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Rôle du ministère tchadien chargé des droits de l'homme dans l'instauration d'une culture de droit et de démocratie.

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par SINGABE JEAN-CLAUDE BERAMGOTO
CIFADDEG - Yaoundé - DIPEC (Master Professionnel) 2010
  

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Paragraphe 2. La difficile collaboration avec les associations de
défense des droits de l'homme

Le ministère crée en 2005 a déjà trouvé sur le terrain, plusieurs organisations de la société civile oeuvrées dans son domaine. En tant que nouveau, sinon profane, le ministère devrait s'appuyer sur l'expérience et les réalisations de ces structures pour mener à bien ses activités. Mais la réalité s'est montrée différente. Le ministère les prend pour des adversaires. Car selon Mr Baldal Oyamta, toujours dans l'interview, la collaboration avec le ministère évolue en dents de scie parce que les responsables du ministère des droits de l'homme ont la perception que les organisations de défense des droits de l'homme sont des structures rattachées à leur ministère et donc doivent rendre compte de toutes leurs activités ; soumettre tous les rapports d'activités avant leurs publications et transmissions aux partenaires ; et demander l'aval du ministère pour exécuter toute autre activité. Cela continue encore avec l'installation des délégués qui imposent ces exigences aux représentations locales de ces associations.

Ces propos démontrent le climat peut luisant qui existe entre le ministère et les associations. Pourtant, la mission assignée au ministère par le décret 753 démontre bien que le ministère et les associations ont les mêmes objectifs et donc la même mission. En principe, le ministère des droits de l'homme et toutes les organisations de défense des droits de l'homme devaient se mettre dans une synergie d'action, qui

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devait permettre des avancées à un rythme effréné. Mais hélas, c'est la situation contraire qui se fait voir.

De l'autre coté, les associations eux aussi à leur niveau, devaient créer entre eux une petite synergie d'action pour avoir un planning d'activités assez dynamique et éviter le saupoudrage. Malheureusement la question de programmes d'action, c'est une «chasse gardée» de chaque association, malgré que plusieurs d'entre eux se soient mises dans une plate-forme. Même celles qui se sont mises dans une même plate-forme ne connaissent pas les activités les unes et autres. Le plus touchant est que les exploits et réussites des uns crées des relents de jalousie chez d'autres ; au lieu de les stimuler à faire autant ou un peu plus.

Pour complément, nous citons les Propos de Mr Enoch DJONDANG34 qui dans son ouvrage affirme : « en effet, il est un trait de mentalité constante qui existe au Tchad selon lequel toute distinction des mérites d'un individu ou groupe suscitait d'abord la jalousie et ensuite l'animosité des autres. Rares sont les talents nationaux, dans n'importe quel domaine, qui reçurent l'écho mérité de leurs compatriotes à la suite d'une distinction juste. Parfois, cela déclenche le processus de la mise en disgrâce de l'intéressé qui sera ainsi combattu et piégé jusqu'à ce que son étoile puisse en pâtir

A titre d'exemple, nous citerons l'Association Jeunesse Anti-Clivage (AJAC)35 qui a connu l'antipathie de ses associations-soeurs pour deux de ses réalisations primées : d'abord pour avoir invité Mr Idriss Deby en tant que Président de la République à ouvrir une Colonie de vacance qu'elle a organisé en 1997 visant à créer un brassage entre tous les jeunes en vue de casser les barrières ethniques, tribales et régionales. Regroupant plus de trois cent (300) jeunes venant de différentes régions du Tchad, cette colonie a connu une récompense du Chef de l'Etat. Ce qui a poussé les autres associations à discréditer l'AJAC soi-disant qu'elle fait la politique du gouvernement. Ensuite pour le Prix Droits de l'Homme de la République française de l'an 2000,

34 Juriste tchadien spécialisé dans les questions de développement et de la bonne gouvernance ; Fondateur de la LTDH, Enoch DJONDANG est un ancien membre de gouvernement du Tchad.

35 AJAC : Association de la société civile tchadienne de lutte contre les discriminations. Membre de l'Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT) et du Bureau International de la Paix (IPB) ; Lauréate du Prix Shalom (Allemagne 1997) et du Prix droits de l'homme de la République française (France 2000).

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décerné par le Premier ministre français pour encourager l'investissement de l'AJAC dans la lutte contre la traite des enfants utilisés comme «bouvier»36 au sud du Tchad.

Ainsi, l'entente au sein des associations entre elles-mêmes est rendue difficile, ce qui rend encore plus difficile une saine collaboration avec le ministère. Parce que les détracteurs des uns et des autres vont manipuler les responsables du ministère au profit de leurs intérêts. Dans un tel climat, le ministère et les associations ne pourront s'entendre pour trouver une issue commune de stratégies de lutte. Ce qui ouvre les portes à ces violations des droits de l'homme qui se hissent à un niveau élevé et les défient tous.

Au-delà de ce problème de collaboration qui est un frein à une synergie d'action, il y a encore d'autres obstacles à la mise en oeuvre des droits de l'homme qui sont communes à la fois aux actions des associations et à celles du ministère. Ces obstacles sont d'ordre socioculturel.

Il s'agit d'abord de la difficile conception des droits humains dans certains milieux, certaines ethnies chez lesquels des actes réprimés par le droit sont des pratiques traditionnelles reconnues et enseignées de génération en génération. En effet, dans certaines régions au Tchad (Région du Batha, du Ouaddaï, du Mayo Kebbi...) le vol et le braquage sont des actes de bravoure pour tout jeune homme. Il doit réaliser ces actes avant d'être admis au mariage. Dans d'autres régions (dans la Région de Tandjilé, le Mayo Kebbi, Moyen Chari...), le viol est un acte de bravoure faisant partie du processus préalable au mariage. Il en est de même pour le crime qui est un acte de bravoure et de vengeance dans les régions de l'Ennedi, du Wadi Fira ... Tuer et voler dans beaucoup de régions sont des gestes aussi naturel que dormir et se réveiller.

Il est très difficile pour des personnes ayant été éduqué à une pratique de vol, de viol, de crime comme acte culturel de bravoure humaine, d'accepter que ces actes sont des violations de droits de l'homme. C'est un pari difficile à gagner tant du côté de l'Etat que des associations de défense des droits de l'homme.

Il y a ensuite la question des valeurs citoyennes qui n'existe plus. Car le vandalisme et l'incivisme ont pris la place. Nous avons perdu nos valeurs citoyennes. L'exemple

36 Phénomène de semi-esclavage d'enfants Saras (Sudistes) vendus comme bergers aux éleveurs (Nordistes) transhumant leur région.

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le plus frappant est celui des événements de février 2008 pendant lesquels la population s'est mise à piller allègrement les biens publics, à détruire les archives etc. Le civisme a disparu parce que la population ne se rend pas compte qu'elle vole ses propres biens ; elle pense que c'est les biens de l'Etat, les biens de l'individu qui gouverne. Comment faire inculquer à cette population, une culture de droits de l'homme, pendant qu'elle ignore ses devoirs civiques et ses valeurs citoyennes ? Ce pari n'est pas aussi des moindres.

Aussi la corruption pratiquée sur les rues par les policiers ; les forces de l'ordre qui tabassent les gens comme bon leur semble ; les hommes en tenus qui au lieu de protéger les citoyens, les maltraitent sans jamais être inquiétés parce qu'ils sont considérés comme des supra-citoyens. Toutes ces situations qui ne sont pas exhaustives constituent des grands obstacles pour l'application des actions en faveur des droits de l'homme.

Parvenu à l'issu de cette première partie, nous nous permettons de dire que la mission dévolue au ministère des droits de l'homme est grande et mérite beaucoup d'efforts de la part du gouvernement pour arriver à bon port.

En effet, conformément au Décret 720, le pouvoir de concevoir de suivre et de mettre en oeuvre la politique du gouvernement en matière des droits de l'homme est pleinement accordé sans aucune restriction. Ce qui donne main libre à ce ministère pour concevoir une politique permettant une lutte efficiente, et adaptée aux problèmes des droits de l'homme au Tchad. Malheureusement, l'analyse critique nous démontre d'une part une mauvaise volonté politique de l'Etat dans l'accomplissement de cette tâche. Cette mauvaise volonté politique se traduit par :

- le manque d'effectivité des engagements internationaux signés ;

- le manque de cohérence et d'application des normes législatives et réglementaires ;

- le recrutement du personnel non qualifié au sein du ministère ;

- le manque de formation ou de recyclage en matière de droits de l'homme au profit du personnel du ministère ;

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- le manque de diagnostic réel lié aux problèmes spécifiques des droits de l'homme au Tchad ;

- le manque de synergie d'action avec les organisations et partenaires opérationnels du domaine.

D'autre part elle démontre une difficile collaboration avec les autres acteurs impliqués dans la même lutte, malgré, qu'une franche collaboration peut mener à des solutions consensuelles plus justes et efficace.

Toutefois, au-delà de cette volonté politique, une stratégie dynamique de mise en oeuvre de cette mission s'avère indispensable, eu égard aux insuffisances de professionnalisme signalées. Car, l'Etat peut y mettre de sa volonté politique, en rendant disponibles les moyens adéquats à cette politique. Mais les sales habitudes résultantes d'une impunité devenue chronique et d'une promotion des cancres érigée en système peuvent être des obstacles à la réussite de cette mission.

De ce qui précède, la mission du ministère chargé des droits de l'homme est une mission bien formulée et très noble qui peut permettre l'instauration effective d'une culture de droits au Tchad. Cependant, la politique de mise en oeuvre de cette mission est émaillée de plusieurs manquements qui méritent d'être corrigés. Car, malgré qu'elle soit bien conçue, cette mission ne peut atteindre son but, si elle n'est pas bien exécutée.

C'est ainsi que nous examinerons dans la seconde partie, les approches possibles pour réussir d'enracinement des droits de l'homme au Tchad en sachant que cet enracinement doit commencer nécessairement par l'amélioration des situations actuelles des droits de l'homme pour déboucher sur les éléments concrets de cet enracinement.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand