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differenciation spatiale et identité sociale en milieu rural

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par krikou amadou DIARRA
 - maà®trise 2006
  

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INTRODUCTION

« L'économie de plantation débutée dans les années 1920 va entrainer en milieu rural ivoirien, certaines populations d'origine ivoirienne et étrangère d'autres pays à se sédentariser dans certaines zones rurales pour y mener des activités économiques et agricoles1(*). »

Ainsi donc, le choc culturel entre ces différents groupes sociaux (migrants et communautés d'accueil) va engendrer des relations interethniques.

Ces interactions entre autochtones et migrants prennent plusieurs formes selon les localités.

Dans certains villages, on observe une tendance à l'intégration souvent entachée de conflits. A titre illustratif en 1998, un conflit a éclaté entre paysans Baoulé et Guéré à Fengolo dans le département de Duekoué et s'est soldé par plusieurs morts. En 1999, Guéré et Burkinabé s'affrontaient à Para dans la sous-préfecture de Taï2(*).

Par contre dans d'autres villages, les rapports interethniques se présentent sous forme de différenciation dans les pratiques sociales. Pour comprendre donc cet état de fait, nous avons mené des investigations à Kanzra, un village de la sous-préfecture de Zuénoula situé au Centre Ouest dans la région du Marahoué.

En effet dans ce village, l'on note une différenciation spatiale avec des assignations identitaires. Alors, on se pose la question de savoir pourquoi une telle différenciation ? Quels sont les enjeux sociaux de cette différenciation ?

Répondre à ces préoccupations, nous emmène à structurer le travail en sept (7) chapitres.

Il s'agit de la construction de l'objet d'étude, de la méthodologie de l'étude, de la présentation de la zone d'étude, de l'organisation sociale du village, des logiques et mécanismes de différenciation à Kanzra, des représentations sociales et le fonctionnement des rapports interethniques et enfin des enjeux sociaux de différenciation à Kanzra.

CHAPITRE I : LA CONSTRUCTION DE L'OBJET D'ETUDE

I : PROBLEMATIQUE DE RECHERCHE

L'actualité rurale de ces dernières années est marquée en Côte d'Ivoire par des affrontements meurtriers qui ont alimenté les manchettes de la presse nationale et étrangère. Cette situation conflictuelle a renouvelé la critique sociale sur la question identitaire et foncière.

Si l'on considère à la suite de plusieurs auteurs que « le foncier est l'ensemble des rapports entre les Hommes à propos de la terre », il faut souligner qu'il s'agit ici (en milieu rural) des rapports entre communauté d'accueil et migrants à la recherche de numéraire à travers soit le travail dans les plantations des autochtones soit la création de leurs propres plantations.

Cette migration de travail entamée sous la colonisation (notamment par le transfert forcé des Mossi et des Bambara4(*) en provenance du Burkina Faso et du Mali) va connaître un essor sans précédent à partir des années 1920 avec l'introduction de l'économie de plantation.

A cause des caractéristiques pérennes du cacao et du café, les migrants s'installent durablement dans les zones d'accueil. Ce qui s'accompagne de phénomènes sociaux tels que la constitution d'unités politiques, économiques, culturelles et sociales avec des assignations identitaires5(*).

Aujourd'hui, la réalité est que ces migrants externes sédentarisés représentent 26% de la population totale estimée à 15.366 .672 habitants6(*)et jouent un rôle important dans le développement économique de la Côte d'Ivoire en ce sens qu'ils sont présents dans ce secteur qui est resté pendant plusieurs décennies le socle de l'économie ivoirienne. Ce qui a permis pendant cette période au pouvoir politique de développer l'idéologie selon laquelle « Le succès de ce pays repose sur l'agriculture ».

Ainsi donc le choc culturel entre différents groupes sociaux (migrants et communautés d'accueils) va engendrer des relations interethniques.

Quels sont donc, partant de ce fait, les modalités d'installation et d'insertion des migrants sédentarisés en milieu rural dans les villages d'accueil ?

Il faut noter que d'une manière générale, l'on note un processus de sédentarisation de ces migrants dans le cadre d'une pluralité des formes de structuration de l'habitat dans le milieu d'accueil et une diversité des modalités de production des rapports interethniques et de reconstruction des identités sociales. Le fait que les populations migrantes aient pu se reproduire socialement, parfois sur plusieurs générations, est un facteur pertinent dans l'analyse des modes d'intégration ou non, d'insertion ou non de ces migrants ainsi que la réponse sur le long terme des couches autochtones face à l'installation des nouveaux venus.

Dans cette même perspective traitant des rapports interethniques en milieu rural, Roch Yao Gnabeli 7(*) dans une synthèse des travaux réalisés en 2006 par des étudiants en maîtrise de sociologie montre que l'interaction autochtone non autochtone donne lieu à trois modes de structuration de l'espace villageois.

Dans le premier cas de structuration de l'espace villageois, les autochtones et les migrants vivent dans les mêmes villages, partagent le même quartier.

Dans le second type, l'on observe un marquage territorial sur la base ethnique, les autochtones ne partagent pas les mêmes quartiers que les autres quand bien même ils résident dans le même village.

Enfin dans le dernier cas de figure, les catégories sociales résident sur le même « terroir »mais les autochtones vivent dans le village d'accueil et les autres dans un ou des campements satellites.

Le deuxième cas de figure tel que présenté par Roch Yao Gnabeli semble correspondre au cas typique de Kanzra dans la sous préfecture de Zuénoula, village où nous avons effectué notre enquête exploratoire.

Ce village est composé d'autochtones Gouro, d'allochtones Gouro, Baoulé, Senoufo, Koyaka, et d'allogènes Mossi, Folaga,8(*)des Maliens et quelques ménages de béninois,de nigériens ,de ghanéens ... etc.  Le premier migrant à s'installer à Kanzra serait Gnombo Bamba qui faisait le commerce. Il serait arrivé dans le village en 1945 et aurait eu comme tuteur Gouro, Serbi Wuetty. Le premier migrant à s'installer sur l'espace du village à des fins agricoles serait un mossi qui aurait quitté le Burkina Faso en 1948 dans un convoi organisé par les colons pour travailler dans les plantations de café et cacao. Il se nommait Zazou Issiaka. Ensuite arrivèrent successivement les baoulés (1963), les maliens (1965) les Gouros de Gohitafla (1970), les senoufos (1976) et certains nigérians, béninois, ghanéens qui seraient venus pour pratiquer le commerce et à la suite se sont sédentarisés. Les rapports entre ces différents groupes ethniques laissent clairement percevoir des différenciations au niveau du mode d'organisation du village.

Au niveau politique, nous constatons qu'à Kanzra bien que les allochtones et les allogènes se soient sédentarisés dans le village, il y a plusieurs décennies, le choix du chef de village est strictement réservé aux originaires du village, c'est-à-dire les Gouro autochtones.

Chez les étrangers (allochtones et allogènes) chaque communauté a son chef ou représentant selon l'origine géographique (nationalité), il s'agit des migrants externes ou selon l'origine ethnique (les migrants internes par exemple).

Chaque communauté met en place et reproduit une organisation sociopolitique, coutumière et des pratiques sociales similaires à celle de son milieu d'origine. Par exemple les Baoulé9(*) vont désigner leur chef par le terme de « nana» et ce chef aura les mêmes pouvoirs et les mêmes considérations comme dans le milieu d'origine. C'est l'équivalent de « Dougoutigui 10(*) » chez les malinkés.

Au niveau culturel, les allogènes burkinabé, malien et les autres malinké et sénoufo ont leur propre cimetière différent de celui des autochtones.

On observe également au niveau spatial, un marquage où l'on retrouve un quartier autochtone Gouro à part et les autres communautés représentées sur un espace géographique spécifique. C'est le cas du quartier des Gouro de Gohitafla appelé quartier Gohitafla, le quartier des mossi appelé Mossibougou, le grand quartier malinké dénommé Djoulabougou.

Pourquoi une telle différenciation entre les Gouro (autochtones) et les Gouro de Gohitafla (allochtones) sachant que c'est le même groupe linguistique (qui logiquement devrait constituer un même groupe homogène') d'une part et entre les Gouro autochtones et les autres migrants d'autre part? Mieux qu'est ce qui légitime une telle différenciation spatiale ? En clair quels sont les enjeux identitaires de la structuration spatiale à Kanzra ?

Pour élucider cette préoccupation, il nous faut considérer les représentations sociales que chaque communauté se fait l'une des autres.

D'autant plus que bien qu'étant sédentarisé depuis plusieurs décennies (pour certaines communautés depuis la colonisation et pour d'autres à partir de 1960), chaque groupe ethnique reproduit les pratiques sociales du milieu d'origine. Ce faisant nous nous posons la question de savoir quelle est l'organisation sociale du village pour cerner les facteurs de différenciation entre les Gouro de Kanzra11(*) et les Gouro de Gohitafla d'une part et entre les Gouro de Kanzra et les autres communautés allochtones et allogènes ?

Ensuite quelles sont les logiques de différenciation entre les autochtones Gouro de Kanzra et les Gouro de Gohitafla d'une part (sachant que c'est le même groupe linguistique) et entre les autochtones Gouro de Kanzra et les allogènes et allochtones d'autre part ?

 A la suite donc de ces préoccupations que nous avons évoquées, nous nous efforcerons de faire l'état des connaissances sur les relations interethniques entre migrants sédentarisés et autochtones.

* 1 Chauveau jean pierre et Dozon(jp),1985,colonisation,économie de plantation et societé civile en Côte d'Ivoire,ORSTOM, pp6-9

* 2 3 Kouassi Dja Flore, Mémoire de maîtrise « différenciation ethnique et pouvoir politique villageois : cas de doukouya dans la sous préfecture de Oumé »

* 4 Revue ivoirienne d'histoire «  La main d'oeuvre africaine en Côte d'Ivoire de 1903 à 1939 », n°1, 2002, p 31

* 5 Kouassi Dja Flore, Mémoire de maîtrise « différenciation ethnique et pouvoir politique villageois : cas de doukouya dans la sous préfecture de Oumé »

* 6 Source Institut National de Statistique

* 7 Ces études ont été menées dans le cadre de leurs mémoires de maîtrise comptant pour l'année académique 2005-2006.

* 8 Groupe ethnique du Burkina Faso présent à Kanzra avec les Mossi.

* 9Nana signifie chez le Baoulé le doyen, le patriarche. A Kanzra cette appellation désigne le Chef Baoulé.

* 10 Dougoutigui est le terme utilisé par les migrants malinkés pour designer leur chef.

* 11 Les habitants de l'actuel pays Gouro se désignaient eux-mêmes ou mutuellement de plusieurs appellations dont aucune ne recouvre la totalité des populations aujourd'hui qualifiées de Gouro. Les N'goï, Par exemple,qui n'avaient autrefois de rapports étroits qu'avec les Baoulé et les tribus voisines,se qualifient eux-mêmes de Baba ainsi que toutes les populations de la rive droite du Bandama Ils appellent Kwene ou Kouin (signifierait selon les Gouro,fils favori) les populations du centre sans distinguer entre elles les divers tribus et lorubin (les gens d'en haut) les populations du Nord. Les Lorubins au Nord Est parmi lesquels figurent les Gouro de Gohitafla les Kwene ou kouin où l'on retrouve les Gouro de Kanzra. Dans le cadre de cette étude nous utiliserons chaque fois le terme Kwene ou kouin pour designer les Gouro de Kanzra et Lorubin pour nommer ceux de Gohitafla. Voir la carte nominative des tribus Gouros dans l'annexe.

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