L'OISEAU, UN ARCHITECTE QUI S'IGNORE...
Institut Supérieur d'Architecture Victor Horta Directeur :
J-P. Vanseveren
Année académique 2005-2006
Travail de fin d'études Lecteurs : L. Bollen
Olmanst Shani J-L. Brisy
Août 2006 J-M. Sterno
TABLE DES MATIERES
Prologue 7
1. INTRODUCTION 9
2. LA POETIQUE DU NID ET DE LA MAISON 15
A. Le nid
La maison
La maison-nid
3. EVOLUTION, ADAPTATION, DIVERSIFICATION 23
3.1. Généralités 25
3.2. Analogie 31
3.2.1. L'habitat rudimentaire 37
A. L'oiseau
L'homme
3.2.2. L'habitat aquatique 41
A. L'oiseau : les nids flottants
les nids sur pilotis
A. L'homme : l'habitat traditionnel L'habitats moderne
3.2.3. L'habitat en hauteur 51
A. L'oiseau
L'homme : l'habitat traditionnel l'évolution
l'habitat actuel
A. L'oiseau : la cavité naturelle
la cavité construite
la cavité creusée : les Mineurs et les
Sculpteurs
A. L'homme : l'habitat traditionnel
L'habitat actuel
3.2.5. L'habitat maçonné 69
A. L'oiseau
L'homme : Qu'est-ce que la maçonnerie ?
Les différentes manières de modeler la terre
3.2.6. Les insolites 77
A. La couveuse
La nourricière
La garçonnière
La couturière
La rénovation, le recyclage
3.3. Un pas vers l'écologie : L'oiseau ménage,
l'homme aménage 89
4. A L'HEURE ACTUELLE, EST-IL ENCORE POSSIBLE POUR L'HOMME DE
VIVRE EN HARMONIE AVEC LA NATURE ? 97
4.1. L'écologiste élémentaire 99
4.2. L'écologiste responsable 101
4.3. L'écologiste complet 105
4. CONCLUSION : Réagissons, réveillons les
consciences ! 109
Bibliographie 115
Remerciements 117
Barcelone, Août 2004
Me voilà à l'intérieur de la Sagrada
Familia, surprise, admirative, génie, pureté des formes,
grandiose, tous ces mots se bousculent dans ma tête. Je me sens si petite
devant cette profusion de lignes, de courbes, de formes si différentes
et si harmonieuses à la fois.
Et là je comprends, Gaudi, architecte de génie, a
pu reprendre bon nombre des diversités que la nature offre à
notre regard.
Et soudain, l'illumination, voilà le sujet de mon
mémoire : l'inspiration de la nature dans l'architecture. Mais le
domaine était trop vaste et il a fallu cibler.
C'est assise dans un parc, qu'une révélation me
vint, les oiseaux, leurs nids.
De comparer leur architecture avec celle des humains et de penser
à l'écologie, il n'y a qu'un pas.
La suite, à vous de la découvrir...
1. INTRODUCTION
« Studio à louer pouvant accueillir couple avec
enfants, en pleine nature, vue imprenable sur la forêt, endroit calme,
grande surface à proximité »
Depuis toujours l'homme pense avoir l'apanage de la
construction.
Il édifie , il bâtit, il défie la nature dans
sa quète de confort en construisant de plus en plus haut, de plus en
plus loin, de plus en plus fort.
Pourtant l'être humain devrait rester humble et constater
que le règne animal a beaucoup à lui enseigner dans ce
domaine.
Les oiseaux, pour ne citer qu'un exemple, édifient de
petits nids douillets qui respectent l'équilibre naturel et qui offrent
tout le confort souhaité pour accueillir une future petite famille
nombreuse.
Les oiseaux sont donc des petits architectes écologistes
!
Ingénieux, astucieux, surprenants ces maîtres
bâtisseurs qui s'ignorent feront l'objet de ce mémoire par le
biais d'une reflexion symbolique et d'une approche, analogique et
écologique.
De tout temps les oiseaux ont inspiré les hommes...
La notion de nid évoque à elle seule toute une
symbolique de sécurité, de confort et de chaleur.
Dans un premier temps je vous transmetterai les propos
reccueillis auprès de diverses personnes (avis d'amateurs et de
professionnels) sur la symbolique véhiculée par le nid.
Lorsque l'on compare le nid des oiseaux à certains
habitats humains (analogie qui fera l'objet du second chapître), on peut
remarquer que quelques peuples, restés proches de la nature et vivant en
parfaite harmonie avec celle-ci, imitent certaines techniques de nidification
pour bâtir leurs refuges familiaux. Mais force nous est de constater que
ces peuples plus « écologiques » sont souvent
considérés comme primitifs et dénigrés par les
civilisations dites « développées ».
L'interèt économique et la rentabilité
l'emportant trop souvent sur la sauvegarde du patrimoine mondial !
En voyant la symbiose existant entre l'oiseau et son milieu
naturel, l'homme ne pourrait-il pas se remettre en question et faire de la
nature son alliée plutôt que sa victime ?
Est-il possible de concevoir une architecture plus
écologique tout en conservant le mode de vie confortable auquel nous
sommes habitués ?
Cette écologie fera l'objet de la troisième partie
de ce travail.
Avant que vous ne poursuiviez la lecture, j'aimerais
préciser que les références surmontées d'un
astérisque renvoient à la bibliographie p115.
Et comme dit l'adage...
Petit à petit, l'oiseau fait son nid...
Et même si ce travail n'a pas la prétention
d'être une anthologie complète, il m'a permis de finaliser mes
études avec passion et susciter mon intérêt pour une future
voie architecturale plus écologique.
2. LA POETIQUE DU NID ET DE LA MAISON
A. Le nid
La maison
La maison-nid
« Si j'étais poète et avais sa verve, je
dirais : « Nid rime avec logis » et pour le décrire, j'y
userais ma plume.
Si j'étais bâtisseur, devant un nid très
élaboré, mes premiers mots exprimeraient ma surprise, mon
étonnement profond, mon admiration devant une oeuvre pleine
d'ingéniosité et d'enseignements,
respirant l'adresse de son réalisateur et
méritant que l'on s'y attarde.
Si j'étais philosophe, je me pencherais davantage sur
sa signification profonde Et le ferais apparaître comme un « cocon
de vie » où règne la quiétude,
et où l'atmosphère protectrice tamise la
lumière du jour et n'a pour « soleil » que la
progéniture.
Si j'étais Roi, je lui attribuerais son titre de
noblesse pour ses qualités préservatrices permettant aux
oisillons de voir le jour et de prendre leur envol
sous le regard de leurs géniteurs bien
préparés. »
Poème rédigé par Jacques Olmanst
N'éprouve-t-on pas un sentiment de surprise lorsque dans
les parcs verdoyants de nos villes et banlieues, dans nos jardins
d'agrément, en pleine nature, non seulement survivent, mais
prospèrent encore une multitude d'oiseaux.
Le nid n'a cessé de nous émerveiller, d'être
évocateur, de se confondre avec nos chaumières, si bien qu'il a
donné lieu à tant de réflexions.
Que se soit par une approche psychologique, scientifique ou
philosophique, la notion de nid véhicule une symbolique de perfection de
l'habitat familial.
C'est pourquoi je vous ai transmis quelques citations,
pensées ou textes dans le seul but d'étayer nos idées
fondées sur ce joyau architectural qu'est le nid :
A. Le nid :
« Image de la perfection, construction qui porte la
marque d'un instinct très sûr, le nid est souvent associé
à des images de repos, d'harmonie, de simplicité, de bonheur, de
chaleur, de sécurité, de tendresse, de confiance. »
« Architecture vivante » de V.Willemin*
« Essai malheureux : LA CAGE »
« L'invention de la cage à oiseaux a dû
être une triste nouvelle pour la gent ailée. La cage est une
prison qui voudrait refléter notre pâle conception du confort. Une
mangeoire, une coupelle d'eau, une baignoire et une petite balançoire
correspondent à notre niveau de subsistance personnel le plus bas. Mais
les animaux domestiqués ne sont pas difficiles et acceptent sans
protester ce que leur donne leur maître. Cependant à regarder de
près les cages, on ne peut s'empêcher d'éprouver une
certaine pitié à l'égard de leurs occupants, tant ces
logis préfabriqués sont loin d'égaler ceux que
construisent les bêtes libres ; l'architecture animale nous fait mieux
saisir l'incertitude de l'homme des villes, dans ce domaine, et ses
tâtonnements incessants. »
« Architecture insolite » de R. Rudofsky*
(( la famille » Françoise Herman
Le nid rassemble tous les éléments qui en font
partie, l'entité maternelle et paternelle qui protègent leur
progéniture.
C'est le point de départ d'une famille lorsque papa et
maman décident de construire un nid en vue d'élever leur
petit.
(( La procréation » Jacques Olmanst
Vouloir exister par sa progéniture, le prolongement de
soi.
(( Le nid d'amour » Jacques Olmanst
Aimer l'autre sans rien attendre en retour.
(( Le lit » David Noël
Douceur, confort, chaleur, douillet.
B. La maison :
C'est le nid de l'homme, un lieu de retrouvailles,
d'échange, de vie. On y chante , on y danse, on s'y dispute, tout ce que
la vie peut procurer de bien ou de mal.
C'est un point de repère et d'accroche, son (( chez soi
».
Intimité, bien-être, protection, chaleur, reflet de
soi, ...
(( L'habitat humain »
« Pour connaître l'histoire des hommes
peut-être faut-il regarder leurs maisons. Elles racontent souvent quelle
place ils se sont assignée dans l'univers et comment ils l'ont
délimitée. Histoires mythiques, histoire de peurs et de
protections, d'échanges et de rencontres. Les constructions des maisons
révèlent alors la complicité de ceux qui les habitent avec
la terre, l'eau, l'air et la lumière. Enveloppes tour à tour
minérales, végétales, animales, leurs formes dessinent
dans le paysage des cercles, des carrés, étirés parfois en
rectangles, des triangles, toute une géométrie variable qui
s'ajuste aux besoins quotidiens du corps humain. C'est lui qui donnera une
fonction à l'espace intérieur et lui ajoutera une âme. Et
ainsi, dans un jeu subtil et secret d'emboîtements, le cosmos englobe la
maison et la maison entoure l'homme. Qu'elle soit coquille ou forteresse , elle
saura protéger l'intimité ou l'ouvrir au regard des autres pour
la partager. Mais ce qui se
passe dans la maison, les murs le laissent
transparaître. Leurs couleurs, leurs épaisseurs, leurs
rugosités, leurs salissures parlent du temps qui passe de la naissance
à la mort. Selon que l'on est vieux ou jeune, célibataire ou
marié, homme ou femme, l'espace attribué changera. L'orientation
face ou dos à la porte d'entrée, au soleil, au froid, aux vents,
ne sera pas la même. Et l'empreinte laissée par les corps à
l'intérieur de la maison suivra cette évolution. Ainsi va la vie
! »
« Maison cocon »
« Faire de sa maison un coin bien à soi est une
tentative occidentale de repli sur soi et chez soi qui semble naturelle. Plus
que des intempéries, de la nuit, des fauves et des insectes, le logis
protège d'un sentiment diffus d'agression. Un petit espace suffit
à faire un cocon patiemment tissé, une seconde peau dans laquelle
on peut se glisser pour découvrir tout ce que le mot «
intérieur » signifie. Alors, loin d'enfermer, les murs
délimitent l'espace privé. »
« Maison mère »
« Enveloppe minérale, animale,
végétale que l'on dessine autour de sa propre chair, la maison
ressemble à une grande matrice. Elle est la mère à la fois
protectrice et nourricière [...] Si les premières limites
humaines, celles du ventre maternel, sont enregistrées dans
l'inconscient dès la conception, elles doivent pourtant être
franchies pour arriver au monde, à la vie. Ce passage par la porte
étroite de la naissance donnera lieu à bien d'autres,
célébrés dans les mythes et lors des
cérémonies religieuses comme un accès à un
état nouveau, une façon de renaître symboliquement. Les
murs des maisons sont eux aussi les premières limites spatiales du
corps. La rareté ou l'abondance des matériaux de construction et
leur coût n'expliquent qu'en partie les structures adoptées.
»
Trois extraits du livre « Habitat du monde » de M. et
C. Laffon*
C. La maison-nid :
« la chaumière-nid de Van Gogh »
« Le nid comme toute image de repos, de
tranquillité, s'associe immédiatement à l'image de la
maison simple. De l'image du nid à l'image de la maison ou vice versa,
les passages ne peuvent se faire que sous le signe de la simplicité. Van
Gogh qui a peint beaucoup de nids et beaucoup de chaumières écrit
à son frère : « La chaumière au toit de roseaux m'a
fait penser au nid d'un roitelet ».
N'y a-t-il pas pour l'oeil du peintre un redoublement
d'intérêt si, peignant un nid, il rêve à la
chaumière, si peignant une chaumière, il rêve à un
nid. A de tels noeuds d'images, il semble qu'on rêve deux fois, qu'on
rêve sur deux registres. L'image la plus simple se double, elle est
elle-même et autre chose qu'elle même : Les chaumières de
Van Gogh sont surchargées de chaume. Une paille épaisse,
grossièrement tressée souligne la volonté d'abriter en
débordant les murs. De toutes les vertus d'abri, le toit est ici le
témoin dominant. Sous la couverture du toit les murs sont de la terre
maçonnée. Les ouvertures sont basses. La chaumière est
posée comme un nid sur le champ.
Et le nid du roitelet, est bien une chaumière, car
c'est un nid couvert, un nid rond. L'abbé Vincelot le décrit en
ces termes : « Le roitelet donne à son nid la forme d'une boule
très ronde, dans laquelle est pratiqué un petit trou placé
en dessous, afin que l'eau n 'y puisse pénétrer. Cette ouverture
est ordinairement dissimulée sous une branche. Souvent, il m'est
arrivé d'examiner le nid dans tous les sens avant d'apercevoir
l'ouverture qui donne passage à la femelle ». En vivant en sa
liaison manifeste la chaumière-nid de Van Gogh, soudain en moi les mots
plaisantent. Il me plaît de me redire que c'est un petit roi qui habite
la chaumière. Voilà bien une image-conte, une image qui
suggère des histoires. »
« La poétique de l'espace » de G. Bachelard*
3. EVOLUTION, ADAPTATION, DIVERSIFICATION
3.1. Généralités 3.2. Analogie
3.2.1. L'habitat rudimentaire 3.2.2. L'habitat aquatique 3.2.3.
L'habitat en hauteur 3.2.4. L'habitat troglodytique 3.2.5. L'habitat
maçonné 3.2.6. Les insolites
3.3. Un pas vers l'écologie : l'oiseau
ménage, l'homme aménage.
« Création de l'amour »
« Toute autre est la demeure du quadrupède. Il
naît vêtu ; qu'a-t-il besoin de nid ? Aussi, ceux qui
bâtissent ou creusent travaillent pour eux-mêmes plus que pour les
petits. La marmotte est un mineur habile dans son oblique souterrain, qui lui
sauve le vent de l'hiver. L'écureuil, d'une main adroite,
élève la jolie tourelle qui le défendra de la pluie. Le
grand ingénieur des lacs, le castor, qui prévoit la crue des
eaux, se fait plusieurs étages où il montera à
volonté : tout cela pour l'individu. L'oiseau bâtit pour la
famille . Insouciant, il vivait sous la claire feuillée, en butte
à ses ennemis; mais dès qu'il n'est plus seul, la
maternité prévue, espérée, le fait artiste. Le nid
est une création de l'amour ».
« L'oiseau » de J. Michelet, p209*
|
« Instinct maternel »
« La mère ne se fie point au mâle pour tout
cela, mais elle l'emploie comme pourvoyeur. Il va chercher des
matériaux, herbes, mousses, racines ou branchettes. Mais quand le
bâtiment est fait, quand il s'agit de l'intérieur, du lit, du
mobilier, l'affaire devient plus difficile. Il faut songer que cette couche
doit recevoir un oeuf, infiniment prenable au froid, donc tout point
refroidi serait pour le petit un membre mort. Ce petit
naîtra nu. Le ventre, au ventre de la mère bien appliqué,
ne craindra pas le froid ; mais le dos, dépouillé encore , le lit
seul doit le réchauffer : la mère est là-dessus d'une
précaution, d'une inquiétude bien difficiles à
satisfaire.
Le mari apporte du crin, mais c'est trop dur : Il ne
servirait que dessous, et comme un sommier élastique. Il apporte du
chanvre, mais c'est trop froid : la soie ou le duvet soyeux de certaines
plantes, le coton ou la laine, sont admis seuls ; ou mieux, ses propres plumes,
son duvet, qu'elle arrache et quelle met sous le nourrisson. »
« L'oiseau » de J. Michelet, p210-211*
|
3.1. Généralités
Après la période des intempéries, les
activités du bâtiment reprennent de plus belle. Les oiseaux aussi
participent à cette reprise saisonnière, en construisant ou en
réparant et nettoyant leurs nids en vue d'y élever leurs
petits.
A ce sujet, il faut rejeter une idée reçue,
à savoir que les nids servent de demeure aux oiseaux. Pour leur
très grande majorité, ce ne sont que des maternités et
pouponnières destinées à la ponte, à la couvaison
et au nourrissage des oisillons jusqu'à leur premier envol, leur
indépendance.
En dehors de la période de nidification, les oiseaux
sont « sans logis » ; ne font exception que quelques espèces
qui se servent de leur nid en vue de leurs parades ou comme lieu de repos.(ex.
:, les hirondelles de fenêtre s'y réfugient pendant la nuit ,
l'oiseau jardinier l'utilise pour ses danses,...)
L'habitat humain est quant à lui destiné à
loger l'homme, à son repos et à ses enfants lorsqu'il en a.
L'homme construit, comme les oiseaux, une maison dans l'idée d'avoir des
enfants, pour que la famille puisse s'agrandir et s'épanouir. Un
territoire dont il est propriétaire.
EVOLUTION, ADAPTATION
Beaucoup d'animaux se livrent à des travaux de
construction pour abriter leur progéniture. Cette tendance s'accentue
chez les oiseaux, dont le nid à subi une évolution et un
perfectionnement évident.
La couvaison et son besoin de chaleur est dû à
l'oviparité qui implique que l'oeuf et l'embryon soient soumis pendant
un temps prolongé à l'action des facteurs agressifs du milieu. De
ce fait , une enceinte thermique et protectrice efficace leur est indispensable
jusqu'à ce qu'ils soient autonomes.
De même, l'homme pense à s'abriter, se
protéger de son environnement, du milieu hostile qui l'entoure ( climat
et prédateurs). Celui-ci se modifiant, ses abris ont également
évolué.
En des milliers d'années , l'homme est passé des
cavernes , des huttes formées de quelques branches, à des maisons
sophistiquées.
(( Un art remarquable »
« J'écris en face d'une jolie collection de nids
d'oiseaux français, qu'un de mes amis a faite pour moi. Je suis à
même d'apprécier, vérifier les descriptions des auteurs, de
les améliorer peut être, si les ressources bien limitées du
style pouvaient donner idée d'un art tout spécial, moins analogue
aux nôtres qu'on ne serait tenté de le croire au premier coups
d'oeil. Rien ne supplée ici à la vue des objets. Il faut voir et
toucher : on sent alors que toute comparaison est inexacte et fausse. Ce sont
des choses d'un monde à part. Faut-il dire au-dessus des oeuvres
humaines ? Ni l'un, ni l'autre ; mais différentes essentiellement, et
dont les rapports ne sont guère qu'extérieurs. »
(( L'oiseau » de J. Michelet, p207*
|
(( Tout est harmonie. »
« Ainsi l'oeuvre est empreinte d'une force de
volonté extraordinaire, d'une passion singulièrement
persévérante. Vous le sentirez surtout à ceci, qu'elle
n'est pas, comme les nôtres, préparée par une charpente qui
en fixe le plan, soutient et régularise le travail. Ici le plan est si
bien dans l'artiste, l'idée si arrêtée, que sans charpente
ni carcasse, sans appui préalable, le navire aérien se
bâtit pièce à pièce, et pas une ne trouble
l'ensemble. Tout vient s'y ajouter à propos, symétriquement, en
parfaite harmonie : chose infiniment difficile dans un tel défaut
d'instrument et dans ce rude effort de concentration et de feutrage par la
pression de la poitrine. »
(( L'oiseau » de J. Michelet, p209*
|
L'habitat humain, de la Préhistoire à nos jours,
qu'il soit flottant, mobile ou sédentaire, a subi une énorme
complexification, cependant il existe encore des habitats restés
à l'état rudimentaire, construits de manière
traditionnelle, vernaculaires.
Comme nous l'avons vu précédement, la «
maison » n'est pas uniquement édifiée pour l'apprentissage
et l'éducation des enfants. Mais lorsqu'un bébé
naît, il aura besoin d'un certain temps pour atteindre l'âge
où il pourra subvenir seul à ses besoins. Il faut plus ou moins
attendre sept ans pour que l'enfant soit capable d'associer des idées,
de
devenir raisonnable, de savoir ce qui est bien ou mal pour lui.
Du fait de la Loi, de quelconques croyances ou encore de règlements
ethniques, cette période se prolonge de plusieurs années pour
qu'il soit complètement indépendant, c'est-à-dire
totalement responsable de ses actes.
La durée de cette tutelle est très difficile
à définir en général, car elle dépend de
beaucoup de facteurs : l'éducation, le pays, la situation sociale,
économique, l'appartenance à une ethnie...
Aux Etat-Unis, la majorité s'aquiert à 21 ans. Dans
certains pays d'Afrique, on est un homme à l'âge de 12 ans.
PERFECTION
Le nid de l'oiseau est considéré comme une oeuvre
parfaite, il est valorisé comme extraordinaire. Le nid passe pour la
plupart du temps pour une merveille de la vie animale. Prenons, dans l'oeuvre
d'Ambroise Paré , un exemple : « L'industrie et artifice,
à laquelle tous les animaux ont à faire leurs nids est faite
proprement qu'il n'est possible de mieux, tellement qu'ils surpassent tous les
maçons, charpentiers et édificateurs ; car il n'y a homme qui
sût faire édifice plus propre pour lui et ses enfants, que ces
petits animaux les font pour eux, tellement que nous avons un proverbe, que les
hommes savent tout faire sinon les nids des oiseaux. »
L'oiseau a donc une conception précise de ce qui constitue
pour lui l'abri parfait, il lui suffit d'y réfléchir, car la
construction du nid est héréditaire, elle est inscrite dans le
patrimoine génétique de l'oiseau. Cela ne signifie cependant pas
que la part de l'acquis soit nulle, les jeunes se montrent moins habiles que
les sujets plus âgés. Contrairement aux oiseaux, les hommes n'ont
pas le sens inné de la construction de leurs maisons. L'homme est
incapable de donner forme à une maison sans expérience
préalable. Il lui faut du temps afin d'acquérir un certain
savoir- faire.
« Adaptation de la maison »
« Lorsqu'un enfant dessine une maison, elle prend
spontanément la forme d'un visage : deux yeux, un nez, une bouche pour
la porte d'entrée et, avec son chapeau de toit, la voilà
personnifiée, comme si le lieu que nous habitons devait avoir figure
humaine. Espace sacré pour les uns, profane pour les autres, elle ne
peut ignorer l'empreinte du corps humain, ce dont il a besoin : respirer, se
nourrir, dormir, aimer. L'importance, essentielle ou relative, de ces besoins
fondamentaux, les réponses apportées déterminent la
façon de vivre. Où mange-t-on ? à table ou assis par terre
? Quelle est la place réservée à chacun, homme, femme,
enfant, pour dormir ? Que l'on protège son intimité, et
aussitôt les formes des fenêtres, leur orientation changent. Les
différents modes de vie influencent les formes d'habitat, la division et
la répartition des espaces domestiques. »
« Habitat du monde » de C. et M. Laffon*
|
« Adaptation du nid »
« Mais dans chaque art, les oiseaux qui s'y livrent
vont plus ou moins haut, selon l'intelligence des espèces, la
facilité des matériaux ou l'exigence des climats. »
« L'oiseau » de J. Michelet, p21 1*
|
Mais il faut malgré tout quand même se rendre compte
que les oiseaux travaillent dans des conditions enviables. Ils ignorent toute
notion de rendement ou de profit, en comparaison de l'homme qui est contraint
d'utiliser des matériaux peu coûteux ; il n'a pas le temps , ni
l'argent pour construire sa maison idéale. La plupart des personnes
choisissent d'édifier une maison standardisée, impersonnelle, qui
est la plus économique possible ; Je pense notamment au concept des
maisons « clé sur porte ».
DIVERSIFICATION
Au cours de l'évolution, le nid des oiseaux et nos
maisons, ont en général subi des modifications profondes et un
perfectionnement très poussé, ce qui est une conséquence
de l'adaptation de l'homme et de l'oiseau à leur milieu, à leur
environnement, au climat et aux prédateurs, tandis que l'homme a
innové dans les techniques et les matériaux.. Pour l'oiseau, le
nid est adapté avant tout à la morphologie de l'animal, au milieu
et aux besoins des jeunes.
Pour l'homme, sa maison est adaptée à son mode de
vie, à ses croyances, à son appartenance ethnique, à son
bien-être, à son confort, aux nouvelles technologies, à sa
situation sociale et économique,...
« Matériaux, outils, construction d'un nid »
« Rappelons-nous d'abord que cet objet charmant, plus
délicat qu'on ne peut dire, doit tout à l'art, à
l'adresse, au calcul. Les matériaux, le plus souvent, sont fort
rustiques, pas toujours ceux qu'eût préférés
l'artiste. Les instruments sont très défectueux. L'oiseau n'a pas
la main de l'écureuil, ni la dent du castor. N'ayant que le bec et la
patte (qui n'est point du tout une main), il semble que le nid doive lui
être un problème insoluble. Ceux que j'ai sous les yeux sont la
plupart formés d'un tissu ou enchevêtrement de mousses, petites
branches flexibles ou longs filaments de végétaux ; mais c'est
moins encore un tissage qu'une condensation ; un feutrage de matériaux
mêlés, poussés et fourrés l'un dans l'autre avec
effort, avec persévérance : art très-laborieux et
d'opération énergétique, où le bec et la griffe
seraient insuffisants. L'outil, réellement, c'est le corps de l'oiseau
lui-même, sa poitrine, dont il presse et serre les matériaux
jusqu'à les rendre absolument dociles, les mêler, les assujettir
à l'oeuvre générale.
Et au-dedans, l'instrument qui imprime au nid la forme
circulaire n'est encore autre que le corps de l'oiseau. C'est en se tournant
constamment et refoulant le mur de tous côtés, qu'il arrive
à former ce cercle. »
« L'oiseau » de J. Michelet, p208*
3.2. Analogie
Les oiseaux sont maîtres dans l'art de construire des nids.
Ils cousent, entrelacent, tissent, collent, empilent ou cimentent divers
matériaux jusqu'à élaborer parfois de véritables
chefs-d'oeuvres.
Contrairement à une idée reçue, il n'y a pas
que les espèces exotiques pour nous offrir les plus incroyables exemples
en matière de réalisations architecturales.
L'oiseau, conditionné par le milieu dans lequel il
évolue, construit son nid avec les matériaux disponibles et c'est
pour cela que l'on constate cette extraordinaire diversité de forme de
nidification à travers le monde pouvant atteindre, parfois, des
techniques de constructions des plus élaborées.
Pourtant tous les nids ont pour élément central, et
quelques fois unique, une cuvette naturelle ou construite, plus ou moins
profonde pour recevoir les oeufs. Mais à partir de ce point, la nature
manifeste une fois de plus son étonnante diversité. Allant de
simples dépressions dans le sol aux constructions tissées les
plus sophistiquées de certains passereaux, elle complète notre
émerveillement par des cavités de tout ordre, des habitations
communautaires, des berceaux suspendus ...
Au début de la différenciation, les oiseaux
déposaient encore leurs oeufs à la manière de leurs
ancêtres reptiliens, se contentant de les enfouir dans le sol ou dans des
matériaux en voie de décomposition afin de les isoler du milieu
agressif.
Ensuite, l'évolution fait que les oiseaux aient
commencé à s'occuper de leurs jeunes, à les couver et
à les élever.
De toutes les espèces, il faut toutefois distinguer deux
sortes d'oiseaux : les nidifuges ( lorsque les oisillons naissent à un
état de développement avancé et quittent le nid dès
l'éclosion ou presque) et les nidicoles (lorsque les oisillons naissent
à l'état de véritables embryons et demeurent au nid un
temps plus long).
Les oiseaux nidifuges aménagent un nid sommaire, il s'agit
d'un simple creux au sol ou d'un amas peu soigné de substances
végétales. Parfois, il n'y a pas de nid du tout.
« Ne sont-ils pas des artisans de petites merveilles ?
»
Les oiseaux nidicoles aménagent une construction
beaucoup plus perfectionnée car ils sont obligés d'avoir un nid
plus élaboré constituant une protection efficace et durable
contre les refroidissements et les prédateurs.
La pression de cette double exigence explique
l'évolution de la nidification chez ce type d'oiseaux. Il s'agit
généralement d'une boule sphérique ouverte ou
fermée comprenant une ossature d'épaisseur variable et un
rembourrage interne constitué de matériaux fins. Afin de
calorifuger le nid, certains utilisent des végétaux en
fermentation pour obtenir une température plus propice à la
couvaison et à la nichée.
Les passereaux bâtissent la plus grande
variété de nids que l'on puisse imaginer. Les plus
évolués font des nids souvent remarquables par leur
complexité, par exemple : les tisserins. S'il y a des espèces qui
nichent isolément, à l'inverse, certaines nichent en colonies
plus ou moins nombreuses (ex : les hirondelles, les corbeaux freux) ou dans des
nids collectifs.
( ex., républicain ou pinson d'Afrique, les perruches de
Bruxelles,...).
Cette forme de nidification permet d'organiser une défense
collective des jeunes face aux prédateurs et d'économiser le
travail d'édification.
Exemples : * Colonie de Mouettes Tridactyles sur le flanc d'une
falaise, à gauche. * Namibie, nid collectif de Républicains
d'Afrique, à droite.
Il existe donc une grande variété de nids, qu'il
est possible de regrouper en différents types selon l'objet de
l'étude ou le centre d'intérèt de celui qui s'y penche.
En tant que futur architecte je me suis surtout basée sur
les techniques de construction plus ou moins élaborées mises en
oeuvre par les oiseaux et les matériaux utilisés.
Je les ai donc classer en 5 catégories différentes
( l'habitat rudimentaire, aquatique, en hauteur, troglodytique et
maçonné) afin de comparer leur savoir-faire à celui des
hommes.
Le chapître consacré aux insolites est
composé de tous les nids les plus incroyables.
« Que la maison soit un abris, un refuge, un temple, sa
conception exprime l'idée que s'en fait le groupe, selon sa culture et
l'importance qu'il accorde au confort matériel. »
« Où que l'on se trouve dans le monde, la
manière d'habiter sera différente : les Occidentaux recherchent,
dans leur maison idéale, une protection renforcée contre leurs
semblables tout autant qu'un refuge stable face aux aléas de la vie, les
Japonais désirent plutôt un abris fragile, temporaire et proche de
la nature pour leur permettre de mesurer l'im permanence de la vie. Mais le
fait de construire une maison n'est pas universel, par exemple, en Inde, des
tribus vivent sans toit, elles ne bâtissent que des sortes de pare- vent,
alors qu'elles dressent des huttes sophistiquées pour les autels des
dieux et des ancêtres. »
« Habitat du monde » de C. et M. Laffon.*
Pour l'habitat humain, j'ai distingé deux grandes
catégories selon une architecture vernaculaire ou plus
industrialisée.
- d'un côté nous trouvons les habitations
traditionnelles, vernaculaires, intégrées à la nature et
qui se rapprochent le plus des nids des oiseaux, (ce que l'on ne manquera pas
de remarquer lors de l'analyse des différents habitats). Ces peuples
perpétuent la tradition de leurs ancêtres et vivent
majoritairement en communauté. Dans ce style d'habitation, la
morphologie de la maison différère évidement en fonction
du mode de vie et du milieu dans lequel le peuple évolue.
- de l'autre côté, nous trouvons les peuples
industrialisés, dit « civilisés » qui eux construisent
des habitations modernes, standardisées qui ne s'intègrent pas
toujours dans l'environnement. Pour l'édification de leurs maisons, ils
épuisent les ressources naturelles et polluent la planète. Ces
sociétés forment des homme souvent individualistes « chacun
chez soi et pour soi» et omnubilés par l'argent, le profit.
Exemples : * Mali, pays Dogon, Ireli Der, habitats
implantés sur la falaise en harmonie avec le paysage.
* Amérique, un quartier résidentiel composé
de maisons impersonnelles et toutes séparées par une haie ou un
grillage, « chacun chez soi ».
3.2.1. L habitat rudimentaire A. L'oiseau
A l'origine, les oiseaux pondaient leurs oeufs directement sur le
sol, sans aménagement des lieux. Quelques espèces en sont
restées pratiquement à ce stade ou y sont revenus et nichent
entièrement à découvert. Certains amassent simplement
quelques pierres et débris végétaux, tout en creusant
légèrement le sol en forme de coupe. Ayant sans doute jugé
bon d'y apporter un peu plus de confort, quelques-unes se sont établies
dans la végétation basse ou clairsemée.
Les oiseaux déposent donc leurs oeufs sur le sol nu, ce
que l'on peut considérer comme la condition la plus rudimentaire sans
pour cela comporter des risques et les considérer comme une
espèce primitive car ils ont évolué et couvent à
présent leurs oeufs.
Toutefois certains, comme le Mégapode, sont restés
à l'état primitive, que l'on découvrira en détail
plus loin.
Exemples :
*Le Petit gravelot : Charadrius dubius
Nidifuge
Europe
*Le pipit des arbres : Anthus trivialis
Nidicole
Europe
B. L'homme :
L'abri préhistorique de Gideion
« Il semble que les premiers habitats reconnaissables
étaient des dépressions dans le sol, en forme d'auge ou de
soucoupe. La forme primitive de la hutte était un cercle, forme qui est
à la base de tant de symboles préhistoriques. Ainsi les huttes
circulaires ou ovales apparaissent comme le type d'habitat primitif dans le
monde entier. Selon Gideion, la maison au plan rectangulaire, tel que figure le
plus souvent l'architecture mineure, est le résultat final de tentatives
les plus variées. »
Article du site aroots de Alain Douangmanivanh*
Exemples :
* France,Saint Christophe de la Grotte : abri
préhistorique.
L'habitat primitif pour l'homme en comparaison de celui de
l'oiseau pourrait s'apparenter aux huttes de feuilles ou à une simple
loge creusée dans la montagne. Ce que l'on pouvait trouver durant la
Préhistoire. certains peuples actuels perpétuent ces techniques
architecturales à ce type d'habitation.
*Les Buchimans : Botswana, désert du Kalahari.
* Inde, Rajasthan, désert du Thar.
Celui de cette peuplade indienne qui se contente de pare-vents
pour se loger mais construit de véritables édifices pour
célébrer ses dieux.
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