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La protection de l'environnement marin au Cameroun: contribution à  l'étude de la mise en oeuvre des conventions internationales

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par Antoine NGAMALIEU NJIADEU
Université de Douala - DEA Droit public 2005
  

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A-LA SANCTION DES ATTEINTES A L'ENVIRONNEMENT MARIN

La pollution marine cause un préjudice à la fois économique et écologique : dommages aux pêcheurs et à toutes les activités touristiques marines et côtières ; dans le même temps, elle cause un dommage à la nature par une grave altération de la qualité des eaux marines, la disparition importante de nombreuses espèces animales et végétales marines. En clair, le préjudice écologique au sens strict du terme est celui qui affecte un milieu naturel indépendamment de tout intérêt humain, corporel et matériel.

A la lecture de la législation camerounaise, la pollution marine est frappée d'interdiction ; raison pour laquelle elle est constitutive d'infraction au regard de la loi. Ainsi, toute personne dont les activités polluent l'environnement marin camerounais est tenue pour responsable. A cet effet, la loi N° 96/12 Du 05 août 1996 distingue deux cas de responsabilité à savoir la responsabilité civile (1) et la responsabilité pénale (2).

1- L'engagement de la responsabilité civile en cas d'atteinte à l'environnement marin

La responsabilité civile en matière d'environnement est l'obligation de répondre devant un juge d'un dommage et de la réparer. Elle est engagée lorsque toute personne porte atteinte à l'environnement. La loi-cadre relative à la gestion de l'environnement au Cameroun dispose à cet effet que « sans préjudice des peines applicables sur le plan de la responsabilité pénale, est responsable civilement , sans qu'il soit besoin de prouver la faute, toute personne qui transportant ou utilisant des hydrocarbures ou des substances chimiques, nocives et dangereuses, ou exploitant un établissement classé, a causé un dommage corporel ou matériel se rattachant directement ou indirectement à l'exercice des activités sus mentionnées269(*) » . Il découle de cette disposition que la responsabilité civile existe même en l'absence de faute tel qu'il est affirmé par l'article 1384 du code civil applicable au Cameroun. L'objet principal dans ce contexte est la réparation du préjudice270(*).

En règle générale, la réparation consiste à établir l'équilibre qui a été rompu par l'auteur du dommage entre son patrimoine et celui de la victime271(*). La principale forme de réparation qui est généralement admise en droit de la responsabilité civile est l'indemnisation des victimes (réparation pécuniaire). Mais la législation Camerounaise semble évasive à ce sujet. La raison en est simple. Le législateur camerounais a certainement omis de mettre en oeuvre à travers la loi cadre certaines dispositions des conventions de Londres de 1969 sur la responsabilité civile pour des dommages dus par la pollution par les hydrocarbures et celle de 1971 portant création d'un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Contrairement à son homologue Sénégalais272(*), il ne prévoit aucune disposition obligeant le capitaine ou l'exploitant de tout navire transportant une cargaison de plus de 2000 tonnes d'hydrocarbures de justifier d'un certificat d'assurance ou d'une garantie financière équivalente avant l'accès dans les eaux maritimes et ports camerounais. Il affirme de façon imprécise que « lorsque les éléments constitutifs d'infraction proviennent d'un établissement industriel, commercial, artisanal ou agricole, le propriétaire, l'exploitant, le directeur ou selon le cas le gérant peut être déclaré responsable du paiement des amendes et frais de justice dus par les auteurs de l'infraction (...)273(*).

De même, en matière de pollution marine, la dépollution ou remise en état des lieux pollués fait également partir des formes possibles de réparation. Encore appelée réparation en nature, elle n'est pas assez fréquente en cas de pollution quoique très importante. Le législateur camerounais ne perd pas de vue cette importance ; c'est pourquoi il affirme que « dans les cas d'avaries ou d'accidents survenus dans les eaux maritimes sous juridiction camerounaise à tout navire, aéronef, engin ou plate-forme transportant à son bord des hydrocarbures ou des substances nocives ou dangereuses et pouvant créer un danger grave et imminent au milieu marin et à ses ressources, le propriétaire dudit navire, aéronef, engin ou plate-forme est mis en demeure par les autorités maritimes compétentes de remettre en l'état le site contaminé en application de la réglementation en vigueur274(*) ». C'est sans doute sur la base de cette disposition législative que la Cotco a été emmenée à procéder à la dépollution du milieu marin et des zones côtières après l'incident du déversement accidentel des hydrocarbures le 15 janvier 2007 à Kome-Kribi. Mais, compte tenu du caractère souvent irréversible de la détérioration de l'environnement marin, il serait difficile de parvenir à la restauration intégrale des systèmes écologiques présents dans le site endommagé. Tel a été le cas en France après l'échouage de l'Amoco Cadiz (16 mars 1978) où le nettoyage des plages n'a pas suffit à réparer intégralement la dégradation du milieu marin.

De manière générale la réparation en nature du dommage écologique est normalement l'option principale d'un droit de la responsabilité civile qui ne vise pas la juste compensation de la victime, mais tout d'abord la prévention du dommage écologique et la restauration des biens environnementaux dégradés275(*). Elle se présente sous trois formes à savoir la remise en état au sens propre du terme, le remplacement ou la substitution de la nature sur un autre lieu et enfin la compensation physique réelle du préjudice à un endroit qui est localement et fonctionnellement lié à l'endroit de l'atteinte. Cette dernière forme a déjà été mise en oeuvre au Cameroun à travers la création du parc national de Campo-Ma'an comme compensation environnementale pour le projet de l'oléoduc Tchad Cameroun276(*).

En somme, la responsabilité civile consiste en la mise en oeuvre des mesures compensatoires. Tel n'est pas le cas pour la responsabilité pénale.

2-L'engagement de la responsabilité pénale en cas d'atteinte à l'environnement marin

La responsabilité pénale est l'obligation de répondre d'une infraction commise très souvent en violation d'une règle juridique préétablie et de subir par conséquent la peine prévue par le texte qui la réprime277(*). Contrairement à la responsabilité civile, la responsabilité pénale a pour objectif principal la répression. Dans notre cas d'espèce, elle est engagée lorsque toute personne par son fait porte atteinte à l'environnement marin par la pollution sous toutes ses formes, la réalisation d'activités aggravant le phénomène d'érosion côtière, ou encore les activités entraînant la destruction d'habitats fragiles vivant dans les zones humides. Le législateur camerounais semble plus se focaliser sur la pollution marine que sur les autres sources de dégradation.

Contrairement à son homologue français278(*), le législateur camerounais à travers la loi-cadre N° 96/12 organise uniquement le régime de la responsabilité pénale pour pollution marine. Il punit d'une amende de dix millions (10 000 000) à cinquante millions (50 000 000) de F CFA et d'une peine d'emprisonnement allant de six (6) mois à un (1) an ou de l'une des deux peines seulement, tout capitaine de navire qui se rend coupable d'un rejet dans les eaux maritimes sous juridiction camerounaise d'hydrocarbures ou d'autres substances liquides nocives pour le milieu marin279(*). Ces peines sont réduites, sans que le minimum de l'amende ne puisse être inférieur à un million (1 000 000) de F CFA lorsque le navire en infraction est un navire autre qu'un navire-citerne et de jauge brute inférieur à quatre cent (400) tonnes. Ces pénalités s'appliquent sans préjudice du droit à l'indemnisation des victimes tel qu'étudié ci-dessus.

Par contre, elles ne s'appliquent pas aux rejets effectués par un navire pour sa propre sécurité ou celle d'autre navire, ou pour sauver des vies humaines, ni au déversement résultant des dommages subis par le navire.

Cette exonération de poursuite pénale n'entraîne nullement celle de la responsabilité civile du capitaine dudit navire en ce sens qu'aucune loi camerounaise n'autorisé la pollution marine dans de telles circonstances.

Toutefois, la responsabilité pénale pour atteinte à l'environnement marin ne peut-être engagée à l'encontre d'un contrevenant que lorsque la preuve de l'infraction qu'il a commise a été rapportée et fait l'objet d'un procès verbal régulier. Ainsi, pour la recherche, la constatation et la poursuite des infractions à l'environnement, des officiers de police judiciaire, le ministère public, ainsi que les agents assermentés de l'administration disposent des pouvoirs leur permettant de vérifier le respect des dispositions interdisant toute pollution marine.

Toutefois, nous constatons que de nos jours aucune sanction pénale n'est encore prononcée par le juge camerounais en matière de répression des atteintes à l'environnement marin ; un tel apport jurisprudentiel serait intéressant pour la protection dudit milieu.

Section 2 : LA MISE EN OEUVRE DES MECANISMES INSTITUTIONNELS ET TECHNIQUES DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT MARIN

La mise en oeuvre au Cameroun des instruments internationaux relatifs à l'environnement marin s'est faite avec celles des institutions et techniques de protection de l'environnement. En effet, le droit international de l'environnement réceptionné par cet Etat lui a permis de reconnaître le rôle imminent que peuvent jouer les institutions pour la protection de l'environnement marin (Paragraphe 1) d'une part ; et d'autre part d'adopter des techniques (Paragraphe 2) sans lesquelles il ne peut y avoir une véritable protection dudit environnement.

Paragraphe 1 : LA PARTICIPATION DES INSTITUTIONS NATIONALES A LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT MARIN

En République du Cameroun, l'environnement constitue un patrimoine commun de la nation. A ce titre, sa protection est un devoir pour tous280(*). Mais, c'est à l'Etat qu'il incombe la défense et la promotion de l'environnement. Alors, dans l'exercice de cette prérogative de puissance publique en matière environnementale, l'Etat a attribué des missions à certaines institutions publiques (A). De même, à travers des législations spécifiques et des procédures d'autorisation administrative, il accorde le rôle de protecteur de l'environnement marin à quelques institutions privées (B)

A- LA DEVOLUTION DES MISSIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT MARIN A CERTAINES INSTITUTIONS PUBLIQUES

Au Cameroun, la mise en oeuvre du droit de l'environnement incombe au gouvernement. A cet effet, il élabore des stratégies, des plans ou programmes nationaux tendant à assurer la conservation et l'utilisation durable des ressources marines et côtières. Il l'applique de concert avec les collectivités décentralisées (2).

Les mécanismes institutionnels de la gestion de l'environnement marin mettent en exergue de nombreuses institutions très impliquées dans les différents secteurs d'activités intéressant la côte camerounaise. Mais faute de pouvoir les étudier toutes, une attention particulière sera accordée à l'administration centrale en charge de l'environnement et de la protection de la nature (1).

1- L'administration centrale en charge de l'environnement et de la protection de la nature

Sur la base de la récente organisation du gouvernement camerounais issue du décret N° 2005/117, c'est le Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature (MINEP) qui assure le rôle de l'administration centrale en matière environnementale. Il a été créé suite à l'éclatement en deux de l'ancien Ministère de l'Environnement et des Forêts.

Le MINEP est chargé de formuler et de mettre en oeuvre la politique nationale environnementale, de déterminer des stratégies de gestion durable des ressources naturelles et de contrôle des pollutions. Il s'assure, en outre, que les engagements internationaux du Cameroun en matière d'environnement sont introduits dans la législation, la réglementation et la politique nationale en la matière281(*).

De même, il assure la tutelle de la Commission Nationale Consultative pour l'environnement et le Développement Durable 282(*) (CNCEDD) ainsi que du Comité Interministériel de l'Environnement (CIE), tous des cadres de concertation où les opérateurs et acteurs environnementaux se retrouvent pour mettre en cohérence leurs approches, notamment en ce qui concerne la gestion durable des ressources naturelles283(*).

En outre, il est chargé des missions de mise en place des normes et de la réglementation de protection de l'environnement ; et d'assurer leur application, l'exécution des inspections environnementales et de la participation aux actions de gestion et de prévention des catastrophes et risques naturels. Il est aussi chargé de l'évaluation et de l'approbation des études d'impact environnemental dans les écosystèmes marins, côtiers, fluviaux et lacustre. A ce titre, il est appelé à suivre particulièrement les activités d'exploration, de production et de transport des hydrocarbures.

Cependant, le décret N° 92/069 du 09 avril 1992 affecte des attributions environnementales supplétives à quelques ministères qui interviennent directement ou indirectement par des agences spécialisées placées sous leurs tutelles. Il s'agit entre autres et restrictivement :

-Du Ministère de l'Elevage, des Pêches et des Industries Animales (MINEPIA) dont le Département des Pêches assure la coordination et le contrôle des pêcheries maritimes. Il assure la tutelle des organismes comme la Caisse de Développement de la Pêche Maritime (CDPM) et de la Mission de Développement de la Pêche Artisanale et Maritime284(*).

-Du Ministère de l'Eau et de l'Energie (MINEE) qui assure la promotion de l'activité minière au Cameroun, avec spécifiquement une mission de contrôle et de suivi des activités d'exploration et d'exploitation pétrolière. A ce titre, il a la charge d'assurer les inspections périodiques des plates-formes et des chantiers où se déroulent des opérations pétrolières.

-Du Ministère de la Recherche Scientifique et de l'Innovation (MINRESI) qui mène des recherches sur la faune sauvage et les ressources halieutiques, y compris celles comprises dans les écosystèmes côtiers et marins du Golfe de Guinée. Il assure la tutelle de l'Institut de Recherche Agricole et le Développement 285(*)(IRAD).marine

-Du Ministère du Transport qui dispose d'une Direction des Affaires Maritimes et des Voies Navigables habilitée à constater et à punir les coupables d'une pollution marine286(*). Ce même Ministère est le représentant de l'Etat auprès de l'Organisation Maritime Internationale qui oeuvre aussi, mais subsidiairement, pour la protection de l'environnement marin.

Telles sont les autres ministères qui assistent l'administration centrale en charge de l'environnement et de la protection de la nature. Cette liste est restrictive dans la mesure où l'on a tenu compte de leur spécialisation avancée pour la protection des milieux marin et côtiers ; et la gestion des ressources biologiques marines. Toutefois, les collectivités décentralisées ne sont pas en reste.

2- L'appui des collectivités territoriales décentralisées

Comme les institutions publiques sus énumérées, les collectivités territoriales décentralisées participent à la protection de l'environnement marin. Cela est possible à partir du moment où elles ont compétence générale pour l'aménagement du territoire communal.

Ainsi, sur le plan de l'administration locale, les magistrats municipaux, dans l'exercice de leur pouvoir de police administrative, peuvent édicter des normes relatives au maintien de l'ordre public dont les composantes essentielles sont la salubrité, la tranquillité et la sécurité publique. De telles compétences leurs sont reconnues dans la mesure où ils sont sensés maîtriser le moins mal et dans les moindres détails les problèmes environnementaux auxquels font face les populations de leurs circonscriptions territoriales.

L'environnement marin et côtier au Cameroun compte environ 23 communes (urbaines et rurales) dont les plus vulnérables sont celles de Douala, Kribi et Limbé dans la mesure où elles sont très exposées aux dangers inhérents, à la pollution marine et à l'insalubrité des côtes maritimes. Mais il est regrettable que de nos jours, aucun arrêté municipal n'a encore été élaboré et adopté dans le but de protéger et d'assainir ne serait-ce que les plages et les bordures de mer dans ces cités balnéaires. Cet état de chose découle-t-elle de l'ignorance ou de l'inertie de l'Exécutif local ? Il est clair qu'il ne s'agit pas de l'ignorance d'une prérogative de la municipalité. Evidemment, le conseil municipal de la commune urbaine de Kribi lors de la session extraordinaire tenue le 20 janvier 2007 s'est réunit pour examiner la situation et présenter à l'opinion nationale et internationale la position de la ville face au déversement du pétrole brut en mer à 12 Km de Kribi. Surpris et étonné de la démarche de la direction générale de la Cotco qui aura attendu cinq jours après l'incident pour informer les populations, M. MBA MBA Grégoire, alors Maire de la commune urbaine de Kribi, a trouvé qu'  « il est inacceptable que notre ville soit en danger et que nous n'en soyons informés de la situation que par les médias287(*) ». Allant dans le même sens, il proteste le fait que la ville de Kribi a été écartée de la formation de l'observatoire pour le contrôle de la pollution par les activités pétrolières. Cette réclamation du maire va dans la droite ligne de l'idée que c'est à lui que revient la tâche d'orienter et superviser les travaux des institutions privées de sa localité en matière de gestion de l'environnement.

B- L'EXERCICE PAR CERTAINES INSTITUTIONS PRIVEES DES MISSIONS RELATIVES A LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT MARIN

La protection de l'environnement marin ne concerne pas uniquement les institutions publiques. D'après les disposition de l'article 6 alinéa 1 de la loi N° 96/12, toutes les institutions privées sont tenues, dans le cadre de leurs compétences, de sensibiliser l'ensemble des populations aux problèmes environnementaux. C'est ce que les organisations non gouvernementales (ONG) à caractère environnemental (1) s'évertuent à faire au quotidien pour contribuer à la gestion écologiquement saine de l'environnement marin et côtier. Toutefois, les entreprises privées opérant sur les milieux marin et côtier (2) sont de plus en plus concernées.

1-Le rôle protecteur des ONG à caractère environnemental

A l'instar des institutions publiques sus évoquées, les ONG à caractère environnemental font partie des institutions nationales de mise en oeuvre du droit international de l'environnement. Elles contribuent aux actions des organismes publics et para-publics en matière d'environnement. Pour y parvenir, elles doivent au préalable remplir la condition fixée par l'article 8 alinéa 1 de la loi-cadre relative à la gestion de l'environnement ; à savoir la soumission à l'agrément administratif.

Les ONG à caractère environnemental jouent un rôle déterminant dans la protection de l'environnement marin au Cameroun. Se situant au bas de l'échelle institutionnelle, elles sont les institutions les plus proches des populations et les plus présentes sur le terrain. Ainsi, elles interviennent dans l'animation, la formation, la sensibilisation et l'organisation des populations autour des projets sociaux, environnementaux ou économiques. De la sorte, elles sont souvent utilisées comme des canaux d'informations et de sensibilisation sur la conduite à tenir par les populations riveraines en cas de déversement des hydrocarbures ou de substances chimiques nocives dans le milieu marin.

Les ONG spécialisées dans la gestion de l'environnement ont vocation à intervenir dans le processus d'élaboration des règles juridiques et des instruments de gestion de l'environnement ; et à contrôler la mise en oeuvre de ces règles et instruments. Elles jouent à ce titre le rôle de représentation des populations civiles dont elles défendent les intérêts. C'est sûrement dans cet ordre d'idée que le législateur leur reconnaît la possibilité de se constituer en partie civile en cas de répression d'une infraction à l'environnement288(*).

Au Cameroun, plusieurs ONG participent à la gestion de l'environnement marin. A titre d'exemple, nous pouvons citer : le Collectif des Organismes de Participation au Développement du Cameroun (COPAD) ; la Fédération des ONG de l'Environnement du Cameroun (FONGEC) ; la Confédération des ONG d'Environnement et de Développement de l'Afrique Centrale 289(*) (CONGAC) et l'Environnement and Resources Protection 290(*)(Envi-rep Cameroun).

Ces différentes ONG (qui sont pour la plupart des institutions de développement), sont techniquement et financièrement assistées par d'autres ONG, mais à compétence internationale comme la World Wide Fund of Nature (WWF), l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (IUCN) et la « Deutsche Gesellschaft Für Technische Zusammenarbeit Gmbh » (GTZ). Ces ONG nationales travaillent parfois en coopération avec les entreprises privées opérant dans la zone côtière et le milieu marin.

2-Le rôle joué par les entreprises privées dans la zone côtière et le milieu marin

Au sens de la loi N° 96/12, les entreprises privées font bel et bien partir des acteurs environnementaux au Cameroun. Il s'agit dans le cadre de cette étude des opérateurs économiques dont les activités sont susceptibles de détériorer la qualité du milieu marin et des zones côtières ; notamment les établissements classés. Ils ont pour devoir de protéger l'environnement dans le périmètre de leurs activités.

Au Cameroun, les entreprises les plus concernées directement par la protection de l'environnement marin sont celles qui opèrent dans l'exploration, l'exploitation et le transport des hydrocarbures ; en bref les sociétés pétrolières. Ces dernières sont considérées comme les grands pollueurs du milieu marin. Dans le cadre de l'obtention de leurs licences d'exploitation, il leur est demandé de maintenir des stocks adéquats d'équipements et de matériels et d'avoir des plans d'urgence en cas de pollution, plans qui présentent les actions nécessaires pour minimiser les impacts sur l'environnement marin en cas de pollution résultant des déversements d'hydrocarbures découlant de leurs opérations. Ces prédispositions font partie des injonctions qu'elles reçoivent du gouvernement.

Mais de façon délibérée, les sociétés pétrolières se joignent aux ONG à caractère environnemental dans le but d'éduquer le public des comportements à adopter en cas de déversements accidentels des hydrocarbures dans les milieux marins. C'est le cas de la coopération CPS/COTCO/ONG qui a pris effet après l'incident de Kome-Kribi du 15 janvier 2007. De même, ces sociétés sont capables de donner des conseils et une aide d'experts au gouvernement Camerounais en cas d'incidents où la partie responsable des déversements d'hydrocarbures n'a pas la capacité d'intervenir (par exemple le cas d'un accident d'acheminement). Tout de même, il est évident que l'étude pour le suivi de la protection de la zone côtière et de l'environnement marin en ce qui concerne la gestion de l'environnement et la pollution marine, notamment par les hydrocarbures dans la zone à risque telle que définit dans l'étude d'impact environnemental relative à l'oléoduc Tchad-Cameroun, n'a pu être réalisée que grâce à leurs financements.

En somme, la protection de l'environnement marin au Cameroun mobilise plusieurs institutions nationales. L'intervention des acteurs non Etatiques esquisse ce que le Pr Maurice KAMTO appelle la « démocratie participative ». Ces institutions interviennent dans le choix de techniques de protection de l'environnement marin.

Paragraphe 2 : L'ADOPTION DES TECHNIQUES DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT MARIN

La mise en oeuvre du droit international de l'environnement marin au Cameroun passe également par l'adoption des techniques de protection dudit environnement. Déjà prescrites par la quasi-totalité des instruments juridiques concernant le milieu marin, le législateur Camerounais n'a fait que les entériner ; à la seule différence qu'il cantonne dans le même dispositif les moyens de prévention et de lutte contre la pollution marine (A) et ceux de la conservation de la biodiversité marine (B).

A- L'ADOPTION DES MOYENS DE PREVENTION ET DE LUTTE CONTRE LA POLLUTION

Au Cameroun, la prévention et la lutte contre la pollution marine sont possibles grâce à la mise en place des mesures préventives (1) et curatives (2).

1- L'adoption des mesures préventives

Les mesures préventives sont celles susceptibles de permettre une anticipation des risques de pollution, soit pour éviter celle-ci ; soit pour mieux se préparer afin d'y faire face efficacement, le cas échéant291(*). En constitue de telles mesures au Cameroun, l'évaluation des effets potentiels de l'activité humaine sur l'environnement marin.

Au même titre que l'étude d'impact sur l'environnement général, l'étude d'impact sur l'environnement marin est une procédure administrative entrant dans le cadre de la prévention des risques liés à l'exécution des projets d'envergure sur ces milieux292(*). Elle permet d'examiner et d'évaluer les conséquences tant bénéfiques que néfastes des projets et programmes de développement envisagés. C'est pourquoi le législateur camerounais en fait une obligation. La loi-cadre du 05 août 1996 dispose à cet effet que « tout promoteur ou maître d'ouvrage de tout projet d'aménagement, d'équipement ou d'installation qui risque, en raison de sa dimension, de sa nature ou des incidences des activités qui sont exercées sur le milieu naturel, de porter atteinte à l'environnement est tenu de réaliser, selon les principes du cahier des charges, une étude d'impact (...)293(*)».

En tant qu'un préalable à toute activité d'envergure sur le milieu marin, l'étude d'impact permet de se convaincre que telle ou telle activité peut être opérationnelle ou non. Dans l'affirmative, elle relève conformément aux dispositions de l'alinéa 2 de l'article 19 de la loi N° 96/12 les indications et obligations auxquelles est soumis le promoteur de l'activité, notamment l'analyse de l'état initial du site et de son environnement, l'analyse des effets prévisibles sur la qualité de l'environnement marin, la description des mesures prévues pour réduire ou éliminer les effets négatifs sur l'environnement marin et enfin la description des solutions de recharge ; c'est-à-dire celles qui permettent de substituer au projet ou à certains de ses éléments un autre présentant moins de risque 294(*).

En terme d'étude d'impact sur l'environnement marin, certaines catégories de travaux et ouvrages sont principalement concernées. Il s'agit pour la plupart des cas de travaux d'envergure réalisables et réalisés sur le littoral tels les ports, les hôtels et autres activités industrielles et minières situées sur la côte ; soit encore en pleine mer tels les plates-formes offshore. C'est pourquoi le projet de construction de l'oléoduc Tchad-Cameroun a donné lieu à la réalisation d'une vaste étude d'impact sur l'environnement marin camerounais. La réalisation de cette condition n'empêche en rien l'adoption des mesures curatives de pollution marine.

2- L'adoption des mesures curatives

Les mesures curatives consistent dans la plupart des pays en l'établissement d'un plan d'intervention d'urgence. Il désigne un plan élaboré sur la base nationale, bilatérale ou multilatérale, pour lutter contre la pollution et les autres atteintes au milieu marin et aux zones côtières ou la menace de situation de ce genre, résultant d'accidents ou d'autres évènements imprévus295(*).

Les plans d'intervention d'urgence en cas de situation critique pour le milieu marin connaissent en réalité, depuis l'adoption et l'entrée en vigueur des textes d'Abidjan, d'énormes difficultés liées à leur démarrage effectif tant sur plan régional que national. L'Etat du Cameroun n'échappe pas ce constat.

D'ailleurs, la loi-cadre sur l'environnement aborde la question de manière imprécise et échappatoire. Elle reconnaît qu'il revient au gouvernement d'initier et de coordonner les actions qu'exige une situation critique, un état d'urgence de l'environnement ; mais laisse le soin à un décret296(*) de fixer les modalités nécessaires pour prévenir et combattre toute pollution marine en provenance des navires et installations sises en mer et /ou sur terre. Ceci revient à dire qu'aucune mesure n'est prise relativement à l'adoption d'un plan d'intervention d'urgence d'envergure nationale.

Cependant le législateur camerounais dans son intention de combler ce vide, soumet tout opérateur des produits pétroliers à l'obligation de disposer d'un système rigoureux de prévention d'accidents et les plans d'urgences à adopter en cas de sinistre ou de menace de sinistre présentant un danger pour l'environnement et la sécurité des biens et des populations297(*).

Pour se conformer à cette disposition règlementaire, le Plan National de Lutte contre les Déversements Accidentels d'Hydrocarbures (PNLDAH) indique de manière détaillée les matériaux et équipements de nettoyage qui ne sont adéquates que pour des déversements mineurs localisés298(*) et moyens299(*). Ils sont inadaptés aux déversements importants franchissant les capacités nationales d'intervention.

En somme, les moyens de prévention et de lutte contre la pollution marine ne sont pas encore sérieusement mis en place par les Etats Parties à la convention d'Abidjan300(*), notamment au Cameroun. Alors, qu'en est-il des moyens d'utilisation durable et de conservation de la diversité biologique marine ?

* 269 Voir article 77 alinéas 1 de cette loi.

* 270 Voir alinéa 2 du même article.

* 271 Cf, ASSEMBOUNI - OGUINJIMI (A, N), le droit de l'environnement marin et côtier en Afrique Occidentale, cas de cinq pays francophones, op. cit, p. 291.

* 272 Voir les dispositions de l'article L 72 de la loi N° 2001-01 du 15 Janvier 2001 portant code de l'environnement au Sénégal.

* 273 Voir article 79 de la loi-cadre relative à la gestion de l'environnement.

* 274 Idem, article 32 alinéa 1.

* 275 Cf., ASSEMBONI - OGUNJIMI (A, N), op. cit, p. 304.

* 276 Cf. Etude pour le suivi de la protection de la zone côtière et de l'environnement marin dans le cadre du projet CAPECE- Cameroun ; in Rapport trimestriel N° 1 présentée par Environnement République du Cameroun, novembre 2006, p.43.

* 277 Voir LE TOURNEAU (P), la responsabilité civile, PUF, Collection « Que sais-je » , paris, 2003, P 5 ; cité par ASSEMBONI- OGUINJIMI, op. cit.  p. 291.

* 278 Il est très important de relever qu'en France, toutes les différentes formes de dégradation du milieu marin et des zones côtières ont été prises en compte. Le cadre juridique français n'est donc pas limité à la pollution.

* 279 Voir article 83 alinéa 1 de cette loi.

* 280 Voir, Point 21 du Préambule de la constitution qui énonce que............

* 281 Cf. Article 14 alinéa 2 de la loi-cadre relative à la gestion de l'environnement

* 282 Cette Commission a été mise sur pied par le décret N° 94/259/ PM du 31 mai 1994. Elle analyse les divers rapports établis dans le cadre du suivi de l'application des différentes conventions internationales relatives à l'environnement et au développement durable.

* 283 Cf. HENGUE (P) , « Présentations des cadres juridiques et institutionnels en matière de lutte contre les déversements accidentels des hydrocarbures », Inédit, p.8.

* 284 Elle a pour attribution la détermination des types d'engins de pêche en fonction des espèces disponibles, bref de tout ce qui a trait à la pêche. Mais ses capacités d'intervention sont aujourd'hui très réduites en raison des contraintes budgétaires.

* 285 Cet institut mène des recherches spécifiques sur les ressources marines et halieutiques à travers le Centre Spécialisé de Recherches sur les Ecosystèmes Marins (CERECOMA) de Kribi et la Station spécialisée de Recherches halieutiques de Batoké à Limbé.

* 286 Ce rôle est confié au Service des Pollutions Marines qui est un département de la dite Direction.

* 287 Voir Sévère KAMEN, Défaillance du terminal Cotco : les déchets pétroliers sur les plages à Kribi, in Quotidien Le Messager en sa parution du 22 janvier 2007.

* 288 Cf. Article 8 alinéa 2 de la loi N° 96/12 du août 1996.

* 289 Elle a été créée en septembre 1992 à Douala, où se trouve son Secrétariat Général. Elle comprend les ONG du Cameroun, Gabon, Congo, Centrafrique, Rwanda, Tchad et du Zaïre. Sa Secrétaire Général en la personne de Dr Jacqueline NKOYOK a rédigé un article sur le Thème : « communication et Education dans la protection des écosystèmes côtiers et marins du Cameroun » dans le cadre d'une plate-forme organisée par l'UNESCO.

* 290 Basée à Limbé, c'est à cette ONG qu'a été confiée l'étude pour le suivi de la protection de la zone côtière et de l'environnement marin dans le cadre du projet CEPECE-Cameroun.

* 291 Voir KAMTO (M), Droit de l'environnement en Afrique, op. cit. p. 295.

* 292 Cf. ASSEMBONI - OGUNJIMI (A, N), op. cit. p. 255.

* 293 Cf. article 17 alinéa 1 de cette loi ».

* 294 Cette dernière condition n'est pas toujours exigée dans la réalisation de l'étude d'impact en général ; mais elle peut être indispensable en ce qui concerne le milieu marin et les zones côtières

* 295 Cf. article 1er paragraphe 3 du protocole de la convention d'Abidjan

* 296 Il est nécessaire de dire qu'un tel décret n'a jamais vu le jour au Cameroun

* 297 Cf. article 61 paragraphe 3 du décret N° 2000/ 465 du 30 juin 2000 fixant les modalités d'application du code pétrolier.

* 298 Il s'agit des déversements qui peuvent être nettoyés à l'aide des ressources et équipements disponibles sur un site.

* 299 Ce sont des déversements qui ne peuvent pas être nettoyés par l'opérateur seul. Des renforts doivent être appelés. Ce type d'incident comprend les accidents résultant d'un abordage de navires pétroliers ou bien d'une rupture d'un pipeline sous-marins entraînant une fuite importante au niveau de l'une des plates-formes de production offshore.

* 300 Ils le sont vraiment dans seulement 2 pays à savoir la Côte- d'Ivoire et le Congo.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand