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Approche comparative de la conception des droits de l'homme dans la philosophe africaine et dans la philosophie politique contemporaine en occident

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par Julien Rajaoson
Sciences Po Grenoble - Master 2008
  

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2°) De l'époque contemporaine

Revenons donc, à ce projet de contribution aux controverses contemporaines : la mondialisation qui est un phénomène global a réussi le pari d'arrêter les guerres en développant l'activité commerciale à l'échelle planétaire, au lieu d'utiliser notre connaissance scientifique dans le but de se détruire mutuellement nous l'utilisons dorénavant pour accroître notre performance économique. L'adaptation à la logique concurrentielle de la mondialisation incline les différentes nations à réformer leurs institutions ainsi que leurs fiscalités afin de satisfaire aux exigences de nouveaux acteurs sur le plan international telles que les firmes multinationales. L'intérêt pour notre réflexion n'est pas de condamner ce système en dévoilant au grand jour ses imperfections intrinsèques, la question ne doit pas être posée en ces termes ; ce que nous allons analyser c'est le système de valeur qui s'y rapporte, ce culte de la performance auquel on adhère plus par contrainte que par conviction. Nous verrons que cela se répercute jusqu'aux relations sociales, alors même qu'en notre for intérieur elle ne semble pas faire pour autant l'unanimité.

A°) L'Homme, la Raison et l'Affect

L'idée qui sous-tend ce système de valeur est celle du savoir rationnel incontestable propre à la science dure179(*), et à l'opposé se situe les croyances d'ordre spirituel, non démontrées et qui ne correspondent pas à cette logique de la performance. Les questions d'ordre spirituel180(*) qui évoquent l'aspect affectif ou irrationnel de la nature humaine ont été oubliées par la philosophie politique contemporaine en Occident, nous allons voir qu'il n'en va pas de même pour la philosophie africaine vue par Tempels181(*). Peut être qu'après avoir Désenchanté le monde (Marcel Gauchet 1985), la rationalité a trouvé mieux que l'affect pour parachever son projet de transformation du monde contemporain. Pourquoi la spiritualité est-elle discréditée au profit de la rationalité ? Le projet n'intéresse-t-il personne à cause du contexte ? Est-ce dangereux de confier ce projet à l'affect de l'Homme, ou faute d'espoir, a-t-on abandonné le pari de poursuivre la transformation du monde ?

C'est avec beaucoup de réserves que nous procéderons à la comparaison des conceptions de Heidegger et de R. P. Tempels au sujet de l'Homme. République de Platon, qui est à la philosophie politique occidentale ce que la Philosophie Bantoue de R. Placide Tempels est à la philosophie africaine, a illustré par le mythe de Gygès182(*) cette hantise qui tourmente le rationalisme occidental. L'affect, le sentiment et les émotions, qui à juste titre menacent constamment ce que la raison est en mesure d'édifier sur le plan politique, ont été mis au ban de la rationalité philosophique et littéralement écartés du projet de transformer le monde « Reste cependant que des nuances existent entre notre mode d'appréhension et celui des Blancs européens. Des nuances et non pas une rupture radicale. En effet, l'esprit humain reste le même à travers toutes les différences culturelles et autres. Dans son mouvement de recherche de la vérité il procède de plusieurs façons : analyse et synthèse, induction et déduction, comparaison et généralisation, intuition et abstraction. (...) Du reste, Senghor lui-même le dit à l'adresse des jeunes d'Afrique qui lui reprochaient de refuser aux Nègres africains la raison discursive, tout comme il semble faire de l'intuition et de l'émotion des qualités exclusivement nègres »183(*). Dans son oeuvre fondatrice de la philosophie politique occidentale, Platon fait un procès sans appel à la partie irrationnelle de la nature humaine ; c'est un legs intellectuel184(*) que semble-t-il, nous n'avions pas jugé bon de questionner pour répondre à des interrogations plus contemporaines sur l'Homme et sur son rapport au monde.

* 179 Richard Rorty, Science et solidarité : la vérité sans le pouvoir, traduit de l'américain par Jean-Pierre Cometti, éd. de L'Eclat, France, 1990 pour la traduction française, p. 46 au chapitre II intitulé La science comme solidarité : « Dans notre culture, les notions de science, rationalité, objectivité et vérité sont étroitement apparentées. La science est considérée comme une discipline qui offre une vérité objective, dure : la vérité qui correspond à la réalité, la seule qui soit digne de ce nom. Les humanistes comme les philosophes, les théologiens, les historiens et les critiques littéraires sont obligés de se soucier de savoir si la qualité de scientifique peut leur être reconnue, autrement s'ils ont le droit de tenir leurs conclusions, indépendamment du soin apporté à l'argumentation, pour dignes de recevoir la qualification du vrai. Nous tendons à identifier la recherche de la vérité objective avec l'usage de la raison, ce qui nous pousse à voir dans les sciences de la nature des paradigmes de la rationalité. D'autre part, nous voyons dans la rationalité un enchaînement de procédures préétablies, une question de méthode et c'est pourquoi nous tendons à utiliser méthodique, rationnel, scientifique et objectif comme s'il s'agissait de synonymes. »

* 180 Christian Godin, op. Cit, p. 1248 se rapporter aux définitions de la Spiritualité et du Spirituel :

- « 1. Nature spirituelle, qualité de ce qui est esprit, et non point corps ou matière. Opp. À matérialité. 2. L'ensemble des phénomènes de nature religieuse qui concernent l'âme et les rapports qu'elle entretient avec la transcendance. »

- l'étymologie de la définition suivante est cruciale pour la suite de la réflexion « adj. (lat. spiritualis). Les sens vont de l'anima (dimension religieuse) à l'animus (dimension intellectuelle) - leur unité étant donnée par l'idée d'un ordre étranger au corps et supérieur à lui. 1. Relatif à la vie religieuse de l'âme, à ses rapports avec la transcendance. Opp. À charnel, sensuel, matériel. (...) 4. Affranchi de la matière et de la vie sensible, qui semble indépendant d'elle (plaisir spirituel, parenté spirituelle). Syn. D'intellectuel. Opp. À matériel. »

* 181 R. Placide Tempels, La Philosophie Bantoue, traduit du Néerlandais par A. Rubbens, imprimé aux Presses Alpha, collection Présence Africaine, 26 rue du Delta Paris 9ème, 1er semestre 1948 Chapitre II sur L'ontologie des Bantous dans la partie a°) La notion de l'être : « (...) La métaphysique considérée comme discipline méthodique et la sagesse humaine, que l'on désigne comme conception du monde, considèrent ou embrassent les réalités qu'on retrouve dans tout être de l'univers. Pareilles réalités sont notamment l'origine, le devenir, le changement, la croissance, l'anéantissement ou l'achèvement des êtres, la causalité active et passive, et plus particulièrement la nature de l'être en soi, vecteur essentiel de ces phénomènes ou modes universels. Par ces réalités tous les êtres ont quelque chose de commun ou d'identique. ». C'est en possédant une vision dynamique de l'Etre que le statut ontologique de la philosophie décrite par Tempels permet d'appréhender différents phénomènes devant lesquels l'ontologie occidentale semble inappropriée.

* 182 Platon texte établi et traduit par Emile Chambry, La République, Livres I à X, éd. Gallimard, Société d'édition « Les Belles Lettres », 1989, pour les livres I à VII et 1982 pour les livres VIII à X. p. 51 du livre II 359 c à 360 d, c'est le mythe de Gygès raconté par Glaucon à Socrate : « (...) Donnons à à l'homme de bien et au méchant un égal pouvoir de faire ce qu'il leur plaira ; suivons-les ensuite et regardons où la passion va les conduire : nous surprendrons l'homme de bien s'engageant dans la même route que le méchant, entraîné par le désir d'avoir sans cesse davantage, désir que toute nature poursuit comme un bien, mais que la loi ramène de force au respect de l'égalité. Le meilleur moyen de leur donner le pouvoir dont je parle, c'est de leur prêter le privilège qu'eut autrefois, dit-on Gygès, l'aïeul du Lydien. Gygès était un berger au service du roi qui régnait alors en Lydie. A la suite d'un grand orage et d'un tremblement de terre, le sol s'était fendu, et une ouverture béante s'était formée à l'endroit où il paissait son troupeau. Etonné à cette vue, il descendit dans ce trou, et l'on raconte qu'entre autres merveilles il aperçut un cheval d'airain, creux, percé de petites portes, à travers lesquelles ayant passé la tête il vit dans l'intérieur un homme qui était mort, selon toute apparence, et dont la taille dépassait la taille humaine. Ce mort était nu ; il avait seulement un anneau d'or à la main. Gygès le prit et sortit. Or les bergers s'étant réunis à leur ordinaire pour faire au roi leur rapport mensuel sur l'état des troupeaux, Gygès vint à l'assemblée, portant au doigt son anneau. Ayant pris place parmi les bergers, il tourna par hasard le chaton de sa bague par-devers lui en dedans de sa main, et aussitôt il devint invisible à ses voisins, et l'on parla de lui, comme s'il était parti, ce qui le remplit d'étonnement. En maniant de nouveau sa bague, il tourna le chaton en dehors et aussitôt il redevint visible. Frappé de ces effets, il refit l'expérience pour voir si l'anneau avait bien ce pouvoir, et il constata qu'en tournant le chaton à l'intérieur il devenait invisible ; à l'extérieur, visible. Sûr de son fait, il se fit mettre au nombre des bergers qu'on députait au roi. Il se rendit au palais, séduisit la reine, et avec son aide attaqua et tua le roi, puis s'empara du trône. Supposons maintenant deux anneaux comme celui-là. Mettons l'un au doigt du juste, l'autre au doigt de l'injuste ; selon toute apparence, nous ne trouverons aucun homme d'une trempe assez forte pour rester fidèle à la justice et résister à la tentation de s'emparer du bien d'autrui, alors qu'il pourrait impunément prendre au marché ce qu'il voudrait, entrer dans les maisons pour s'accoupler à qui lui plairait, tuer les uns, briser les fers des autres, en un mot être maître de tout faire comme un dieu parmi les hommes. En cela, rien ne le distinguerait du méchant, et ils tendraient tous deux au même but, et l'on pourrait voir là une grande preuve qu'on n'est pas juste par choix, mais par contrainte, vu qu'on ne regarde pas la justice comme un bien individuel, puisque partout où l'on croit pouvoir être injuste, on ne s'en fait pas faute. Tous les hommes en effet croient que l'injustice leur est beaucoup avantageuse individuellement que la justice, et ils ont raison de le croire, si l'on s'en rapporte au partisan de la doctrine que j'expose. Si en effet un homme, devenu maître d'un tel pouvoir, ne consentait jamais à commettre une injustice et à toucher au bien d'autrui, il serait regardé par ceux qui seraient dans le secret comme le plus malheureux et le plus insensé des hommes. Ils n'en feraient pas moins en public l'éloge de sa vertu, mais à dessein de se tromper mutuellement dans la crainte d'éprouver eux-mêmes quelque injustice. Voilà ce que j'avais à dire sur ce point. »

* 183 A. J. Smet, Philosophie africaine. Textes choisis II, préface par Mgr Tshibangu T, éd. Presses Universitaires du Zaïre B.P 13.399, Kinshasa, 1975, voir le chapitre sur Octave Ugirashebuja dans lequel il traite de La position négative de la pensée de Senghor p. 318.

* 184 R. Placide Tempels, La philosophie Bantoue, traduit du Néerlandais par A. Rubbens, imprimé aux Presses Alpha, coll. Présence Africaine, 26 rues du Delta, Paris 9 ème 1er semestre, 1948. P. 34 : « La pensée occidentale chrétienne, ayant adoptée les formules de la philosophie grecque, et peut-être sous l'influence de celle-ci, définit le plus souvent cette réalité commune à tous les êtres, ou si l'on veut, l'être comme tel : la réalité qui est, quelque chose qui existe, ce qui est. Sa métaphysique a été basée sur un concept fondamental plutôt statique de l'être. (...) Nous, occidentaux, voyons dans la force un attribut de l'être, et nous avons élaboré une notion de l'être dégagée de la notion de force. Il semble que les primitifs n'ont pas interprété ainsi la réalité. Leur notion de l'être est essentiellement dynamique. ». C'est un point crucial que nous ne manquerons pas de relever dans une comparaison entre l'ontologie de type occidentale est celle qui se rapporte à l'Afrique ; en effet, le contenu métaphysique de la conception de l'idée de l'Homme est en question, doit on saisir l'Homme en tant qu'Etre statique conformément à la conception ontologique occidentale, ou dans une perspective nouvelle doit-on concevoir l'Etre et la Force constitutives de l'idée de l'Homme.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand