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Impacts des conflits liés à  la mobilité pastorale sur le développement et la gouvernance dans la province du Mayo-Kebbi ouest (Tchad)


par Souleymane ALI SALEH
Université de Dschang - Master en Science Politique, spécialité Gouvernance Locale, Décentralisation et Développement  2020
  

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D. LA MÉTHODE DE RECHERCHE

La méthode de recherche que nous retenons pour mener à bien notre étude, est l'interactionnisme stratégique. Les relations sociales sont faites d'interaction. Les interactionnistes centrent leurs analyses sur les interactions62. L'interactionnisme cherche à construire une nouvelle façon d'analyser le social à partir de l'hypothèse selon laquelle les individus sont des sujets conscients. Ils proposent d'expliquer le social par des actions où l'action a un sens pour les individus.

Michel CROZIER et Erhard FRIEDRENG63 suggèrent pour la compréhension des actions collectives à partir des comportements d'intérêts individuels et parfois contradictoires entre les acteurs.

Pour Jacques ROJOT64, l'important est de réaliser la pertinence de cinq concepts fondamentaux de la théorie de l'interaction : l'acteur, l'objet, les ressources, les contraintes et la stratégie pour mieux cerner l'action des acteurs. Il souligne à cet effet : « il est postulé que les acteurs ont toujours des objectifs. Il n'y a pas d'acte gratuit, le comportement de chacun dans une situation organisationnelle est toujours orienté par les buts. Chacun est actif dans une direction qu'il suit vers ses propos objectifs »

Pour mieux comprendre l'interactionnisme, nous passons en revue des cinq concepts principaux de la théorie de l'interactionnisme de ROJOT.

L'acteur : c'est un individu ou groupe d'individus membre d'une communauté qui pose des actes selon les objectifs qu'il vise. Plus simplement, l'auteur est la personne qui est à l'origine de quelque chose. Dans le champ de notre étude, les acteurs des conflits liés à la mobilité pastorale sont : les usagers (les éleveurs, les agriculteurs, les bouviers et accessoirement les pêcheurs) et les institutions étatiques et non-étatiques. Les premiers concernés sont les éleveurs, qui sont les propriétaires de bétail. Ces éleveurs, dans la zone du

62 Les actions réciproques entre les individus.

63 CROZIER (Michel) et FRIEDRENG (Erhard) cité DJINGAM-OUDAL RATEBAYE (Edmond) op cit. p. 28.

64 ROJOT (Jacques), cité par DJINGAM-OUDAL RATEBAYE (Edmond) op cit. p. 28.

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Mayo-Kebbi Ouest sont les peuls et les haoussas, tous des musulmans. À ceux-ci, il faut ajouter les commerçants, des militaires, les administrateurs qui sont détenteurs des capitaux investis préférentiellement dans le bétail. C'est sont ceux-là que le code pastoral nomme expressément « les propriétaires de capital-bétail ». Les seconds sont les agriculteurs. Ces agriculteurs sont des sédentaires. Dans la région, à part les groupes sus cités, tous les groupes sont des agriculteurs, chrétiens et animistes. Il y a une autre catégorie d'acteurs, souvent négligée par tout le monde, pourtant ils sont les acteurs les plus importants, c'est sont les bouviers. Ils sont les employés des éleveurs et c'est eux qui sont au-devant de la scène. Ils sont malproprement qualifiés d'éleveurs. Les derniers usagers concernés sont les pêcheurs, ces derniers entrent en conflit avec les éleveurs transhumants quand les animaux, au passage détruisent les filets de pêche. Les conflits entre les éleveurs et les pêcheurs sont assez rares, car le Mayo-Kebbi Ouest n'est pas une zone d'intense pêche, excepté le Lac Léré. Même si ces conflits ont eu lieu autrefois autour du Lac Leré, ils restent très limités. Les institutions étatiques entrent en conflit avec les pasteurs lors des déplacements, quand les animaux des éleveurs côtoient les aires protégées (forêts classées, réserves de faune, forêts sacrées, parcs nationaux, sanctuaires...). Ces conflits peuvent également opposer les pasteurs transhumants aux institutions non-étatiques à l'instar des ONG.

L'objectif : c'est l'idéal qu'un acteur veut atteindre en posant un acte. Tout acte posé est en réalité pour atteindre un but plus ou moins manifeste, les objectifs ne sont jamais clairs, ni explicites voire contradictoires, c'est là tout le sens du célèbre dicton « il n'y a pas d'acte gratuit ». C'est en considérant ce dicton que les agriculteurs refusent catégoriquement de comprendre l'argument le plus souvent avancé par les éleveurs. Les éleveurs prétendent toujours que, c'est à leur insu que les animaux détruisent les champs. L'objectif des éleveurs, c'est d'avoir en suffisance de pâturages et de l'eau pour les animaux. Les agriculteurs quant à eux ont pour objectif de protéger leurs champs de toute dévastation. Pour leur tour, les pêcheurs ont pour objectif de préserver aussi longtemps que possible les filets pour avoir une quantité suffisante de poissons.

Les ressources : c'est sont des moyens dont disposent les acteurs pour la réalisation de leurs objectifs. C'est ainsi que le code pastoral parle de ressources pastorales, qui sont l' « ensemble des ressources clés nécessaires à l'alimentation des animaux en élevage extensif. Exemple : l'eau, le pâturage, les résidus de cultures, le foin stocké, les terres

salées... »65 Pour les agriculteurs, les ressources sont constituées des terres cultivables, les tracteurs, la houe, l'eau... et en fin pour les pêcheurs, les ressources sont les eaux, les filets, les pirogues, les bâches...

Les contraintes : c'est des choses qui empêchent aux acteurs d'atteindre leurs objectifs, elles peuvent être propres ou externes à l'auteur. Leurs importances sont proportionnelles aux objectifs à réaliser. Dans le cadre de notre étude, la majorité de ces contraintes sont naturelles. C'est d'ailleurs ces contraintes qui sont à l'origine de la mobilité pastorale au rang desquelles la diminution de la pluviométrie, l'accroissement de la population, le retard des pluies... Pour les agriculteurs, ces contraintes sont le retard des pluies, le manque d'espaces pour cultiver, le manque de moyens modernes de culture, les criquets pèlerins, les oiseaux dévastateurs... Pour les pêcheurs, les contraintes sont entre autres le retard des pluies, le tarissement des lacs ou rivières, le manque de moyens modernes de pêche...

La stratégie : est l'action de l'auteur, qui pour réaliser une action, prend en compte les ressources disponibles et les contraintes auxquelles il sera confronté dans une situation donnée. Ainsi, toutes ces communautés ont développé des stratégies dans leur domaine respectif. Les stratégies des éleveurs sont la politique de contrôle foncier, la recherche d'équilibre économique... Pour leur part, les agriculteurs ont développé des stratégies telles que l'appropriation des terres, la tendance vers une gestion individuelle, la pratique de l'élevage, la préservation du niveau de vie, la recherche de la sécurité alimentaire et des revenus monétaires... et les pêcheurs ont développé cette stratégie de s'adonner aux cultures riveraines, l'occupation de l'espace lacustre...

L'interactionnisme stratégique nous a permis ainsi de connaitre les acteurs des conflits liés à la mobilité pastorale, leurs objectifs, leurs ressources, les contraintes auxquelles ils sont confrontés et leurs stratégies. Dans le cadre de notre travail, nous utilisons l'interactionnisme pour expliquer la difficile cohabitation entre ces communautés, motivées chacun par des intérêts personnels.

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65 Article 4 du code pastoral.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille