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Exploration d'un passé et d'une culture à  travers l'étude de ça tire sous le sahel de Frédéric Titinga Pacere (étude déconstructive)

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par K. Landry Guy Gabriel YAMEOGO
Université de Ouagadougou - DEA 2008
  

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DEUXIEME PARTIE

EXPLORATION D'UN PASSE ET D'UNE CULTURE

CHAPITRE I

SOCIETES TRADITIONNELLES DENATUREES

Les sociétés traditionnelles africaines se sont toujours distinguées des sociétés d'ailleurs par leur mode de vie singulier et spécifique. Même à l'intérieur des sociétés africaines, la vie des hommes varie d'une société à une autre. Les civilisations diffèrent également les unes des autres. Les loisirs - qui viennent rompre la monotonie des jours - varient à l'infini et se diversifient selon l'âge et le sexe.

Le statut des hommes varie à l'intérieur d'une même société. On y trouve des rois et des chefs coutumiers, des conseillers du roi, des pages, des nobles, des guerriers, des cultivateurs, des éleveurs, des captifs de guerre ou esclaves, des griots, des sorciers, féticheurs ou guérisseurs qui servent d'intermédiaires entre le monde visible et le monde des esprits.

De nos jours avec la métamorphose de nos sociétés traditionnelles, toutes les différences tendent à s'estomper ou à être reléguées au second plan à cause de la réorganisation des grands empires. Les indépendances ont accéléré « l'occidentalisation » de nos sociétés fortement ébranlées dans leurs principes par la colonisation.

La nouvelle organisation des sociétés s'observe dans des domaines bien déterminés : politique, culturel, professionnel et religieux. On essaie de tout substituer en Afrique.

En effet, le pouvoir politique qui était entre les mains des chefs traditionnels sera confisqué par de nombreux maîtres issus du système colonial. Les Nanamse vont perdre leurs attributs et leur pouvoir de diriger les affaires intérieures et extérieures des sociétés :

« On rencontrera

Les rois Rivières

Rivières taries

Sur lesquelles

Poussent les arbustes du Sahel

Plus blancs que le crâne d'un blanc à l'agonie

Tous les Foudres,

Soleils,

Eperviers portant l'enclume

Plus blancs que le crâne d'un blanc à l'agonie

Tous,

Tous,

Tous,

Tous seront là.

EAUX A TERRES,

Bec en l'air,

PAGES DERRIERE ! »

Les chefs coutumiers ont été non seulement déchus mais aussi corrompus. Au lieu d'enseigner la morale, d'inviter à la vertu, de forcer à la justice, de donner de bons exemples, de réprimer les abus et les vices, ces souverains se laisseront détourner de leurs devoirs par les nouveaux maîtres du système colonial.

« Le petit Pierrot (7)

Plus gros que son cheval »

En outre sur le plan culturel, un bouleversement scandaleux du mode

de vie entraîne la naissance de nouveaux loisirs :

« Le marché

Est le Carrefour

De tous les amis,

Leurs ministres,

Leurs ministricules,

De tous ceux qui peuvent si bien

Compter les cauris,

Danser au Lou PARADOU ».

Le Lou PARADOU est une boîte de nuit. Et qui parle de boîte de nuit parle de lieu où la modernisation a fait son entrée avec pour inconvénient la dépravation des moeurs.

Les femmes qui ne pouvaient se faire valoir rien qu'au foyer voient leur statut changé.

Elles peuvent désormais fréquenter les mêmes lieux que les hommes et montrer leurs charmes, leurs artifices :

(7) Naba Kougri, intronisé en 1957 et décédé en 1982 soit vingt cinq ans de règne.

« Il y aura les grâces,

Les trois Grâces de l'Empire,

Qui sont les plus belles de la terre,

Elles ont les fesses d'un tueur de serpent,

Elles brillent et exhibent,

Poitrine au vent,

Leurs grandeurs sous les étoiles ! »

Les « Grâces » sont les épouses des représentants des trois premières institutions républicaines (exécutif, législatif, et judiciaire) du pays. Elles se démarquent carrément des femmes dont il est question dans cet extrait de l'ouvrage de Joseph Ki-ZERBO intitulé Histoire de l'Afrique noire :

« Les femmes, a-t-on dit, constituaient une catégorie

particulièrement opprimée. Certes, la femme africaine était

parfois une travailleuse et une source de travailleurs

supplémentaires dans le champ d'un polygame. Elle constituait parfois un bien d'échange, servant par la dévolution en mariage, à consolider les relations sociales.

Mais la femme noire, malgré les mutilations corporelles qu'on lui infligeait parfois, avait aussi des prérogatives qui sont aux antipodes de l'oppression et qui lui donnaient un statut

enviable par rapport aux femmes de certains pays à la même

époque (...).

A vrai dire, malgré les désavantages qu'elle subissait

parfois, malgré la Diminutio Capitis qui en faisait parfois

une sorte de mineure perpétuelle, la femme africaine était

une source toujours vive et intarissable d'espoir. Rien

de plus gai qu'un groupe de femmes rassemblées pour

porter le bois ou la récolte, pour piler, vanner le mil et

cuisiner. Productrice de biens, productrice d'enfants,

prêtresse, amante versant passionnément l'ivresse

du vin du noir, la femme africaine a toujours été

berceuse des peuples dans leurs labeurs quotidiens,

leurs tribulations, leurs rêves et leurs angoisses, leurs

voluptés et leurs joies » (8)

Aucune similitude ne semble exister entre l'image de ces trois Grâces qui sont purement les produits de la modernité et celle des femmes que nos sociétés traditionnelles ont connu et connaissent - cela pour combien de temps encore - sous certains cieux. Au nom de l'égalité entre les deux sexes, les tâches et les rôles ne sont plus spécifiques à l'homme ou à la femme. La femme ne sera plus l'élément conservateur de la tradition mais une progressiste. Elle s'implique corps et âme à la réorganisation des sociétés africaines. Une prise de conscience de certaines violences se traduira par l'émergence d'une nouvelle race de femmes. La transmission des valeurs sociales et morales au sein de la cellule de base n'est plus assurée dans l'unicité du couple mère - enfant.

(8) Joseph KI - ZERBO, Histoire de l'Afrique noire, Editions Hatier, Paris, 1978, P176

De plus si dans les sociétés traditionnelles africaines l'on concevait difficilement qu'une femme ne s'investisse pas dans tous les domaines où s'exerçait l'activité domestique, il est, de nos jours, de plus en plus fréquent qu'elle n'exécute plus des travaux ménagers à cause des activités professionnelles. Loin de nous l'idée selon laquelle la femme dans la société traditionnelle jouait un rôle de second plan. Le nouveau statut de la femme trouble plus d'un et révèle parfois une profonde misère morale des femmes dites modernes. Le bouleversement des structures sociales entraîne une

dégradation des conditions de vie.

Par ailleurs, une administration coloniale nouvellement instaurée fait voir le jour à des professions existantes sous une autre forme dans nos sociétés traditionnelles. KI - ZERBO l'atteste en ces termes :

« Le royaume mossi de Ouagadougou était

une monarchie centralisée, à laquelle il n'a

manqué q'une bureaucratie de scribes,

et la rapidité des communications pour

être comparable aux royaumes européens

de son temps » (9)

De ces professions qui émanent de l'administration coloniale, nous pouvons citer entre autres les fonctions de ministre, d'ambassadeur et de journaliste.

En effet, de par le passé, les provinces du royaume mossi étaient confiés à des ministres comme : le Widi - Naba (chef des chevaux) sorte de premier

(9) Joseph KI - ZERBO, Histoire de l'Afrique noire, Editions Hatier, Paris, 1978, P256

ministre, conseiller et porte - parole politique dont l'une des attributions spécifiques est la succession des rois, le Gounga Naba (Ministre à compétence militaire), le Larlé - Naba qui en plus de ses attributions militaires (général en chef) est considéré comme expert ès - coutumes, le Baloum - Naba, majordome et surintendant du palais chargé aussi des rites religieux comme l'entretien du feu royal et transport des vases sacrées (tibo), le Kamsaogho - Naba, eunuque chargé du harem et de l'exécution des hautes oeuvres puis le Samandé Naba (chef de la cour extérieure).

Quant aux fonctions d'ambassadeur, de magistrat et d'avocat, elles étaient exercées par le roi lui-même, juge absolu, les chefs de villages et de cantons. Ils étaient tous soumis aux mêmes lois que le commun des mortels du royaume. Leur intégrité et leur impartialité vis-à-vis du peuple étaient un devoir moral auquel il ne fallait pas faillir. De nos jours, les extraits suivants montrent la disparition de certaines précieuses valeurs telles que l'honnêteté et la justice.

« Le marché

est le carrefour

De tous ceux

Qui vomissent à l'extérieur

Ce qu'ils n'ont pas mangé à l'intérieur

Qui montre à longueur des temps

Des fleurs

Sur des champs de fumier

Et des carcasses de chantiers,

Qui tiennent haut le crachoir

Et qui finiront

Tous les bavoirs de la république

Qui sont corbeaux

Et séparent si bien ce que Dieu a uni ! ».

Ces extraits révèlent les pratiques avilisantes des ambassadeurs « ceux qui vomissent à l'extérieur ce qu'ils n'ont pas mangé à l'intérieur » et des avocats « qui tiennent haut le crachoir et qui finiront tous les bavoirs de la république » et des magistrats « qui sont corbeaux et séparent... » En refusant de dire la vérité, de défendre des causes nobles et de rendre la justice, diplomates, avocats et magistrats agissent de manière sordide et ne se présentent pas comme des modèles sur les plans éthique et professionnel. Les uns embellissent ce qui est laid et les autres ne méritent aucune confiance des justiciables. Aucune crédibilité ne peut leur être accordée et leur dignité est échangée contre des richesses matérielles et éphémères. Sont devenues désuètes les valeurs morales enseignées par la sagesse africaine, la morale des contes et des fables.

La fonction du journaliste est évoquée à travers les vers ci-dessous :

« Le carrefour

De tous les ubiquitaires

Qui

A mille lieux à la ronde

Se font voir,

Sans jamais être vus »

La fonction de griot, qui a été remplacée partiellement par celle du journaliste, connut une fin tragique :

« Tous les archers mythes séculaires,

Plus asséchés que leurs arcs »

Pourtant combien était noble ce métier :

« Ils étaient chargés de rattacher les vivants

D'aujourd'hui aux vivants d'hier, par une

Récitation rituelle et sans faille »

A l'instar des domaines politique, culturel et professionnel, le domaine religieux n'a pas été à l'abri du changement dans les pratiques rituelles. C'est ainsi que l'animisme dans les sociétés traditionnelles fit place aux religions révélées que sont l'islam et le christianisme :

« Il y aura aussi,

Tous ceux

Tous ceux,

Tous ceux qui fredonnent des

CREDO tous les matins

Sous les coupoles »

Ces religions révélées vont empêcher l'existence de l'harmonie intérieure et extérieure de l'homme noir et portera ainsi atteinte à la noblesse d'antan de son âme. Joseph KI - ZERBO nous éclaire sur le rôle déterminant que jouait la religion dans la vie des Africains :

«...écrasé par les forces naturelles ambiantes, l'homme

noir a élaboré une vision du monde conçu comme un

gigantesque match de forces à conjurer ou exploiter.

Dans cet océan de flux dynamiques en conflit, il s'est

fait poisson pour nager. Plutôt que de dompter,

il a préféré participer. Il a gagné à cette attitude

une prodigieuse richesse émotionnelle et existentielle,

spirituelle aussi. (...) L'homme pouvait régner sur le

monde par le rite et par le verbe... (10)

Religion, philosophie, mentalité et organisation sociale qui régissaient les sociétés traditionnelles africaines seront en déclin. De profondes réformes structurelles et institutionnelles sont à l'origine de la déperdition des sociétés africaines qui ne cessent d'être des immenses chantiers de transformation. Elles engendrent des conflits entre les ethnies qui se sont cristallisées et créent le mimétisme culturel. Il est donc légitime de s'opposer à ces réformes qui aliènent, qui détruisent l'identité plurielle des peuples africains. La diversité culturelle doit être un tremplin de développement. Mais une uniformisation des cultures serait un obstacle aux différentes expressions culturelles.

Pour se développer, les sociétés africaines doivent extraire en elles mêmes le maximum de génie. Le développement doit être endogène et si jusque là elles en ont été incapables, des facteurs le justifient.

(10) Joseph KI-ZERBO, Histoire de l'Afrique noire, Edition Hatier, Paris, 1978, P. 17

I -1 FACTEURS

Les facteurs de la métamorphose des sociétés traditionnelles africaines sont multiples et variées . Ils sont tous inhérents aux dérives d'une vie dépourvue de sagesse africaine, de repères socio - culturels.

La perversion, la fausseté, l'injustice, la corruption, le cartésianisme, l'avènement des nouvelles religions, la substitution des structures traditionnelles par celles modernes, font perdre aux sociétés traditionnelles leur identité culturelle.

Dans le marché qui représente un véritable  « Carrefour », les différentes facettes de la société dénaturée se donnent à voir. Le marché qui autrefois offrait un cadre de rencontres chaleureuses entre parents et amis devient un lieu où les travers de la société sont visibles et rivalisent pour assiéger les mentalités. Le mensonge est dénoncé à travers les ambassadeurs qui vont à l'étranger dire rien que du bien du pays alors que rien ne va. Chargés de représenter leurs pays à l'étranger, les ambassadeurs dépeignent une situation agréable des sociétés africaines qui sont pourtant en proie à l'injustice sociale et à la transgression des droits humains les plus élémentaires :

« Le marché

est le carrefour

De tous ceux

Qui vomissent à l'extérieur

Ce qu'ils n'ont pas mangé à l'intérieur

Qui montre à longueur des temps

Des fleurs

Sur des champs de fumier »

«  Les champs de fumier » représentent toutes les exactions que multiplient chaque jour certains pouvoirs politiques. Toutes les actions qui rebutent et qui sont viles sont désignées par le terme « fumier ».

L'injustice commise par les hommes censés être les garants de la justice est évoquée :

« Qui tiennent haut le crachoir

Et qui finiront

Tous les bâvoirs de la République

Qui sont corbeaux

Et séparent si bien ce que Dieu a uni ! »

Les détenteurs d'une parcelle de pouvoir sont indexés à cause de l'abus de leur autorité. Ils se prennent pour des Tout - puissants et ne font que ce qu'ils veulent :

« Le marché

Est le carrefour

De tous ceux

Qui représentent

Que,

Seul,

Un Seigneur sectaire,

Dans sa magnanimité,

Ouvrira

Les portes d'un paradis »

L'identité et les pratiques ignobles des dirigeants et des partis politiques se découvrent :

« On y verra

Tous les éléphants

Qui se feront digérer

Par des larrons,

Tous les lions

Et toutes les hypothétiques problématiques

Coincées avant la Genèse,

Tous ceux

Qui partagent leur mil

Avant de le croquer,

Tous ceux

Qui croquent leur mil

Sans le partager,

Tous ceux

Qui partagent le mil des autres,

Avant de tout croquer

Et tous ceux qui ne savent pas

Où ils se sont mouchés la veille »

« Mais il y aura

Tous ceux qui honorent la honte

Qui n'ont pas peur

En pissant froid. »

Les assassinats politiques (« coincés avant la Genèse », renvoie à la mort accidentelle, à Sakoinsé, de Nazi BONI), la gabegie, l'égoïsme, les intérêts personnels et les promesses non tenues sont autant de bavures commises par les dirigeants politiques et ceux qui aspirent à la conquête du pouvoir.

Par ailleurs, les sociétés traditionnelles africaines ont plus d'inclination aux superstitions. Tout acte, tout événement, tout rêve, toute maladie, tout incident, etc., n'est fortuit. Tout s'interprète et s'explique grâce aux sciences occultes (divination, magie, spiritisme, etc.).

Convaincues de l'influence de forces invisibles qui habitent la nature, forces avec lesquelles des rapports harmonieux doivent exister, les pratiques et les croyances ont toujours eu une signification surnaturelle.

Le mysticisme occupe une place importante dans le vécu quotidien des Africains qui ont une grande dévotion pour les divinités dont il faut craindre les représailles.

Cependant toutes les institutions religieuses nouvellement implantées en Afrique et la prise en compte des méthodes rationnelles dans les réflexions ont fortement ébranlé les convictions des peuples et ont été à l'origine de leur aberration.

« Il y aura aussi

Tous ceux,

Tous ceux,

Tous ceux qui fredonnent des CREDO

Tous les matins sous les coupoles

Et qui

Le soir venu,

Disparaissent dans les gouffres

Insondables de KIENPALGO »

« Il y aura aussi

Tous ceux qui pensent

Dur comme fer,

Que l'égalité

Est une chimère,

Que la terre

Est moins prospère,

Que la vie

Se détériore,

Que Satan

Est le plus fort,

Qu'il faut enterrer les Eglises

Et chanter autour du feu ! »

« Il y aura aussi

Tous ceux qui pensent

Dur comme fer,

Que c'est l'homme

Qui danse en rond,

Que c'est Dieu

Qui est Satan,

Que Satan

Notre Dieu,

Qu'il faut construire les temples

Et y adorer le feu ! »

L'homme noir va élaborer une autre vision du monde. Les richesses émotionnelles, existentielles et spirituelles vont être sérieusement compromises, voire détruites. Les liens sociaux, spirituels et humains sont dénaturés. Le développement sera envisagé désormais à partir de la culture étrangère. Tout un héritage culturel, au lieu d'être entretenu,est banalisé, voire abandonné. Cette déculturation engendre des conséquences désastreuses qui ne seront pas occultées.

Par ailleurs, nos sociétés africaines avaient des institutions propres à elles qui sont pour la plupart sapées. Notons que les institutions en Afrique varient à l'infini selon les sociétés. Nous n'avons pas la prétention de les énumérer toutes. Quelques unes qui leur sont propres nous intéresseront.

Les différentes institutions ont soit un caractère politique, soit un caractère social, soit un caractère économique, soit un caractère religieux. Au niveau des institutions politiques, nous pouvons citer la « chefferie » représentée actuellement par le pouvoir exécutif ; le « conseil de sage » constitué d'hommes dont l'autorité morale est sans conteste ; les « cantons » qui sont des subdivisions territoriales dirigées par des chefs désignés par l'empereur ; l'« armée » constituée de guerriers qui protègent les intérêts du royaume et travaillent à son extension.

Les faits sociaux tels que le mariage, les loisirs (danse, chasse, soirée de conte...) constituent des institutions sociales. A travers ces institutions, les hommes se responsabilisent et se donnent des moments de divertissement qui ont aussi une portée pédagogique.

L'existence des castes au sein des sociétés traditionnelles constitue une de leur particularité. La caste est un groupe social composé d'individus partageant un même statut hiérarchique et exerçant généralement une activité professionnelle commune. Ainsi au sein de nos sociétés traditionnelles il existe la caste des griots, la caste des forgerons, la caste des pages, etc.

Par ailleurs, il existait au sein des sociétés africaines traditionnelles l'achat, la vente, l'échange de marchandises, de denrée. Une telle activité est appelée commerce. Elle permet la distribution de ce qui est nécessaire aux besoins des hommes. Le commerce constitue une institution économique qui n'était pas négligeable car elle rapprochait les cultures et les hommes. L'intégration des peuples était effective grâce à cette institution économique.

Aux institutions socio - politiques et économiques s'ajoutent celles qui ont un caractère religieux ou sacré. Les rites coutumiers, les initiations, les funérailles et la sortie des masques sont entre autres des pratiques qui relèvent de la croyance des Africains. Les initiations permettent le passage de l'état d'immaturité à l'état mature par des exercices physiques et moraux très éprouvant. Ils permettent également l'intégration de certaines personnes novices dans des sociétés sécrètes.

S'agissant des funérailles, elles constituent l'ensemble des cérémonies solennelles qui accompagnent le repos éternel d'un mort. Au cours des funérailles d'une personne âgée, la sortie des masques qui incarnent les éléments du monde invisible permet l'accession de l'âme au monde des ancêtres qui intercèdent pour les vivants.

Les rites, de façon générale, confèrent un caractère sacré aux différentes pratiques qui ont lieu dans la société. Il existe les rites nuptiaux, les rites funéraires, les rites de purification, les rites de demande de pardon, les rites de demande d'aide, les rites de fête, etc.

Toutes les institutions traditionnelles de l'Afrique n'ont plus la même envergure qu'avant. Elles sont délaissées au profit d'autres qui sont propres à d'autres peuples jugés civilisés et plus évolués.

Ces derniers sont pris pour des modèles sur tous les plans et tout le mécanisme de mimétisme mis en place vise à faire des Africains des clones parfaits de ces sociétés occidentales. Mais engagés toujours dans la lutte pour le développement, les pays africains rencontrent les mêmes difficultés. Il est temps de se convaincre que le développement économique et la renaissance sociale et culturelle de l'Afrique ne passe certainement pas par l'imitation.

Par ailleurs, les institutions légitiment certaines pratiques qui portent sérieusement atteinte à l'intégrité physique et morale des Africains. Celles - ci reposent sur des fondements difficilement ébranlables et se révèlent pérennes. Ces pratiques traditionnelles qui reposent sur des valeurs socio - culturelles, religieuses, hygiéniques et esthétiques sont entre autre le lévirat, le sororat, le mariage forcé, les mutilations génitales féminines, les scarifications, etc. Toutes ces pratiques bien acceptées dans les sociétés africaines traditionnelles visaient à sauvegarder les liens familiaux et la dot

(lévirat, sororat), à témoigner ses amitiés (mariage forcé ou précoce) à assurer la virginité et la fidélité des filles et des épouses (mutilation génitale féminine), à soigner ou à embellir (les scarifications). Les raisons des pratiques sont nobles mais leurs conséquences sont redoutables.

En définitive des institutions sont propres aux sociétés traditionnelles africaines. Elles permettent une vie paisible et prospère au sein d'elles bien qu'elles autorisent certaines pratiques néfastes à l'homme. Les pratiques traditionnelles, même si elles se sont cristallisées peuvent s'estomper par la clarification des valeurs qui permet une analyse de celles - ci sur les plans moral, social, religieux, économique et sanitaire en vue de les renforcer ou de les affaiblir. La clarification des valeurs peut se faire à travers une étude de cas, un jeu de rôle, une discussion de groupe, une simulation, un jeu, un questionnaire anonyme, etc. Avec un recul de ceux qui détiennent les rennes des institutions traditionnelles et une ouverture de leur part, les pratiques peuvent être plus commodes et plus profitables. Ainsi nos sociétés gagneraient en rayonnement grâce à la correction de certains comportements nuisibles. Le rayonnement que l'on pense obtenir par le mimétisme paraît impossible. Nos sociétés africaines ne peuvent rayonner que grâce à leur culture.

Pour conclure cette partie, nous énumérons, sous forme de tableau récapitulatif, des pratiques traditionnelles sous - tendues par des « valeurs ». Elles paraissent néfastes et rétrogrades.

LISTES DES PRATIQUES TRADITIONNELLES :

Pratiques traditionnelles

Raisons qui soutiennent les pratiques

L'excision

- pureté, hygiène, changement de statut : passage de l'enfance à l'adolescence pour être accepter socialement

- garantir la fidélité, le respect des coutumes et de la religion

Mariages forcés et précoces, maternités précoces

Fondement religieux (rapports sexuels interdits hors mariage), préservation de la virginité de la fille, respect des liens familiaux, de l'amitié, peur de l'inceste et de grossesse hors mariage

Les scarifications

Moyen d'identification du groupe ethnique - esthétique - soins de santé

Le tatouage des gencives, des lèvres, des joues

Esthétique - acte de bravoure

Le percement du lobe de l'oreille, du nez, des lèvres

Esthétique

Limite de la parole

L'extraction des dents de lait

Pendant la dentition, en cas de diarrhée extraction des canines considérées comme mauvaises dents qui peuvent empêcher l'enfant de grandir.

Les tabous nutritionnels

Exemples

a) OEufs

b) Citron

c) Lait caillé

d) Piment et autre épices

Respect des coutumes et traditions pour prévenir certains vices et comportements déviant les enfants et les femmes :

- l'enfant qui mange des oeufs devient voleur - respect de la vie

- l'enfant devient méchant

- peut provoquer des grossesses rapprochées

- pour la femme en grossesse : enfant pleurnichard et nerveux

Le gavage

- Donner force et santé à l'enfant

- Pour la femme : pour rentrer dans les grâces du mari, rang prestigieux, charme, prestige

- Pour le mari signe d'aisance « mari capable », embonpoint

Ceinture de grossesse

Aux environs du 5ème et 6ème mois de la grossesse, ceinture autour de l'abdomen pour fixer le foetus et l'empêcher de remonter ou qu'il ne soit pas trop gros.

Sevrage précoce

En cas de grossesse précoce

Massage ou écrasement des seins après l'accouchement

Faciliter la montée laiteuse, éliminer le colostrum considéré mauvais pour l'enfant.

Abstinence de rapports sexuels pendant la grossesse

Respect des coutumes, risques d'avortement

Abstinence de rapports sexuels pendant la période de l'allaitement

Détériorer le lait maternel, affecter la santé de l'enfant.

Taille des dents

Esthétique, acte de bravoure.

Lévirat et sororat

Sauvegarder la dot et les liens familiaux.

Interdiction du premier lait colostrum à l'enfant

- Respect des coutumes et traditions

- Premier lait considéré mauvais

Interdiction de rendre visite aux parents avant l'accouchement

Risque d'avortement ou de malformation du foetus.

Dot très élevée

Valoriser la femme, recherche d'un enrichissement

Confession obligatoire de la mère en cas de difficulté d'accouchement

Lutter contre l'adultère

Sevrage brusque en cas de suspicion de grossesse

Sauvegarder l'enfant et préserver la grossesse

Lavement évacuateur à base de décoction de plantes

Purge et soins de l'enfant

Exclusion sociale des femmes et des filles

Sorcellerie, non respect des coutumes et traditions, refus de mariage forcé par la fille

Exclusion sociale de certaines catégories d'enfants : jumeaux, albinos

Enfant porte malheur

Ségrégation en matière d'éducation et de traitement entre filles et garçons, sous - scolarisation des filles

Respect de la tradition en matière de code éducationnel, respect du rôle traditionnel de la femme au foyer

Inégale répartition des tâches entre l'homme et la femme

Respect de l'ordre social traditionnel

Déshéritage de la femme par ses beaux parents

Respect de la tradition reléguant la femme au second plan

Problème de caste dans les mariages et autres rapports dans la société

Respect des coutumes et traditions

Exclusion familiale des filles en grossesse

Respect des coutumes et traditions sauvegarder l'honneur de la famille

Le non accès de la femme à la terre

La terre est sacrée, possibilité pour la femme de changer de famille

Déshéritage des jeunes enfants par leur oncle ou grands - parents

Non maturité des enfants, respect des traditions sur la gestion de la communauté familiale

Rejet des femmes n'ayant pas de poils sur le pubis

Femme porte malheur

Rejet de la femme stérile

Impossibilité de perpétuer la famille

Cicatrisations spécifiques des femmes mariées et non mariées

Identification des femmes de part leur statut, préservation des femmes mariées des tentations masculines.

En dépit de ces pratiques, l'Afrique ancestrale était forte de sa sagesse traditionnelle et de sa maîtrise du verbe. Le malaise social émane surtout de cette absence de circonspection et d'inspiration de nos valeurs

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus