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La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo.

( Télécharger le fichier original )
par Kwasi Nyatefe DOUGBLO
Université Amadou Hampate Ba de Dakar - Master 2016
  

Disponible en mode multipage

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    REPUBLIQUE DU SENEGAL

    UN PEUPLE-UN BUT-UNE FOI

    *******

    MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE
    SCIENTIFIQUE

    *******
    DIRECTION DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
    ********
    UNIVERSITE AMADOU HAMPATE BA DE DAKAR

    FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

    *******

    Mémoire de fin de cycle pour l'obtention du diplôme de Master en
    Management Public et Relations Internationales (MPRI)

    SUJET : LA TRANSPARENCE DANS LES
    MARCHES PUBLICS AU SENEGAL ET AU TOGO

    ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016

    Présenté par :

    M. Kwasi Nyatefe DOUGBLO

    Sous la direction de :

    M. Aliou SAWARE

    Docteur en droit public à l'UCAD, expert en Partenariat Public-privé,

    Avocat inscrit au barreau du Sénégal

    ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016

    i

    REPUBLIQUE DU SENEGAL

    UN PEUPLE-UN BUT-UNE FOI

    *******

    MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE
    SCIENTIFIQUE

    *******
    DIRECTION DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
    ********
    UNIVERSITE AMADOU HAMPATE BA DE DAKAR

    FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

    *******

    Mémoire de fin de cycle pour l'obtention du diplôme de Master en
    Management Public et Relations Internationales (MPRI)

    SUJET : LA TRANSPARENCE DANS LES
    MARCHES PUBLICS AU SENEGAL ET AU TOGO

    Présenté par :

    M. Kwasi Nyatefe DOUGBLO

    Sous la direction de :

    M. Aliou SAWARE

    Docteur en droit public à l'UCAD, expert en Partenariat Public-privé,

    Avocat inscrit au barreau du Sénégal

    AVERTISSEMENT !

    « L'Université Amadou Hampaté Ba n'entend donner aucune approbation, ni improbation, aux opinions émises dans les mémoires. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs ».

    Avertissement ii

    DEDICACE

    A la mémoire de ma chère mère Jacqueline EHO,

    A mon père Alex DOUGBLO,

    A mes soeurs Nadine et Honorine,

    A mes tantes Enyonam et Flavienne EHO,

    A mon cousin Thierry EBRI,

    A Armel KAGBARA, Josias BILE et mon cher FAFANA Moubarak,

    A Madame Martine SEGBEAYA,

    A ma très chère Soukeyna Wendyam OUEDRAOGO que j'affectionne tant,

    Eux qui soufflent en moi l'espoir de persévérer et de donner le meilleur de moi,

    Je leur dédie ce mémoire.

    Dédicace iii

    REMERCIEMENTS

    Remerciements iv

    Je tiens à remercier en premier lieu, mon Directeur de Recherches, le Docteur Aliou SAWARE, pour ses conseils, sa disponibilité et son soutien qui m'ont permis de donner vie et valeur à ce mémoire.

    Je remercie également M. Cheikh SAMB, mon professeur et expert en Marchés publics, pour sa disponibilité et sa promptitude à mon égard.

    Mes remerciements vont aussi à l'Université Amadou Hampaté Ba pour sa formation et sa rigueur.

    Je remercie tous mes compagnons d'étude de la Promotion MPRI 2015-2016, la promotion bénie et la meilleure de tout mon parcours universitaire.

    Une pensée spéciale à mon ami et condisciple Fakridine Saïd pour son attention, sa disponibilité à mon égard, et ses critiques constructives.

    Ma gratitude va également à l'endroit de M. Kombate Lardja, éminent juriste à l'ARMP-TOGO, pour ses orientations pertinentes, ses encouragements et ses conseils.

    A tous mes proches, ainsi qu'à toutes les personnes qui ont participé de près ou de loin, par un apport, un conseil, une prière, une aide quelconque, à la réalisation de ce mémoire, vous avez toute ma gratitude.

    Sigles, acronymes et abréviations v

    SIGLES, ACRONYMES ET ABREVIATIONS

    AAI : Autorité Administrative Indépendante

    AC : Autorité Contractante

    AGPM : Avis Général de Passation des Marchés

    AO : Appel d'offres

    AOO : Appel d'Offres Ouvert

    AOR : Appel d'Offres Restreint

    ARMP : Autorité de Régulation des Marchés Publics CCMP : Commission de Contrôle des Marchés Publics

    CMP : Code des Marchés Publics

    CCGA : Cahier des Clauses Générales Administratives CHNUF : Centre Hospitalier National Universitaire de Fann

    COA : Code des Obligations de l'Administration

    CPC : Cahier des Prescriptions Communes

    CPS : Cahier des Prescriptions Spéciales

    CPM : Cellule de Passation des Marchés

    CRD : Comité de Règlement des Différends

    CS : Cour Suprême

    DAGE : Direction de l'Administration Générale et de l'Equipement

    DAO : Dossier d'Appel d'Offres

    DCMP : Direction Centrale des Marchés Publics

    DNCMP : Direction Nationale de Contrôle des Marchés Publics

    DP : Demande de Propositions

    DRP : Demande de Renseignements et de Prix

    ED : Entente Directe

    LONATO : Loterie Nationale Togolaise

    MEF : Ministère de l'Economie et des Finances

    MFPAA : Ministère de la Formation Professionnelle, de l'Apprentissage et de l'Artisanat

    MP : Marchés Publics

    MPEM : Ministère de la Pêche et de l'Economie Maritime

    MSAS : Ministère de la Santé et de l'Action Sociale

    SAZOF : Société d'Administration de la Zone Franche

    SENELEC : Sénégal Electricité

    PPM : Plan de Passation des Marchés

    PRMP : Personne Responsable des Marchés Publics

    UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

    Sigles, acronymes et abréviations vi

    SOMMAIRE

    Sommaire vii

    Introduction

    TITRE I : Une transparence affirmée

    Chapitre 1 : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation

    Section 1 : Une transparence quant aux procédures normales

    Section 2 : Une transparence quant aux procédures particulières

    Chapitre 2 : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle

    Section 1 : Un contrôle administratif ambivalent

    Section 2 : Un contrôle juridictionnel indispensable

    TITRE II : Une transparence relative

    Chapitre 1 : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation

    Section 1 : Des atteintes liées aux marchés de type concurrentiel

    Section 2 : Des constats relatifs aux procédures particulières

    Chapitre 2 : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales

    Section 1 : Des faiblesses liées aux mécanismes de contrôle

    Section 2 : Des mesures de recommandations générales

    Conclusion générale

    Bibliographie

    Table des matières

    EPIGRAPHE

    Epigraphe viii

    «La relation contractuelle est par nature réfractaire à la transparence ».

    CH. BRÉCHON-MOULÈNES, « Transparence et marchés publics »

    Introduction 1

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    INTRODUCTION

    Depuis quelques années déjà, l'on est témoin en Afrique, d'une mutation des règles du droit public qui, au gré de l'évolution du contexte économique des Etats, a suscité pour ces derniers, la nécessité de définir un cadre harmonisé de leurs législations. Le lien ainsi établi entre le droit et l'économie semble a priori dénoter d'une part de l'importance que revêt un encadrement juridique pour la matière économique et d'autre part, de la volonté pour les Etats à se conformer aux exigences d'un organe supranational dans le but d'atteindre les objectifs de développement économique et de bonne gouvernance. De cette configuration bâtie sur une dynamique d'intégration sous régionale, naquit un droit dit des « marchés publics ».

    A l'évidence, si les marchés publics1 voient leur complexité croître au fil des années sous l'influence de certaines pratiques, le droit communautaire oeuvre quant à lui, à redorer leur blason, tant dans leur passation que dans leur contrôle et exécution. Depuis la Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide au développement du 2 mars 2005, le Sénégal et le Togo se sont résolument engagés dans un vaste programme de réformes au niveau des finances publiques et des systèmes nationaux de passation des marchés publics. Parmi ces réformes on note l'harmonisation de leurs systèmes de passation des marchés pour les hisser au rang des meilleures pratiques internationalement admises2. C'est donc dans ce contexte que l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) a théorisé et mis en oeuvre un programme sous régional de refonte des systèmes nationaux de passation des marchés, visant à limiter autant que possible, les irrégularités tant décriées dans ce domaine particulier du droit public économique3.

    Mais pour en arriver là, l'instance communautaire a adopté le 9 décembre 2005, deux textes

    1Il convient de faire la différence entre marchés publics, convention de service public et accord de partenariat, tous des contrats administratifs mais n'étant pas définis par les mêmes critères.

    2 Cf. le point 28 de la Déclaration de Paris, relatif au renforcement des systèmes nationaux de passation des marchés.

    3 Le droit public économique est un droit de l'intervention de l'Etat et des personnes publiques dans la sphère économique.

    Introduction 2

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    fondamentaux. Il s'agit d'une part de la directive N°04/2005/CM/UEMOA portant procédure de passation, d'exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public, et d'autre part de la directive N°05/2005/CM/UEMOA portant Contrôle et Régulation des marchés publics et délégation de service public, permettant ainsi au Sénégal et au Togo d'ajuster leur règlementation en la matière.

    En effet, ces nouveaux textes ont apporté de nombreuses innovations, notamment la rationalisation des procédures de passation des marchés publics, l'amélioration du contrôle à priori, la responsabilisation des structures dépensières et surtout la systématisation du contrôle à postériori. Dans ce contexte, la création d'un organe en charge du contrôle et de la régulation des marchés publics, a été perçue comme une des innovations majeures tant en droit positif sénégalais que togolais.

    Le Sénégal, en ce qui le concerne, s'est doté d'une autorité de régulation des marchés publics4 (ARMP), nouveauté à mettre à l'actif du code des marchés publics en vigueur à cette époque5. Cet organe de régulation est une autorité administrative indépendante6 (AAI), distincte des administrations traditionnelles de l'Etat et perçue comme la manifestation la plus affirmée de la régulation juridique7 dans ce domaine. Composée d'un Conseil de Régulation8, d'une Direction générale9 et d'un Comité de Règlement des Différends (CRD)10, compétent pour

    4 Décret n° 2007-546 portant organisation et fonctionnement de l'autorité de régulation des marchés publics, 02 juin 2007 p. 2938 et S

    5 Décret N°2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Marchés publics.

    6 Une Autorité administrative indépendante est une personne morale de droit public, différente des administrations traditionnelles qui quant à elles, reposent sur le lien de la hiérarchie. Ce type d'organisme se développe de plus en plus dans les économies et dispose d'une autonomie financière, de gestion et d'administration.

    7 N DECOOPMAN , « A propos des autorités administratives indépendantes et de la déréglementation », J. CLAM, G. MARTIN (dir), Les transformation de la régulation juridique, LGDJ, « Droit et société, Recherches et travaux », vol 5, 1998, p.24

    8 Le conseil de régulation dispose des pouvoirs les plus étendus pour administrer l'ARMP, définir et orienter sa politique générale et évaluer sa gestion dans les limites fixées par ses missions organiques et statutaires.

    9 La Direction générale est assurée par un Directeur général, recruté sur appel d'offres par le Conseil de Régulation sur la base de critère d'intégrité morale, de qualification et d'expérience dans les domaines juridique, technique et économique des marchés publics et délégations de service public.

    10 Le comité de règlement des différends est une autorité compétente chargée des recours non juridictionnels ouverts à tout candidat à une procédure d'attribution d'un marché public ou délégation de service public.

    Introduction 3

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    trancher les litiges, l'ARMP s'affirme de plus en plus comme le défenseur des droits des soumissionnaires qui s'estimeraient lésés par le fait de certaines autorités contractantes.

    Quant au Togo, l'ARMP, tout en restant fidèle à la même configuration structurelle évoquée pour le compte du Sénégal, doit son avènement au décret n° 2009/013 du 30 juin 2009 relatif aux marchés publics et délégation de service public. Ce décret, tout en définissant le cadre institutionnel des marchés publics, qui d'ailleurs repose sur le principe de la séparation des fonctions de passation, de contrôle11 et de régulation12, précise l'indépendance de cette institution de régulation13.

    Par ailleurs, la mise en oeuvre des directives de l'UEMOA s'est faite conformément aux accords et grands principes qui gouvernent la commande publique14 et qui sont communément admis par les standards internationaux à savoir la liberté d'accès15 à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats16, l'efficience17 de la dépense publique mais aussi et surtout la transparence des procédures. Ce dernier principe qui, de toute évidence constitue le socle de ses devanciers, sera la substance centrale autour de laquelle seront bâtis nos travaux.

    Il va donc de soi que l'analyse de ce thème dépasse le cadre spécifique des Etats, du moment où

    11 La fonction de contrôle consiste à s'assurer de la bonne application de la règlementation sur l'ensemble des autorités contractantes.

    12 La fonction de régulation est de la compétence de l'ARMP. Elle consiste à assurer le bon fonctionnement du système de passation des marchés publics.

    13 Elle se conçoit sous trois formes : indépendance vis-à-vis des entreprises régulées et des autres intérêts privés; indépendance vis-à-vis des autorités publiques et indépendance sous forme d'autonomie institutionnelle.

    14 La commande publique est une notion « globalisante ». Elle renvoie littéralement à un ordre de l'administration par lequel il est, entre autres, demandé à un fournisseur la livraison d'une marchandise ou l'exécution d'un service. L'expression « commande publique » a été employée pour la première fois dans une acception juridique à l'article 1er du Code des marchés publics issu du décret du 7 mars 2001. Voir sur cette question, Jean-Matthieu Glatt, « La catégorisation des contrats de commande publique : source d'insécurité juridique », note sous CJCE, 10 septembre 2009, EURAWASSER, in Les petites affiches, 11 février 2010, p. 3 et S., spéc. p. 12. V. Grégory KALFLECHE, Des marchés publics à la commande publique. L'évolution du droit des marchés publics, Thèse, Paris II, 2004, p. 25

    15 Ce principe suppose la possibilité pour toute personne remplissant les conditions requises, de se porter candidate à un marché public

    16 Les principes de liberté d'accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats sont complémentaires. Ils résultent du principe constitutionnel plus général d'égalité des citoyens devant la loi, ainsi que des principes de libre concurrence et de liberté du commerce et de l'industrie.

    17 L'efficience correspond à une utilisation rationnelle des deniers publics dans la passation des marchés. C'est pour cela qu'un marché public doit être attribué au candidat ayant présenté une offre techniquement conforme et financièrement avantageuse (moindre coût) pour l'autorité contractante.

    Introduction 4

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    elle intègre des règles formalisées du droit communautaire, destinées à être transposées. En effet, l'existence d'un organe communautaire, l'étendue de ses compétences et l'influence de ses décisions, constituent aujourd'hui l'expression d'une trame historique récente surtout au regard des deux dernières directives, considérées comme le fondement juridique le plus en vogue depuis 11 ans, dans les généralités qui gravitent autour de la notion de « marchés publics » dans l'espace UEMOA.

    L'expérience sénégalaise et togolaise dans les marchés publics, quoique récente, contribuera dans une perspective comparée à mieux asseoir les préoccupations inhérentes aux marchés publics. Comme on le sait, ce domaine est profondément entaché par de nombreuses irrégularités, malgré la consécration des textes qui, reconnaissons-le, ont tout de même contribué à creuser le sillon, ce qui du reste nous invite à examiner « la transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo », thème objet de nos travaux.

    Pour une compréhension plus adéquate de ce sujet de recherche, il convient d'apporter une définition des plus larges et complètes des termes qui le constituent.

    A ce titre, « la transparence » constitue conformément au décret n° 2005-576 du 22/06/05, portant Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés publics au Sénégal, « l'application équitable et rigoureuse de procédures connues et qui constituent exclusivement la base des décisions d'attribution des marchés »18. A cet égard, ce principe à valeur constitutionnelle19, suppose avant tout, un système d'information performant permettant de lutter contre l'opacité, à travers la publication régulière et en temps opportun de toute l'information sur les marchés publics allant de la publication du plan de passation des marchés (PPM) jusqu'à celle de l'avis d'attribution du marché.

    D'un autre côté, la transparence suppose aussi le bannissement de toute entrave à la compétition et l'abandon des pratiques anticoncurrentielles. Concrètement, cela signifie que d'une part, il faille définir complètement et ce, de façon neutre, les besoins à satisfaire des autorités

    18 Décret n° 2005-576 du 22/06/05, portant Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés publics.

    19 L'exigence de transparence au Sénégal a été élevée au rang de principe constitutionnel. En effet, dans le préambule de la constitution du 22 janvier 2001, le constituant sénégalais affirme son attachement à la transparence dans la conduite et la gestion des affaires publiques, ainsi qu'au principe de bonne gouvernance.

    Introduction 5

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    contractantes, et d'autre part, laisser libre cours à la concurrence en évitant autant que possible les pratiques comme le favoritisme ou la prise illégale d'intérêt et en se fondant sur l'objectivité comme critère d'évaluation des offres et d'attribution des marchés. D'un point de vue spécifique, la mise en concurrence permet d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix, conformément aux principes d'économie et d'efficience. Aussi, en appliquant des critères décisionnels objectifs, élimine-t-on dans la mesure du possible, partialité, préjugés et subjectivité dans le processus de passation des marchés publics. Tous ces éléments combinés convergent vers un traitement équitable et non discriminatoire des candidats et garantissent ainsi, un comportement conforme à l'éthique.

    L'éthique ainsi évoquée confère à la transparence, non seulement une culture de l'intégrité20 mais surtout, la reconnaissance et l'organisation d'un droit de recours afin de réparer éventuellement les dommages causés aux soumissionnaires et de redresser les décisions inéquitables en matière d'attribution des marchés. Sur ce point, en matière de passation des marchés, il existe deux sortes de recours : un recours non juridictionnel et un recours juridictionnel.

    Le recours non juridictionnel est d'abord exercé à titre gracieux au niveau de la personne responsable du marché public (PRMP)21, puis, en cas de non satisfaction du soumissionnaire, au niveau du comité de règlement des différends de l'organe de régulation. En fonction de la nature du dossier dont il est saisi, le CRD peut soit statuer en formation litige22, soit en formation disciplinaire23. Quant au recours juridictionnel, il est généralement introduit devant le juge de l'administration, tant les contrats de marchés publics sont généralement des contrats administratifs.

    A l'évidence, la notion de transparence, dans son essence profonde et historique, a connu une

    20 L'intégrité suppose une moralité irréprochable dans le traitement des dossiers, une utilisation sans gabegie des fonds publics et un traitement équitable de tous les soumissionnaires.

    21 La PRMP est cette personne habilitée à signer le marché au nom de l'autorité contractante. Par conséquent, les marchés conclus par une personne non habilitée à cet effet sont nuls et de nullité absolue.

    22 On parle de « Formation litige » lorsque le CRD statue sur la recevabilité et la suite à donner à une contestation portant sur une décision d'attribution d'un marché.

    23 La Formation disciplinaire est celle qui porte sur la sanction du faute grave commise par une des parties lors de la passation d'un marché public.

    Introduction 6

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    évolution d'un point de vue qui transcende le droit communautaire24 de l'Afrique de l'ouest francophone. Il y a bien des années, le droit positif français avait entrepris des ajustements en vue de clarifier l'étendue de cette notion. Mais au contexte actuel, l'appréhension classique qui était reconnue à la transparence a connu des mutations et c'est dans l'affirmation rénovée de cette transparence que le Sénégal et le Togo25 ont proclamé leur foi afin de venir à bout des maux qui assaillent les marchés publics.

    Au bout du compte, la transparence est le principe sur lequel le législateur fonde sa politique de lutte contre les malversations dans les marchés publics. Le raisonnement qui est fait peut-être simplifié en ces termes : le « principe de transparence » interdit que le choix soit fait sans que l'on puisse en déterminer les étapes préalables et les motivations. Ce principe est connu pour être le socle sur lequel se fonde les autres principes des marchés publics. Il permet donc de vérifier que le choix des autorités contractantes a respecté les principes de liberté et d'égalité entre les candidats, ou, pour prendre un terme adapté à l'organisation d'un choix, l'impartialité de la procédure. En rendant lisible la procédure, la transparence permettra de vérifier une composante fondamentale de la notion d'impartialité26: l'interdiction d'avoir un préjugé sur la solution à donner au choix.

    Quant aux marchés publics, on dira d'eux pour les définir dans une acception juridique, qu'ils sont avant tout, des contrats administratifs par détermination de la loi27 , « écrits, et conclus à titre onéreux par une autorité contractante pour répondre à ses besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, ou à des besoins combinant ces différentes catégories »28. Partant de là, un marché public est donc considéré comme la manière spécifique dont une personne

    24 Directive n° 04/2005 de l'UEMOA portant passation des marchés publics

    25 Le principe de transparence a été envisagé de manière approfondie dans le code togolais des marchés publics dans le chapitre 1 du titre III relatif aux procédures de passation des marchés publics.

    26 La notion d'impartialité implique aussi l'impossibilité pour l'autorité contractante, d'être à la fois juge et partie.

    27 Il arrive que le législateur, qualifie directement un contrat de « public », ou lui donne ce caractère indirectement en attribuant le contentieux au juge administratif. Ainsi 3 types de contrats obéissent à ce principe :

    D'abord il s'agit des contrats relatifs à l'exécution des travaux publics et les ventes d'immeubles de l'Etat (Loi du 28 Pluviôse An VIII, article 4), ensuite des contrats portant occupation du domaine public et enfin des contrats soumis au code des marchés publics.

    28 Article 4 CMP Sénégal relatif aux définitions.

    Introduction 7

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    publique au sens large29 commande des fournitures, des services ou des travaux. Cependant, tous les contrats, faisant intervenir au moins une personne publique ne sont pas forcément des marchés publics. Ainsi les contrats passés par les sociétés nationales et les sociétés anonymes à participation publique majoritaire, ne sont-ils pas des contrats publics, mais bien des contrats relevant du droit privé et par ricochet, relèvent de la compétence du juge judiciaire.

    Dès lors, tous les actes créateurs de droit30 de l'administration, les marchés publics y compris, sont soumis à un contrôle juridictionnel de la Cour suprême. Ainsi, conformément à la loi n° 2008-75 du 08 août 2008 au Sénégal, la Cour suprême peut « contrôler la régularité formelle ainsi que la validité juridique des actes unilatéraux pris par l'administration »31 . Concrètement, elle peut être saisie dans le cadre d'un contrôle dénommé « Recours pour Excès de Pouvoir » (REP), recours destiné à l'annulation d'une décision d'une autorité administrative32. Dès lors, elle est également compétente pour examiner, en cassation, les décisions rendues par les juges du fond en matière administrative. Au Togo, le contentieux administratif au titre duquel figure le contentieux des marchés publics est confié à la chambre administrative de la cour d'appel et à la chambre administrative de la cour suprême33.

    Aujourd'hui, les marchés publics au Sénégal et au Togo, représentent par essence une matière pluridisciplinaire et complexe34. Par conséquent, ils se situent au carrefour de plusieurs domaines où le droit doit servir une bonne gestion économique et technique des marchés, tant il est vrai que cette situation, conduit à reconnaitre au juge administratif, des prérogatives complémentaires qui donnent une nouvelle orientation à ses attributions.

    A bien voir le thème objet d'analyse, sa stature est telle qu'elle nous impose un certain nombre de choix quant à la démarche à adopter. En effet, la notion de marchés publics parait reposer, conformément aux prescriptions communautaires35, sur un triple aspect à savoir la phase de

    29 Certaines personnes privées doivent également respecter les règles des marchés publics lorsque les pouvoirs publics exercent sur elles une influence (matérielle ou financière) significative.

    30 Il s'agit des actes administratifs unilatéraux et des contrats administratifs.

    31 Voir CS du Sénégal, 23 janvier 1996, Souleymane Badiane, Bulletin des arrêts de la CS.

    32 Décisions rendues par le Comité de Règlement des différends de l'Autorité de Régulation des Marchés Publics.

    33 Ordonnance numéro 78-35 du 07 septembre 1978.

    34 Braconnier Stéphane, Précis du droit des marchés publics, éditions Le Moniteur 2012, p. 65

    35 Directive n°04/2005 portant passation des marchés publics, op. cit

    Introduction 8

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    passation, la phase de contrôle et celle d'exécution. Ainsi, serait-il présomptueux de vouloir égrener la totalité de la littérature aussi bien générale que spécifique qui s'identifie à la transparence et les insuffisances qui vont avec dans chacune de ces phases, tant cette approche serait titanesque.

    Il sera alors question d'examiner la transparence dans les marchés publics au regard de la phase de passation et celle de contrôle, abstraction faite de la phase d'exécution qui, bien que présentant des irrégularités, ne sera cependant pas abordée dans le cadre de notre analyse.

    Eu égard à ces considérations, il est convenable de centrer cette étude autour d'une problématique qui servira de clef de voûte à notre analyse.

    A ce titre, considérant que la transparence, constitue d'une part un principe conçu au plan communautaire et d'autre part, adopté par les Etats pour assainir le secteur des marchés publics, il convient de préciser que ce principe se heurte à des pratiques obscures36 qui mettent en évidence, une réalité quelque peu nuancée. En effet, des autorités contractantes tout comme certains soumissionnaires, font souvent preuve d'une grande discrétion et de subterfuges pendant le processus de passation, alimentant ainsi la controverse si bien que l'on se demande si on peut véritablement parler de transparence. Ainsi donc, la question à laquelle nous serons amenés à répondre est celle-ci : La transparence est-elle effective dans les marchés publics au Sénégal et au Togo ?

    Ce thème soulève essentiellement deux intérêts. Un intérêt théorique d'abord, puis un intérêt pratique. Pour le premier, retenons que la notion de transparence a suscité bien de controverses dans son appréhension. En effet si le professeur BRECHON-MOULENES, il y'a un peu plus de trente (30) ans, ne voyait dans ce principe que le seul moyen de « créer un milieu concurrentiel »37 il n'est pas certain avec l'évolution qu'a subie la transparence et la reconnaissance de

    36 Ces pratiques s'identifient à la fraude, la corruption, la collusion, la prise illégale d'intérêt, le favoritisme, les conflits d'intérêt, etc.

    37 CH. BRÉCHON-MOULÈNES, « Transparence et marchés publics », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° Spécial colloque sur la transparence, pp. 45-62, spé. p. 53 : « c'est en arriver à la véritable fonction de la transparence : une fonction d'accessibilité au marché et non seulement au marché public mais au marché au sens économique. La transparence vise à créer un milieu concurrentiel. »

    Introduction 9

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    nouveaux principes38 qu'elle a engendrés, que cet auteur dirait aujourd'hui la même chose de ce sacro-saint principe. Comme l'a si bien remarqué Grégory KALFLECHE39, les effets de la transparence ne se confondent pas seulement avec ceux de l'égalité et de la libre concurrence. Désormais, la transparence dans les marchés publics, ne se contente plus seulement d'être un principe découlant de l'égale concurrence. Elle a également acquis une autre dimension qui entraine par elle-même, des effets incontestables, témoignant d'un renforcement des procédures de passation à travers l'instauration systématique des mécanismes de contrôle, à savoir le contrôle administratif40 et le contrôle juridictionnel. A ces différents égards, il est donc évident que l'on est en face d'une doctrine qui a pris ses responsabilités en procédant à une analyse profondément influencée par les exigences contemporaines.

    Mais au-delà de la joute doctrinale et précisément dans une approche pratique, tout le monde s'accorde aujourd'hui sur le fait que la transparence, lorsqu'elle est effective, garantit une atmosphère saine et rationnelle des marchés publics et implique une gestion efficace des deniers de l'Etat.

    Concrètement, cette étude cherchera à répondre aux différentes préoccupations inhérentes à la définition d'un cadre juridique relatif à la transparence et mettra en évidence les contradictions qui dans les faits accompagnent sa mise en oeuvre tout en cherchant à les dépasser sur fond de recommandations.

    Dès lors, pour mener à bien cette analyse, la méthode de recherche pour laquelle nous avons opté s'axera essentiellement sur la recherche documentaire. Celle-ci s'articulera autour des ouvrages généraux et spécialisés, de l'ensemble des textes communautaires, législatifs et règlementaires, de la doctrine, de la jurisprudence, des rapports, des articles traitant de la matière, et surtout d'une analyse approfondie et comparée des données statistiques produites par les différents organes de régulation des deux cadres géographiques de notre étude, nous permettant ainsi d'avoir un aperçu sur l'état de la transparence dans la passation et dans le contrôle des marchés publics, et de voir dans quelles mesures les manquements constatés peuvent être corrigés.

    38 Il est question des principes relatifs à l'économie, l'efficience, l'efficacité.

    39 Thèse « Des marchés publics à la commande publique », Paris 2004

    40 Il s'agit des contrôles a priori et a posteriori que nous analyserons dans les parties à venir.

    Introduction 10

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    In fine, c'est à un raisonnement en deux temps que tiendront nos travaux, inductif d'abord par la description de la transparence à tous les niveaux de la procédure de passation, déductif ensuite par un exposé des différents facteurs qui résultent des insuffisances qui compromettent son effectivité.

    De cette dialectique dont on espère qu'elle pourrait éclairer des zones d'ombre, découle le plan de cette étude. Ainsi, face à une transparence affirmée (TITRE I), du fait qu'elle a été consacrée par les textes communautaires puis nationaux, se dresse telle une arlésienne au regard de sa difficile effectivité, une transparence relative (TITRE II).

    Titre 1 : Une transparence affirmée 11

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    TITRE I : UNE TRANSPARENCE AFFIRMEE

    Dans le souci d'assurer un fonctionnement adéquat de leurs activités, les administrations du Sénégal et du Togo passent en permanence des marchés pour des acquisitions de travaux, de fournitures et services au moyen de montants considérables de fonds publics et d'aides de donateurs internationaux. Les contrats publics en général et les marchés publics en particulier, au regard des montants exorbitants qu'ils mettent en jeu, sont bien souvent considérés comme étant « réfractaires de transparence »41.

    De cette évidence est née une volonté qui, d'abord exprimée au plan communautaire, consistera à élaborer un paquet législatif que les Etats devront ensuite incorporer dans leur ordre juridique interne. De cette initiative communautaire, ont vu le jour des principes de passation des marchés publics tels que nous les connaissons aujourd'hui et au rang desquels figure le principe de transparence. Cette modernité communautaire, affirmée à travers les deux directives de l'UEMOA dont nous avons fait cas dans nos propos introductifs, va s'appliquer à toutes les phases de la passation des marchés, en influant tant sur les procédures de passation que sur les mécanismes de contrôle qui les régissent.

    Ainsi, ce double mouvement d'influences, qu'il reste d'ailleurs à détailler, montre bien un constant développement de la notion de transparence dans les marchés publics. Fort de cette certitude, nous partirons de la garantie d'une transparence dans les procédures de passation des marchés (chapitre 1), pour aboutir à la garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle (chapitre2).

    41 Cf. CH. BRÉCHON-MOULÈNES, « Transparence et marchés publics », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° spécial sur la transparence, pp. 45-62 qui estime, et l'on ne saurait la contester, que « la relation contractuelle est par nature réfractaire à la transparence » ; ce qui justifie que ce soit en cette matière que l'on ait le plus ressenti la volonté de développer la transparence. Le droit privé constate aussi ce « principe de secret » dans les contrats comme en témoigne J. MESTRE, « Transparence et droit des contrats », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° s pécial sur la transparence, pp. 77-88.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 12

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    CHAPITRE I : GARANTIE D'UNE TRANSPARENCE DANS LES PROCEDURES DE PASSATION

    La mise en oeuvre de l'intégrité dans la passation s'inscrit dans une logique interprétative des implications majeures de la transparence dans chacune des phases de passation des marchés publics. Pour ce faire, que ce soit au Sénégal ou au Togo les résolutions prises depuis la déclaration de Paris en passant par les directives de l'UEMOA de 2005 garantissent une transparence affirmée par les textes, puis unanimement acceptée.

    A cet effet, il nous importe de voir comment cette transparence se manifeste dans les procédures normales (Section 1) et ensuite comment elle peut être appréhendée à travers les procédures particulières (Section 2).

    Section 1 : Une transparence quant aux procédures normales

    Les procédures normales de passation sont celles qui admettent les procédés ordinaires de mise en concurrence dans l'attribution d'un marché. La transparence de ces procédures suppose avant tout une intégrité partant de la phase préalable d'appel d'offres (Paragraphe 1), jusqu'aux méthodes proprement dites de mise en concurrence (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : L'intégrité dans la phase préalable d'appel d'offres

    La phase préalable d'appel d'offres est celle qui vient en prélude à toute soumission. La transparence s'y applique à travers d'une part l'élaboration du plan de passation des marchés (A) et celle de l'avis général de passation des marchés (B).

    A- Une transparence relative au plan de passation des marchés

    Une série de mesures conditionnent l'effectivité de la transparence dans la phase préalable à l'appel d'offres. La détermination des besoins par l'autorité contractante préalablement à tout lancement de la procédure de passation d'un marché constitue l'un des principes rappelés par les

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 13

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    codes sénégalais et togolais des marchés publics42.

    En effet, avant tout appel à la candidature, consultation ou négociation, la personne responsable des marchés (PRMP) est tenue de déterminer la nature et l'étendue des besoins à satisfaire, de sorte que des prestations qui feront objet de marchés, contribuent à répondre exclusivement à ces besoins déjà identifiés et consignés dans un document dénommé le plan de passation des marchés (PPM)43.

    Par PPM, on entend un outil de programmation et de planification des marchés à engager au cours de l'année. Dans ce contexte, toutes les autorités contractantes ont le devoir en début d'année, de recenser tous les besoins des marchés et de les inscrire dans un document. La détermination aussi précise que possible des besoins par l'autorité contractante, annuellement dans un plan de passation des marchés et préalablement à tout lancement de la procédure de passation d'un marché, constitue l'un des fondements de la commande publique, rappelé à l'article 24 du Code des Obligations de l'Administration (COA)44. Lesdites prestations peuvent être définies par rapport aux normes nationales ou internationales applicables, qui doivent être expressément mentionnées dans le Cahier des Prescriptions Spéciales (CPS)45.

    En résumé, l'obligation faite aux autorités contractantes de déterminer leurs besoins, a le mérite d'assurer l'efficacité de la procédure de passation et ainsi éviter que des offres ou propositions assorties de réserves, soient remises par les candidats aux marchés.

    Une fois les besoins de l'autorité contractante déterminés, celle-ci doit procéder à leur spécification. A cet effet, elle fait une description claire des fournitures, services, travaux ou prestations intellectuelles afin de permettre aux candidats de répondre de façon réaliste et

    42 Cf. respectivement les articles 5 al.1 et 6 des CMP du Sénégal et du Togo relatifs à la détermination des besoins à satisfaire.

    43 Le plan de passation des marchés concerne tous les types de marchés, suivant un modèle type fixé par l'ARMP.

    44 Article 24, COA « En vue d'assurer l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics, la conclusion des contrats d'achat passés à titre onéreux par les acheteurs publics exige une définition préalable de leurs besoins par ces acheteurs».

    45 « Le CPS, préparé par l'autorité contractante, constitue le document destiné à compléter les dispositions du Cahier des Clauses Administratives Générales (CCAG) et du Cahier des Clauses techniques Générales (CCTG) afin de préciser les obligations contractuelles, et les clauses techniques reflétant les circonstances particulières de l'appel d'offres concerné », Manuel de procédure du code des marchés public du Sénégal, page 33.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    compétitive. Rappelons par ailleurs que pour les marchés de fournitures, travaux et services courants, on parle de spécifications techniques mais pour les marchés de prestations intellectuelles, la spécification des besoins est effectuée dans les Termes de Référence (TDR).

    En outre une étape délicate dans les procédures préalables à la soumission réside dans l'évaluation du montant des besoins. Dans ce contexte, l'estimation du montant des besoins en toute transparence est nécessaire non seulement pour le calcul des crédits requis, mais aussi pour éviter les fraudes et déterminer si les seuils d'application des procédures formalisées de passation d'approbation ou de contrôle des marchés sont atteints.

    Une fois ces seuils atteints, l'autorité contractante procède au choix de la procédure de passation. La question la plus élémentaire qui se pose ici est de savoir s'il convient de recourir à une mise en concurrence ou d'attribuer un contrat sur une base non concurrentielle. Dans le premier cas, l'autorité contractante est tenue de respecter les procédés compétitifs et ce pour les marchés fractionnés lorsque le seuil est atteint. Mais lorsque le montant des marchés est inférieur au seuil règlementaire, il est simplement attribué sur une base non concurrentielle.

    Par exemple dans le secteur public sénégalais, les marchés dont les montants estimés atteignent 70.000.000 Francs CFA pour les travaux, 50.000.000 Francs CFA pour les services courants et fournitures, 50.000.000 Francs CFA pour les prestations intellectuelles doivent être passés par la procédure dite d'appel d'offres ouvert qui fera objet de développement dans les prochaines parties. Quant au Togo, le seuil de passation est de 25.000.000 pour les travaux, 50.000.000 pour les fournitures et services et 25.000.000 pour les PI.

    Toutefois le fractionnement des marchés par une autorité contractante, dans le but de le soustraire aux obligations de concurrence est contraire au principe de transparence et par est par ricochet interdit à la fois en droit positif sénégalais et togolais.

    Le deuxième volet de la transparence que nous allons analyser ne se rapporte plus ni à l'identification des besoins, ni à leur spécification ou même à leur évaluation ou au choix de la

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 14

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 15

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    procédure, mais bien à la publication46 du document qui renferme tous ces procédés c'est-à-dire le plan de passation des marchés. Rappelons que la publication de ce document vise avant tout à garantir l'accès des marchés au plus grand nombre de candidats au regard de principes de liberté d'accès et d'égalité de traitement des candidats.

    Sous cet angle, la publicité dans la passation s'identifie à un « système d'informations performant permettant la publication régulière et en temps opportun de toute l'information sur les marchés publics »47. Le plan de passation des marchés est élaboré par la cellule de passation des marchés de l'autorité contractante, et est ensuite transmis à la Direction Centrale des Marchés Publics (DCMP) au plus tard le 1er décembre de l'année précédant l'année budgétaire considérée. La DCMP vérifie la conformité du document et en assure la publication dans les trois jours suivant la réception.

    L'autorité contractuelle dispose d'un délai de sept jours pour tenir compte des observations faites par la DCMP. Après ce délai, la DCMP publie le plan de passation des marchés en faisant au préalable un rapport détaillé à l'Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP). Une fois la publication faite sur le portail des marchés publics et au moins dans un quotidien officiel, les potentiels candidats ont désormais la possibilité de connaitre tous les projets de marchés inscrits au titre de l'année concernée.

    Au Togo, cette exigence est prévue par l'article 14 du décret n° 2009-277 portant code des marchés publics48. Tout comme au Sénégal, c'est à partir du « Plan Prévisionnel de Passation des Marchés » (PPPM)49 que l'autorité contractante extrait les marchés dont elle est sûre de l'exécution. Par ricochet, et ce à l'exception des marchés passés par entente directe, les autres marchés passés par les autorités contractantes et qui n'ont pas été au préalable inscrits dans le

    46 F. LLORENS, « principe de transparence et contrats publics », Contrats et marchés publics, janvier 2004, pp. 4-12 « la transparence est à la base de la réglementation la plus ancienne en ce domaine (celle des marchés publics) sous la forme notamment d'une obligation de publicité minutieusement organisée ».

    47 Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés publics, P. 2

    48 Les marchés à passer par les autorités contractantes doivent avoir été préalablement inscrits dans les plans prévisionnels initiaux ou révisés qu'elles ont élaborés à peine de nullité, sous réserve de l'appréciation de la DNCMP.

    49 Dénomination du code togolais des marchés publics de 2009.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 16

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    PPM sont en principe nuls. Il ne serait pas superflu cependant de préciser que le PPM est révisable.

    En définitive, c'est le PPM qui sur fond de transparence, donne un aperçu des marchés susceptibles d'être conclus. Une fois répertoriés, ces marchés seront consignés dans un autre document et qui fera l'objet de la prochaine sous-partie de notre analyse.

    B- Une transparence relative aux avis de passation

    L'élaboration et la publication des avis relatifs aux marchés publics sont de la compétence de la cellule de passation des marchés. En effet, après la publication du plan de passation des marchés, il incombe à chaque autorité contractante d'élaborer et de publier dès que le budget est disponible, un avis général de passation des marchés (AGPM)50 qui par la suite sera conforté par un avis spécifique d'appel à la concurrence.

    D'abord en ce qui concerne l'avis général de passation, il faut préciser qu'il consiste pour l'autorité contractante à recenser la liste des marchés publics qu'elle prévoit de passer par appel d'offres51 durant l'exercice budgétaire. Il contient les informations sur les marchés dont les montants estimés dépassent les seuils d'examen préalable des dossiers d'appel à la concurrence (article 53 du CMP Sénégal), conformément au modèle annexé à la circulaire n°003 du 20/11/2007. Au Sénégal comme au Togo, cet avis est établi conformément à un modèle type fixé par voie règlementaire. Par ailleurs, la publication de l'AGPM a la particularité d'alerter suffisamment à l'avance, les candidats potentiels sur les opportunités offertes par les marchés de sorte à permettre que la concurrence soit effective52 une fois l'appel d'offres lancé.

    Ensuite relativement à l'avis spécifique d'appel à la concurrence, il convient de rappeler qu'il ne concerne pas tous les marchés qu'une autorité contractante entend passer mais se rapporte uniquement à un marché contenu dans l'AGPM. Pour cette raison, chaque marché public passé par appel d'offres est précédé d'un avis spécifique d'appel public à la concurrence qui tout

    50 Art.15 CMP Togo, L'avis général de passation des marchés comporte les caractéristiques des marchés de travaux, fournitures et services que l'autorité contractante entend passer dans l'année.

    51 Il s'agit ici des marchés passés par appel d'offres ouvert, avec pré qualification, en deux étapes ou restreint.

    52 Rappelons ici que l'effectivité de la concurrence est un gage de transparence.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    comme l'AGPM est établi conformément à un modèle type fixé par voie règlementaire.

    La publication de l'avis général de passation des marchés et de l'avis spécifique d'appel à la concurrence se fait à la fois sur le portail des marchés publics et dans un journal quotidien de large diffusion. Cependant, avec le recours de plus en plus aux procédures dématérialisées53, les autorités contractantes, dans un souci de rapidité et d'efficacité économique, favorisent la diffusion et les échanges d'information par voie électronique.

    En guise de précision, notons que lorsque la passation d'un marché requiert une mise en concurrence obligatoire, le contenu de l'avis spécifique publié dans différents supports d'information doit être identique et comporter les mêmes renseignements quel que soit le support afin de garantir les mêmes chances aux candidats.

    A l'analyse de ces deux documents, il va sans dire que l'exigence de publicité assure le respect des principes rappelés à l'article 2 de la directive N°04 de l'UEMOA54. Ces principes généraux du droit des marchés publics ont été repris par chacun des codes sénégalais et togolais des marchés publics sur la base de la non-discrimination55 et c'est le juge administratif qui veille à leur respect.

    Par ailleurs, en plus de porter les marchés à la connaissance de tous et de permettre à ceux qui éventuellement seraient intéressés, de se préparer et de pouvoir soumissionner, la publicité de l'avis général de passation des marchés et des avis spécifiques à le mérite de susciter une plus grande diversité des offres. Par conséquent, elle permet d'accroître les chances d'obtenir l'offre techniquement conforme et la plus avantageuse en termes de coût56 et de garantir ainsi un bon usage des deniers publics.

    Toutefois, il faut convenir sur le fait que les modalités de publicité et de mise en concurrence à

    53 Cf. articles 56 CMP Sénégal et 45 CMP Togo relatifs à la dématérialisation des procédures.

    54 Art.2 Directive N°04/2005/CM/UEMOA : Les procédures de passation des marchés publics et des délégations de service public, quel qu'en soit le montant, sont soumises aux principes de l'économie et l'efficacité du processus d'acquisition, le libre accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats, la transparence des procédures, et ce à travers la rationalité, la modernité et la traçabilité des procédures.

    55 Articles 6 et 14 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et du citoyen de 1789.

    56 Le moindre coût s'identifie à l'efficience des procédures, un principe clé de la commande publique.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 17

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 18

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    mettre en oeuvre par l'autorité contractante ne se font pas ex nihilo. En effet, elles sont déterminées en fonction du montant estimé du besoin à satisfaire. C'est la raison pour laquelle l'estimation doit être faite sur fond de transparence afin d'éviter que le choix se porte sur une procédure de passation inappropriée, ce qui serait une entorse au principe de transparence dans cette phase dite préalable à la soumission.

    En définitive, et sans nier l'évidence, on attend du respect effectif de toutes ces exigences inhérentes à la publicité, rien de moins que l'intégrité de la part des acteurs des marchés publics, et l'efficacité dans le rendement attendu. Ces considérations qui sans doute font le délice d'un système de passation enclin à moins de fraude et de corruption, constituent depuis quelques années, le cheval de bataille des autorités tant sénégalaises que togolaise dans leur quête de transparence dans le secteur très sensible de la commande publique en général et celui de la passation des marchés publics en particulier.

    Paragraphe 2 : L'intégrité dans la phase proprement dite d'appel d'offres

    La passation des marchés publics peut être conduite selon différentes méthodes, dont l'appel d'offres qui, en répondant à des règles rigoureuses de publicité et de mise en concurrence, assure la transparence. Au Sénégal comme au Togo, on assiste à une consécration conjointe de l'appel d'offres (A), et une exigence d'intégrité dans l'attribution des marchés (B).

    A- Une consécration conjointe de l'appel d'offres ouvert

    La consécration « conjointe » dont nous faisons cas ici se justifie pour le Sénégal et le Togo par la transposition dans leur ordre juridique interne de la directive N°04 de l'UEMOA. En effet, une double lecture des deux codes des marchés publics consacre l'appel d'offres ouvert comme le mode de principe57 en matière de passation des marchés publics.

    En guise de définition, l'appel d'offres est une méthode de passation des marchés publics, par

    57 Selon le rapport de l'ARMP pour l'année 2014, le taux de passation des marchés conclus par appel d'offres par les autorités contractes au Sénégal est de 80,26% en valeur et de 14,50% en nombre.

    Au Togo les estimations de l'ARMP en ce sens font état de 52% de recours à ce mode de passation.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 19

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    laquelle l'autorité contractante met publiquement en concurrence des entreprises candidates, sur la base de critères objectifs préalablement portés à leur connaissance, en vue d'attribuer le marché au candidat qui présentera l'offre évaluée conforme et la moins-disante.

    Lorsqu'il est dit ouvert, l'appel d'offres met en compétition plusieurs candidats. En réalité, il présente l'avantage d'être une procédure a priori moins longue et moins lourde dans la mesure où les offres les candidats sont sollicitées et reçues en même temps. Aujourd'hui, la définition des seuils58 de passation qui imposent la procédure d'appel d'offres constitue à n'en point douter, une avancée majeure au regard des décennies de recours excessifs à l'entente directe, pratique ayant significativement gangrené le secteur de la passation des marchés publics.

    Par ailleurs, les exigences de publicité s'appliquent pleinement au dossier d'appel d'offres (DAO) qui est un outil utilisé dans le cadre des marchés de travaux, de fournitures, de services courants, et qui contient la totalité des pièces et documents nécessaires à la consultation et à l'information des candidats. Ces informations concernent notamment les règles du jeu de la compétition et pour des raisons de transparence, ces dernières doivent être objectives, écrites, compréhensibles et accessibles à tous afin de permettre aux candidats de se préparer et de présenter leur soumission dans le délai fixé par le DAO.

    Il va donc de soi que la publicité garantie une clarté de l'information et assure à plus d'un titre, son accès équitable aux futurs candidats tout en favorisant la compétitivité. La mise en concurrence suppose clairement la restriction de toute considération subjective quant à l'attribution du marché. Le choix de l'offre est donc réalisé sans qu'aucune négociation59 ne soit autorisée avec les candidats. Toutefois, nous devons préciser qu'au-delà de l'appel d'offres ouvert, existent des formes dérivées qui, en dépit de leur pluralité, restent néanmoins soumises aux mêmes règles de transparence.

    A cet effet, on distingue un triptyque de procédures concurrentielles auxquelles l'autorité contractante a recours pour la passation d'un certain type de marchés. Il s'agit en effet de l'appel

    58 Art 53 CMP Sénégal, relatif aux seuils et champs d'application des procédures.

    59 PIERRE DE BAECKE, Comprendre simplement les marchés publics, Ed Le Moniteur, Paris 2013, P.85

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    d'offres avec pré-qualification, de l'appel d'offres ouvert en deux étapes et de l'appel d'offres avec concours.

    On entend par appel d'offres avec pré-qualification, la procédure de passation des marchés à laquelle recourt une autorité contractante pour l'exécution des marchés complexes60, en s'assurant préalablement de la capacité des candidats à exécuter un tel marché. On distingue à cet effet deux phases. Celle de pré-qualification qui va permettre à l'autorité contractante d'établir une liste de candidats ayant des capacités jugées suffisantes et satisfaisantes pour l'exécution du marché concerné. Ensuite, les candidats qui sont jugés comme ayant apporté des garanties et des réponses satisfaisantes au regard des critères définis par l'autorité contractante, sont invités dans la deuxième phase à déposer une offre complète.

    Néanmoins, l'appel d'offres avec pré-qualification reste soumis aux exigences de publicité avec notamment la publication d'un avis d'appel public à candidature61, renfermant un dossier de pré-qualification62 qui fait état d'une série d'exigences63 auxquelles doivent satisfaire les candidats conformément au délai de dépôt des candidatures. Mais à l'expiration de ce délai, aucune offre n'est plus recevable. Toutefois, une lettre d'information64 est adressée par l'autorité contractante aux candidats pré-qualifiés les invitant à déposer leurs offres. C'est désormais ces derniers qui devront concourir.

    Quant à l'appel d'offres ouvert en deux étapes, il répond aux marchés de « grande complexité »65. Au regard de la particularité de ce type de marché, l'autorité contractante ne peut y recourir que sur avis de la DCMP. Au cours de la première étape où les candidats sont invités à ne déposer que leurs offres techniques, l'autorité contractante doit observer le principe d'égalité

    60 Les marchés complexes sont ceux qui s'identifient à des travaux importants ou aux fournitures de matériels devant être fabriqués sur commande ou à des services spécialisés.

    61 Articles 71 et 19 CMP du Sénégal et du Togo relatifs aux appels d'offres avec pré-qualification.

    62 Dénomination usitée dans le code togolais des marchés publics.

    63 Il s'agit des renseignements relatifs aux travaux, la description précise des conditions à remplir, la date limite de dépôt et les délais dans lesquelles les résultats de pré-qualification seront connus des candidats.

    64Il est également adressé aux candidats évincés, une lettre les informant des résultats du dépouillement et également les motifs de rejet du dossier s'ils en font la demande formelle

    65Il peut s'agir des marchés relatifs à la construction de barrages par exemple. Mais on cette procédure est aussi sollicitée ou lorsque la personne responsable du marché s'intéresse exclusivement aux critères de performance des candidats.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 21

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    de traitement des candidats66. Le but poursuivi par l'autorité contractante dans cette première étape est de parvenir à avoir une liste restreinte des candidats dont elle est sûre de la capacité à réaliser le marché, au regard de la conformité technique de leurs offres. Les candidats retenus étant ceux qui ont présenté une offre technique conforme, l'évaluation se fera dans une deuxième étape sur la base de leurs offres financière.

    En dernier lieu, nous avons l'appel d'offres avec concours, mode de passation ayant la particularité de ne s'appliquer qu'aux marchés qui présentent des motifs particuliers67 comme ceux relatifs à l'art. Le concours dans ce cas a lieu sur la base d'un programme établi par l'autorité contractante qui fournit les données nécessaires notamment les besoins à satisfaire, les contraintes fonctionnelles et techniques, de même que le plafond de la dépense prévue pour l'exécution du projet. Ce mode de passation, suit une procédure de règlement particulière68.

    En définitive, une fois les exigences relatives à la publicité du PPM, de l'AGP, de l'avis spécifique de passation, du DAO et celles inhérentes au dépôt des offres respectées, il revient à la commission de passation d'intervenir.

    B- Une exigence d'intégrité dans l'attribution des marchés

    La phase d'attribution des marchés marque la fin de la procédure de passation des marchés. Pour ce faire, elle doit se dérouler en toute transparence notamment en ce qui concerne les travaux de la commission. L'attribution d'un marché public est d'autant plus délicate qu'elle est l'aboutissement des travaux relatifs à l'ouverture des plis et à l'évaluation des offres.

    66 L'autorité contractante doit s'abstenir de fournir de manière discriminatoire des informations susceptibles d'avantager certains candidats par rapport à d'autres ou de révéler aux autres candidats les solutions proposées ou d'autres informations confidentielles communiquées par un candidat, sans l'accord de celui-ci.

    67 Art. 75 al. 1 CMP Sénégal, L'Etat, les collectivités locales, les agences et autres organismes publics, les sociétés nationales et les sociétés anonymes à participation publique majoritaire peuvent mettre au concours, entre les hommes de l'art ou les entreprises qualifiées, l'établissement d'un projet, d'une fourniture ou d'un ouvrage, lorsque des motifs techniques, esthétiques ou financiers justifient des recherches particulières.

    68 La particularité ici se saisit d'abord à travers les primes, récompenses ou avantages qui sont alloués aux soumissionnaires les mieux classés ; ensuite, les projets primés deviennent tout ou partie propriété de l'autorité contractante, conformément à l'art. 26 CMP Togo relatif à la procédure d'appel d'offres avec concours.

    Au Sénégal, l'article 75, al.2 du CMP précise que l'appropriation par l'autorité contractante du projet se fait par achat à l'amiable ou après expertise d'une licence d'utilisation des brevets, dessins ou modèle qu'il contient.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 22

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    L'ouverture des plis est conditionnée par une réception préalable des offres. Celles-ci doivent être contenues dans une seule enveloppe contenant les renseignements relatifs à la candidature et la garantie d'offre requise, et, séparément, l'offre technique et l'offre financière69, sous réserve des dispositions spécifiques applicables aux marchés de prestations intellectuelles70.

    Pour les modes normaux de passation (appel d'offres ouvert), les offres faisant l'objet d'évaluation doivent être reçues aux lieux, dates et heures spécifiés dans l'avis d'appel d'offres conformément aux articles 67 et 54 des codes sénégalais et togolais des marchés publics. A cet effet, Le délai de réception des candidatures ou des offres ne sauraient être inférieur à trente (30) jours pour les marchés supérieurs aux seuils nationaux71. Il convient de rappeler que les offres reçues doivent être rangées dans un lieu sûr et des mesures doivent être prises pour s'assurer que leur contenu ne sera pas divulgué.

    Cependant, les exigences communautaires de transparence imposent que l'ouverture des plis se fasse par la commission en séance publique, à l'expiration du délai fixé dans l'avis et en présence des candidats ou de leurs représentants. A cet effet, le président de la commission vérifie que les enveloppes contenant les offres sont cachetées avant d'annoncer les soumissions reçues. Ensuite, il procède à l'ouverture de chaque pli et annonce à haute voix tous les détails utiles. Ce n'est qu'à la fin de cette dernière opération qu'une équipe technique est désignée, sur proposition du président de la commission des marchés, pour procéder à l'évaluation des offres. Cette commission est composée de représentants de l'autorité contractante et des membres des administrations concernées.

    L'évaluation des offres est une phase extrêmement délicate de la procédure de passation des marchés en raison des risques d'atteintes à la transparence qui peuvent l'affecter et au rang desquels figure l'épineuse question des conflits d'intérêt72. En effet, cette phase est celle qui débouche directement sur l'attribution provisoire des marchés et pour cela, les travaux qui s'y

    69 Art.56 de la directive n°O4 de l'UEMOA relatif à l'enveloppe contenant l'offre.

    70 Les marchés de prestations intellectuelles feront l'objet d'une analyse approfondie dans les parties à venir.

    71 Art.52 al.1 de la directive n° 04/2005/CM/UEMOA portant procédure de passation, d'exécution et de règlement des MP et DSP dans l'UEMOA, relatif aux délais de réception des offres.

    72 Il s'agit ici de la situation dans laquelle se retrouve un membre de la commission lorsqu'il se met à défendre les intérêts d'un soumissionnaire alors que l'évaluation et l'attribution doivent se faire de façon objective.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    déroulent doivent être empreints de clarté pour satisfaire aux exigences de transparence.

    Dans ce contexte, la commission des marchés va dans un premier temps procéder à un examen préliminaire73 conformément aux articles 68 et 56 des codes sénégalais et togolais des marchés publics et qui se soldera par la validation ou le rejet des offres74. Précisons ici que les offres anormalement basses peuvent aussi faire l'objet de rejet à ce stade de l'évaluation, si la commission estime que leur montant ne se justifie pas par une réalité économique. Mais les différentes législations reconnaissent aux soumissionnaires ayant fait ces offres, le droit de justifier le prix en cause.

    Dans un second temps, la commission procède à un examen détaillé75 des offres des soumissionnaires. En somme, il s'agit dans les deux cas (Sénégal et Togo) de procéder d'une part à une vérification de sorte à déterminer si l'offre prend en charge tous les paramètres et les variantes76 prévus dans le DAO ; et d'autres parts de procéder à un classement séparé des offres afin de les comparer, pour finalement déterminer l'offre évaluée la moins-disante. La vérification se fait uniquement sur la base des critères prédéfinis dans le DAO.

    Une fois les offres évaluées, la commission retient celle qui est conforme c'est-à-dire celle dont le candidat est reconnu avoir réuni les critères de qualification annoncés dans le DAO et évaluée la moins-disante. Toutefois, elle prend le soin d'aviser les candidats dont les offres n'ont pas été retenues et procède à la publication d'un avis d'attribution provisoire. Rappelons qu'à ce niveau,

    73 Cet examen préliminaire déterminera si les candidatures sont recevables et conformes aux exigences mentionnées dans le DAO.

    Au Togo, les offres reçues sont confiées à une sous-commission d'analyse désignée par la PRMP pour évaluation et classement des offres dans un délai de trente jours.

    74 Les offres non conformes sont rejetées soit parce qu'elles ont été déposées tardivement, soit pour un vice de forme, ou pour absence de la garantie de soumission.

    75 Cet examen a la particularité de porter sur des critères spécifiques mentionnés dans le DAO tels que la qualité du matériel, les délais d'exécution, les coûts de fonctionnement et d'entretien, les modalités de garantie ou les valeurs techniques des prestations.

    76 Les variantes constituent des modifications, à l'initiative des candidats, de spécifications prévues dans la solution de base décrite dans les documents de consultation. La variante permet aux candidats de proposer aux pouvoirs adjudicateurs, une solution ou des moyens pour effectuer les prestations du marché autres que ceux fixés dans le cahier des charges. Il s'agit d'une offre alternative. Leur introduction rend plus complexe l'analyse des offres. Les variantes diffèrent de l'option en ce sens qu'elles sont à l'initiative du candidat, alors que l'option est à l'initiative de l'autorité contractante. www.marchespublics.fr, consulté le 08/07/2016

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 23

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    un délai de recours de quinze (15) jours court à partir de la publication de cet avis77.

    Au Sénégal comme au Togo, Les propositions d'attribution validées par la commission de contrôle des marchés de l'autorité contractante font l'objet d'un procès-verbal, dénommé procès-verbal d'attribution provisoire78 qui, étant établi selon un document modèle, doit faire l'objet d'une publication, après validation de la DCMP. Cependant, si la DCMP émet des recommandations qui ne satisfont pas l'autorité contractante, celle-ci peut saisir le Comité de Règlement des Différends de l'ARMP dans un délai de trois jours ouvrable suivant la recommandation79. Celui-ci statue dans les sept jours qui suivent la réception de la demande.

    Toutefois, dès que la proposition d'attribution est approuvée, les candidats dont les offres n'ont pas été retenues sont immédiatement informés du rejet de leurs offres ; dans la foulée, il leur est restitué la garantie de soumission. C'est seulement à cette dernière étape qu'est publié l'avis d'attribution provisoire.

    Aussi doit-on ajouter que l'autorité contractante peut au bout du compte ne plus attribuer le marché. Cette situation peut résulter d'un appel d'offres infructueux80 ou sans suite81. Mais avant de prendre une telle décision, l'autorité contractante doit au préalable consulter la DCMP.

    Toutefois, les conditions relatives à la transparence exigent que la décision déclarant l'appel d'offres infructueux82 soit publiée par l'autorité contractante par insertion dans le Journal des

    77 Art.85 CMP Sénégal relatif à la signature, approbation, notification et publication de l'avis d'attribution définitive.

    78 Le procès-verbal d'attribution provisoire mentionne le ou les soumissionnaire(s) retenu(s), le nom des soumissionnaires exclus et les motifs de leur rejet, et le cas échéant les motifs de rejet des offres jugées anormalement basses

    79 Art.84 al.4 du CMP Sénégal relatif à la décision d'attribution des marchés.

    80 Art.64 du CMP Sénégal, L'appel d'offres est infructueux lorsqu'aucune offre n'a été remise à l'expiration de la date limite de dépôt des offres ou lorsqu'il n'a été proposé que des offres irrecevables ou non conformes, bien que toutes les conditions devant assurer le succès de l'appel à la concurrence aient été remplies ; Art.55 CMP Togo.

    81 Art.65 CMP Sénégal, L'autorité contractante peut après consultation de la DCMP, ne pas donner suite à un appel d'offres pour des motifs d'intérêt général, tels que la disparition du besoin qui était à l'origine de la procédure ou des montants d'offres trop élevés par rapport à la valeur estimée du marché.

    82 Lorsqu'un appel d'offres est déclaré infructueux, il est alors procédé, soit à un nouvel appel d'offres, soit à une consultation d'au moins trois entrepreneurs, fournisseurs ou prestataires, et dans ce dernier cas après autorisation de la DCMP. Le lancement d'un nouvel appel d'offres doit être précédé d'une évaluation du DAO ou de consultation pour s'assurer qu'il n'y a pas de modifications ou clarifications à apporter, ou encore dans le but de redéfinir les

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 24

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 25

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Marchés publics ou dans toute autre publication habilitée.

    En définitive, la transparence assure une part significative de clarté et d'intégrité dans les procédures normales de passation des marchés publics. Cependant, si la tendance actuelle et principielle en passation des MP au Sénégal et au Togo est de se calquer sur l'appel d'offres ouvert ou ses formes dérivées, cette modernité communautaire ne renie pas pour autant le recours à des modes variables, dérogatoires et spécifiques strictement contrôlés par la DCMP. Ces modes de passation demeurent eux aussi soumis aux exigences de transparence.

    Section 2 : Une transparence quant aux procédures particulières

    Les procédures particulières de passation sont soit celles qui n'admettent pas des méthodes concurrentielles pour des raisons légales, soit l'admettent mais à une échelle réduite ou encore font recours à des procédés spécifiques notamment dans l'évaluation des propositions et la désignation de l'attributaire. La particularité de ces procédures n'échappe pas aux exigences de transparence. Nous aborderons à cet effet, dans un premier temps, la redéfinition des procédures dérogatoires (paragraphe1) et dans un second temps, la transparence des procédures spécifiques (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : La redéfinition des procédures dérogatoires

    Les procédures dérogatoires sont dans les codes sénégalais togolais des MP, la procédure de l'appel d'offres restreint et l'entente directe. Leur redéfinition se traduira par un réaménagement de l'AOR (A), puis par un recadrage de l'entente directe (B).

    A- Un réaménagement de l'appel d'offres restreint

    L'appel d'offres est dit restreint lorsque seuls peuvent remettre des offres, les candidats que

    besoins de l'autorité contractante.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    l'autorité contractante a décidé de consulter83. Cette sélection s'effectue en principe sur la base de critères non-discriminatoires, liés à l'objet du marché. Ces critères doivent cependant être mentionnés dans le dossier d'appel d'offres ou dans la demande de proposition.

    Toutefois, il ne peut être recouru à la procédure de l'appel d'offres restreint que lorsque les biens, les travaux ou les services, de par leur nature spécialisée, ne sont disponibles qu'auprès d'un nombre limité de fournisseurs, d'entrepreneurs ou de prestataires de services. Dans ce cas, seuls les candidats susceptibles d'exécuter le marché concernés sont invités à déposer leurs offres.

    La nature particulière de ce mode de passation ne lui fait pas pour autant échapper aux exigences de transparence. Pour cela, le réaménagement de ce mode de passation impulsé depuis 2005 par la directive n°04 de l'UEMOA s'est imposé par le fruit d'une prise en compte dans les droits positifs sénégalais et togolais, des dispositions concernées notamment en termes de publicité et par ricochet de transparence. Tout comme l'appel d'offres ouvert et ses dérivées, l'appel d'offres restreint doit faire l'objet d'une publication dans un journal officiel ou sur une plateforme en ligne accréditée.

    Toutefois, il ne peut être procédé à l'appel d'offres restreint qu'après avis de la DCMP et ce, dans des cas bien définis par le législateur. Dans ce contexte et conformément à l'article 73 du CMP du Sénégal, on y recourt dans les situations qui ne sont pas du fait de l'autorité contractante à savoir les cas d'urgence simple84, mais qui imposent une action rapide, qui justifient la réduction des délais85 de réception des candidatures afin de prévenir un danger ou un retard préjudiciable à l'autorité contractante.

    Par ailleurs, il peut aussi être fait recours à l'appel d'offres restreint pour des marchés de travaux, fournitures ou services qui ne sont exécutés qu'à titre de recherche, d'essai d'expérimentation ou de mise au point et aussi des marchés que l'autorité contractante doit faire exécuter en lieu et place des titulaires défaillants, à leur frais et risques.

    83 Art. 73 CMP Sénégal, 23 CMP Togo relatif à la définition de l'appel d'offres restreint.

    84 Pour des raisons de transparence, l'urgence simple doit être justifiée ; elle permet de réduire les délais de consultation tout en maintenant les obligations d'informations.

    85 Selon le CMP Sénégal, ce délai est de 15 jours pour les marchés cités à titre d'exemple.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 26

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 27

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Enfin, la procédure d'appel d'offres restreint s'applique aux marchés qui ont donné lieu à un appel d'offres infructueux. Rappelons qu'un appel d'offres est dit infructueux lorsqu'à la date limite de dépôt des dossiers, aucune offre n'a été remise ou que les offres déposées sont irrecevables.

    Quant à la situation d'urgence citée plus haut, elle est doit présenter une certaine particularité, et sur ce dernier aspect, le code sénégalais a eu le mérite d'énumérer, contrairement au code togolais, les conditions dans lesquelles l'urgence peut être invoquée. En effet, l'urgence invoquée pour procéder à l'appel d'offres restreint doit répondre à certaines conditions. Ainsi dans un premier temps, la situation d'urgence doit être réelle, ce qui exclut la volonté d'accélérer la procédure pour des raisons de convenance de l'autorité contractante ou d'un tiers ; dans un second temps, l'événement concerné doit être imprévisible et la situation d'urgence, qui du reste doit être constatée par la DCMP, ne doit pas résulter du fait de l'autorité contractante. A cet effet, les candidats ont un délai réduit86 pour déposer leurs offres.

    Par exemple, la réalisation urgente de travaux d'évacuation des eaux avant l'hivernage ne constitue pas une situation d'urgence avérée dès lors que cet événement est prévisible et que la réalisation tardive de travaux résulte du manque de prévoyance de l'autorité contractante. Mais toutefois, comme l'exige la transparence, le nombre de candidats87 admis à soumissionner doit assurer une concurrence réelle. Comme en matière d'appel d'offres ouvert on met en oeuvre les procédés compétitifs entre les candidats sélectionnés pour ne retenir que celui qui aura convaincu l'autorité contractante par la conformité de son offre technique, et l'avantage que représente son offre financière pour l'autorité contractante.

    Sur cet aspect, notons que les capacités techniques sont des moyens matériels et humains dont dispose un candidat à un marché public. Elles sont appréciées quantitativement et qualitativement. En vertu de cela, il peut être demandé aux candidats des certificats établissant des livraisons ou des prestations de service qu'ils ont au préalable effectuées, au profit d'une autre entité publique ou privée. Aussi peuvent être demandés non seulement des certificats de

    86 Ce délai réduit est de 10 jours au moins au Sénégal (Cf. article 63 alinéas 2 CMP), et de 15 jours au minimum au Togo (article 44 CMP).

    87 Pour l'effectivité de la concurrence, l'appel d'offres restreint met aux prises trois (3) candidats au moins.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    bonne exécution pour les travaux, mais également une description de l'équipement technique. L'évaluation par la commission se fera ensuite sur le montant de l'offre financière et c'est dans cette condition que le marché sera attribué au candidat ayant justifié d'une capacité technique conforme et d'une offre financière avantageuse pour l'autorité contractante.

    En définitive, il est évident que le recours à la procédure d'appel d'offres restreint ne repose pas sur une base hasardeuse. Il doit être nécessité par une situation particulière qui à défaut de convaincre la DCMP entrainera simplement le rejet du recours à cette procédure dérogatoire. Du réaménagement concerté de l'AOR, on débouchera dans la suite de notre analyse sur l'aspect relatif à l'entente directe.

    B- Un recadrage de l'entente directe

    Un marché est dit de « gré à gré » ou par « entente directe »88 lorsqu'il est passé sans appel d'offres, après autorisation préalable de la DCMP confirmant que les conditions légales sont réunies. En d'autres termes, un marché est passé par entente directe lorsque l'autorité contractante engage directement les discussions avec un ou plusieurs opérateurs économiques et attribue le marché au candidat qu'elle a retenu.

    A l'analyse d'une telle approche, on remarque que l'entente directe est une procédure de passation qui doit sa particularité au fait qu'elle passe outre les procédés compétitifs qui pourtant sont exigés pour les autres méthodes de passation. L'entente directe a pendant longtemps été utilisée dans le secteur des marchés publics tant sénégalais que togolais, des décennies durant. Suite aux réformes instituées par la directive n°04 de l'UEMOA, le Sénégal et le Togo ont strictement encadré et de façon unanime, le recours à l'entente directe dans la passation des marchés.

    Dans la conception générale, on est bien tenté de penser que cette procédure particulière de passation occulte toute idée de transparence. Mais en réalité, elle n'en constitue pas toujours une entorse. Pour autant, malgré leur connotation péjorative et nonobstant le fait qu'ils sont décriés

    88 Art.76 CMP Sénégal, Les marchés sont passés par entente directe lorsque l'autorité contractante engage directement les discussions avec un ou plusieurs opérateurs économiques et attribue le marché au candidat qu'elle a retenu.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 28

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 29

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    aux yeux du commun des citoyens, les marchés passés par entente directe n'en demeurent pas moins légitimés par chacun des droits positifs de notre cadre d'étude. Pour cette raison, des circonstances particulières justifient le recours à l'entente directe.

    En effet, les codes sénégalais et togolais des MP ont pris en compte des circonstances exceptionnelles auxquelles les autorités contractantes peuvent être confrontées et dont certaines justifieraient le recours à l'entente directe. Il s'agit essentiellement de l'urgence impérieuse, des marchés d'exclusivité89, des marchés complémentaires, et des marchés secret défense.

    Pour rappel, l'urgence impérieuse résulte de circonstances imprévisibles pour l'autorité contractante ; ces circonstances n'étant pas compatibles avec les délais et règles de forme exigés par la procédure d'appel d'offres ouvert ou restreint, la dérogation qui s'applique à elles permet de recourir au marché négocié, sans publicité et sans mise en concurrence. Il s'agit là du marché par entente directe, étiqueté de « gré à gré ». Eu égard à leur nature, il convient de se référer aux articles 76 et 35 des codes sénégalais et togolais des marchés publics, qui fixent certaines conditions de recours à cette procédure. Mais il faut préciser que dans tous les cas de marchés par entente directe, une autorisation ou un avis de la DCMP est nécessaire.

    Sous cet angle, l'autorisation de la DCMP concerne les marchés destinés à répondre à des besoins qui, pour des raisons tenant à la détention d'un droit d'exclusivité, ne peuvent être satisfaits que par un contractant déterminé. Aussi convient-il d'ajouter que les fournitures, services ou travaux objets dudit marché doivent constituer un complément à ceux ayant fait l'objet d'un premier marché, exécuté par le même titulaire dans le cadre d'un marché complémentaire90. Toutefois, la condition dans ce cas est que le marché ait été préalablement passé selon la procédure d'appel d'offres. Du reste, le nouveau marché doit porter sur des fournitures, des services ou travaux ne figurant pas dans le marché initialement conclu, ne pouvant en être techniquement ou économiquement séparés, mais qui sont devenus nécessaires à la suite d'une circonstance imprévue et extérieure aux parties. Rappelons ici que le montant cumulé des marchés complémentaires ne doit pas dépasser un tiers du montant du marché

    89 Le service recherché à travers ce genre de marché est ne peut être réalisé que par une seule entreprise qui en a le monopole.

    90 Dans ce type de marché, on fait appel à une entreprise pour assurer d'autres travaux sur l'oeuvre déjà réalisée.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    principal.

    Quant à l'avis de la DCMP, il ne peut être sollicité que pour les marchés considérés comme secrets ou dont l'exécution nécessite des mesures d'accompagnement particulières de sécurité comme les marchés de la défense ou de la sécurité nationale.

    La seconde catégorie des marchés concernés, renvoie à ceux destinés à répondre à des besoins nés d'une situation d'urgence impérieuse, résultant des circonstances imprévisible, irrésistibles et extérieurs à l'autorité contractante, incompatibles pour les délais requis pour l'appel d'offres ouvert ou restreint.

    Rappelons qu'au Togo, la DNCMP veille à ce que sur chaque exercice budgétaire, le montant additionné des marchés passés par entente directe ne dépasse pas 10% du montant total des MP passés par ladite autorité. Mais dans l'hypothèse où une autorité contractante solliciterait auprès de la direction nationale de contrôle des marchés publics une autorisation de passer un marché de gré à gré, alors que le seuil des dix (10) pour cent serait franchi, la décision favorable de cette direction sera soumise, avant l'initiation de la procédure, à l'autorité de régulation qui doit la valider91.

    Si aujourd'hui la nécessité se fait sentir de recourir de moins en moins à ce mode de passation des marchés, il apparait opportun de préciser qu'au Sénégal et au Togo, le taux d'entente directe il y a quelques années était très encore très élevé, ce qui manifestement était un abus. Toutefois cette estimation, est depuis 2015 descendue sous la barre des vingt pourcents.

    En tout état de cause, l'entente directe ne doit pas méconnaitre certains principes comme la détention d'un droit d'exclusivité ou le principe du marché complémentaire pour ne citer que ceux-là, et qui sont les garde-fous lorsqu'ils sont observés, d'une transparence garantissant la bonne gouvernance.

    En définitive, les modes dérogatoires de passation des marchés comme l'appel d'offres restreint et l'entente directe ne supposent pas que soit occultées les règles de transparence lorsqu'une autorité contractante en fait recours. Ils demeurent malgré leur caractère particulier soumis à des

    91 Art.36 al.4 CMP Togo, relatif à l'autorisation préalable des marchés passés par entente directe.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 30

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    exigences d'intégrité et de clarté, comme le sont d'ailleurs les procédures spécifiques de passation des marchés.

    Paragraphe 2 : La transparence des procédures spécifiques

    Les procédures spécifiques sont des procédés auxquels recourt l'autorité contractante lorsque les marchés à passer ne présentent pas les mêmes caractéristiques que celles exigées par l'un des modes de passation cités plus haut. Ces procédures concernent d'une part les marchés de prestations intellectuelles -PI- qui d'ailleurs affichent une certaine particularité (A), et d'autre part les demandes de renseignement et de prix92 et les marchés passés suite à une offre spontanée (B).

    A- Une particularité quant aux prestations intellectuelles

    Les marchés de prestations intellectuelles sont ceux dont les résultats ne sont pas quantifiables et qui sont basés sur le « know how »93. Ils ne se traduisent pas par un résultat physiquement mesurable ou apparent. Partant de ce constat, ils peuvent renvoyer à la réalisation d'études, les services de consultant, conception ou de conseil, les services de conseil ou études en informatique, les prestations d'ingénierie, de maîtrise d'oeuvre, de maîtrise d'ouvrage délégué, de conducteur d'opération, les prestations de conseil juridique, d'expertise comptable, d'expertise technique et de contrôle, de formation.

    Pour l'exécution de ces marchés, c'est le savoir-faire du consultant qui est primordial et non l'importance de ses moyens matériels ou de sa capacité financière. Du fait de ces caractéristiques, la procédure de sélection ne se fait pas par appel d'offres comme pour les procédures normales

    92 Selon l'article 78 alinéa 1, du CMP Sénégal l'autorité contractante peut recourir à la procédure de DRP pour les fournitures, travaux et service dont la valeur estimée est inférieure aux seuils requis pour les marchés à passer par appel d'offres. La DRP doit être utilisée conformément à la procédure fixée par arrêté du MEF.

    Pour des raisons de transparence, il est exigé que les marchés passés par une DRP soient conclus à travers des contrats écrits et publiés sur le site des marchés publics dès leur attribution.

    L'autorité contractante doit à cet effet communiquer à la DCMP, la liste des personnes consultées, le nom de l'attributaire, ainsi que la nature et le montant du marché.

    93 Terme anglophone désignant le « Savoir-faire ».

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 32

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    de passation mais plutôt par une procédure assez particulière appelée « Demande de propositions»94. En effet, conformément aux articles 80 du CMP Sénégal et 30 du CMP Togo, les demandes de propositions donnent lieu à une pré-sélection des candidats admis à présenter une offre, basée sur des impératifs de transparence. Une lecture attentive de ces dispositions nous instruit à suffisance sur les modalités d'attribution de ces types de marchés dans ces deux Etats.

    Sous ce rapport, une mise en concurrence des candidats présélectionnés est nécessaire. Partant de là, il importe d'abord que la liste des candidats soit arrêtée suite un appel public à manifestation d'intérêts dans les conditions et délais dans lesquelles sont tenues les autorités contractantes. Ensuite il convient de préciser que le délai minimum de réponse est de quinze (15) jours à compter de la date de publication de l'avis public à manifestation d'intérêts.

    Dès lors, les candidats sont sélectionnés par la commission des marchés compétente, en raison de leur aptitude à exécuter les prestations objet du marché et sont classés sur la base des critères publiés dans l'avis public à manifestation d'intérêt. L'autorité contractante adresse alors une demande de proposition à au moins trois des premiers candidats sélectionnés. A ce titre, ils reçoivent un dossier de consultation comprenant les termes de référence95, une lettre d'invitation indiquant les critères de sélection et leur mode d'application détaillé ainsi que le projet de marché. Après évaluation, le marché est attribué au candidat ayant fait la meilleure proposition.

    En ce qui concerne le dépôt des propositions, il se fait sous la forme d'une enveloppe unique contenant deux enveloppes distinctes et cachetées comportant respectivement l'offre technique et l'offre financière. La commission de passation des marchés de l'autorité contractante procède alors à l'ouverture des propositions à l'expiration de la date limite de dépôt. Pour ce faire, l'ouverture des propositions s'effectue en deux temps.

    Dans un premier temps, les propositions techniques sont ouvertes et évaluées conformément aux méthodes96 décrites par les textes en vigueur. Dans un deuxième temps, seuls les

    94 En matière de prestations intellectuelles, la demande de proposition (DP) est l'équivalent de ce qu'est le DAO pour les marchés de travaux, de fournitures ou de services courants.

    95 Les TDR contiennent les spécifications sur les marchés de prestation intellectuelle.

    96 Art. 80 CMP Sénégal et 31 CMP Togo relatifs aux dispositions spécifiques des marchés de prestations intellectuelles.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    soumissionnaires ayant présenté des propositions techniquement qualifiées et conformes, voient leurs propositions financières ouvertes. Les autres propositions financières sont retournées, sans être ouvertes, aux soumissionnaires non qualifiés. L'ouverture des propositions financières est publique et est effectuée en présence des soumissionnaires qualifiés invités à y participer. De l'ouverture des propositions, va découler leur évaluation sur fond de transparence.

    Pour préserver cette dernière et lutter contre les conflits d'intérêts, les codes sénégalais et togolais des MP exigent que l'évaluation des propositions se fasse en deux étapes ; la première consistant en une évaluation des propositions techniques, la seconde se rapportant aux propositions financières.

    Sous cet angle, il est procédé dans un premier temps à l'ouverture des propositions techniques. Elles sont évaluées sur la base de leur conformité aux Termes de référence conformément aux critères définis. Les Propositions financières restent cachetées et déposées en lieu sûr. Chaque proposition conforme se verra attribuer une note technique (NT). Notons qu'une proposition sera rejetée à ce stade si elle ne satisfait pas à des aspects importants de la DP, et particulièrement aux Termes de référence (TDR) ou n'atteint pas la note technique minimum spécifiée dans les Données particulières.

    A l'issue de l'évaluation des propositions techniques, l'Autorité contractante informera les Candidats des notes techniques obtenues par leurs Propositions. Dans la foulée, il sera notifié aux candidats dont les propositions n'ont pas obtenu la note minimale de qualité ou ayant été jugée non conforme à la DP et aux TDR que leurs propositions financières leur seront renvoyées sans être ouverte à l'issue du processus de sélection. Aux candidats dont la proposition technique est conforme à la note minimale de qualification, il leur est indiqué le lieu, la date et l'heure d'ouverture des propositions financières. Toutefois, La date d'ouverture des propositions financières doit être déterminée de manière à donner aux Candidats le temps suffisant pour assister à l'ouverture, s'ils choisissent d'y assister.

    Dans un deuxième temps, la commission des marchés de l'autorité contractante procède à l'évaluation des propositions financières des candidats dont les propositions techniques ont été validées. Cependant, l'évaluation des propositions et la désignation de l'attributaire s'effectuent

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 34

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    sur la base de plusieurs facteurs. Elles peuvent se faire au sens des articles 80 et 53 des codes togolais et sénégalais des MP soit sur la base de la qualité technique et le coût97 ; soit sur la base d'un budget prédéterminé98 ; soit sur la base de la meilleure proposition financière99 soumise par les candidats ayant obtenu une note technique minimum ; soit exclusivement sur la base de la qualité technique exclusivement100 ou soit selon la méthode de sélection basée sur la qualification101.

    Toutefois, en passant d'une méthode à une autre, un facteur déterminant qui fait office de leitmotiv doit être constamment gardé à vue. Il s'agit de l'objectivité dont doit faire preuve les membres de la commission dans leurs travaux afin d'éviter de tomber dans le vice du conflit d'intérêt qui inévitablement ouvre la voie au favoritisme102 et porte de ce fait une atteinte aux exigences de transparence.

    B- Un recours aux autres procédures spécifiques

    Les autres procédures spécifiques sont essentiellement les demandes de renseignements et de prix (DRP) et les offres spontanées. Les DRP ou encore demandes de cotation constituent une procédure spécifique à laquelle se réfère une autorité contractante pour les marchés de petits montants103 qui ne nécessitent pas le recours à une procédure par appel d'offres. Dans ce cas, vu qu'il s'agit d'une procédure simplifiée, les règles de publicité et de mise en concurrence ne sont

    97 La qualification sur la base de la qualité technique et le coût est le procédé principiel d'attribution des marchés de prestations intellectuelles. Elle suppose la recherche d'une note globale, qui se fait par l'addition des notes techniques et financières pondérées des propositions faites par les entreprises candidates. L'entreprise qui aura obtenu la meilleure note globale sera celle qui remportera le marché.

    98 Cette méthode consiste à attribuer le marché au candidat qui présente à la fois une offre technique conforme et une offre financière inférieure ou égale au budget-cible. Dans tous les cas, l'offre financière retenue ne saurait présenter la moindre exorbitance au regard de la limite budgétaire prévue.

    99 Cette méthode consiste à ne retenir que le candidat qui présente une offre technique conforme et une offre financière estimée la plus basse.

    100Ce procédé permet à la commission des marchés de ne prendre en compte que la meilleure note technique uniquement. Cette méthode n'est cependant utilisée que pour les marchés de prestations intellectuelles présentant une certaine complexité.

    101 Ici on est à la recherche d'un consultant ou d'un expert dont le seul critère de sélection est la qualification dans le domaine concerné. A cet effet, l'évaluation se fait sur la comparaison des CV des candidats

    102 Le favoritisme est une pratique qui dans le cadre des marchés publics, consiste à accorder des faveurs injustes ou illégales à un candidat.

    103 Il s'agit des marchés inférieurs aux seuils fixés par les articles 53 et 5 des CMP du Sénégal et du Togo ;

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 35

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    pas aussi rigides que celles imposées pour la passation des marchés dont le montant est au-dessus des seuils des procédures formalisées.

    Toutefois, le recours aux DRP104 doit être fait conformément à une procédure fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances. A cet effet au Sénégal, l'arrêté du 07 janvier 2015 relatif aux modalités de mise en oeuvre des procédures de DRP en application de l'article 78 du CMP distingue trois catégories de DRP ; il s'agit de la DRP simple dispensée d'une forme écrite, de la DRP à compétition restreinte et de la DRP à compétition ouverte.

    De l'analyse de la DRP simple dispensée d'une forme écrite, il ressort qu'il s'agit d'une procédure qui ne nécessite pas de publicité, autant qu'elle ne requiert aucun formalisme. De ce fait, en dessous d'un certain montant105, l'autorité contractante peut directement s'adresser à au moins 3 entrepreneurs fournisseurs ou prestataires à travers une demande de cotation et qui seront consultés selon les modalités laissées à sa libre appréciation. Toutefois, les propositions financières sont soumises sous forme de facture pro forma, conformément aux fournitures et prestations exigées. L'attribution du marché se fait conformément aux mêmes règles de transparence106 qui régissent les procédures formalisées.

    En ce qui concerne la DRP à compétition restreinte, l'autorité contractante s'y réfère lorsqu'elle veut passer des marchés dont les montants approximatifs se situent à un certain niveau107. A cet effet, l'autorité contractante choisit des modalités de publicité adaptées au montant et à la nature du marché ; ensuite, elle sollicite simultanément, par écrit, des prix auprès d'au moins 5 entreprises choisies en priorité parmi les prestataires ayant manifesté leur intérêt pour les marchés concernés. A ce niveau l'autorité contractante doit s'assurer que les candidats sont

    104 Selon le rapport ARMP Sénégal de 2014, la DRP ont représenté 81,07% en nombre et 11,38% en valeur des marchés.

    Quant au Togo, le recours aux DRP est selon le rapport de l'ARMP sur les marchés conclus en 2015, de 28% en termes de valeur.

    105 Travaux d'un montant estimatif inférieur à 5 millions de francs TTC ; prestations intellectuelles d'un montant estimatif inférieur à francs TTC ; fournitures ou services d'un montant estimatif inférieur à 3 millions de francs TTC.

    106 L'attribution se fait en faveur du candidat dont l'offre technique est évaluée conforme et dont la proposition financière est évaluée la moins-disante.

    107 Il s'agit des marchés dont les montants estimés sont inférieurs à 25 millions de francs CFA pour les travaux ; 15 millions de francs CFA pour les services courants et fournitures et 25 millions pour les prestations intellectuelles.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 36

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    intéressés par la procédure et ont à cet effet la capacité d'exécuter le marché108. Une fois les formalités relatives au dépôt des offres et à leur évaluation observées, le marché est attribué au candidat ayant présenté l'offre techniquement conforme et évaluée la moins-disante. Pour respecter les exigences de publicité conférant aux candidats évincés un droit de recours, vecteur de transparence, l'autorité contractante est tenue d'informer ceux dont l'offre n'a pas été retenue, après avoir rédigé pour le compte de celui qui a remporté le marché, le procès-verbal d'attribution.

    Enfin on distingue la procédure de DRP à compétition ouverte. Par cette procédure, l'autorité contractante lance un avis public d'appel à la concurrence dont la date de publication fait courir le délai109 de dépôt des offres. Tout comme les procédures citées préalablement, la procédure de DRP à compétition ouverte intervient au regard du montant110 et de la nature du marché concerné. L'attribution du marché se fait par la commission de passation des marchés dans un délai maximum de 15 jours dans le respect strict de l'intégrité. Les modalités d'information du candidat retenu et de ceux évincés demeurent de mise. Ceux qui s'estiment lésés doivent préalablement à un recours contentieux111, saisir la PRMP d'un recours gracieux par une notification écrite112. Cette dernière est tenue d'y donner suite dans un délai de deux jours au-delà duquel un défaut de réponse serait constitutif d'un rejet du recours gracieux.

    Somme toute, il faut admettre que le recours aux DRP au Sénégal a connu à partir de 2013, une réelle amélioration par rapport à la préparation des dossiers, à l'invitation d'au moins 5 candidats, à l'implication de la commission des marchés et au choix pour l'essentiel du candidat

    108 Les marchés concernés donnent lieu à des contrats écrits de forme libre.

    109 Le délai de dépôt des offres pour la DRP à compétition ouverte est de 15 jours calendaires.

    110 Montant estimé inférieur à 70 millions de francs CFA et supérieur ou égal à 25 millions de francs CFA pour les travaux ; Montant estimé inférieur à 50 millions de francs CFA et supérieur ou égal à 15 millions de francs CFA pour les fournitures et services courants ; Montant estimé inférieur à 50 millions de francs CFA et supérieurs ou égal à 25 millions de francs CFA.

    111 En tout état de cause, ce recours doit impérativement se rapporter à une violation caractérisée de la règlementation des marchés publics et doit être exercé dans un délai de 3 jours francs et ouvrés, à compter de la publication de l'avis d'attribution provisoire du marché, de l'avis d'appel à la concurrence ou de la communication du dossier d'appel à la concurrence.

    112 Article 6, al. 1 arrêté relatif aux modalités de mise en oeuvre des procédures de DRP, « La notification écrite indique les références de la procédure de passation du marché et expose les motifs de réclamation du requérant par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou déposée contre récépissé ».

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    moins-disant et qualifié.

    Au Togo, la procédure des DRP n'est pas formellement prévue par les textes en vigueur113. En réalité, cette pratique s'inscrit dans le cadre de la procédure restreinte dénommée « demande de cotation », prévue par les textes 114. Les DRP constituent une mesure pratique préconisée par la DNCMP pour alléger les procédures d'acquisition dont les montants sont inférieurs à 3 millions de francs CFA. Au-delà de ce montant, est alors appliquée la procédure de demande de cotations qui s'applique aux procédures d'acquisition dont le montant est inférieur à 15 millions, mais supérieur à 3 millions.

    En ce qui concerne les offres spontanées115, il convient de préciser avant tout et dans une approche définitoire qu'elles constituent une procédure récemment consacrée et par laquelle une entreprise candidate présente une offre pour répondre à un besoin qui n'avait pas été identifié lors de la phase préalable d'appel d'offres par l'autorité contractante. Cette méthode de passation passe ainsi pour une « échappatoire» ou mieux une exception juridiquement admise au principe qui voudrait que soient déclarés nuls tous les marchés ne figurant pas dans le plan de passation des marchés. Cependant, le recours aux offres spontanées n'échappe pas aux principes fondamentaux régis par la transparence.

    Dès lors, il convient de se pencher sur la manière dont on doit recourir à ce procédé spécifique de passation dans les limites d'une utilisation normale pour éviter tout abus. A cet effet, il faut préciser que les offres spontanées ne permettent pas toujours à l'autorité contractante de passer directement le marché avec les entreprises qui en sont à l'origine. Si la personne publique souhaite donner suite à un tel projet, elle doit organiser la mise en concurrence de tous les opérateurs économiques potentiellement intéressés par sa mise en oeuvre, offrant ainsi en conformité avec l'article 81 alinéa 2 du CMP Sénégal, toutes les garanties d'impartialité de sélection, mais sous réserve des marchés qui dérogent totalement au jeu de la concurrence.

    Toutefois, le recours à la négociation directe avec une entreprise présentant une offre spontanée

    113 Précisons que depuis un moment, toutes ces procédures sont en train d'être revues dans le cadre des activités de relecture des textes suite aux nouvelles mesures adoptées par la Commission de l'UEMOA en 2014.

    114 Cf. les articles 16 du CMP Togo et 12 du décret n° 2011-059/PR du 04 mai 2011 portant seuils de passation, de publication, de contrôle et d'approbation des MP au Togo.

    115 Cf. 81 du CMP Sénégal.

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 37

    Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 38

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    ne peut se faire que sur avis de la DCMP sous certaines conditions cumulatives. A cet effet, le montant estimatif du marché concerné doit être au moins égal à 50 milliards de francs CFA, intégralement financé par l'entreprise mais conformément aux règles d'endettement du Sénégal. En outre, si l'entreprise est de droit non communautaire, elle doit s'engager à sous-traiter aux nationaux, une part de marché qui ne peut être inférieur à 10% du montant total. Enfin, comme dernière condition, l'entreprise doit définir le cas échéant, un schéma pouvant assurer un transfert de compétences et de connaissances.

    Par ailleurs, l'autorité contractante ne peut recourir à la procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence que dans les hypothèses expressément prévues par le code, notamment lorsque l'offre spontanée s'appuie sur une technologie particulière que seule l'entreprise détient ou maîtrise et qu'aucune alternative n'existe pour satisfaire le besoin de l'acheteur.

    Toutefois, dans le cadre d'une mise en concurrence, l'autorité contractante doit éviter tout favoritisme à l'égard d'une des entreprises candidates. Dans cette logique, il ne doit être porté atteinte à l'égalité des candidats en reprenant dans les cahiers des charges, les indications techniques directement inspirées de celles fournies par l'initiateur du projet ou en diffusant des informations techniques protégées par le secret des affaires. En ce qui concerne le droit positif togolais, le code des marchés publics n'a jusqu'à présent pas prévu de dispositions relatives aux offres spontanées.

    En définitive, les règles de transparence sont de mise à tous les niveaux de la procédure de passation. Le respect de ces règles que consacrent les textes de l'UEMOA, transposés en droit sénégalais et togolais, est conforté par un mécanisme de contrôle qui n'échappe pas au principe de transparence.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 39

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    CHAPITRE II : GARANTIE D'UNE TRANSPARENCE DANS

    LES MECANISMES DE CONTROLE

    Qu'il s'agisse des procédures normales ou des procédures particulières, il est indispensable que les pouvoirs publics portent une attention singulière sur leur déroulement. Dès lors, ces derniers exercent une série de contrôles pour s'assurer de la conformité de ces procédures au regard des prescrits communautaires et aussi des lois et règlements.

    Dans ce contexte, l'efficacité du contrôle des procédures de passation des marchés publics est assurée par un contrôle administratif ambivalent (section 1) et un contrôle juridictionnel indispensable (section 2).

    Section 1 : Un contrôle administratif ambivalent

    Le contrôle administratif est celui opéré par les autorités publiques directement reliées à l'Etat ou à l'autorité contractante, ou encore celles relevant d'instances administratives indépendantes. Il s'agira essentiellement pour cette partie de notre travail d'évoquer les aspects relatifs au contrôle a priori (paragraphe 1) et ceux tournant autour du contrôle a posteriori (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : La mise en place d'un contrôle a priori

    Le respect du bon déroulement de la procédure de passation des marchés publics est assuré dans le cadre du contrôle a priori par des organes désignés à cet effet. Au-delà de l'aspect étendu de ce contrôle (A), nous allons démontrer que lorsqu'il est effectif, le contrôle a priori, constitue un mécanisme de transparence (B).

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 40

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    A- Un contrôle étendu

    Du premier chapitre de la directive n°05 UEMOA116 du 9 décembre 2005, il ressort que les Etats membres s'engagent à mettre en place des entités administratives centrales déconcentrées, ainsi que décentralisées de contrôle des marchés publics. Dans les deux pôles géographiques sur lesquels porte notre étude, le droit positif reconnait l'existence d'un contrôle a priori de la passation des marchés publics à partir d'un certain seuil117.

    Conformément à l'article 141 du code sénégalais des marchés publics, le contrôle a priori de la passation des marchés publics est assuré par la direction chargée du contrôle des marchés publics. Au Togo, il est régi par les dispositions de l'article 11 du code des marchés publics et est assuré par la Direction Nationale du Contrôle des Marchés Publics (DNCMP). C'est l'occasion de rappeler que le contrôle a priori s'exerce à différents niveaux du processus de passation.

    En effet, le contrôle de la DCMP commence au Sénégal comme au Togo, au moment de l'élaboration du plan de passation des marchés jusqu'à la revue juridique avant signature du contrat. Dans ce contexte, les nombreuses attributions de la DCMP peuvent être regroupées en une trilogie fonctionnelle118.

    En premier lieu, la DCMP au Sénégal et au Togo, a pour rôle d'assurer le contrôle a priori de la passation des marchés publics. Partant de ce constat, elle est chargée d'émettre non seulement un avis sur les PPM élaborés par les autorités contractantes, mais aussi un avis de non objection (ANO) sur les dossiers d'appel d'offres avant le lancement de l'appel à la concurrence et la publication correspondante. La direction chargée du contrôle des MP dans ses attributions fondamentales, émet également un avis de non objection sur le rapport d'analyse comparative des offres et propositions et le procès-verbal d'attribution provisoire du marché.

    116 Cf. article 4 de la directive 05, relatif aux « Fonctions et mécanismes de contrôle des marchés publics et délégations de service public ».

    117 Arrêté n°011580 fixant les seuils de contrôle a priori des dossiers de passation des marchés publics au Sénégal.

    118 Décret du 25 avril 2007 relatif au rôle de la direction centrale des marchés publics du Sénégal.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Par ailleurs, elle doit procéder à un examen administratif, juridique et technique du dossier de marché avant son approbation et au besoin adresse à l'autorité contractante toute demande d'éclaircissement, de modification de nature à garantir la conformité du marché avec le dossier d'appel d'offres et la réglementation en vigueur.

    En deuxième lieu, la DCMP joue un rôle fondamental en ce qui concerne les marchés revêtant un caractère assez particulier. En ce sens, elle accorde les autorisations et dérogations nécessaires à la demande des autorités contractantes lorsqu'elles sont prévues par la réglementation en vigueur. Ces dérogations concernent essentiellement les procédures de concurrence restreinte et l'entente directe.

    En dernier lieu, la DCMP assure en relation avec l'organe chargé de la régulation des marchés publics, la formation, l'information et le conseil de l'ensemble des acteurs de la commande publique sur la réglementation et les procédures applicables, tout en contribuant, en relation avec l'organe chargé de la régulation des marchés publics, à la collecte et à l'analyse des données ainsi qu'à l'établissement des statistiques sur les marchés publics.

    Notons cependant que le contrôle a priori, bien qu'étant assuré pour l'essentiel par la DCMP, n'exclut pas pour autant celui opéré par les organes de contrôle inhérents à l'autorité contractante. A cet effet, le CMP du Sénégal précise119 que les marchés qui n'ont pas atteint les seuils de revue de la Direction chargée du contrôle des MP sont examinés par la cellule de passation des marchés publics de l'autorité contractante dans les conditions fixées par arrêté du Ministre chargé des finances. Sur ce dernier aspect relatif au contrôle interne à priori assuré par la cellule de passation, il convient de mettre en lumière quelques-unes des prérogatives qu'elle exerce pour un regain de transparence.

    A ce propos, au sein de chaque AC, existe une cellule de passation des MP qui prend généralement l'aspect d'une structure de conseil. Elle s'assure que les dossiers d'appel d'offres sont constitués le mieux possible et que le processus d'attribution des marchés se déroule conformément à la règlementation. C'est également la cellule de passation qui élabore le plan de passation de l'autorité contractante dont elle relève et qui veille au bon fonctionnement de la

    119 Cf. avant dernier alinéa de l'article 141du CMP Sénégal.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 41

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    commission des marchés publics.

    En ce qui concerne le Togo, une particularité en rapport avec le contrôle interne a priori doit être relevée. En effet, depuis la loi n°2009-013 du 30 juin 2009 relative aux marches publics et délégations de service public jusqu'au décret N° 2011-059 / PR du 04 mai 2011 portant définition des seuils de passation, de publication, de contrôle et d'approbation des marchés publics, un certain nombre de missions sont confiées à une structure nouvelle dénommée « Commission de Contrôle des Marchés Publics120 » (CCMP), distincte de la commission de passation des marchés et qui, au regard de ses attributions équivaut à ce que le droit positif sénégalais désigne par « cellule de passation des marchés ». Cet organe, placé sous la responsabilité de la PRMP, joue un rôle central dans le contrôle de régularité des marchés passés par les autorités contractantes depuis la phase de planification jusqu'à l'attribution du marché lorsque leur montant n'atteint pas le seuil de compétence de la DNCMP.

    Dès lors, le contrôle interne a priori de la CCMP s'effectue à plusieurs niveaux de la passation. Pour cette raison, l'autorisation préalable par la DNCMP de certains marchés par entente directe se fait sur la base d'un rapport spécial validé par la CCMP121. En ce qui concerne les cas d'appel d'offres infructueux, c'est la CCMP de l'autorité contractante, qui, en l'absence d'offres ou en cas de non-conformité de propositions au DAO, émet un avis sur la question. C'est à partir de cet avis que la commission de passation des marchés déclare l'appel d'offres infructueux122. En outre, conformément à l'article 56 du CMP relatif à la procédure d'évaluation des offres, c'est à la CCMP que sont soumis les rapports d'analyse de la sous-commission de passation et c'est elle qui valide les propositions d'attribution des marchés123.

    Au Togo en définitive, tout dossier qui doit être soumis à un contrôle a priori de la DNCMP doit

    120 Art. 1 CMP Togo, La CCMP est une structure constituée auprès de l'autorité contractante chargée du contrôle de la régularité de la procédure de passation du marché public ou de la délégation de service public. Art. 8 CMP Togo, la CCMP est créée et placée auprès de l'autorité contractante et placée sous la responsabilité de la personne responsable des marchés publics ; elle est chargée du contrôle de la régularité de la procédure de passation des marchés publics et délégations de service public.

    121 Art.36 CMP Togo relatif à l'autorisation préalable.

    122 Art.55 CMP Togo relatif à l'appel d'offres infructueux.

    123 Art.61 CMP Togo, C'est sous réserve de l'approbation de la CCMP d l'autorité contractante que la commission de passation des marchés déclare attributaire provisoire, le soumissionnaire dont l'offre est conforme aux prescriptions du descriptif technique et qui présente l'offre de prix la moins « disante ».

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 42

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    passer par la CCMP qui a pour mission de contrôler la régularité de la procédure de passation des MP au sein de l'autorité contractante.

    Eu égard à toutes ces ramifications du contrôle a priori, on peut légitimement envisager l'efficacité d'un tel contrôle au regard du principe de transparence.

    B- Un mécanisme de transparence

    La mise en place d'un contrôle a priori interne ou externe de la passation des marchés vise avant tout à donner une acception pratique à la notion de transparence. Ce contrôle prend naissance à partir de l'élaboration du plan de passation des marchés et s'arrête à la revue juridique avant signature du contrat. Au cours des développements à venir, nous envisagerons tour à tour, les différents niveaux du processus de passation sur lesquels plane l'ombre du contrôle a priori dans sa dimension de transparence.

    Commençons d'abord notre analyse par le plan de passation des marchés qui apparait aujourd'hui dans un contexte de communautarisation des procédures comme un outil fondamental de contrôle à préserver. En effet, parmi les mécanismes instaurés pour que le processus de passation soit transparent, l'acte plus fort posé est sans doute l'élaboration et la publication d'un PPM qui peut être consulté par tout citoyen sur le portail des MP. Il s'agit d'une plateforme où tous les marchés qu'un ministère ou une autorité contractante compte passer pendant l'année, sont inscrits. L'intérêt ici est que tout marché qui n'y figure pas est nul, à l'exception des marchés classés secret défense et les marchés conclus en cas d'urgence impérieuse résultant de la force majeure.

    Sous ce rapport, Le PPM est adressé à la Direction qui a en charge le contrôle des MP qui le publie sur le portail des marchés publics. L'élaboration du PPM est basée sur des crédits déjà alloués mais précisons qu'il est tout de même révisable en cours d'année. En ce sens, il revient à l'autorité contractante de proposer sa révision et son envoi à la DCMP. Après vérification du respect de la réglementation, celle-ci procède à la mise à jour du PPM. C'est sur ce dernier point que le mécanisme de transparence dont le contrôle a priori est le porte étendard se manifeste une

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 43

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    fois de plus.

    En effet, c'est à travers cette vérification que la direction chargée du contrôle des marchés publics veille à ce qu'il n'y ait pas de fractionnement illégal124 des marchés afin de soustraire l'autorité contractante aux exigences de concurrence (AAO). La DCMP vérifie donc que l'autorité contractante a bien regroupé les marchés en fonction de leur nature.

    En outre, pour un marché de fourniture inférieur à quinze (15) millions, l'autorité contractante peut passer une DRP qui est une procédure simple. A cet effet, elle invite au minimum cinq (5) candidats capables d'exécuter le marché et attribue celui-ci au moins disant. Cette possibilité si elle n'est pas contrôlée, permet à l'AC de faire plusieurs DRP pour éviter d'initier un appel d'offres ouvert, ce qui a priori remet en cause les principes d'égalité de traitement des candidats, de liberté d'accès à la commande et surtout de transparence.

    C'est en ce sens que le contrôle a priori est essentiel. Pour cela, la DCMP vérifie au regard du plan de passation des marchés, les regroupements pour éviter les fractionnements frauduleux. Si au terme de ce processus, la DCMP estime que tout est en ordre, elle publie dans le portail le PPM de toutes les autorités contractantes avec des données fiables et précises sur les dates, le mode de passation et autres données sur le marché.

    Par ailleurs, concernant les autorisations accordées par la DCMP pour les marchés limitant la concurrence, on signale qu'il ne peut être procédé à un appel d'offres restreint qu'après avis de la DCMP pour la passation des marchés présentant un caractère d'urgence ou ceux ayant donné lieu à un appel d'offres infructueux ou ceux que l'autorité contractante doit faire exécuter en lieu et place des titulaires défaillants125.

    Soulignons dans la même logique que les marchés par entente directe n'échappent pas non plus au contrôle a priori. On note en ce sens que le contrôle a priori de la DCMP a permis de rejeter plusieurs demandes d'entente directe abusives. L'un des cas récents est celui de la SENELEC même si au final cette dernière a trouvé une échappatoire pour contourner le rejet de sa demande. Rappelons au passage qu'il ne peut être passé des marchés par entente directe qu'après avis de la

    124 Au Sénégal comme au Togo, les fractionnements peuvent contribuer à contourner les contrôles a priori du CMP.

    125 Art.73 CMP du Sénégal et 23 du CMP du Togo.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 44

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    DCMP dans le cadre du contrôle a priori et ces marchés donnent lieu à un compte rendu détaillé. Par ailleurs, la publication d'un avis d'attribution provisoire fait l'objet d'approbation de la DCMP et c'est à partir de l'aval donné par celle-ci que ledit avis est publié.

    Il appert au regard des éléments cités ci-haut que le contrôle a priori contribue à assainir le secteur de la passation des marchés publics en se fondant sur des critères définis par le code des marchés publics. La transparence des mécanismes de contrôle est nécessaire à assurer l'intégrité du système de passation. Toutefois ce mécanisme de contrôle administratif ne se calque pas que sur le contrôle a priori.

    Paragraphe 2 : La systématisation d'un contrôle a posteriori

    Lorsque les prestations objets du marché sont réceptionnées par l'autorité contractante, s'exerce un autre type de contrôle, se substituant au contrôle a priori. Il s'agit du contrôle a posteriori, opéré à titre accessoire par l'autorité contractante elle-même, et à titre principal par l'autorité de régulation. Il sera donc question dans un premier temps d'analyser l'aspect bicéphale de ce contrôle (A) pour aboutir dans un second temps au droit de recours non juridictionnel mis en oeuvre auprès de l'autorité de régulation (B).

    A- Un contrôle à deux visages

    La bicéphalie du contrôle a posteriori de la passation des marchés au Sénégal et au Togo se dénote déjà à travers une exploration sommaire des différents codes régissant les marchés publics dans ces deux pays. Partant de ce constat et conformément aux dispositions des articles 143 et 144 du code sénégalais des MP, on remarque qu'il existe au sein de chaque autorité contractante, un organe de contrôle interne qui doit s'assurer du respect rigoureux des dispositions légales et réglementaires applicables aux marchés publics. Pour cela, chaque cellule de passation des marchés a l'obligation d'établir avant le 31 mars de chaque année à l'intention de l'autorité dont elle relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP, un rapport annuel sur l'ensemble des marchés publics passés l'année précédentes. C'est à travers ce rapport que la cellule de passation fournit

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 46

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    la liste des entreprises jugées défaillantes, précise la nature des manquements constatés et donne un compte rendu détaillé des marchés passés par entente directe.

    En ce qui concerne le Togo, lorsque nous analysons les attributions de la CCMP conformément au décret n° 2009-297/PR, ou peut lire dans le dernier alinéa que la CCMP « établit à l'attention du représentant de l'autorité contractante, un rapport annuel d'activités ». Ce rapport comme au Sénégal porte sur l'ensemble des marchés déjà passés au cours de l'année précédente. De ce constat, on comprend à suffisance qu'il s'agit là d'un contrôle a posteriori exercé au plan interne.

    Cependant, au-delà du contrôle interne a posteriori exercé à titre accessoire par la cellule de passation des marchés (Sénégal) et la commission de contrôle des marchés publics (Togo), existe un autre type de contrôle a posteriori, exercé à titre principal et au plan externe par l'ARMP. Le contrôle a posteriori de l'ARMP est une exigence communautaire qui consiste en l'exercice d'une série de prérogatives, conformément à la directive 05 de l'UEMOA.

    A ce titre, l'autorité de régulation des marchés publics est chargée de veiller, par des études et avis réguliers, à la saine application de la réglementation et des procédures relatives à la passation des marchés publics et de proposer au gouvernement et aux institutions en charge des marchés publics toutes recommandations ou propositions de nature à améliorer et renforcer l'efficience du système de passation des marchés publics.

    Par ailleurs, un aspect important qui mérite d'être évoqué et qui fait office de convergence dans les deux codes est le pouvoir de l'ARMP à mener des opérations de contrôle et d'audit126 portant sur la transparence dans la passation des marchés.

    C'est le lieu d'évoquer les conclusions du rapport de synthèse des marchés conclus par 31 autorités contractantes au Togo et qui ont été rendues en mai 2015127. Ce rapport fait état des résultats des travaux portant sur les marchés passés au titre de la gestion 2012, l'examen du traitement des litiges, les marchés passés par entente directe et ceux conclus suivant la procédure

    126 Cf. Art. 145 CMP Sénégal relatif au contrôle externe et a posteriori et l'article 13 du CMP Togo relatif aux missions et attributions de l'ARMP.

    127 Revue indépendante de la conformité de la procédure de passation des marchés publics passés par les Autorités contractantes au titre de l'année 2012

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    d'appel d'offres restreint.

    D'une manière générale, il ressort au terme de ces travaux que des manquements ont émaillé d'une manière significative la passation des marchés, portant ainsi un coup dur aux dispositions législatives et règlementaires régissant le principe fondamental de la transparence.

    Quant au Sénégal, l'ARMP procède annuellement comme au Togo à la revue a posteriori des marchés publics, sur la base d'un échantillon représentatif. Un système de ciblage est conçu pour la sélection des structures à auditer. A cet effet toutes les structures publiques gérant un budget supérieur à dix (10) milliards sont systématiquement auditées128 contre 50% des structures gérant un budget compris entre 5 et 10 milliards; 25% des structures gérant un budget compris entre 1 et 5 milliards et 10% des structures gérant un budget inférieur à 1 milliard.

    Toutefois, quoiqu'on puisse dire, il faut admettre que ces différents rapports ont permis aux organes de régulation sénégalaise et togolaise d'interpeler les autorités contractantes pour plus de rigueur tout en leur proposant des actions correctives et préventives de nature à améliorer la qualité de leurs performances, dans un souci d'économie, de transparence et d'efficacité dans les procédures de passation. Par ricochet, des mesures coercitives ont aussi été érigées pour sanctionner les contempteurs des normes relatives à la transparence. A cet effet, des personnes physiques ou morales défaillantes se sont vues imposer des sanctions financières et certaines ont même été exclues des procédures de passation et sont répertoriées sur une liste tenue par l'ARMP.

    Somme toute, les rapports de contrôles annuels a posteriori effectués par l'ARMP doivent être transmis aux autorités étatiques pour être ensuite publiés. Mais étant dans une logique de transparence garantie par un organe de régulation, il importe que nous puissions appréhender une autre façon dont use ce dernier pour assurer le respect des règles et la sanction des manquements constatés. La charte de transparence et d'éthique, garantissant un droit de recours lié au contentieux à tout candidat qui estime être injustement évincé, nous allons donc nous en inspirer pour aborder la fonction contentieuse de l'ARMP dans le règlement non juridictionnel des différends relatifs à la passation.

    128 ARMP Sénégal, Rapport annuel 2011, P.14

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 48

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    B- Une garantie en matière de recours

    Le processus de passation des marchés publics ne se déroule pas toujours dans les meilleures conditions et dans le respect total des principes régissant la matière. Les éventuelles irrégularités qui pourraient surgir peuvent être traitées soit à l'amiable, soit par voie contentieuse par saisine du comité de règlement des différends (CRD) de l'ARMP.

    En effet, les codes sénégalais et togolais reconnaissent un préalable obligatoire à la saisine du CRD lors du contentieux des marchés publics. Sous cet angle, le candidat qui s'estime lésé est d'abord tenu de saisir la personne responsable du marché à travers un recours gracieux129. Ce recours peut selon l'article 89 du CMP du Sénégal, porter sur la décision d'attribuer ou de ne pas attribuer le marché, les conditions de publication des avis, les règles relatives à la participation des candidats, le mode de passation, etc. Dans ce cas de figure, le candidat doit adresser une notification écrite à la PRMP comprenant les références de la procédure de passation ainsi que l'exposé des motifs. Ce recours doit être exercé au Sénégal par le requérant dans le délai de 5 jours suivant la publication de l'avis provisoire d'attribution du marché. Ce recours s'exerce en droit togolais au plus tard dans les 10 jours qui précèdent la date prévue pour le dépôt de la soumission130. La PRMP est tenue de notifier sa réponse au requérant ; mais si elle ne le fait pas dans le délai règlementaire131, ce défaut de réponse sera constitutif d'un rejet implicite du recours gracieux. Le candidat peut alors saisir le CRD de l'organe de régulation dans le délai de 3 jours suivant la saisine de la PRMP132 (Sénégal). Par ailleurs ce délai en droit togolais est de 7 jours conformément à l'article 125 du CMP133 Togo.

    129 Art. 89 CMP Sénégal et 122 CMP Togo relatif au recours devant l'autorité contractante.

    130 Article 124 CMP Togo « Ce recours doit être exercé dans les délais requis à l'article 62 du présent décret, ou au plus tard dix (10) jours ouvrables précédant la date prévue pour le dépôt de la candidature ou de la soumission. Il a pour effet de suspendre la procédure jusqu'à la décision définitive de la personne responsable des marchés ou de l'autorité de régulation des marchés publics ».

    131 Ce délai au sens de l'article 89 alinéa 4 du CMP Sénégal est de 3 jours.

    132 Art. 90 CMP Sénégal,

    133 Article 125CMP Togo « En l'absence de décision rendue par la personne responsable des marchés publics dans les cinq (5) jours ouvrables de sa saisine, le requérant peut également saisir l'autorité de régulation qui rend sa décision dans les sept (7) jours ouvrables de sa saisine, faute de quoi l'attribution du marché ou de la délégation ne peut plus être suspendue ».

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 49

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Sur ce dernier point sus évoqué, rappelons que l'une des implications essentielles de la fonction de régulation de l'ARMP est de procéder au règlement non juridictionnel des litiges nés à l'occasion de la passation des marchés publics. Cette fonction est dévolue au Sénégal et au Togo au Comité de Règlement des différends (CRD), qui de toute évidence constitue le pivot central du contentieux non juridictionnel des marchés publics. Partant de ce point de vue, il va sans dire que les diligences effectuées par le CRD constituent la démonstration d'une volonté conjointe en ce qui concerne la mise en oeuvre d'un droit de recours lié au contentieux de la passation des marchés comme le recommande la charte de transparence et d'éthique au Sénégal.

    Dès lors, le CRD est chargé de recevoir les dénonciations des irrégularités constatées par les parties intéressées ou celles connues de toute autre personne avant, pendant et après la passation ou l'exécution des marchés publics. Sa saisine se fait par notification écrite et n'est recevable que lorsque le requérant invoque une violation caractérisée de la règlementation des MP et accompagne sa requête de la pièce attestant du paiement d'une consignation.

    Cependant, pour des raisons de cohérence, nous ne nous intéresserons qu'aux irrégularités survenues pendant la phase de passation. Rappelons aussi que pour des questions de transparence et dans le but de prévenir tout conflit d'intérêt lors du règlement d'un litige, les membres de la société civile et du secteur privé susceptibles d'avoir un intérêt avec l'une des parties au conflit sont remplacés sur décision du président du comité au moment de statuer sur le litige. Par ailleurs, si les faits reportés devant le CRD caractérisent des violations de la réglementation relative à la passation des marchés publics, le Président du Comité saisit, soit la Commission Litiges134, soit le Comité en formation disciplinaire135. En ce sens, plusieurs décisions ont été rendues par le CRD dans le souci de corriger les écorchures faites au principe de la transparence. Mais rappelons que la saisine du CRD a un effet suspensif136 sur la procédure jusqu'à sa décision définitive.

    Au Sénégal, dans sa décision n°147/16/ARMP du 18 mai 2016, le CRD a statué en commission

    134 Le CRD statue en formation litige pour approuver ou non la requête du requérant par rapport à la décision de la commission de passation des marchés de l'autorité contractante.

    135 Le CRD statue en formation disciplinaire pour sanctionner un soumissionnaire ayant fait preuve de malhonnêteté.

    136 L'effet suspensif ici correspond au respect des mesures conservatoires.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 50

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    litiges sur la saisine de la Direction du Livre et de la Lecture du ministère de la culture et de la communication. En l'espèce, le CRD a été saisi suite au refus de la DCMP d'autoriser la signature par entente directe, d'un marché d'acquisition de livres, avec chacune des librairies « Harmattan Sénégal », « Quatre vents », et « La différence ». Malgré l'assurance que la Direction du Livre et de la Lecture prétendait avoir par l'article 142 alinéa 3 du CMP 137, le CRD n'a pas manqué de lui lancer un message fort en lui rappelant le respect scrupuleux des principes sacrosaints de la passation des marchés publics à savoir la liberté d'accès à la commande, l'égalité de traitement des candidats et la transparence des procédures, qui ne sauraient être tenus en échec pour un marché d'acquisition de livres au profit de l'entente directe. Ainsi donc, le CRD a t-il approuvé la décision de la DCMP et a ordonné à la Direction du Livre et de la Lecture de passer le marché envisagé par appel d'offres.

    En résumé, le respect de la transparence est de mise à tous les niveaux de la procédure de passation. Du contrôle administratif du processus de passation, découle un autre type de contrôle qui, loin d'intéresser à nouveau la DCMP ou l'organe de régulation, fait émerger un nouvel acteur, le juge.

    Section 2 : Un contrôle juridictionnel indispensable

    Le contrôle juridictionnel dans la passation des marchés revêt une importance capitale dans une exigence de transparence. A cet effet nous aborderons d'abord ce contrôle comme portant sur la régularité des procédures (paragraphe1) et ensuite l'étendue d'un tel contrôle (paragraphe 2).

    137 « Si l'autorité contractante n'accepte pas les avis et recommandations qui, le cas échéant auront été formulés par la Direction chargée du contrôle des marchés publics concernant la possibilité d'utiliser une procédure autre que l'appel d'offres ouvert ou relatives à la proposition d'attribution du marché, elle ne peut poursuivre la procédure de passation qu'en saisissant le Comité de Règlement des Différends près l'organe chargé de la régulation des Marchés Publics ».

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 51

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Paragraphe 1 : Le contrôle de la régularité des procédures

    Le contrôle de la régularité des procédures permet au juge d'avoir un droit de regard sur le processus de passation. Ainsi, sera-t-il procédé au rappel des règles de transparence (A) puis à la régulation économique par le juge (B).

    A- Un rappel des règles de transparence par le juge

    Au Sénégal, les marchés publics sont soumis au principe de la publicité et de mise en concurrence conformément à la charte de transparence et d'éthique en matière des marchés publics, à la directive n°04 de l'UEMOA, au décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portant code des marchés publics et au code de transparence dans la gestion des finances publiques au sein de l'UEMOA. Ils relèvent de la même directive au Togo mais sous la houlette du décret 2009/277 portant code des marches et délégation de services publics.

    Sous ce rapport, le juge administratif veille au respect scrupuleux des règles fondamentales qui définissent la transparence dans la passation des marchés publics. A bien des égards, la commande publique se doit de respecter tout d'abord la liberté d'accès qui consiste à permettre à toutes les personnes remplissant les conditions nécessaires, de se porter candidates à un marché public. Dès lors, toute discrimination injustifiée dans le choix des candidats doit être sanctionnée. Cette liberté d'accès des candidats correspond, en réalité, à l'application particulière de la liberté de concurrence dans le cadre des marchés publics. Sur ce dernier aspect, il convient de rappeler que l'obligation de mise en concurrence s'applique dans sa globalité à l'administration conformément aux dispositions de l'article 24 et 3 nouveau du COA138. L'autorité contractante ne peut donc violer les règles de concurrence et de libre accès aux marchés publics sans encourir une sanction de la part du juge administratif.

    Dans ce contexte, le juge sénégalais dans l'arrêt de la cour suprême « Société SARRE-CONS contre ARMP »139 du 22 aout 2013 n'a pas manqué de rappeler que l'autorité contractante ne peut violer les règles de concurrence et de libre accès aux marchés publics en insérant dans les

    138 Loi n° 65-51 du 19 juillet 1965, portant code des obligations de l'administration, modifiée par la loi 06-16 du 30 juin 2006.

    139 CS, 22/08/2013, Société SARRE-CONS c/ ARMP Bulletin des arrêts de la Cour suprême du Sénégal 2013.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 52

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    dossiers d'appel d'offres une clause relative à l'autorisation du constructeur à fournir par les candidats au marché de véhicules neufs.

    L'intervention du juge au regard du respect des critères contenus dans le DAO s'affirme de plus en plus au Sénégal et demeure dans un état quasiment latent en droit positif togolais. En effet, le contentieux de la passation offre à la Cour suprême, l'opportunité de recenser et de corriger les irrégularités administratives constatées dans le cadre de l'examen des candidatures au regard des critères inhérents à la transparence.

    En réalité, à travers le respect du principe constitutionnel140 de la concurrence, le juge est parvenu à imposer l'égalité des candidats dans la passation des marchés publics et en a fait un élément d'appréciation objective au regard de la légalité des actes administratifs. Dans cette nouvelle donne, le juge administratif au Sénégal comme au Togo apparait comme l'ultime rempart contre les atteintes aux règles de transparence qui gouvernent la passation des marchés.

    Par ailleurs, le juge administratif s'assure également de l'effectivité de la transparence par la vérification des formalités de publicité par les autorités contractantes. En effet, il faut bien convenir que les marchés publics doivent faire l'objet de publicité sous réserve des marchés requérant une procédure de passation non concurrentielle. Ainsi, la soumission des marchés publics au Sénégal et au Togo aux formalités de publicité n'échappe pas à l'office du juge administratif. La tendance de favoritisme étant toujours présente, l'autorité contractante peut être amenée à procéder à la passation d'un marché par entente directe et donc sans formalité de publicité, alors que la nature du marché ne l'exigeait pas.

    Dès lors, le juge administratif est intervenu au Sénégal à travers des arrêts pour rappeler que l'obligation de publicité n'a pas un caractère facultatif. En effet, l'analyse des décisions rendues par la Cour suprême du Sénégal atteste singulièrement de la permanence de l'office du juge en la matière. C'est le lieu d'évoquer au regard de la pertinence de son dispositif, l'arrêt Société Angélique International Limited (A.I.L) contre ARMP141. Le juge sénégalais considère à travers cet arrêt qu'il y a violation de l'obligation de publicité lorsque les critères et sous critère n'ont

    140 Linotte Didier., « Existe-t-il un principe général du droit de la libre concurrence » ?, AJDA, 2005, p.1549.

    141 CS Sénégal, 24/10/2013 Angélique International Limited (A.I.L) contre ARMP.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    pas été portés à la connaissance des candidats au marché.

    Par conséquent, conformément à l'exigence de transparence, on peut considérer qu'un marché a été passé dans des conditions satisfaisantes si les moyens de publicité utilisés ont réellement permis aux potentiels soumissionnaires d'en être informés et ont abouti à une diversité des offres. En effet, l'efficacité de la publicité constitue une composante essentielle de la régularité du marché. Un avis de publicité insuffisant comme le non-respect d'une procédure dont le formalisme est défini par le code, est susceptible d'entrainer l'annulation du marché pour violation des principes fondamentaux que sont la liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats, et la transparence des procédures de passation142.

    A ces différends égards, on peut conclure d'un point de vue prétorien qu'au Sénégal, le respect de l'exigence de publicité vise à assurer une meilleure conciliation entre le principe de légalité et l'action des autorités contractantes et cette situation s'impose dès lors comme une méthode de raisonnement. Cependant, au-delà du rappel juridictionnel des règles de transparence, s'opère une mission technique qui se rapporte à la régulation économique par le juge, de la passation des marchés publics.

    B- Une régulation économique par le juge

    La rénovation du système de contrôle dans la régulation des marchés publics a été consolidée dans un passé récent par un contrôle juridictionnel qui s'observe à des proportions variables au Togo et au Sénégal. Cette situation s'est accompagnée d'une mutation de l'office du juge administratif qui conserve néanmoins ses attributions classiques.

    En guise de définition, la régulation est entendue en droit comme une « fonction tendant à réaliser certains équilibres entre concurrence et d'autres impératifs d'intérêt général, à veiller à des équilibres que le marché ne peut pas produire à lui seul »143. Elle renvoie dès lors à des

    142 Docteur Mamadou Yaya DIALLO, « Le juge de l'administration et la régulation des marchés publics au Sénégal », Page 18.

    143 Lombard Martine, « Institutions de régulation économique et démocratie politique », AJDA, n°10, 14 mars 2005, p. 531.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    considérations économiques étant donné les montants exorbitants que suppose la passation des marchés publics.

    En effet, le juge administratif ne peut plus se cantonner dans une analyse abstraite et indifférente aux enjeux économiques et financiers des décisions qu'il contrôle. Il intègre dès lors des données économiques dans la résolution des affaires dont il est saisi. Il doit non seulement les comprendre mais aussi déterminer leur place dans les notions fondamentales telle que la concurrence, une composante de l'intérêt général protégée par la loi. Sous ce rapport, on peut citer la décision de la Cour suprême sénégalaise dans l'affaire «Association sénégalaise des hémodialysés et insuffisants rénaux, ASHIR » contre ARMP144 où l'intérêt général dégagé par les juges repose sur une considération essentiellement économique.

    Dans cette affaire, la cour suprême a estimé que l'intérêt général est une condition de légalité de l'acte administratif. Mais le plus important dans cette décision c'est que le juge considère que l'attribution du marché à Carrefour Médical rendait plus accessible les médicaments à un moindre coût. Par conséquent, le but de l'intérêt général est aussi réalisé. Cette situation amène le juge à conclure que le moyen développé par l'association en question et tenant à la violation de la loi n'est pas fondé. Par cette décision, le juge a cherché à concilier protection de l'intérêt général et celle des intérêts économiques particuliers. Le juge montre à travers cette décision que la régulation de l'économie peut aussi se faire par le droit mais dans un souci de préservation de l'intérêt général. Pour cela, le juge doit faire preuve d'une clarté irréprochable au regard des textes dans ses décisions dans le souci d'assurer une sécurité juridique145 et un règlement effectif des différends qu'il doit trancher.

    Par ailleurs, la régulation économique par le droit dans la passation des marchés publics apparait comme l'instrument par lequel le juge reconnait à l'administration les pouvoirs qui lui sont nécessaires pour mener sa politique économique. Toutefois un contrôle efficace est exercé sur ces pouvoirs pour ne pas laisser surgir des dérives de la part de l'administration. Ce contrôle

    144 CS, 12/04/2012 Association sénégalaise des hémodialysés et insuffisants rénaux (ASHIR) contre l'ARMP.

    145 La sécurité juridique est un principe du droit qui a pour objectif de protéger les citoyens contre les effets secondaires négatifs du droit, en particulier les incohérences ou la complexité des lois et règlements, ou leurs changements trop fréquents.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    cependant n'est pas effectué sur la base exclusive des règles du droit administratif classique car ces dernières ne sauraient efficacement prendre en compte des données économiques en perpétuelles mutation qui caractérisent les marchés publics.

    A cet effet, si nous revenons à la décision « ASHIR contre ARMP » précitée, le juge s'est prononcé non pas sur la base des règles immuables du droit administratif traditionnel, mais bien sur le fondement des considérations économiques et de la notion d'intérêt général146. La Cour suprême s'est cantonnée sur une appréciation des faits alors qu'elle pouvait se contenter d'une application stricte de la règle de droit basée sur une méthode habituelle de raisonnement. Dès lors, la représentation juridique des faits dont participe l'intérêt général perd donc de son autonomie pour se structurer autour du modèle dominant qu'offre la pensée économique. Ainsi, à la lumière de cette mutation qui s'impose aux juges sénégalais et togolais au regard de leurs attributions, on serait tenté de conclure qu'il s'agit là d'une dénaturation de leur mission originaire. Pourtant, il faut bien s'accorder sur le fait que les récentes transformations du droit public ne signalent ni sa dénaturation dans les domaines qui seraient réservés au droit privé, ni sa dissolution, mais son adaptation aux exigences nouvelles de l'action publique : « Les deux corps du droit subsistent »147.

    C'est sans doute dans cette logique de raisonnement que les considérations actuelles en matière de contrôle juridictionnel trouvent accessoirement un sens surtout en droit positif sénégalais où le juge bien souvent, fait preuve d'une saine audace, mettant ainsi en évidence une divergence prétorienne vis-à-vis de l'activité contentieuse de son homologue togolais.

    Mais rappelons une fois de plus que ces attributions nouvelles ne font pas pour autant perdre au juge administratif ses attributions classiques en ce qui concerne le contentieux de la passation des marchés publics. Ce contentieux bien que revêtant une symétrie variable, touche du doigt les réalités de plus d'une discipline du droit.

    146 Dans ladite décision, l'existence de l'intérêt général est avérée en raison de l'accessibilité des patients aux médicaments à un moindre coût.

    147 Gérard TIMSIT, « Les deux corps du droit, Essai sur la notion de régulation », RFAP, n°78, avril-juin 1996, p. 376.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 56

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Paragraphe 2 : L'étendue du contrôle juridictionnel

    La transparence des procédures implique que les décisions du CRD soient soumises à un contrôle du juge administratif au regard du principe de légalité (A). Partant de ce dernier aspect, nous allons nous intéresser à l'extension du contrôle au juge pénal (B).

    A- Un contrôle axé sur la légalité

    Comme nous l'avons souligné dans nos propos introductifs, le contentieux148 en matière de passation des marchés publics est de la compétence du juge administratif. De ce fait, c'est par le contrôle des décisions de l'ARMP que le juge renforce son autorité. Aussi vrai que l'Autorité de Régulation des Marchés Publics incarne une institution administrative indépendante et donc soustraite à la tutelle hiérarchique de l'Etat, elle demeure néanmoins rattachée à son « placenta administratif »149. Désormais, en renforçant ses outils méthodologiques en termes de contrôle150 classique, le juge administratif est amené à jouer un rôle en matière économique, en veillant au respect des droits et libertés économiques et à exercer un contrôle direct151 sur l'action des autorités publiques en charge de la passation des marchés publics.

    Les articles 90 et 125 des codes sénégalais et togolais des marchés publics, confirment respectivement les compétences du CRD pour statuer sur les éventuels conflits susceptibles de survenir lors de la passation des marchés. A cet effet, les décisions du comité de règlement des différends ne peuvent avoir pour effet que de corriger la violation alléguée ou d'empêcher que d'autres dommages soient causés aux intérêts concernés.

    Toutefois, toute personne non satisfaite des décisions du CRD a la faculté de saisir la chambre administrative de la cour suprême aux fins de contrôle si elle estime que la décision du CRD souffre d'une irrégularité formelle ou sur le fond. Rappelons que le principe de légalité

    148 Il s'agit ici du recours pour excès de pouvoir, le recours de plein contentieux étant l'apanage du TGI de Dakar pour le Sénégal et de la chambre administrative de chacune des deux cours d'appel du Togo.

    149 Docteur Mamadou Yaya DIALLO, Op. cit. Page 3.

    150 Coulibaly D., Baba Kane, « Le juge administratif, rempart de protection des citoyens contre l'administration en Afrique noire francophone? » Disponible sur le site www.afrilex.u-bordeaux4.fr

    151 Jean MARIMBERT, L'ampleur du contrôle juridictionnel sur le régulateur, in Marie Anne Frison-Roche, pp. 179-183.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    administrative requiert un rapport de conformité entre les normes, et par ricochet de non contrariété. Pour cela, les décisions du CRD ne sauraient contredire les lois en vigueur de même que les deux directives de l'UEMOA qui servent de houlette à la passation des marchés publics au Sénégal et au Togo. En effet, la passation des marchés, lorsqu'elle s'écarte des exigences du code des marchés publics, donne lieu à divers recours qui sont souvent communs aux autres contrats administratifs. Sous cet angle, la cour suprême du Sénégal, conformément à la loi n° 2008-75 du 08 août 2008, peut contrôler la régularité formelle ainsi que la validité juridique des actes unilatéraux pris par l'administration. Quant au Togo, c'est l'ordonnance n° 78-35 du 07 septembre 1978 qui confie cette mission de contrôle à cette auguste assemblée.

    Par ailleurs, l'aspect porteur d'intérêt dans l'innovation du contentieux juridictionnel en passation des marchés publics surtout au Sénégal est sans doute la mise sur pied de ce qu'il convient d'appeler le « Recours du soumissionnaire évincé ». En effet, à travers un tel recours, le juge de l'administration qui en statuant sur saisine du soumissionnaire évincé, sanctionne les manquements aux aboutissements sacrosaints du principe de transparence, avant la signature du marché.

    Dans ce contexte, une analyse approfondie de ce dernier constat renforce à suffisance la conviction selon laquelle les juges administratifs sénégalais et togolais, à travers le contrôle des actes du CRD relativement aux règles de publicité et de concurrence, se conforment aux exigences communautaires, législatives et règlementaires de transparence. Mais pour arriver à un tel constat, il convient de préciser au préalable, les implications de la joute prétorienne, surtout au niveau de la chambre administrative de la cour suprême sénégalaise et qui ont eu une part significative d'implications sur l'évolution de la matière.

    C'est le lieu de souligner à cet égard, les célèbres décisions, par elle rendues à travers les arrêts « Sarre-CONS contre ARMP »152 et « Etat du Sénégal contre Société Africaine Audit »153. Ces jurisprudences ont marqué le début d'une évolution ouvrant la voie à la prise en compte par le bloc de la légalité, des dispositions relatives au droit de la concurrence et qui tendent à mettre à la charge des personnes publiques, une obligation de respect de la neutralité et de mise en oeuvre

    152 CS, 22/08/2013, Société SARRE-CONS c/ ARMP Bulletin des arrêts de la Cour suprême du Sénégal 2013.

    153 CS, 25 avril 2006 Etat du Sénégal c/ Société Africaine Audit.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    de la libre concurrence.

    En effet, dans le 1er arrêt, l'autorité contractante avait inséré dans le DAO, une clause relative à l'autorisation du constructeur et que devraient présenter les candidats à un marché de fournitures de véhicules neufs. Le juge a dès lors affirmé à travers cette jurisprudence que cette exigence de l'autorité contractante mettait à mal les règles de concurrence, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 24 du COA154. Le juge s'est attelé dans le deuxième arrêt à rappeler comme dans le premier, la nécessité pour les acheteurs publics de se conformer au respect de l'obligation de mise en concurrence.

    Ainsi, le juge dans son office à travers ces deux décisions sus mentionnées, fait-il valoir que toute discrimination injustifiée dans l'attribution du marché, doit être sanctionnée155. Eu égard à cela, il est plus que jamais évident que l'intervention du juge dénote de l'intérêt à préserver la clarté et à imposer aux autorités contractantes, le respect des obligations de liberté d'accès et de mise en concurrence, des éléments fondamentaux dans le pré carré des exigences de transparence dans la passation des marchés.

    Aujourd'hui il va sans dire que le contentieux juridictionnel de la passation des marchés publics ne relève pas exclusivement de la compétence du juge administratif.

    B- Une extension du contrôle au juge pénal

    Le contentieux juridictionnel de la passation des marchés publics peut, à un niveau, relever moins d'un manquement aux règles du droit administratif que d'une violation avérée des principes du droit pénal. A cet effet, il ne se borne pas seulement à faire sanctionner le non-respect des obligations de publicité et de mise en concurrence par une décision d'injonction, de suspension ou d'annulation de l'attribution d'un marché. Dès lors, des sanctions pénales peuvent être prises à l'encontre des auteurs des faits allégués, au regard de leur gravité. En effet, la

    154 Art.24, COA « le non-respect des formalités de publicité prescrites et la violation du principe d'égalité de traitement des candidats aux commandes publiques par les acheteurs publics entraîne la nullité de la procédure de passation ou du marché passé, à la requête de toute personne intéressée au déroulement normal de la procédure ».

    155 Docteur Yaya DIALLO, op. cit, p.9.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    méconnaissance des règles de transparence, matérialisée par des pratiques frauduleuses relevant du droit pénal, fait passer le maillet, des mains du juge de l'administration à celles du juge pénal.

    La passation des marchés publics requiert une attention particulière de la part des citoyens tant il est vrai que ce sont eux qui la financent en partie à travers l'impôt. C'est la raison pour laquelle toute atteinte à la règlementation constitutive de fraude doit être réprimée. A l'analyse de ces pratiques frauduleuses, on remarque que les atteintes à la liberté d'accès, à l'égalité de traitement des candidats ou de tout autre facteur garantissant la transparence dans la passation des marchés sont érigées autour d'une trilogie d'infractions que sont le délit de favoritisme, la corruption (active ou passive) et la prise illégale156 d'intérêt. Bien que le CRD statue en formation disciplinaire pour sanctionner les auteurs des pratiques frauduleuses, il peut cependant saisir le juge pénal lorsque sont constatés des faits susceptibles d'une qualification pénale.

    L'atteinte à la liberté et à l'égalité d'accès aux marchés publics consiste à procurer à une personne physique ou morale, un avantage anormal au moyen d'une entorse à la législation sur les marchés publics indépendamment de savoir si l'autorité a sollicité ou accepté un tel avantage. Toutefois, le problème qu'il s'est posé au Sénégal et au Togo réside dans la sanction pénale des auteurs de telles infractions. En effet, le délit d'atteinte à la liberté d'accès dans les marchés publics encore appelé délit de favoritisme tel qu'il existe en droit français et qui a pour but de réprimer pénalement de telles atteintes, n'existe pas encore en droits positif sénégalais et togolais. Conformément au principe de légalité des délits et des peines157 , le juge pénal ne saurait condamner les présumés auteurs de tels actes pour le seul motif qu'ils ne sont pas encore pénalement qualifiés par chacun de ces droits positifs.

    Toutefois, l'office du juge pénal n'est pas pour autant amoindri. En effet, une lecture attentive du code pénal du Sénégal et celui du Togo aide à comprendre que des dispositions générales peuvent aussi sanctionner les faits des agents publics ou candidats qui occultent la transparence

    156 La jurisprudence a reconnu depuis longtemps que le délit de prise illégale d'intérêt est constitué par l'intérêt personnel, patrimonial pris par une personne exerçant des fonctions publiques dans une affaire sur laquelle elle exerce l'une des formes de contrôle prévu par la loi. Mais aujourd'hui, on admet de plus en plus que l'intérêt visé puisse être moral.

    157 Selon ce principe, on ne peut être pénalement condamné qu'en vertu d'un texte pénal précis et clair au sens de la formule latine « Nullum crimen, nulla poena sine lege ».

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 59

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 60

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    lors de la phase de passation des marchés publics.

    A cet effet, des délits comme l'usage de faux sont punissables au correctionnel sur la base des articles 147 et 375 du code pénal sénégalais. On en déduit donc qu'un candidat qui soumissionne sur la base de faux documents afin de se voir attribuer un marché public peut être poursuivi au plan pénal. De même au Togo, des pratiques comme la corruption sont réprimées par le juge conformément aux dispositions de l'alinéa 2 de l'article 208 du code pénal158.

    Toutefois, il n'est pas superflu de souligner que la menace de sanctions pénales159 est une incitation forte pour les acteurs publics et privés des marchés publics à se conformer au droit pendant la phase de passation. En effet, bien qu'il n'existe pas véritablement un arsenal répressif propre aux marchés publics au Sénégal et au Togo, on note cependant que c'est à travers la répression de certains délits comme la corruption, le trafic d'influence et bien d'autres et que l'on observe d'ailleurs dans le domaine de la passation des marchés, que le juge pénal prévient les atteintes et donne des signaux clairs aux pouvoirs publics et acteurs privés, les contraignant ainsi à se conduire de manière prudente, conformément aux règles de transparence.

    Aujourd'hui, l'irruption du juge pénal sur la scène des marchés publics est en train de se matérialiser dans un contexte où les mécanismes traditionnels de contrôle que sont les contrôles a priori, a posteriori, financier et du juge administratif, semblent témoigner d'une relative défaillance face aux atteintes sans cesse récurrentes à la règlementation sur les marchés publics. L'office du juge pénal qui certes ne dénotera d'une « efficacité curative »160 accomplie que dans un futur proche, appelle cependant à des ajustements préalables des codes pénaux sénégalais et togolais en vue de clarifier sa sphère d'intervention.

    Dans ce cas de figure, la pénalisation du droit des marchés publics contribuera à exposer de

    158 Art. 208 al. 2 code pénal Togo: « Sera puni d'un à 5 ans d'emprisonnement, tout officier public, magistrat, fonctionnaire ou préposé d'un service public qui aura sollicité ou agréé des dons, promesses, avantages de toute nature en vue d'accomplir un acte de sa fonction non sujet à rémunération particulière ou en vue de s'abstenir de remplir un devoir de sa fonction. »

    159 Pendant que les sanctions administratives et financières sont traditionnellement destinées à mettre en cause les institutions, les sanctions pénales quant à elles frappent la personne à l'origine du comportement fautif.

    160 Catherine PREBISSY-SCHNALL, « La pénalisation du droit des marchés publics », ed. LGDJ, Bibliothèque de droit public (tome 223).

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    manière dynamique, la manière dont le juge pénal devra examiner les moyens utilisés par les acteurs pour atteindre les objectifs économiques qu'ils se sont fixés et leur conformité à la règlementation en vigueur. Partant de là, il va sans dire que la crédibilité de la répression pénale dépendra avant tout du degré d'autonomie qui sera reconnue au juge pénal dans le jugement des questions dont il sera saisi dans le contentieux de la passation des marchés publics.

    En définitive, l'ensemble du dispositif de contrôle qu'il soit administratif, financier ou juridictionnel, garantissant un respect du principe de transparence dans la passation des marchés publics s'accorde sur un dénominateur commun: c'est que les marchés publics sont soumis à une kyrielle d'atteintes, rendant fragile l'effectivité de cette transparence tant défendue. Toutefois et sans nier l'évidence, des efforts à l'allure d'antidotes ont été entrepris et s'inscrivent aujourd'hui dans une note positive au regard des améliorations apportées.

    Mais et si ces antidotes n'arrivaient pas à guérir le mal? Faisons remarquer que cette question vaut son pesant d'or. Mais quoiqu'on puisse penser, accordons-nous sur le fait que le principe de transparence connait bien des atteintes qui feront l'objet d'une analyse plus approfondie dans la seconde partie de notre travail.

    Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 61

    Titre 2 : Une transparence relative 62

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    TITRE II : UNE TRANSPARENCE RELATIVE

    Tout ne va donc pas pour le mieux dans le milieu des marchés publics. Les systèmes de passation des marchés publics d'un bon nombre de pays africains, y compris le Sénégal et le Togo, présentent de nombreuses faiblesses qui peuvent être rattachées au non-respect de leur législation, à la lenteur et la complexité des formalités, aux difficultés de mise en oeuvre des mécanismes de contrôle et également à la fraude et la corruption161. Ces épines entrainent inévitablement un impact négatif sur leurs budgets et par ricochet sur leur croissance économique.

    Ainsi, parties d'une affirmation textuelle flamboyante mais controversée dans la pratique, les règles de transparence qui au départ se voulaient messianiques et irréprochables ont vite fait de se laisser influencer par des pratiques qui au bas mot peuvent être qualifiées de déviantes. Des lors, comme palliatifs aux difficultés encourues par les exigences de transparence, les principes de fonctionnement qui en résultent au Sénégal et au Togo ont suscité le besoin d'être consolidés et sauvegardés à différents niveaux de la phase de passation.

    A cet effet, il s'agira dans cette seconde partie de notre travail de faire une analyse fine de la pratique de passation au Sénégal et au Togo pour en faire ressortir les failles et des recommandations innovantes pour contourner au mieux l'épineux problème des atteintes au principe de la transparence. Pour ce faire, il sera d'abord question de faire un état des lieux des insuffisances relatives à la transparence des procédures (Chapitre 1), et d'envisager ensuite un diagnostic des mécanismes de contrôle sur fond de recommandations (Chapitre 2).

    161 OCDE, Guide sur la prévention de la corruption dans la passation des marchés publics, Editions OCDE.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    CHAPITRE I : INSUFFISANCES RELATIVES A LA
    TRANSPARENCE DES PROCEDURES DE PASSATION

    Les pratiques qui suivent sont qualifiées de déviantes car elles regroupent celles qui violent directement la lettre du code, et celles qui prêchent contre son esprit, lesquelles sont les plus délicates à appréhender. Il est possible de faire apparaitre ces pratiques en remontant le fil chronologique des procédures de passation qui ont été décrites dans la première partie de nos travaux. Qu'il s'agisse du Sénégal ou du Togo, Il importe de prendre conscience que les atteintes aux règles de transparence des procédures de passation peuvent avoir des causes diverses, allant d'une simple erreur dans l'exécution d'une tâche administrative à une transgression délibérée de la législation et des règles applicables. A cet effet, nous avons pu faire un état des lieux de ces insuffisances dans les différents modes de passation. Dès lors, après une analyse des atteintes relatives aux marchés de type concurrentiel (Section 1), nous allons nous intéresser aux constats relatifs aux procédures particulières (Section 2).

    Section 1 : Des atteintes liées aux marchés de type concurrentiel

    Consacrer la concurrence comme porte-flambeau de la transparence n'a pas toujours été aisé, du fait des irrégularités constatées. Il a été crucial à ce niveau de notre travail de répertorier ces irrégularités dans les marchés de type concurrentiel. A cet effet, les insuffisances seront abordées tour à tour dans le mode de passation (paragraphe 1) et dans le traitement des dossiers (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Les insuffisances dans le mode de passation

    La passation des marchés publics est bien souvent émaillée d'insuffisances dues à un non-respect de la règlementation en vigueur162. Ces insuffisances dans le mode de passation seront analysées d'abord à travers une compromission en amont de la soumission(A), puis dans la phase

    162 Directives 04 et 05 de l'UEMOA relatives aux marchés publics, codes sénégalais et togolais des marchés publics.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 63

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    proprement dite d'appel d'offres (B).

    A- Une compromission en amont de la soumission

    Pendant la phase préalable d'appel d'offres, les autorités contractantes procèdent à une série d'activités allant de l'évaluation des besoins jusqu'au choix de la procédure applicable avec pour but d'inscrire les potentiels marchés dans le PPM. En ce qui concerne chacune de ces étapes situées en amont de la soumission, les risques d'atteintes sont bien présents et peuvent, de façon significative, entacher la procédure de passation.

    En effet, on remarque à première vue pour certains marchés, une mauvaise qualité de l'évaluation des besoins qui se traduit par une approbation de biens, services ou projets inutiles, soit par des agents incompétents, qui bien souvent se basent sur des besoins peu pertinents privant ces marchés de toute objectivité, soit par des agents qui identifient le besoin d'un achat, en ayant un intérêt privé dans l'acquisition du bien objet du marché163.

    Aussi doit-on préciser que certaines autorités contractantes ne respectent pas l'inscription préalable des marchés dans le PPM164 et la publication des avis généraux de passation des marchés165.

    Par ailleurs, des dysfonctionnements qui s'observent dans la phase de planification et budgétisation s'inscrivent de plus en plus dans une récurrence alarmante avec de lourdes conséquences. En effet, c'est pendant la phase préalable d'appel d'offres que se fait l'analyse financière devant déboucher sur une estimation en terme de coût des biens et services ayant été identifiés lors de l'évaluation des besoins.

    163 Kari K. HEGGSTAD, « les fondements de l'intégrité dans la passation des marchés », P.16

    164 Au Sénégal, des marchés de la Commission de Régulation du Secteur de l'Electricité (CRSE) et du Conseil Exécutif des Transports Urbains de Dakar (CETUD) ont été passés sans être préalablement inscrits dans le PPM. La Direction de l'Administration Générale de l'Equipement (DAGE) du MITD n'a quant à elle pas transmis son PPM à la DCMP en violation des dispositions de l'article 6 du décret portant CMP.

    165 Au Togo en 2012, aucune autorité ciblée par les enquêtes du cabinet Grant Thornton n'a établi un avis général de passation en violation des dispositions de l'article 15 du CMP.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 64

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Il arrive cependant que cette estimation soit volontairement sous-évaluée par des agents indélicats afin de présenter à l'autorité d'approbation des marchés, des montants réduits et qui après validation, échapperont aux valeurs seuil de mise en concurrence. Ceci se fait généralement dans l'espoir d'ajuster le coût contractuel initialement approuvé, une fois le projet en cours validé. Parfois, l'approbation des marchés se fait par une personne non habilitée et la non-signature des marchés par la PRMP166.

    Il va sans dire que cette pratique dénote non seulement d'une malhonnêteté de la part des agents publics, mais aussi d'une absence de définition précise et objective des exigences d'achat qui normalement devraient être soumises aux règles de transparence. Le défaut d'inscription de certains marchés dans le PPM dont nous avons tantôt fait cas a été dénoncé dans le rapport de l'ARMP Togo167, publié le 20 Aout 2015 pour les marchés conclus en 2012. Cette situation a été imputée au ministère délégué auprès du ministère de l'agriculture, chargé des infrastructures rurales.

    Au regard des exigences d'achat susmentionnées, notons que des fonctionnaires corrompus à qui revient la préparation des documents de nature technique comme le DAO ou le cahier des charges, les établissent parfois au profit d'une seule entreprise limitant ainsi la concurrence qui pourtant est nécessaire pour assurer la transparence. Bien souvent, le DAO et le cahier des charges sont inutilement et volontairement rendus complexes afin de dissimuler les actes de corruption et rendre difficiles les opérations de surveillance.

    Rappelons cependant que les pratiques occultant la transparence ne sont pas exclusivement le fait des agents publics. A cet effet, au niveau des entreprises candidates, la tentation est tout aussi grande. De ce fait, des entreprises candidates fournissent des certificats d'assurance falsifiés, aux fins d'être éligibles à l'appel d'offres, bien qu'étant non qualifiées168.

    166 www.itietogo.org relativement à la transparence des marchés publics, consulté le 19 octobre 2016.

    167 Ce rapport a été produit par le cabinet de renommée internationale Grant Thornton du Sénégal et a concerné 31 autorités contractantes dont 15 ministères, 1à sociétés d'Etat, 2 agences, 2 universités, 1 commune et une institution représentant le corps de contrôle de l'Etat.

    168 Ceci se justifie par les nombreuses décisions de l'ARMP en formation disciplinaire tant au Sénégal qu'au Togo pour sanctionner les entreprises auteures de tels actes.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 65

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Par ailleurs, l'aspect relatif à l'adaptation ou l'irrégularité du choix de la procédure de passation mérite une attention particulière. A ce niveau encore les risques d'atteintes sont palpables. A cet effet, on dénonce un recours abusif aux procédures restrictives de concurrence qui sont utilisées sans justification adéquate, ou simplement dans l'ignorance des exigences, pour par exemple exploiter exagérément la segmentation des marchés169, violant de ce fait les exigences de l'article 53 du code sénégalais et 5 du code togolais des marchés publics relatives aux valeurs seuil.

    Précisons à ce niveau que le droit positif exige que les marchés passés par chaque autorité contractante et dépassant ces valeurs seuil soient traités et attribués conformément aux procédures définies dans le CMP. Les textes sont pourtant clairs dans les deux cadres d'étude; mais à l'analyse, on constate que certaines autorités contractantes, surtout au Sénégal, au mépris de la règlementation, continuent de recourir à un nombre exponentiel de Demandes de Renseignement et de Prix (DRP)170, procédure spécifique de passation qui d'ailleurs fera l'objet d'analyse plus poussée dans les parties à venir.

    Dans la même logique, notons qu'il arrive que des fournisseurs soient évalués sans procédure d'appel d'offres préalable, probablement parce que les décideurs ont choisi une société particulière pour des motifs personnels, et ce, au risque d'ignorer le meilleur soumissionnaire potentiel. Une telle situation peut porter atteinte à la qualité des prestations fournies.

    En outre, des informations utiles ne sont pas communiquées à tous les candidats de la même manière171. Cette situation, constitutive d'une violation du principe d'égalité de traitement des candidats, est telle que certains candidats privilégiés sont préalablement informés des délais de dépôt des offres au détriment des autres. Cela leur offre un avantage considérable puisque les délais leur ont été communiqués d'avance, ce qui leur laisse le temps de se préparer et de déposer à temps leurs offres.

    169 Il s'agit ici d'une fragmentation délibérée des contrats pour ne pas dépasser les valeurs seuil légales à partir desquelles la mise en concurrence est obligatoire.

    170 La DRP est une procédure par laquelle les PRMP procèdent à des consultations de fournisseurs pour les achats ou services normalisés d'un prix inférieur aux seuils de passation. Le recours à cette procédure exige que l'autorité contractante s'adresse au moins à 3fournisseurs ou entrepreneurs.

    171 L'autorité contractante donne ici des délais irréalistes afin de réduire le temps imparti pour répondre à l'appel d'offres ouvert.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 66

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    En résumés, ces exemples montrent à quel point les procédures de passation des marchés publics sont, pendant la phase préalable à l'appel d'offres, compromises par les malversations de tous genres, allant des moindres aux plus audacieuses. Malheureusement, la phase proprement dite d'appel d'offres n'en est pas épargnée.

    B- Une compromission pendant la phase d'appel d'offres

    La phase d'appel d'offres est émaillée autant que celle qui la précède d'irrégularités manifestes. A cet effet, on dénote une kyrielle d'atteintes aux règles de transparence aussi bien au Sénégal qu'au Togo. Pour ce faire nous allons procéder successivement à travers ces deux sphères au recensement de ces atteintes.

    D'abord s'agissant du Togo il faut souligner qu'au total, 841 marchés publics toutes catégories confondues ont été conclus au cours de l'exercice 2015 dont 52% d'appels d'offres. Le rapport de synthèse de l'ARMP Togo sur la conformité de la procédure de passation des marchés publics passés en 2013, fait remarquer que la passation des marchés par la méthode de l'appel d'offres souffre de malversations tant au niveau des autorités contractantes qu'au niveau des candidats.

    En effet, en plus des défaillances relatives au système d'archivage, il a été dénoncé un défaut de publicité pour certains marchés, avec pour conséquence une inaccessibilité pour le public à l'information relative à la procédure d'appel d'offres. Aussi, les critères de sélection du soumissionnaire qui a remporté le contrat ne sont-ils pas toujours publiés alors qu'ils devraient l'être selon les exigences du CMP.

    D'un autre côté, des informations pertinentes ne sont pas toujours distribuées aux candidats de manière équitable ce qui biaise la transparence et porte un revers au principe d'égalité de traitement. En ce qui concerne l'état de la transparence sur le délai de réponse à un appel d'offres public, on constate qu'il n'est pas appliqué à l'ensemble des soumissionnaires de manière équitable. Il ressort qu'il est excessivement court, et par conséquent, seules les entreprises bénéficiant de connaissances approfondies ont le temps de préparer le dossier d'appel d'offres.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 67

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Mais à bien considérer les choses, il ressort que tel un effet papillon172, un manquement en amont est susceptible de bouleverser complètement l'état de la transparence le long de la procédure d'appel d'offres. En effet, le défaut de publicité évoqué plus haut entraine inévitablement une absence de la concurrence et par ricochet un coût trop élevé en ce qui concerne l'offre financière de l'entreprise. Au regard de ce dernier aspect, il apert que c'est le principe de l'efficience des procédures qui en prend un coup, et pas des moindres.

    Mais au-delà des atteintes dont sont auteures les autorités contractantes, des pratiques peu louables sont de plus en plus imputées à l'action des entreprises candidates. Dans ce cas de figure, des concurrents se concertent pour fixer le prix d'achat à un niveau artificiellement élevé, se rendant de ce fait coupables de collusion. En outre, des entreprises offrent-elles des pots-de-vin pour avoir accès à des informations confidentielles sur l'importance relative des différents éléments de l'appel d'offres ou sur les soumissions d'autres concurrents. Il s'agit là et d'une façon on ne peut plus manifeste, d'une pratique constitutive de corruption, portant atteinte à l'égalité d'accès à l'information des candidats. Aussi convient-il de rappeler que certaines entreprises soumettent de faux certificats d'assurance qualité, permettant ainsi à des entreprises non qualifiées de participer au processus de mise en concurrence.

    Quant au Sénégal, il n'échappe pas non plus à ces atteintes qui émaillent l'appel d'offres. Le rapport annuel de l'ARMP pour le compte de l'année 2014 indique qu'au Sénégal, les appels d'offres représentent 80,26 % (dont 53,04% pour l'AAO) en termes de valeur et 14,50% (dont 6,16% pour les AAO) en termes de nombre. Le rapport fourni par l'ARMP dénonce un fait alarmant, notamment le faible recours à l'appel d'offres ouvert en termes de nombre. Sur les 11 autorités contractes qui composent le 1er périmètre de contrôle issu de ce rapport annuel, on constate que 6 d'entre elles n'ont pas lancé d'appels d'offres ouverts.

    Par contre sur les 5 autres restantes, on note que l'une d'entre elles a passé 91,22% de la valeur des appels d'offres ouverts. Ainsi toute réflexion faite, le mode principiel de passation des marchés semble, au vu de son nombre, devenir une procédure d'exception même si cette

    172 Expression venant de l'anglais « Butterfly efffect » et qui est matérialisée par une chaine d'évènements qui se suivent les uns les autres et dont le précédent influe sur le suivant.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 68

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    supposition est battue en brèche lorsque l'on raisonne en fonction de la valeur financière de ces marchés.

    Par ailleurs, en plus du défaut d'archivage173 des dossiers d'appel d'offres, dû à l'insuffisance de dotation en matériels et équipements d'archivage des documents de passation des marchés, on dénonce une insuffisante maîtrise des textes qui organisent les modalités de mise en oeuvre des procédures de contrôle de la validité des pièces administratives requises aux articles 43 et 44 précisés par l'article 45 du CMP. Des demandes de renouvellement de pièces sont adressées aux soumissionnaires, pour des pièces qui donnent pourtant droit à la participation aux marchés publics, au regard des dispositions de l'article 45 du CMP.

    Au terme de l'article 115 du CMP, il est fait obligation à tout titulaire d'un marché dont le montant dépasse la valeur seuil, de présenter une garantie de la bonne d'exécution de celui-ci, destinée à couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services. Mais il est regrettable de constater dans les faits, que la garantie de bonne exécution ne soit pas fournie dans les délais requis par cette disposition du code sénégalais des marchés publics.

    En définitive, même si l'appel d'offres ouvert demeure le mode recommandé de passation des MP pour les autorités contractantes, il reste marqué dans son application par des critères abusifs ou discriminatoires, qui sont une entrave au principe de libre accès à la commande publique. En effet, même si l'importance du marché le requiert, l'exigence faite aux candidats de présenter des états financiers certifiés sur une période de 3 ans et des références des marchés similaires constituent une barrière à l'accès aux marchés publics pour les entreprises de création récente, même si elles ont les capacités techniques et financières pour exécuter lesdits marchés.

    Des irrégularités dans les prérogatives de la commission et de la cellule de passation des marchés méritent elles aussi d'être clarifiées.

    173 Cas de la « Fondation Droit à la Ville » (FDV) dont la cellule de passation des marchés, n'ayant pas de bureau, ne dispose pas de locaux destinés à l'archivage et au classement des documents de passation des marchés, rendant difficiles les travaux de collecte d'informations. Cf. Mission de Revue Indépendante de la Conformité de la Passation des Marchés de la Fondation Droit à la Ville, Aout 2015, P.31

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 69

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Paragraphe 2 : Les anomalies dans le traitement des dossiers

    Le traitement des dossiers par l'autorité contractante peut révéler des irrégularités sur plusieurs plans. Les anomalies dont il est question ici peuvent dès lors être structurées, à travers l'évaluation compromise des offres (A) et l'attribution irrégulière des marchés (B).

    A- Une évaluation compromise des offres

    Au terme des dispositions des articles 35 du CMP Sénégal174 et 1er du CMP Togo175, on retient qu'une fois que les offres ont été déposées par les candidats, la commission de passation des marchés de l'autorité contractante concernée procède à l'ouverture publique des plis et à l'évaluation des offres qui ont été déposées dans les délais contenus dans le dossier d'appel d'offres. Ces deux phases concentrent cependant des manquements aux règles de transparence à cette étape de la procédure car ce sont elles qui détermineront respectivement la prise en connaissance du contenu des offres techniques des candidats et leur conformité par rapport aux spécifications du DAO de même que l'évaluation de leurs offres financières.

    Au Sénégal, le dernier rapport publié de l'ARMP176 indique que la conduite de plusieurs processus d'évaluation des offres est marquée par une absence de formalisation dans les rapports d'évaluation et un contrôle insuffisant de la conformité technique des offres aux spécifications des cahiers de charges, en violation des dispositions de l'article 59 du CMP relatif aux critères d'évaluation des offres.

    En outre, les opérations d'audit portant sur les marchés passés par la Fondation Droit à la Ville font état de graves manquements dans les activités de la commission et dans celles de la cellule

    174 « Au niveau de chaque autorité contractante, sont mises en place une commission des marchés chargée de l'ouverture des plis, de l'évaluation des offres et de l'attribution provisoire des marchés ainsi qu'une cellule de passation des marchés chargée de veiller à la qualité des dossiers de passation des marchés ainsi qu'au bon fonctionnement de la commission des marchés, dans les conditions fixées par arrêté du Ministre chargé des finances après avis de l'organe chargé de la régulation des marchés publics.»

    175 «Commission constituée par une autorité contractante pour procéder à l'ouverture et à l'évaluation des offres ; elle recommande, dans ses conclusions, l'attribution ou non du marché ou de la délégation ».

    176 Rapport annuel 2014 de l'ARMP Sénégal.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 70

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    de passation177 des marchés de ladite fondation. Aussi, la désignation du coordonnateur de la cellule de passation des marchés comme membre du comité d'évaluation des offres et membre de la commission de réception méconnait-elle les dispositions de l'article 36 du code qui régit la composition de la commission de passation des marchés des autorités contractantes.

    Rappelons à cet effet dans l'esprit du code et ce, pour des questions de transparence, que les membres de la cellule de passation des marchés et ceux de la commission de passation doivent être désignés de manière distincte. Aussi a-t-il été constaté que la commission des marchés ne s'est pas réunie pour procéder à l'examen du rapport d'évaluation, au mépris des exigences de l'article 39 alinéa 2 du code et du décret n°1048 du 27/07/2011.

    Les anomalies variant dans leurs spécificités d'une autorité contractante à une autre, mais demeurant communes dans leur esprit général d'atteintes au principe de la transparence, on constate une fois de plus dans la phase d'évaluation des offres, une opacité de la définition des critères de sélection, qui de ce fait rend le processus de sélection subjectif plutôt qu'objectif.

    En effet, les rapports d'évaluation de certaines autorités contractantes ont été très sommaires. C'est le cas de l'Agence Sénégalaise d'Electrification Rurale (ASER) où les évaluations ont été faites uniquement sur la base d'une comparaison des prix, en violation des articles 59 et 70 du CMP alors qu'elles devaient se faire conjointement avec l'offre technique178.

    Pour d'autres autorités contractantes comme la SENELEC, il a été constaté que le rapport d'évaluation des offres ne précise pas la date d'approbation de deux des marchés qu'elle a passés, pour le compte de l'année 2013.

    Aussi, note-t-on une violation du principe d'intangibilité des offres au niveau de l'Agence Nationale de l'Aquaculture suite à un ajustement et non une correction d'erreur arithmétique qui a été opéré sur l'offre d'un soumissionnaire, pour la rendre conforme au dossier d'appel à concurrences par la commission alors que cela n'était pas de son ressort. Il en a été de même lors

    177 Le rapport dénonce à cet effet une mise en place tardive de la commission de passation des marchés violant ainsi les dispositions de l'article 35 du CMP et de l'arrêté 12/783 du 26/12/2012

    178 Cabinet d'audit Grant Thornton, Revue indépendante de la conformité de la passation des marchés des autorités contractantes du groupe 2 (Gestion 2014), Agence Sénégalaise d'Electrification Rurale, Rapport définitif, Page 4.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 71

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    du processus de passation pour l'acquisition de deux unités de fabrique d'aliments de poisson ou l'un des soumissionnaires a apporté par lettre, des modifications sur son offre financière.

    En ce qui concerne le Togo, les phases d'ouverture et d'évaluation des offres sont organisées sous la responsabilité de la Personne Responsable des Marchés Publics, assistée dans cette mission par une Commission de Passation des Marchés Publics, chargée des opérations d'ouverture et d'évaluation des offres et des propositions. Là encore, nous avons relevé des irrégularités.

    En effet à ce niveau de la procédure, le dernier rapport de synthèse de l'ARMP portant sur les marchés publics conclus au cours de l'année 2015, impute à certaines autorités contractantes, un non-respect ou une interprétation erronée des clauses des dossiers d'appel à la concurrence lors de l'évaluation et la comparaison des offres. Ainsi ce rapport déplore-t-il une violation du principe d'égalité de traitement des candidats, déjà constatée lors de l'évaluation des offres, notamment à travers la tolérance pour des écarts graves commis par certains soumissionnaires et l'austérité avec laquelle sont traités d'autres candidats moins indélicats.

    Par ailleurs, il a été rapporté que certaines autorités contractantes ont déclaré conformes certaines offres alors qu'elles ne l'étaient pas et inversement. Toujours dans cette logique de mauvaise évaluation des offres, le rapport de l'ARMP fait état d'un cas de déclaration d'une offre anormalement basse sans que l'autorité contractante ait au préalable pris le soin d'inviter le soumissionnaire à justifier son prix comme l'exigent les dispositions de l'article 64 du code togolais des marchés publics. En outre, il est fait mention d'un cas de rejet d'une offre pour absence de la page de signature de la lettre de soumission alors qu'elle y figurait.

    Pour ce qui est des marchés passés par la Société d'Administration de la Zone Franche (SAZOF) en 2013, en plus de la non-obtention de l'avis de la commission de contrôle des marchés publics sur le rapport d'évaluation des offres, il est constaté que le rapport d'analyse des offres est signé mais ses pages ne sont pas paraphées par les membres de la sous-commission en charge de l'analyse des offres pour les 3 marchés179, entrainant de ce fait un risque de non-contrôle sur la fiabilité et la régularité de la procédure de contrôle.

    179 Rapport de revue indépendante de la conformité des procédures de passation, de contrôle et d'exécution des marchés publics passés par la Société d'Administration de la Zone France (SAZOF) au titre de l'année 2013.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 72

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Quant à la Société Togolaise de Eaux, l'analyse de l'évaluation des marchés par elle passés par AOO en 2013 montre que pour 4 des 7 marchés audités soit 57%, le rapport d'analyse des offres n'a pas été soumis à l'approbation de la commission de contrôle des marchés publics (équivalent de la cellule de passation des marchés en droit sénégalais).

    Tous ces phénomènes susmentionnés, témoignent d'un manque de transparence dans le processus d'évaluation, et dont les causes pourraient dans un examen antérieur sur la question, relever de la corruption des agents publics ou du favoritisme au profit d'un des candidats. Somme toute, voilà autant d'anomalies que d'incompréhensions qui d'une manière significative compromettent la transparence dans le processus d'évaluation des offres. Qu'en est-il alors de l'état de la transparence au plan de l'attribution des marchés ?

    B- Une attribution irrégulière des marchés

    Une fois les offres techniques et financières évaluées, il incombe à la commission de passation des marchés de l'autorité contractante de procéder à l'attribution du marché conformément aux dispositions des articles 84 du CMP Sénégal et 31 du CMP Togo. En effet, selon les exigences d'intégrité qui régissent la commande publique et sur fond de transparence, l'autorité contractante ne peut attribuer le marché qu'au soumissionnaire ayant présenté non seulement une offre technique conforme aux spécifications du dossier d'appel d'offres ou de la demande de propositions, mais aussi une offre financière jugée moins-disante. Toutefois dans la pratique, ces exigences qui garantissent la transparence sont dans bien de cas occultées. A cet effet, on signale des malversations aussi néfastes les unes que les autres dans cette phase cruciale du processus de passation.

    D'abord en ce qui concerne le Sénégal, il y a lieu de souligner une défaillance au sein de certaines commissions de passation. A cet effet, le rapport d'audit de l'ARMP sur les marchés passés en 2014 nous instruit à suffisance sur cet état de fait. Entre autres on note des délais anormalement longs constatés entre l'ouverture des plis et l'attribution des marchés imputés à

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 73

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    certaines autorités contractantes180 violant ainsi les dispositions de l'article 70 du CMP qui fixe ce délai a 15 jours181. Mais les faits les plus délicats s'articulent autour des phénomènes des conflits d'intérêts182 et de favoritisme qui semblent à bien des égards être présents dans le processus, depuis l'évaluation des offres jusqu'à l'attribution provisoire du marché.

    En effet, les conflits d'intérêt dans les commissions de passation des marchés, peuvent résulter de l'action de plusieurs ou d'une seule personne. Mais le plus souvent, il est le fait du détenteur du pouvoir discrétionnaire. Sous cet angle, il peut être associé au risque de partialité lorsque la transparence de la prise de décision est faible. Ainsi le risque est plus élevé si un seul individu dispose d'un pouvoir discrétionnaire sur toutes les décisions, que si plusieurs personnes sont impliquées dans la prise de décision. On signale à ce effet que le Directeur de l'Administration Générale et de l'Equipement (DAGE) du ministère du tourisme et du transport aérien (MTTA) est président de la commission des marchés, président de la commission de réception et au-delà de ce cumul de fonctions, contraire au principe de séparation des fonctions, il agit comme PRMP en approuvant certains contrats sans avoir reçu une délégation formelle du ministre dépensier au sens de l'article 27 du CMP183 à cet effet. Cette situation a eu pour conséquence la rupture du principe d'égalité de traitement des candidats184 lors de l'évaluation et de l'attribution de certains marchés.

    En outre, certains candidats dont les offres n'ont pas été retenues, n'ont-ils pas été informés par écrit du rejet de leurs offres. De toute évidence, ce défaut de notification ne s'inscrit pas dans une

    180 Il s'agit de la commission de passation des marchés des autorités contractantes comme le Centre Hospitalier Régional de Thiès (CHRT), le Centre Hospitalier Régional Ibrakhima Niass de Kaolack (CHREIN-KL), la Société d'Infrastructure et de Réparation Navale (SIRN), la Société Nationale du Port Autonome de Dakar (SN PAD).

    181 Ce délai peut être prorogé dans la limite maximale de 10 jours sur demande motivée de l'autorité contractante adressée à la DCMP.

    182 Il s'agit d'une situation dans laquelle les membres des commissions se retrouvent à orienter leur décision dans le sens des intérêts d'un soumissionnaire pour lequel ils prennent parti, contrevenant ainsi aux exigences d'intégrité et de transparence dans l'attribution des marchés.

    183 Article 27 CMP Sénégal « La procédure de passation des marchés est conduite par la personne responsable du marché, qui est habilitée à signer le marché au nom de l'autorité contractante. Les marchés conclus par une personne non habilitée à cet effet sont nuls et de nullité absolue.

    L'autorité contractante peut désigner d'autres personnes responsables des marchés, en précisant les catégories et les montants des marchés pour lesquels celles-ci disposent des compétences de personnes responsables de marchés ».

    184 Il s'agit du marché relatif à l'acquisition du matériel de transport à la DAGE.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 74

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    logique de transparence puisque les soumissionnaires évincés ont le droit de prendre connaissance des raisons qui ont motivé le rejet de leurs offres. Par ailleurs, on remarque que lors de l'attribution des marchés, les décideurs manquent parfois d'impartialité comme cela a été le cas dans l'affaire opposant la DCMP à la SENELEC185.

    Quant au Togo, les constats relatifs à l'attribution des marchés sont inquiétants au moins autant si ce n'est plus qu'au Sénégal. A cet effet, si nous prenons d'une part les marchés de la (SAZOF) évoqués précédemment, il ressort dans les travaux de la commission de passation des marchés que les offres reçues ne sont pas enregistrées dans leur ordre d'arrivée dans un registre spécial mais plutôt sur des papiers imprimés sur format A4. Plus grave, le procès-verbal d'attribution n'a pas été publié après la validation du rapport d'évaluation par la DNCMP avec pour conséquence, une non-information des soumissionnaires non retenus à qui la possibilité n'est plus de ce fait donnée de faire un recours, recours qui a priori constitue une garantie prônée par le principe de transparence.

    D'autre part, l'analyse de la suite de l'attribution provisoire des marchés par la commission de passation de la LONATO (Loterie Nationale Togolaise) par AOO révèle que deux 2 marchés sur les 03 audités soit 66,67% n'ont pas été approuvés dans le délai de validité des offres, entrainant non seulement un allongement des délais de réalisation de l'activité mais aussi un risque considérable de non-validité des offres. Par ailleurs le rapport déplore le défaut de publication d'avis d'attribution définitive dans le journal officiel des marchés publics ou tout autre journal habilité sur la totalité des marchés audités186 causant ainsi un déficit d'informations des soumissionnaires et du public en général.

    Pour ce qui est des marchés passés par appel d'offres ouvert par la société nationale de téléphonie mobile TOGOCEL et le Port Autonome de Lomé, c'est le même son de cloche que la LONATO, en ce qui concerne l'approbation des marchés audités dans le délai de validité des offres, mais dans une proportion de risque quelque peu élevée. Il en est de même pour les formalités de publicité dans le journal officiel des marchés publics relativement à l'avis

    185 Nous aborderons cette question de manière plus approfondie dans les parties à venir.

    186 Cabinet Erudit, Rapport de revue indépendante de la conformité des procédures de passation, de contrôle et d'exécution des marchés publics passés par la LONATO au titre de l'année 2013, Page 20.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 75

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 76

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    d'attribution définitive.

    Tout bien pesés, les faits ci-haut cités constituent aux bas mots les manquements les plus partagés dans l'évaluation et l'attribution des marchés passés par AOO, dans la mesure où la majorité des autorités contractantes n'ont pas échappé à ces constats. Ces derniers d'ailleurs ne se limitent pas qu'aux procédures normales de passation des marchés.

    Section 2 : Des constats relatifs aux procédures particulières

    Les procédures particulières de passation sont celles qui font appel à des règles distinctes de celles sollicitées pour les marchés par appel d'offres ouvert. Nos constats sur l'état de la transparence porteront à cet effet sur les procédures de concurrence restreinte (Paragraphe 1) et les procédures spécifiques de passation (Paragraphe2).

    Paragraphe 1 : Les méthodes de concurrence restreinte

    Les procédures restrictives de concurrence sont celles qui n'admettent pas la concurrence, ou l'admette mais à un degré réduit. Elles sont du fait de leur particularité, parfois utilisées dans un contexte qui ne garantit pas toujours la transparence. A cet effet, nos observations porteront successivement sur les incohérences relatives à appel d'offres restreint (A) et sur celles portant sur l'entente directe(B).

    A- Des incohérences quant à l'appel d'offres restreint

    Comme cela a prévalu dans les parties précédentes, nous rappelons que les constats évoqués, de même que les marchés sur lesquels ils ont porté ne sont pas exhaustifs. Ces constats sont cependant récurrents et c'est pour cette raison que nous avons choisi de nous intéresser à ceux qui d'une manière particulière altèrent la transparence dans le processus de passation.

    En guise de rappel, l'appel d'offres est dit restreint lorsque seuls les candidats sélectionnés par l'autorité contractante, sont autorisés à soumissionner187. Le recours à cette méthode de passation est subordonné à une autorisation préalable de la DCMP. Par ailleurs une autorité contractante ne

    187 Cf. article 73 CMP Sénégal et 23 CMP Togo

     
     
     
     
     
     

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    peut recourir à un AOR que dans les cas d'urgence simple, de marchés exécutés à titre de recherche d'essai d'expérimentation ou de mise au point et aussi des marchés que l'autorité contractante doit faire exécuter en lieu et place des titulaires défaillants, à leur frais et risques et enfin dans le cas des marchés ayant donné lieu à un appel d'offres infructueux.

    De la même façon que des atteintes ont été décelées dans chacune des étapes précédentes, il en sera de même dans cette partie de notre analyse. Ainsi au Sénégal, et sur la base du rapport de synthèse de l'ARMP au titre des marchés passés au cours de l'année 2014, des incohérences ont été dénoncées. Sur ce, nous allons analyser dans une logique non-exhaustive, des cas de non-conformité pris au hasard sur la base de ce rapport.

    Au Sénégal, l'examen des procédures par AOR a permis de noter que des critères discriminatoires figurent dans certains Dossiers d'Appel à la Concurrence, en violation des principes de libre accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats. A titre d'illustration, il a été noté que l'offre d'un des soumissionnaires pour l'AOR relatif à la sélection d'un prestataire pour un marché de fourniture de véhicule 4x4, attribué pour un montant de 71 400 000 F CFA, bien que moins-disante, a été rejetée au motif que ladite offre ne satisfait pas aux critères relatifs à la cylindrée, à la taille du réservoir et à la puissance fiscale. Il s'agit là de critères discriminatoires, constitutifs d'une entrave au libre accès à la commande publique et à l'égalité de traitement des candidats. Cette élimination a conduit l'autorité contractante à contracter avec un autre soumissionnaire, dont l'offre présentait un surcoût de 19.126.000. Il ressort de ce constat que non seulement les règles de transparence ont été négligées mais aussi les principes d'économie et d'efficacité de la dépense publique n'ont pas été suffisamment pris en considération dans la mise en oeuvre de cette procédure.

    En outre, si nous consultons le rapport définitif de l'ARMP publié en 2015 et portant sur les marchés relatifs à l'exercice 2014 de l'Agence Nationale pour l'Economie et la Maitrise de l'Energie (AEME)188, il ressort qu'un seul marché a été passé par appel d'offres restreint. Il s'agit du marché N°C 2168/14, relatif au programme d'analyse, de suivi et de réduction des dépenses

    188 Cabinet d'audit Grant Thornton, Revue indépendante de la conformité de la passation des marchés des autorités contractantes du groupe 2, Gestion 2014, Pages 3 et 4.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 77

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    d'électricité dans ce secteur public. A l'analyse de ce marché conclu pour un montant de 191 295 700 F CFA, il ressort qu'il a été le produit d'une relance suite à un appel d'offre infructueux. Cependant l'autorité contractante n'a pas pu fournir les lettres de relance.

    Au Togo, les marchés passés par appel d'offre restreint en 2013 s'élèvent à un effectif de quarante (40) pour un montant de vingt-six milliard huit cent soixante-treize millions trois cent soixante-treize mille sept cent soixante-quinze (26 873 373 775) FCFA et représentent 6% en nombre et 7% en valeur du total des marchés passés par l'ensemble des autorités contractantes sélectionnées189.

    Conformément aux dispositions de l'article 23 du code des marchés publics : « il ne peut être recouru à l'appel d'offres restreint que lorsque les biens, les travaux ou les services, de par leur nature spécialisée, ne sont disponibles qu'auprès d'un nombre de fournisseurs, d'entrepreneurs ou prestataires de service ». Malheureusement, il ressort de notre analyse que cette condition n'est pas toujours satisfaite dans la plupart des marchés passés par appel d'offres restreint.

    En définitive, à l'analyse des insuffisances relevées sur les marchés audités, il ressort de façon globale que les retards notés dans les AOR relèvent d'un paradoxe puisque l'AOR est une procédure indiquée pour les situations d'urgence, en plus des cas de substitution d'entreprises défaillantes. On comprend dès lors sur l'interprétation de ces rapports d'audit que les irrégularités notées sont dues à un manque de maîtrise de la procédure. En effet, en dépit du contrôle a priori de la DCMP, les autorités contractantes consultent des entreprises sans s'assurer de leur qualification aux plans technique et juridique. C'est ce qui explique que des candidats soient écartés après évaluation des offres pour défaut de qualification, en violation des dispositions règlementaires et des principes qui régissent les AOR. En outre, les reports des dates d'ouverture pour insuffisance du nombre des offres reçues sont fréquents, notamment lorsque le nombre de candidats consultés est inférieur à trois. Quid alors des irrégularités relatives à l'entente directe ?

    189 Cabinet ERUDIT, Rapport de Synthèse de la revue indépendante de la conformité des procédures de passation, de contrôle et d'exécution des marchés publics passés par les autorités contractantes du Togo au titre de l'année 2013, Page 13.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 78

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    B- Des irrégularités liées à l'entente directe

    Pour rappel, les marchés sont dits par « entente directe » lorsque l'autorité contractante engage directement les discussions qui lui paraissent utiles avec les candidats et attribue le marché au candidat qu'elle a retenu. Dans les codes sénégalais et togolais des marchés publics, une autorité contractante ne peut recourir à ce mode dérogatoire de passation que dans les cas de marchés d'exclusivité, de marchés complémentaires, de marchés secret défense et enfin de marchés liés à des cas d'urgence impérieuse. Soulignons que toute procédure de passation de marchés par entente directe nécessite au préalable un avis190 ou une autorisation191 de la DCMP et le cas échéant, donnent ensuite lieu à un compte rendu détaillé. Toutefois ces marchés n'échappent pas du fait de leur caractère dérogatoire, aux exigences de transparence. C'est ainsi que dans les faits, des autorités contractantes recourent aux ententes directes sans que les conditions qui définissent leur transparence soient réunies.

    A cet effet au Sénégal, on constate un recours aux procédures faisant l'objet d'exceptions juridiques, par exemple pour des raisons de "sécurité nationale", ou création d'une situation d'urgence pour passer un marché dans des conditions exceptionnelles. Au titre de l'exercice 2014, 35 marchés des 2366 ont été passés par entente directe (1,48% en nombre et 6,72% en valeur) pour un montant de 8 186 430 634 F CFA192. De même, même si la passation d'un certain type de marchés se justifie par l'entente directe, il existe des cas où des autorités contractantes se livrent maladroitement à des incohérences dans la façon dont il faut procéder. Cette situation s'est illustrée à travers les deux (2) marchés passés par entente directe par l'Agence des Aéroports du Sénégal (ADS) au titre de l'année 2014. En effet, on remarque à l'analyse que l'ADS s'est méprise sur la formule à adresser à la DCMP pour le recours à cette méthode de passation. Ainsi, une autorisation a-t-elle été requise par l'ADS auprès de la DCMP pour recours

    190 On ne recourt à une demande d'avis que pour les marchés de défense et sécurité, les marchés liés à une urgence impérieuse, les marchés passés dans le cadre des mesures de mobilisation générale et de mise en garde. Cf. art. 76 CMP Sénégal.

    191 Une autorité contractante ne recourt à la demande d'autorisation que pour les marchés d'exclusivité ou de

    complémentarité ou encore les marchés passés suite à une urgence impérieuse.

    192 Rapport annuel ARMP Sénégal relatifs aux marchés de 2014, page 55.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 79

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    à l'entente directe, alors que c'est plutôt son avis qui aurait dû être demandé, compte tenu des motifs invoqués dans les 2 procédures, conformément à l'article 76 alinéa 2 du CMP.

    En ce qui concerne le Ministère de la Santé et de l'Action Sociale, le rapport final de l'ARMP publié en Septembre 2015 grâce aux travaux d'audit du Groupement GMS/SSPM portant sur les marchés passés par entente directe par ledit ministère en 2014, fait état de deux marchés passés par cette méthode de passation. Ces marchés ont comme ceux qui ont précédé, été entaché d'irrégularités en ce qui concerne leur inscription dans le plan de passation des marchés de 2014, l'archivage de leur notification, le classement des copies de garantie dans le dossier.

    Au Togo, les marchés passés par entente directe au cours de l'exercice 2013 sont estimés à 142 pour l'ensemble des 34 autorités contractantes auditées193. De toutes les autorités contractantes auditées, Togo Télécom est celle qui s'est le plus illustrée avec un nombre record de recours à l'entente directe s'élevant à 68 marchés au total parmi lesquels, 8 seulement ont pu être audités194. Il a été remarqué que les propositions des fournisseurs pressentis n'ont pas fait l'objet d'analyse par une commission désignée par l'autorité contractante. Ce constat a eu pour conséquence, une méconnaissance des biens et services proposés par ces fournisseurs. On constate aussi qu'il y a eu une série de manquements parmi lesquels des absences de preuves relatives à l'enregistrement du marché avant son commencement, un défaut de publication de l'avis d'attribution définitive.

    D'un autre côté, si nous analysons les marchés conclus par la Nouvelle Société Cotonnière du Togo (NSCT), il ressort que l'unique procédé de passation par entente directe dont elle a eu recours n'a pas été justifié dans un rapport spécial validé par la commission de contrôle des marchés publics. Par ailleurs, il a été constaté que cette procédure n'a pas été approuvée par la DNCMP au mépris des dispositions de l'article 35 du Code des Marchés Publics. Cet état de fait a malheureusement conduit à un défaut de contrôle de la fiabilité et de la régularité de la procédure par la DNCMP.

    193 Rapport de synthèse ARMP-TOGO relatif aux marchés de l'exercice 2013 et publié en Novembre 2015, page 5 des annexes.

    194 Rapport du cabinet ERUDIT relatif aux marchés conclus par TOGO TELECOM en 2013 et publié en Octobre 2015, page 15.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 80

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Aussi constate-t-on lorsqu'on se réfère aux 4 marchés passés par entente directe par le ministère de la santé que le montant additionné des marchés de gré à gré, dépasse le seuil contraignant des 10% du montant total des marchés publics passés par cette autorité contractante, en violation de l'article 36 alinéa 3 du CMP195 du Togo. Il a aussi été révélé que pour la planification de ces 4 marchés, la demande de gré à gré n'a pas été justifiée comme cela a été le cas pour la NSCT. De même il y a eu un manquement aux exigences de publicité suite à l'attribution définitive de chacun de ces 4 marchés.

    D'une manière générale, il ressort qu'au Togo, certains marchés conclus par entente directe n'ont pas été passés en conformité avec les exigences règlementaires compte tenu non seulement des nombreux manquements notés et imputables aux autorités contractantes, mais aussi de l'absence de rigueur dans l'exercice des prérogatives dévolues aux organes de contrôle. Figure aussi sur la liste de ces manquements, un défaut de concurrence pour les marchés par entente directe éligibles à la concurrence mais aussi une absence de rapport de l'observateur indépendant destiné à l'ARMP sur tous les dossiers soumis pour revue sur les marchés passés par entente directe. C'est la preuve qu'au moment où les opérations d'audit ont été menées, la transparence n'était pas effective pour les marchés relevant de ce mode de passation.

    En définitive, les incidences du défaut de transparence altèrent à des proportions variables, la passation des marchés passés par des procédures dérogatoires. Mais ces atteintes ne demeurent pas moins visibles pour les marchés conclus par des méthodes spécifiques de passation.

    Paragraphe 2 : Les insuffisances relatives aux procédures spécifiques

    Lorsqu'il est question de l'analyse des procédures spécifiques, un certains nombres de points peuvent être soulevés en guise d'insuffisances. Il s'agira dans cette partie d'envisager successivement les anomalies liées aux DRP (A) et celles relatives aux autres procédures

    195Article 36 alinéa 3 du CMP Togo : « La direction nationale de contrôle des marchés publics veille à ce que, sur chaque année budgétaire, le montant additionné des marchés de gré à gré passés par chaque autorité contractante ne dépassent pas dix (10) pour cent du montant total des marchés publics passés par ladite autorité ».

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 81

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    spécifiques (B).

    A- Des anomalies liées aux demandes de renseignements et de prix

    Lorsque l'on scrute les méthodes de passation des marchés publics au Sénégal comme au Togo, il y a un constat qui interpelle et qui, difficilement pourrait passer sous silence. Il s'agit de la primauté des recours aux DRP. En effet, le mode principiel de passation des marchés publics qui est l'appel d'offre ouvert, semble au vu de son nombre, devenir une méthode d'exception au profit de la procédure de demandes de renseignements et de prix196.

    Ainsi au Sénégal, lorsqu'on analyse le PPM de l'exercice 2014, on constate que sur les 278 818 marchés qui ont été prévus, 64 057 devaient être passés par appel d'offres ouvert, 25 616 par appel d'offres restreint ou entente directe et 215 248 par demande de renseignements et de prix soit un taux de 71% de DRP197 pour l'ensemble des marchés à passer pour cette année.

    Ces précisions étant faites, il est possible d'envisager les atteintes qui, étant multiples, varient d'une autorité contractante à une autre. Dès lors, un regard sur les marchés passés par DRP par les ministères nous confronte à une évidence. Il s'agit du fait pour chaque direction relevant d'un ministère, de gérer de manière isolée ses demandes de renseignements et de prix, favorisant ainsi, le risque de fractionnement, surtout si celui-ci s'inscrit dans une logique obscure.

    A titre d'exemple, 498 demandes de renseignements et de prix ont été recensées au niveau du Ministère de l'Economie, des Finances et du Plan. Dans ce lot, des DRP de même nature passées par des directions différentes et qui auraient pu, avec une bonne planification, être regroupées ont été identifiées. Mais si l'on pousse loin l'analyse, on remarque que ces commandes par DRP sont généralement le fait de gestionnaires de programmes198 désignés par le ministre dépensier

    196 Constat à relativiser parce que malgré la primauté des DRP en termes de nombre, l'appel d'offres demeure en termes de valeur, la première méthode de passation.

    197ARMP Sénégal, Direction des Statistiques et de la Documentation portail des Marchés Publics, page 19.

    198 Nouveau concept initié par le nouveau cadre harmonisé des finances publiques pour désigner ce qu'on appelait avant, « Administrateurs de crédits délégués ».

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 82

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    conformément à l'article 18 du décret 2011-1880 du 24 novembre 2011 portant Règlement Général sur la Comptabilité Publique, qui tiennent absolument à avoir la main sur les crédits qu'ils administrent et agissent comme des Personnes Responsables des Marchés Publics, sans avoir été formellement désignés comme telles199 conformément aux dispositions des articles 27 et 28 du CMP.

    Dès lors, le constat qui se dégage à travers ces faits est que très souvent, le cumul de ces DRP de même nature dépasse le seuil de passation des marchés par appel d'offres et est assimilable à un fractionnement des marchés proscrit par les dispositions de l'article 54 alinéa 5 du CMP200.

    D'un autre point de vue et toujours pour le cas spécifique des DRP, il est indispensable de disposer des offres des soumissionnaires dont l'examen permettra de déceler les manquements aux règles de transparence. A cet effet, malgré les améliorations qui ont été reconnues au recours aux DRP, il convient cependant de reprocher à cette méthode spécifique de passation, des anomalies qui pour le moins portent atteinte aux exigences de transparence.

    Dans ce contexte, outre les manquements tels que la publication de marchés non-inscrits dans le PPM en violation de l'article 6 du CMP et imputable à certaines autorités contractantes comme le Centre Hospitalier Régional de Thiès, la Société d'Infrastructure et de Réparation Navale, pour ne citer que celles-là, on constate aussi des pratiques collusives de même que des simulations de concurrence. En outre remarque-t-on dans la constitution des listes restreintes, un manque de transparence matérialisé par la récurrence de la consultation conjointe de mêmes groupes d'entreprises.

    Au Togo, les atteintes à la transparence ne demeurent pas moins présentes dans les demandes de cotation201. Ainsi, en se basant sur le rapport de synthèse de l'ARMP publié en 2015 et qui porte sur les marchés passés en 2013 par cette méthode, on constate une série de faits tout aussi

    199 Les DRP signées par les administrateurs de crédits sont frappées de nullité en vertu des articles 18 et 22 du Code des Obligations de l'Administration qui sanctionnent respectivement le défaut d'autorisation et l'incompétence.

    200 Article 54 al. 4 du CMP Sénégal « Les autorités contractantes ne peuvent en aucun cas fractionner les dépenses ou sous-estimer la valeur des marchés de façon à les soustraire aux règles qui leur sont normalement applicables en vertu du présent décret ».

    201 Expression utilisée par le CMP Togo pour la passation des marchés situés en dessous des seuils de passation. Cf. les articles 11, 12 et 15 u CMP Togo.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 83

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    saisissants que pernicieux vis-à-vis des idéaux de transparence. En effet, sur 87 cotations auditées, 23 n'ont pas été inscrites au PPM.

    En plus de cela, il a été constaté une inexistence des dossiers de demandes de cotation pour un certain nombre de marchés, en dessous du seuil202 avant le lancement de la procédure. Cette situation a entrainé une non-information des soumissionnaires sur les spécifications techniques des biens à acquérir, les critères d'évaluation des offres et les obligations des différentes parties.

    En outre, Neuf (09) demandes de cotation sur quatre-vingt-sept (87) auditées n'ont pas été soumises à la Commission de Contrôle des marchés publics pour validation, entrainant un défaut de contrôle par celle-ci sur la fiabilité et la régularité de la procédure. Selon les exigences du code, les demandes de cotation doivent être adressées au moins à 5 prestataires sélectionnés à partir d'un registre tenu par l'autorité contractante. Là encore, sur les 87 cotations auditées, 18 ont manqué à cette obligation. L'analyse de ce dernier aspect montre à suffisance qu'il y a eu dans la mise en oeuvre de cette procédure, un défaut de mise en concurrence d'un nombre suffisant de prestataires et de fournisseurs potentiels. Cette situation a probablement pour le moins entrainé un risque d'obtention de prix non compétitifs.

    Une analyse des marchés passés par DRP par la Nouvelle Société Cotonnière du Togo (NSCT) nous renseigne à suffisances sur les incohérences à chaque étape de la passation. Sur 41 marchés, 11 l'ont été par appel d'offres ouvert, 1 par appel d'offres restreint, 1 par entente directe, et 28 par DRP soit un taux de 68% pour ces derniers203. En plus de cela, on constate pendant leur planification et la préparation des dossiers, une violation de l'article 9 du CMP. Quant à la phase d'ouverture et d'évaluation des offres, il a été constaté qu'il n'existait pas au niveau de la commission de passation, un registre spécial, coté et paraphé destiné à l'enregistrement des offres dans leur ordre d'arrivée. Mais bien plus grave, la NSCT a très souvent omis d'informer systématiquement par écrit, les soumissionnaires non retenus du motif du rejet de leurs offres et d'en conserver les preuves. En outre, la NSCT ne procède pas à la publication systématique du

    202 La demande de cotations au Togo s'applique aux marchés dont le montant est compris entre 3 millions et 15 millions de francs CFA.

    203 Cabinet ERUDIT, Rapport de Revue indépendante de conformité des procédures de passation des marchés passés par la NSCT au titre de l'année 2013, publié en octobre 2015, Page 8.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 84

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    procès-verbal d'attribution du marché après l'obtention de l'avis de non-objection de la DNCMP sur le rapport d'évaluation des offres.

    Quant à la phase de signature du contrat, on déplore un non-respect d'attribution du marché pendant le délai règlementaire de même qu'une absence de preuve de l'enregistrement du marché avant exécution et un défaut de publication dans le journal officiel, de l'attribution définitive du contrat.

    Somme toute, ces irrégularités sont principalement imputées aux autorités contractantes puisqu'aucun acteur extérieur n'est impliqué dans les DRP. Les audits ont de ce fait mis en évidence les nombreuses dérives substantielles, découlant non seulement de l'absence de maîtrise des procédures mais aussi d'une volonté délibérée de contournement de la règlementation.

    B- Des anomalies relatives aux autres procédures spécifiques

    Les marchés de prestations intellectuelles ne sont pas, malgré leur spécificité, exempts de vices entachant la transparence au cours de leur passation. Il importe toutefois de faire un bref rappel définitoire de cette catégorie propre de marchés publics. Ainsi en guise de définition, un marché de prestation intellectuelle est celui portant sur un métier du savoir dont les résultants précis ne peuvent être définis préalablement à son exécution. Ces marchés sont immatériels et sont caractérisés par la « co-production », ce qui signifie que le client et le prestataire contribuent tous les deux à la réussite de la prestation.

    Quant aux atteintes, on note au Sénégal et ce pour le compte de certaines autorités contractantes, une insuffisante maitrise des procédures de passation des marchés de prestations intellectuelles. C'est le cas par exemple du Ministère de la Formation Professionnelle, de l'Apprentissage et de l'Artisanat (MFPAA) qui a traité en 2014, les marchés de prestations intellectuelles comme s'il s'agissait de de marchés de services courants ou de fournitures, en violation de l'article 80 du

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 85

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    CMP204.

    En outre, toujours pour le même ministère, il a été constaté relativement à la sélection d'un consultant pour l'élaboration du projet annuel de performance attribué pour un montant de 24 780 000F CFA, une incohérence entre la liste des candidats invités et la liste des soumissionnaires inscrits au niveau du procès-verbal d'ouverture des plis. En effet, l'examen de la liste des soumissionnaires a permis de noter que trois autres candidats ont soumissionné en lieu et place des trois candidats invités de la liste restreinte. Cependant, l'examen des propositions des nouveaux candidats a permis de noter que ces propositions, sous forme de facture pro forma205, sont venues s'ajouter à celles des candidats de la liste restreinte présélectionnée.

    Par ailleurs, en ce qui concerne toujours les demandes de propositions, il ressort des marchés passés par les dix autorités contractes du groupe IV, auditées au titre de l'année 2014, que celles-ci ont eu recours à cinq marchés de prestations intellectuelles pour un coût global de 158 313 756 F CFA. Le rapport d'audit fait état de situations alarmantes parmi lesquelles la non-inscription au PPM de la plupart des marchés transmis à la DCMP comme ce fut le cas pour le Centre Hospitalier National Universitaire de FANN (CHNUF).

    D'un autre côté, l'article 80 alinéa 1.a dispose que « ...Lorsqu'un nombre minimum de trois candidat n'est pas réuni à la date de réception des offres ou après évaluation, l'autorité contractante ouvre un nouveau délai qui ne peut être inférieur à dix (10) ouvrables et invite de nouveaux candidats... ». Cependant, il n'a pas été fait mention d'une telle ouverture de délai pour les demandes de propositions auxquelles a eu recours le Ministère de la Pêche et de l'Economie Maritime (MPEM) au cours de l'exercice 2014206. En dernier lieu mais pas de façon exhaustive, on note que les dossiers de demandes de propositions de certaines autorités contractantes comme le Ministère de la Santé et de l'Action Sociale (MSAS), ne prévoient pas la

    204 Cet article est relatif aux dispositions spécifiques aux marchés de prestations intellectuelles.

    205 La facture pro forma est un document commercial qui est utilisé lors des échanges entre une entreprise commerciale et son prospect. Il s'agit pour la personne qui propose un produit ou un service d'établir une facturation pour la prestation. L'expression « pro forma » vient du latin et signifie « pour la forme ». www.droit-finances.commentcamarche.net, consulté le 31 octobre 2016.

    206 Rapport annuel de l'ARMP pour les marchés de l'exercice 2014.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    production des pièces administratives par les candidats, violant ainsi l'article 44 du CMP, relatif aux renseignements et justifications à fournir.

    Au Togo, les marchés de prestations intellectuelles bien que moins nombreux par rapport au Sénégal, gardent néanmoins des faisceaux d'insuffisances quoique non-substantielles, relativement à l'effectivité des règles de transparence auxquels ils sont en principe soumis. Mais sur les trois dernières années, les différents rapports d'audit de l'ARMP que nous avons consultés ne nous ont pas révélé des manquements ayant porté atteinte aux règles de transparence. Toutefois le rapport de synthèse des marchés de l'exercice 2012, révèle cependant une absence de la mise en oeuvre de la phase « manifestation d'intérêt » sur certains marchés de prestation intellectuelle. En plus de cela, il a été constaté que l'effectivité n'est pas souvent justifiée par un livrable ou une attestation de service fait pour des marchés de prestations intellectuelles.

    Doit, pour terminer cette analyse, concernant les procédures spécifiques, être abordé le cas des offres spontanées. En effet l'analyse des offres spontanées met en évidence une propension pour les autorités contractantes surtout au Sénégal en ce qui concerne le recours à cette méthode de passation des marchés. Les principaux constats sont relatifs au recours systématique à l'entente directe avec les entreprises ayant présenté des offres spontanées sans que ces entreprises n'obéissent aux conditions énumérées par l'alinéa 3 de l'article 81 du CMP du Sénégal. Précisons que le recours aux offres spontanées fait partie des innovations apportées en 2014 par le code sénégalais des marchés publics. Mais cette notion n'existe pas pour le moment en droit positif togolais, ce qui explique l'absence de constat relativement à cette méthode.

    En définitive, un parcours de ce qui a évoqué précédemment fait réaliser que la transparence, en plus d'être affectée en amont de la soumission, connait un parcours aussi délicat que tortueux au cours de la mise en oeuvre des méthodes de passation des marchés. Cependant, lorsqu'on continue d'explorer les procédures de passation, on remarque que celles-ci ne présentent pas moins de difficultés quant aux différents mécanismes de contrôle.

    Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 87

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    CHAPITRE II : DIAGNOSTIC DES MECANISMES DE CONTROLE ET RECOMMANDATIONS GENERALES

    Les mécanismes de contrôle tels qu'on les connait ont été conçus207 afin de porter un regard particulier sur le respect par les autorités contractantes et les opérateurs privés, des procédures de passation telles que définies dans le code des marchés publics, depuis la phase préalable à l'appel d'offres jusqu'à l'évaluation et l'attribution des marchés. Ces mécanismes s'exercent d'abord au niveau des autorités administratives dans le cadre du contrôle a priori et a posteriori, puis au niveau des autorités juridictionnelles.

    Toutefois, ces autorités ne présentent pas moins des insuffisances quant à leur façon de procéder à de tels contrôles. Il sera alors question dans ce chapitre de faire une analyse en partant des faiblesses des mécanismes de contrôle (Section 1) jusqu'aux mesures de recommandations générales (Section 2).

    Section 1 : Des faiblesses liées aux mécanismes de contrôle

    Le contrôle des méthodes de passation des marchés a incontestablement eu le mérite de dénoncer et de limiter autant que possible les incohérences qui les entachent. Ces mécanismes de contrôle souffrent cependant de certaines insuffisances. Pour ce faire, il sera procédé successivement à l'analyse des insuffisances relatives au contrôle administratif (Paragraphe 1) et celles relatives au contrôle juridictionnel (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Les insuffisances relatives au contrôle administratif

    Le contrôle administratif est celui opéré à l'interne par la cellule de passation des marchés, et à l'externe par la DCMP et l'ARMP dans le cadre des contrôles a priori et a posteriori. A cet effet, il sera abordé dans un premier temps, les faiblesses relatives au contrôle a priori (A) et dans un second temps celles liées au contrôle a posteriori (B).

    207 Elles ont été précisées par la directive n° 05 de l'UEMOA portant Contrôle et Régulation des marchés publics et délégations de service public.

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 89

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    A- Des faiblesses liées au contrôle a priori

    Lorsqu'on parle de contrôle a priori, il s'agit à titre de rappel, du contrôle qui s'effectue depuis l'élaboration du PPM jusqu'à la revue juridique qui précède la signature du contrat. Il est essentiellement assuré par la DCMP pour les marchés ayant un montant égal ou supérieur aux seuils de passation208, mais aussi par la cellule de passation des marchés (Sénégal) ou commission de contrôle des marchés (Togo), lorsque les montants en jeu n'atteignent pas le seuil de passation.

    Cependant, une analyse attentive du contrôle a priori, permet de déceler des insuffisances qui, en mettant à mal la liberté d'action de ces entités ayant en charge un tel contrôle, influencent négativement l'effectivité de la transparence dans la passation des marchés.

    Ainsi au niveau des autorités contractantes au Sénégal et au Togo, les principales difficultés auxquelles sont soumises la cellule de passation des marchés et la commission de contrôle des marchés, dans le cadre du contrôle interne a priori, résident pour un certain nombre d'autorités contractantes, dans la non-conformité de leur système d'archivage au manuel de classement des documents des marchés. En effet, on déplore au sein des organes chargés du contrôle interne a priori, une difficulté quant à l'archivage physique et numérique des dossiers relatifs à la passation des marchés.

    Ces carences documentaires entrainent généralement un classement non-centralisé des documents des marchés et font ainsi retarder la mise en oeuvre des travaux de vérification pour l'établissement des rapports annuels.

    En outre et plus pertinent encore, les rapports d'analyse et de synthèse de certaines autorités contractantes, qui en principe devraient être soumis à la cellule de passation des marchés ou encore la commission de contrôle des marchés pour validation, ne le sont pas dans certains cas. En plus de cela, les propositions d'attribution, validées par la commission de contrôle des marchés dans le cas du Togo par exemple et qui devraient en principe faire l'objet d'un procès-verbal d'attribution provisoire des marchés, ne le sont pas.

    208 Cf. article 53 CMP Sénégal et 5 CMP Togo.

     
     
     
     
     
     

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Par ailleurs, il a été constaté au niveau des deux espaces géographiques sur lesquels porte notre étude que certaines cellules de passation ou commissions de contrôle des marchés, manquent de moyens et d'agents suffisamment formés pour exécuter les prérogatives qui leur sont reconnues. Cette situation entraine bien souvent une incidence sur la qualité des dossiers à traiter. Faisons aussi remarquer que le contrôle exercé par les cellules n'est pas indépendant, si l'on sait que jusqu'à un certain moment, les responsables de cellules sont dans bien des cas nommés par les ministres. Ceci montre toute la difficulté de ces cellules à jouir de toute l'indépendance nécessaire.

    Au niveau des différentes directions sénégalaise et togolaise en charge du contrôle a priori de la passation des marchés publics, des observations méritent également d'être faites. A cet effet, on déplore un relatif allongement des procédures, dû à la récurrence de correspondances entre des autorités contractantes et la DCMP, mettant ainsi à mal les objectifs recherchés par la réforme des marchés publics en termes de célérité. C'est le lieu de rappeler que l'examen d'un dossier de marché peut déboucher sur un certain nombre d'observations qui du reste, impliquent la nécessité pour l'autorité contractante concernée de les prendre en compte dans le souci de se conformer aux exigences de la procédure de passation. Mais la prise en compte de ces observations n'exclut cependant pas que de nouvelles observations puissent une fois de plus être émises par la DCMP.

    Au final, la fréquence de ces observations a le triste mérite d'impacter sur les délais de procédures, entrainant de ce fait un allongement de la durée du processus de passation des marchés.

    Pour ce qui est des autorisations relatives aux modes dérogatoires de passation, on signale depuis quelques temps, un recours quelque peu anormal aux procédés limitatifs de concurrence. Toutefois, la mise en oeuvre des procédures dérogatoires ne peut se faire que si la DCMP les autorise préalablement. Mais si on signale un recours excessif à ces méthodes, cela voudrait-il dire que la DCMP autorise les dérogations à la hauteur des demandes qui lui sont adressées ?

    On ne saurait répondre à cette interrogation par l'affirmative sans remettre en cause les efforts fournis par cette noble institution dans le cadre du contrôle a priori. Il existe malheureusement au

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Sénégal, un problème de contournement des refus de la DCMP. Aujourd'hui, même s'il est vrai qu'il y a beaucoup de sérieux dans les autorisations accordées par la DCMP, cette dernière doit continuer de procéder avec rigueur à l'examen de toutes les demandes qui lui sont adressées comme cela a été le cas lors de l'analyse de la demande d'autorisation de la SENELEC pour la passation d'un marché par entente directe.

    Pour rappel, la SENELEC dans cette affaire avait saisi la DCMP d'une demande d'entente directe avec l'argument que le candidat propose une solution qu'on ne trouve pas sur le marché, argument peu convaincant et que le code des marchés publics ne prévoyait pas dans ses textes. La DCMP a naturellement rejeté cette demande d'autorisation en motivant son refus sur la base de la législation en cours à l'époque. Néanmoins, la SENELEC au eu gain de cause209 et a attribué le marché à AFRICA-ENERGY malgré les protestations de la DCMP qui dénonçait un manque de transparence. La DCMP est revenue à la charge, persistant à contester le marché mais cela sera sans effet puisque le marché avait déjà été signé.

    Voici des cas qui, bien que n'étant pas exhaustifs, ont contribué à démontrer, la façon dont est mis à mal le système du contrôle a priori de la passation des marchés.

    B- Des difficultés inhérentes au contrôle a postériori

    Le contrôle a posteriori des marchés publics est une prérogative qu'exercent conjointement la cellule de passation des marchés (ou commission de contrôle des marchés au Togo) et l'autorité de régulation des marchés publics. Une analyse de ce contrôle nous montre des failles variant en fonction de la nature des organes qui en ont la charge. Ainsi, si on se réfère aux articles 143 et 144 du code sénégalais des MP, il existe au sein de chaque autorité contractante, un organe de contrôle interne qui doit s'assurer du respect rigoureux des dispositions légales et réglementaires applicables aux marchés publics.

    209 Le Directeur Général de la SENELEC avait obtenu du chef du gouvernement son aval pour l'attribution dudit marché en invoquant l'article 76 du CMP, lequel autorise l'entente directe pour les marchés « considérés comme secrets ou dont l'exécution doit s'accompagner de mesure particulière de sécurité, lorsque la protection de l'intérêt supérieur de l'Etat l'exige ».

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Ce faisant, chaque cellule de passation ou commission de contrôle des marchés, a l'obligation d'établir avant le 31 mars de chaque année à l'intention de l'autorité dont elle relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP, un rapport annuel sur l'ensemble des marchés publics passés l'année précédente. Malheureusement, cette exigence, en plus d'être mal exécutée, n'est pas toujours observée de manière suffisamment satisfaisante. Par conséquent, cette situation rend difficile, la mise à disposition auprès de l'ARMP, des documents indispensables aux opérations d'audit.

    Sous ce rapport, l'autorité de régulation des marchés publics éprouve des difficultés aigues à accéder aux informations portant sur les marchés passés par ces autorités contractantes, lorsqu'elle exerce ses prérogatives dans le cadre du contrôle a posteriori. Ainsi cette situation peut-elle être constitutive de retard dans la production des rapports d'audit. A cet effet, on dénonce au Sénégal un retard incroyablement long dans la publication des rapports d'audit de l'ARMP sur les marchés de l'exercice de 2012210. Cette situation s'observe aussi au Togo puisque la revue indépendante de la conformité de la procédure de passation des marchés passés par les autorités contractantes, au titre de l'année 2012 n'a été rendue publique qu'en mai 2015.

    De ce fait, on remarque que les autorités sénégalaises comme togolaises, n'ont pas publié ces rapports d'audit, dans un délai raisonnable. Le manque de diligence en ce sens va à l'encontre de « l'indicateur 11 » intitulé « Degré d'accès à l'information » de l'OCDE211 sur l'évaluation du système de passation des marchés publics. Cet indicateur en guise de précision, renvoie à la qualité, à la pertinence et à l'exhaustivité des informations sur le dispositif de passation des marchés publics.

    Cependant, ne pas remédier à un tel retard dans la publication des rapports de synthèse sur la passation des marchés, pourrait être constitutif d'une violation du principe de transparence prévu par la Directive 04/2005/CM/UEMOA et par la loi 2006 -16 du 30 juin 2006 portant Code des Obligations de l'Administration au Sénégal.

    210 Ce rapport a été finalement transmis au premier ministre le 31 décembre 2014, soit deux ans après l'écoulement de l'année pour le compte duquel il a été établi.

    211 L'Organisation pour la Coopération et le Développement Economique, OCDE, a été mise en place par la Convention de Paris du 14 novembre 1960, laquelle est rentrée en vigueur le 30 septembre 1961. Elle se substitue à l'OECE. Elle comprend 35 Etats membres et à vocation à favoriser le développement de l'économie mondiale dans un univers mondialiste de non-discrimination et aider à la stabilité financière des Etats membres.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    En outre, on a pendant longtemps constaté une augmentation des litiges au niveau du CRD, entrainant ainsi une période de traitement relativement longue des contentieux. Mais lorsqu'on l'observe de près, l'augmentation des litiges peut d'une part, et ce en amont, être rattachée à la mauvaise qualité des agents des commissions et cellule de passation, qui évaluent mal et font une attribution subjective des marchés, sans procéder au préalable aux vérifications requises en conformité avec la règlementation. D'autre part, la mauvaise formulation des requêtes, la tendance aux recours abusifs et la production de dossiers de requêtes généralement incomplets212 ralentissent considérablement les travaux du CRD et compliquent l'instruction des dossiers.

    Par ailleurs, dans certains cas, les prérogatives de l'ARMP la conduisent à trancher entre différents intérêts en présence et le cas échéant, elle peut exceptionnellement trancher en faveur de l'administration pour lui permettre d'attendre les objectifs de développement que l'Etat s'est fixés213.

    Paragraphe 2 : La complexité du contrôle juridictionnel

    Le contrôle juridictionnel de la passation des marchés publics met en évidence une configuration complexe du droit au regard de l'outillage technique dont disposent les différents juges pour faire face aux mutations de la matière. A cet effet nous envisagerons tour à tour le dépassement des attributions classiques du juge administratif (A) et les difficultés liées au volet pénal (B).

    A- Un dépassement des attributions classiques du juge

    Depuis que le juge administratif est amené à jouer un rôle en matière économique, en veillant d'une part au respect des droits et libertés économiques et en assurant un contrôle directe sur l'action des autorités publiques en charge de la passation des marchés publics d'autre part, il est allé de soi que ses attributions originelles ont changé d'orientation. Ainsi, initialement formé dans une logique pure de la science juridique traditionnelle, le juge administratif va désormais

    212 Très souvent, les requérants omettent de joindre à leurs dossiers, des pièces à conviction.

    213 Cette situation peut amener l'ARMP à accélérer la procédure et à ne pas respecter les critères contenus dans le dossier d'appel dans le but de ne pas perdre le financement de l'Etat.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    chercher à étendre sa sphère de compétence à un autre domaine, celui de l'économie.

    Toutefois et ce jusqu'à aujourd'hui, cette extension de compétence ne s'est pas toujours révélée aisée du fait de la complexité de l'analyse économique214 à laquelle les juges administratifs sénégalais et togolais sont confrontés dans le contentieux des marchés publics. Dès lors, on comprend mieux les propos du doyen Georges VEDEL lorsqu'il affirmait que l'économie « intimidait » ou « ennuyait » le juge215.

    Mais aujourd'hui, depuis que les règles de droit public ont entrepris une mutation, c'est cette même économie qui est devenue le « patrimoine juridique commun » de tous les juges, y compris du juge administratif qui apparaît, de prime abord, peu concerné par ce domaine modelé par les relations privées. Désormais, le contentieux des marchés publics semble très éloigné du contentieux classique de la légalité, entendu au sens classique du terme. C'est un contentieux d'espèce qui, de toute évidence révèle le caractère purement économique du droit des marchés publics et il n'est plus permis aux juges administratifs sénégalais et togolais, de se contenter de dire simplement le droit216.

    A l'évidence, cette appréhension qui place le contentieux de la passation au coeur de l'élaboration d'un droit de la régulation économique, devrait permettre au juge d'avancer dans le contrôle d'opportunité des décisions de l'autorité de régulation217, à condition bien sûr de disposer réellement des connaissances techniques appropriées, chose qui a priori fait défaut aux juges sénégalais et togolais.

    Par ailleurs, l'application par le juge d'un droit influencé par l'économie soulève chez celui-ci, la crainte que l'économie ne porte atteinte à l'intégrité du droit218. En effet, cette crainte peut paraître fondée dans la mesure où les droits administratifs sénégalais et togolais sont très

    214 Docteur Mamadou Yaya DIALLO, « Le juge de l'administration et la régulation des marchés publics au Sénégal », page 28

    215 Georges VEDEL, Le droit économique existe-t-il ? , Mélanges Vigreux, 1981 p. 778

    216 Dans cette nouvelle configuration, le droit que doit dire le juge administratif, n'est pas le droit entendu au sens formel, mais un droit intégrant des considérations économiques et des politiques de régulation économique.

    217 Canivet Guy, Propos généraux sur les régulateurs et les juges , in Marie-Anne Frison-Roche, p. 192

    218 TAMIN C, Economie et droit, in Dénys. Alland et J. Riels (dir), Dictionnaire de la culture juridique PUF et Lamy, 2003, pp. 578-581

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 95

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    sensibles aux normes communautaires notamment dans le cadre des marchés publics219. En clair, on pourrait être amené à penser que le droit a perdu de son essence profondément judiciaire au contact de l'économie220.

    Par ailleurs, il importe de souligner que le juge sénégalais de l'administration n'est pas outillé, pas plus que son homologue togolais pour exercer efficacement certaines prérogatives. En effet, ils ne disposent pas du pouvoir d'enjoindre à l'administration d'agir dans un certain sens, ni de prononcer des astreintes, alors que c'est du renforcement des pouvoirs du juge administratif que l'efficacité du contrôle juridictionnel trouvera son sens.

    En outre, au-delà de l'espoir qu'il suscite dans la mise en oeuvre d'une transparence de plus en plus affirmée dans la passation des marchés, le recours juridictionnel connait une fois de plus des entailles. En effet, au Sénégal comme au Togo, le recours juridictionnel en matière de contentieux de la passation n'a pas d'effet suspensif sur le processus de passation (art. 92 al.2 et art. 127 des CMP du Sénégal et du Togo). Cette situation qui prévalait déjà au Togo depuis la loi du 23 juin 1981221, est simplement déplorable pour la simple raison qu'on se demande à quoi servirait un tel recours si les mesures conservatoires222 ne sont pas déployées afin d'éviter d'aboutir à la signature définitive du contrat.

    A ces différents égards, si nous nous proposons de faire une comparaison de l'activité juridictionnelle en matière de contentieux de la passation entre le Sénégal et le Togo, on se rend très vite compte qu'il existe une divergence prétorienne saisissante. De ce fait, pendant que le juge sénégalais « s'impose » et fait preuve d'une relative audace, on assiste cependant à un

    219 La transposition des directives 04 et 05 de l' UEMOA par le Sénégal et le Togo atteste de cette perméabilité de leur droit administratif.

    220 Jean BOULOUIS, Droit économique in L'unité du droit : Mélange en hommage à Roland Drago, Economica, 1996, p.175

    221 Article 9 de la loi togolaise N° 81-10 du 23 juin 1981 fixant la procédure devant la chambre administrative de la cour d'appel de Lomé qui dispose : « Le dépôt de la requête n'a pas d'effet suspensif à l'égard de la décision attaquée, sauf si le président de la cour ordonne le sursis à exécution cette décision, notamment dans la mesure où la poursuite de l'exécution serait de nature à créer une situation irréversible ôtant tout effet à l'exercice du recours ».

    222 Les mesures conservatoires sont des mesures provisoires prises par le juge, afin de préserver la situation juridique dans laquelle se trouve chacune des parties au moment de sa saisine

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 96

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    balbutiement de la part de son homologue togolais en termes de recours223 contre les décisions du CRD. Ainsi, jusqu'à aujourd'hui, signale-t-on seulement quatre (4) contentieux relatifs à la passation des marchés publics auprès de la chambre administrative de la cours d'appel de Lomé, témoignant d'une certaine latence pour cette juridiction dans le traitement des recours liés à la passation des marchés.

    Au Sénégal où cette activité prétorienne est plus poussée, on signale néanmoins des difficultés chez le juge de la cour suprême. D'une part, on déplore l'absence des dispositions réglant de manière satisfaisante le problème des procédures d'urgence relativement au contentieux de la passation des marchés publics. D'autre part, le juge administratif sénégalais semble toujours ne pas comprendre que «ordonner à l'administration de faire ce que le droit lui impose ne constitue pas une méconnaissance de la séparation des pouvoirs ou des fonctions »224.

    In fine, on retient de ces constats sur le plan pratique, que les juges administratifs sénégalais et togolais sont confrontés à un défi, celui de leur capacité au regard de leur formation, à juger efficacement les problèmes afférents au contentieux économique dans la passation des marchés publics.

    B- Des difficultés liées au volet pénal

    Les pratiques irrégulières qui surviennent lors de la passation des marchés publics se déclinent généralement en corruption passive225, la prise illégale d'intérêt, le trafic d'influence226 et le favoritisme227. Pour le magistrat sénégalais Malick LAMOTTE, « On est en face d'une corruption passive lorsqu'on envisage l'infraction du côté du corrompu », c'est-à-dire celui qui

    223 Conformément à l'article 127 alinéas 2 du CMP Togo, les opérateurs économiques qui ne sont pas d'accord avec les décisions rendues par le Comité de Règlement des Différends peuvent saisir la chambre administrative de la juridiction d'appel compétente.

    224 Charles DEBBASCH, Déclin du contentieux administratif, page 97

    225 Dans le cadre de la corruption passive, le corrompu sollicite ou accepte un avantage pour lui-même ou un proche que son interlocuteur reste libre de ne pas verser.

    226 Le trafic d'influence n'apparait pas clairement dans les CMP du Sénégal et du Togo mais il demeure tout de même, une infraction occulte pouvant être commise dans le cadre des marchés publics.

    227 Le favoritisme s'assimile au non-respect des conditions d'attribution des marchés publics.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    rend service en contrepartie d'un avantage. Inversement, il s'agit pour les autorités contractantes, dans l'optique d'obtenir un avantage indu de procurer ou de tenter de procurer un avantage anormal à un candidat ou de passer un marché avec un candidat exclu des marchés publics. Les faits qui entrent dans la définition de cette infraction apparaissent à la lecture des dispositions des articles 146 et 147 du CMP du Sénégal et 132 du CMP du Togo, toutes relatives aux sanctions des candidats, soumissionnaires et titulaires des marchés, applicables pour non-respect de la règlementation des marchés publics.

    Si l'on observe attentivement le constat contenu dans nos derniers propos, un fait interpelle notre attention en tant que juriste. En effet, on remarque d'une manière on ne peut plus claire, que la répression de cette première catégorie d'infraction, bien que reconnue au juge pénal, tient cependant moins à une disposition du code pénal du Sénégal ou du Togo, qu'à une disposition relevant de leurs codes des marchés publics. Ainsi s'ouvre la brèche qui s'identifie aux difficultés d'ordre pénal qui assaillent le secteur de la passation des marchés publics et qui de ce fait dénotent d'une absence d'un arsenal pénal propre, destiné à réprimer les irrégularités constatées dans les procédures de passation.

    La pénalisation des marchés publics au Sénégal et au Togo reste en effet du moins au plan textuel, un domaine peu exploré à la fois par le législateur que par les tenants de la doctrine. Ne disposant pas de l'outillage juridique nécessaire, le juge pénal se contente jusqu'ici d'un pis-aller228 pour sanctionner les irrégularités qui lui sont signalées dans les procédures de passation. L'imprécision des statistiques pénales en ce domaine, l'absence de volet économique et financier dans les codes pénaux sénégalais et togolais, le nombre peu connu des décisions de justice non diffusées ou encore l'absence d'une formation spécifique des magistrats révèlent que l'émergence d'un droit pénal229 directement applicable aux marchés publics, n'a jusque-là pas encore été concrétisée.

    Aujourd'hui, si on se réfère à la lente formation d'un véritable contentieux pénal de la

    228 Un pis-aller est une solution que l'on choisit faute de mieux. Dans ce cas-ci, il s'est agi pour le juge pénal, à défaut de disposer des textes spécifiques, de se baser sur les dispositions générales contenues dans le code pénal.

    229 Catherine PREBISSY-SCHNALL « La pénalisation du droit des marchés publics », publié aux éditions LGDJ dans la collection Bibliothèque de droit public (tome 223).

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 98

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    commande publique et ses hésitations à suivre l'évolution actuelle des mutations propres aux marchés publics, on peut facilement remarquer qu'il est urgent et impératif de créer un cadre juridique autonome adapté au volet pénal de la passation.

    En plus de cela, nous avons également constaté qu'il n'est nulle part mentionné dans les codes pénaux sénégalais et togolais, un délit dit de «favoritisme » bien que l'expression soit récurrente dans les débats juridiques. Si nous prenons par exemple le droit positif français, les « atteintes à la liberté d'accès et à l'égalité de traitement des candidats dans les marchés publics », ont été instituées comme un délit depuis la loi du 3 janvier 1981 et sont réprimées par l'article 432 alinéas 14 du code pénal français230. Cependant, même si la violation des conditions d'attribution des marchés est abordée par les codes sénégalais et togolais des marchés publics231, il ne reste pas moins vrai que leurs codes pénaux gardent le silence quant à leur qualification pénale.

    En définitive, même s'il est vrai que les marchés publics ont d'une certaine manière réussi à allier droit administratif et économie, ils n'ont cependant pas encore totalement réussi ce pari pour le droit pénal, ce qui à tous égards est perçu aujourd'hui comme un défi à relever pour le Sénégal et le Togo.

    Sous ces dernières observations, les faits rapportés ci-haut viennent clore la longue liste, mais non exhaustive des insuffisances que connaissent la passation des marchés publics au Sénégal et au Togo. Ces irrégularités répertoriées, il importe maintenant de faire des recommandations pour voir dans quelles mesures la transparence peut être restaurée.

    230 Article 432 alinéas 14 code pénal français « Est puni de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 200 000 euro, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction, le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investi d'un mandat électif public ou exerçant les fonctions de représentant, administrateur ou agent de l'Etat, de collectivités territoriales, des établissements publics, des sociétés d'économie mixte locales ou par toute personne agissant pour le compte de l'une de celles susmentionnées de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou règlementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et délégations de service public ».

    231 Cf. articles 146 et 147 du CMP du Sénégal et 132 du CMP du Togo

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Section 2 : Des mesures de recommandations générales

    Les recommandations dont il sera ici question se feront conformément aux différentes insuffisances dont nous avons préalablement fait cas. Ainsi ces recommandations seront successivement abordées relativement aux procédures de passation (paragraphe 1) puis à l'égard des mécanismes de contrôle (paragraphe2).

    Paragraphe 1 : Les recommandations relatives aux procédures

    Concernant les procédures de passation, les recommandations que nous allons proposer, se feront relativement aux procédures normales (A) puis aux procédures particulières de passation (B).

    A- Des propositions relatives aux procédures normales

    En dépit des nombreuses irrégularités dont souffrent les procédures de passation, il ne demeure pas moins vrai qu'il existe des possibilités de promouvoir la transparence232. Il sera ici question des propositions faites pour conforter le processus de passation et répondre aux insuffisances relatives à la fois à la phase préalable à l'appel d'offres et celles mentionnées pour la phase proprement dite d'appel d'offres. A cet effet, nous faisons les recommandations suivantes :

    ? La nécessité d'une incitation à la dématérialisation des procédures

    Il est un fait incontestable que la dématérialisation des procédures constitue aujourd'hui un gage de transparence dans les procédures de passation des marchés publics. La dématérialisation des procédures mérite donc au vu de son caractère innovant et de sa récurrence dans l'actualité, une attention particulière.

    Qu'entend-t-on par dématérialisation des procédures ? Qu'apporte-t-elle concrètement et en quoi contribue-t-elle à la transparence? Autant de questions qui nous amènent à nous intéresser à ce nouveau procédé.

    232 Transparancy international, « Minimum Standards of public procurement », 2005

     
     
     
     
     
     

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    w' La notion de dématérialisation des procédures

    La dématérialisation des procédures des marchés publics est une technique qui consiste à mettre en oeuvre des moyens électroniques pour effectuer des opérations de traitement, d'échange et de stockage d'informations sans support papier. A cet effet, la dématérialisation est définie au sens de l'article 43 de la directive 04 de l'UEMOA comme étant « La création, l'échange, l'envoi et la réception ou la conservation d'informations ou de documents par des moyens électroniques par des moyens électroniques ou optiques ».

    Elle suppose deux procédés233 : Soit les documents sont numérisés à partir d'un support papier, soit ils sont créés directement sous forme électronique.

    w' Les apports de la dématérialisation

    La dématérialisation constitue un facteur d'économie dans la mesure où elle assure une diminution des dépenses relatives à l'élaboration et la diffusion des dossiers en format papier et par ricochet, une réduction des coûts de transactions.

    Aussi, la dématérialisation permet-elle lors de la phase de préparation des dossiers par les entreprises candidates de gagner en temps, les formulaires étant directement remplis et envoyés par voie électronique.

    w' La contribution de la dématérialisation à la transparence

    A partir du moment où les informations relatives aux marchés à passer sont diffusées largement par le biais de moyens électroniques, l'accès à ces marchés est désormais facile à l'ensemble des entreprises candidates. Cette situation constitue non seulement un facteur de concurrence, mais également assure une égalité de traitement des candidats et une liberté d'accès à tous à la commande publique, trilogie constitutive du principe de transparence. Partant de là, les petites entreprises disposent au même titre que les grandes, d'un accès aux marchés publics.

    En définitive, l'ouverture des marchés publics à la communication électronique constitue un

    233 Jean-Marc RIETSH, Mise en oeuvre de la dématérialisation, Ed. Dunod, 2010.

     
     
     
     
     
     

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    gage de transparence dans les procédures de passation et aussi de contrôle.

    > L'évaluation des besoins doit être conduite par des agents publics compétents, dont l'autorité contractante s'assure au préalable de l'intégrité morale.

    > Les autorités contractantes doivent être plus regardantes sur l'élaboration et la publication du PPM et la DCMP doit systématiquement rejeter des marchés qui n'y sont pas préalablement inscrits.

    > Le choix de la méthode de passation doit se fonder sur des motifs réels et objectifs.

    > Les décideurs publics doivent se garder de privilégier certains candidats et doivent communiquer les informations relatives aux marchés de façon que tous les candidats puissent y avoir un accès équitable.

    > Les entreprises candidates doivent elles aussi faire preuve d'intégrité dans la présentation des documents qui attestent de leur capacité techniques à exécuter les marchés pour lesquelles elles ont soumissionné.

    > La publication régulière des marchés dans les avis généraux de passation ne doit souffrir d'aucune exception sauf si bien sûr une discrétion est requise pour certains marchés particuliers.

    > Pendant la phase proprement dite d'appel d'offres ouvert, les exigences de publicité doivent scrupuleusement être respectées par les autorités contractantes.

    > Les critères d'évaluation des offres des candidats et d'attribution des marchés doivent se faire sur la base de critères objectifs fidèles aux exigences de conformité technique et en termes de coût financier.

    > Les conflits d'intérêt et aussi le favoritisme doivent être bannis et les restrictions qui pèsent sur eux doivent être renforcées.

    > Il serait intéressant pour la commission de faire siéger des représentants de la société civile à travers des audiences publiques afin de leur permettre de prendre part au processus de décision, même si aujourd'hui, l'évaluation se fait à huis clos.

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 102

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    > Faire appel à un groupe et non pas à un individu pour convenir de la décision d'attribution.

    > Pratiquer une plus grande rotation du personnel afin d'éviter l'ancrage des relations corrompues234.

    > Il est impératif pour chaque autorité contractante de s'assurer que la personne chargée de l'attribution est différente de la personne ou du groupe qui lance l'appel d'offres. Le fait de dissocier la décision des achats du choix de l'attributaire permet de diminuer le risque d'arrangements corrompus entre l'autorité contractante et les soumissionnaires.

    > Contre les délais excessifs notés dans l'évaluation des offres, il serait souhaitable que soit mise sur pied, une déconcentration des opérations de dépouillement par une habilitation des unités de gestion de projets et autres structures à prendre en charge leurs propres marchés.

    > Aussi serait-il nécessaire de rendre effective l'application de sanctions contre les membres

    des commissions en cas de retards exagérés235 constatés dans l'évaluation des offres.

    > Les cellules de passation des marchés quant à elles doivent faire preuve de diligence et de professionnalisme dans l'archivage des dossiers relatifs aux marchés passés par les autorités contractantes dont elles relèvent afin de faciliter l'établissement des rapports lors des opérations d'audit.

    > Les autorités contractantes doivent veiller à ce qu'il n'y ait plus de plaintes suite à la non-publication des avis d'attribution provisoire et définitive des marchés.

    > La notification aux candidats, du rejet de leurs offres ne doit plus être négligée. Ainsi, leur sera-t-il permis non seulement de connaitre les motifs du rejet de leurs offres, mais aussi de pouvoir exercer en connaissance de cause, un recours gracieux et s'il y a lieu, un recours contentieux.

    Voilà donc quelques améliorations qui pourraient contribuer à atténuer les insuffisances dont souffre le principe de transparence dans les méthodes normales de passation des marchés au

    234 Transparency International 2006, Page 44

    235 Il n'est pas exagéré d'affirmer qu'aucune autorité contractante ne respecte le délai de 15 jours imposé par le CMP. Le non-respect de ce délai est tel que l'évaluation des offres peut parfois prendre 6 mois ou même plus.

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Sénégal et au Togo. Quid des procédures particulières ?

    B- Des propositions relatives aux procédures particulières

    Les recommandations que nous formulons pour les procédures particulières se feront en deux volets, les procédures dérogatoires d'abord et les procédures spécifiques ensuite.

    Pour les premières voici les mesures que nous préconisons :

    ? Pour corriger les insuffisances que nous avons relevées pour la procédure d'appel d'offres restreint, nous conseillons aux autorités contractantes de porter à 4 ou à 5, le nombre236 minimum de candidats invités à soumissionner, afin de réduire les risques d'appel d'offres infructueux.

    ? Compte tenu des risques de blocage pouvant découler du respect du seuil de 10% à l'échelle nationale, la DCMP doit veiller scrupuleusement au respect de cet indicateur par les autorités contractantes, ce qui permettrait une péréquation qui prend en considération le fait que les autorités contractantes ne soient pas soumises aux mêmes réalités face à la problématique de l'urgence et aux autres conditions devant donner lieu à des procédures dérogatoires.

    ? La DCMP doit continuer à dénoncer tout recours injustifié à l'appel d'offre restreint et à l'entente directe.

    Quant aux irrégularités constatées dans les procédures spécifiques, voici ce que nous proposons :

    ? Pour les DRP, il faut une rigueur dans la gestion des dossiers et la formation conséquente des agents publics des autorités contractantes, aux conditions de recours à ce mode spécifique de passation.

    ? En ce qui concerne le fractionnement excessif des marchés par les autorités contractantes, nous leur recommandons de regrouper tous ces achats et lancer des

    236 Ce nombre minimum est aujourd'hui fixé à 3 candidats.

     
     
     
     
     
     

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    appels d'offres en plusieurs lots sous forme de marchés à commandes237 ou de marchés de clientèle238 qui constituent en fait une déclinaison des accords-cadres.

    ? Dans une perspective de transparence, il est nécessaire que soit aménagées pour les DRP, des possibilités de recours pour les candidats qui s'estimeraient lésés.

    ? Les autorités contractantes doivent non seulement respecter les obligations relatives à la publication des informations à toutes les étapes, mais aussi celle de publier sur le portail des marchés publics, les résultats de DRP.

    ? Il serait opportun de songer à un système de sanction des auteurs de malversations constatées dans les DRP.

    ? Concernant les marchés de prestations intellectuelles, les membres des commissions de passation des marchés doivent parfaitement maitriser les techniques d'évaluation des demandes de propositions239 qui obéissent un certain nombre de critères spécifiques.

    ? Concernant les offres spontanées, les autorités contractantes ne doivent pas systématiquement exclure l'appel d'offres ouvert dans la mise en oeuvre de cette procédure spécifique.

    Telles sont donc les propositions que nous pouvons faire d'un point de vue global afin venir à bout des irrégularités auxquelles sont confrontées les procédures de passation.

    Paragraphe 2 : Les recommandations relatives aux contrôles

    En termes de contrôle nous allons procéder respectivement à travers les recommandations relatives au contrôle administratif (A) puis celles relatives au contrôle juridictionnel (B) de la

    237 Un marché à commandes fixe le minimum et le maximum des fournitures ou de prestations, arrêtées en valeur ou en quantité, susceptibles d'être commandées au cours de la période déterminée, n'excédant pas celle d'utilisation des crédits de payement ; les quantités des prestations ou fournitures à exécuter sont précisées pour chaque commande, par l'autorité contractante en fonction des besoins à satisfaire. Cf. article 25-1.a du CMP Sénégal.

    238 Un marché de clientèle est celui auquel recourt une autorité contractante et par lequel elle s'engage à confier au prestataire ou au fournisseur retenu, des commandes portant sur une catégorie déterminée de prestations de service, fournitures ou travaux d'entretien ou de maintenance, sans indiquer la qualité ou la valeur globale des commandes. Cf. article 25-1.b du CMP Sénégal

    239 Il s'agit d'une bonne connaissance des techniques d'évaluation des offres techniques et des offres financières.

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 105

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    passation des marchés.

    A- Des propositions quant au contrôle administratif

    Il sera question ici de propositions relatives au contrôle a priori et au contrôle a posteriori du processus de passation.

    ? Pour le contrôle a priori interne, il serait souhaitable de renforcer la capacité des autorités contractantes en ressources humaines et doter les fonctionnaires des cellules de passation(Sénégal) et commission de contrôle des marchés (Togo), d'un système de motivation à la hauteur de la responsabilité qui leur incombe.

    ? Pour le contrôle a priori externe, afin de venir à bout du problème de contournement des refus de la DCMP240, nous plaidons pour une volonté politique plus affirmée.

    ? A niveau du contrôle a posteriori interne, l'obligation faite à chaque cellule de passation ou commission de contrôle des marchés, d'établir avant le 31 mars de chaque année, un rapport sur les marchés passés l'année précédente, à l'intention de l'autorité dont elle relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP, doit être plus contraignante.

    ? En ce qui concerne le contrôle a posteriori de l'ARMP, bien que cette institution établisse annuellement un rapport synthétique des marchés passés, et comportant des propositions de mesures tendant à prévenir les irrégularités constatées, elle doit cependant faire diligence dans la publication de ses rapports parce que nous avons remarqué surtout au Togo un retard dans la publication de ces rapports241.

    ? Pour des faits de corruption, de trafic d'influence242, de prise illégale d'intérêt243 ou de toute forme d'atteintes aux principes de liberté et d'égalité d'accès, commis par des agents publics ou privés, il serait opportun de centraliser les infos nécessaires à la

    240 Cf. affaire DCMP contre SENELEC, où malgré le rejet par la DCMP de la demande d'autorisation d'un marché par entente directe, la SENELEC a usé d'autres moyens pour passer le marché.

    241 Pour preuve, le rapport de synthèse des marchés publics passés par les autorités contractantes au Togo au titre de l'année 2012 n'a été publié qu'en mai 2015, soit 3 ans plus tard.

    242 Le trafic d'influence consiste à solliciter ou agréer des avantages pour soi-même ou pour autrui en abusant de son influence réelle ou supposée, en vue de faire obtenir d'une autorité publique, une faveur.

    243 La prise illégale d'intérêts est le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique, de prendre, recevoir ou conserver directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une opération dont elle a la charge d'assurer la surveillance ou l'administration.

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 106

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    détection et à la prévention de tels faits en mettant sur pied un service indépendant de lutte contre la corruption.

    Sur ce dernier aspect, d'aucuns pourraient dénoncer une surabondance institutionnelle mais au regard de l'importance des montants qui disparaissent par défaut de transparence dans le processus de passation, aucune innovation pratique dont le mérite manifestement incontestable ne doit être ignorée.

    B- Des propositions quant au contrôle juridictionnel

    Les mesures qui seront proposées pour faire face aux insuffisances relevées pour le compte du contrôle juridictionnel se feront en deux temps. Il sera d'abord questions des propositions relatives au juge administratif et ensuite celles qui concernent le juge pénal.

    Concernant le juge administratif, nous avons évoqué plus haut que les mesures conservatoires n'étaient pas appliquées en cas de saisine de la cour suprême. Ce qui fait qu'on constate que pour certains contentieux soumis à la cour, les marchés sont exécutés avant l'intervention de la décision de la cour. Ce qui rend sans objet voire totalement inutile la décision rendue par la cour.

    Après réflexion sur une telle situation voici ce que nous proposons :

    ? Bien qu'il existe au Sénégal et au Togo la procédure de demande de sursis à exécution244 de la décision d'attribution du marché à un soumissionnaire, Il serait opportun de renforcer les droits des candidats aux marchés publics qui devront s'opérer et se calquer sur l'institution du « référé précontractuel »245, technique existant en France, qui comporte des vertus considérables.

    244 Le sursis à exécution est une décision par laquelle le juge reporte la date de la mise en oeuvre d'une décision.

    245 V. François BRENET, Succession d'un référé précontractuel et d'un référé contractuel , note sous CE, 10 novembre

    2010, France Agrimer, in Droit administratif, janvier 2011, p. 38 et S., p. 38. Le Professeur Jean-David DREYFUS remarquait une « mosaïque de recours ». V. Dreyfus Jean-David, « Référé précontractuel et référé contractuel : l'ignorance prémunit contre l'irrecevabilité », note sous CE, 10 novembre 2010, France Arrimer, in AJDA, 2011, p. 51. et S. p. 52. Le Professeur Philippe COSSALTER qualifiait le contenu du contentieux administratif des contrats publics de « feu d'artifice ».V. en ce sens : COSSALTER Philippe, « Vingt ans de contentieux administratif des contrats publics : permanence et innovations », in Mélanges en

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 107

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    ? Dans sa mise en oeuvre, le référé précontractuel permettra aux opérateurs économiques de saisir de saisir le juge administratif, avant même que le contrat soit signé, à un stade où les éventuelles violations aux règles de publicité et de mise en concurrence peuvent encore être empêchées ou corrigées. Il s'agira pour le Sénégal et le Togo de donner ainsi sa pleine effectivité à l'intervention du juge en favorisant la prévention en amont, des manquements aux règles de passation des marchés publics.

    Concernant les difficultés liées à l'appropriation par les juges sénégalais et togolais des techniques économiques, nous faisons les recommandations suivantes :

    ? Il faudrait inventer des « magistratures économiques »246, pour appliquer un nouveau droit pénétré d'économie, ce qui leur permettra d'intégrer les enjeux et impératifs de la régulation économique dans leur raisonnement247 et de comprendre que dans certaines situations, l'application du droit dans toute sa rigueur et son autorité peut être contreproductive d'un point de vue économique.

    ? Il faut aussi donner aux juges administratifs, le pouvoir d'enjoindre à l'administration d'agir dans un sens ou dans un autre et de prononcer des astreintes car l'efficacité du contrôle juridictionnel de la régulation justifie le renforcement des pouvoirs du juge.

    Pour ce qui est des insuffisances constatées pour l'office du juge pénal, voici nos recommandations:

    ? Il s'impose de créer une incrimination autonome destinée à sanctionner l'atteinte à la liberté et à l'égalité d'accès aux marchés publics. Car c'est d'abord l'égalité et ensuite la concurrence qui en résulte, qui assurent l'efficacité de la dépense et partant de là, garantit la bonne gouvernance des deniers publics.

    l'honneur de Jean-Pierre Boivin, IDPA, 2012, p. 231 et s., p. 250. Le Professeur Stéphane Braconnier soulignait la « concurrence fratricide entre les actions post-contractuelles ouvertes aux concurrents évincés » ; Marino-Philippe Clémence, « Les nouvelles règles de la commande publique : bilan autour d'un contentieux en perpétuelle évolution », in RDP, 2011, p. 113 et s., p. 114

    246Jacquemin Alexis, la magistrature économique, oyez et Bruylant, 1976, « Eléments structurels d'une magistrature économique » RTD com 1977, pp. 421-434

    247 Il importe toutefois de souligner que le juge sénégalais de l'administration et son homologue du Togo ne sont pas aussi outillés que le juge français en ce sens.

    Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 108

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    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    ? La pénalisation constituant un dispositif de protection des marchés248, il faudrait impérativement penser à pénaliser le favoritisme. En ce sens, une révision du code pénal s'impose au Sénégal tout comme au Togo.

    En définitive, voilà donc quelques propositions qui, si elles sont observées, pourraient aider à atténuer les insuffisances dont souffre le principe de transparence dans la passation des marchés publics au Sénégal et au Togo.

    248 Catherine PREBISSY-SCHNALL, « La pénalisation du droit des marchés publics », op. cit, page

     
     
     
     
     
     
     

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    CONCLUSION GENERALE

    Ces dix dernières années auront porté pour le Sénégal et le Togo, l'empreinte d'une décennie caractérisée par un combat commun, celui de mettre fin aux pratiques sombres qui depuis longtemps sévissent dans les marchés publics. L'on ne peut dénier que les efforts entrepris, ont apporté des changements significatifs à divers niveaux. En effet la nouvelle règlementation née de ces apports a su asseoir un climat d'évolution, de constance et de relative confiance dans l'assainissement des pratiques de passation de même que dans les mécanismes de contrôle.

    Mais malgré les efforts consentis ici et là, les incohérences dans les pratiques n'ont pas disparu pour autant. De ce fait, comme nous l'avons relevé, les entorses sont toujours légions. Elles semblent à certains égards considérablement éprouver les efforts si durement consentis, du moins au plan textuel et occultent ainsi les retombées positives que l'on pouvait escompter du respect des règles de transparence. Nous avons compris qu'une prise de conscience était nécessaire mais elle ne saurait garantir à elle seule l'intégrité tout au long du processus de passation et de contrôle des marchés. Ainsi, le professionnalisme du personnel impliqué est-il essentiel pour garantir la bonne gestion et la prévention des comportements réprouvés.

    Du reste, ce n'est pas tant le trop grand espoir suscité par son avènement que la désillusion autour de son effectivité qui est reproché à la transparence, mais bien la faiblesse dans l'affirmation d'une volonté politique plus audacieuse à entreprendre davantage de réformes afin de venir à bout des atteintes tous azimuts que nous avons antérieurement évoquées.

    En outre, s'il est vrai que les droits de recours sont garantis et que les contrôles a priori et a posteriori sont généralement respectés, il reste que les autres exigences de la transparence ne sont pas vérifiables dans leur mise en oeuvre. Ainsi, au vu des circonstances qui prévalent, on peut affirmer jusqu'en ce moment où nous sommes en train de broder ces propos finaux, que la transparence est relative dans les marchés publics au Sénégal et au Togo. Il va sans dire que cet aboutissement moins généreux auquel on est confronté aujourd'hui témoigne bien de la difficulté à instaurer un environnement des marchés publics, exempt de toute irrégularité.

    Conclusion générale 108

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Mais comme pour toute bonne oeuvre destinée à instaurer une embellie dans une situation qui pendant longtemps a été obscurcie, il y a toujours des péripéties qui ne devraient cependant pas contraindre les défenseurs les plus optimistes du principe de la transparence au désistement.

    En outre, les phases de passation et de contrôle ayant été analysées, quid alors de l'état de la transparence dans la phase d'exécution des marchés publics au Sénégal et au Togo ?

    Conclusion générale 109

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    BIBLIOGRAPHIE

    Bibliographie I

    OUVRAGES GENERAUX:

    > Charles DEBBASCH, Déclin du contentieux administratif, Ed. Dalloz-Sirey, 1967. > Georges VEDEL, Le droit économique existe-t-il ? Mélanges Vigreux, 1981.

    > Jean BOULOUIS, Droit économique in L'unité du droit : Mélange en hommage à Roland DRAGO, Economica, 1996.

    > Jean-Marc RIETSH, Mise en oeuvre de la dématérialisation, Ed. Dunod, 2010.

    > Nicole DECOOPMAN, Les transformation de la régulation juridique, LGDJ, « Droit et société, Recherches et travaux », vol 5, 1998.

    > PIERRE DE BAECKE, Comprendre simplement les marchés publics, Ed Le Moniteur,

    Paris 2013.

    > TAMIN C, Economie et droit, in Dénys. Alland et J. Riels (dir), Dictionnaire de la culture juridique PUF et Lamy, 2003.

    OUVRAGES SPECIAUX :

    > Catherine PREBISSY-SCHNALL, La pénalisation du droit des marchés publics, ed. LGDJ, Bibliothèque de droit public (tome 223).

    > F. LLORENS, Principe de transparence et contrats publics, Contrats et marchés publics, janvier 2004.

    > Stéphane BRACONNIER, Précis du droit des marchés publics, éditions Le Moniteur 2012.

    Bibliographie II

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    ARTICLES:

    > BEDOS Gérard, « Transparence et marchés publics », LPA, 13 septembre 1995, n° 110 dossier transparence et contrôle des activités publiques.

    > CH. BRÉCHON-MOULÈNES, « Transparence et marchés publics », Revue de

    jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° Spécial colloque sur la transparence.

    > COSSALTER Philippe, « Vingt ans de contentieux administratif des contrats publics : permanence et innovations », in Mélanges en l'honneur de Jean-Pierre Boivin, IDPA, 2012

    > Coulibaly D, Baba Kane, « Le juge administratif, rempart de protection des citoyens contre l'administration en Afrique noire francophone? » .

    > DELVOLVE Pierre, « La transparence administrative (colloque sur la transparence) », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° Spécial.

    > DUPONT Laurent, « La preuve des pratiques anticoncurrentielles en droit français », Revue de la concurrence et de la conso, juillet 1993.

    > Gérard TIMSIT, « Les deux corps du droit, Essai sur la notion de régulation », RFAP, n°78, 1996.

    > J. MESTRE, « Transparence et droit des contrats », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° spécial sur la transparence.

    > Jacquemin ALEXIS, « La magistrature économique », RTD, 1976.

    > Jean MARIMBERT, « L'ampleur du contrôle juridictionnel sur le régulateur », in Les régulations économiques : légitimité et efficacité, collection Droit et Economie de la Régulation, Presses de Sciences Po et Dalloz, 2004.

    Bibliographie III

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    > Jean-Matthieu Glatt, « La catégorisation des contrats de commande publique : source d'insécurité juridique », note sous CJCE, 10 septembre 2009.

    > Kari K. HEGGSTAD, les fondements de l'intégrité dans la passation des marchés, Anticorruption Resource Centre.

    > Linotte Didier, « Existe-t-il un principe général du droit de la libre concurrence » ?, AJDA, 2005.

    > Mamadou Yaya DIALLO, « Le juge de l'administration et la régulation des marchés publics au Sénégal ».

    > Marino-Philippe Clémence, « Les nouvelles règles de la commande publique : bilan autour d'un contentieux en perpétuelle évolution », in RDP, 2011.

    > Martine LOMBARD, « Institutions de régulation économique et démocratie politique », AJDA, 2005.

    > N. RENAUDIN, « Transparence et concurrence (colloque sur la transparence) », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° Spécial.

    > Oyez et BRUYLANT, 1976, « Eléments structurels d'une magistrature économique » RTD 1977.

    > V. François BRENET, « Succession d'un référé précontractuel et d'un référé contractuel », note sous CE.

    THESE:

    > Grégory KALFLECHE, « Des marchés publics à la commande publique ». L'évolution du droit des marchés publics, Thèse, Paris II, 2004

    MEMOIRES :

     
     
     
     
     

    Bibliographie IV

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    > Anne Marie Cécile DIENE, Le contrôle a priori de la commande public au Sénégal : forces et faiblesses, CESAG 2013.

    > Ibrahima Khadil DIOP, Diagnostic de la performance du processus de passation des marchés par rapport au nouveau code des marchés publics : Cas d'une agence routière au Sénégal, CESAG 2012.

    > Mamadou Ndiaye, Analyse des procédures de passation des marchés publics dans un établissement public de santé : Cas du Centre National de Transfusion Sanguine de Dakar

    > Seynabou ATHJ, Audit des marchés publics, CESAG 2011.

    > VA Sandrine Anne Elodie, Mise en place de la dématérialisation du processus de passation des marchés publics au Sénégal, CESAG 2014.

    DOCUMENTS OFFICIELS :

    > ARMP Sénégal, Rapport annuel 2011.

    > ARMP Sénégal, Rapport annuel 2014.

    > ARMP Togo, Rapport annuel 2012.

    > ARMP Togo, Rapport annuel 2013.

    > Arrêté d'application du décret du n°2014 - 1212 du 22 septembre 2014 portant code des

    marchés publics au Sénégal.

    > Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés publics, Sénégal.

    > Code des Obligations de l'Administration (COA).

    > Code Pénal Sénégal.

    > Code Pénal Togo.

    > Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide au développement du 2 mars 2005.

    > Décret n°2009/277/PR portant code des marches et délégation de services publics au

    Togo.

    Bibliographie V

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    > Décret n°2007/546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l'ARMP

    au Sénégal.

    > Décret n°2007/54 du 25 avril 2007 portant création de la DCMP.

    > Directive n°04/2005/CM/UEMOA portant procédures de passation, d'exécution et de

    règlement des marchés publics et des délégations de marchés publics dans l'UEMOA.

    > Directive n°05/2005/CM/UEMOA portant contrôle et régulation des marchés publics et

    délégation de service publics dans UEMOA.

    > Guide du contrôle a priori de la commande publique Togo.

    > Loi du 28 Pluviôse An VIII

    > Manuel de procédure du code des marchés public du Sénégal.

    > OCDE, Guide sur la prévention de la corruption dans la passation des marchés publics,

    Editions OCDE.

    > OCDE, « L'intégrité dans les marchés publics » Les bonnes pratiques de A à Z, Editions

    OCDE.

    > Ordonnance numéro 78-35 du 07 septembre 1978.

    > Programme d'action d'Accra (2008).

    > Revue indépendante de la conformité de la procédure de passation des marchés publics passés par les Autorités contractantes au titre de l'année 2012.

    > TRANSPARENCY INTERNATIONAL, « Minimum Standards of Public Procurement », 2005.

    > TRANSPARENCY INTERNATIONAL, 2006.

    > Vocabulaire juridique, Gérard CORNU, Association Henri CAPITANT.

    JURISPRUDENCES:

    > CS Sénégal, 22/08/2013, Société SARRE-CONS c/ ARMP, Bulletin des arrêts de la Cour Suprême du Sénégal.

    > CS Sénégal, 24/10/2013 Société Angélique International Limited (A.I.L) c/ ARMP, Bulletin des arrêts de la Cour Suprême du Sénégal.

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    WEBOGRAPHIE:

    ? www.afrilex.u-bordeaux4.fr

    ? www.droit-finances.commentcamarche.net

    ? www.itietogo.org

    ? www.lagazette.sn

    ? www.marchespublics.fr

    Bibliographie VI

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    TABLE DES MATIERES

    Sigles, Acronymes et Abréviations v

    Introduction 1

    TITRE I : UNE TRANSPARENCE AFFIRMEE . 11

    Chapitre 1 : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 12

    Section 1 : Une transparence quant aux procédures normales 12

    Paragraphe 1 : L'intégrité dans la phase préalable d'appel d'offres .. 12

    A- Une transparence relative au plan de passation des marchés ... 12

    B- Une transparence relative aux avis de passation des marchés .. 16

    Paragraphe 2 : L'intégrité dans la phase proprement dite d'appel d'offres 18

    A- Une consécration conjointe de l'appel d'offres ouvert 18

    B- Une exigence d'intégrité dans l'attribution des marchés .. 21

    Section 2 : Une transparence quant aux procédures particulières 25

    Paragraphe 1 : La redéfinition des procédures dérogatoires 25

    A- Un réaménagement de l'appel d'offres restreint 26

    B- Un recadrage de l'entente directe 28

    Table des matières VI

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Paragraphe 2 : La transparence des procédures spécifiques . 31

    A- Une particularité quant aux prestations intellectuelles 31

    B- Un recours aux autres procédures spécifiques . 35

    Chapitre 2 : Garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle 39

    Section 1 : Un contrôle administratif ambivalent .. 39

    Paragraphe 1 : La mise en place d'un contrôle a priori 39

    A- Un contrôle étendu 40

    B- Un mécanisme de transparence 43

    Paragraphe 2 : La systématisation d'un contrôle a posteriori 45

    A- Un contrôle à deux visages 45

    B- Une garantie en matière de recours 48

    Section 2 : Un contrôle juridictionnel indispensable . 50

    Paragraphe 1 : Le contrôle de la régularité des procédures 51

    A- Un rappel des règles de transparence par le juge .. 51

    B- Une régulation économique par le juge .. 53

    Paragraphe 2 : L'étendue du contrôle juridictionnel 56

    A- Un contrôle axé sur la légalité 56

    B- Une extension du contrôle au juge pénal . 59

    TITRE II : Une transparence relative .. 62

    Chapitre 1 : Insuffisances relatives à la transparence des procédures de passation 63

    Section 1 : Des atteintes liées aux marchés de type concurrentiels . 63

    Table des matières VII

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Paragraphe 1 : Les insuffisances dans le mode de passation 63

    A- Une compromission en amont de la soumission 64

    B- Une compromission pendant la phase l'appel d'offres 67

    Paragraphe 2 : Les anomalies dans le traitement des dossiers 70

    A- Une évaluation compromise des offres 70

    B- Une attribution irrégulière des marchés 73

    Section 2 : Des constats relatifs aux procédures particulières 76

    Paragraphe 1 : Les méthodes de concurrence restreinte 76

    A- Des incohérences quant à l'appel d'offres restreint . 77

    B- Des irrégularités liées à l'entente directe . 79

    Paragraphe 2 : Les insuffisances relatives aux procédures spécifiques 82

    A- Des anomalies liées aux demandes de renseignements et de prix 82

    B- Des anomalies relatives aux autres méthodes spécifiques 85

    Chapitre 2 : Diagnostic des mécanismes de contrôle et recommandations générales 89

    Section 1 : Des faiblesses liées aux mécanismes de contrôle 89

    Paragraphe 1 : Les insuffisances relatives au contrôle administratif 89

    A- Des faiblesses liées au contrôle a priori 90

    B- Des difficultés inhérentes au contrôle a posteriori 92

    Paragraphe 2 : La complexité du contrôle juridictionnel 94

    A- Un dépassement des attributions classiques du juge 94

    B- Des difficultés liées au volet pénal 97

    Section 2 : Des mesures de recommandations générales 100

    Table des matières VIII

    La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

    Paragraphe 1 : Les recommandations relatives aux procédures 100

    A- Des propositions relatives aux procédures normales 100

    B- Des propositions relatives aux procédures particulières 102

    Paragraphe 2 : Les recommandations relatives aux contrôles 104

    A- Des propositions quant au contrôle administratif . 104

    B- Des propositions quant au contrôle juridictionnel 105
    Conclusion générale 108

    Bibliographie I

    Table des matières VI

    Table des matières IX






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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King