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Localisation de futurs collèges dans le cadre de la démarche SCOT

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par Tristan BLIN
Université Toulouse le Mirail - Master 2 professionnel « Villes, Habitat et Politiques d?Aménagement » 2007
  

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La mixité sociale - un objectif politique.

Le récent retour en force de la mixité sociale comme objectif politique s'est instauré et a pris forme, en particulier depuis la mise en place de la loi Solidarité Renouvellement Urbain (SRU) du 13 décembre 2000 à travers son article 552 . Or il est intéressant de se rappeler des discours qui ont porté directement ou indirectement la mixité comme objectif politique. Le philosophe Marcel GAUCHET a mis en avant l'existence d'un « mur » entre les élites et les classes populaires, conceptualisant cette idée sous une expression qui a fait des émules, «la fracture sociale». Réutilisée lors de sa campagne de 1995, Jacques CHIRAC en a fait un de ses thèmes de prédilection (du moins durant cette campagne) en présentant la fracture sociale comme une menace de l'unité nationale. Par la suite, l'expression intégrée par les

1 « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Article 1 de la constitution de la Ve République.

2 Cet article a été modifié par l'article 65 de la Loi Engagement national pour le logement du 13 juillet 2006

différentes parties politiques s'est vu revisitée. Mais c'est bien à partir de là que les français ont eu un mot pour désigner la peur d'une dislocation de la société. Evidemment, la politique de la ville avait précédemment alerté sur les situations de relégation de certains quartiers et du risque de désolidarisation de la société3 . Mais étant attachée pendant longtemps à l'échelle du quartier (DSQ, DSU), elle n'a pas suscité une prise de conscience générale.

La perspective d'une société désunie, divisée socialement, a remis la mixité sociale comme enjeu de premier ordre, du moins dans les déclarations des décideurs.

Au regard de cette évolution, il est intéressant de constater qu'à l'instar des intentions environnementales par exemple, la mixité sociale a pour objectif de désamorcer un processus en oeuvre. La question de la mixité sociale est actuellement présentée face au spectre de la « fracture sociale », conclusion d'un processus de ségrégation où l'entre soi prend le pas sur le faire société4.

Par ailleurs, malgré le consensus autour de l'idée de mixité sociale, la volonté affichée ne présente pas un caractère sociétal complet. Bien au contraire, si nous reprenons la définition communément admise de l'adjectif sociétal5, la volonté de mixité que nous observons actuellement est cloisonnée à certains aspects de la vie sociale des individus, l'importance de l'homogamie par exemple ne fait pas l'objet d'un discours d'opposition valorisant la mixité sociale au sein des mariages. Donc la volonté de mixité est bien ciblée dans la vie sociale des individus et cela se traduit spatialement. La société concentre, en effet, toute son attention sur des lieux, des espaces où, pour certaines raisons que nous aborderons plus tard, la volonté de mixité est forte (la volonté n'étant pas l'intention).

En premier chef, l'école et ensuite la ville, sont devenus les lieux qui cristallisent tous les discours sur la mixité. Il suffit de reprendre les discours de campagne électorale de 2007 des deux principaux candidats6, pour se convaincre que la question de la mixité sociale s'est focalisée sur ces lieux.

Aussi, nous le comprenons bien, la volonté de mixité sociale s'intensifie sur des secteurs très précis et spatialement identifiés. C'est évidement par ce dernier aspect que la réflexion géographique trouve tout son intérêt. L'aménageur, le géographe, celui qui travaille

3 Rapport BONNEMAISON, 1982 ; Rapport DUBEDOUT, 1983 ; Rapport LEVY, 1988.

4 « Le problème n'est plus alors de résoudre une question sociale associée à la logique du conflit, mais de faire société pour enrayer une logique de séparation » extrait tiré de l'ouvrage Faire société : la politique de la yille aux États-Unis et en France, Seuil, 2003. Jacques Donzelot, Catherine Mével, Anne Wyvekens.

5 Societal : "Qui se rapporte aux divers aspects de la vie sociale des individus." Le Petit Larousse, édition 2005.

6 Voir l'article du 12/02/2007 sur le site de Radio France International.

sur l'espace, permet d'intégrer l'analyse spatiale dans la recherche de mixité sociale. A titre d'exemple, l'article très technique de Philippe APPARICIO intitulé Les indices de ségrégation résidentielle : un outil intégré dans un système d'in formation géographique, montre bien l'apport de la cartographie, du géographe et des sociologues (école de Chicago dans le cas présent) sur ces questions7.

En tout cas, si la volonté de mixité semble bien se concentrer sur certains endroits, il convient de se demander, en quoi ces lieux suscitent une telle attention et pourquoi l'hétérogénéité sociale des personnes qui la composent est il un enjeu affiché ?

L'attention portée à la ville (dans le sens d'une ville centre, de sa banlieue et de son périurbain) se comprend avant tout par le fait qu'une part importante de la société y est localisée et qu'elle concentre les plus fortes inégalités. Aussi, de part l'accentuation de la ségrégation socio spatiale, la ville tend à se partitionner en secteurs fortement marqués sociologiquement, économiquement et culturellement. Les tensions qui en découlent interpellent et mettent l'accent sur les risques de la ségrégation. En ce sens, la ville apparait aujourd'hui pour l'opinion publique comme le lieu où se réalise la fracture sociale. Il est sûr que les émeutes de novembre 2005 ont marqué les esprits et ont questionné la société française sur son unité. Mais si la fracture entre les zones de relégation et le reste de la ville est la plus médiatisée, d'autres fractures existent au niveau de la classe moyenne et des classes supérieures. Ce problème d'homogénéisation sociale des secteurs de la ville (toujours au sens de l'agglomération) fait craindre une scission, voire des scissions8 au sein de cette dernière. Or, il n'y a qu'un pas entre une fracture au sein des villes et une au sein de la société. Marie-Christine JAILLET le montre bien, dans son article La tentation de la sécession9, lorsqu'elle décrit le phénomène de peuplement homogène des classes moyennes dans le périurbain : (( A la reconnaissance d'une commune appartenance au-delà de l'affirmation des liens électifs, se substitue le désir de (( faire sécession », c'est-à-dire non seulement de vouloir vivre dans un entre-soi choisi mais de s'abstraire de la collectivité pour se soustraire à l'obligation de solidarité que sous-tend le fait d'y appartenir ».

La volonté de mixité au sein de la ville, affichée par les politiques, se comprend en réalité comme un mortier colmatant les brèches sur la clé de voûte de la société, si la ville se fracture, la société est en péril. Aussi, la recherche de mixité sociale n'est pas réellement un objectif en soi dans la volonté politique, elle est un moyen de produire la cohésion sociale.

7 Cet article est présenté dans le CD annexe. Il est publié sur le site cybergéo.

8 La ville à trois vitesses : Gentrification, relégation, périurbanisation Collectif Esprit N° 303 Mars-Avril 2004

9 Article paru dans Lien Social le 3 juin 1999-N°489 OASIS Magazine - http://www.travail-social.com et présent dans le cd annexe.

La logique appliquée au milieu scolaire est légèrement différente mais l'objectif de cohésion est le même. L'école représente un pilier de l'unité nationale, et ce depuis déjà longtemps. En ce sens, l'école de la III République par exemple a fortement contribué à la construction d'une identité commune10, l'interdiction des patois régionaux et les programmes d'histoire - géographie en sont des illustrations bien connues. De fait, il y a une attente d'intégration et de socialisation attribuée à l'école. La volonté politique d'instaurer de la mixité dans les établissements scolaires suit cette logique.

Pour la société, l'école répond au besoin de former les plus jeunes individus à des valeurs partagées et de construire chez eux, un sentiment d'appartenance à cette société. Or pour ce faire, l'école doit accueillir, autant que faire se peut, des classes aux publics représentatifs de cette société.

L'homogénéisation sociale des écoles crée un double risque, le premier étant que l'élève, quelque soit son milieu d'appartenance, construit à travers sa classe une vision tronquée de la société. Et deuxièmement, de par son milieu social, la probabilité de réussite scolaire de l'élève est variable11. Aussi, en simplifiant, la concentration sociale se traduit par la concentration de l'échec scolaire et de la réussite scolaire ce qui stigmatise d'autant plus les établissements soit dans le positif, soit dans le négatif, selon les résultats. Ceci aboutit à la construction d'une autre fracture plaçant l'école dans un cercle vicieux d'un processus de ségrégation qui s'autoalimente. Or, pour autant que le système éducatif mis en place ne soit pas construit dans une logique de concurrence12, la mixité sociale et culturelle semble plutôt favoriser la réussite scolaire des élèves.

Ainsi, la volonté de mixité se focalise sur ces deux espaces, car l'école est le lieu de formation traditionnel de l'unité de la société, et la ville est le lieu où les crispations sociales sont les plus marquées, alors même que sa structure est intimement liée à la société ellemême.

Si nous pouvons nous interroger sur la véracité de volonté de mixité de certains décideurs politiques, il est néanmoins important d'avoir conscience, quelques soient les ambitions des décideurs, que l'action sur cette thématique est complexe.

10 « En 1882, lorsque Jules Ferry fonde le système public d'enseignement de la IIIe République, il choisit de donner à l'école une mission d'intégration à la Nation comme à la République ». Rapport de J. HEBRARD intitulé La mixité sociale à l'école et au collège, mars 2002.

11 La Reproduction. Eléments pour une théorie du système d'enseignement, P. Bourdieu édition Minuit, 1970

12 Voir le texte de Conférence Classes difficiles. J.F BLIN. Présenté dans le cd annexe.

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