypothèse d'endogénéité. Ensuite, il faudra confirmer ou infirmer cette hypothèse par celle de spécialisation. Pour cela, la méthodologie fera recours au calcul de l'indice de Herfindhal pour capter le degré de la spécialisation, et de l'indice de Grubel et Lloyd pour cerner la nature de la spécialisation.

    Pour mener à bien cette étude, deux parties seront développées.

    La première va exposer la relance de l'intégration en Afrique centrale à la lumière des réformes macro-monétaires et institutionnelles de la décennie 90. Elle sera intitulée : De l'UDEAC à la CEMAC : les mutations de l'intégration sous-régionale, et comprendra deux chapitres : le premier chapitre va présenter le contenu des réformes, et le second va dresser leur bilan sur l'intégration en Zone CEMAC.

    La deuxième partie quant à elle va tester les deux conclusions majeures des ZMO (à savoir l'endogénéité et la spécialisation). Elle se justifie par le fait que les réformes (et ce depuis la création de la Zone Franc en 193915(*)) ayant abouti à la suppression de l'effet frontière monétaire, cette suppression peut avoir pris deux directions à savoir l'augmentation du commerce intra-zone et la spécialisation des pays. Cette partie sera intitulée : La CEMAC, une union monétaire atypique : la suppression de l'effet frontière monétaire. Pour cela, elle va intégrer la dynamique des réformes sur l'intégration par le marché en Zone CEMAC et sera aussi articulée autour de deux chapitres : le premier va porter sur l'ampleur de l'effet frontière monétaire sur l'accroissement du commerce, et le second s'interrogera si la suppression de l'effet frontière monétaire n'a pas plutôt influencé la structure la spécialisation des pays.

    PREMIERE PARTIE DE L'UDEAC A LA CEMAC : LES MUTATIONS DE L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE

    INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE

    Le constat général qui peut être fait ici est que des institutions bien solides, une population mue par l'esprit communautaire, une rigueur dans la prise et l'exécution des différentes résolutions communautaires, sont des arguments favorables à l`intégration. Ce constat en Zone CEMAC est à première vue mitigé.

    La période UDEAC, période faste, a toujours été considérée comme celle pendant laquelle les pays de la sous-région ont connus des performances économiques élevées. Mais la myopie face à une crise qui planait n'a pas empêché les chefs d'Etat à entreprendre des initiatives dépensières telles que les tournois de football, accompagnés de plusieurs festivités. Cette période a été marquée d'un manque de discipline financière, car aucune institution véritablement supranationale et contraignante n'existe. Cette situation a profondément retardé le processus d'intégration en Afrique centrale, retard conforté par la récession des décennies 80 et 90.

    La crise ayant débouché sur un enlisement économique, les bailleurs de fonds multilatéraux proposent les PAS comme solution de sortie de crise. Ces programmes visaient le redressement des équilibres macroéconomiques intérieurs et extérieurs, mais ont sévèrement sacrifié le secteur social, car elles prônaient le désengagement de l'Etat.

    Ces solutions, qui ont été inspirées de l'extérieur, n'ont pas significativement redressé la structure macroéconomique et ont négligé la relance de l'intégration sous-régionale. C'est dans cette optique qu'un vaste programme de réformes a été initié par les chefs d'Etat de la sous-région depuis le début de la décennie 90. Ces réformes avaient pour objectif de retrouver les grands équilibres macro-financiers et la redynamisation des institutions de la sous-région.

    Plusieurs secteurs de l'économie ont été concernés par les réformes, d'où leur caractère multidimensionnel. Cette partie se donne ainsi pour objectif de dresser le bilan de ces réformes (chapitre 2) tout en présentant au préalable leur contenu (chapitre 1).

    CHAPITRE 1. LE CONTENU DES REFORMES MACROECONOMIQUES ET INSTITUTIONNELLES APPLIQUEES EN ZONE CEMAC

    Dès la signature du Traité de l'UDEAC en 1964, les Etats membres optent pour la constitution d'un Marché Commun (MC). Cette option implique une série de réformes commerciales et notamment l'adoption d'un Tarif Extérieur Commun (TEC), l'élimination des barrières tarifaires et non tarifaires aux échanges communautaires, l'instauration du libre jeu de la concurrence entre les entreprises des Etats membres et la libre circulation des facteurs de production. Mais un peu plus de quatre décennies après, il apparaît intéressant d'examiner la réalisation de ces différents objectifs assignés. L'on pourrait penser au rôle joué par la monnaie commune tout en s'appesantissant sur le vaste chantier des réformes entamées depuis la décennie 90. Ces réformes visaient la restructuration des institutions usées par quatre décennies de fonctionnement et le redressement des déséquilibres commerciaux et économiques.

    Ce chapitre propose à travers une lecture synthétique des réformes, leur contenu. Il justifie la nécessité des réformes (section 2) tout en rappelant au préalable l'état de l'intégration avant la création de la CEMAC (section 1).

    SECTION 1. DES DIFFICULTES DE L'INTEGRATION ECONOMIQUE EN AFRIQUE CENTRALE ...

    La Zone CEMAC est l'une des régions au monde qui a expérimenté et qui continue d'expérimenter l'intégration économique. Mais avant sa création en 1994, l'intégration en Afrique centrale est considérée comme un échec. La présente section présente un bref historique du processus d'intégration en Afrique Centrale et s'attellera ensuite à faire une présentation de l'architecture économique de la CEMAC avant les réformes.

    1.1. BREVE HISTOIRE DE L'INTEGRATION ECONOMIQUE EN AFRIQUE CENTRALE

    A dominante monétaire et verticale16(*), l'intégration en Afrique Centrale apparaît originale en ceci qu'elle est le fruit d'une politique de gestion des chocs économiques extérieurs auxquels fait face la métropole. En outre, cette zone ne s'est pas inscrite dans une logique théorique de l'intégration telle que présentée par Balassa (1961), mais surtout a subi une intégration imposée de l'extérieur. Malgré cette caractéristique, des études montrent que la séquence suivie par les pays de la Zone CEMAC a finalement débouché sur un échec, contrairement à la séquence théorique suivie par les pays de l'UE Avom (2003). Mais qu'est ce qui a réellement amené les pays à s'intégrer ?

    1.1.1. Les grandes motivations de l'intégration en Afrique centrale

    Si en Europe l'idée d'intégration naît du souci de préservation des idéaux de paix après la période belliqueuse des années 40, en Afrique et en Amérique latine, cette idée naît de la nécessité de substituer les importations. Les pays choisissent ainsi de fédérer les potentialités productives sous-régionales (Gbetnkom, 1996).

    Sur le plan théorique, Balassa (1961) est incontestablement considéré comme le père de l'intégration économique. A la suite des travaux pionniers de Viner (1951), il admet qu'en fonction du degré de réduction et d'élimination des barrières commerciales, d'harmonisation et d'unification des politiques, le processus d'intégration passe par cinq principales phases: la Zone de Libre-échange (ZLE) ; l'Union Douanière (UD) ; le Marché Commun (MC) ; l'Union Monétaire (UM) et l'Intégration Economique Complète (IEC).

    Cet examen des étapes de l'intégration économique révèle l'intervention de la variable monétaire dans le processus d'intégration, notamment à l'étape de l'UM. La théorie économique s'est également développée dans une direction qui examine l'opportunité et l'intérêt des progrès de l'intégration monétaire. Cela est le cas en Zone CEMAC. En plus, le processus de déstructuration - restructuration a eu un impact significatif sur les pays de la zone. On assiste fondamentalement à une structuration commerciale et monétaire. Sur le plan réel, les pays sont structurés comme des fournisseurs des matières premières. Sur le plan monétaire, il s'agit pour la colonie de former un coussin de sécurité pouvant faire face aux chocs externes (déséquilibre de la balance des paiements) de la métropole. C'est ainsi que dans les années 30 et 40, la France avait créé dans chacune de ses colonies une monnaie rattachée au franc français. À la fin de la seconde guerre mondiale, les monnaies de ces colonies ont été réunies dans le franc des Colonies Françaises d'Afrique (FCFA), sa parité ayant été fixée en octobre 1948 à 50 FCFA pour 1 franc français17(*).

    Ainsi, l'intégration économique en Afrique centrale a un caractère externe à sa dynamique, c'est-à-dire suscité de l'extérieur par les métropoles. Dans cette logique, les canons d'intégration risquent d'échapper au contrôle des acteurs concernés. Ce processus pourrait ainsi être contraire aux idéaux des pays qui sont sensés être intégrés. Mais peu à peu, les pays se sentent responsables et ambitionnent de se déconnecter de la métropole.

    Les différentes motivations ayant débouché sur la spécialisation des pays de la Zone CEMAC et un renforcement de l'intégration verticale (Nord-Sud), il convient à présent de s'intéresser à la face de cette intégration avant les réformes.

    1.1.2. La nature de l'intégration avant les réformes 

    L'UDEAC avait permis quelques avancées dans la marche vers l'intégration. Avant les indépendances18(*), la Zone CEMAC est globalement regroupée au sein de l'Afrique Equatoriale Française (AEF) avec pour capitale Brazzaville, et ce depuis 1910 jusqu'en 1958. En 1959, une Union Douanière Equatoriale (UDE) est instaurée entre la RCA, le Congo et le Tchad. Deux ans plus tard, c'est le Traité de l'Union Douanière Equatoriale et du Cameroun (UDE-Cam) qui est signé, matérialisant ainsi une Zone d'Echange Partielle (ZEP). En 1961, on assiste à la signature d'une Convention réglementant les relations entre le Cameroun et l'UDE, instaurant une Zone Partielle de Libre Echange (ZLE), en l'occurrence l'UDE-Cameroun (Oussouman, 2004).

    Cette phase dite d'« intégration négative » est généralement caractérisée par la manipulation d'instruments fiscaux et tarifaires, ne nécessitant pas des institutions et des organes solides et supranationaux. C'est ainsi que plusieurs dispositions fiscales ont été harmonisées : l'impôt sur le chiffre d'affaires intérieur en 1969, l'impôt sur les sociétés en 1972, l'impôt sur le revenu des personnes physiques en 1977, l'assiette et le champ d'application de l'impôt sur les revenus de capitaux et valeurs mobilières en 1977, etc. (CEMAC, 2006b). En plus, c'est une période pendant laquelle la France détient une exclusivité commerciale et monétaire. Mais après les indépendances et ce jusqu'avant les réformes, les pays émettent des signaux endogènes de régionalisme avec notamment l'idée du Panafricanisme et de l'insertion à l'économie mondiale (notification à l'OMC en 1999).

    Sur le plan monétaire, les changes sont libéralisés et contractuels. Ceci se justifie surtout par la situation de la France qui connaît une nette amélioration économique, avec pour conséquence le relâchement de la protection de la zone19(*). Il y a une liberté totale de change à l'intérieur de la zone et une liberté partielle à l'extérieur. Au centre de cette coopération monétaire, on rencontre le principe du Compte d'Opération (CO), qui garantit ainsi le CFA quant à sa convertibilité libre et illimitée. Si ce principe est fondé sur un jeu où toutes les parties gagnent, au moins un revers est à noter : la perte de souveraineté monétaire des pays20(*). Toujours en cette période après les indépendances, on constate déjà une coordination « administrée » des politiques monétaire et financière. Dans cet élan de coopération, la France effectue des consultations périodiques sur des questions financières et monétaires ; mais surtout la Zone CEMAC en particulier et la Zone Franc en général constitue un cadre de financement préférentiel.

    Malgré tous ces dispositifs, l'intégration sous-régionale n'est pas encore véritablement effective. Certains auteurs ont déterminé les causes de cet échec. Ainsi, pour Fouda (2003), l'échec s'explique par le fait que les pays n'observaient pas les conditions préalables sine qua non. Ces conditions sont l'existence d'importantes économies d'échelle, la non exploitation à fond des spécialisations nationales, l'existence d'effets de masse critique intéressants (formation, recherche, services d'étude). Bien avant lui, Snirivasan (1993) énumérait quatre conditions qui concourent à la réussite de l'intégration : un niveau élevé des droits de douanes, l'existence d'un commerce régional substantiel avant l'intégration et d'une complémentarité dans la demande des pays, et enfin, les dotations en facteurs de production significativement différentes.

    Aucune de ces conditions n'est vraiment respectée en Zone Franc. C'est pourquoi la zone se retrouve dans une situation de coopération plutôt que d'intégration. Cet échec ne saurait être exclusivement imputable au processus lui-même, mais peut aussi trouver quelques justificatifs dans l'organisation économique et financière de l'époque.

    1.2. L'ARCHITECTURE ECONOMIQUE DES PAYS AVANT LES REFORMES

    Cette présentation se fera d'abord sur les fronts monétaire et bancaire et ensuite sur les fronts réel et institutionnel.

    1.2.1. L'organisation monétaire et bancaire

    L'influence de la métropole avant les indépendances et l'intervention de l'Etat après les indépendances sont les traits principaux des économies de la CEMAC à cette époque.

    Sur le plan monétaire, la structuration est celle d'une coopération Nord-Sud. C'est ainsi qu'en 1972, est signé à Brazzaville une Convention de coopération monétaire entre le Cameroun, la RCA, le Congo, le Gabon et le Tchad qui prévoit la création d'un Institut d'Emission commun (la BEAC). La monnaie émise par la nouvelle BC est le Franc de la Coopération Financière en Afrique Centrale (FCFA). Les pays signent également une autre Convention qui instaure la Zone Franc.

    Toutefois c'est une période où les clauses ne sont pas clairement définies. Ainsi dans les textes de 1972 de la BEAC, l'objectif final de la politique monétaire n'est pas explicitement énoncé. Mais compte tenu des facilités de financement accordées aux Trésors nationaux et aux PME nationales, il ressort que l'objectif final de la BEAC était le financement du développement. En plus, la politique monétaire était généralement définie avec l'accord de la France, les instruments étant les taux d'intérêt, les plafonds de réescompte, les réserves obligatoires et surtout le contrôle qualitatif ou sélectif du crédit21(*).

    Cet état de choses a sûrement intéressé les chercheurs. Bekolo-Ebe (2001b), partant d'un contexte de crise d'ajustement et dans une analyse critique, décrie « le statisme de la politique monétaire » qui a sévi dans la zone : crédits de campagne, fixation des côtes globales de crédit comme seul instrument quantitatif de la politique monétaire. Les plafonds globaux étaient déterminés exclusivement à partir du déficit de trésorerie communiqué par les banques et faisaient l'objet de relèvement quasi automatique par les organes de décision de la BEAC. C'est ainsi qu'ils sont passés, entre juin 1973 et juin 1987, de 59,9 milliards à 443,6 milliards de FCFA pour le court terme et de 15 à 286,3 milliards pour le moyen terme. En dépit de l'unique baisse opérée en 1988, ces plafonds ont été toujours revus à la hausse. En plus, le Compte d'Opérations qui totalisait 305,8 milliards au 31 janvier 1986, est devenu débiteur de 58,4 milliards au 30 novembre 1987. Cette évolution a eu un impact sur le taux de couverture extérieure de la monnaie qui est passé de 63,7% à 13,6%, pour un seuil minimum de 20%22(*).

    Sur le plan bancaire, il n'existe pas encore d'institutions fiables de contrôle de l'activité dans ce secteur, et même lorsque celles-ci existent, elles sont inopérantes et sans pouvoir coercitif. Le manque de données, un des obstacles majeurs, ne facilite pas la lisibilité de la réglementation, ne permettant pas ainsi l'évaluation de la santé du secteur. Les problèmes rencontrés sont généralement les suivants : non respect des normes et règles, organisation anarchique des banques, manque de diversification des services offerts, manque d'innovations financières et de facilités de traitement de l'information. En plus, l'Etat est l'acteur majeur du système bancaire (graphique 1). En fait, le haut niveau des recettes de l'Etat, justifié par la conjoncture favorable de l'époque l'amène à accroître ses dépôts. Au Cameroun, la loi prévoit que « La structure du capital social des banques doit faire apparaître la présence des intérêts publics qui ne peuvent être inférieurs au tiers des actions souscrites »23(*). Dans les autres pays et particulièrement la RCA et le Congo, ce seuil est fixé à un minimum de 51% (Avom et Eyeffa, 2007). Mais très vite, le brusque retournement de la conjoncture au milieu des années 80 va conduire à des ponctions considérables de l'Etat, entraînant ainsi un éventuel risque systémique. Ainsi, la crise des finances publiques a pour conséquence la crise du système bancaire.

    Graphique 1 : Evolution des dépôts et des créances de l'Administration Centrale des pays de la

    CEMAC dans les banques commerciales (milliards de FCFA) de 1975 à 1985.

     

    Source : Construit par l'auteur, à partir de Avom et Eyeffa (2007).

    Enfin, les créances de l'économie sont dominées par des activités d'intermédiation et de spéculation (import-export, commerce, etc.) au détriment des activités de production, génératrices de la croissance (Bekolo-Ebe, 2001b). En outre, la crise des années 80 a encouragé le désengagement de l'Etat en délaissant le secteur réel. C'est ainsi que l'on a observé des privatisations et des cessions dans le secteur des entreprises publiques.

    1.2.2. L'environnement réel et institutionnel

    Depuis les indépendances et ce jusqu'au milieu des années 80, les pays de la CEMAC ont des performances économiques louables. Malgré la conjoncture défavorable causée par les chocs pétroliers des années 70 et la détérioration des termes de l'échange, le taux de croissance se situe en moyenne au dessus des 4%.

    En outre, l'architecture productive est façonnée par la métropole de façon à favoriser son approvisionnement. Ce sont des économies peu industrialisées, peu diversifiées et principalement articulées sur la production et l'exportation de produits de base. La genèse de cette structuration se situe dans le fait que ces pays, sous l'emprise coloniale, étaient régis par le principe de la Division Internationale du Travail (DIT), la conséquence étant une spécialisation de type vertical. L'exemple de l'orientation de nombreux pays africains dans la production cotonnière illustre bien cette spécialisation de type colonial. En effet, l'organisation de la filière cotonnière en Afrique est une décision de la Compagnie Française pour le Développement des Fibres Textiles (CFDT). En 1971, se sont constituées, sur la base d'anciennes structures existantes, des sociétés nationales d'économie mixte dans lesquelles l'Etat africain intervient en partenariat avec la CFDT24(*) (Boungou Bazika, 2002).

    Cette configuration du secteur réel devient structurelle et chronique dans une absence généralisée des institutions, dont les premières ne voient le jour qu'après le vent des indépendances des années 60. Il ressort une remarque au final que la forte main mise de l'Etat et la présence de la métropole ont détourné les idéaux d'intégration au profit de la coopération. C'est ainsi que dans un souci de redynamisation du processus, une refonte généralisée des politiques et des institutions prend place au courant la décennie 90.

    SECTION 2. ... A LA NECESSITE DES REFORMES EN ZONE CEMAC

    Fragilisation généralisée des institutions, manque d'esprit communautaire, absence d'organes de contrôle et d'un cadre de concertation macroéconomique, monétaire, financière et bancaire, telle sont les signaux de l'échec de l'intégration en Zone CEMAC. Face à ce constat, une solution s'impose : les réformes initiées par les bailleurs de fonds multilatéraux.

    C'est ainsi qu'en décembre 1991, l'instance supérieure de l'UDEAC, à savoir le Conseil des Chefs d'Etats, décida à l'unanimité de donner une nouvelle impulsion au processus d'intégration sous-régionale. Le Gouverneur de la BEAC a été chargé de piloter le dossier. Les différentes expertises ont abouti à la création de la CEMAC, institution susceptible de transformer la coopération monétaire existante en une véritable UM et, d'autre part, la mise en cohérence des politiques macroéconomiques à travers la surveillance multilatérale des politiques budgétaires nationales (BEAC, 2005)

    2.1. LES REFORMES MONETAIRES, BANCAIRES ET FINANCIERES

    L'intégration en Zone CEMAC est d'abord de nature monétaire et financière. C'est la raison pour laquelle le premier souci est l'assainissement de ces secteurs. Deux principaux temps forts ont marqué le processus des réformes.

    2.1.1. La première vague des réformes

    Elle a pour but principal le recentrage du rôle de la BEAC sur l'objectif de la politique monétaire, la modernisation du cadre et des procédures d'interventions de la BEAC. Cette vague met aussi l'accent sur la réforme du dispositif de supervision bancaire et la mise en oeuvre d'un programme de restructuration bancaire et enfin, l'adoption d'une réglementation commune des changes (BEAC, 2005).

    Avant les réformes, l'environnement monétaire de la CEMAC n'est certes pas parmi les meilleurs, car les grands principaux équilibres macro-monétaires ont du mal à être respectés. C'est ainsi que l'indicateur de couverture extérieure de la monnaie passe drastiquement de 57% en 1985 à 15% en 1993 (BEAC, 2002 ; Avom et Eyeffa, op. cit.). Ces déviances constatées appellent automatiquement la réforme de la politique monétaire qui prend une optique d'inspiration libérale. C'est ainsi qu'en juillet 1991, la programmation monétaire (nationale)25(*) est adoptée dans chaque Etat membre comme cadre de définition de la politique monétaire. Sept ans plus tard (1998), les missions de la BEAC sont clairement définies. Cette première génération de réformes a aussi été ponctuée en juillet 1994 par la création d'un marché monétaire sous-régional26(*).

    Après ces réformes successives, la stratégie de politique monétaire est plus complète et lisible. Il existe désormais un cadre de formulation à travers la programmation monétaire, un objectif final de politique monétaire clairement défini dans les statuts de 1998 (stabilité monétaire). En plus, deux objectifs intermédiaires ont été retenus (crédits à l'économie et masse monétaire - M2). En outre, la BEAC dispose de trois instruments indirects pour ses interventions (refinancement à travers le marché monétaire, taux d'intérêt et réserves obligatoires).

    Le système bancaire de la CEMAC quant à lui est chaotique jusqu'au début des années 90. En effet, sur une quarantaine de banques que comptait la zone, neuf avaient cessé leurs activités et sur celles restant en activité, une seule respectait l'ensemble des normes réglementaires en vigueur ; quatorze avaient des équilibres précaires et seize étaient totalement insolvables. Ce constat a rapidement appelé les pays de la CEMAC à l'assainissement de leurs systèmes bancaires et à se doter d'un dispositif de contrôle.

    La restructuration s'est opérée en deux phases : la première concerne des mesures isolées au sein du système bancaire et a généralement abouti à un résultat peu concluant. La seconde phase implique toute la structure macroéconomique dans le processus, car une véritable restructuration ne doit plus être une action parcellaire ou isolée (COBAC, 2002). Elle vise globalement l'arrimage aux nouvelles règles mondiales définies (Bâle II), l'homogénéisation des règlementations bancaires des différents pays, la minimisation du poids des Etats, la facilitation de la sous-régionalisation des banques, le regain des activités de la microfinance (BEAC, 2005).

    Ainsi, après ces réformes, la sphère bancaire bénéficie globalement d'une instance de contrôle : la Commission Bancaire d'Afrique Centrale (COBAC). Elle va ainsi permette à la BEAC d'entamer une marche vers son indépendance tout en crédibilisant sa politique monétaire vis-à-vis du marché et de la communauté internationale. Des améliorations sont sensibles. Prenant un cas simple de comparaison statutaire entre 1972 et 1998, on note une évolution remarquable en ce qui concerne la marge d'autonomie des Autorités monétaires dans la mise en oeuvre de la politique monétaire (Avom, 2006). Par délégation du Conseil d'Administration, le Gouverneur a le pouvoir de manipuler les taux d'intérêt pour répondre à l'objectif de stabilité monétaire. En contrepartie, la BEAC a l'obligation de rendre compte de son activité et des décisions de politique monétaire. En outre, ces réformes ont permis de  définir des normes de gestion conformes aux standards internationaux, d'instituer un agrément unique pour les établissements de crédit désirant s'implanter dans plusieurs pays. Enfin, elles ont facilité une réglementation sous-régionale adaptée aux institutions de microfinance et permis de mener à bien les restructurations. Après ces réformes, tous les pays ont connu une embellie significative en ce qui concerne leur tissu bancaire (BEAC, 2005)27(*), avec des améliorations des bilans (graphique 2). C'est ainsi que l'indicateur de liquidité dans tous les pays est en moyenne supérieure à 100% (surliquidité)28(*) sur la période 1993-2003 (CEA, 2006 ; Avom et Eyeffa, op. cit.).

    Graphique 2 : Niveau de liquidité des banques des pays de la CEMAC (moyenne 1993-2003).

     

    Source : Construit par l'auteur à partir de Avom et Eyeffa (2007).

    En ce qui concerne l'harmonisation de la réglementation des changes de la CEMAC, elle a été adoptée le 29 avril 2002 par le Comité Ministériel de l'UMAC. Elle vient renforcer le dispositif de la monnaie commune et concourt au développement des transactions financières des Etats membres avec l'extérieur. Le but visé par cette réglementation est de lever toutes les restrictions aux paiements courants, conformément aux dispositions des Statuts du FMI et aux engagements auxquels les Etats de la CEMAC ont tous adhéré. Bien que la Réglementation Harmonisée des Changes relève de la tutelle du Ministère chargé des Finances dans chaque pays, le rôle de la BEAC a été renforcé en ce qui concerne certaines dispositions, notamment le rapatriement des recettes d'exportation. Pour préparer et/ou favoriser davantage l'intégration, les pays envisagent des mécanismes sains et concurrentiels de financement des économies. Et c'est sous la deuxième génération des réformes que ce chantier est entrepris.

    2.1.2. La deuxième vague des réformes

    Elle concerne principalement l'émission de titres publics à souscription libre, la création d'un marché financier régional  (projet BVMAC), la modernisation des systèmes de paiement et de règlement, la programmation monétaire sous-régionale, la mise en place d'une centrale de bilans et la lutte contre le blanchiment d'argent.

    L'émission de titres publics à souscription libre vise à favoriser l'établissement d'un marché monétaire sous régional et surtout à limiter le financement des déficits par la BEAC. Ceci permettra une relative flexibilité de la politique monétaire. Ainsi, les Etats pourront faire recours aux épargnants nationaux et étrangers pour le financement du développement (BEAC, 2005). Dans la même optique, le projet de création de la Bourse des Valeurs Mobilière d'Afrique Centrale (BVMAC) vise à faciliter le financement des économies à long terme à travers les actions et les obligations, c'est-à-dire la transformation de ressources en emplois longs. Ceci pourrait renforcer le rôle traditionnel des banques, qui préfèrent assurer des financements à court terme. La mise en place des deux structures de base du marché financier régional, à savoir la Commission de Surveillance du Marché Financier de l'Afrique Centrale (COSUMAF) relevant de l'UMAC et la Bourse des Valeurs Mobilières de l'Afrique Centrale (BVMAC-SA), suit son cours.

    La modernisation des systèmes de payement et de règlement vise une harmonisation entre les pays afin de les arrimer à la donne internationale. Le projet recouvre quatre modules, à savoir : le Système de Règlement Brut en temps réel ou système de paiement de gros montants, la Télé-compensation ou système de paiement de masse, le Système Monétique Interbancaire ou système de paiement par cartes et enfin la Centrale des Incidents de Paiement. Cette réforme qui s'inscrit en droite ligne des missions fondamentales assignées à la BEAC (articles 1er, 9 et 20 des statuts) fut lancée en 2002 et prévue pour prendre fin en 2006. Il vise principalement un développement de la base clientèle des banques avec le renforcement des paiements scripturaux, un accroissement du taux de bancarisation de 3% à 10% d'ici 200929(*), un renforcement de l'intégration financière des économies de la CEMAC et des mécanismes de transmission de la politique monétaire.

    Le projet de la programmation monétaire sous-régionale30(*) est apparu comme une continuation et une harmonisation de cette programmation déjà implémentée sur le plan national. Ainsi, les évolutions macroéconomiques régionales doivent être incorporées dans les anticipations de la BEAC en matière de politique monétaire31(*).

    La mise en place d'une centrale de bilans constituera un outil d'informations économiques à la disposition des agents économiques et des investisseurs. Cette réforme ne pourra être bénéfique que dans un contexte de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Dans cette optique, le Groupe d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale (GABAC) a été créé par un Acte additionnel au Traité de la CEMAC en 2000. Un Règlement, portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme a été adopté le 4 avril 2003 et mis en vigueur. Il ne reste plus qu'à créer dans chaque Etat membre une unité de renseignement financier, dénommée Agence Nationale d'Investigation Financière (ANIF) qui sera rattachée au Ministère en charge des Finances.

    L'intégration étant un tout, et donc impliquant certains aspects réels et structurels de l'économie, il convient à présent de voir le volet macro-institutionnel des réformes.

    2.2. LES REFORMES REELLES ET INSTITUTIONNELLES

    Il convient dans un premier temps de présenter les réformes réelles et dans un second temps, les réformes institutionnelles.

    2.2.1. Les réformes réelles

    Elles comprendront un volet macroéconomique et un volet fiscalo-douanier.

    Les réformes macroéconomiques visent principalement la coordination des politiques et leur mise en cohérence avec la politique monétaire commune, en vue de tendre vers un bon « policy-mix »32(*) des pays de la CEMAC. Ces réformes sont pilotées à travers la mise en place du dispositif de surveillance multilatérale et l'adoption des critères de convergence.

    Les indicateurs de la surveillance multilatérale permettent de porter un diagnostic plus complet sur l'évolution économique et financière d'un Etat membre. Il s'agit de critères indicatifs devant faire l'objet d'un suivi rigoureux du fait du rôle déterminant qu'ils jouent dans la réalisation de l'objectif de viabilité interne et externe des économies. On distingue trois types d'indicateurs : les indicateurs généraux de performance (taux de croissance du PIB réel, taux de couverture extérieure de la monnaie, ratio du compte courant, avoirs extérieurs bruts, taux de pression fiscale) ; les indicateurs analytiques (ratio du taux d'investissement au PIB, ratio de la masse salariale et des recettes budgétaires totales hors dons, suivi de la compétitivité et des performances extérieures) ; les indicateurs de politique économique (suivi de la politique budgétaire et de la politique monétaire) (extrait de : www.beac.int).

    La définition de ces critères montre encore des limites du fait de leur nombre élevé et du manque de normes coercitives. Pour corriger ces lacunes, le Comité Interministériel de la Zone Franc, réuni à Douala en 2001 a défini ce que l'on appelle les critères de convergence. Sans trop s'écarter de la logique européenne33(*), quatre critères sont définis à savoir :

    § le ratio du solde budgétaire de base hors dons au PIB nominal (positif ou nul) : ce critère mesure la capacité de l'Etat à couvrir avec ses ressources propres l'ensemble de ses dépenses courantes, financées sur ressources internes ;

    § le taux d'inflation annuel moyen (inférieur ou égal à 3%) : ce critère vise essentiellement à minimiser les écarts d'inflation entre les pays en vue d'éviter un désalignement des taux de change réel ;

    § le ratio de l'encours de la dette intérieure et extérieure au PIB nominal (inférieur ou égal à 70%) : ce ratio permet de contrôler le problème d'endettement excessif des Etats, aux conséquences macroéconomiques néfastes (perte de crédibilité de la politique budgétaire et défiance des marchés, poids exorbitant des intérêts, monétisation des déficits, impact sur les réserves de change, etc.) ;

    § les arriérés de paiement intérieurs et extérieurs (non accumulation) : le respect de ce critère exige la non accumulation d'arriérés sur la gestion de la période courante. Ce critère est guidé par le souci d'assainir le circuit de financement des économies, de préserver la viabilité des systèmes bancaires et de restaurer la crédibilité des Etats auprès de la Communauté financière internationale.

    Le non respect de ces critères expose à des sanctions, notamment le critère du ratio budgétaire hors dons au PIB nominal.

    Les évolutions récentes de ces critères sous forme de carré magique sont résumées dans le graphique ci-dessous. Ainsi, la convergence du point de vue globale est appréciable en Zone CEMAC. Il convient de noter, au delà du critère monétaire (taux d'inflation) régi par la politique monétaire commune, des évolutions sensibles au niveau des autres indicateurs de dépenses, qui sont majoritairement guidé par la seule volonté des Etats.

    Graphique 3 : Evolution du carré magique de la surveillance multilatérale (2002-2006).

     

    Source : Extrait de CEMAC (2006a).

    Dans une perspective dynamique, il est prévu que cet exercice soit apprécié dans le cadre des Programmes Triennaux de Convergence qui doivent être mis en place dans les Etats membres. Mais la caractéristique de ces réformes est l'existence d'une batterie d'indicateurs multilatéraux de surveillance, critères de second ordre34(*).

    Afin de lisser le sentier conjoncturel en Zone CEMAC qui a connu une embellie en 1994-1997 suite à la dévaluation, et un ralentissement en 1998-1999 dû aux politiques des institutions de Betton Woods, les chefs d'Etat réunis à Malabo en juin 1999 élaborent un Programme de Redressement Economique et Financier (PSR). Ce programme, confié à la BEAC, vise principalement à restaurer les grands équilibres et à renforcer les structures économiques et financières des pays membres afin de promouvoir une croissance saine et soutenue. A cet effet, il met l'accent sur les axes de politique économique jugés essentiels à la réalisation de ces objectifs, tout en privilégiant les actions de portée régionale, dans une matrice de 20 mesures35(*). Cela nécessite l'implication de toutes les parties à savoir les Etats, la CEMAC, la BEAC, la COBAC, notamment à travers un rapport régulier de la Banque Centrale au Comité Ministériel de l'UMAC. L'évaluation du PSR en 2006 a fait ressortir des avancées significatives36(*).

    En ce qui concerne le secteur fiscalo-douanier, les réformes ont été entreprises depuis le lancement de l'UDEAC, car l'une des missions assignées était l'instauration d'une zone de libre échange, première étape théorique du processus d'intégration économique. Tout commence en 1959 avec l'instauration d'une union douanière, dénommée Union Douanière Equatoriale (UDE). Elle a été suivie deux ans plus tard du Traité de l'Union Douanière Equatoriale et du Cameroun (UDE-Cam), marquant ainsi l'insertion de ce dernier dans la zone. Ce Traité matérialise dans un premier temps une zone d'échange partielle, visant à terme une zone de libre échange, l'objectif étant la suppression progressive des barrières douanières.

    Tous ces mécanismes fiscalo-douaniers n'ont pas montré des résultats satisfaisants, et c'est l'une des causes de l'échec de l'intégration dans cette sous-région. Ainsi, les réformes de la décennie 90 n'ont pas épargné le renforcement de ces mesures. En 1991, les pays adoptent une Plate Forme Régionale de Réformes sur le cordon douanier et le régime de transit inter-Etats. Trois ans plus tard, la réforme fiscalo-douanière entre en vigueur. Elle avait pour but de définir une plate-forme minimale de mesures fiscales et douanières communes à prendre par les Etats membres pour parvenir à la suppression progressive des barrières tarifaires et des restrictions quantitatives aux échanges. Ce programme s'articulait autour de trois volets : les transports, le secteur financier et la fiscalité (CEMAC, 2006b). En 1997, les règles d'origine37(*) sont redéfinies suivi de l'adoption d'une charte communautaire de l'investissement. L'année 1998 marque la libéralisation totale du Commerce des Produits Originaires et l'élimination du Tarif Préférentiel Généralisé.

    2.2.2. Les réformes institutionnelles

    Le diagnostic montre que les réformes dans le secteur des institutions en Afrique centrale ont été nécessaires. Elles concernent essentiellement la transformation de l'UDEAC en CEMAC, c'est-à-dire le passage d'une situation de coopération à celle de l'unification des politiques économiques des pays de la Zone.

    Ainsi, le 6 décembre 1991, les chefs d'Etat de l'UDEAC chargèrent la BEAC, le Secrétariat Général de l'UDEAC, la BDEAC, les Etats membres et la France de piloter le dossier de l'intégration de la Zone. Ces différentes parties ont proposé la consolidation des acquis, la création de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) prévue en 1994. Elle est articulée sur l'harmonisation des règles et des normes dans certains domaines clés de la politique économique. En outre, les Conventions régissant l'UMAC et l'UEAC qui sont annexées au Traité ainsi que l'Additif au Traité relatif au système institutionnel et juridique de la Communauté, sont à leur tour signés le 5 juillet 1996 à Libreville. Enfin, le 25 juin 1999 à Malabo, les Chefs d'Etat proclamèrent l'entrée en vigueur de la CEMAC (BEAC, 2005).

    Mais aujourd'hui, la priorité doit être accordée au renforcement des institutions déjà existantes. C'est dans ce sens que le Programme de Réformes Institutionnelles (PRI) qui doit couvrir l'échéance 2006-2008 a été défini par la Conférence des Chefs d'Etat. L'objectif visé est un réaménagement institutionnel renforçant la cohérence et le poids du dispositif communautaire : le rôle et les pouvoirs des instances communautaires doivent être renforcés, leur indépendance mieux assurée et de véritables mécanismes d'injonction et de sanction mis en place. Ainsi, au niveau de la CEMAC, il paraît plus opportun de se doter d'une Commission en lieu et place du Secrétariat Exécutif. Selon le Cabinet d'audit Performances Management Consulting - ECDPM, il serait souhaitable que la décision de transformation du Secrétariat Exécutif en Commission soit prise dès que possible avec une phase de transition de deux ans permettant de réaliser quelques réformes essentielles requises pour assurer le bon fonctionnement de la future Commission (CEMAC, 2006b).

    Enfin, les Etats décident de créer le Programme de Réformes Institutionnelles (PRI) de la CEMAC pour la période 2006-2008 comportant cinq (05) axes et une feuille de route : des initiatives fortes des Etats Membres pour marquer leur engagement ; l'instauration de nouveaux modes de fonctionnement générateurs de confiance ; un réaménagement institutionnel renforçant la cohérence et le poids du dispositif communautaire ; le renforcement des capacités du Secrétariat Exécutif ; le renforcement des dispositifs nationaux liés aux questions communautaires (CEMAC, 2006b). Ainsi, la mise en oeuvre du PRI suppose le rééquilibrage de l'exécutif des institutions communautaires, le plan de renforcement des capacités du Secrétariat Exécutif (ou création de la Commission). En plus, il est prévu l'élaboration conjointe par le Secrétariat Exécutif de la CEMAC, la BEAC et la BDEAC, d'un programme économique régional et un plan d'autonomisation des institutions spécialisées. En outre, il est prévu un plan de renforcement des autres institutions communautaires (Cours de Justice, Parlement), la mise à jour des textes de la CEMAC et enfin la mise en place de la Commission de la CEMAC.

    Tel est le vaste programme des réformes institutionnelles qui attend les organes de la CEMAC. L'urgence est donc signalée, vu le calendrier et les échéances qui menacent.

    CONCLUSION DU CHAPITRE 1

    Les réformes entreprises en Zone CEMAC depuis la fin des années 80 sont considérées comme une solution à l'étranglement du processus d'intégration dans ladite zone. Depuis le lancement du processus de l'intégration avec la création de l'UDEAC en 1964, aucune mission principale assignée n'a été atteinte, du moins totalement. Dans ce chapitre, il a été question de présenter les réformes entreprises aux plans économique et institutionnel. Deux enseignements se sont tout de même dégagés : tout d'abord, l'environnement économique et institutionnel en Afrique centrale avant la décennie 90 n'émet aucun signal favorisant l'intégration ; ensuite, l'antidote à cette situation a été le chantier des réformes, majoritairement orientées dans les secteurs monétaire, bancaire, macroéconomique et institutionnel.

    Mais très vite, ces réformes s'avèrent limitées, ce qui a appelé la deuxième génération des réformes (Programmation monétaire sous-régional, marché monétaire sous-régional, renforcement de l'indépendance de la BEAC, avec la création de trois nouvelles Directions et du Comité de politique monétaire) majoritairement appliquées pendant la décennie 2000. Ces réformes ont conduit à assurer la stabilité monétaire, à assainir le tissu bancaire et à redresser certains équilibres macroéconomiques. Il ressort au final que le renforcement de l'intégration nécessite la poursuite de ces réformes. Le chapitre qui suit s'atèle à dresser de façon plus complète le bilan des réformes sur la dynamique de l'intégration par le marché en zone CEMAC.

    CHAPITRE 2. LE BILAN DES REFORMES SUR L'INTEGRATION EN ZONE CEMAC

    Une simple présentation des réformes appliquées en Zone CEMAC à première vue ne montre en rien leurs retombées et n'épuise pas totalement la question quant à leur pertinence. Mais une observation analytique et même l'option de ces réformes38(*) pourrait déceler quelques informations en ce qui concerne l'intégration.

    Il convient de rappeler que la deuxième génération des réformes qui a été exposée dans le chapitre 1 ci-dessus naît des contestations de certains pays de la Communauté tels que la Guinée Equatoriale. Cette dernière réclame notamment la rotation dans l'attribution des postes exécutifs dans les institutions sous-régionales, surtout au niveau de la BEAC et de la CEMAC, depuis lors occupées par le Gabon et le Cameroun respectivement.

    Loin d'une justification des fondements théoriques des réformes, ce chapitre présente dans une approche bilan l'impact des réformes de première et de deuxième génération sur le processus d'intégration en Zone CEMAC. Il s'agira ensuite de souligner la nécessité de la poursuite des réformes de la deuxième génération à travers les récentes mutations opérées au sein de la Communauté.

    SECTION 1. LE BILAN DES REFORMES DE LA PREMIERE GENERATION

    Les réformes de la première génération ont surtout ciblés les secteurs monétaires et bancaires et n'ont par conséquent pas influencé significativement la problématique de l'intégration.

    1.1. UN BILAN MITIGE

    Le bilan des réformes peut être qualifié de mitigé, car les résultats sont différents selon qu'elles concernent les équilibres macro-financiers et les aspects de l'intégration.

    1.1.1. Une stabilité monétaire et un renforcement du dispositif financier et bancaire

    Hormis la dévaluation de 1994, la Zone CEMAC a fait preuve de stabilité sur le plan monétaire. En outre, les taux d'inflation ont été parmi les plus faibles comparativement aux autres régions en développement. Ces deux éléments constituent une preuve de crédibilité de la politique monétaire. Cette crédibilité repose à son tour sur trois éléments essentiels du cadre institutionnel : la fixité de la parité du taux de change, la convertibilité du FCFA et l'existence d'une UM (BEAC, 2005). La convertibilité illimitée du FCFA en franc français et maintenant en euro est une fois de plus l'un des arguments de la stabilité monétaire en Zone CEMAC. La stratégie adoptée ici est l'ancrage sur une monnaie internationale crédible et donc épargnée de la décote.

    En plus la politique de change en Zone CEMAC est la fixité de la parité par rapport au franc français et depuis 1999, à l'euro. Cette politique se justifie par le fait que certains pays peuvent vouloir maintenir à un bas niveau la valeur du taux de change pendant que d'autres préfèrent la fixer à un niveau haut. Cette politique dépend au final des objectifs dans les relations commerciales des pays. Ainsi, pour une zone comme la CEMAC caractérisée par un poids commercial négligeable, l'option optimale aurait été la première, c'est-à-dire le maintien de la valeur de la monnaie à un niveau faible. Mais cette situation n'est profitable que si les pays possèdent une base consistante de produits exportables.

    Graphique 4 : Evolution de l'inflation annuelle moyenne des pays de la CEMAC (1985-2006).

     

    Source : Construit par l'auteur à partir de Administrations Nationales, BEAC, FMI

    La stabilité monétaire se justifie une fois de plus à travers la création d'une UM en Zone CEMAC. Ce processus prend ses racines depuis l'époque coloniale à travers la création de la ZF et s'est renforcé tout récemment avec la création de la CEMAC. Cette situation se justifie généralement par le principe du compte d'opération. L'évolution se justifie ainsi à travers le passage de la Zone Monétaire à l'Union Monétaire (UMAC), entraînant des taux d'inflation bas. Malgré le pic moyen de 36,26% observé en 1994 et justifié par la dévaluation de la même année (graphique 4), les pays de la CEMAC sont considérés comme des exemples en matière des taux d'inflation bas.

    Ainsi, le bilan des réformes monétaires ne vient que donner une embellie au processus d'intégration de ce secteur. En outre, les autres critères de convergence semblent confirmer l'élan donné par le critère monétaire (annexe 3-a).

    Tout ce dispositif a été appuyé par un assainissement du dispositif bancaire et financier à travers la création de la Commission Bancaire d'Afrique Centrale (COBAC) et de la Bourse des Valeurs Mobilières d'Afrique Centrale (BVMAC). Mais qu'en est-il du bilan des réformes sur les échanges intra-zone ?

    1.1.2. Au niveau des échanges intra-sous-régionaux

    Hormis la stabilité monétaire, le bilan de l'intégration en Afrique centrale est globalement non concluant. Sur le plan commercial, le volume des échanges intra-régionaux n'est estimé qu'à environ 5%39(*) du commerce extérieur officiel40(*) (BEAC, 2005). Comparativement aux autres zones d'intégration, la CEMAC apparaît comme la zone la moins intégrée sur le plan commercial. D'ailleurs, ce constat a été souligné lors du dernier Sommet Interministériel de l'UEAC tenu à Yaoundé en décembre 2007.

    De façon Générale, le degré d'ouverture des pays de la Zone Franc (PAZF) est élevé41(*). Mais il apparaît néanmoins que les PAZF commercent très peu entre eux, le ratio des exportations intra-zone au PIB étant très faible, ce qui implique une faible explication de la création des richesses par le commerce intra-zone. Ces pays ne peuvent donc de ce fait constituer une ZMO au sens de McKinnon. Prenant spécifiquement le cas de la CEMAC, le taux d'ouverture intra-zone est évalué à 0,73 en 1995 et à 0,71 en 1996 (Ondo Ossa, 2000).

    Sur une perspective de moyen terme, l'évolution de la part du commerce intra-CEMAC des pays dans leur total mondial montre que le Cameroun occupe la quasi-totalité des exportations intra-zone malgré un sentier non régulier (graphique 5). Il convient tout de même de noter une embellie après la signature du Traité de la CEMAC de presque tous les pays, l'essoufflement s'étant ressenti à partir de 1999, date d'entrée en vigueur de la CEMAC.

    Graphique 5 : Evolution des exportations intra-régionales de la CEMAC en milliers de FCFA.

     

    Source : Construit par l'auteur à partir de CEA (2006).

    La lecture du graphique montre un saut quantitatif du Cameroun en 2003, présomption d'une nouvelle dynamique de l'intégration par le marché. Le constat est le même pour tous les autres pays, mais l'évolution est restée négligeable.

    Il serait accessoire de limiter le bilan des réformes à la sphère économique et commerciale seulement. Il faut aussi tenir compte des institutions et de la population qui peuvent jouer un rôle important dans le processus d'intégration de la zone.

    1.2. L'INERTIE DES INSTITUTIONS ET LE MANQUE D'ESPRIT COMMUNAUTAIRE

    Deux blocages majeurs constituent des entraves au processus d'intégration en Zone CEMAC : le non respect des mécanismes de financement et le manque d'esprit communautaire. En effet l'expérience a montré que la Taxe Communautaire d'Intégration (TCI)42(*) recouvrée est généralement en deçà des attentes. Cette situation justifie la faiblesse du budget du Secrétariat Exécutif, frein au bon fonctionnement des institutions. A titre d'exemple, seuls 19% de la TCI ont été reversés en 2002, 41% en 2003 et 37% en 2004. Les arriérés ont quadruplé en trois ans, passant de 8,2 milliards en 2002 à 32,8 milliards en octobre 200543(*) et 61,7% de ces arriérés seraient imputables au Cameroun44(*). Au cours des années 2003 et 2004, les meilleurs élèves ont été le Congo, la RCA, la Guinée Equatoriale (100% de TCI reversée), le Tchad ayant fait un faux pas en 2004 avec seulement 14% de TCI reversée. Le Cameroun et le Gabon, les deux plus gros contributeurs de la zone, se sont avérés être les mauvais élèves. En 2003, le Cameroun n'a reversé que 1,5 milliard sur les 6,5 milliards collectés et le Gabon 1,2 sur les 3,8 milliards, soit respectivement 23% et 31% ; en 2004, le Cameroun n'a reversé que 2,6 milliards sur les 8,2 milliards collectés et le Gabon, 0,7milliard sur les 3,6 milliards, soit respectivement 32% et 19% (CEMAC, 2006b).

    1.2.1. Les goulets d'étranglement au niveau des institutions

    La faiblesse des institutions en Zone CEMAC peut être soulignée à cinq niveaux :

    v le premier concerne la répartition actuelle des postes de responsabilités au sein des institutions, débouchant déjà sur la méfiance et les frustrations. Les principes considérés comme des facteurs-clés de succès (indépendance des institutions communautaires, compétence des responsables, équité voire égalité entre les Etats membres et rotation dans les postes de responsabilité) ne sont pas appliqués45(*) ;

    v en second lieu, on pourrait noter l'incohérence du dispositif institutionnel de la CEMAC au regard de l'ambition de construction d'une véritable Union. Ce manque de cohérence se manifeste principalement par : un outil institutionnel inadapté aux ambitions d'une Union ; le poids politique insuffisant des institutions ; la synergie insuffisante entre les institutions communautaires notamment entre le Secrétariat Exécutif, la BEAC et la BDEAC dans la mise en oeuvre des programmes communautaires ; le manque de cohérence des institutions spécialisées par rapport au dispositif global ;

    v le troisième problème est relatif à l'insuffisance des capacités du Secrétariat Exécutif. Les dernières réformes plaident en faveur du renforcement du dispositif communautaire tout en reléguant au second plan les aspects humains et financiers accompagnant ce renforcement ;

    v un quatrième goulot serait le manque d'appropriation de la Communauté par les Etats membres. Ainsi, les dispositifs nationaux chargés de suivre l'application des dispositions communautaires sont parfois inexistants ;

    v enfin, on pourrait souligner le déficit de bonne gouvernance. Ce diagnostic renvoie à la problématique du nécessaire approfondissement de la gouvernance de la CEMAC, qui doit reposer sur trois socles à savoir : une meilleure application des principes de bonne gouvernance qui s'imposent à toute institution publique ; un accord sur un nombre de règles de bonne gouvernance spécifiques à une organisation d'intégration régionale et enfin la légitimité de la CEMAC aux yeux des citoyens (CEMAC, 2006b).

    Il ressort au final que ces différents goulets entravent considérablement le sentier de l'intégration en Afrique centrale, qui a pris du retard sur d'autres blocs régionaux.

    1.2.2. L'expérience de quelques sous-régions : l'UE et la CEDEAO / UEMOA

    Ce paragraphe se justifie par le fait que l'UE constitue un exemple d'intégration sans précédent dans le monde ayant suivi les étapes théoriques et que l'UEMOA, qui a presque les mêmes caractéristiques que la CEMAC, évolue plus vite.

    Le modèle européen, modèle théorique, a suivi les étapes préconisées par Balassa en 1962. Depuis la signature du traité de Rome en 1957, des avancées remarquables ont été notées. En ce qui concerne l'augmentation du commerce intra, il est passé de 30% dans les années 60 à plus de 60% de nos jours (Boungou Bazika, 2002).

    Rappelant les deux principaux débats autour de l'intégration économique46(*), Avom (2003) dans une étude comparative entre l'UE et la CEMAC se pose la question de savoir si l'intégration monétaire doit-elle ou non précéder l'intégration réelle. Retraçant les itinéraires des deux sous-régions, il montre que le cas européen a débouché sur un succès. Ainsi, de la création de la Communauté Economique du Fer et de l'Acier (CECA) en 1951 à la signature du Traité de Maastricht en 1992, les pays de cette sous-région ont eu le souci du respect des étapes théoriques.

    En ce qui concerne la ZF née à la fin des années 30 des suites de la crise de 1929, la séquence a été l'inverse. Certains auteurs s'accordent et concluent que le cas européen, qui a suivi un processus théorique s'oppose au cas de la ZF par ses résultats. Mais quelque soit l'agencement des séquences, l'une ou l'autre forme d'intégration doit être suivie par l'autre pour éviter la statisme du processus (Avom, 2003).

    Le dispositif institutionnel de l'UE a fait l'objet d'un zoom particulier. Il repose sur un savant équilibre entre intérêts nationaux et intérêt commun. Au nom du second, les Etats ont accepté de transférer de larges parts de leur souveraineté à l'Union, dans laquelle des institutions autonomes jouent un rôle essentiel. En outre, quelques règles47(*) de nature coutumière régissent la nomination du Président de la Commission Européenne. En plus pour un souci de cohérence, la Présidence du moment est assistée de celle qui l'a précédée et de la suivante, de façon à assurer la continuité du traitement des dossiers. Au niveau de la Banque Centrale Européenne (BCE), le directoire est composé de six personnes, ce qui fait l'organe le plus fédéral de l'Union, puisque tous les Etats n'y sont pas « représentés ». Ils sont nommés pour un mandat de huit ans non renouvelables, ce qui renforce leur indépendance (CEMAC, 2006b).

    Le cas de l'UEMOA (et de CEDEAO) est encore remarquable, car elle est souvent considérée comme la jumelle de la CEMAC. Le Secrétaire Exécutif de la CEDEAO48(*) est nommé par compétition ouverte, pour un mandat de quatre ans renouvelable une fois. Ainsi, depuis 1975, date de création de la CEDEAO, quatre nationalités différentes (Côte-d'Ivoire, Sierra Léone, Guinée et Ghana) sont déjà passées aux commandes. Au niveau de l'UEMOA, Le principe de la nomination du Président de la Commission est la rotation des pays (4 ans renouvelables). Il est choisi par les Chefs d'Etat parmi les Commissaires désignés par les Etats. La BCEAO n'est pas en reste. Il suffit de voir son effort de crédibilisation de la politique monétaire, sans oublier l'indépendance instrumentale et politique dont jouissent ses membres.

    Ainsi, la Zone CEMAC présente encore des faiblesses en ce qui concerne son organisation institutionnelle et organique. Des efforts sont recommandés notamment au niveau de la rotation, la concurrence et l'équilibre par rapport aux pays et au genre dans l'occupation des postes étant souhaités.

    SECTION 2.  LES RECENTS REAMENAGEMENTS DANS LA CEMAC : LA POURSUITE DES REFORMES DE LA DEUXIEME GENERATION

    Les constats marquant le frein au bon fonctionnement des organes de la CEMAC ont été soulignés dans la section précédente. La présente section justifie le souci des autorités sous-régionales de relancer véritablement le processus d'intégration à travers les récents réaménagements opérés.

    2.1. LA REDYNAMISATION DES PRINCIPALES INSTITUTIONS

    Malgré les réformes de la décennie 90, certaines institutions se doivent d'évoluer dans leur organigramme afin de répondre aux préoccupations actuelles. Parmi les institutions les plus importantes, il convient de citer en premier lieu la BEAC et le Secrétariat Exécutif de la CEMAC.

    2.1.1. La BEAC : comment renforcer son indépendance et réorienter ses missions ?

    Les Banques Centrales ont acquis un rôle de premier plan parmi les institutions publiques aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement. Aux Etats-Unis par exemple, la Réserve Fédérale est devenue l'institution la plus puissante pour agir sur la conjoncture et préserver la croissance, ralentir l'entrée en récession ou accélérer sa sortie. En Europe, le Système Européen des Banques Centrales (SEBC) apparaît depuis le Traité de Maastricht en 1992, comme la seule institution véritablement puissante, en dépit du Pacte de Stabilité signé en 1997, pour engager la convergence des politiques économiques à l'intérieur de l'Union (Eboué, 2006)49(*). Enfin, la Zone UEMOA avec la BCEAO est de nos jours entrain de se démarquer.

    Comme la BCEAO, la BEAC est la principale institution menant les réformes en ce qui concerne les problèmes de convergence et d'intégration régionale en Zone CEMAC. Ainsi, son rôle dans le chantier des réformes aurait été plus significatif si lors de décennies passées, elle était exonérée des influences politiques et arrimée à la donne contemporaine.

    Théoriquement, les questions actuelles en ce qui concerne les BC tournent autour de leur indépendance et la crédibilité de la politique monétaire50(*). Ainsi, depuis Rogoff (1985) et Mc Callum (1988, 1995), la question de l'indépendance des BC est l'un des enjeux de la recherche de l'efficacité de leur action. Kydland et Prescott (1977), prix Nobel d'économie en 2004, ont porté un grand intérêt sur la question de l'indépendance des BC. Cherchant à définir les conditions de réussite d'une bonne politique monétaire, ils concluent au fait qu'une politique monétaire ne doit pas être liée à la conjoncture politique, voire aux échéanciers électoraux : seule cette condition permet à la BC d'éviter l' « incohérence temporelle ». A la suite de Kydland et Prescott (1977), Barro et Gordon (1983) attribuent cette « incohérence temporelle » au choix (faible engagement) des autorités monétaires, car elles sont enclines à l'arbitrage entre l'inflation et le chômage. A court terme, elles ont le souci de résorber le chômage et à long terme, elles sont amenées à favoriser la stabilité des prix (Eboué, 2004).

    Au final, une BC devrait, pour conduire une politique monétaire crédible, être déconnectée de toute conjoncture politico-monétaire, comme le constate Fouda (1997) dans le cas de la Zone BEAC. En plus, elle doit avoir une indépendance aussi bien institutionnelle, opérationnelle que financière (ou budgétaire)51(*) (Avom, 2006).

    Le cas de la zone monétaire BEAC révèle toujours des paradoxes. Fouda (1997) montre qu'il existe des cycles politico-monétaires au sein de la zone bien qu'on souligne une évolution en ce qui concerne le degré d'autonomie de la BEAC. Ce degré est cerné à partir d'une étude comparative entre les statuts de 1972 et ceux de 1998 (Avom, 2006)52(*). Il est clairement démontré que les réformes au niveau monétaire ont connu des évolutions sensibles, et les toutes dernières mutations viennent soutenir cet élan.

    En effet, le huitième Sommet des chefs d'Etat de la CEMAC tenu à N'djamena le 25 avril 2007 a procédé au changement du Gouverneur de la BEAC. Le nouveau Gouverneur a été nommé suite à un Acte Additionnel lors de la même Conférence53(*). Malgré le statisme dans la rotation (déjà noté), quelques innovations sont quand même à souligner : élargissement du gouvernement de la Banque, avec la création de trois postes de Directeurs Généraux et de trois nouvelles Direction Centrales. Ceci permet le passage de neuf à douze du nombre de Directions Centrales54(*).

    Lors du même sommet, la Banque de Développement (BDEAC) par la voie de son Président a présenté à son tour un bilan. Ce dernier fut axé sur l'expansion des opérations de financement des projets de développement, l'intense activité de mobilisation et de drainage des ressources financières vers la sous-région et enfin la dynamisation de la coopération avec les partenaires au développement. Suite à ce bilan élogieux, le Vice-Président de cette institution a été confirmé.

    2.1.2. La nécessité d'une Commission en Zone CEMAC

    L'écart constaté aujourd'hui entre la CEMAC et l'UEMOA en ce qui concerne le processus d'intégration est dû au fait que la seconde ait opté pour une institutionnalisation supranationale et rigoureuse (Commission), dotée de plus de pouvoirs réels et coercitifs. Cette Commission jouit des prérogatives suivantes : le processus de nomination du Président, le profil du Président et des différents Commissaires, l'indépendance du Président et enfin l'irrévocabilité des Commissaires pendant la durée de leur mandat (CEMAC, 2006b). De même, le Sommet des chefs d'Etat de la CEDEAO de janvier 2006 vient d'approuver la transformation du Secrétariat Exécutif de la CEDEAO en Commission avec des prérogatives telles que : la représentation de la Communauté dans les relations internationales, recommandations adressées au Conseil et à la Conférence, banque d'informations importantes de toutes les autres Institutions, adoption des règlements d'exécution des actes édictés par le Conseil et sur délégation de ce dernier, la prépondérance du Président55(*). Le cas européen est encore un exemple sur le rôle de la Commission, car ses interventions ont été déterminantes pour cette zone.

    Ce n'est récemment que la Zone CEMAC s'est inscrite dans cette logique d'adoption d'une Commission. Ainsi, le dernier Sommet des chefs d'Etat de la CEMAC tenu à N'djamena en avril 2007 a décidé de « créer une Commission, composée d'un Commissaire par Etat membre et dirigé par un Président, en lieu et place du Secrétariat Exécutif actuel, ... » (CEMAC, 2007).

    La situation actuelle du Secrétariat Exécutif en ce qui concerne ses missions et son poids est celui d'une institution qui a besoin d'une nouvelle dynamique (CEMAC, 2006b):

    · manque de régularité dans le fonctionnement et manque de ressources suffisantes fait de lui un instrument sans aucun pouvoir ;

    · les organes juridictionnelles sont à faible pouvoir de contrainte ;

    · les structures de contrôle démocratique sont embryonnaires.

    Il convient tout de même de rappeler que l'article 2O du Traité de l'UDEAC prévoit certaines prérogatives pour le Secrétaire Général : « [...] Il est responsable de l'efficacité générale des services administratifs et de l'organisation de l'appareil exécutif ; il assure l'organisation des réunions du Conseil, du Comité de Direction et des Commissions spécialisées dont il assume le Secrétariat ; il entretient des relations avec les autorités nationales et les organismes publics ou privés de l'Union ; il est chargé de l'application du Traité et des décisions prises par le Conseil et le Comité de Direction ; en matière budgétaire, ses attributions sont fixées par le règlement financier de l'Union ; dans le cadre des décisions du Conseil et du Comité de Direction, il a la responsabilité de préparer et de promouvoir les programmes-cadres de développement et des projets communautaires, éventuellement en liaison avec les Commissions spécialisées » (CEMAC, 2006b).

    Au final, le Secrétariat Général n'assure que les missions classiques de secrétariat. En outre, le pouvoir de contrainte de la Cour de Justice (Chambre judiciaire) apparaît également limité dans la pratique. Son rendement paraît faible, avec seulement 17 arrêts et 5 avis rendus en 5 ans d'existence. Ceci s'expliquerait par le manque de vulgarisation du droit communautaire, mais aussi du faible volume du contentieux communautaire. Quant au futur Parlement de la CEMAC, son poids politique ne pourra véritablement s'affirmer qu'avec le temps, car il est fort probable que son fonctionnement se fonde à celui des autres organes (CEMAC, 2006b).

    Mais peut on parler d'avenir dans la CEMAC vu les différents goulots qui étranglent le processus d'intégration ?

    2.2. LES NOUVELLES PERSPECTIVES EN ZONE CEMAC 

    Si la période UDEAC n'a pas montré des résultats concluants malgré les projets ambitieux, les réformes doivent prendre le relais et même être continuelles. C'est ainsi que deux générations ont été implémentées. Mais la perspective d'une intégration sérieuse dans la CEMAC ne pourra devenir une réalité que si des objectifs pertinents de moyen terme sont fixés et surtout atteints.

    2.2.1. Les objectifs d'intégration de la Communauté à moyen terme (2006-2011)

    Lors de l'entrée en vigueur de la CEMAC en 1999, trois grandes séquences évolutives de l'intégration ont été définies par les pays membres sous formes de « plans quinquennaux », à savoir 1999-2004, 2004-2009 et 2009-2014.

    Le « premier plan » (1999-2004)56(*), qui s'est fixé pour objectif de permettre une transition de l'UDEAC à la CEMAC dévoile globalement en matière d'intégration des avancées significatives, mais avec une nécessité de consolidation. C'est dire que des faiblesses ont été observées, et parmi les plus importantes, l'immobilisme (manque de rotation) dans les nominations aux postes des institutions de la Communauté, l'esprit conservateur dans la direction de ces institutions, l'insuffisance des moyens financiers (gap déficitaire énorme entre la TCI collectée et la TCI versée). En effet, c'est la manifestation des séquelles de l'échec de l'intégration qui a longtemps été observé dans cette zone. Dans un souci de redynamisation, et suite aux difficultés et aux résultats insuffisants enregistrés durant ces cinq premières années, les Chefs d'Etat de la Communauté demanderont un audit global57(*) en vue de relancer la deuxième phase, qui débutera finalement en 2006 (plutôt qu'en 2004 comme prévu).

    Ainsi, l'étape 2006-2011 constitue un tournant décisif pour donner un nouveau souffle à la CEMAC et inscrire le processus d'intégration dans une dynamique irréversible. C'est l'étape de toutes les attentes. Lors du Sommet Malabo de mars 2006, il est lancé le Programme de Réformes Institutionnelles (PRI) 2006-200858(*) ; en plus, les chefs d'Etat adoptent des mesures immédiates à prendre et désignent une Présidence et un Comité de Pilotage. Ces derniers sont chargés de finaliser les modalités de ce programme en vue de son lancement officiel en juillet 2006 dans le cadre d'un Sommet extraordinaire. Lors de cette étape, il est attendu un strict respect des règles, une définition d'objectifs à la hauteur des moyens financiers, un versement automatique de la TCI, la mise en place des mécanismes de solidarité (compensation fiscale en vue de juguler les chocs budgétaires) et de développement (projets intégrateurs). Cette étape compte être celle du véritable saut qualitatif vers l'Union Economique et Sociale (CEMAC, 2006b).

    En plus, lors du Sommet de N'djamena d'avril 2007, le rapport d'étape sur les réformes rendu par le responsable du dossier du PRI a été adopté par les chefs d'Etat, du moins sur ses grandes lignes et il a été demandé de poursuivre ces réformes jusqu'à terme (CEMAC, 2007). Outre ces décisions spécifiques et immédiates, il est abordé des questions de paix et de sécurité (situation de la paix au Tchad et en RCA, recommandation au retour à la normalisation socio-politique entre les peuples de ces deux pays, création de l'Etat major d'une Brigade sous-régionale à Libreville). En ce qui concerne les questions de circulation des biens et des personnes, les chefs d'Etat ont décidé en faveur de son effectivité dès le premier juillet 2007. Mission a été donné au Secrétariat Exécutif de la CEMAC de statuer et de trancher définitivement sur la question du passeport CEMAC. En plus, les chefs d'Etat ont statué sur le projet de création d'une compagnie aérienne (Air CEMAC), avec pour partenaire technique et stratégique SN-Bruxelles. Sur le plan commercial, il est prévu des négociations avec l'UE, dans l'optique de signer des Accords de Partenariat Economiques Régionaux (APER). Cette mission est confiée au Président en exercice, afin d'initier des actions diplomatiques de haut niveau.

    Mais ces réformes ne pourront porter leurs fruits que si les organes chargés de leur suivi font preuve de dynamisme et de rigueur.

    2.2.2. Les goulots à l'atteinte des objectifs d'intégration

    Les ambitions en Zone CEMAC sont grandes ; les résolutions adoptées et les réaménagements apportés lors des dernières Conférences des chefs d'Etat en sont quelques illustrations. Mais une vision rétrospective dévoile une conclusion récurrente, à savoir des réaménagements institutionnels sans résultats probants. Cela prêterait à croire qu'il s'agit d'un problème structurel.

    Ainsi, en juin 2005, un Conseil Extraordinaire des Ministres a été réuni pour faire le point sur la non application des textes par les Etats Membres. Ceci a débouché sur un constat d'échec. Il en ressort que le champ des décisions non appliquées couvre un large spectre des instruments d'intégration dont se sont dotés les Etats. L'extrait suivant (tableau 1) du rapport-bilan établi par le Secrétariat Exécutif résume une situation préoccupante (CEMAC, 2006b).

    Tableau 1 : Quelques décisions importantes non appliquées ou projets en retard en CEMAC.

    Textes/Décisions

    Etat d'application

    Conséquences

    Règlement N°1/00-CEMAC-042-CM-04 portant institution et conditions d'attribution du Passeport CEMAC.


    · Démarches préliminaires

    entreprises par le Secrétariat

    Exécutif de la CEMAC ;


    · Non mise en oeuvre par les

    Etats.

    Source: Secrétariat Exécutif de la CEMAC, Février 2004.


    · Persistance de besoins de visa entre certains Etats Membres ;


    · Difficulté de libre circulation des ressortissants de la

    communauté dans la Zone ;


    · Retard dans la construction du marché commun.

    Acte Additionnel N°3/00-CEMAC-046-CM 05 instituant un mécanisme autonome de financement de la Communauté et

    Acte Additionnel N°01/01-CEMAC-046-CE-03 portant modification de l'Acte Additionnel N°3/00/CEMAC-

    046-CE-03 du 14 Décembre 2000 instituant un Mécanisme Autonome de Financement.


    · Mise en oeuvre tardive au niveau des Etats (2002) ;


    · Respect partiel des

    engagements et exécution très différenciée dans le reversement de la Taxe Communautaire d'Intégration (TCI).


    · Difficultés de fonctionnement du Secrétariat Exécutif de la CEMAC ;


    · Difficulté de financement des projets communautaires due à la faiblesse du FODEC.

    Retard dans la mise en oeuvre de projets communautaires d'intégration

    AIR CEMAC

    Acte Additionnel N°02/01-CEMAC-066-CE-03 portant création d'une Compagnie Communautaire de Transports Aériens en Zone CEMAC.


    · De nombreuses démarches

    entreprises ;


    · Projet presqu'en panne par

    manque d'engagement des Etats et du secteur privé.

    Source: Secrétariat Exécutif de la CEMAC, Février 2004


    · Difficultés de transport entre les Etats ; freine les relations

    commerciales intra -communautaires ;


    · Situation aggravée par les mauvaises performances des

    compagnies nationales, le manque de réseau ferroviaire inter-Etats, de routes bitumées inter-Etats et d'interconnexion de réseau des télécoms.

    Règlement N°7/00/CEMAC-062-CM-04 adoptant l'Accord

    Intergouvernemental portant création du Centre Sous-Régional de Maintenance des Télécommunications des pays de la CEEAC.


    · Non encore opérationnel.


    · Coût de maintenance des équipements de

    Télécommunications ;


    · Difficulté de formation du personnel à la maintenance.

    Source : Extrait de CEMAC (2006b).

    Le statisme observé pendant la période l'UDEAC semble porter un effet d'« hystérèse »59(*) dans le processus d'intégration en Zone CEMAC : en plus du manque ou du retard dans l'application des décisions, s'ajoutent la multitude d'accords auxquels font face les pays. On pourrait prioritairement citer la coexistence de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC)60(*) qui se veut non seulement plus large et plus englobante dans la grande Afrique centrale, mais qui n'est pas très différente de la CEMAC vue ses missions, ses institutions et ses projets. La CEEAC ne viendra redynamiser le processus d'intégration en Afrique centrale que s'il n'existe pas de conflits d'objectifs ou de projets. Surtout les pays de la CEMAC doivent jouer un véritable rôle de meneurs et doivent servir d'exemple, vu leur expérience en matière d'intégration.

    Ensuite, il est noté au sein de la Zone CEMAC un comportement hostile des populations. En effet, certains pays ayant connu des performances macro-économiques ne cessent d'attirer les populations voisines souvent à la recherche d'emploi, provoquant de temps en temps des actes de xénophobie. L'exemple équato-guinéen est patent sur cet aspect lorsque plusieurs camerounais ont été expulsés tout récemment. La population devrait plutôt jouer un rôle intégrateur important dans la zone, car de tels actes xénophobes pourraient limiter le critère de mobilité des facteurs, entraîner des réticences pour l'intégration par le marché et encourager au final le commerce informel.

    Reste enfin le problème des infrastructures. La densité du réseau routier en Zone CEMAC est relativement basse, comparativement à l'UE et surtout à l'UEMOA ou presque toutes les capitales sont reliées par des axes lourds. Par exemple, il faut en moyenne 7 à 10 jours pour rallier Douala à Bangui (1450 km seulement), avec près d'une vingtaine de points de contrôle (police, gendarmerie, eaux et forêts, douanes, municipalités). Cet important « effet frontière infrastructurel » ou cette faiblesse du « capital spatial » se trouve être un goulot à la circulation des facteurs. Le capital spatial ainsi énoncé se définit comme « la somme des capacités productives localisées qui concourent à accroître la productivité des autres facteurs de production ». Il est constitué des facteurs de croissance (communications, services à la production) localisés dans l'espace et générateurs d'externalités d'agglomération (coûts de transaction, effets de taille de marché, externalités de connaissances). Ainsi le capital spatial reste à construire au sein de la zone : le réseau routier principal de la CEMAC a une longueur de 57858 km dont 12% seulement sont des routes bitumées. Pour l'ensemble de la région, la densité routière pour les routes bitumées est de 0,24. Sur les détails, le Cameroun possède à lui tout seul plus de 45% du réseau routier avec seulement 15% de routes bitumées et 20% pour le Congo. Les densités des routes bitumées sont de 0,85 pour le Cameroun, de 0,29 pour le Congo, de 0,23 pour le Gabon, de 0,11 pour la RCA et de 0,03 pour le Tchad. Les voies ferrées ne sont pas interconnectées et lorsqu'elles existent, elles ne sont qu'a vocation national (Transcamerounais, Transgabonais, etc. généralement vétustes) et datent pour l'essentiel de la période coloniale. Le transport aérien intra-régional, qui est un indicateur du niveau de l'intégration reste encore non effectif. Il est généralement plus facile et rapide de passer par Paris, Bruxelles ou Johannesburg que de relier deux villes d'Afrique centrale. Mais réuni à Yaoundé le 21 juin 1993, et toujours dans le but de relancer l'intégration sous l'ère CEMAC, les pays adoptent un réseau d'itinéraires de transits dits «axes structurants», avec pour objectif le renforcement de l'intégration réelle. Les travaux sur certains projets sont déjà livrés : c'est le cas de la route Bertoua-Garoua Boulai (2476 km) qui assurent la liaison du Cameroun au Tchad et de la route Yaoundé-Ambam qui doit permettre de relier le Cameroun au Gabon et à la Guinée équatoriale61(*).

    Sur le plan téléphonique, le Cameroun disposait de 16,1 lignes fixes et mobiles pour mille personnes en l'an 2000, la Guinée équatoriale 24,5, le Congo 31,3 et le Gabon 129 lignes. Il convient de noter que ces niveaux observés ne sont pas encore en mesure de faciliter fondamentalement l'intégration sous-régionale. En ce qui concerne l'utilisation du réseau Internet, le Cameroun en l'an 2000 avec près de 40 000 utilisateurs devance le Gabon (15 000), le Tchad (3 000), la RCA (2 000), le Congo (800) et la Guinée équatoriale (700). On note à ce niveau des évolutions sensibles : 60 000 en 2002 au Cameroun, 6 000 en 2003 en RCA, 15 000 en 2002 au Tchad, 15 000 en 2003 au Congo, 1 800 en 2002 en Guinée Equatoriale et 35 000 en 2003 au Gabon (World Bank Africa Data Base, 2005).

    Sur le plan énergétique, il existe encore des discordes malgré de faibles capacités. C'est ainsi que l'on note l'absence du Cameroun62(*) dans le Pool Energétique de l'Afrique centrale créé le 12 avril 2003 et qui regroupe le Gabon, la RCA, la RDC, la Guinée équatoriale, São Tomé et Principe, le Congo et le Tchad.

    CONCLUSION DU CHAPITRE 2

    Ce chapitre examinait le bilan des réformes macro-monétaires et institutionnelles sur le processus d'intégration en Zone CEMAC. Les différents résultats dévoilent un bilan globalement prometteur, des faiblesses étant notées au niveau des infrastructures. La faiblesse du « capital spatial » peut ainsi être considérée comme le principal goulot qui a freiné le processus d'intégration en Zone CEMAC. Au regard des différentes évolutions, trois enseignements sous forme de scenarii sont à prévoir d'ici à 2010 (CEMAC, 2006b) :

    · Scénario 1 : « la CEMAC en panne ». Ce scénario traduit la persistance des blocages actuels. Elle est en panne et donc menacée à terme d' « éclatement », voire de « disparition » ;

    · Scénario 2 : « l'intégration graduelle ». Dans ce scénario, les Etats membres s'appliquent résolument à lever les blocages et définissent des objectifs prioritaires réalistes pour l'étape 2006-2011. Ce scénario nécessite des acquis solides, visibles et irréversibles ;

    · Scénario 3 : « le bond en avant ou l'intégration accélérée ». Dans ce scénario, les Etats membres lèvent rapidement les obstacles actuels et se fixent l'objectif d'entreprendre l'ensemble des chantiers menant vers l'union économique. Il requiert des changements profonds d'attitude et la mise en place des instances communautaires.

    Ainsi, le choix d'un scénario à court et à moyen terme doit permettre à la CEMAC de faire face aux défis d'un environnement international en forte mutation et surtout marqué par la libéralisation du commerce (APE) et l'avènement des grands blocs régionaux. Enfin, il est recommandé que le scénario 2 soit privilégié, car c'est le juste milieu et le plus réaliste, le troisième paraissant un peu plus enthousiaste et le premier à proscrire.

    CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

    La lecture des réformes appliquées en Zone CEMAC a débouché sur la présentation sous forme de bilan, de leurs résultats sur les plans macro-monétaire et financier et de leurs effets sur le processus d'intégration par le marché. Des enseignements issus des analyses documentaires ont été tirés. Sur le plan financier (monétaire et bancaire), les réformes ont sans douté été d'un apport important, car presque tous les équilibres dans ce secteur ont été retrouvés (stabilité monétaire interne et externe, amélioration du bilan des banques, création d'un marché financier sous régional, etc.). Mais il a fallu deux générations de réformes pour aboutir à ce résultat, qui a réussi à conforter la suppression de l'effet frontière monétaire. Mais il persiste des défaillances telles que la surliquidité du système bancaire, qui traduit une faiblesse de l'investissement (stagnation de l'épargne), et des rumeurs « spéculatives » de dévaluation.

    Mais au total, malgré l'impact mitigé des réformes, elles ont été d'un apport indéniable dans le processus de restructuration des économies modernes en général et celles de la CEMAC en particulier. En outre, il convient de souligner que les réformes ne sont pas en elles-mêmes une mauvaise initiative, c'est pourquoi il faut encourager leur poursuite comme c'est le cas actuellement à la CEMAC et à la BEAC, en vue de redresser durablement la structure des économies de la sous-région et de tracer le sentier de l'intégration.

    Cette intégration passe par un renforcement du marché commun sous-régional. D'un point de vue intuitif, le bilan des réformes sur l'intégration par le marché est négatif, malgré la suppression de l'effet frontière monétaire. La deuxième partie de ce travail tente de vérifier si les flux commerciaux intra-régionaux des pays de la Communauté ont augmenté ou si ces derniers se sont spécialisés suite à la suppression de cet effet frontière monétaire et à la redynamisation des institutions sous-régionales

    DEUXIEME PARTIE  LA CEMAC, UNE UNION MONETAIRE ATYPIQUE : LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE

    INTRODUCTION DE LA DEUXIEME PARTIE

    La Zone CEMAC comme d'ailleurs toute la Zone Franc africaine est caractérisée de zone atypique, car elle n'obéit à aucune logique théorique dans sa formation ou son évolution. C'est ainsi que l'Union Monétaire a été lancée depuis la décennie 30, alors que l'UDEAC ne s'est formée qu'en 1964. Cette caractéristique peut être à l'origine des résultats paradoxaux rencontrés dans cette communauté.

    Mais en plus, le faible niveau de commerce observé entre les pays pourrait s'expliquer par la structure productive et donc le potentiel commercial intra-zone. Ainsi cinq pays sur six de la sous-région sont spécialisés dans les produits primaires ou de base et sont essentiellement des mono-producteurs (de pétrole). Cette caractéristique pose ainsi le problème de la spécialisation, qui selon la littérature économique est due soit aux dotations factorielles, soit aux avantages comparatifs.

    L'objectif de la deuxième partie de ce travail est de tester si la suppression de l'effet frontière monétaire, héritée des réformes, a conduit à une augmentation des échanges ou plutôt à une spécialisation des pays. Ce questionnement sera éclaté en deux chapitres qui vont meubler cette deuxième partie du travail.

    CHAPITRE 3. LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE ENCOURAGE-T-ELLE LE COMMERCE DANS LA CEMAC ?

    Selon la doctrine dichotomique classique du XVIIème s, l'économie est composée de deux sphères : la sphère réelle et la sphère monétaire, la dichotomie ici voulant dire qu'il n'y a pas de lien entre les deux. Mais l'approche intégrative de Keynes des années 30 viendra radicalement rompre avec cette vision : les deux sphères s'influencent mutuellement.

    Loin de ce débat purement doctrinal, il existe aujourd'hui d'autres problématiques, mais ce travail privilégie celle du lien entre la monnaie et les flux commerciaux. C'est dans cette veine que Rose (2000) s'inscrit en débouchant sur un résultat important, à savoir l'impact positif et significatif de la monnaie unique sur le commerce. Plusieurs études ont confirmé ce résultat dans certaines UM, mais très peu, à la connaissance actuelle, se sont intéressées au cas de la CEMAC, en dehors de Carrere (2002) et d'Avom (2005).

    Ce chapitre, qui examine la question de l'existence ou non d'un effet frontière monétaire et de son impact sur le commerce des pays de la CEMAC, débouche sur quelques résultats empiriques. Ainsi, dans la compréhension de cette problématique, il convient au préalable de faire un aperçu sur les théories du commerce international et des ZMO.

    SECTION 1. JUSTIFICATION THEORIQUE DU LIEN ENTRE MONNAIE ET COMMERCE

    L'orientation géographique des exportations des pays de la CEMAC vers leurs principaux partenaires révèle que ces pays sont essentiellement extravertis. Prenant le cas du Cameroun, locomotive du commerce dans la sous-région, il ressort que l'orientation de ses exportations vers l'Afrique centrale occupe une place négligeable à son total mondial. Ainsi de 2003 à 2005, la part du commerce intra-zone, calculée comme le ratio de la somme des importations et des exportations de l'Afrique centrale au total mondial, dévoile un trend décroissant : 4,94% en 2003 ; 4,28% en 2004 et 3,87% en 2005.

    Cette situation est en majeure partie expliquée par un détournement des exportations intra-zone qui sont continuellement décroissantes, plus que proportionnellement à la création des courants d'importations, qui augmentent. Ces différentes informations sont synthétisées dans le tableau ci-dessous.

    Tableau 2 : Orientation géographique des échanges du Cameroun (millions de FCFA)

    Zones

    Géographiques

    2003

    2004

    2005

    Exports

    Imports

    Exports

    Imports

    Exports

    Imports

    Europe

    839 697

    657 642

    870 572

    665 455

    1 080 101

    590 149

    Afrique Centrale

    111 606

    15 370

    82 639

    29 744

    69 900

    47 650

    Afrique

    189 373

    211 604

    158 425

    284 881

    211 113

    521 558

    Amérique

    116 858

    94 475

    79 747

    112 453

    61 212

    139 691

    Asie

    134 648

    195 025

    107 352

    236 962

    96 872

    250 807

    Océanie

    197

    1 301

    147

    879

    322

    1 548

    Total général

    1 318 157

    1 251 561

    1 256 789

    1 365 047

    1 509 215

    1 524 464

    Source : Construit par l'auteur à partir des données du MINCOM, 2007.

    Sur un autre plan, l'évolution du total des exportations intra-communautaires dévoile un trend faiblement croissant au cours du temps (graphique 6a). Il est en outre pertinent de constater qu'une large part de ces exportations (environ 70%) revient au Cameroun (graphique 6b).

    Graphique 6 : Evolution du total et moyenne (%) par pays des exportations intra-CEMAC (1994-2003)

     
     

    Source : Construit par l'auteur à partir de CEA, 2006.

    Après ce bref dialogue intuitif avec les chiffres, il va s'agir d'adopter une logique empirique beaucoup plus rigoureuse. Mais avant d'y parvenir, il s'avère opportun de faire un détour théorique du lien entre monnaie et commerce. Ceci passe tout d'abord par une revue critique et éclectique des différentes théories du commerce international et enfin par la présentation de nouveaux facteurs explicatifs du commerce.

    1.1. APERCU SUR LES THEORIES DU COMMERCE INTERNATIONAL

    Le commerce international a été depuis longtemps expliqué par de nombreux déterminants, mais le rôle de la monnaie (unique) a été relégué au second plan ou oublié. Mais avant de passer à la justification théorique de la monnaie (unique), il convient au préalable de rappeler l'évolution théorique de la littérature sur le commerce international.

    1.1.1. Les explications traditionnelles du commerce international

    Les explications traditionnelles du commerce international recouvrent deux aspects : les aspects statiques et les aspects dynamiques.

    Les aspects statiques sont généralement regroupés autour de la théorie des avantages comparatifs et examinent la spécialisation des pays (Smith, 1776 ; Ricardo, 1817). Considérant d'autres facteurs tels que la dotation factorielle, Ohlin (1933) et Heckscher (1949) ont cherché à expliquer autrement la motivation des Etats à commercer. Leurs travaux furent complétés à travers une formulation mathématique par Samuelson (1949), qui démonte les prédictions de leurs conclusions.

    Entre les deux visions classique et suédoise, une analyse néoclassique est présentée par Haberler (1936) et s'articule autour de la théorie des coûts d'opportunité ou des taux de substitution. D'inspiration microéconomique, il démontre que l'équilibre en cas d'ouverture est meilleur que l'équilibre autarcique. Plusieurs autres contributions telles que celle de Leontief (1956) s'attardent plutôt sur la spécialisation internationale, surtout avec le cas des Etats-Unis, où il trouve un résultat paradoxal. En effet, les Etats-Unis qui sont un pays capitalistique avaient tendance à exporter les produits à forte concentration en main-d'oeuvre.

    Les analyses traditionnelles, vu leur caractère immuable et statique se sont avérées peu concluantes. En toute logique, les conditions initiales peuvent changer et la spécialisation elle-même est vouée au dynamisme. C'est ainsi que Graham (1923) a proposé le concept de gains et pertes dynamiques dans la spécialisation internationale, ceux-ci pouvant être liés aux structures d'offre et de demande63(*).

    S'intéressant à la nature des produits échangés, Lassudrie-Duchêne (1971) avance la notion de commerce intra-branche, qui peut être défini comme l'échange croisé des produits similaires entre les pays aux caractéristiques différentiées64(*).

    Mais ces théories ont subi l'érosion du temps et se sont avérés peu pertinentes.

    1.1.2. Les dépassements des théories traditionnelles

    C'est sous la Nouvelle Théorie du Commerce International (Krugman, 1993) que se sont développés au courant des années 90 les dépassements des théories traditionnelles du commerce international. Les arguments explicatifs tournent autour de la structure imparfaite du marché et la nature croissante des rendements d'échelle65(*).

    La prise en compte des économies externes a des implications différentes sur la structure du marché. Répondant à la question `'comment les économies d'échelle externes influencent-elles le commerce international ?'', Krugman et Obstfeld (1995) avancent que « de fortes économies externes tendent à confirmer les structures existantes des échanges inter-industriels quelle que soit l'origine de celles-ci. Les pays qui sont au départ gros producteurs de certaines industries pour quelle que raison que ce soit tendent à le rester ». Rainelli (1997) pour sa part affirme que « si de telles économies existent dans la production d'un bien, elles ont pour effet de favoriser, toute chose égale par ailleurs, les nations qui produisent des volumes importants de ce bien ».

    En ce qui concerne les économies d'échelle internes, la structure du marché, comme il a été dit, est généralement imparfaite (Guillochon, 1993 ; Krugman et Helpman, 1985). Prenant le cas des marchés contestables66(*), Guillochon (1993) et Rainelli (1997) concluent que les conséquences à l'ouverture internationale vont conduire à évincer du marché le pays dont le prix est le plus élevé, l'hypothèse de départ étant l'existence de deux pays en situation de monopole contestable. On débouche finalement à l'émergence d'un monopole sur le plan international, car à long terme, seul un pays réussira à solder de manière significative la demande mondiale avec des coûts de production les plus bas.

    Les développements ci-dessus qui se limitent à expliquer le commerce international oublient toujours dans la gamme d'outils, d'autres facteurs explicatifs qui relèvent du secteur monétaire : c'est la monnaie elle-même. Depuis les décennies 90 et 2000, plusieurs travaux empiriques cherchent plutôt à montrer l'effet de la monnaie sur le commerce. Ce rôle est souvent conforté par celui d'autres variables telles que la frontière, la distance et bien d'autres variables géographiques et socio-historiques.

    1.2. UN NOUVEAU DETERMINANT DU COMMERCE INTERNATIONAL : LA MONNAIE UNIQUE

    Le rôle de la monnaie unique sur le commerce est aujourd'hui indéniable depuis les travaux pionniers de Rose (2000). Il arrive au résultat selon lequel les pays faisant partie d'une même UM et ayant des caractéristiques similaires, voient leurs échanges augmenter de plus de trois (03) fois. Il s'agit en s'inspirant de ce résultat, de dresser une revue sur les liens qui existent entre monnaie et commerce à travers la théorie des zones monétaires optimales.

    1.2.1. La théorie des zones monétaires optimales (ZMO)

    Une ZMO est une zone géographique où la résorption des déséquilibres provoqués par des chocs asymétriques est assurée par d'autres mécanismes que la manipulation des taux de change entre les régions ou les pays de cette zone. Elle est généralement discutée suivant deux voies : une voie traditionnelle cherchant un consensus sur la nature du régime de change, et une voie récente qui privilégie la coordination des politiques nationale. Cette théorie peut être présentée en plusieurs séquences.

    Tout d'abord, la phase pionnière avec Mundell (1961) qui pense que le coût d'une monnaie commune est qu'elle est un frein à l'ajustement en cas de chocs asymétriques. Il conclut tout de même que l'organisation optimale est celle d'une monnaie unique pour des régions dont les facteurs sont mobiles.

    Ensuite, vinrent les prolongements de McKinnon (1963) avec son critère d'ouverture. Il montre que les petits pays ont davantage intérêt à miser sur un régime de changes fixes, et qu'un taux d'ouverture élevé est une condition d'optimalité monétaire. Kenen (1969) pour sa part examine la problématique de la diversification des économies, diversification qui pourrait être à l'origine des demandes croisées et donc de l'augmentation du commerce.

    Mais pendant les années 80-90, la théorie est soumise à des raffinements, surtout avec des analyse en équilibre général tout d'abord avec imperfection des marchés financiers (Helpman et Razin, 1982 ; Neumayer, 1998), et ensuite avec rigidité des prix et des salaires (Bayoumi, 1994 ; Ricci, 1997 ; Beine et Docquier, 1998). Deux conclusions sont avancées : la première montre que l'ouverture des économies, en accroissant l'ampleur des chocs réels, réduit les bénéfices nets de l'UM ; pour la seconde, l'adhésion à une UM accroît le bien-être si les gains issus de l'élimination du risque de change excèdent les coûts de réduction des divers instruments financiers dans l'économie (Bamba, 2004).

    Les analyses ci-dessus proposent des critères qui sont qualifiés de statiques, c'est-à-dire exogènes. Cette phase pionnière de la théorie des ZMO manque cependant un cadre unifiant dans la mesure où selon la théorie appliquée, les frontières des ZMO peuvent changer radicalement. Une économie très ouverte devrait selon la théorie de McKinnon (1963) favoriser l'intégration monétaire. Or cette même économie peut être caractérisée par une mobilité des facteurs de production réduite ; ce qui, selon Mundell (1961), supposerait un système de change flexible. C'est ainsi que le débat s'est ensuite orienté vers l'endogénéité des ZMO, aboutissant à deux issues dialectiques. Tout d'abord Krugman (1993) qui démontre à partir d'un cercle vicieux que les pays d'une UM font face à des chocs asymétriques. Pour lui, l'intégration économique, financière et monétaire permet aux pays d'exploiter leurs avantages comparatifs, leurs dotations factorielles, donc de diversifier leur production par un processus de spécialisation à l'intérieur de la zone. Chaque pays réagit en effet aux évolutions spécifiques du secteur dans lequel il se spécialise. Ensuite, Frankel et Rose (1998)67(*) proposent, contrairement à Krugman (1993), un cercle vertueux entre la monnaie et le commerce. Ils sont renchéris par des auteurs tels que Rose (2000), Alesina et Barro (2002) et Alesina et Tenreyro (2003). La conclusion principale est que deux pays qui passent en changes fixes ou qui adoptent la même monnaie voient leurs échanges commerciaux s'accroître et leurs cycles réels se synchroniser, ce qui justifie ex post l'intégration monétaire.

    Il est clair que les analyses ci-dessus n'épuisent pas le problème de l'optimalité d'une zone monétaire. D'autres analyses ont privilégiés les aspects tels que l'analyse coûts - bénéfices avec pour principaux auteurs Ishiyama (1975), Bean (1992) et Tavlas (1994). Ainsi, les bénéfices soulignés par Bean (1992) tournent autour des aspects tels que l'accroissement de la valeur liquide de la monnaie, la transparence des prix, la baisse de l'incertitude liée au taux de change, la réduction de la volatilité liée à la spéculation, les gains de réputation, bref la réduction des coûts de transaction. En contre partie, les coûts seraient généralement liés à l'abandon de l'instrument de change, à l'abandon de l'autonomie monétaire, aux effets externes négatifs. Quel serait donc l'arbitrage optimal ? Il convient de souligner qu'au final, la montée du régionalisme dans le monde a donné raison à la suprématie des avantages sur les coûts.

    Au-delà de cet aperçu théorique, des études empiriques ont été entreprises dans presque tous les blocs régionaux du monde. Ondo Ossa (2000) s'intéressant à la Zone Franc (ZF) africaine arrive à la conclusion selon laquelle cette zone est optimale, non de part sa définition, mais de part sa finalité, c'est-à-dire la solidarité des pays.

    La coordination des politiques budgétaires a aussi constitué un noeud dans l'analyse des problématiques des UM. S'il est interdit toute politique monétaire indépendante en UM, il n'est pas évident qu'il en aille de même pour la politique budgétaire. Les résultats montrent que les pays qui forment une UM doivent automatiquement coordonner leurs politiques budgétaires nationales. Cela passe par le respect des critères de convergence. Quelques limites peuvent être décelées au niveau interne (normes trop restrictives, laxisme dans la mise en oeuvre et dans l'application des sanctions) et externe (difficultés à définir un bon policy-mix et la non prise en compte du secteur social) (Avom, 2007).

    Les conclusions tirées des critères traditionnels, qui se sont avérées peu réalistes, ont cédé depuis le début des années 90 la place à des critères plus raisonnables. Tous ces développements récents ont été regroupés sous l'appellation de « critères de convergence » (voir chapitre 1). Notion centrale en économie, la convergence signifie que la différence entre deux grandeurs devient arbitrairement petite (Bamba, 2004). Théoriquement, cette notion a une double acception : la convergence conditionnelle et la convergence inconditionnelle68(*).

    Ainsi défini, les critères de convergence en Zone CEMAC peuvent être mis en cause. Leur caractère restrictif ainsi que leur statisme face à l'évolution conjoncturelle est discutable dans le cadre de ces économies en quête de croissance, et donc vouées à plus de dépenses (Avom, 2007). Une autre critique est que, la poursuite du respect des critères conduit à mettre en oeuvre des politiques budgétaires de court terme plutôt que structurelles, à effet succinct plus que curatif (Schor, 2000).

    Ainsi, la théorie des ZMO, malgré son caractère multidimensionnel, explique au final le rôle de la monnaie sur l'intégration par le marché. Mais dans les nouveaux modèles empiriques (modèle de gravité par exemple), il est de plus en plus montré le rôle d'autres facteurs géographiques, historiques et sociologiques.

    1.2.2. Au-delà de la monnaie unique : l'apport de la frontière et de la distance

    L'effet frontière en général peut avoir plusieurs connotations : monétaire, infrastructurel et terrestre. L'effet frontière monétaire est synonyme de coexistence de monnaies nationales au sein d'une zone et débouche sur des conclusions déjà connues. L'effet frontière infrastructurel quant à lui a trait à la faiblesse du capital spatial, ensemble de facteurs qui facilitent la mobilité et le commerce au sein d'une zone. Ainsi, Fouda (2003) démontre qu'un faible capital spatial constitue un frein au développement du commerce en Zone CEMAC. Il convient de rappeler que les deux effets sus-cités ont plus ou moins été délaissés ou traité autrement par la littérature au profit de l'effet frontière terrestre. Ce dernier peut être appréhendé de façon qualitative à travers une variable indicatrice, ou encore approché par un indicateur de droits de douane. En plus, il est facile à décomposer en effet interne et externe pour les pays qui sont constitués de plusieurs Etats comme le Canada, le Brésil ou les USA (McCallum, 1995 ; Daumal et Zignago, 2005 ; Helliwell et Schembri, 2005). En général et quelle que soit sa nature, l'effet frontière a un même résultat intuitif sur le commerce, à savoir la réduction de ce dernier.

    L'approche empirique de ces différents effets a confirmé l'intuition théorique ci-dessus : il existe une grande réduction des flux commerciaux due à la distance et aux frontières internationales, mais ceci varie selon le temps et l'espace. (Anderson, 1999 ; McCallum, 1995 ; Head et Mayer, 2001 ; Helliwell et Schembri, 2005). Ce résultat qui rime avec les pays ne faisant pas partie de la même zone d'intégration a connu une variante avec Lochard (2005). Pour lui, les Etats qui partagent la même frontière commerceraient davantage par rapport aux autres, car le facteur « proximité » entre en jeu, combiné à la disparition de certaines barrières nocives au commerce. Ceci peut être la résultante de nombreux accords régionaux passés entre ces pays. Ce travail fait suite à ceux d'Anderson et van Wincoop (2003), Combes et al. (2004), De Sousa et Disdier (2006).

    Prenant spécifiquement le cas Africain, Fouda (2003) pense que « Les frontières exercent un effet déprimant sur le commerce, même en l'absence de barrières tarifaires ou non tarifaires, de différences culturelles ou linguistiques, de l'incertitude liée au taux de change ou encore d'autres obstacles économiques ».

    Un autre facteur qui est au centre des analyses contemporaines est la distance, et c'est sa mesure dans les travaux empiriques qui est problématique. Elle peut tout d'abord être cernée comme une approximation des coûts de transaction, car en toute logique, ceux-ci sont fortement liés à la distance entre deux points. Ensuite elle peut être simplement traitée comme l'écart absolu qui sépare deux pays ; ainsi elle peut être obtenue à partir des paramètres orthodromiques (longitudes et latitudes des deux points dont on veut évaluer la distance). Presque toutes les études empiriques ci-dessus ont également abouti au même résultat en ce qui concerne l'impact de cette variable sur le commerce, à savoir un effet déprimant. Ainsi Melitz (2006b)69(*) montre que dans les modèles de gravité, la distance reflète l'une des frictions les plus importantes du commerce bilatéral. Même en Afrique, le résultat de cette variable dans la plupart des études est toujours le même que celui trouvé précédemment (Carrere, 2002 ; Avom, 2005 ; Avom et Gbetnkom, 2005 ; Gbetnkom, 2006 ; Agbodji, 2007).

    Au total, cette vaste littérature sur la monnaie, la frontière et la distance ne trouvera de crédibilité que si elle est robuste après une application en Zone CEMAC.

    SECTION 2. VERIFICATIONS EMPIRIQUES EN ZONE CEMAC

    Pour comprendre l'ampleur de l'effet frontière monétaire sur les échanges dans la CEMAC, il convient dans le cadre de cette section, d'exposer la méthodologie appropriée (modèle de gravité) et la technique utilisée pour l'estimation.

    2.1. LE MODELE DE GRAVITE AUGMENTE

    Il faut dans un premier temps présenter le modèle dans ses fondements pour enfin déboucher sur la justification des variables.

    2.1.1. Présentation du modèle

    Le modèle de gravité est l'un des grands succès historiques de l'analyse économique, car il s'est imposé comme un sérieux instrument empirique pour explorer les flux commerciaux entre les partenaires. C'est un modèle normatif qui détermine le niveau potentiel des échanges entre les partenaires. Longtemps sevré de fondements théoriques, il est aujourd'hui et ce depuis les années 90, un creuset de justifications théoriques. Mais on remonte aux années 70 la première tentative de justification théorique (Agbodji, 2007). Plusieurs travaux renforcent cette intuition, mais en ajoutent d'autres fondements tels que la concurrence imparfaite qui génèrent les économies d'échelle et les coûts de transport (Bergstrand, 1989 ; Oguledo et MacPhee, 1994 ; Deardorff, 1995 ; Hummels et Levinsohn, 1995 ; Anderson et Wincoop, 2001 et Evenett et Keller, 2002).

    En Afrique, Foroutan et Pritchett (1993) sont les premiers au courant des années 90 à l'appliquer de façon empirique. Ces auteurs cherchaient à quantifier le niveau potentiel des flux intra-Afrique sub-saharienne, en vue de le comparer à son niveau effectif.

    Malgré ce succès, les fondements théoriques de ce modèle ont toujours fait débat entre les économistes. Dans un modèle à deux pays (modèle bilatéral), les prédictions en ce qui concerne les variables traditionnelles (distance, PIB) cadrent bien avec les théories du commerce international. Mais dans sa forme multilatérale, les résultats sont dans la plupart des cas imprécis. Ainsi donc, l'équation de gravité a pour fondements théoriques le modèle monopolistique appliqué au commerce international qui suppose des rendements d'échelle croissants et la différenciation des produits au niveau de l'entreprise. Le cadre d'analyse est généralement sous-tendu par trois hypothèses : la maximisation des profits par les firmes en concurrence monopolistique, la maximisation de l'utilité par les consommateurs et la spécialisation de l'offre de biens entre pays (Feenstra, 2004 ; Helliwell et Schembri, 2005).

    Les avantages70(*) de ce modèle sont sa simplicité et son efficience dans la prédiction des déterminants du commerce bilatéral, l'évaluation directe des accords régionaux sur le commerce intra-régional. En plus, il explique environ 80% de la variation du commerce global et permet de capter indirectement des régularités empiriques qui échappent aux autres modèles (De Melo et Grether, 1997 ; Avom, 2005).

    Formellement, l'équation de gravité est inspirée de la physique newtonienne. Selon Combes et al, (2005), la théorie newtonienne de la gravitation énonce que «deux corps sont attirés en raison proportionnelle de leur masse et en raison inverse du carré de la distance qui les sépare ». La formulation de cette équation donne l'expression suivante :

    F la est la force d'attraction, Mi(j) la masse des corps, g la constante de gravitation et D la distance entre les deux corps. Les pionniers à l'avoir appliqué en économie sont Tinbergen (1961), Pöyhönen (1963) et Linnemann (1966). Ainsi, la transposition économique de ce modèle donne l'expression suivante :

    Xij est le flux de commerce bilatéral entre les deux pays, Yi(j) le PIB réel, Dij la distance entre les deux pays et A l'ordonnée à l'origine. La disparition du carré sur la distance est due au fait d'une l'hypothèse implicite qui est la parfaite proportionnalité, c'est-à-dire que les élasticités doivent être unitaires. La forme log-linéaire et déterministe du modèle donne :

    .

    Mais dans la spécification adoptée dans ce travail, il sera fait recours à une « équation de gravité augmentée », c'est-à-dire que d'autres variables de contrôle (qualitatives et quantitatives) seront ajoutées (Rose, 2000 ; Avom 2005 ; Agbodji, 2007).

    La spécification prendra alors la forme ci-dessous :

    est la valeur des exportations du pays i vers le pays j à la période t, Y est le PIB réel, Dij est la distance entre i et j, Pop la population et SA la surface arable. Langcom et Frocom sont deux variables muettes qui valent 1 si i et j partagent une frontière commune et une même langue. Ouv est une variable qui prend en compte l'ouverture du pays exportateur à la mer, valant 1 si le pays exportateur est ouvert à la mer. Colcom illustre le fait d'appartenir au même colonisateur et vaut 1 si les pays partenaires ont été colonisés par la même métropole. La variable AC1 est une variable muette qui prend la valeur 1 si le flux bilatéral est effectué entre deux pays de la CEMAC. AC2 est une variable muette qui prend la valeur 1 si le pays i est de la CEMAC et le pays j hors-CEMAC. AC3 est l'inverse de AC2. MC est la principale variable d'intérêt qui prend en compte l'utilisation de la même monnaie. est le terme d'erreur, suivant une loi log-normale.

    En regroupant les variables par nature, on obtient l'expression suivante:

    ? est le vecteur des variables quantitatives en logarithme et Dum celui des variables qualitatives.

    2.1.2. Le choix, la justification des variables et la période d'étude

    Le modèle de gravité originel ne comprenait que quelques variables de contrôle telles que les masses des pays (PIB), les populations et la distance. De nos jours l'extension peut se justifier par la recherche d'autres facteurs pertinents qui n'étaient jusqu'alors prises en compte que dans le terme constant. Ainsi la justification des variables prises en compte dans un modèle se fait en fonction de la théorie économique et en fonction de l'environnement.

    En ce qui concerne les variables quantitatives, le PIB des partenaires s'avère comme une variable fondamentale dans l'explication du commerce. En effet, un pays exporte plus s'il est riche, c'est-à-dire qu'il a une base productive ou industrielle diversifiée. En même temps, un niveau élevé du PIB du partenaire induit un courant d'échange additionnel, car il constitue un élément déterminant du pouvoir d'achat ou de capacité d'absorption71(*). La population joue un rôle ambigu. Pour le pays i, elle peut encourager le commerce si elle est productrice et créatrice de richesse, mais en même temps, elle peut être considérée comme un facteur déterminant de l'absorption, c'est-à-dire principale consommatrice de la production nationale. L'interprétation est la même pour le pays j. Ainsi, le signe attendu de son élasticité est non concluant, pouvant être positif ou négatif. La surface arable est aussi un facteur jugé explicatif du commerce, car plus un pays dispose d'une grande surface arable, plus il produit davantage et plus il commerce. Cette variable s'explique par le fait que l'échantillon est composé uniquement des pays d'ASS, qui sont essentiellement agricoles. Mais il convient de lever le voile en ce qui concerne la taille du pays. Ainsi, cette variable pourrait entraîner un biais pour les petits pays qui ont généralement des dotations en surface arable négligeables. On s'attend généralement à une élasticité positive pour le pays exportateur et négative pour le pays importateur. Enfin, la distance explique aussi le commerce entre deux pays, mais de façon négative. Ainsi, deux pays éloignés commercent moins, même s'ils passent des accords commerciaux incitatifs. La distance est donc considérée comme un facteur déprimant le commerce, malgré le débat sur sa mesure. En général, c'est la capitale politique qui est prise en compte. Mais dans un certain nombre de cas, quand la capitale administrative ne représente pas le point le plus important du pays, elle est remplacée par la capitale économique (Carrere, 2002). C'est une distance orthodromique, qui tient compte de la sphéricité de la terre. Ici, la terre est considérée comme un grand cercle et le calcul de la distance tient compte de la longitude et de la latitude des deux points.72(*)

    Le panel des variables qualitatives montre que le partage d'une langue commune, d'un colonisateur commun et d'une frontière commune entre les pays partenaires devrait augmenter le commerce. Il s'agit de préserver les bonnes relations de voisinage et de ne pas trahir l'héritage colonial. Ces variables socio-historiques qui parfois sont difficiles à expliquer, seraient positivement liées au commerce. La variable Ouv (ouverture) est une dummy qui prend en compte le fait que l'ouverture à la mer est une facilité de commerce. Cette variable, qui regroupe ici le rôle du capital spatial doit positivement expliquer le commerce. Les variables AC prennent en compte l'effet des accords régionaux en termes de la création de commerce, de détournement des importations et des exportations à l'intérieur de d'une zone, ici la CEMAC (Agbodji, 2007 ; Bayoumi et Eichengreen, 1995 ; Frankel, 1997 ; Soloaga et Winters, 2001). La nature de leurs signes est ambiguë.

    MC est la principale variable d'intérêt de cette étude. Elle prend en compte l'effet de l'utilisation de la même monnaie par les pays de l'échantillon et/ou de la CEMAC. Elle prend la valeur un si les deux pays partagent la même monnaie et zéro sinon. Le signe attendu a priori est positif. Mais vu le caractère atypique des échanges au sein de la CEMAC, ce signe pourrait être dans le cadre de ce travail, positif mais non significatif. Cette variable peut davantage être affinée pour ne regrouper que les pays de la CEMAC. Il jouera alors le même rôle que AC1.

    Cette étude qui porte sur l'impact des réformes macro-monétaires et institutionnelles sur l'intégration par le marché en Zone CEMAC compte, à l'aide de deux sous-périodes, tester l'effet de la monnaie commune (CFA) et des autres variables connexes sur le commerce. Il s'agit donc de voir si après les réformes, le commerce a augmenté en Zone CEMAC. Cette méthodologie, inspirée de Gbetnkom et Avom (2005) capte l'évolution de la significativité des coefficients et surtout l'évolution de la principale variable d'intérêt (MC). Ainsi, si ce coefficient augmente, l'on dira qu'il y a eu évolution substantielle des échanges au travers de la monnaie en Zone CEMAC, mais il faudra vérifier sa significativité. Pour ce faire, la période 1993-994 sera considérée comme celle de rupture, car c'est au cours de celle-ci que les réformes les plus importantes ont eu lieu en Zone CEMAC, notamment le vaste programme de réformes fiscalo-douanière, la réforme monétaire (la dévaluation), sans oublier la création de la CEMAC en 1994. Pour ce faire, la première sous-période ira de 1990 à 1993, et la seconde de 2000 à 200373(*). L'écart entre les deux peut se justifier par le fait qu'il faille une durée moyenne (moyen terme) pour pouvoir juger rationnellement d'un changement sensible, après la mise en ouvre des réformes, qui ont un effet structurel. En plus, cette durée de 10 ans sert à vérifier l'endogénéité des critères d'optimalité monétaire de la CEMAC.

    Ainsi, la variable dépendante requiert un traitement qui est dû à sa nature. Les données étant en millions de dollars US courants, cette variable comporte des zéro et de données manquantes. Sa spécification en logarithme sera donc indéterminée, vu le domaine de définition de la fonction logarithmique. Pour surmonter ce problème, ces valeurs seront `'censurées'' à 1 pour les petits niveaux de commerce.

    2.2. TECHNIQUES D'ESTIMATION ET RESULTATS

    Le modèle de gravité tel que présenté ci-dessus parait être un instrument efficace de mesure du commerce. En ce qui concerne les techniques utilisées pour son estimation, il est généralement fait recours aux panels ou au model Tobit (Gbetnkom et Avom, 2005).

    2.2.1. Aperçu sur les données de panels

    Le modèle Tobit est utilisé lorsque la variable dépendante est censurée ou tronquée, c'est-à-dire lorsqu'on lui impose des valeurs à prendre surtout en cas de données manquante. Mais ici, cette méthode ne parait pas pertinente, car ce modèle est purement qualitatif et ne saurait donc appréhender les phénomènes commerciaux, qui eux sont quantitatifs. En plus, les coefficients issus de ces modèles servent généralement à donner le sens d'influence de chaque variable car la codification binaire ou polytomique est arbitraire. Ce qui complique l`interprétation des coefficients, car ils ne sont pas considérés comme des élasticités, mais des probabilités expliquant l'occurrence d'un l'événement.

    Pour ces différentes raisons, le modèle de gravité en panel (ici coupe transversale, car l'effet temporel a été expurgé) s'impose. Au-delà de ces raisons techniques, s'ajoute une raison pratique : les données sont exprimées en millions de dollar US, ce qui est une unité de compte élevée la présence des zéros dans la variable dépendante.

    Les données de panel offrent ainsi un avantage incontournable parce qu'elles prennent en compte au moins deux dimensions, spatiale et temporelle. Ainsi, si on fixe un individu observé, on obtient la série chronologique, ou coupe longitudinale le concernant. Si c'est la période examinée qui est fixée, on obtient une coupe transversale ou instantanée, pour l'ensemble des individus.

    Si on prend par exemple une équation économétrique de type , cette relation prend la forme pour l'observation it, c'est-à-dire l'individu i à la période t. La modélisation particulière porte uniquement sur la spécification des aléas . La forme de base s'écrit simplement :, où ui désigne un terme constant au cours du temps, ne dépendant que de l'individu i, vt un terme ne dépendant que de la période t, et wit un terme aléatoire croisé. La suite qui résume les techniques d'estimation dépend des hypothèses retenues quant aux composantes ui, vt et wit et à leurs relations.

    Tout d'abord, une méthode simple peut être utilisée en appliquant directement les moindres carrées ordinaires (MCO) sur les données empilées (Pooled Least Squares), sans se préoccuper de leur nature ni de celle de l'aléa. Ensuite, le modèle à effets fixes (fixed effects) suppose que ui et vt sont des effets constants, non aléatoires, qui viennent donc simplement modifier la valeur de l'ordonnée de l'équation selon les valeurs de i et de t. Si on suppose que les perturbations aléatoires croisées wit satisfont aux hypothèses classiques des MCO (c'est-à-dire centrées, homoscédastiques, indépendantes et normales), les estimations sont optimales. Enfin, il peut être fait appel au modèle à effets aléatoires, encore appelé modèle à erreurs composées, qui suppose les ui et vt aléatoires.

    Le cas des modèles de gravité est atypique. De par leur nature, ces modèles relèvent du domaine de l'économétrie spatiale. Mais leur spécification en trois dimensions (transversale, longitudinale et bilatérale) fait d'eux des modèles complexes à estimer. Des méthodes proposées consistent soit à fixer i, soit à fixer j, soit à fixer t dans les cas les plus simples. On peut aussi recourir à la programmation si l'on veut tenir compte des trois dimensions. Mais dans la spécification retenue ici, seules les dimensions bilatérale et transversale seront prises en compte. Il s'agira de tenir compte des variables en moyenne uniquement et ceci pour au moins deux raisons : d'abord pour contourner la modélisation tridimensionnelle qui nécessite une programmation relativement complexe, et ensuite, pour expurger des variables les effets conjoncturels.

    2.2.2. Sources de données, résultats et interprétations

    Pour mesurer l'effet de la monnaie commune sur le commerce des pays de la CEMAC, 25 pays d'ASS ont été regroupés dans un échantillon parmi lesquels 5 pays de la CEMAC à savoir le Cameroun, le Congo, le Gabon, la RCA et le Tchad (voir en annexe la liste des pays). Ce choix est important parce que cerner les déterminants des échanges en Zone CEMAC requiert la prise en compte des autres pays partenaires, ce qui permet de contourner le problème que pose la spécification des variables muettes.

    Les sources des différentes données quant à elle sont assez homogènes. Les données sur les exportations bilatérales des pays sont extraites des annuaires de la Banque Mondiale (African Data Indicators). Les données sur les PIB, les populations et les surfaces arables sont obtenues à partir du CD-Rom de la banque mondiale (World Bank Africa Data Base 2005). Toutes les variables muettes ont été compilées par l'auteur. La distance (orthodromique) a été obtenue à partir du site www.indo.com/cgi-bin/dist.

    Les données étant transformées en leurs moyennes, aucun test relatif aux séries temporelles n'est nécessaire, car les données doivent être considérées comme transversales. Seul le test de White en vue de corriger l'hétéroscédasticité a été effectué. Cette spécification des données en moyennes se justifie par le fait que des phénomènes conjoncturels au fil du temps peuvent facilement biaiser les résultats. Il peut s'agir d'une baisse ou d'une augmentation inattendue de la production due aux aléas climatiques, de l'effondrement d'un pont sur une voie stratégique d'approvisionnement, etc. En générant les moyennes, ces effets conjoncturels sont expurgés, ce qui permet un filtrage optimal. Mais la limite à ce niveau est de ne pas tenir compte de la spécificité annuelle des données. En effet, la moyenne est interprétée comme un niveau similaire d'une variable observé chaque année. Or il peut exister un écart important entre les observations.

    Au final, c'est cette mesure qui a été adoptée ; la méthode d'estimation étant celle des moindres carrés sur données empilées (Pooled Least Squares - PLS), car les pays sont considérés comme homogènes et les erreurs iid (indépendantes, centrées et suivant une loi log-normale). Les résultats sont consignés dans le tableau ci-dessous.

    Tableau 3: Résultats des estimations du modèle de gravité

    Pooled Least Squares

    Variable dépendante : Log Xij

    Sous-période 1990-1993

    Sous-période 2000-2003

    Variables explicatives

    Coefficients

    t-statistiques

    Coefficients

    t-statistiques

    Log PIBi

    0,369

    (1,33)

    1,604

    (3,49)*

    Log PIBj

    0,759

    (1,93)***

    1,138

    (3,24)*

    Log Popi

    0,218

    (0,50)

    -1,060

    (-1,82)***

    Log Popj

    0,160

    (0,33)

    -0,502

    (-1,086)

    Log SAi

    0,105

    (1,28)

    0,097

    (1,13)

    Log SAj

    -0,036

    (-0,55)

    -0,0007

    (-0,01)

    Log Dist ij

    -3,774

    (-9,55)*

    -4,209

    (-10,13)*

    Langcom

    -0,716

    (-1,03)

    -0,059

    (-0,08)

    Frocom

    3,321

    (3,44)*

    3,130

    (3,15)*

    Ouv

    2,864

    (4,78)*

    3,072

    (4,56)*

    Colcom

    2,729

    (3,45)*

    1,322

    (1,61)

    MC

    1,560

    (1,39)

    1,980

    (1,81)***

    AC1

    -5,829

    (-3,49)*

    -7,409

    (-4,65)*

    AC2

    -2,099

    (-2,77)*

    -4,119

    (-5,51)*

    AC3

    -1,786

    (-2,37)**

    -1,553

    (-2,10)**

    Statistiques sommaires

    Nombre d'observations

    575

     

    575

     
     

    0,4362

    0,4686

     

    0,4211

    0,4544

    F-statistic

    28,83

    32,87

    Prob(F-statistic)

    0,00

    0,00

    NB: * implique significativité à 1%; ** implique significativité à 5%; *** implique significativité à 10%

    Source : Construit par l'auteur

    Les résultats de cette estimation montrent globalement une évolution de la significativité des variables qui ont pour la plupart le signe attendu. En plus, la significativité globale du modèle est appréciable (F=28,83 et 32,87 significatif à 1%). Enfin, l'ajustement est aussi appréciable pour un modèle en coupe transversale (=42,11% et 45,44%).

    Les variables quantitatives étant exprimées en logarithme népérien, leurs coefficients sont directement interprétés comme des élasticités, alors que les coefficients des variables indicatrices seront interprétés comme des semi-élasticités74(*).

    Ainsi, les variables qui symbolisent la masse des pays à savoir le PIB sont de signe attendu, avec une significativité individuelle appréciable, sauf le PIB du pays i à la sous-période 1990-1993. Cette situation peut s'expliquer par le fait que la richesse dont dispose un pays n'est pas utilisée pour la production des biens exportables. Un phénomène économique peut aussi expliquer ce fait : les pays sont sous ajustement et la priorité n'est pas le commerce, mais la recherche des équilibres macro-économiques.

    Les populations quant à elles jouent un rôle ambigu au cours des deux sous-périodes : lors de la première, elles sont non significatives. Mais à la deuxième, le coefficient devient significatif pour le pays exportateur, mais faiblement (10%). Ce comportement des populations traduit un dynamisme dans la production des produits exportables. Les surfaces arables sont de signes attendus, mais non significatifs.

    La variable distance explique comme attendu négativement et significativement (à 1%) le commerce bilatéral. D'abord considérée comme la prise en compte des coûts de transaction, elle explique le fait que l'augmentation d'un point de ces coûts diminue respectivement de 3,74 et 4,20 les exportations bilatérales. Tous les modèles de gravité rencontrés jusqu'alors confirment cette hypothèse. Il ressort donc pour les pays de la CEMAC que la diminution du coefficient de cette variable impliquerait l'augmentation du commerce avec les partenaires les plus éloignés, mais malheureusement, il augmente.

    Avant de passer à l'interprétation des autres variables muettes, il convient d'analyser le signe de la principale variable, à savoir la variable d'union monétaire (MC). Tout d'abord, cette variable a un signe positif, mais sa significativité doit être examinée. Ainsi, sur la période 1990-1993, le coefficient n'est pas significatif. Ce résultat corrobore les études précédentes appliquées en Afrique (Carrere, 2002 et 2004 ; Avom, 2005 ; Agbodji, 2007). Rose (2002) a justifié ce résultat par la petite taille des observations et a conclu que l'effet est positif et statistiquement significatif pour de grands échantillons. Il convient d'ajouter aussi que le temps qui passe peut renforcer les échanges bilatéraux. Le commerce bilatéral s'inscrivant dans une logique dynamique, plusieurs facteurs (signature des accords régionaux, stabilité du taux de change, renforcement de la convergence et de la surveillance multilatérale) peuvent contribuer à expliquer l'effet positif quoique non substantiel de la monnaie commune. La période post-réformes montre une réalité légèrement différente, à savoir l'augmentation du coefficient (attendu) malgré sa faible significativité (10%). Ce résultat inspire un premier commentaire, celui de confirmation, mais au sens faible de la deuxième hypothèse de cette étude, à savoir l'impact positif et significatif des réformes macro-monétaires et institutionnelles sur l'intégration par le marché dans la CEMAC. On pourrait ainsi « conclure naïvement » à l'optimalité monétaire ex post de la Zone monétaire CEMAC, tel que le prédisent fortement Frankel et Rose (1998) et Rose (2000). Mais il convient de retenir au final que l'augmentation du coefficient de la variable MC peut être imputable à l'effet des réformes et aux aspects techniques d'estimation75(*).

    La principale variable historique, le colonisateur commun (Colcom), explique positivement les exportations entre les pays partenaires. Mais il reste non significatif dans la seconde sous-période. Ce résultat montre l'élan de déconnexion qui prévaut actuellement entre les anciennes colonies et la métropole (Côte-d'Ivoire et France par exemple). On remarque aussi la montée des nouveaux partenaires tels que l'Inde, les Etats-Unis et surtout la Chine, qui déjouent le rôle de la métropole. Ces nouveaux pays expliquent le détournement de commerce entre la métropole et les colonies. La langue commune, fortement corrélée à cette variable génère un coefficient négatif et non significatif, quelle que soit la sous-période. Ceci s'explique par le fait que les pays africains en général et ceux de la CEMAC en particulier utilisent plusieurs langues, surtout les langues maternelles, reléguant ainsi au second plan la langue officielle. En plus, la population est majoritairement illettrée, son seul moyen de communication étant sa langue maternelle, pourtant incomprise par l'autre. Ainsi, les coûts de transaction que génèrent les traductions et le risque de se tromper peuvent expliquer négativement le commerce.

    Les autres facteurs géographiques tels que la frontière commune (Frocom) et l'ouverture à la mer (Ouv) donnent des effets significativement positifs et escomptés (1%). Ainsi le partage d'une frontière terrestre par deux pays est un facteur qui aide à intensifier les échanges, car les coûts de transaction et de manutention sont considérablement allégés. En plus, l'ouverture à la mer est un atout géographique naturel qui dope le commerce d'un pays, lui permettant ainsi de contourner les coûts liés au dédouanement et au transit.

    Les variables AC, qui captent la création et le détournement des exportations sont toutes affectées du signe négatif et sont significatives à 1% pour AC1 et AC2 et à 5% pour AC3. Le coefficient affecté à AC1 est négatif, traduisant le fait que l'appartenance des deux partenaires à la Zone CEMAC diminue significativement leur commerce. Ceci peut se justifier par le manque de demandes croisées et surtout la non application effective du bouclier fiscalo-douanier. On note même une augmentation de la semi-élasticité en valeur absolue de ce coefficient dans le temps (de 5,82 à 7,4). AC2 est aussi négatif, augmente dans le temps et est significatif à 1%. Ceci implique que les pays de la CEMAC ont exporté de moins en moins vers leurs partenaires extra-zone, ce qui laisse présager paradoxalement une création de commerce intra-zone. AC3 est aussi négatif, significatif à 5% mais diminue dans le temps en valeur absolue (de 1,78 à 1,55). Ainsi les pays de la CEMAC ont augmenté leurs importations en provenance de leurs partenaires extra-zone.

    Ce modèle décèle quand même quelques limites au niveau technique, c'est-à-dire à la méthode d'estimation (Pooled Least Squares), un estimateur plus performant tel que celui de Hausman et Taylor (1981) pouvant corriger les problèmes d'endogénéité ; ensuite, le caractère statique et transversal du modèle, qui s'est imposé par la structure des données disponibles. L'introduction d'un régresseur retardé de l'endogène (Agbodji, 2007) aurait pris en compte le caractère dynamique du commerce bilatéral ; en outre la considération en une seule variable du facteur UM manque aussi de précision en ce qui concerne l'effet net du Franc CFA sur les échanges des pays de la CEMAC.

    CONCLUSION DU CHAPITRE 3

    Le modèle de gravité continue de s'imposer comme l'un des meilleurs instruments techniques en ce qui concerne l'explication des flux commerciaux bilatéraux entre les partenaires. Appliqué dans le cadre de ce travail pour les pays de la CEMAC, il ressort clairement que les principales variables du modèle (PIB, distance, monnaie commune) donnent globalement des effets attendus. Il ressort aussi que les réformes ont eu un impact significatif sur ces variables. L'évolution du coefficient affecté à la monnaie commune, loin de confirmer totalement l'hypothèse d'endogénéité des ZMO de Frankel et Rose (1998) et Rose (2000) pourrait par contre s'expliquer par des facteurs tels que le renforcement des critères de convergence (et surtout le critère monétaire - l'inflation), la stabilité du taux de change. Mais l'endogénéité de la Zone monétaire CEMAC est une hypothèse en devenir, qui deviendra une réalité avec l'application effective du bouclier fiscalo-douanier, la stabilité renforcée du Franc CFA, la coopération des pays leaders, et enfin, la consolidation des acquis en matière de convergence des économies de cette sous-région.

    CHAPITRE 4. LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE INFLUENCE-T-ELLE LA SPECIALISATION DANS LA CEMAC ?

    Il est clairement montré dans la littérature que l'utilisation de la même monnaie au sein d'une zone débouche soit à une augmentation du commerce, soit à une spécialisation des pays. Cette spécialisation peut être issue de la suppression de l'effet frontière monétaire (adoption d'une monnaie unique par les pays), ou par les dotations factorielles.

    Le cas de la ZF africaine est particulier. Les estimations de la part du commerce intra-zone dans les deux principaux blocs (CEMAC et UEMOA) montrent des résultats inférieurs à 10%. Ce résultat a été fortement confirmé par le modèle de gravité estimé dans le chapitre précédent. Paradoxalement la plupart des pays de la zone dégagent des excédents de production et donc, devraient être enclins à commercer davantage entre eux (Boungou Bazika, 2004). Ainsi, existe-t-il des excédents des produits exportables au sein de la Zone CEMAC ? Si oui comment sont-ils gérés ?

    Le présent chapitre s'atèle à répondre à ce questionnement en deux sections : la première portera sur l'évaluation du potentiel commercial des pays de la CEMAC, et la deuxième établira le lien qui existe entre le degré, la nature de la spécialisation et le niveau des échanges sous l'influence de la monnaie unique.

    SECTION 1. LE POTENTIEL COMMERCIAL DES PAYS DE LA CEMAC

    Parler de potentiel commercial revient dans un premier temps à évaluer la sphère productive de la CEMAC et dans un second temps à estimer son potentiel commercial.

    1.1. EVALUATION DE LA SPHERE PRODUCTIVE DE LA CEMAC

    Il est généralement reconnu que les pays de la Zone CEMAC sont des économies dans lesquelles le secteur primaire (agricole) prévaut. En plus, l'un des problèmes auxquels font face les pays africains, c'est le manque de productions complémentaires, ce qui empêche le développement du commerce intra-régional (Boungou Bazika, op. cit.).

    1.1.1. La structure de production des pays de la CEMAC

    Les pays de la Zone CEMAC sont généralement des monocultures et donc peu diversifiés. L'indicateur de diversification des exportations de ces pays se situe à un niveau bas, mais surtout en deçà de la moyenne du continent africain comme l'illustre le graphique ci-dessous (CEA, 2006).

    Graphique 7 : Niveau de diversification des économies de l'Afrique en 2002

     

    Source : construit par l'auteur à partir de CEA (2006)

    La justification de ce faible niveau de diversification se trouve dans l'architecture productive. En effet, la part de l'agriculture dans la composition du PIB depuis plusieurs décennies occupe environ 18%. Les récentes performances macroéconomiques, majoritairement dépendantes des secteurs des hydrocarbures et de l'agriculture montrent qu'en 2006, la filière des hydrocarbures s'est constituée comme le principal moteur de la croissance. Le Tchad et le Congo sont les principaux tireurs dans cette filière, avec respectivement une augmentation de 28,7% et de 15,25% respectivement. En plus, la ventilation sectorielle du PIB dans la Zone CEMAC en 2005 (graphique 8) montre la prédominance des secteurs industries extractives et agriculture / sylviculture. Les deux secteurs à eux seuls ont contribué à hauteur de 55% dans la formation du PIB de la sous région (CEA, op. cit).

    Cette structure de la production a plusieurs causes à savoir : les causes exogènes (restructuration des pays par les métropoles76(*)) et les causes endogènes (position géographique qui impose aux pays une certaine catégorie de produits à exporter). Cette caractéristique leur impose une ouverture naturelle, allant ainsi à l'encontre des politiques d'ouverture compétitives.

    Il ressort que les systèmes productifs des pays de la CEMAC souffrent d'une adaptation structurelle. Ainsi, la relance de l'intégration régionale reste fragile et sans impact significatif, parce que les systèmes productifs n'ont pas fondamentalement changé. Ils auraient permis l'accroissement de la production et favoriser l'intégration sectorielle, tant à l'intérieur de chaque économie qu'entre les économies de l'union. L'activité productive est toujours articulée autour de quelques produits primaires, agricoles ou miniers, suivant la logique de la division internationale du travail.

    Graphique 8 : Ventilation sectorielle du PIB dans la Zone CEMAC (%) en 2005

     

    Source : construit par l'auteur à partir de CEA (2006)

    Ainsi, le problème de l'intégration réelle n'est pas seulement dû au manque de complémentarités productives, situation qui pourrait bloquer le renforcement des échanges intra-communautaires ; mais surtout de l'existence d'entraves (faible capital spatial) à la valorisation des complémentarités potentielles (Bongou Bazika, op. cit).

    1.1.2. Une complémentarité commerciale et productive souhaitable

    La complémentarité est une notion qui délimite la nature du commerce - composition des exportations et des importations - (complémentarité commerciale) ainsi que la possibilité d'existence des excédents (complémentarité productive) d'un pays ou d'une région. En Zone CEMAC hors Cameroun, tous les pays ont une structure commune dans leur architecture productive (tableau 5) : la prédominance de la monoculture et de la faiblesse des dotations, la conséquence étant la faible diversification des exportations. Zone appartenant au golfe de Guinée et situé aux confins de tous les autres blocs régionaux africains, seule la RCA ne dispose pas encore de gisement pétrolier.

    La problématique de la complémentarité au sein d'une UM a longtemps été mise en veilleuse. Il convient de noter qu'un examen minutieux de cette notion remonte aux travaux précurseurs de Meade (1955) où il montre que la meilleure Union Douanière est celle qui se caractérise par la similitude et la complémentarité des économies qui la forment. Fouda (2003) soutient que l'une des conditions de réussite de l'intégration économique est la disposition, avant le passage des accords, de potentialités productives qui encouragent la complémentarité, en créant ainsi des courants additionnels d'échange.

    Tableau 4 : Dotation en principales ressources naturelles des pays de la CEMAC

    Pays

    Ressources naturelles

    Cameroun

    Pétrole, cacao, café, coton, huile de palme, hévéa, bois, cultures

    vivrières et élevage.

    RCA

    Or, diamant, cobalt et bois.

    Congo

    Pétrole et bois.

    Gabon

    Pétrole et bois.

    Guinée Equatoriale

    Pétrole.

    Tchad

    Pétrole, coton et élevage.

    Source : Construit par l'auteur, à partir de CEMAC (2006b)

    Sur un plan empirique, l'analyse de la complémentarité couvre deux aspects majeurs : la complémentarité commerciale et la complémentarité productive.

    La complémentarité commerciale se base sur les échanges internationaux. Il capte les échanges effectués entre deux pays faisant partie d'un même bloc régional. Mickaeley (1994) a élaboré un indice pour mesurer cette complémentarité :

    Mik est la part du produit i dans les importations du pays k et Xij est la part du produit i dans les exportations du pays j. Ainsi, si ICC=0, aucun bien exporté par un pays n'est importé par un autre ; ICC=1 implique que les importations et les exportations sont structurées de la même façon dans les deux pays. Plus la valeur de cet indice est élevée, plus l'intégration régionale a des possibilités de se consolider77(*). Mais cet indice se limite au plan commercial et ne permet pas de saisir les productions qui génèrent les échanges commerciaux. Pour lever cette équivoque, un indice plus parlant et qui permettrait de comprendre les causes de la faiblesse des échanges est l'indice de complémentarité productive (ICP), qui se réfère à la structure de production des pays membres. Cet indicateur permet de conclure à la possibilité des excédents et donc de commerce au sein d'une zone d'intégration. Son expression technique est la suivante :

    pt est la production totale de la zone en %, pa la production du pays a membre de la zone en %, dt la demande totale équivalent à la population totale de la zone, da la demande du pays a représentée par la population totale du pays, np le nombre de pays producteurs du bien et n le nombre de pays faisant partie de la zone. Ainsi si l'ICP < 0, le produit est non complémentaire ; si l'ICP = 50, la complémentarité est supposée moyenne ; si l'ICP < 50, la complémentarité est faible ; si l'ICP > 50, la complémentarité est supposée forte.

    Il convient de noter que les facteurs déterminants de cette complémentarité productive sont l'absence ou le manque de concurrence entre les industries de la zone et la taille interne des marchés (Boungou Bazika, 2004).

    La conclusion tirée ci-dessus sur le manque ou la faible complémenté productive entre les pays de l'Afrique n'est pas absolue. En effet, les pays africains disposent de potentialités productives qui méritent d'être valorisées à travers les infrastructures routières, les études de marchés des pays partenaires par exemple. Il faut en plus noter que certains pays de la CEMAC en particulier et ceux de l'Afrique en général disposent des excédents exportables (tableau 5).

    Tableau 5: Excédents des produits exportables au sein des pays africains

    Pays

    Nature des excédents

    Ethiopie, Mali, Niger, Somalie, Soudan

    Viande

    Côte d'Ivoire, Madagascar, Maurice, Mauritanie, Mozambique, Sénégal, Somalie

    Poisson

    Burundi, Cameroun, Kenya, Zimbabwe

    Céréales

    Côte d'Ivoire, Liberia, Nigeria

    Caoutchouc

    Kenya, Malawi, Mozambique, Tanzanie

    Thé

    Côte d'Ivoire, Ghana, Nigeria

    Cacao

    Maurice, Swaziland, Zimbabwe

    Sucre

    Congo Démocratique, Mozambique

    Hydroélectricité

    Angola, Nigeria, Congo, Gabon

    Pétrole

    Source : Extrait de Boungou Bazika (2004)

    Une application empirique de l'ICP par Boungou Bazika (2004) en Zone CEMAC sur la période 1990-1998 décèle des résultats intéressants. Il trouve l'existence de quatre niveaux de complémentarité de produits dans la CEMAC CEMAC.

    Ainsi, les produits non complémentaires au sein de la CEMAC sont le maïs, le café, le bois scié et les boissons alcoolisées, avec des ICP négatifs. Les produits à faible complémentarité sont la viande de boeuf et le riz paddy avec des indices de 47,9 chacun. Parmi les produits à moyenne complémentarité, on rencontre les produits de la pêche, le cacao, les tissus, les parties de machines, avec des ICP compris entre 50 et 60. Les produits à forte complémentarité sont nombreux : manganèse, autres bois, tabac, Okoumé, cartouches, dioxyde de carbone, azote, cigarette, gasoil, lubrifiants, diamants, coton tourteaux avec des ICP qui se situent au delà de 100%.

    Il ressort que près de 85,7% des produits réalisés en CEMAC possèdent un indice de complémentarité élevé. En plus, la taille du pays et donc du marché influence la valeur de l'indice. Les produits issus des pays à petite taille sont plus complémentaires (surtout lorsqu'ils sont producteurs uniques) que ceux venant des pays à grande taille de marché, car le phénomène d'absorption entre en jeu. Il ressort que les produits manufacturés ont un ICP élevé, ceci s'expliquant par leur forte demande et le fait que leur offre est assurée en majorité par un seul pays (le Cameroun et plus ou moins le Gabon). En outre, la non complémentarité du café et du maïs s'explique par le fait que ce sont les pays à forte demande qui en sont les premiers producteurs78(*). Un produit tel que le textile ne présente qu'une complémentarité moyenne, due au fait que les importations extra-zone sont largement supérieures aux importations intra-zone, masquant ainsi toute création de courants de commerce additionnels. Ce dernier cas s'expliquerait par la compétitivité imposée à travers la faiblesse des coûts de productions dans les pays producteurs extra-CEMAC, malgré l'instauration du TEC.

    De ce qui précède, il ressort qu'une analyse profonde de la sphère productive des pays de la CEMAC révèle des complémentarités (ex ante), contredisant ainsi l'hypothèse généralement répandue de productions non complémentaires. En plus, il convient, pour bénéficier de cette complémentarité potentielle, de renforcer le capital spatial.

    Mais au delà de la complémentarité, qu'en est-il du potentiel commercial dans la zone ?

    1.2. CALCUL DU POTENTIEL COMMERCIAL (EXPORTATIONS) DES PAYS DE LA CEMAC

    Le potentiel commercial est un indicateur qui permet de juger le gap qui existe entre le niveau effectif et le niveau potentiel ou prédit du commerce d'un pays. C'est une mesure de l'intensité commerciale. Comprendre la problématique du potentiel commercial exige tout d'abord un détour méthodologique et enfin une application empirique.

    1.2.1. L'analyse graphique du potentiel des exportations : une approche par le résidu

    L'appréhension du potentiel commercial peut être faite à travers une analyse graphique du résidu, qui est une méthode absolue et comparative. Il s'agit ici d'analyser le résidu de l'estimation du modèle de gravité, qui est un modèle déterminant le niveau normatif des flux d'échange bilatéraux. Il convient de rappeler que le modèle de gravité qui a servi à estimer les déterminants des échanges des pays de la CEMAC inclus d'autres pays extra-CEMAC. Ce constat qui est simplement technique ne biaise pas l'analyse. La méthodologie selon cette première approche consiste à générer le résidu et à constater sa déviation par rapport à sa tendance moyenne qui est zéro par hypothèse. L'une des hypothèses émises lors de l'estimation est celle de la normalité du résidu, c'est à dire que ce dernier est iid (individuellement et identiquement distribué) tout en suivant une loi log-normale. Cette hypothèse veut aussi dire que les erreurs du modèle de gravité sont homoscédastiques, c'est-à-dire qu'elles ont une variance constante quel que soit le pays :

    Le résidu représente ainsi l'ensemble des facteurs qui surviennent ou peuvent survenir de façon aléatoire et ayant un impact significatif sur la variable dépendante (ici le flux des exportations). Il capte ainsi les fluctuations inattendues et imprévues. Ces différents événements peuvent être l'accident d'un camion transportant des marchandises d'un pays à l'autre, l'effondrement d'un pont sur un axe reliant deux pays, le climat et/ou la météorologie, avec un impact positif ou négatif sur la production d'une denrée exportable dans la sous-région.

    Techniquement, le résidu est la différence entre la valeur effective d'une variable et sa fitted value ou valeur potentielle, ou valeur prédite. Il décrit ainsi la déviation de cette valeur autour de son niveau réel. Ainsi, si le résidu est positif, la valeur effective est supérieure à la valeur potentielle ; si le résidu est négatif, la valeur potentielle est supérieure à la valeur effective ; s'il est nul, la variable se situe à son niveau potentiel ou attendu. L'application de cette méthode graphique du résidu est représentée à l'annexe 4.

    L'interprétation ci-dessus peut être facilement transposée au modèle estimé dans cette étude. Si pour une observation la courbe se situe au point zéro (moyenne résiduelle), il y a égalité entre les exportations potentielles et les exportations effectives. Si la courbe se situe au dessus de cette moyenne, on déduit que les exportations effectives sont supérieures aux exportations prédites. Donc le pays commerce au delà de ses capacités. Si enfin la courbe se situe en deçà du point zéro, l'interprétation à donner c'est que le pays se trouve dans une situation de sous-capacité commerciale avec ses partenaires.

    Suite à ce bref aperçu, trois groupes de pays se distinguent dans la Zone CEMAC, quelle que soit la sous-période. Le premier groupe est celui des pays dont les points du résidu sont majoritairement observés au dessus de la moyenne. Cela traduit une capacité pour ces pays de commercer au-delà de leurs potentialités. On retrouve dans ce groupe de pays le Cameroun et le Gabon. Le second groupe, formé du Congo et du Tchad montre que les pays commercent faiblement au-delà de la moyenne. Le troisième groupe, formé de la RCA montre globalement une absence de commerce, car la quasi-totalité des points de la courbe du résidu se trouvent en deçà de la moyenne.

    Mais une question doit être posée en ce qui concerne l'orientation de ce commerce. Le commerce observé au Cameroun et au Gabon profite-t-il à ses partenaires de la zone ? Pour répondre à cette question, une méthodologie plus rigoureuse qui est le calcul du potentiel commercial (ici des exportations) doit être adoptée.

    1.2.2. Une analyse robuste : le calcul du potentiel des exportations

    Le calcul du potentiel commercial apparaît comme une méthode robuste si l'on veut juger du niveau d'échange entre un groupe de pays. Techniquement, il s'agit de faire le ratio du commerce potentiel ou prédit au commerce effectif79(*).

    Le commerce effectif est celui que l'on observe dans les différentes bases de données qui ont servi à effectuer les différents travaux empiriques. En d'autres termes, c'est l'ensemble des flux enregistrés par les services compétents d'un pays, le commerce potentiel reflétant son niveau ajusté, prédit ou estimé. La variable qui a été étudiée ici c'est le flux des exportations bilatérales, c'est-à-dire les exportations qui partent du pays i vers un pays destinataire j. C'est la raison pour laquelle, seul le potentiel des exportations sera calculé dans cette section.

    Ainsi, pour générer les exportations potentielles ou prédites, il faut combiner les coefficients estimés du modèle aux différentes variables explicatives suivant chaque sous-période. Il s'agit pour cela de multiplier les différents coefficients obtenus après estimation du modèle gravitaire aux différentes valeurs observées des variables explicatives en fonction des deux sous-périodes. On peut aussi obtenir ce niveau potentiel en retranchant le résidu généré du niveau effectif de la variable dépendante. Il convient de noter que c'est la première technique qui a été utilisée.

    L'analyse ne sera pas globale, mais ciblera uniquement les pays de la CEMAC inclus dans l'échantillon, à savoir le Cameroun, le Congo, le Gabon, la RCA et le Tchad80(*). Il s'agira dans un premier temps d'extraire leurs flux bilatéraux effectifs et potentiels de ces pays et ensuite d'effectuer leur ratio respectifs. Les données sont en millions de dollars US courants, et les résultats sont consignés dans le tableau ci-dessous, malgré l'indétermination en certains points.

    Tableau 6 : Résultats du potentiel des exportations des pays de la CEMAC (millions de $ US)

    Exportations de i vers j

    1990-1993

    2000-2003

    Exports effectives

    Exports

    prédites

    Potentiel des exports

    Exports effectives

    Exports

    prédites

    Potentiel des exports

    Cam>Con

    Cam>Gab

    Cam>RCA

    Cam>Tch

    Con>Cam

    Con>Gab

    Con>RCA

    Con>Tch

    Gab>Cam

    Gab>Con

    Gab>RCA

    Gab>Tch

    Rca>Cam

    Rca>Con

    Rca>Gab

    Rca>Tch

    Tch>Cam

    Tch>Con

    Tch>Gab

    Tch>RCA

    23,667

    27,667

    14,333

    3,667

    0

    0

    0

    0

    1

    0

    0,333

    0

    0

    0

    0

    0,333

    0,333

    0

    0

    0,333

    0,016

    1,089

    0,022

    0,062

    0,003

    0,005

    8,4.10-6

    1,4.10-6

    0,255

    0,006

    7,4.10-4

    1,2.10-5

    1,1.10-5

    2,8.10-5

    2,2.10-6

    4,3.10-4

    0,0017

    7.10-6

    9,6.10-6

    0,0018

    6,76.10-4

    0,039

    0,0015

    0,017

    -

    -

    -

    -

    0,255

    -

    0,022

    -

    -

    -

    -

    0,0013

    0,0051

    -

    -

    0,0054

    18,667

    27,667

    12,333

    29,333

    7

    2

    0

    0

    2

    9,333

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    2,333

    0,0452

    12,122

    0,0198

    0,0204

    0,0125

    0,0588

    0,00248

    1,42.10-5

    8,347

    0,146

    0,00057

    0,0003

    9,77.10-6

    4,4.10-6

    4,07.10-7

    2,46.10-6

    6.10-4

    1,51.10-6

    1,27.10-5

    0,00014

    0,0024

    0,4381

    0,0016

    0,0006

    0,0018

    0,0294

    -

    -

    4,1735

    0,0156

    -

    -

    -

    -

    -

    -

    -

    -

    -

    6.10-05

    Source : Calcul de l'auteur

    L'analyse révèle globalement un faible potentiel des exportations. Ainsi, lorsque les exportations observées sont positives, elles sont automatiquement supérieures (largement) aux exportations prédites. Seul le Gabon fait l'exception dans la seconde sous-période dans son flux bilatéral vers le Cameroun. Les pays sont ainsi dans une logique qui reflète la volonté de commercer au-delà de leurs capacités ou de leur potentiel. Ceci peut être expliqué par la recherche du renforcement de intégration par le marché.

    Le premier commentaire montre que lorsque les exportations effectives sont nulles, les exportations prédites (quoique négligeables) sont positives. Cette configuration rend impossible le calcul du potentiel de ces exportations, car l'on fait face à une indétermination. Ces cas sont fréquents pour la RCA, le Congo et le Tchad.

    L'analyse par sous-périodes ne montre en rien l'évolution substantielle du potentiel. La sous-région CEMAC serait ainsi dans un état statique et même déprimant en ce qui concerne ses flux d'exportations intra-zone.

    L'analyse par pays révèle aussi des résultats similaires, à savoir la non augmentation substantielle des exportations, hormis le seul cas particulier entre le Gabon et le Cameroun au cours de la seconde sous-période où le potentiel est de 4,17. En outre, le Congo et la RCA sont les seuls pays n'ayant pas exportés de façon substantiel vers leurs partenaires sous-régionaux au cours d'une sous-période (la première sous-période pour le Congo et le seconde pour la RCA).

    Ces résultats viennent une fois de plus contredire l'hypothèse d'une complémentarité productive entre les pays de la CEMAC. Mais il convient de rappeler que l'ICP connaît des limites à ce niveau, car il mesure le potentiel ex ante, alors que le modèle de gravité mesure le potentiel ex post. La notion de potentiel ex ante signifie ici que les pays disposent des dotations en produits exportables, mais ne sont pas valorisées, les causes étant la faiblesse du capital spatial et le manque de besoins croisés par exemple. Le potentiel ex post signifie que malgré la faiblesse du capital spatial, les pays échangent globalement en deçà du niveau prévu. L'exception en Zone CEMAC est faite par le Cameroun, qui exporte plus que proportionnellement à son niveau potentiel. C'est en fait le rôle que doit jouer le pays pivot dans une UM. Sur les deux sous-périodes par exemple, ce pays assure la totalité des exportations sous-régionales vers le Congo et le Gabon.

    Ainsi, l'analyse du potentiel des exportations dans la CEMAC révèle que les pays commercent au-delà de leur niveau potentiel, ce qui pourrait montrer une réelle volonté d'intégration. Or la principale variable d'UM comme le révèle le test effectué au chapitre 3 ne montre pas significativement cette volonté. La limite à ce niveau peut être l'extraversion des pays de la CEMAC vers les autres pays de l'échantillon et qui ne figurent pas dans le calcul du potentiel commercial. Cette réalité prête donc le flanc à la spécialisation des pays.

    SECTION 2. LE DEGRE ET LA NATURE DE LA SPECIALISATION DANS LA CEMAC, UN FREIN POUR LES ECHANGES INTRA-REGIONAUX

    La deuxième conclusion majeure en ce qui concerne les ZMO est la spécialisation internationale (Krugman, 1993). Ici l'utilisation d'une monnaie commune débouche sur la poursuite des avantages comparatifs, ce qui diversifie davantage les cycles. Cette spécialisation a plusieurs facettes et la compréhension de cet aspect s'avère fondamental dans ce travail. C'est pourquoi il convient tout d'abord d'explorer l'existant tout en faisant un détour sur la théorie de l'économique géographique.

    2.1. JUSTIFICATION DE LA SPECIALISATION INTERNATIONALE

    La spécialisation internationale a longtemps intéressé les chercheurs. Le débat a évolué au fil du temps, partant des classiques anglais et de la théorie suédoise, pour greffer de nos jours la problématique de la spécialisation à l'utilisation de la monnaie unique.

    2.1.1. La notion de spécialisation dans la littérature économique

    La spécialisation illustre le fait qu'un pays comporte dans ses exportations une faible variété de produits. C'est un indicateur de non diversification. Au-delà de sa considération par les théories classiques, Kenen (1969) est le premier à proposer le degré de spécialisation comme un critère d'optimalité monétaire d'une zone. Pour lui, les économies diversifiées peuvent plus facilement adopter des changes fixes et s'intégrer en une zone monétaire, car ils gèrent facilement les chocs asymétriques qui surviennent.

    Krugman (1993), l'un des pionniers de l'analyse de cette notion, montre que lorsque l'intégration est poussée au sein d'une zone monétaire, les pays se spécialisent en fonction de leurs avantages comparatifs. Des phénomènes d'agglomération se forment et débouchent finalement sur une faible synchronisation des cycles réels et sur une forte asymétrie des chocs. C'est la théorie du « cercle vicieux » des ZMO. Busson et Villa (1994) viennent corriger cette affirmation en apportant le facteur « dotation ». Pour ces auteurs, si les pays faisant partie d'une UM se spécialisent en fonction de leurs dotations, ceci pourrait accroître leurs flux commerciaux, mais à une condition : la diversification entre les pays ou la spécialisation inter-branche.

    En plus, la nature du secteur de spécialisation, qui peut être industriel ou agricole a un impact significatif sur le volume du commerce au sein d'une UM. Ainsi, les pays du Nord, qui sont généralement spécialisés dans la production des biens industriels échangent des produits substituables et du coup, ont un niveau élevé de commerce (du moins en valeur) entre eux, car ce sont des produits à forte valeur ajoutée.

    La nature inter et intra-industrielle de la spécialisation a également été abordée par d'autres auteurs. La spécialisation inter-industrielle résultant de l'intensification du commerce international, se caractérise par une concentration de l'activité économique dans certains secteurs. Par ailleurs, la spécialisation intra-industrielle se caractérise par le fait qu'il peut y avoir, simultanément, dans une industrie donnée ou dans un pays, des exportations et des importations, et ce, de façon significative (Lassudrie-Duchêne, 1971 ; Dufort et al, 2005). Ainsi, la spécialisation inter-industrielle se caractérise par l'essor de secteurs essentiellement exportateurs ou importateurs alors que la spécialisation intra-industrielle se caractérise par l'essor de secteurs qui sont à la fois d'importants exportateurs et importateurs.

    Des variantes dans l'analyse de la spécialisation ont été apportées. Ces variantes intègrent les facteurs tels que les flux commerciaux et de capitaux, le chômage et les contrats salariaux (Osakwe et Shouyong, 1998). D'autres par contre intègrent la proximité géographique, l'intensité des échanges commerciaux et du marché potentiel comme facteurs de polarisation des IDE dans les pays du centre ou meneurs (Dupuch et Mazier, 2002). Le cas européen pris par Dupuch et Mazier (2002) montre que les investissements domestiques ont contribué au renforcement de la spécialisation des pays, alors que les IDE ont favorisé la diversification des activités et les échanges intra-branche de qualité.

    La spécialisation peut aussi être cernée de façon régionale ou nationale. Il s'agit ici de savoir si tous les pays d'une sous-région sont spécialisés dans la production d'un bien spécifique ou alors si chaque pays de la sous-région est spécialisé en fonction de ses avantages comparatifs spécifiques. En Europe par exemple, et comme le montre Gaulier (2003), la spécialisation est plus marquée au niveau régional que national. Il trouve une augmentation de l'intensité de la spécialisation sectorielle entre 1980 et 1996, notamment dans les secteurs de l'agriculture, des industries et des services. En plus, il se dégage une augmentation nette de la part du commerce intra-branche dans le commerce européen, dû selon Fontagné et al, (1997), à une homogénéisation des spécialisations.

    Une autre considération affinée de la spécialisation internationale réside dans la théorie de l'économie géographique81(*), aspect formalisé de la géographie économique, elle-même partie de la géographie urbaine. Généralement analysée sous le prisme de l'économie spatiale, les auteurs majeurs à avoir donné une ampleur déterminante à cette théorie sont Krugman (1991), Venables (1996) et Fujita et al, (1999). Leurs travaux expliquent les phénomènes de concentration et d'agglomération géographique dans un espace régional par le jeu de forces centrifuges et centripètes. Ainsi, pour Krugman (1992) « Any interesting model of economic geography must involve a tension between "centripetal" forces that tend to produce agglomerations and "centrifugal" forces that tend to pull them apart ».

    Dupuch et Mazier (2002) montrent quant à eux que lorsque les pays sont faiblement intégrés et les barrières fiscales élevées, les firmes se répartissent entre les régions pour répondre à la demande des consommateurs. Pour des coûts de transaction intermédiaires, un mouvement d'agglomération se produit afin de bénéficier de la réduction des coûts et de l'accroissement du potentiel de demande. Mais si la main-d'oeuvre est immobile, des écarts de salaires persistent. Pour des coûts de transaction très faibles, les différences de rémunérations agissent comme une force centrifuge et les firmes se localisent là où les salaires sont plus faibles.

    Au-delà de cet aspect général, quelle est la réalité de la spécialisation en Zone CEMAC.

    2.1.2. Un état théorique de la spécialisation en Zone CEMAC

    La réalité de la spécialisation en Zone CEMAC nécessite tout d'abord un test intuitif des différents développements théoriques ci-dessus.

    Ainsi, l'hypothèse de Busson et Villa (1994) de spécialisation inter-branche sous la condition de diversification productive entre les pays ne se vérifie pas en Zone CEMAC. Tout d'abord les activités productives dans la zone sont à dominante agricoles et ensuite les caractéristiques géographiques favorisent le fait qu'ils soient dotés des potentialités similaires. On pourrait ainsi se poser la question de savoir si la spécialisation est plutôt de type inter ou intra-brache.

    Une intégration régionale réussie nécessite que les pays n'aient pas encore exploité à fond les spécialisations (Fouda, 2003). Ainsi, le fait que les pays n'aient pas des produits à échanger entre eux peut rendre le processus d'intégration impossible. Les spécialisations dont il faut encourager dans ce sens sont celles spécifiques aux différents pays et sont fortement indexés aux dotations factorielles (Snirivasan, 1993). Cette vision rejoint celle de Boungou Bazika (2002 et 2004) qui montre que le fait de ne pas posséder des besoins croisés encourage plutôt au sein des groupements régionaux africains, une intégration verticale avec les pays à niveau de développement supérieur. Ceci montre une logique de commerce inter-branche a priori au détriment des pays membres, confinés dans la pauvreté et l'instabilité socio-politique82(*).

    Malgré la proximité géographique, la polarisation des IDE intra-CEMAC n'a pas été accentuée à cause de la faiblesse de l'intensité commerciale ou encore du marché potentiel. L'exemple européen est toujours parlant car selon Dupuch et Mazier (2002), les investissements domestiques et les IDE expliquent significativement et respectivement la spécialisation et la diversification des activités. Il convient en plus d'ajouter que les IDE intra-CEMAC sont quasi nuls, mais pourraient s'améliorer avec la redynamisation du processus d'intégration et l'amélioration des principes de bonne gouvernance.

    En plus, la Zone CEMAC s'inscrit dans une mouvance de spécialisation régionale, c'est-à-dire la similitude des tissus productifs nationaux. Tout les pays de la CEMAC en dehors de la RCA sont producteurs de pétrole par exemple, secteur qui tire prioritairement la croissance. D'ailleurs, la ventilation du PIB par secteur montre que les industries extractives occupent à elles seules 37% du PIB de la CEMAC en 2005 (CEA, 2006). Ce type de spécialisation ne peut qu'encourager l'intégration verticale, car l'absorption de ces produits par les pays de la sous-région est nulle.

    Il convient tout de même de souligner que la configuration de la spécialisation régionale est bénéfique à une région si celle-ci est hautement industrialisée et fabrique des produits manufacturés facilement substituables comme en Europe. Seule cette situation est capable de développer un commerce intra-branche substantiel, car des phénomènes de « demande de différence » pour les biens qui bénéficient de la « qualité de non banalisation » peuvent se produire (Lassudrie-Duchêne, 1971). En plus, les politiques de contingentements ou de quotas et un niveau élevé de tarification doivent être proscrites pour faciliter les transactions. Cette réalité n'est pas non plus vérifiée en Afrique centrale.

    En outre, la spécialisation nationale, pendant de la diversification régionale serait salutaire pour les pays de la CEMAC. Elle non plus n'est pas observée car les pays ont des dotations factorielles similaires et même unitaires, ce qui renvoie le problème à la dimension ex ante : les dotations factorielles expliquent significativement la spécialisation internationale. L'indice de diversification des exportations des pays de la CEMAC se trouve en deçà de la moyenne africaine qui est de 7,7%. Le plus élevé se situe à 4,3% et est à mettre à l'actif du Cameroun, (CEA, 2006).

    Il apparaît au final que cette hyper-spécialisation est fortement influencée par les dotations initiales, et les pays sont des mono-producteurs. Ce soubassement intuitif et théorique mérite d'être approfondi à travers une analyse rigoureuse et empirique.

    2.2. ANALYSE EMPIRIQUE DE LA SPECIALISATION EN ZONE CEMAC

    Les pays de la CEMAC, qui n'ont pas significativement confirmés l'hypothèse d'endogénéité des ZMO prônée par Frankel et Rose (1998) et Rose (2000) seraient-ils finalement spécialisés ? Si oui, quel type de spécialisation rencontre-t-on dans ces pays ? La méthodologie pour répondre à ce questionnement consiste à calculer deux indices : l'indice de Herfindhal et l'indice de Grubel et Lloyd. Ces indices s'avèrent pertinents ici car ils ne se limitent pas à vouloir déterminer la possibilité de l'existence des excédents de production (spécialisation ex ante) comme l'indice de complémentarité productive, mais mesurent la spécialisation ex post.

    2.2.1. Le degré de spécialisation en Zone CEMAC

    Cerner le degré de spécialisation en Zone CEMAC requiert que l'on adopte un indice spécifique : l'indice de Herfindhal (H). Beaucoup plus adapté à l'analyse de la concentration ou la fragmentation géographique des entreprises, l'indice H se prête aussi facilement à la mesure de la spécialisation commerciale internationale d'un pays. Sa formulation mathématique est la suivante :

    .

    Il s'interprète comme la mesure de la part des carrés des exportations de chaque secteur j (Xijt) dans les exportations totales (Xit). L'élévation au carré permet ainsi de donner plus de poids aux plus grands secteurs d'exportation. L'indice H est le dépassement d'un autre indice qui mesure la concentration industrielle et qui peut être facilement transposé dans la spécialisation internationale : le rapport de concentration83(*).

    Mais dans le cadre de ce travail, face au manque de données des autres pays de la CEMAC, seul un indice H pour le Cameroun sera calculé. Pour cela, la méthodologie consiste à considérer le Cameroun (locomotive de la CEMAC) comme un échantillon dans l'espace CEMAC, tout en sachant que les résultats de ce dernier pourront être facilement extrapolables. Cette hypothèse est émise dans la meure où le Cameroun est le pays le plus diversifié de la zone et représente environ 70% de la part du commerce intra-zone, comme cela a déjà été montré (voir tableau 4 et graphique 6b). Ainsi, les produits les plus exportées par le Cameroun et en fonction de la disponibilité des données sont : la banane fraîche, le café, la pâte de cacao, le cacao en fèves, les huiles brutes de pétrole, les carburants et lubrifiants, les bois bruts, les feuilles de placage en bois, le coton brut et l'aluminium brut. L'indice H est ainsi calculé pour les années 2003, 2004 et 2005 à partir des données issues de la Morasse 2005 du MINCOM (2007).

    Tableau 7 : Résultats de l'indice de Herfindhal appliqué aux données du Cameroun

    Années

    H1

    H2

    H3

    2003

    0,2225

    0,2833

    0,4197

    2004

    0,1958

    0,2378

    0,4765

    2005

    0,2334

    0,2702

    0,5124

    Source : Calcul de l'auteur

    Trois indices ont été calculés, à savoir un indice qui tient compte du total des exportations du Cameroun (H1), ensuite un indice qui ne tient compte que du total des exportations des produits évoqués ci-dessus (H2), et enfin un indice calculé en fonction de l'orientation des exportations vers les sous-groupes régionaux dans le monde (H3).

    Les deux premiers indices sont faibles, traduisant le fait que le Cameroun n'est pas un pays spécialisé, c'est-à-dire qu'il comporte une base productive relativement diversifiée. Ce résultat doit être sagement interprété ici, car plusieurs produits ont des exportations non significatives (banane fraîche, café, pâte de cacao, cacao en fèves, coton brut et aluminium brut)84(*). Ainsi, seuls les secteurs pétroliers et forestiers sont significativement représentés dans les exportations. C'est pourquoi les contributions de chaque produit à l'élaboration de l'indice s'avèrent importantes pour affiner davantage l'interprétation. Il ressort ainsi que les secteurs pétroliers et forestiers contribuent respectivement à plus de 90% en moyenne dans l'explication de la spécialisation. Ainsi, la faiblesse des exportations des autres secteurs biaise la valeur de H à la baisse.

    Après cette analyse, on pourrait conclure à une diversification dans les exportations du Cameroun, mais le calcul des pondérations montre une spécialisation relative dans les secteurs forestiers et pétroliers. Ce résultat doit être nuancé pour tous les autres pays, qui sont hyper-spécialisés. L'approche innovante ici est celle de la prise en considération des contributions des secteurs à l'élaboration de H. Elle paraît fondamentale et permet ainsi de pallier le biais autour du calcul de l'indice.

    En ce qui concerne le troisième indice qui tient compte de l'orientation géographique (sommation en fonction des sous-régions), les résultats montrent une spécialisation moyenne et croissante au fil du temps. Ceci voudrait dire que les pays du Nord au fil du temps continuent à se montrer comme les principales destinations des exportations du Cameroun, confirmant ainsi l'hypothèse de spécialisation verticale. Ainsi, les exportations intra-Afrique centrale sont résiduelles et même décroissantes : 8,4% en 2003 ; 6,57% en 2004 et 4,63% en 2005.

    Les indices ci-dessus montrant une spécialisation relative pour le cas du Cameroun, leur application aux autres pays de la CEMAC ne pourrait révéler qu'une hyperspécialisation.

    Mais qu'en est il de la nature de la spécialisation de ces pays ?

    2.2.2. La nature de la spécialisation en Zone CEMAC

    Une autre mesure de la spécialisation est celle qui consiste à savoir si les pays échangent dans les mêmes branches ou non. C'est une mesure de la nature de la spécialisation et l'indice approprié est celui élaboré en 1975 par Grubel et Lloyd (GL). Cet indice capte généralement la part du commerce intra-branche dans le commerce total. Sa construction part de la détermination de la part du commerce inter-branche et du commerce intra-branche : Le commerce inter-branche se note, et le commerce intra-branche se note. Ainsi, puisque l'indice de GL est la part du commence intra-branche dans le commerce total, il vient que :

    Xi représente les exportations dans la branche i et Mi les importations dans la branche i et CT le commerce total. Le numérateur mesure la part du commerce intra-branche de la branche i dans le commerce total. Ai est communément appelé le coefficient de Balassa. L'indice de GL varie entre 0 et 1. Plus il est proche de 1, plus le commerce intra-industriel représente une fraction importante du commerce total85(*).

    Tableau 8 : Résultat de l'indice de GL des pays de la CEMAC.

    Années

    Cameroun

    Congo

    Gabon

    Guinée Eq.

    RCA

    Tchad

    M/ses

    S/ces

    M/ses

    S/ces

    M/ses

    S/ces

    M/ses

    S/ces

    M/ses

    S/ces

    M/ses

    S/ces

    1994

    1995

    1996

    1997

    1998

    1999

    2000

    2001

    2002

    2003

    0,8300

    0,7871

    0,8556

    0,8517

    0,8929

    0,9374

    0,8394

    0,8634

    0,9972

    0,9292

    0,4494

    0,5332

    0,5283

    0,5550

    0,6026

    0,6235

    0,5880

    0,5495

    0,6616

    0,7034

    0,7798

    0,6749

    0,5232

    0,5628

    0,5791

    0,5031

    0,3914

    0,4978

    0,4778

    0,4831

    0,2252

    0,1140

    0,0107

    0,1392

    0,1679

    0,1939

    0,1556

    0,1989

    0,1970

    0,2195

    0,4945

    0,5046

    0,4659

    0,5013

    0,6176

    0,4995

    0,5372

    0,4876

    0,4857

    0,4848

    0,2948

    0,2910

    0,2610

    0,2509

    0,2829

    0,2713

    0,2629

    0,2629

    0,2878

    0,3004

    0,9848

    0,9398

    0,8859

    0,8289

    0,9709

    0,7017

    0,5079

    0,5467

    0,5385

    0,5095

    0,0930

    0,0808

    0,0350

    0,0229

    0,0334

    0,0206

    -

    0,0073

    0,0080

    0,1161

    0,9648

    1

    0,9363

    0,9667

    0,9583

    0,9450

    0,8556

    0,8677

    0,9371

    0,9594

    0,5263

    0,5071

    0,5497

    0,5180

    0,6896

    0,4313

    0,3200

    0,4444

    0,3584

    0,5416

    0,7780

    0,9346

    0,9896

    0,9938

    0,9734

    0,8805

    0,7973

    0,5338

    0,3480

    0,7029

    0,2592

    0,5031

    0,3654

    0,3552

    0,3651

    0,3868

    0,3696

    0,3059

    0,2617

    0,2017

    Moyenne

    0,8784

    0,5795

    0,5473

    0,1621

    0,5079

    0,2766

    0,7415

    0,0417

    0,9391

    0,4886

    0,7932

    0,3374

    Source : Calcul de l'auteur.

    A défaut d'une base de données détaillée en branches, les données disponibles présentent les exportations et les importations dans les secteurs des marchandises et des services. L'indice de GL a donc été appliqué à ces deux secteurs. Il permettra ainsi de savoir si les pays de la Zone CEMAC sont spécialisés dans les services ou dans le commerce des marchandises. Les données sont issues de la base de données de la Banque Mondiale (Africa Data Indicators, 2005) et sont exprimées en millions de dollars US courants. L'indice a été calculé pour la période 1994-2003 et des moyennes par pays et par secteurs ont été calculées, en vue de faciliter l'interprétation.

    L'analyse globale de l'indice de GL révèle globalement une spécialisation de type intra-branche dans le secteur des marchandises et inter-branche dans le secteur des services. Ceci voudrait dire que le commerce de tous les pays de la CEMAC est en majeure partie occupé par les marchandises. Ainsi, ces pays vendent et achètent les marchandises en majorité dans leurs transactions commerciales.

    Ce résultat semble conforté par le fait que les pays d'ASS ont beaucoup plus orienté leurs investissements dans le secteur des marchandises, car ce n'est récemment que l'idée du développement du secteur des services (tourisme, voyage et hôtellerie par exemple) a pris de l'ampleur. En outre, cette spécialisation confirme bien le niveau de développement de ces pays qui sont des pays émergents, et donc encore incapables de développer des services compétitifs à l'échelle mondiale.

    L'analyse par pays est beaucoup plus intéressante, car deux groupes de pays se distinguent. Ainsi, dans le secteur des marchandises, tous les pays sont spécialisés mais dans des proportions différentes. Les pays à forte spécialisation intra-marchandise sont le Cameroun et la RCA, avec des indices supérieurs à 70%. Les pays à spécialisation intermédiaire sont le Gabon, le Congo, la Guinée Equatoriale et le Tchad (avec des indices compris entre 50 et 70%). L'explication du premier groupe de pays réside dans le fait que ce sont des pays relativement diversifiés, c'est-à-dire spécialisés dans un petit nombre de produits (le Cameroun dans les produits agricoles, forestiers et pétroliers et la RCA dans les céréales, le bétail et les minerais). L'explication liée au second groupe réside dans le fait que les pays sont exclusivement spécialisés dans un secteur : ce sont des pays hyper-spécialisés, c'est-à-dire des mono-producteurs.

    La conclusion ci-dessus confirme le niveau de l'indice de GL appliqué dans le secteur des services. Ainsi presque tous les pays obéissent à une spécialisation inter-services, en dehors du Cameroun qui présente un indice supérieur à 50% (à savoir 57,95%). Il convient de souligner que parmi ces pays, la Guinée Equatoriale est le pays qui obéit le plus à ce type de spécialisation, avec un indice de spécialisation inter-service égal à 95,83%. Ceci voudrait dire que la Guinée Equatoriale produit des services qu'elle n'utilise pas ou qui ne sont pas substituables avec ceux produits par ses partenaires commerciaux. Le cas du Cameroun est illustratif, et confirme son juste équilibre en ce qui concerne sa base productive des services et des marchandises, son niveau de spécialisation inter-marchandise se situant à 12,16%.

    CONCLUSION DU CHAPITRE 4

    La deuxième conclusion majeure liée à la théorie des ZMO est la spécialisation des pays, surtout lorsque ces derniers suivent la logique des avantages comparatifs. A la question de savoir si l'utilisation d'une monnaie unique conduit à une forte spécialisation en Zone CEMAC, la réponse donnée par ce chapitre n'est pas stricte. Prenant l'exemple du Cameroun, il ressort une conclusion ambiguë : l'indice de spécialisation internationale montre que ce pays n'est pas spécialisé au sens absolu, mais plutôt au sens « relatif  », dans les secteurs forestiers et pétroliers. Ce caractère relatif s'explique par le fait que ce pays possède une base productive (et donc exportable) relativement diversifiée, mais dont quelques branches (pétrole et bois) occupent une grande part. Ce résultat a été obtenu en calculant le poids de ces secteurs lors l'élaboration de l'indice de Herfindhal.

    En ce qui concerne la nature de la spécialisation, l'indice de Grubel et Lloyd appliqué à l'ensemble des pays de la CEMAC montre que ces pays obéissent globalement à une spécialisation intra-branche dans le secteur des marchandises et inter-branche dans le secteur des services. Mais des données désagrégées auraient pu aboutir à des résultats plus affinés.

    Enfin, tous ces résultats sont confirmés par le faible niveau du potentiel commercial des pays de la CEMAC, et montrent que les pays sont spécialisés en fonction de leurs dotations naturelles.

    CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

    L'analyse empirique du marché de la CEMAC a privilégié un aspect : le rôle de la monnaie unique sur le processus d'intégration par le marché. Trois enseignements majeurs issus d'une méthodologie économétrique (modèle de gravité augmenté) et statistique (indicateur du potentiel des exportations et indices de Herfindhal et de Grubel et Lloyd) doivent être tirés :

    v le premier montre que la monnaie unique n'a pas joué le rôle attendu dans le renforcement de l'intégration par le marché. Mais l'estimation montre que ce rôle s'apprécie au fil du temps, car il est observé une augmentation du coefficient de la variable UM ainsi que de sa significativité. Mais lorsque la variable est construite à partir des seuls pays de la CEMAC, le coefficient associé est négatif, significatif à 1%, et augmente en valeur absolue dans les deux sous-périodes ;

    v le second enseignement, qui découle du premier montre que les pays de la CEMAC sont spécialisés dans un petit nombre de produits. Ainsi, ils obéissent à une spécialisation intra-branche dans le secteur des marchandises et inter-branche dans celui des services. Cette spécialisation est imposée non par la suppression de l'effet frontière monétaire, mais par les dotations naturelles ;

    v en ce qui concerne le potentiel commercial des pays, il se dégage que les pays de la sous-région Afrique centrale possèdent un faible potentiel commercial qui n'est pas valorisé à cause de la faiblesse du capital spatial (infrastructures routières, ferroviaires, connexions Internet et téléphoniques, etc.).

    Au final, il ressort que les pays de la Zone CEMAC, tout en obéissant à une logique de spécialisation régionale (car cinq pays sur six sont producteurs de pétrole) montrent quelques signes d'endogénéité sur le plan monétaire, hypothèse en devenir. Cette conclusion est confortée à travers l'augmentation dans le temps de la valeur du coefficient de la variable d'UM en présence des partenaires. En plus, le Cameroun à lui tout seul ne saurait déterminer le degré de diversification, malgré son poids dans la Communauté. Ainsi, la suppression de l'effet frontière monétaire a conduit d'une part à l'amélioration du commerce quoique non significative et d'autre part à la spécialisation des pays, mais cette fois ci en fonction des dotations naturelles.

    CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS DE POLITIQUE ECONOMIQUE

    Rendu à l'issue du travail, il convient de rappeler qu'il s'agissait de répondre à la question de savoir si l'utilisation du Franc CFA en Zone CEMAC est un atout dans le processus de l'intégration par le marché ou plutôt un facteur de spécialisation de cette zone. Cette étude a été menée en intégrant l'impact des réformes macroéconomiques et institutionnelles de la décennie 90. Ce questionnement, qui a débouché sur une issue dialectique au courant des années 90 en deux principales conclusions (endogénéité et spécialisation des ZMO), a été vérifié en la Zone CEMAC. La méthodologie a consisté à utiliser en deux parties, des outils à la fois documentaires, statistiques et économétriques.

    La première partie qui a dressé le bilan des réformes sur le processus d'intégration en Zone CEMAC, a livré un résultat principal selon lequel les réformes ont eu un impact mitigé. Cet impact mitigé se justifie par le fait que sur les plans financier et institutionnel, il y a eu plusieurs résultats (assainissement et modernisation du système financier, stabilité monétaire, dispositif de convergence des pays, création de la CEMAC). Mais, il a fallu une deuxième génération de réformes pour atteindre significativement ces résultats. En ce qui concerne le volet de l'intégration par le marché, les réformes n'ont pas apporté les résultats probants. Ainsi, la part du commerce intra-zone est largement restée en deçà des 10% du total du commerce international jusqu'à nos jours.

    La deuxième partie quant à elle visait à vérifier les deux conclusions de la théorie des ZMO (endogénéité et spécialisation), théorie qui étudie le lien entre la monnaie unique et le commerce. Cette partie s'est imposée car il fallait, après avoir montré la suppression de l'effet frontière monétaire suite au bilan de réformes, détecter la direction que cette suppression a prise (renforcement du marché commun ou spécialisation des pays). Ainsi, la question de savoir si les pays de la CEMAC commercent davantage entre eux parce qu'ils utilisent la même monnaie et vice-versa débouche sur la conclusion selon laquelle le Franc CFA n'a pas joué le rôle attendu sur le processus d'intégration par le marché. Ce résultat infirme ainsi quoique faiblement la deuxième hypothèse de cette étude, à savoir l'endogénéité. La troisième hypothèse qui teste la spécialisation des pays est, elle aussi faiblement confirmée, car elle débouche sur une spécialisation relative pour le Cameroun et à une spécialisation absolue (hyperspécialisation) pour les autres pays. En ce qui concerne la nature de la spécialisation, faute d'avoir des données désagrégées par branches, les résultats montrent que les pays obéissent à une spécialisation intra-branche dans le secteur des marchandises et inter-branche dans le secteur des services. En plus, un détour sur le potentiel commercial des pays de la CEMAC montre que ce potentiel se trouve à un niveau faible, expliqué à son tour par la faiblesse du capital spatial.

    Des deux parties, il ressort toujours des résultats mitigés, montrant ainsi le caractère atypique de la Communauté. Mais il serait souhaitable que ces résultats soient plutôt mis à l'actif d'une transition des pays de la coopération vers l'union, transition appuyée par les récentes mutations entreprises lors du Sommet de N'djaména en avril 2007 et qui doivent se poursuivre.

    Ce travail recèle quelques limites notamment sur le plan empirique : tout d'abord la non prise en compte de la dimension temporelle lors de l'estimation du modèle de gravité, la spécification adoptée ne permettant pas d'entreprendre des tests de diagnostique; la seconde limite a trait au caractère extrêmement agrégé des données qui ont servi au calcul de l'indice de Grubel et Lloyd, ce qui ne permet pas de connaître exactement dans quelles branches ou dans quels secteurs spécifiques de l'économie les pays sont spécialisé.

    Somme de tout ceci, quelques recommandations de politique économique en guise d conclusion s'avèrent nécessaires :

    1. sur le plan de la politique monétaire, il faut renforcer l'indépendance de la BEAC afin qu'elle puisse poursuivre librement et sans pressions politiques les réformes macro-financières et institutionnelles, dont elle a été chargée par les chefs d'Etat. Cette indépendance doit être comprise de façon large, surtout sur les plans instrumental, institutionnel et budgétaire. Mais il faut au préalable veiller à consolider les acquis relatifs à l'implémentation de ces réformes. Cette autonomie aura nécessairement pour pendant la confortation de la suppression de l'effet frontière monétaire et le renforcement du rôle de la monnaie unique dans l'augmentation du commerce sous-régional. Cette situation pourra enfin favoriser l'optimalité monétaire de cette sous-région. Pour y parvenir, l'agence de restriction externe (la France) qui joue le rôle de gendarme au sein des organes de la BEAC doit être maintenue, car l'existence d'une telle agence a contribué à plus d'un titre à la réussite de la coopération monétaire et financière dans la sous-région.

    2. sur le plan financier, il faut militer en faveur de l'assainissement du climat des affaires, facteur d'attrait des IDE et générateur de commerce. Ensuite, cet assainissement pourrait restaurer la confiance entre la sphère financière et la sphère réelle, afin que des crédits soient accordés en faveur des projets intégrateurs et en capital spatial. Il convient de souligner que la BDEAC à elle seule ne peut pas financer tous les projets sous-régionaux, qui requièrent souvent des montants énormes. Il faut donc à ce niveau impliquer tout le système bancaire de la zone et surtout miser sur un marché financier sous-régional performant, qui pourra facilement transformer des ressources en emplois longs. Dans cette optique, la Bourse des Valeurs Mobilières d'Afrique Centrale (BVMAC) à un rôle capital à jouer et son entrée en vigueur s'avère nécessaire, malgré le conflit d'objectifs et de leadership qui l'attend face à la Douala Stocks Exchange (DSX), qui a vue le jour depuis 2003.

    3. en ce qui concerne le renforcement de l'intégration sous-régionale, deux principaux volets doivent être privilégiés : commerciale et monétaire. Sur le plan commercial, l'intégration dans la CEMAC ne sera couronnée d'un succès que s'il se développe en son sein un véritable Marché. La réussite à ce niveau passe par une base productive, dont la nature est déterminante. Elle doit être diversifiée, afin de permettre des demandes croisées entre les partenaires à l'intégration. Pour y parvenir, il faut se déconnecter de la logique de la monoculture et développer au sein des pays membres de véritables politiques nationales d'ouverture à vocation sous-régionale, plutôt que de subir une ouverture naturelle qui alimente l'intégration verticale. En ce qui concerne le volet monétaire, il faut militer pour le respect des critères traditionnels des ZMO au sens de Mundell (1961). Pour cela, il est urgent de faciliter la libre circulation des facteurs et surtout des personnes à travers la mise en vigueur du passeport CEMAC, bien que ce point connaisse encore quelques écueils dans la sous-région, avec des expulsions fréquentes en Guinée Equatoriale. Aussi, il ne faut pas oublier le renforcement des conditions de convergence, qu'elle soit nominale, réelle ou structurelle. Sur ce point, la discipline des pays en ce qui concerne le respect du critère monétaire (inflation) de convergence doit être étendue aux critères de dépenses, bien que pilotés sur le plan national. Un contrôle strict du respect des critères de convergence passerait par l'application et le suivi rigoureux des sanctions, la mise en place d'un bouclier efficace de compensation en cas de pertes budgétaires et la coordination des politiques nationales.

    4. sur le plan institutionnel, il faut renforcer les institutions sous-régionales, et la priorité doit être accordée à la Commission nouvellement créée lors du dernier sommet des chefs d'Etat en avril 2007 à N'Djaména. Pour une action efficace de cette dernière, tous ses mécanismes de financement doivent être obligatoires et restructurés. La proposition à ce niveau est la formation des agents régionaux chargés du recouvrement de la Taxe Communautaire d'Intégration (TCI), dotés d'un esprit communautaire et protégés par des pouvoirs supranationaux. En outre, les versements doivent être directs dans les comptes de la Commission. Cette dernière doit marquer une rupture nette avec l'ancien Secrétariat Exécutif qui s'est avéré être une simple chambre d'enregistrement. Pour ce faire, la nomination du Président doit être issue d'un processus concurrentiel en fonction de ses caractéristiques propres et ce poste doit être rotatif, ce qui permettrait d'assurer l'égalité des partenaires. Enfin, il faut éviter des conflits entre les différents organes, les différentes Institutions et surtout entre la Commission et le Conseil des chefs d'Etat. Pour y parvenir, il faut clairement définir les frontières existantes entre ces différents organes à travers une application rigoureuse des textes. Une situation conflictuelle à ce niveau illustrerait une fois de plus le manque de volonté politique des dirigeants, car c'est une partie de leurs pouvoirs qui doit être transférée à la Commission.

    Enfin, concluons avec Eboué (2004) pour dire que ce n'est qu'à ces conditions que l'Union Monétaire CEMAC pourra devenir un espace de croissance tirée par le commerce extérieur et sous-régional.

    ANNEXES

    Annexe 1

    Répartition de la population en zone CEMAC EN 2003.

     

    Source : Construit par l'auteur à partir du World Bank Africa Database 2005.

    Annexe 2

    Evolution de la surveillance multilatérale en Zone CEMAC de 2002 à 2006

    Couverture extérieure de la monnaie

    Solde budgétaireprimaire

    Taux de pession fiscale

    Masse salariale sur recettes budgétaires

    Compte courant sur PIB

    Dette extérieure sur exportations

    Source : construit par l'auteur.

    Annexe 3-a

    La dynamique de la convergence en Zone CEMAC de 1985 à 2006

    Solde budgétaire de base sur PIB nominal

    Ratio dette extérieures / PIB

    Arriérés de paiement extérieurs

    Inflation annuelle moyenne

    Source : construit par l'auteur.

    CRITERES DE CONVERGENCE

    PAYS

    Nombre de pays respectant le critère

     

    Cameroun

    Centrafrique

    Congo

    Gabon

    Guinée Equatoriale

    Tchad

    CEMAC

    2006

     

    2005

    2004

    Solde budgétaire de base sur PIB

    (norme : >=0)

    Respecté

    Non respecté

    Respecté

    Respecté

    Respecté

    Respecté

    Respecté

    5

    5

    5

    Taux d'inflation annuel moyen

    (norme : <3%)

    Non Respecté

    Non Respecté

    Respecté

    Respecté

    Non respecté

    Non Respecté

    Non Respecté

    2

    4

    5

    Encours de la dette publique totale rapporté au PIB nominal

    (norme : <=70%)

    Respecté

    Non respecté

    Non respecté

    Respecté

    Respecté

    Respecté

    Respecté

    4

    4

    4

    Arriérés gestion courante

    - intérieurs

    - extérieurs

    (norme : = 0)

    Respecté

    Non respecté

    Non respecté

    Respecté

    Respecté

    Non Respecté

    Non respecté

    3

    3

    1

    Nombre de critères respectés par le pays

    2006

    3

    0

    2

    4

    3

    2

    2

     
     

    2005

    4

    1

    2

    4

    3

    2

    3

    2004

    3

    1

    2

    3

    3

    3

    3

    Annexe 3-b : Vue synoptique des résultats prévisionnels de la Surveillance Multilatérale dans la CEMAC au 31 décembre 2006.

    Source : extrait de CEMAC, 2006-b

    Annexe 4

    Analyse graphique du résidu du modèle de gravité des pays de la CEMAC

    1990-1993

    Cameroun

    Congo

    Gabon

    RCA

    Tchad

    2000-2003

    Cameroun

    Congo

    Gabon

    RCA

    Tchad

    Source : Construit par l'auteur

    Annexe 5

    Liste des 25 pays et capitales de l'échantillon.

    CEMAC

    UEMOA

    Autres pays d'ASS

    Pays

    Capitales

    Pays

    Capitales

    Pays

    capitales

    Cameroun

    Congo

    Gabon

    RCA

    Tchad

    Douala

    Brazzaville

    Libreville

    Bangui

    N'djaména

    Bénin

    Burkina Faso

    Côte-d'Ivoire

    Mali

    Niger

    Sénégal

    Togo

    Porto Novo

    Ouagadougou

    Yamoussoukro

    Tombouctou

    Niamey

    Dakar

    Lomé

    Burundi

    Ethiopie

    Ghana

    Kenya

    Madagascar

    Mauritanie

    Nigeria

    R. D. Congo

    Rwanda

    Tanzanie

    Uganda

    Zambie

    Zimbabwe

    Bujumbura

    Addis Ababa

    Accra

    Nairobi

    Antananarivo

    Nouakchott

    Lagos

    Kinshasa

    Kigali

    Dar Es Salam

    Entebbe

    Lusaka

    Harare

    Source : construit par l'auteur

    Annexe 6

    Tableaux des estimations extraits du logiciel EViews 3.0 (la variable dépendante est Log Xij)

    1990-1993

     

    2000-2003

     

    Source : Construit par l'auteur

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    TABLE DES MATIERES

    SOMMAIRE 1

    AVERTISSEMENT 3

    DEDICACE 4

    REMERICIEMENTS 5

    RESUME 6

    ABSTRACT 6

    LISTE DES SIGLES 7

    LISTE DES GRAPHIQUES 9

    LISTE DES TABLEAUX 9

    LISTE DES ANNEXES 9

    INTRODUCTION GENERALE 10

    PREMIERE PARTIE : DE L'UDEAC A LA CEMAC : LES MUTATIONS DE L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE 19

    INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE 20

    CHAPITRE 1 : LE CONTENU DES REFORMES MACROECONOMIQUES ET INSTITUTIONNELLES APPLIQUEES EN ZONE CEMAC 21

    SECTION 1. DES DIFFICULTES DE L'INTEGRATION ECONOMIQUE EN AFRIQUE CENTRALE ... 21

    1.1. BREVE HISTOIRE DE L'INTEGRATION ECONOMIQUE EN AFRIQUE CENTRALE 21

    1.1.1. Les grandes motivations de l'intégration en Afrique centrale 22

    1.1.2. La nature de l'intégration avant les réformes 23

    1.2. L'ARCHITECTURE ECONOMIQUE DES PAYS AVANT LES REFORMES 24

    1.2.1. L'organisation monétaire et bancaire 25

    1.2.2. L'environnement réel et institutionnel 27

    SECTION 2. ... A LA NECESSITE DES REFORMES EN ZONE CEMAC 27

    2.1. LES REFORMES MONETAIRES, BANCAIRES ET FINANCIERES 28

    2.1.1. La première vague des réformes 28

    2.1.2. La deuxième vague des réformes 31

    2.2. LES REFORMES REELLES ET INSTITUTIONNELLES 32

    2.2.1. Les réformes réelles 32

    2.2.2. Les réformes institutionnelles 36

    CONCLUSION DU CHAPITRE 1 38

    CHAPITRE 2 : LE BILAN DES REFORMES SUR L'INTEGRATION EN ZONE CEMAC 39

    SECTION 1 : LE BILAN DES REFORMES DE LA PREMIERE GENERATION 39

    1.1. UN BILAN MITIGE 39

    1.1.1. Une stabilité monétaire et un renforcement du dispositif financier et bancaire 39

    1.1.2. Au niveau des échanges intra-sous-régionaux 41

    1.2. L'INERTIE DES INSTITUTIONS ET LE MANQUE D'ESPRIT COMMUNAUTAIRE 42

    1.2.1. Les goulets d'étranglement au niveau des institutions 43

    1.2.2. L'expérience de quelques sous-régions : l'UE et la CEDEAO / UEMOA 44

    SECTION 2 : LES RECENTS REAMENAGEMENTS DANS LA CEMAC : LA POURSUITE DES REFORMES DE LA DEUXIEME GENERATION 46

    2.1. LA REDYNAMISATION DES PRINCIPALES INSTITUTIONS 46

    2.1.1. La BEAC : comment renforcer son indépendance et réorienter ses missions ? 46

    2.1.2. La nécessité d'une Commission en Zone CEMAC 48

    2.2. LES NOUVELLES PERSPECTIVES EN ZONE CEMAC 50

    2.2.1. Les objectifs d'intégration de la Communauté à moyen terme (2006-2011) 50

    2.2.2. Les goulots à l'atteinte des objectifs d'intégration 51

    CONCLUSION DU CHAPITRE 2 55

    CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 56

    DEUXIEME PARTIE : LA CEMAC, UNE UNION MONETAIRE ATYPIQUE : LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE 57

    INTRODUCTION DE LA DEUXIEME PARTIE 58

    CHAPITRE 3. LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE ENCOURAGE-T-ELLE LE COMMERCE DANS LA CEMAC ? 59

    SECTION 1. JUSTIFICATION THEORIQUE DU LIEN ENTRE MONNAIE ET COMMERCE 59

    1.1. APERCU SUR LES THEORIES DU COMMERCE INTERNATIONAL 60

    1.1.1. Les explications traditionnelles du commerce international 61

    1.1.2. Les dépassements des théories traditionnelles 62

    1.2. UN NOUVEAU DETERMINANT DU COMMERCE INTERNATIONAL : LA MONNAIE UNIQUE 63

    1.2.1. La théorie des zones monétaires optimales (ZMO) 63

    1.2.2. Au-delà de la monnaie unique : l'apport de la frontière et de la distance 66

    SECTION 2. VERIFICATIONS EMPIRIQUES EN ZONE CEMAC 67

    2.1. LE MODELE DE GRAVITE AUGMENTE 67

    2.1.1. Présentation du modèle 67

    2.1.2. Le choix, la justification des variables et la période d'étude 70

    2.2. TECHNIQUES D'ESTIMATION ET RESULTATS 72

    2.2.1. Aperçu sur les données de panels 72

    2.2.2. Sources de données, résultats et interprétations 74

    CONCLUSION DU CHAPITRE 3 78

    CHAPITRE 4 : LA SUPPRESSION DE L'EFFET FRONTIERE MONETAIRE INFLUENCE-T-ELLE LA SPECIALISATION DANS LA CEMAC ? 79

    SECTION 1. LE POTENTIEL COMMERCIAL DES PAYS DE LA CEMAC 79

    1.1. EVALUATION DE LA SPHERE PRODUCTIVE DE LA CEMAC 79

    1.1.1. La structure de production des pays de la CEMAC 79

    1.1.2. Une complémentarité commerciale et productive souhaitable 81

    1.2. CALCUL DU POTENTIEL COMMERCIAL (EXPORTATIONS) DES PAYS DE LA CEMAC 84

    1.2.1. L'analyse graphique du potentiel des exportations : une approche par le résidu 85

    1.2.2. Une analyse robuste : le calcul du potentiel des exportations 86

    SECTION 2 : LE DEGRE ET LA NATURE DE LA SPECIALISATION DANS LA CEMAC, UN FREIN POUR LES ECHANGES INTRA-REGIONAUX 89

    2.1. JUSTIFICATION DE LA SPECIALISATION INTERNATIONALE 89

    2.1.1. La notion de spécialisation dans la littérature économique 89

    2.1.2. Un état théorique de la spécialisation en Zone CEMAC 91

    2.2. ANALYSE EMPIRIQUE DE LA SPECIALISATION EN ZONE CEMAC 93

    2.2.1. Le degré de spécialisation en Zone CEMAC 93

    2.2.2. La nature de la spécialisation en Zone CEMAC 95

    CONCLUSION DU CHAPITRE 4 98

    CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 99

    CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS DE POLITIQUE ECONOMIQUE 100

    ANNEXES 104

    BIBLIOGRAPHIE 109

    RESSOURCES INTERNET (WEBLIOGRAPHIE) 114

    TABLE DES MATIERES 115

    * 1 Les dénominations de ces regroupements sont respectivement l'Union du Maghreb Arabe (UMA), la Communauté de Développement de l'Afrique Australe (SADC), la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), le Marché Commun de l'Afrique Orientale et Australe (COMESA), et la Communauté Economique des États de l'Afrique Centrale (CEEAC). Cette stratégie visait à terme la formation de l'Union Africaine.

    * 2 L'intégration par la production se justifie par le fait qu'en présence d'inégalités structurelles, des asymétries spatiales et des inégalités économiques, il appartient à un ensemble de pays, par une politique interventionniste, de favoriser la prise d'initiatives et de provoquer la substitution aux importations. Le protectionnisme minimum quant à lui traduit l'idée selon laquelle un niveau de libéralisation des échanges plus poussé dans la région assure un niveau de protection élevé à l'intérieur de la zone par rapport à l'extérieur. L'approche par les règles d'harmonisation s'intéresse à un ensemble de normes que doivent suivre les pays désirant s'intégrer afin de faire bénéficier à leur groupement les gains de l'extension du marché (CEA, 2004).

    * 3 Les deux exemples asiatique et africain posent le problème d'ouverture à l'économie mondiale. C'est ainsi que les pays asiatiques ont préférés dans un premier temps s'ouvrir à l'économie mondiale, et ce n'est que tout récemment qu'ils ont pensé à la dimension sous-régionale. Cette logique est tout à fait l'inverse en Afrique, et notamment en Zone Franc.

    * 4 Née en 1994 et entrée en vigueur cinq ans plus tard, la CEMAC est une relique de l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC), créée trois décennies auparavant (1964). C'est une partition sous-régionale à caractère économique et surtout monétaire, qui a pour principale mission le renforcement du processus d'intégration en Afrique centrale. Elle est composée de six pays : Le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale, la République Centrafricaine (RCA) et le Tchad. Quatre institutions sont rattachées à la Communauté, gérées par quelques organes de décision. Comme institutions, on note l'Union Économique de l'Afrique centrale (UEAC), l'Union Monétaire de l'Afrique Centrale (UMAC), le Parlement Communautaire et la Cour de Justice Communautaire, comprenant une Chambre Judiciaire et une Chambre des Comptes. Les organes sont : la Conférence des chefs d'État, le Conseil des Ministres de l'UEAC, le Comité Ministériel de l'UMAC, le Secrétariat Exécutif (remplacé depuis avril 2007 par une Commission), le Comité Inter-Etats, la Banque des États de l'Afrique Centrale (BEAC), la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC), l'Institution de Financement du Développement.

    * 5 Cette faiblesse du commerce est montrée par la part des exportations et des importations intra-zone dans le total mondial. La moyenne de cette part entre 1986 et 2001 est de 3,3% pour les importations et de 2,1% pour les exportations. Source : calculs de l'auteur à partir des données de Nations Unies, CEA, CDSR-AC, (2001), « Afrique centrale en chiffres », CEA.

    * 6 Cette notion peut être comprise à travers là définition de zone monétaire optimale, qui a deux sens : traditionnellement, c'est un ensemble de territoires où une monnaie donnée est acceptée, soit totalement, soit partiellement en règlement des transactions internes ou externes (ou les deux) ; en termes de dépendance, une zone monétaire est constituée d'un groupe de pays définissant leurs monnaies par rapport à une monnaie dominante. Il faut distinguer entre zone monétaire et union monétaire. Ainsi, une union monétaire est une zone monétaire dans laquelle les politiques sont gérées conjointement en vue d'atteindre des objectifs macroéconomiques communs.

    * 7 Le dictionnaire Dicos Ecarta 2007 définit la réforme comme un « changement radical apporté en vue de l'amélioration de (quelque chose) ». C'est cette connotation qui sera adoptée dans le cadre de ce travail, qui s'appui sur les réformes macroéconomiques et institutionnelles appliquées en Zone CEMAC.

    * 8 L'« effet frontière » doit être compris ici comme un ensemble de facteurs qui freinent le commerce intra-régional. Il peut s'agir de l'utilisation de monnaies nationales, de la faiblesse des infrastructures, etc.

    * 9 Il s'agit des réformes fiscalo-douanières de 1993-94, des réformes institutionnelles de 1994 avec la création de la CEMAC, et enfin des réformes monétaires, fortement marquées par la dévaluation de janvier 1994.

    * 10 De 1989 à 1998, les importations en millions de CFA du Cameroun en provenance de ses partenaires de la CEMAC étaient de 7633 contre 25839,2 pour le Nigeria, en moyenne sur les dix ans. Source : calcul de l'auteur à partir des données de la Direction de la Statistique et de la Comptabilité Nationale (DSCN).

    * 11 Mundell (1961) propose comme critère d'optimalité la mobilité des facteurs de production, McKinnon (1963) un fort degré d'ouverture commercial, et Kenen (1969), la diversification des pays.

    * 12 Le résultat sur lequel ils débouchent est consensuel, à savoir la prédominance des bénéfices sur les coûts. Les principaux bénéfices sont la stabilité monétaire interne (inflation) et externe (taux de change) et les externalités positives dont bénéficient les petits pays. Les principaux coûts sont tous liés à la perte de souveraineté monétaire, ce qui limite l'utilisation de l'arme monétaire comme instrument d'ajustement.

    * 13 Ce point a constitué l'un des noeuds lors du dernier Sommet des chefs d'Etat de l`UA au mois de juin 2007 à Accra. En plus, le Guide Libyen lors de sa dernière tournée en Afrique de l'Ouest à l'occasion du même Sommet, n'a cessé de plaider pour une Banque Centrale commune et une monnaie commune africaine. Bien avant, l'Association des Gouverneurs des Banques Centrales Africaines a annoncé en août 2003 qu'elle chercherait à mettre en place une monnaie unique et une Banque Centrale commune d'ici à 2021 en Afrique.

    * 14 L'héritage des réformes est la confirmation de la suppression de l'effet frontière monétaire.

    * 15 Voir (Avom, 2003).

    * 16 L'intégration horizontale est celle qui est entreprise entre les pays proches, présentant des caractéristiques communes et qui dans la plupart des cas, appartiennent à un même continent. L'intégration verticale est celle qui se passe entre les pays ayant des structures de développement différentes, par exemple entre les pays du Nord et ceux du Sud (c'est l'exemple de la Zone Franc et de l'Union Méditerranéenne).

    * 17 Initialement, le Franc CFA était émis par la Caisse Centrale de la France d'Outre-mer. Cependant, après l'accession à l'indépendance au début des années 60, la responsabilité de l'émission monétaire et de la supervision du fonctionnement de la Zone a été dévolue à deux Banques Centrales régionales, à savoir la BEAC et la BCEAO. La première émet le Franc de la Coopération Financière d'Afrique, et la seconde émet le Franc de la communauté Financière d'Afrique. Il convient tout de même de noter que la parité des deux francs est la même (Hadjimichael et Galy, 1997).

    * 18 Ayant acquis leur indépendance pour la plupart dans les années 60, les six pays ont connu des histoires coloniales diverses. Le Congo, la RCA, le Gabon, le Tchad étaient d'anciennes colonies françaises ; le Cameroun était d'abord sous la tutelle des Nations Unies, avant d'être simultanément protectorat français et britannique ; la Guinée Equatoriale a d'abord été une colonie portugaise, puis espagnole.

    * 19 Ce relâchement est symbolisé par une nouvelle forme de coopération monétaire prônant la liberté des pays membres. C'est ainsi que les pays tels que le Mali, la Mauritanie, Madagascar, l'Algérie n'ont pas fait partie de la ZF (seul le Mali a réintégré la zone).

    * 20 Le principe du CO confère quelques avantages : stabilité monétaire ; assise monétaire favorable à l'intégration ; renforcement de l'influence des banques ; régularité des ressources d'exportation ; rigueur de la politique monétaire.

    * 21 La BEAC opte pour un niveau bas de taux d'intérêt, se situant ainsi dans une logique keynésienne de dopage de l'investissement. C'est donc une banque qui promeut le développement, in « Mécanismes et objectifs de la politique monétaire de la BEAC, Complément de la fiche d'identité de la BEAC ». Source: www.izf.net/IZF/FicheIdentite/Complements/Beac1.htm.

    * 22 Source : www.izf.net/IZF/FicheIdentite/Complements/Beac1.htm.

    * 23 Ordonnance du 30 août 1973, complétée par celle n° 85/002 du 31 août 1985.

    * 24 Les sociétés nationales avec participation de la CFDT se constituent en 1971 au Tchad (COTONTCHAD), en 1974 au Sénégal (SODEFTEX), en Côte-d'Ivoire (CIDT) et au Cameroun (SODECOTON), en 1975 au Mali (CMDT), et en 1979 au Burkina Faso (SOFITEX).

    * 25 Mise en place en septembre 1991 au Cameroun et en janvier 1992 dans les autres pays de la CEMAC, elle a pour but de répondre aux critiques formulées à l'encontre de l'ancien système, en vigueur jusqu'au début des années 90, des plafonds globaux de refinancement des banques commerciales. Cette méthode, qui permettait de déterminer le montant maximum d'intervention de la Banque Centrale à partir des prévisions de déficits des banques après confrontation de leurs emplois et ressources s'est en effet avérée limitée et inopérante, particulièrement dans le contexte de crise. La démarche de la programmation monétaire est essentiellement macroéconomique ; l'exercice s'articule généralement en deux temps, à savoir : tout d'abord l'établissement des prévisions des agrégats économiques et financiers et, ensuite la détermination des objectifs monétaires et de crédit. Source : www.izf.net/IZF/FicheIdentite/Complements/Beac1.htm.

    * 26 Ce marché comprend un compartiment interbancaire impliquant les banques de réseaux et de pays différents. En plus il faut ajouter l'abandon du contrôle direct du crédit au profit d'instruments indirects qui agissent sur la liquidité bancaire (BEAC, 2005).

    * 27 Le bilan est appréciable. Ainsi lorsque la COBAC entre en activité, 1 seule banque respectait l'ensemble des nouvelles normes prudentielles et 16 étaient dans une situation critique. Au terme de la première phase, on ne comptait plus que 28 banques en activité, dont 10 seulement présentaient une situation financière relativement bonne. La situation en 2002 montre que sur un peu plus de 30 banques en activité, 20 présentaient une situation relativement saine et 2 seulement étaient dans une situation critique (COBAC, 2002).

    * 28 Cette surliquidité peut aussi se justifier par la stagnation de l'épargne, qui n'est pas transformée en investissement ou en emplois longs.

    * 29 En outre, le taux d'intermédiation bancaire qui est le rapport entre le nombre de guichets de banques et la population montre que le degré de pénétration des banques reste faible en Zone CEMAC. Il est de 1 guichet pour 200 000 habitants, expliquant ainsi une forte concentration bancaire Avom (2007).

    * 30 Cet exercice a en effet permis à l'Institut d'Emission de renforcer la cohérence entre la politique monétaire et le cadre macroéconomique des pays membres, et d'instaurer un dialogue permanent entre la Banque Centrale, les administrations publiques et les établissements de crédit sur la détermination des objectifs monétaires et de crédit.

    * 31 La démarche de la programmation monétaire repose sur la méthode dite de projection directe. Celle-ci consiste à déterminer par étapes successives, les différents agrégats des secteurs macroéconomiques avant d'assurer la cohérence d'ensemble du cadre macroéconomique. L'avantage de cette méthode est de laisser une bonne place au jugement. Elle s'oppose ainsi à la méthode économétrique qui suppose l'utilisation d'un modèle complexe (Source : www.beac.int).

    * 32 Le policy mix est défini de façon simple comme une combinaison optimale des deux principaux instruments de la politique économique, à savoir la politique monétaire et la politique budgétaire.

    * 33 La signature du Traité de Maastricht en 1992 par les pays européens fixe comme critères de convergence la stabilité des prix (le taux d'inflation du pays candidat ne doit pas dépasser de plus de 1,5% celui des trois États membres présentant les meilleurs résultats) ; la soutenabilité des finances publiques (le solde du secteur public ne doit pas faire apparaître un déficit excessif. En situation normale, il ne doit pas excéder 3 % du PIB et la dette publique accumulée ne doit pas dépasser 60% du même agrégat) ; la stabilité du change (les Etats membres doivent respecter les marges normales de fluctuation prévues par le mécanisme de change du système monétaire européen), et enfin l'alignement des taux d'intérêt (les taux d'intérêt à long terme - moyenne annuelle - ne doivent pas excéder de plus de 2% celui des trois Etats membres présentant les meilleurs résultats en matière d'inflation) (Schor, 1999).

    * 34 Les indicateurs de la surveillance multilatérale (couverture extérieure de la monnaie ; solde budgétaire primaire ; taux de pession fiscale ; ratio masse salariale sur recettes budgétaires ; ratio compte courant sur PIB et ratio dette extérieure sur exportations) sont représentés pour la période 2002-2006 à l'annexe 2.

    * 35 Cette matrice comporte quatre grands domaines d'action : les PAS ; la consolidation des finances publiques ; le renforcement de l'intégration régionale ; la politique monétaire et les réformes financières. Ces quatre grands domaines sont à leur tour éclatés en vingt rubriques.

    * 36 En mai 2006, le rapport montre que sur les vingt 20 mesures : i) sept ont été intégralement exécutées; ii) sept autres ont enregistré globalement des avancées; iii) six mesures n'ont pas connu de début d'exécution ou ont enregistré des retards. Source : http://www.beac.int/CEMAC/psr310506.htm.

    * 37 La règle d'origine privilégie le taux d'incorporation des matières premières locales et/ou de la valeur ajoutée dans le produit final. Ainsi par exemple, un « produit CEMAC » doit incorporer au moins 40% de matières communautaires dans le total des intrants qui le composent.

    * 38 Les réformes sont théoriquement analysées sous le prisme de l'Economie Institutionnelle et sont fondées sur des concepts tels que le gradualisme et la thérapie des chocs. Les questions généralement posées sont les suivantes : Quelles institutions faut-il réformer ? Quel timing (à quel moment) et quelle séquence pour les réformes ? En ce qui concerne l'approche gradualiste, ses fondements peuvent se retrouver dans la théorie de la firme bancaire (Avom et Eyeffa, 2007).

    * 39 En prenant l'exemple européen, les pays échangeaient déjà entre eux à hauteur de 30% lors de la signature du Traité de Rome en 1957, et de 60% lors de l'adoption de l'euro en 1999 (Boungou Bazika, 2001).

    * 40 Cette part n'a pas significativement évolué. Mais on note une grande part occupée par le commerce informel dont l'importance se reflète dans le volume des billets déplacés. Ce phénomène s'explique aussi par un laxisme des institutions et l'existence de nombreux « effets frontière » qui freinent le commerce.

    * 41 Le ratio du commerce extérieur au PIB est de 55,46 en 1995 et de 59,85 en 1996, alors que le ratio des exportations intra-zone au PIB est de 1,51 et de 1,67 pendant les mêmes années (Ondo Ossa, 2000).

    * 42 Le mécanisme de la TCI a démarré en janvier 2002. Son rôle est d'assurer le fonctionnement des institutions à hauteur de 30%, et les 70% devraient servir à financer les compensations de pertes de recettes budgétaires et les projets intégrateurs (autrement dit, la solidarité et le développement).

    * 43 Ces arriérés s'élevaient à 19,6 milliards en 2003 et à 20, 6 milliards en 2004 (CEMAC, 2006b).

    * 44 Plusieurs manquements ont été identifiés au niveau des Etats Membres dans le fonctionnement de la TCI : refus de prélever séparément la TCI au cordon douanier ; refus de reverser les prélèvements de TCI effectués et enfin, distraction d'une partie de la TCI collectée.

    * 45 Ainsi, la répartition des postes dans les trois grandes Institutions (Secrétariat Exécutif, BEAC, BDEAC) nécessite un réel souci d'équilibre. Depuis sa création (UDEAC puis CEMAC), le Secrétariat Exécutif (ancien Secrétariat Général et depuis la Conférence des chefs de l'Etat à en avril 2007, Commission) n'a été dirigé que par des Camerounais - plus de 40 ans) ; la BEAC depuis sa création en 1955 n'a été dirigée que par des Français (de 1955 à 1977), puis par des Gabonais (30 ans, depuis 1978) ; à la BDEAC, seuls les Centrafricains sont les principaux dirigeants.

    * 46 Ces deux débats concernent la théorie des unions douanières (UD) et celle qui considère l'intégration comme un processus graduel qui va de l'intégration réelle à l'intégration monétaire. Ainsi les UD s'insèrent dans la conception classique qui préconise que l'intégration par l'échange doit être régie par les règles de marché accompagnée d'une conception volontariste au niveau des politiques nationales. Dans cette optique, la production débouche finalement sur l'harmonisation des règles.

    * 47 D'abord le Président est issu alternativement d'un « grand » et d'un « petit » Etat. Bien que cette coutume ne soit pas inscrite dans les textes, elle marque le souci d'éviter toute forme d'hégémonie par un ou quelques Etats.

    * 48 Au niveau de l'Union Africaine (UA), la première désignation de Commissaires, intervenue au cours de l'année 2003, constitue un exemple de succès en matière de nomination des organisations communautaires. Ce processus s'est fait sur une triple base de compétence, d'équilibre entre les régions et d'équilibre entre les genres (CEMAC, 2006b).

    * 49 Notes du cours « Monnaie-Banque-Finance, Analyse et Politique Monétaire », PTCI - Campus Commun des Cours à Option (CCCO), Niamey-Niger.

    * 50 Les questions en ce qui concerne la nouvelle politique monétaire de la BEAC ont été plus ou moins épongées. Dans les pays développés, cette politique monétaire pose entre autres les problèmes liés à « la monnaie manquante », au « biais inflationniste » et au « ciblage de l'inflation ». Le problème de monnaie manquante est techniquement expliqué par l'instabilité des équations de demande de monnaie associées aux agrégats faisant l'objet du contrôle des autorités. La théorie du biais inflationniste quant à elle a été mise en avant pour expliquer le faible engagement des BC à vouloir lutter efficacement contre l'inflation, en raison notamment des coûts déflationnistes qu'une telle politique entraînerait. Le régime de ciblage du niveau général des prix revient pour la BC à annoncer un niveau des prix et sa fourchette de variation, alors que le régime de ciblage de l'inflation implique que la cible est fixée en fonction d'un taux d'inflation à long terme dans un sentier qui va en s'agrandissant (Eboué, 2004 et 2006).

    * 51 L'indépendance institutionnelle doit être constatée dans les sphères organique et juridique, définissant ainsi les conditions de fonctionnement de la BC. L'autonomie opérationnelle quant à elle fait référence à l'implication effective de la BC, non seulement dans la définition des objectifs, mais également dans la conduite de la politique monétaire (choix et utilisation des instruments). L'autonomie financière enfin est liée à l'importance des ressources financières pouvant faciliter le bon fonctionnement de la Banque.

    * 52 En ce qui concerne les évolutions, il convient de souligner que l'objectif de la politique monétaire est clairement défini dans les statuts de 1998. Le Conseil d'Administration est aussi réorganisé (il regroupe les hauts fonctionnaires, nommés en fonction de leur compétence, et non les Ministres de l'Economie et des Finances des différents pays). La présidence de cette instance est assurée par un Gouverneur. Il a seul, le privilège et l'exclusivité de la manipulation des taux, contrairement aux anciens textes (Avom, 2006). Mais l'architecture financière est vétuste, avec un taux de bancarisation de 17% seulement contre 101% en Afrique du Sud, 106% en Tunisie, 27% dans la Zone UEMOA par exemple. A l'intérieur de la Zone CEMAC, la bancarisation est de 23% au Gabon et de 18% au Cameroun. Pour le reste des pays, elle situe entre 7% et 12%. Source : http://www.cameroon-info.net/cmi_show_news.php?id=16428.

    * 53 Il s'agit de l'Acte N°19/CEMAC/CCE du 20 juin 2007. Le nouveau Gouverneur a été officiellement installé dans ses fonctions le 12 juillet 2007 à Yaoundé. Source : www.beac.int/beac_int.html.

    * 54 Avant cette réforme, la Banque était dirigée par un Gouverneur, assisté d'un Vice-Gouverneur et d'un Secrétaire Général. Cette Administration Centrale était complétée par neuf Directions centrales, cinq Départements et une Cellule d'Etudes. Source : www.beac.int/coorporate/sgodcm.htm.

    * 55 Le Président de la Commission est le principal fonctionnaire de la Communauté et de toutes ses Institutions. Il est le représentant légal de l'ensemble des Institutions de la Communauté ; il est l'élément charnière de la Communauté. Il est chargé d'entreprendre des actions concernant la mise en oeuvre et le suivi des Protocoles, Conventions et Décisions de la Communauté. Il lui revient de veiller à ce que le cours du processus d'intégration ne soit pas dévié. Il peut conclure des accords de coopération dès lors que ceux-ci ne font qu'énoncer les principes de la coopération (CEMAC, 2006b).

    * 56 Les objectifs spécifiques de la première étape concernent : (1) l'harmonisation des règles du marché commun ; (2) la coordination et la transformation des politiques nationales à terme en politique commune dans les secteurs clés ; (3) la mise en place des instruments de la circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes ; (4) le développement de la coordination des politiques commerciales et des relations économiques avec les autres régions, (5) l'entreprise d'actions communes dans les domaines de l'enseignement, de la formation professionnelle et de la recherche. (Extrait de la Convention régissant l'UEAC. Source : Textes organiques de la CEMAC, 1998).

    * 57 Pour réaliser cet audit, la CEMAC a bénéficié de l'appui du consortium composé d'un cabinet international de conseil en management, Performances Management Consulting, et d'une fondation indépendante, le Centre Européen de Gestion des Politique de Développement (ECDPM). Cet audit s'est appuyé sur une analyse documentaire approfondie, complétée par des entretiens auprès d'une part des institutions communautaires, d'autre part des responsables gouvernementaux des Etats Membres (CEMAC, 2006b).

    * 58 Ce programme prévoit la création d'une Commission, la décentralisation des pouvoirs au sein de la BEAC ; une répartition plus équilibrée des postes de responsabilité au sein des grandes institutions (CEMAC, 2006b).

    * 59 C'est la propagation persistante des signaux d'un phénomène dans le temps.

    * 60 C'est une Communauté qui découle du Plan d'Action de Lagos d'avril 1980 et qui regroupe, en plus des six pays de la CEMAC, la République Démocratique du Congo (RDC), l'Angola, le Rwanda, le Burundi, et Saõ Tomé et Principe. Instituée par un Traité signé le 20 octobre 1983 à Libreville et entrée en vigueur le 18 décembre 1984, la CEEAC a pour principale mission de conduire le processus de coopération et d'intégration en Afrique Centrale. Quatre domaines sont privilégiés : l'intégration humaine ; le développement des capacités d'analyse, d'action, d'intervention, d'initiatives entrepreunariales, de communication et de négociations collectives ; le développement de l'intégration physique, économique et monétaire ; le développement des capacités de maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité. Les priorités de la CEEAC sont la promotion de la paix (Conseil de Paix, de Sécurité et de stabilité de l'Afrique centrale (COPAX)), et d'un pool énergétique (Pool Energétique de l'Afrique centrale (PEAC) créé le 2 Avril 2003 à Brazzaville). Source : site de la CEEAC.

    * 61 Source : http://www.cameroon-info.net/cmi_show_news.php?id=16428.

    * 62 Ce pays avec la RDC regorgent un important potentiel énergétique avec près de 800 MW. Malheureusement, ce potentiel est insuffisamment exploité et se dégrade rapidement.

    * 63 Du côté de l'offre, lorsqu'un pays se spécialise dans une production à rendements d'échelle croissants et donc à coûts décroissants, le gain statique de l'échange est remplacé par un gain dynamique et inversement ; du côté de la demande, Graham (1923) distingue les biens à demande progressive (biens industriels) et les biens à demande régressive (produits primaires). Ainsi lorsqu'un pays se spécialise dans les premiers et importe les seconds, sa situation se renforce par un gain dynamique.

    * 64 Les explications se retrouvent dans la volonté de certains pays de combler leur désavantage comparatif, des effets de ``demande de différence'', c'est-à-dire le snobisme de certains consommateurs envers certains produits. Les produits en question bénéficient de la « qualité de non banalisation ». Une autre explication se retrouve dans la `'hiérarchie des avantages comparatifs'' : à ce niveau les pays intermédiaires (niveau de développement moyen) jouent un rôle important de transit de ces biens.

    * 65 En effet, le corollaire de l'hypothèse de concurrence pure et parfaite rencontrée dans les théories traditionnelles est celui des rendements d'échelle constants. L'échange international peut être aussi bien influencé par les économies d'échelle externes et internes. Les économies d'échelle externes résultent de la structure industrielle dans son ensemble (externalités positives) et les économies d'échelle internes renvoient à l'organisation interne de l'entreprise.

    * 66 Théorie développée par Baumol, Willig et Panzar au courant des années 80 avec pour hypothèses fondamentales l'existence d'entrants potentiels, l'absence de barrières à l'entrée et à la sortie. Dans cette configuration de marché, les prix sont fixés par égalisation du coût moyen et de la recette moyenne, contrairement aux hypothèses de la théorie microéconomique traditionnelle, pour lesquels le prix se fixe par égalisation du coût marginal et de la recette marginale.

    * 67 « Entry into a currency union may raise international trade linkages [...] ».

    * 68 La convergence absolue, connue aussi sous le nom de sigma-convergence mesure en un point du temps la disparité des revenus par tête d'un groupe de pays. Empiriquement, elle s'appréhende à travers le coefficient de variation. La convergence conditionnelle ou bêta-convergence a un sens un peu plus économique : elle signifie qu'à terme, les pays pauvres rattraperont les pays riches dans le processus de croissance, surtout si l'écart est important. On peut aussi parler de clubs de convergence, c'est-à-dire des groupes plus ou moins homogènes de pays qui partagent les mêmes propriétés de croissance à long terme. On distingue une autre classification de la notion de convergence : la convergence nominale (inflation), la convergence réelle (taux de croissance) et la convergence structurelle (organisation de la base productive).

    * 69 «North, South and Distance in the Gravity Model».

    * 70 La limite principale de l'équation de gravité est la surestimation du volume des échanges. Souvent on note une sous-estimation de l'effet de la distance.

    * 71 On s'attend à ce que le signe affecté à cette variable soit positif.

    * 72 Pour Hainry, la distance séparant un point A d'un point B est mesurée par l'arc de grand cercle sous-tendu par la corde [AB], in «Jeux Mathématiques et Logiques - Orthodromie et Loxodromie ».

    * 73 Cette sous-période comprend les années 1990, 1992 et 1993 et la seconde comprend les années 2000, 2002 et 2003.

    * 74 On parle de semi-élasticité lorsque le coefficient estimé lie une variable en niveau et une variable en logarithme.

    * 75 Ainsi, lorsque la variable MC est uniquement composée des pays de la CEMAC, le résultat montre un lien fortement négatif et significatif entre la monnaie unique et le commerce. En plus, cet effet s'amplifie au cours du temps, venant ainsi contredire l'hypothèse d'optimalité ex post ou d'endogénéité. La semi-élasticité associée à cette variable est de -4,73 pour la période 1990-1993, et de -6,02 pour la sous-période 2000-2003, significative à 1%.

    * 76 Les échanges des pays africains avec leurs anciennes métropoles se situent à environ 50% du commerce total. A l'inverse, le commerce entre l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique de l'Est est quasi nul (Boungou Bazika, 2002).

    * 77 Les calculs effectués par Hugon (2001) montrent que cet indice se situe à 0,089 pour les pays de l'Afrique sub-saharienne et à 0,563 pour les pays de l'ALENA ou de l'UE.

    * 78 Ces pays sont le Cameroun, la RCA et le Tchad, ce qui limite les exportations vers les autres pays.

    * 79 Les expressions « commerce potentiel » et « potentiel commercial » peuvent prêter à confusion. Il convient de souligner que le commerce potentiel est le niveau prédit ou normatif sur lequel devrait se situer un pays s'il utilisait pleinement toutes ses capacités commerciales. Le potentiel commercial est simplement un indicateur statistique qui mesure la performance ou l'intensité commerciale d'un pays.

    * 80 La Guinée Equatoriale a été exclue de l'échantillon pour une raison principale, à savoir la rareté des données sur toutes les sous-périodes considérée dans cette étude.

    * 81 En ce qui concerne les fondements théoriques, on constate une évolution dans le temps. Ainsi, la première génération de ces modèles montrent généralement que l'interaction entre économies d'échelle, coûts de transaction et mobilité du facteur travail, favorise l'agglomération des activités dans les pays meneurs au détriment des pays périphériques (Krugman, 1991). Dans des modèles plus récents et sous l'hypothèse d'immobilité du travail plus conforme avec le cas européen, la dispersion peut au contraire être favorisée (Puga, 1999).

    * 82 Par exemple, le PIB par tête des pays d'ASS en 2000 était de 1 560 dollars US. Entre 1963 et 1998, la BAD a recensé 26 conflits donc 7 inter-Etats. Le capital spatial est aussi déplorable : on compte seulement 171 000 km de routes, ce qui est l'équivalent de la seule Pologne. L'Europe pour une petite comparaison a un PIB par habitant de 20 000 dollars US et compte plus de 3 millions de km de routes bitumées. En plus, le commerce intra-européen est évalué au moins à 60% avant le processus d'intégration (Fouda, 2003).

    * 83 Formellement il se note : et mesure la part de la production détenue par les n plus grandes firmes. Sa principale limite est de ne pas tenir de l'information détenue par les N-n firmes, N étant la population totale des firmes et n l'échantillon. L'indice H corrige ce biais, car il incorpore toutes les unités statistiques. Mais son système de pondération est critiqué à son tour par la possibilité d'élaboration d'un indice général (HG) pouvant se noter comme suit :.

    * 84 La base exportatrice comporte en outre le caoutchouc brut, les légumes, les écorces des plantes, les bières, le beurre de cacao, les bois prolifiés, les déchets et débris de fonte, le bois contre-plaqué, les ouvrages de menuiserie, les niveleuses, les fruits, les tombereaux automoteurs, les tissus de coton, les lames de bouteurs, les antennes radio et télé, les peaux épilées d'ovins, les traverses en bois pour voies ferrées, les tôles en aluminium, les whiskies et liqueurs, l'alcool et l'eau de vie, les huiles de palme bruts et raffinées, les préparations pour soupes et potages, les savons de ménage en morceau, les piles et batteries de piles électriques, les pâtes alimentaires, les groupes électrogènes, les eaux, le haricot, le tabac brut, les turbopropulseurs, les autres préparations alimentaires, les déchets et débris d'aluminium,... (MINCOM, 2007).

    * 85 Cet indice ne tient pas compte de l'importance du commerce total par rapport aux livraisons (Hanson, 1996). En plus, les conclusions fournies par cet indice ne tiennent pas compte de l'évolution temporelle du commerce intra-industriel. Il ne renseigne que sur l'importance du commerce intra-industriel à un moment précis dans le temps. Ainsi pour corriger ce biais, Brülhart (1996) a élaboré un indice permettant de connaître la nature du nouveau commerce. Cet indice mesure la part du nouveau commerce qui est de nature intra-industrielle. Une des limites de cet indice est due au fait qu'il s'applique à un seul item, la version additive étant plus robuste. En plus Grubel et Lloyd proposent d'ajuster l'indice par le rapport du solde global (en valeur absolue) au total du commerce lorsque ce dernier est fortement déséquilibré. Aquino (1978) pour sa part propose un indice élaboré qui tient compte des déséquilibres par postes. Une autre limite est le fait de ne pas tenir compte des considérations bilatérales. Dans cette optique, l'indice de GL tient compte des différents pays partenaires et s'obtient comme une sommation par rapport à ces différentes destinations. En effet, il est important de savoir si un même produit fait l'objet d'un commerce intra-branche entre deux pays, ou bien si, au contraire, ce produit fait l'objet d'exportations du pays A vers le pays B et d'importations du pays A en provenance d'un pays C (Mucchielli et Mazerolle, 2004).






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