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Démocratie et écologie : des relations complexes et nuisibles au traitement du changement climatique ?

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par Jacques-Aristide Perrin
Université Paris-Est - Master II Recherche Science Politique 2011
  

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Conclusion

Le changement climatique correspond à une nouvelle épreuve pour les démocraties de par ses conséquences potentielles, sa nature très particulière touchant au quotidien et aux équilibres naturels et la difficulté de l'appréhender pour son caractère inédit parce que global et trans-étatique dans un monde inter-étatique.

Ce phénomène climatique anthropique est une vérité de fait c'est-à-dire démontré et certain tandis qu'il ne parvient pas à être considéré comme une vérité de raison. Le passage entre les deux n'est pas encore franchi et empêche toute intervention politique majeure en raison de la faible prise de conscience du danger. Parvenir à convaincre les opinions publiques et les sphères politiques et économiques afin de modifier les mentalités et les comportements écologiques sont donc un préalable à la réussite des futures politiques environnementales. Mais l'équilibre est encore difficile à trouver entre le développement de divers catastrophisme et la promotion de la responsabilité citoyenne. Un tel défi doit se partager entre les devoirs de citoyens et les obligations de l'Etat dans un cadre démocratique : l'éducation à l'environnement et une meilleure prise en compte des problèmes environnementaux locaux constituent des voies envisageables pour traiter politiquement du changement climatique. Comme le dit l'adage populaire, on ne prend soin que ce dont on connaît et ceci s'applique autant à l'individu qu'à un Etat démocratique.

La démocratie est encore inadaptée au nouveau contexte climatique : c'est pourquoi elle a besoin d'être réformée. Pour autant le projet de démocratie écologique n'est pas la panacée puisqu'elle se concentre uniquement sur les problèmes écologiques alors que comme nous l'avons vu, les difficultés que rencontrent les démocraties sont multiples. Centrer notre attention sur le seul milieu naturel ne résoudra pas le changement climatique qui s'inscrit dans un ensemble de difficultés de la démocratie. Celle-ci en tant que modèle imparfait est en mouvement constant : elle vit et évolue sans se transformer fondamentalement. A partir de son essence libérale et de sa promotion de la diversité, nous pouvons la faire aller de l'avant.

Des réformes doivent être engagées afin d'opérer des changements politiques : sans les remettre en cause, les institutions, la participation populaire dans la prise de décision et

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l'éducation sont à revoir. Ces réformes sont toutes liées entre elles et forment un système : l'une ne peut fonctionner sans les autres et le tout est plus fort que les parties. Parallèlement à ces réformes, il s'agit d'arrêter de tout attendre ou à l'inverse de ne rien espérer de l'Etat qui doit jouer son rôle en s'ajustant lui aussi et surtout en coopérant avec ses partenaires. La vision idyllique d'un monde uni et d'un gouvernement mondial n'a pas plus de chance d'exister que par le passé. Le politique doit retrouver son utilité d'origine et proposer sa capacité de dialogue. Cependant le scénario vers lequel nous nous profilons est bien celui d'une crise puisque l'anticipation des difficultés ne semble plus envisageable dans un monde attaché au court terme et au pragmatisme.

Jean Pierre Dupuy voit notre salut dans la catastrophe à la condition sine qua non que nous l'esquivions non par la fuite mais par l'action. Le caractère inédit du changement climatique consacre un rôle primordial à la politique bien que par le passé d'autres catastrophes comme Tchernobyl n'aient pas servis de leçons. Paul Ricoeur écrivait avec justesse qu'« avant le pouvoir sur, vient le pouvoir dans. Le pouvoir procède fondamentalement de la capacité d'agir en commun ». Le politique incite dans son essence même à penser, imaginer, mettre en place des réponses adaptées à la situation et donner les moyens à la politique pour réussir.

La difficulté pour le politique est d'écouter, de prendre en compte les opinions des experts mais de ne point se réduire à elles. La science se meut entre l'information et la connaissance alors que la philosophie se situe entre la connaissance et la sagesse. De fait le politique peut s'appuyer sur la science pour prendre connaissance et comprendre le problème mais doit également se servir de la sagesse philosophique pour penser et agir.

Agir dans le contexte actuel revient à évoluer pour perdurer. Dans l'Histoire, toutes les sociétés qui ont parcouru les siècles sont celles qui ont su respecter les règles qu'elles s'imposaient tout en les actualisant. Après les développements économiques et les besoins de développement des XIX et XXème siècles, ces règles ont changé. Il faut faire évoluer - sans révolutionner - nos démocraties afin de conserver notre cadre démocratique inhérent au principe de liberté.

Pour savoir comment évoluer et vers où nous diriger, l'éthique, en dialogue avec le politique, peut nous guider. Une éthique acceptée par les individus parait consubstantiel au succès des réformes étant donné qu'il est bien aisé de respecter des valeurs que l'on partage. Les valeurs de la démocratie libérale forment une première ébauche d'une société désirable et souhaitée avec notamment la défense des libertés et de l'autonomie de l'individu, un mode de

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gouvernement respectant la pluralité des opinions et des pouvoirs. Une éthique environnementale, notion encore confuse et hétérogène, pourrait voir le jour dans ce cadre démocratique. A condition d'être anthropocentrique et de rapprocher la théorie de la pratique, elle constituerait un moyen d'accompagner la politique. En effet sur un tel sujet de complexité qu'est le changement climatique, la politique est pour le moment velléitaire. Assujettie aux partis politiques et prit en tenaille par l'antagonisme entre l'utopie et l'idéologie - dont le pragmatisme fait partie aujourd'hui-, elle a perdu de son efficacité et de sa vigueur.

Dans son ouvrage L'utopie et l'idéologie paru en 1997, Paul Ricoeur écrivait : « L'idéologie et l'utopie opèrent toutes deux à trois niveaux. Là où l'idéologie apparaît comme une distorsion, l'utopie se présente comme une fantasmagorie irréalisable. Là où l'idéologie est légitimation, l'utopie est une alternative au pouvoir en place. La fonction positive de l'idéologie est de préserver l'identité d'une personne ou d'un groupe ; le rôle positif de l'utopie consiste à explorer le possible, les possibilités latérales du réel. Idéologie et utopie illustrent ainsi les deux versants de l'imagination-conservation et invention ». C'est de cet esprit de conservation et d'invention que la politique a besoin à la fois. Le changement climatique, en tant qu'épreuve pour la politique et la démocratie, aura au moins le mérite de forcer la politique à dépasser l'opposition conservatisme et progressisme : l'un et l'autre sont nécessaires. En revanche la question est de savoir dans quelles proportions et si la capacité de renouvellement de la politique ( contenu ) se fera dans un cadre limité ou si ce cadre ( le contenant ) sera

débordé par l'audace et notre faculté d'invention.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon