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La situation de la femme marocaine en général et le travail de terrain des associations féminines dans la région du nord du Maroc


par Fadma Ouaiaou
ULB / BRUXELLES - Master 2011
  

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IV.1.PROGRES VERS LE RECUL

Au 19ème siècle, à l'époque de Nahda (renaissance arabe), les penseurs réformateurs ont déclenché le signal d'alarme quant à la situation de la femme arabe (musulmane et chrétienne). Cette dernière vivait dans l'ignorance, privée de tous ses droits fondamentaux. À cette époque, les voix des réformateurs arabes s'élèvent pour revendiquer l'égalité sur le plan éducatif des filles et des garçons. Parmi eux, Rafaha Tahtawi, Mohamed Abdu, Jamal Dine Alafghani, et d'autres.

Néanmoins pour la question de l'émancipation des femmes, il importe de citer le libérateur de la femme arabe, Qasim Amine, qui a publié : « l'émancipation de la femmes » en 1899 et « la nouvelle femme » en 1900. Avec ces deux livres, Qasim Amine représentait la pensée des lumières européennes dans le monde arabe. Pour lui, l'émancipation de la femme équivaut à la libération de la Umma (communauté musulmane) et à son développement129. Sa pensée est influencée par les idées des penseurs et philosophes occidentaux, particulièrement en France où il a fait ses études. Cette pensée se base sur deux principes : la science et la raison. « La femme est privée de tout ce dont l'homme jouit : le plaisir est réservé à l'homme et la peine pour la femme ; l'homme vit dans la liberté et elle dans l'esclavage ; l'homme acquiert et détient le savoir, la femme reste dans l'ignorance ; l'homme peut prétendre à l'intelligence, la femme est proie à la sottise ; l'homme commande et ordonne, la femme ne peut qu'obéir et endurer »130.

128 AMIN, Q. (1899), libération de la Femme, nouvelle édition en 1993, Caire : Office Egyptien général du livre. (En arabe).

129 SAID, K. (1991), « Femme, liberté, innovation », sous direction de MERNISSI, F in Femmes maghrébines à l'horizon 2000, Casablanca : Le Fennec, p 13 - 62 (en arabe).

130 AMINE, Q. (1993), p 20

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D'autres voix se sont élevées pour revendiquer le dévoilement des femmes. Ainsi, de retour au Caire d'une conférence en Italie sur la condition des femmes, la féministe égyptienne Hoda Chaaraoui131 accompagnée d'un groupe des femmes descendirent du train, toutes dévoilées.

Au Maroc en 1947, lors de la manifestation organisée à l'occasion de la première visite du souverain marocain sous le protectorat à Tanger (ville de statut international à l'époque), la fille du roi Mohammed V a pris la parole non voilée. Les femmes présentes sur place ont commencé à se découvrir la tête: un véritable symbole de la libération des femmes marocaines.

Il importe également de signaler qu'à l'époque du protectorat, le leader du mouvement nationaliste et réformateur Allal Elfassi 132 a revendiqué l'interdiction de la polygamie et la réglementation de la répudiation133.

En 2002, les résultats des élections des représentants à la chambre des députés ont montré que le jeune parti politique islamiste PJD134 a triplé ses sièges au parlement, ils sont passés de 14 à 42 sièges135. Il faut souligner que le processus électoral a « respecté dans l'ensemble, les règles de transparence »136. Ceci montre que la société a changé et que la pensée religieuse a gagné du terrain par rapport aux partis de gauche traditionnellement populaires. De 1993 à 2004, les débats n'ont pas changé. Le combat est toujours le même entre les universalistes et les particularistes autour de la question des droits de la femme dans le code de la famille et autour de l'égalité entre les hommes et les femmes. Toutefois, ce débat a montré que la condition de la femme a régressé et ce, partout au Maroc. En effet, comme le souligne Isabel Taboada Leonetti : « De dévoilement en revoilement, le corps des femmes n'a cessé d'être symboliquement manipulé par les hommes et leur statut modifié au gré des événements et des rapports de force, nationaux ou internationaux ».137

IV.2. REFORMES LIMITEES

131 L'une des premières féministes égyptiennes

132 Fondateur du parti Istiqlal et coordinateur du projet du premier code du statut personnel en 1957 (loi de la famille).

133 DAOUD, Z. (1996), P 257.

134 Le Parti Justice et Développement (le seul parti politique islamique qui siège le parlement comme groupe d'opposition depuis les deux élections précédentes : en 2002 et en 2007

135 ZAGHAL, M. (2003), Religion et politique au Maroc aujourd'hui, consulté en ligne sur la page : http://www.ifri.org/files/Moyen_Orient/DT_3_Zeghal.pdf le 12 juin 2011.

136 Ibidem.

137 TABOADA LEONETTI, I., sous la direction de (2004), Les femmes et l'Islam : entre modernité et intégrisme, Paris : L'Harmattan, p 10-11.

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Le régime politique accorde aux femmes une certaine place au sein de postes politiques mais ces derniers demeurent sans importance décisive 138 . Les militantes du mouvement féministe universaliste ont été convaincues que le changement des mentalités discriminatoires envers les femmes ne peut être réalisé qu'à travers une réforme du statut juridique de la femme139. Ensuite, il importe de souligner que l'ambition des militantes du mouvement féministe universaliste a subi un choc, vu la réalité d'application du nouveau code de la famille, mais aussi à cause des lacunes existants encore dans le texte tant décrit progressiste (LDDF140). En effet, les rapports que publie la ligue démocratique des droits de la femme sur l'application du code de la famille, attestent d'une dure réalité. Certains articles de ce code restent encore inégalitaires ou ouvrent une possibilité d'interprétation d'un juge, qui dans la majorité des cas décide en faveur d'une vision patriarcale. Ainsi, l'âge du mariage est souvent une violation des droits humains. Cette interprétation abusive touche particulièrement les adolescentes âgées de 12 à 16ans. Dans la région du Nord, le mariage des mineures demeure encore une réalité choquante. Malheureusement, selon les rapports des centres d'écoute qui accueillent des mineures victimes de violence conjugale, le nombre des mariages de ces dernières après la réforme de la moudawana (Code de la famille 2004) a connu une hausse remarquable.

Ainsi, juste après l'entrée en vigueur du code de la famille, le rapport de la LDDF sur les mariages précoces (entre 5/2/2004 et 31/12/ 2005) a enregistré pour la ville de Larache 400 demandes de mariages des mineures autorisées des 406 demandes de mariage déposées. Cela signifie que l'appréciation du juge dans la majorité des cas entraine l'accord. Force est de constater que laisser une marge d'interprétation dans une loi n'est en faveur que de la mentalité conservatrice. Ce sujet entraîne des débats continuels, la loi sur l'âge du mariage régit par le code de la famille anime encore des polémiques entre les particularistes (les islamistes) et les universalistes. Les articles 20 et 21141 du code de la famille ouvre au juge la possibilité d'autoriser le mariage d'un mineur avec l'accord de son tuteur, et même parfois, sans l'accord de celui-ci dans certaines circonstances. Le nombre de mariages de mineures sous l'autorité d'un juge a dépassé toutes les limites lors de l'entrée en vigueur du Code de la famille. Il est donc alors primordial de prendre au sérieux la déclaration de la secrétaire générale

138 ALAMI M'CHCHI, H. (2002), p 41.

139 COMBE, J. (2001), p 195.

140 La Ligue Démocratique des Droits de la Femmes, une association féminine nationale qui publie chaque année un rapport sur l'application du code de la famille depuis son entrée en vigueur en février 2004, sa section de Larache fait partie de notre échantillon. (rapport de 2009).

141 Les articles 19, 20 et 21, (2004), Code de la famille, ministère de la justice :
http://www.justice.gov.ma/fr/documentation/documentation

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de la Ligue démocratique des Droits de la Femme (LDDF) Fawzia Assouli lors d'une interview donnée au journal marocain « Aujourd'hui le Maroc »142: « le mariage des mineurs a connu une hausse de plus de 10% ». On peut donc en conclure que le juge abuse de son pouvoir et ce en toute légalité. « Comment empêcher alors ce dernier d'user largement (voir arbitrairement) de son pouvoir pour transgresser la règle juridique ?143». Il faut rappeler que le Code de la famille régit d'autres domaines qui demeurent discriminatoires envers les femmes. Ainsi, il comprend des articles sur les domaines suivants: la polygamie, l'héritage et la répudiation (rapport 2010, rapport annuel du centre d'écoute de l'association Mains Solidaires pour le droit à la dignité et à la citoyenneté144.

La présidente de la section de la LDDF à Larache a souligné lors de notre entretien que « l'article sur l'âge du mariage a constitué un piège, puisqu'il y'a des juges qui ont une vision patriarcale et qui abusent de leur pouvoir, et autorisent la majorité des demandes de mariages des mineures. Ce qui constitue un recul par rapport à la situation avant le nouveau Code de la famille »145.

Les articles du Code de la famille posent problème dans la société marocaine.

En effet, les articles cités ci-dessus sont plus que conflictuels entre les islamistes et les universalistes. Pour bien comprendre les points de vue des trois composantes du Féminisme marocain (Etatique, islamiste et universaliste), il importe d'approcher la question de l'héritage puisque c'est une loi qui découle du Coran, donc sacrée et intouchable, mais aussi qui est basée sur la nature de la filiation d'une société patriarcale. Mais la loi sur l'héritage est également fortement liée à la nature de la monarchie marocaine. C'est une évidence qui explique pourquoi le Code de la famille n'a pas apporté de changement à la loi sur l'héritage. L'approche de cette loi dans le cadre de notre recherche a pour objectif d'analyser les rapports entre les composantes du féminisme marocain (féminisme d'Etat, féminisme islamique et féminisme universaliste). L'objectif est aussi de montrer que le statut juridique de la femme est fortement lié aux rapports d'alliance et d'opposition qui sont basés sur le pouvoir politico-religieux.

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