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Le pardon et la justice post conflits en Afrique. Etude comparative des dynamiques des acteurs et des institutions du dedans et du dehors (Afrique du Sud, Rwanda)

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par Alain-Roger Edou Mvelle
Université de Yaoundé 2 - DEA 2008
  

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Paragraphe 2 : La collaboration variable entre les institutions de la justice internationale et les juridictions nationales au Rwanda

Selon qu'elles sont positives ou négatives, les relations entre le TPIR et les tribunaux rwandais vont traduire soit des conflits de compétence, soit une certaine coopération.

A. L'affirmation conflictuelle des compétences

Le Statut du TPIR est pourtant clair. En son article 7, l'étendue de sa compétence ratione loci est précisée de la manière suivante : « La compétence ratione loci du Tribunal international pour le Rwanda s'étend au territoire du Rwanda, y compris son espace terrestre et son espace aérien, et au territoire d'États voisins en cas de violations graves du droit international humanitaire commises par des citoyens rwandais. ». L'écriture de cette disposition n'a pas laissé de doute sur son interprétation. En effet, la compétence du tribunal suit le lien national entre tout individu et l'Etat Rwandais. Cette déterritorialisation de la loi pénale est amplement justifiée par les crimes sanctionnés :

- le génocide qui comprend une série d'actes commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. L'on y ajoute l'entente en vue de commettre le génocide, l'incitation directe et publique, la complicité et ma tentative182(*) ;

- les crimes contre l'humanité qui renvoient à l'assassinat, aux tortures, viols, et aux autres actes commis dans le cadre d'une attaque généralisée et systématique contre une population civile quelle qu'elle soit, en raison de son appartenance nationale, ethnique, raciale, religieuse mais aussi politique, à l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, aux expulsions, emprisonnement, tortures, et autres actes inhumains183(*) ;

- les violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et du Protocole additionnel numéro II. Il s'agit des personnes qui ont commis ou donné l'ordre de commettre ces violations notamment : les punitions collectives, la prise d'otages, les actes de terrorisme, les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants, la contrainte à la prostitution, le pillage184(*).

Le TPIR a la primauté sur les juridictions nationales du Rwanda, en vertu de l'alinéa 2 de l'article 8 de ses Statuts qui précise : « Le TPIR a la primauté sur les juridictions nationales de tous les Etats ». Toutefois, le problème se pose avec la mise en application du principe non bis in idem énoncé à l'article 9 en ces termes :

Alinéa 1. Nul ne peut être traduit devant une juridiction nationale pour des faits constituant de graves violations du droit international humanitaire au sens du présent statut s'il a déjà été jugé pour les mêmes faits par le Tribunal international pour le Rwanda ;

Alinéa 2. Quiconque a été traduit devant une juridiction nationale pour des faits constituant de graves violations du droit international humanitaire ne peut subséquemment être traduit devant le Tribunal international pour le Rwanda ;

Alinéa 3. Pour décider de la peine à infliger à une personne condamnée pour un crime visé par le présent statut, le Tribunal international pour le Rwanda tient compte de la mesure dans laquelle cette personne a déjà purgé toute peine qui pourrait lui avoir été infligée par une juridiction nationale pour le même fait.

A cette limite de la double incrimination, il est permis au TPIR de dessaisir les juridictions nationales dans l'une des trois conditions suivantes :

a. le fait pour lequel il a été jugé était qualifié crime de droit commun ;

b. la juridiction nationale n'a pas statué de façon impartiale ou indépendante,

c. la procédure engagée devant elle visait à soustraire l'accusé de sa responsabilité pénale internationale, ou la poursuite n'a pas été exercée avec diligence.

Comment en effet apprécier du degré de partialité des instances judiciaires nationales sans que cela n'aboutisse inéluctablement à un conflit ? La diligence requise du procès peut ne pas être observée de bonne foi, eu égard notamment aux contraintes budgétaires et infrastructurelles de l'Etat rwandais au lendemain du génocide. Un dessaisissement sur cette base peut éventuellement créer des incompréhensions entre les deux parties. Heureusement un équilibre a été trouvé, répondant aux voeux de la communauté internationale : « Au TPIR de juger de la poignée d'idéologues et d'organisateurs du génocide se trouvant à l'étranger, et aux juridictions rwandaises d'organiser les procès de la multitude des exécutants demeurés au Rwanda »185(*). Une libération d'un prévenu a aussi constitué la pomme de discorde majeure entre le Rwanda et le tribunal international. Il s'agit de Jean-Bosco Barayagwiza, membre créateur de Radio milles collines186(*). L'intéressé avait bénéficié d'un acquittement de la Chambre d'Appel, déclarant nul l'acte d'accusation formulé contre lui. Frédéric Mégret revient sur ce cas en écrivant : « Dans l'affaire Barayagwiza, la Chambre d'Appel avait décidé que l'accusé devait être transféré au Cameroun en se fondant sur l'article 40 bis (H) qui stipule qu'une personne relâchée suite à une détention provisoire doit être remise aux autorités de l'Etat l'ayant transférée. »187(*). Malgré l'affirmation conflictuelle des compétences, la praxis offre un répertoire d'actions collaboratives.

* 182 Article 2 du Statut du TPIR.

* 183 Article 3 du Statut du TPIR.

* 184 Article 4 du Statut du TPIR.

* 185 Philippe Mégret, op.cit ; p.85.

* 186 L'intéressé répondait de sept chefs de génocide, de crime contre l'humanité et de pillage. Cet homme était détenu au Cameroun et, selon le TPIR, des irrégularités ont été observées par le Parquet pendant le processus judiciaire de ce pays.

* 187 Op.cit ; pp. 87-88. Dans le cas d'espèce, le Rwanda avait émis un mandat d'arrêt contre cet individu et souhaitait qu'il soit transféré vers ses propres juridictions.

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