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Production cotonnière et développement rural au Burkina Faso: controverses et réalité. Cas du département de Diabo dans la province du Gourma

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par Paul Marie MOYENGA
Université de Ouagadougou - Memoire de Maà®trise de Sociologie 0000
  

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CONCLUSION

La problématique du développement s'est toujours posée à toutes les sociétés humaines qui ont toujours cherché à maximiser leurs capacités de satisfaction de leurs besoins. Mais depuis le rapport de Berg de 1981, la conception du développement a changé d'orientation en intégrant une dimension déterminante : celle de la durabilité des facteurs de développement. Dès lors, l'enjeu devient : comment assurer son développement sans compromettre la capacité des générations futures à assurer le leur ? C'est le principe du développement durable. Cette conception a pris toute son importance au tournant de cette dernière décennie où la lutte contre la pauvreté est au coeur des discours et programmes politiques. Pour de nombreux pays africains confrontés à une capacité d'actions très limitée, l'éradication de la pauvreté demeure un gigantesque défi. Pour le cas du Burkina Faso, au regard du caractère fortement rural de sa population, la promotion du secteur agricole s'est présentée comme un champ d'action capable d'insuffler une dynamique de développement. C'est alors que la promotion de la culture du coton s'est présentée comme une porte de sortie. A partir de 2005, le pays est devenu le premier producteur d'or blanc en Afrique. Nous avons donc jugé opportun de s'interroger sur l'influence effective du coton sur la condition paysanne.

En abordant la présente étude, notre ambition était de comprendre et d'expliquer les influences de la cotonculture sur la vie et le développement du milieu rural burkinabè en prenant appui sur le département de Diabo. Dans ce sens, nous avons émis l'hypothèse selon laquelle la production cotonnière accroît la vulnérabilité du monde paysan diabolais. Cette hypothèse se trouve confirmée à l'issue de nos travaux.

En effet, le constat qui se dégage est que la production cotonnière est organisée sur un modèle monocultural. Elle commande une action répétée du ménage et à des intervalles constants, une minutie et un soin qui limitent la possibilité des paysans à diversifier leur production vivrière. Les crédits inhérents à cette production qui constitue la seule source et la seule garantie de paiement

n'autorisent pas des prises de risques de la part des producteurs qui voient systématiquement leurs biens domestiques bradés au plus offrant pour compenser une production déficitaire. De cette façon, la concurrence dans le calendrier cultural ne peut que jouer au détriment des autres cultures tant au niveau des semis, de l'entretien que de la récolte. La diversité agricole se trouve donc compromise, ce qui limite la possibilité de variation alimentaire du paysan avec comme résultante une ration alimentaire déséquilibrée, quand la production arrive à couvrir les besoins. La disponibilité alimentaire ne protège donc pas les paysans contre l'insécurité alimentaire dont les indices sont les situations d'anémies qui sévissent dans les grandes provinces productrices du pays.

Aussi, les nouvelles logiques de production que l'avènement du coton a instituées sur l'espace social diabolais ne permettent-elles pas de dégager un surplus substantiel à la fin d'un cycle agricole. Du coup, le ménage se retrouve dans une incapacité de réaction face à l'avènement d'un phénomène inattendu, à des crises sans grands dommages dévastateurs, conformément aux traits que le PNUD (1998) donne au ménage vulnérable. Cette insécurité des ménages est accrue par l'entame de plus en plus croissante faite à l'élevage dont la fonction stratégique n'est plus discutable. Etant de type extensif, il est aujourd'hui confronté à la réduction des surfaces pastorales par la conquête des espaces libres et mêmes des pistes à bétail. Ce qui, en plus d'entraver l'épargne sécurité des paysans, est source de nombreux conflits dont les dimensions prennent des allures préoccupantes. Dans le département, le massacre entre producteurs et éleveurs qui a fait plusieurs dizaines de victimes à Baléré en 2005 a marqué les esprits et est assez illustratif de l'ampleur de la conquete des brousses diabolaises et de l'envergure de leurs effets. Des conflits du même genre mais de moindre portée abondent dans le département, mais trouvent pour la plupart des cas un dénouement à la Préfecture qui est l'organe de régulation. D'autres zones productrices de coton ont aussi enregistré ces genres d'incidents en 2007 (Sidéradougou, Boromo...). Mais au regard de l'orientation que l'on donne à la cotonculture, le coton semble avoir encore de beaux jours devant lui dans le département en dépit du fait qu'il constitue une source de rémunération jugée modeste par ceux qui en profitent et source de ruine pour les autres. Chez ceux qui réalisent de bilans positifs, il y a en général plus étalage de faste que d'investissements productifs. Dans tous les cas, le constat qui se dégage c'est que

l'argent généré par le coton en milieu rural diabolais n'induit aucunement le développement de la zone. Au contraire, il est à l'origine d'une décomposition sociale et de nombreux conflits sociaux qui fragilisent les conditions de vie déjà précaires des ménages.

En sus de cela, les conditions de production du coton ne font pas de ce dernier un facteur de développement soutenable. Les pesticides, nécessaires à sa production, fragilisent l'environnement rural et accroissent sa vulnérabilité. La dégradation des sols dont les producteurs du département font eux-mêmes l'expérience au fil des années et les nombreux exemples qui nous sont offerts ailleurs sur le territoire national (Région de Dori, du Bam, de Bobo...) et international (interdiction du DDT en Europe) doublée de la menace qui pèse sur l'équilibre écologique de l'écosystème rural et sur l'homme lui-même (de nombreux cas d'intoxication chaque année) suffisent à témoigner du caractère non durable de toute forme de développement centrée sur le coton. En s'attaquant à la première ressource vitale du monde rural (toute la vie socio-économique en milieu rural repose sur la terre !), c'est la survie même des générations futures du monde rural qui est en voie de compromission. C'est ce qu'a perçu ce producteur quand il s'inquiétait en ces termes : « maintenant, nous ne savons pas si le durcissement de nos sols aura pour conséquence le refus du coton et la réussite du mil, en tout cas c'est ce que nous souhaitons pour notre progéniture. Mais ce qui est vraisemblable, c'est qu'en se durcissant, et refusant du coton, ces sols à moyen ou long terme, vont refuser le mil compromettant ainsi la survie de nos descendants». En durcissant ses sols et en s'attaquant à son environnement immédiat, le coton accroît sa vulnérabilité. Somme toute, la culture du coton sur le département de Diabo se présente comme un obstacle au développement durable de cette société.

Dans ce nouveau contexte de subvention de la production cotonnière avec son lot de conséquences, la FAO présente le coton transgénique BT comme le salut des pays en voie de développement malgré les rapports d'études antinomiques de plusieurs organismes de recherche21 autonomes ou financés par la FAO elle-même

21 Le rapport de la Coalition d'Andhra Pradesh, intitulé « Le coton BT a-t-il encore échoué en Andhra Pradesh en 2003-2004 ? » a étudié les cas de164 petits agriculteurs de trois districts d'Andhra Pradesh pendant la saison 2003-2004et a montré que l'avoir des agriculteurs du coton BT a baissé de 9%.

(/ www.abcburkina.net/content/view/110/45/). Le 26 Septembre 2006, Salif DIALLO, Ministre burkinabè de l'agriculture, de l'hydraulique et des ressources halieutiques, présentait à son tour le coton BT comme une aubaine pour le Burkina Faso et annonce le début de sa production pour la campagne 2007/2008. Dans le même temps, la COPAGEN/Burkina dans sa déclaration du 3 novembre 2006 invitait les organisations de producteurs, les ONG en activités, les organisations de consommateurs à la vigilance permanente pour empêcher la prise en otage de l'agriculture africaine et burkinabè en particulier et partant, la réduction des paysans à la pauvreté et à la misère.

Au regard de l'engouement que le Burkina Faso, devançant l'ensemble des pays ouest-africains, manifeste pour cet OGM et considérant les conclusions des études y relatives ci-dessus référées, on ne peut que se demander quels lendemains réserve-t-on à la condition paysanne burkinabè et à notre patrimoine écologique ?

Selon l'étude menée par l'ONG South African NGO Biowatch, le problème de l'endettement est tellement grave que Vunisa Cotton et la Landbalk (la compagnie finançant le coton BT) se sont retirés du projet sur le coton BT parce que les agriculteurs ne pouvaient pas rembourser leurs dettes.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote