WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le recours des individus auprès du panel d'inspection de la banque mondiale.

( Télécharger le fichier original )
par Jean-Eric FONKOU CHANOU
Université Yaoundé II-Soa - Master II en Relations Internationales, Filière Diplomatie, Spécialité Contentieux International 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

§II- L'exécution limitée des décisions du Panel

L'exécution des décisions du Panel est limitée à cause de la priorité accordée à l'économique sur les droits humains (A) et à cause des lacunes révélées par l'évaluation de la mise en oeuvre des décisions du Panel (B)239(*).

A- La priorité accordée à l'économique sur les droits humains par la BM

L'objectif de légitimation et d'accountability de la BM dans ses activités n'a pas empêché que la finalité économique prime sur l'intérêt humain (A) et que les enjeux égoïstes des Etats membres de la BM entravent l'épanouissement des droits humains (B).

1- Le respect des droits humains lorsque l'objectif économique n'est pas menacé

La BM étant une OI dont l'objet est principalement le développement économique, la priorité est accordée à cette finalité. Les droits humains sont ainsi respectés lorsque l'objectif économique n'est pas menacé.

Les accords internationaux comportant une clause sur les droits de l'homme sont avant tout des accords économiques. La dimension économique restant prédominante, celle-ci n'est pas nécessairement compatible avec la défense des droits fondamentaux comme le démontrent souvent les tergiversations des gouvernements occidentaux dans leurs rapports avec la Chine ou encore leur clémence à l'égard des royaumes du Moyen-Orient au point où l'on peut se demander si le respect des droits fondamentaux est toujours un droit universel ou alors simplement une obligation sélective240(*).

Bien plus, la BM finance les prêts qu'elle accorde à ses Etats membres en recourant à des emprunts (via l'émission de titres) sur les marchés financiers. Dans ce sillage, la rentabilité économique du projet est mise en avant. Car, pour ne pas courir le risque que le prêt ne soit pas remboursé, la priorité est mise sur les dividendes que le projet pétrolier, infrastructurel ou minier pourra engendrer.

En effet, une très grande quantité de prêt octroyés par la BM a systématiquement privilégié les prêts pour de grandes infrastructures telles les grands barrages, les investissements dans les industries extractives de matières premières241(*), des politiques agricoles favorisant le « tout à l'exportation » au prix de l'abandon de la sécurité et de la souveraineté alimentaires, la construction de centrales thermiques, grandes consommatrices de forêts tropicales.

Par ailleurs, la BM est venue en aide en de très nombreuses occasions à des régimes dictatoriaux, responsables avérés de crimes contre l'humanité : les dictatures de l'Amérique latine des années 60 aux années 80, de nombreuses dictatures en Afrique242(*), des régimes de l'ancien bloc soviétique tels la dictature du Président Ceaucescu en Roumanie, les dictatures d'Asie du Sud-Est et d'Extrême-Orient telles celle de Marcos de 1972 à 1986 aux Philippines, de Suharto de 1965 à 1998 en Indonésie, des régimes dictatoriaux de Corée du Sud (1961-1981), de Thaïlande 1966-1988.

L'institution du respect des droits humains dans les accords de prêt constitue sans doute la première tentative d'envergure en vue de dépasser la logique essentiellement économique au sein de la BM. Force est pourtant de constater que le résultat est décevant à bien des égards. On reproche à cette initiative de vouloir instituer une morale internationale en trompe l'oeil. D'ailleurs, certains auteurs n'hésitent pas à affirmer que «toutes les notions qui composent la conditionnalité politique sont au service des bénéficiaires du marché ». Simplement, le monde des affaires « a besoin d'un certain type de régime politique (...) d'un certain mode de comportement des administrations et des citoyens, d'un certain niveau d'éducation (...) permettant l'établissement de relations favorisant une croissance durable»243(*). Par ailleurs, la primauté des intérêts des grandes puissances ne permet pas d'asseoir la légitimité de la BM et nourrit la suspicion des populations à l'égard des activités de la BM ?

2- Une analyse réaliste des décisions du Conseil d'administration de la BM : la primauté des intérêts des grandes puissances sur les autres

La théorie réaliste dans les relations internationales permet de démontrer qu'au sein du Conseil d'Administration de la BM, les Etats préservent leurs intérêts égoïstes244(*). Ainsi, seuls les Etats puissants pourraient influencer les décisions en matière du respect des droits humains, car ils disposent d'un pouvoir de vote important.

En effet, la BM est un instrument contrôlé par des grandes puissances au prorata de leurs parts financières au sein de la BM245(*). Comme le souligne le Professeur M. KAMTO, « derrière le FMI et la Banque mondiale, ce sont les bailleurs bilatéraux, en l'occurrence les pays occidentaux les plus riches, qui s'en servent aux fins de leurs propres politiques dans tel pays sous ajustement dans lequel ils ont des intérêts importants à sauvegarder »246(*). Alors, les grandes puissances n'ont pas toujours pour priorité les droits humains dans les Etats où ils ont des intérêts prioritaires, comme dans d'autres. Par exemple, le fait que les Etats-Unis d'Amérique n'aient pas mis un terme à l'aide accordée à certains pays, en particulier à la Corée du Sud et aux Philippines, « en raison des intérêts liés à la sécurité a provoqué beaucoup de commentaires critiques chez les défenseurs des droits de l'homme »247(*). La Chine également est aujourd'hui citée comme un Etat qui dans le cadre de l'APD est indulgent voire indifférent à la conditionnalité droits humains248(*). Cette pratique d'indulgence quant au respect des droits humains peut permettre de déduire que la Chine ne votera pas une décision du Panel qui recommande la suspension d'un prêt par la BM à un Etat « ami »249(*). En ce sens, Philippe Hugon soutient que : « les questions de bonne gouvernance et de respect des droits humains et des normes sociales et environnementales sont devenues prioritaires. Elles risquent d'être remises en question par l'arrivée des nouveaux partenaires, peu regardants vis-à-vis de ces priorités, et par le rôle de cette concurrence déloyale justifiant le retour aux anciennes pratiques »250(*). En effet, « pour assurer ses besoins en pétrole, la Chine a noué des liens avec l'Angola, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Niger, le Nigeria, le Tchad et le Soudan - ce qui explique ses abstentions lors des votes au Conseil de sécurité concernant la question du Darfour »251(*). Dans ce sillage l'hypothèse de la priorité des intérêts commerciaux et économiques semblent mieux se confirmer lors des votes au sein de la BM.

Aussi, le Conseil d'administration qui détient le pouvoir d'autoriser les enquêtes et d'entériner les recommandations du rapport d'enquête du Panel est financé en grande partie par les grandes firmes qui sont généralement originaires de ces Etats puissants. Il faut par ailleurs souligner qu'au-delà de ces limites stratégiques à la protection des droits humains, il existe des lacunes révélées par l'évaluation de l'application des décisions du Panel.

* 239 Le caractère non obligatoire des décisions du Panel sera étudié infra.

* 240 J.-L. ATANGANA, « Conditionnalité et droit de l'homme », op. cit, p. 77.

* 241 Par exemple, les mines à ciel ouvert, la construction de nombreux oléoducs (Tchad-Cameroun et Bakou-Tbilissi-Ceyhan). Cf. pour les projets financés par la BM le lien www.banquemondiale.org.

* 242 Le régime du Président MOBUTU de 1965 à sa chute en 1997, le régime d'apartheid en Afrique du Sud.

* 243J.-L. ATANGANA AMOUGOU, « Conditionnalité et droit de l'homme», op. cit., p. 77.

* 244 H. MORGENTHAU, Politics among nations. The struggle of power and peace, New York, 5ème edition, Alfred A. Knopf, 1978, pp. 4-15. Selon l'auteur, les Etats agissent dans les relations internationales par les voies qui peuvent conserver et accroître leur puissance. Ainsi, la morale des Etats ne doit pas être assimilée aux lois morales objectives qui gouvernent le monde.

* 245 En 2004, la répartition des droits de vote au sein de la BM fait état de 16,39°/° pour les Etats-unis d'Amérique, 7,87 °/° pour le Japon, 4,49 °/° pour l'Allemagne, 4,30 °/° pour la France, 4,30°/° pour la Grande-Bretagne, 2,78 °/° pour l'Arabie Saoudite, 2,78 °/° pour la Russie et 2,78 °/° pour la Chine. Cette dernière a vu son droit de vote passé de 2,77% à 4,42%, ce qui la positionne à la 3ème place au sein de la BM. Cette augmentation a été décidée lors du sommet du G20 tenu en septembre 2009 à Pittsburgh aux Etats-Unis et de la réunion du Comité de développement en octobre 2009 à Istanbul.

* 246 M. KAMTO, «Problématique de la conditionnalité en droit international et dans les relations internationales », op. cit., p. 20.

* 247 Cf. Débats, sous-commission de l'Aide à l'étranger de la commission des Relations extérieures du Sénat, 4 mars 1977. 95e Cong., lère session, p. 18, 35 ; cité par O. SCHACHTER, « Les aspects juridiques de la politique américaine en matière de Droits de l'homme » in AFDI, volume 23, 1977. p. 68

* 248 Li ANSHAN, « Des chercheurs estiment que l'aide de la Chine à l'Afrique non-assortie de conditions politiques reflète l'attitude sincère de la Chine », www.focac.org, le 07 décembre 2011.

* 249 Il faut relever que la Chine a aujourd'hui des intérêts significatifs en Afrique. Ainsi, La coopération économique et commerciale s'est renforcée sans cesse. « Depuis 2000, le commerce sino-africain a augmenté à un taux de croissance annuelle de plus de 30% et en 2008 le volume total du commerce a dépassé 100 milliards de dollars US, soit deux fois plus important que celui de 2006, et 10 fois plus important par rapport à l'an 2000, atteignant ainsi deux ans plus tôt que prévu l'objectif fixé par le Sommet de Beijing, qui visait à élever le volume du commerce sino-africain à 100 milliards de dollars en 2010 ». V. Le Forum sur la Coopération sino-africaine, « Le Forum sur la Coopération sino-africaine bénéfice aux pays africains », www.focac.org, consulté le 07 décembre 2011. En plus en tant que deuxième puissance mondiale, la Chine a davantage besoin de matières premières pour soutenir sa croissance à deux chiffres.

* 250 Ph. HUGON, « Les nouveaux acteurs de la coopération en Afrique », Revue Evolution des politiques de développement, lien : poldev.revues.org, consulté le 07 décembre 2011.

* 251 Idem.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille