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Adaptation cinématographique de chanson douce roman de Leila Slimani


par Imane LAAMIRI
université Chouaib Doukkali - Licence 2021
  

Disponible en mode multipage

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    Département de langue et littérature françaises

    Filière : études françaises Parcours : Littérature

    Mémoire de Licence sous le thème :

    De l'adaptation cinématographique de Chanson douce, roman de Leila Slimani.

    Réalisé par : LAAMIRI Imane Encadré par : Professeur BEJJTIT Réda

    Année universitaire

    2020-2021

    1

    2

    Dédicace

    Je dédie ce modeste travail à mes chers parents, les personnes les plus chères,
    ce qui nous oblige à les classer dans les premières lignes de notre dédicace.

    Qui sont toujours là pour moi et pour ma réussite, et qui, sans eux, je
    n'aurais jamais pu réussir.

    À toi ma seule soeur, mon futur docteur : Zineb
    À toi mon cher frère, mon confident : Hamza

    À toute la famille, à tous ceux qui m'ont aidé de près ou de loin pour réaliser

    ce mémoire.

    À la mémoire de M. Sabah Abdelkhalek

    Puisse Dieu vous avoir en sa sainte miséricorde et que ce travail soit une
    prière pour votre âme !

    3

    Remerciements

    Avant d'entamer la présentation de ce travail, je tiens à remercier Allah le Tout Miséricordieux de m'avoir donné la patience, le courage et la volonté qui m'ont permis d'accomplir ce travail de recherche à son ultime point.

    Je tiens, en premier lieu, à remercier profondément et sincèrement mon encadrant M. BEJJTIT Réda pour sa disponibilité, ses précieux conseils et la subtilité de ses orientations.

    Un grand remerciement, aussi, que j'adresse à mes enseignants du Département de Langue et Littérature Française qui ont assuré ma formation pendant les trois ans de mon cursus universitaire.

    Mes vifs remerciements vont également à mes parents et ma famille pour m'avoir aidée, soutenue afin de mener à bien cette étude ; je leur exprime toute ma reconnaissance ! Qu'Allah le Tout Puissant vous récompense par le prix de son vaste paradis !

    4

    Table des matières

    Introduction générale .. 6

    PREMIERE PARTIE : GENERALITES SUR L'ADAPTATION

    CINEMATOGRAPHIQUE D'UNE OEUVRE LITTERAIRE

    Chapitre I : cadre théorique .8

    1. définition des concepts de base 9
    1.1 Définition de l'oeuvre littéraire

    1.2 Définition du roman

    1.3 Définition du cinéma . 10
    1.4 Définition du film

    1.5 Définition du scénario

    2. Le phénomène de l'adaptation cinématographique

    2.1 Définition de l'adaptation

    2.2 Les types d'adaptation cinématographique ..11
    2.2.1. L'adaptation passive (fidèle)

    2.2.2. L'adaptation amplificatrice ..12
    2.2.3. L'adaptation libre

    2.3 Les techniques de l'adaptation cinématographique .13
    2.3.1. Les démarches de l'adaptation

    2.3.2. Le travail de l'adaptation cinématographique . .14
    DEUXIEME PARTIE : ADAPTATION CINEMATOGRAPHIQUE DE

    CHANSON DOUCE DE LEILA SLIMANI 16
    Chapitre II : Adaptation cinématographique du roman

    Chanson douce de Leila Slimani

    1. Présentation du corpus .17

    1.1 Présentation de l'auteur

    5

    1.2. Présentation du roman

    1.3 Présentation de réalisateur .18
    1.4 Présentation du film

    2. Synopsis

     

    3. fiche technique du roman et du film

    ..19

    4. Etude comparative entre le roman et le film

    .20

     

    4.1. Le titre

     

    4.2. Les personnages

    .21

    4.3. Analyse spatio-temporelle

    ..22

    4.4. Les thèmes .23

    4.5. Les scènes 24

    Conclusion générale

    26

    Bibliographie

    ..28

    Annexe

    31

    6

    INTRODUCTION

    Le cinéma est l'art du XXème siècle le plus représentatif. C'est un prodigieux moyen d'expression qui se prolonge par la télévision.

    La naissance de cet art est considérée lors de la première projection publique par les frères lumière le 28 décembre 1895 à Paris. Au début du XXème siècle, le cinéma devient un divertissement pour les spectateurs. C'est l'époque ou Georges Méliès réalise des films fantastiques, comme « le Voyage dans la Lune », avec les premiers effets spéciaux de l'histoire du cinéma ; c'était Le premier long métrage de l'histoire du cinéma « the story of the kelly gang » réalisé par Charles Tait.

    Le cinéma français s'est constitué une place dans le domaine artistique en devenant « le septième art », cette désignation est née de l'idée que le cinéma utilise l'espace, le visuel, les mots et les sons pour transmettre des idées. En outre, comme tous les arts, le cinéma fait appel en même temps aux sens, aux émotions et à l'intellect. Il est devenu un média de masse, une institution sociale, une nouvelle forme d'expression, un art populaire et une industrie.

    D'ailleurs, d'après Jonathan Demme, « le cinéma a trois fonctions vitales. Primo : divertir, et c'est une noble entreprise. Secundo : faire réfléchir grâce a une fiction qui ne privilégie pas seulement le divertissement. Tertio: être un miroir de l'existence1 ».

    Depuis son plus jeune âge, le cinéma ne cesse d'établir des rapports très importants avec les autres arts et notamment la littérature : il a eu besoin de s'appuyer sur les produits littéraires comme références documentaires pour prouver sa légitimité. Selon Gaudreault « le cinéma a été intermédial comme il ne le sera peut être jamais [...] surtout dans les toutes premières années de son existence2 » ; à partir de cela l'adaptation cinématographique des romans se manifeste, c'est-à-dire que les réalisateurs et les scénaristes usaient de la matière première qui est l'oeuvre littéraire

    1 Demme, Jonathan. [ http://evene.lefigaro.fr/citations].

    2 Gaudreault, 1999 : 175.

    7

    avec tous ses genres (romans, nouvelles, contes et pièces théâtrales), afin de faire naître le scenario pour réaliser un film.

    Le cinéma s'approprie alors, des oeuvres romanesques qui ont suscité des succès mondiaux. Puiser dans la littérature et s'inspirer des romans célèbres, dont le titre seulement garantit le succès du film et incite à aller le voir, devient une véritable stratégie de la production cinématographique pour élargir le public du cinéma. Ces adaptations cinématographiques peuvent aussi attirer l'attention du public vers un livre récent ou rendre actuel un livre oublié par les lecteurs.

    Aujourd'hui, les adaptations ont complètement imprégné nos représentations culturelles. Au cinéma, les adaptations d'oeuvres littéraires, de Bandes Dessinées, de biographies... sont très nombreuses et la question qui se pose souvent c'es : est-ce que le film est fidèle à l'oeuvre littéraire ?

    Dans ce sens, nous avons choisi pour ce mémoire le thème de l'adaptation cinématographique d'une oeuvre littéraire, dans le but de démontrer les convergences et les divergences entre l'oeuvre littéraire et son adaptation en film. Pour réaliser cette comparaison, nous avons choisi comme corpus le roman de Leila Slimani « Chanson douce », publié en 2016, et son adaptation en film Chanson douce (2019) réalisé par Lucie Borleteau.

    Notre travail s'organisera en deux chapitres, dans un premier chapitre, nous essayerons de comprendre les notions de base de l'adaptation.

    Le deuxième chapitre, sera réservé à l'analyse du corpus. Une étude comparative entre l'oeuvre et le film.

    8

    Chapitre I : Cadre théorique

    Généralités sur l'adaptation cinématographique d'une oeuvre littéraire.

    9

    1. Définition des concepts de base

    Avant d'entamer notre étude, nous proposons les définitions des concepts clés liés à notre thème de recherche :

    1.1. Définition de l'oeuvre littéraire

    En tout premier lieu le terme « oeuvre » est connu comme une chose produite par l'Homme. Sous ce rapport, il peut s'agir d'un produit intellectuel, littéraire, artistique ou autre (comme une chanson ou un poème) ou d'un objet matériel (une maison, des travaux manuels).

    Selon le dictionnaire Larousse, le mot « oeuvre » est défini comme étant un ensemble de la production d'un artiste.

    Littéraire, du latin litterarius, est un adjectif qui a rapport à la littérature en tant qu'activité.

    Une oeuvre littéraire est donc une création qui exprime une intention de communiquer de la part de l'auteur, à des fins esthétiques, dans le but de transmettre une idée ; l'outil qu'il utilise pour réaliser cette oeuvre est l'écriture et essaie de travailler avec elle pour que son message puisse être compris. Ces oeuvres racontent souvent une histoire, que ce soit à la première ou à la troisième personne, avec un argument et par l'utilisation de diverses ressources littéraires qui sont liées à son époque.

    L'oeuvre littéraire peut appartenir à différents genres, tels que le récit, le lyrique, le drame, l'épique ou le didactique.

    1.2. Définition du roman

    Le mot « roman » apparaît au Moyen Âge pour désigner une oeuvre écrite en langue « romane », c'est-à-dire la langue courante, par opposition au latin. Il est alors l'héritier des épopées antiques et, s'il est bien de nature narrative, il peut être écrit en vers. La forme moderne du roman en prose apparaît au XVIIème siècle.

    Le roman est définit à l'origine dans le dictionnaire de français Le Robert comme étant une « OEuvre d'imagination en prose qui présente des personnages donnés comme réels. Romans et nouvelles3 ».

    Littéralement, il s'agit d'une oeuvre littéraire en prose, mêlant le réel et l'imaginaire et qui, dans sa forme la plus traditionnelle, cherche à susciter l'intérêt, le plaisir du lecteur en racontant le destin d'un héros principal, une intrigue entre

    3 Vers une définition du genre romanesque [ www.maxicours.com]

    10

    plusieurs personnages, présentés dans leur psychologie, leurs passions, leurs aventures, leur milieu social, sur un arrière-fond moral, métaphysique.

    Par rapport à d'autres fictions narratives, le roman se distingue par sa longueur et par sa vraisemblance.

    Le genre romanesque est caractérisé par sa diversité, sa capacité à aborder tous les sujets. Il comprend les romans d'amour, policiers, historique, autobiographiques, d'aventures...

    1.3 Définition du cinéma

    Tout d'abord, on nomme cinéma une projection visuelle en mouvement, le plus souvent sonorisée.

    Le terme « cinéma » est défini dans le dictionnaire Larousse comme étant l'art de composer et de réaliser des films cinématographiques. À cet égard, il s'agit d'un procédé permettant de procurer l'illusion du mouvement par la projection, à cadence suffisamment élevée, de vues fixes enregistrées en continuité sur un film.

    C'est une forme de divertissement populaire dans le monde entier qui consiste à regarder des films dans des salles obscures.

    1.4 Définition du film et du réalisateur

    Un film est une succession d'images fixes qui, une fois projetées sur un écran, semblent en mouvement. Il signifie aussi que la pellicule vierge sur laquelle l'oeuvre cinématographique est enregistrée est entièrement réalisée par le réalisateur, qui le fait avec la participation du scénariste, en imaginant les scènes et dirigeant l'ensemble des acteurs.

    1.5 Définition du scénario

    Le scénario est l'une des étapes majeures dans le processus de fabrication d'un film. C'est la description écrite de ce que sera un film. Il marque une étape importante entre le projet initial et sa réalisation à l'écran.

    Il s'agit d'un document technique destiné en premier lieu au producteur. Une fois validé, le scénario devient la référence pour tous les métiers investis dans la production du film, acteurs, décorateurs...

    2. Le phénomène de l'adaptation cinématographique

    2.1. Définition de l'adaptation

    L'adaptation est vivement présentée dans notre environnement culturel, artistiquement et commercialement. Pour une raison ou à une autre, elle vise presque tous les domaines culturels en prenant différentes formes : un film, une pièce de théâtre, un dessin animé, une Bande Dessinée,...

    11

    Pour arriver à la définition de l'adaptation cinématographique des oeuvres littéraire, il faut d'abord définir le terme adaptation ; nous allons faire appel à plusieurs définitions, de différentes sources.

    Le terme « adaptation » est définit selon Le Dictionnaire du littéraire4 comme étant une pratique de transposition d'une oeuvre (texte ou image) d'un mode d'expression vers un autre. Elle ne concerne pas seulement la littérature, mais l'ensemble des arts dont elle décloisonne le territoire.

    Le dictionnaire Vocabulaire technique du cinéma5, qui définit le terme « adaptation » comme étant une préparation, un travail littéraire préparatoire effectué à partir d'une oeuvre préexistante (roman, nouvelles, pièce) ou d'un sujet original pour assurer sa transformation en terme cinématographique. L'adaptation constitue la première étape du travail de présentation, elle précède la mise au point de la continuité dialoguée et du découpage.

    Linda Hutcheon propose dans son ouvrage6 une définition à l'adaptation comme une transposition identifiable et ouvertement annoncée d'une ou plusieurs oeuvre(s), qui peut inclure un changement de média, de genre ou de contexte temporel ou géographique. En d'autres termes, la forme de l'oeuvre change, mais le contenu perdure. L'adaptation implique donc des transpositions intersémiotiques d'un système de signes (les mots) à un autre (les images).

    Une adaptation cinématographique est donc un film basé sur une oeuvre existante tel qu'un livre, un jeu-vidéo, une série télévisée, ou encore un dessin animé. En critique littéraire et artistique, l'adaptation est « l'ensemble de modifications apportées à une oeuvre que l'on souhaite exprimer dans une autre forme que sa forme originale7 ».

    2.2 Les types d'adaptation cinématographique

    L'adaptation d'une oeuvre littéraire au cinéma ne signifie pas que le résultat sur l'écran soit une copie conforme du livre, ce qui paraît impossible. Alors, pour identifier le degré de fidélité du film par rapport au roman adapté, on distingue trois types d'adaptation : l'adaptation passive appelée aussi fidèle ou soumise, l'adaptation amplificatrice et l'adaptation libre.

    2.2.1 L'adaptation passive (fidèle) :

    L'adaptation passive se définit comme étant cette illustration qui procède à la reproduction de l'oeuvre initiale avec des aménagements nécessaires, ne gardant en

    4 ARON, Paul, SAINT JACQUES Denis et VIALA Alain, Le Dictionnaire du Littéraire, Presse Universitaire de France.

    5 FLATTOT, B, « Les liaisons dangereuses : du roman à la représentation théâtrale », mémoire de maîtrise, Université de Metz, département de lettres Modernes, 2004, p. 51.

    6 Hutcheon, Linda. Theory of Adaptation. New York: Routledge, 2006.

    7 L'adaptation Cinématographique.[ www.ladissertation.com]

    12

    particulier, que l'enchaînement des péripéties et les aspects figuratifs et scéniques au

    détriment des développements dits « littéraires ».

    Ce type consiste à respecter le contexte de l'action, le cadre historique et temporel, les

    caractéristiques des personnages du roman et leurs fonctions dans l'histoire, où le

    scénariste poursuit une démarche plus littérale, loin de toute créativité. Nous pouvons ainsi stipuler qu'il n'y a pas un film totalement fidèle au roman, et il est impossible

    qu'un réalisateur puisse adapter le texte d'inspiration tel qu'il est, malgré tous ses

    efforts pour être fidèle pour les raisons suivantes :

    - La première raison est que le langage des images ne reflète pas le langage des

    mots ;

    - La deuxième raison, c'est qu'un film de deux heures ou plus ne peut pas reprendre précisément ou en détail tous les événements et les gestes d'un récit de 240

    pages en une heure quarante minutes (le cas de notre corpus). Le cinéaste doit donc faire des choix. Opérer des choix semble être, de manière analogue, une façon qu'a le

    cinéaste de s'adapter aux problèmes que lui pause l'adaptation.

    - Enfin, la troisième raison est qu'en adaptant, le cinéaste propose sa lecture, sa vision de l'oeuvre, son interprétation. C'est d'ailleurs ce que disait Proust dans A La

    Recherche du temps perdu : « Chaque lecteur est, quand il lit, le propre lecteur de soi-même8 ». L'adaptation fidèle reste donc une mission impossible.

    2.2.2. L'adaptation amplificatrice

    Cette adaptation ne se contente pas de reproduire en image les scènes du roman, elle les grossit, les étoffe, les amplifie. Or les textes les plus adaptés sont les nouvelles, que le cinéaste est bien obligé d'amplifier pour atteindre la durée minimale d'une heure et demi du film. Cette amplification est due à des exigences d'ordre esthétique ou technique concernant le travail de l'adaptation lui-même

    D'ailleurs, le scénariste cherche à amplifier des scènes, soit par l'invention de

    certains éléments qui réussissent à frapper l'esprit du spectateur et déclenchent sa curiosité afin de maintenir le contact avec lui, soit par l'ajout de scènes complètes pour

    ne pas risquer que le spectateur s'ennuie à un moment de la diffusion du film. Alors

    c'est toute la structure générale de l'histoire qui va être modifiée. Cette modification s'interprète par l'aspect de prolongement.

    2.2.3. L'adaptation libre

    Cette adaptation donne libre cours a la créativité du cinéaste, en lui permettant de

    s'inspirer du livre tout en revendiquant le droit de le modifier la liberté de créer des images originales ; il peut apporter un changement d'époque et de lieu, la suppression

    8 Le Temps retrouvé - tome 2. [ fr.wikisource.org/Proust]

    13

    des personnages et la mise en évidence d'autres, transposer des scènes et supprimer ou ajouter certains éléments.

    Le réalisateur peut même transformer la structure de l'oeuvre par des redoublements ou des ellipses qui correspondent mieux à son propos univers. Car il ne faut pas perdre de vue que l'adaptation est avant tout la confrontation fructueuse de deux mondes imaginaires, celui de l'auteur et celui du scénariste.

    2.3 Les techniques de l'adaptation cinématographique

    Avant de pouvoir se lancer dans l'adaptation d'une oeuvre littéraire et pour atteindre le plus haut degré de réussite ; il y a une démarche de deux phases à suivre.

    2.3.1. Les démarches de l'adaptation.

    C'est une phase qui comporte les étapes à suivre afin de préparer le terrain pour le travail d'adaptation.

    En effet, le premier pas à faire, lorsque l'on souhaite adapter un roman, c'est de se renseigner sur ses droits. Deux cas de figure peuvent se présenter :

    - Une oeuvre tombée dans le domaine public ; - Une oeuvre protégée.

    Pour les premières, La protection accordée par le droit d'auteur persiste au profit de ses ayants droit pendant l'année civile en cours et les 70 ans qui suivent la mort de l'auteur. Une fois le délai expiré, l'oeuvre appartient au domaine public : cela signifie que tout auteur est libre de l'adapter sans avoir à en demander l'autorisation.

    Pour un ouvrage protégé, dans ce cas le scénariste, le producteur ou le réalisateur doit avoir les droits d'adapter cette oeuvre à travers la négociation du droit exclusif avec son auteur.

    Cette négociation se fait souvent par le producteur pour une période d'exclusivité des droits limitée et fixée par contrat, généralement un an renouvelable. Cette option sur les droits est souvent signée avec le producteur et non avec le scénariste pour deux raisons :

    - L'option est souvent payante, voire onéreuse ;

    - Le scénariste a peu de chance d'obtenir des droits s'il ne travaille pas avec un producteur puisqu'il n'a quasiment aucune chance que son scénario soit tourné.

    Après avoir obtenu l'accord d'adapter une oeuvre littéraire tel un roman, le Scénariste se met directement au travail.

    14

    2.3.2. Le travail de l'adaptation cinématographique

    Le travail d'adaptation est le choix et le tri de nombreuses coupes douloureuses, qui ne peuvent se faire que suite à l'imprégnation du scénariste du contenu du livre afin d'en retirer les éléments qui instaureront la base d'un scénario.

    La méthode la plus pratiquée est de commencer par résumer chacun des chapitres de l'oeuvre, celle qui consiste à dégager les éléments de base suivants :

    - Le thème qu'on saisit à travers un résumé global de l'oeuvre.

    - L'intrigue ; le noeud du roman sur lequel on met l'accent pour extraire le degré dramaturgique.

    - Le protagoniste ; personne ayant le rôle principal dans l'histoire.

    Le conflit extrême ; appelé « climax », l'objectif auquel le protagoniste se rend en mission.

    Après avoir défini les éléments constituants le schéma du scénario, le travail de l'adaptation, se basant sur ces éléments, peut se définir par les étapes suivantes :

    1. L'organisation : en trois actes, des éléments les plus dramaturgiques du roman. Ces trois actes se présentent comme suit :

    a. L'exposition : permet de présenter rapidement le protagoniste, l'univers dans lequel il vit, la situation dans laquelle il se trouve au moment où débute le film. Soudain, survient un événement, l'incident déclencheur qui va bouleverser

    l'équilibre de ce personnage, le pousser à faire un choix difficile, ou alors lui faire désirer quelque chose de nouveau. Dès lors, le héros de l'histoire a un objectif qui va le pousser à tout faire pour l'atteindre. L'histoire, à proprement parler, peut alors débuter.

    b. Le développement : représente la majeure partie du scénario où le protagoniste fait tout pour atteindre son objectif en faisant face à de nombreux

    obstacles, parfois incarnés par un personnage, un antagoniste. Les obstacles s'enchaînent et gagnent sans cesse en intensité jusqu'à un point de non retour, le

    climax, au cours duquel le protagoniste va devoir mener l'ultime combat contre un

    personnage ou un événement. A ce stade, le héros a soit atteint son objectif, soit échoué. C'est ce qu'on appelle la réponse dramatique.

    Le deuxième acte peut être scindé en deux, par un climax médian, qui relance l'histoire et l'intérêt du spectateur.

    c. Le dénouement : montre les résultats, les conséquences de l'histoire. C'est la partie la plus brève du scénario. Chaque acte se décompose lui-

    15

    même en séquences, qui se décomposent à leur tour en scènes. Assurément, il existe des variantes ; ce schéma n'est qu'une base.

    2. Suppression des éléments qui ne font pas avancer l'action :

    Tels que les personnages et les événements superflus, cette suppression se réalise

    par :

    a. La fusion qui vise à fondre les caractéristiques de plusieurs personnages en un seul.

    b. Le montage qui est une scène muette construite d'une succession de plans rapides permet de résumer tout un plan de l'histoire, de montrer que le temps passe.

    3. La traduction, en action, de tout l'aspect intérieur du personnage, ses pensées, ses souvenirs, ses émotions. Cette étape permet de montrer ce que le personnage ressent à travers ses actions et ses gestes.

    4. Le rétrécissement des scènes et dialogues qui ne doivent, généralement, pas dépasser les trois minutes.

    5. Le recours à la voix off (dialogue prononcé par un personnage qui n'est pas à l'écran, parfois, c'est aussi l'illustration sonore des pensées du personnage à l'écran par le biais de musiques ou de bruits) afin de résumer une situation, de rendre hommage, discrètement, au texte d'origine.

    6. Rendre le protagoniste le plus actif possible pour que le public puisse s'identifier à lui ; autrement, les spectateurs ne pourront pas pénétrer dans l'histoire, s'y intéresser, être émus.

    7. L'entrée rapide dans le vif de l'histoire par une exposition qui doit être brève. Dans le cas où le roman présente un univers complexe, dense, le scénariste est obligé de trouver le moyen de le présenter brièvement, à l'aide d'images fortes.

    8. L'invention des éléments manquants, quand le roman ne contient pas un ou quelques éléments constituant le schéma du scénario.

    9. L'éloignement du texte de départ même si le roman contient un bon potentiel filmique, car le travail de l'adaptation n'est, en aucun cas, de la paraphrase. Ceux-ci constituent les étapes que peut et doit suivre un adaptateur dans son travail, mais ce n'est jamais de la science exacte et chaque scénariste a une marge de liberté qui permet à son don, son génie, d'intervenir pour créer sa propre oeuvre.

    16

    Chapitre II :

    ADAPTATION CINEMATOGRAPHIQUE DE

    CHANSON DOUCE DE LEILA SLIMANI

    17

    1. Présentation du corpus.

    1.1. Présentation de l'auteur

    Leïla Slimani est une journaliste et écrivaine franco-marocaine née à Rabat le 3 octobre 1981. Son père est banquier et haut fonctionnaire marocain, secrétaire

    d'État chargé des Affaires économiques de 1977 à 1979. Sa mère est médecin ORL et a été la première femme médecin à intégrer une spécialité médicale au Maroc.

    Après son baccalauréat, obtenu au lycée français Descartes à Rabat en 1999, elle vient à Paris en classes préparatoires littéraires au lycée Fénelon. Elle sort ensuite

    diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris. Passionnée de théâtre, elle s'inscrit parallèlement au Cours Florent pour devenir comédienne. Elle se tourne ensuite vers

    les médias en poursuivant des études à L'École supérieure de commerce de Paris (ESCP Europe).

    De 2008 à 2012, elle est engagée au magazine Jeune Afrique avant de se

    consacrer à l'écriture littéraire, mais continue des piges pour le journal. Elle écrit son premier ouvrage, La baie de Dakhla : Itinérance enchantée entre mer et désert en

    20139 avant de connaître un premier succès avec son premier roman Dans le jardin de

    l'ogre10 en 2014. Deux ans plus tard, elle fait l'unanimité des critiques avec son roman Chanson douce11.

    1.2. Présentation du roman

    Chanson douce est le deuxième roman de Leïla Slimani publié aux éditions Gallimard. Il a obtenu, le 3 novembre 2016, le prix Goncourt dès le premier tour de scrutin.

    C'est un roman social terrifiant qui relate le quotidien d'une famille ordinaire et prend surtout des allures psychologiques d'une nourrice en provoquant des circonstances familiales et financières qui sont à l'origine de cette soif en vengeance contre le monde.

    Le roman s'ouvre sur cette phrase terrible « le bébé est mort » une mère se tient en état de choc, un long hurlement qui déchire le coeur de qui que ce soit ; celui qui perçoit ce cri comprend qu'un drame est arrivé ; il y a un troisième corps dans l'appartement, celui de la nourrice qui a tenté de mettre fin à ses jours.

    ? 9 Slimani, Leila. « La baie de Dakhla - Itinérance enchantée entre mer et désert », 2014. Editeur : Malika.

    10 Slimani, Leila. « Dans le Jardin de l'Ogre » 2014, Ed, Gallimard.

    11 Slimani, Leila. « Chanson Douce » 2016, Ed, Gallimard.

    18

    1.3 Présentation de réalisateur

    Lucie Borleteau est une actrice et réalisatrice française née en 1980. Elle fait des études de cinéma à Saint-Denis Paris 8. Après, elle passe à la pratique : apprend la production chez Why Not Productions, travaille comme assistante réalisatrice pour Lou Ye et Arnaud Desplechin, collabore à l'écriture de scénarios (White Material de Claire Denis). Depuis, elle travaille dans le cinéma, a fait un peu de production, collaboré en scénario ou en mise en scène avec des réalisateurs - Claire Denis, Arnaud Desplechin, Lou Ye... - joué dans quelques films, et parfois au théâtre. Elle a réalisé trois moyens-métrages. Fidelio, L'Odyssée d'Alice est son premier long métrage, qui lui permet d'être nommée au César du meilleur premier film

    1.4 Présentation du film

    Chanson douce est un film français réalisé par Lucie Borleteau, sorti en 2019. Il s'agit d'une adaptation du roman éponyme de la franco-marocaine Leila Slimani, cet ouvrage glaçant avait obtenu quelque mois plus tard le prix Goncourt.

    Dans le film Chanson douce, ce drame psychologique d'une durée de 1h 40 mn, on retrouve les acteurs Karine Viard dans le rôle de la nounou et Leila Bekhti et Antoine Reinartz qui jouent le rôle des parents. Cette nounou se montre dévouée, consciencieuse, volontaire, au point que sa présence occupe une place centrale dans la famille. Mais très vite les réactions de Louise deviennent inquiétantes.

    2. Synopsis

    Chanson douce s'ouvre sur une scène de crime : un bébé tué, une petite fille gravement blessée et la meurtrière dans le coma après s'être tranchée les veines et enfoncée un couteau dans la gorge. Le récit qui suit nous raconte la genèse de ce crime atroce. Myriam et Paul, deux jeunes parisiens, sont à la recherche d'une nounou pour leurs enfants, Mila et Adam. Ils trouvent la candidate idéale en la personne de Louise, dont la complicité avec les enfants se fait tout de suite sentir.

    Louise est irréprochable, elle ne se contente pas de prodiguer à Mila et Adam douceur et attention, mais se charge aussi d'effectuer toutes les tâches ménagères, libérant ainsi Myriam de la servitude domestique qui l'étouffait jusque-là. La nounou devient progressivement indispensable au bon fonctionnement de leur foyer. Aveuglé par l'idéal de bonheur bourgeois qu'il est en train d'atteindre, le couple ne voit pas et ne veut pas voir que derrière ce rôle de bonne fée qu'elle s'évertue à tenir, Louise se

    19

    bat avec une solitude, une misère et un épuisement qui nourrissent en elle une morbidité grandissante.

    3. fiche technique du roman et du film

    pages.

    ? Chanson douce : roman

    - Titre : chanson douce

    - Auteur : Leila Slimani

    - Edition : Gallimard

    - Nombre de pages : 227

    - Date de parution : 18 août 2016.

    - Collection : Blanche.

    - Langue : français.

    - Genre : roman.

    - Distinctions : Goncourt (2016)

    ? Chanson douce : film

    - Titre : CHANSON DOUCE

    - Pays : France

    - Année de production : 2018

    - Date de sortie : 27/11/2019

    - Durée: 1h 40 mn

    - Pays de tournage : France

    - Scénario : Maïwenn, Lucie Borleteau, Jérémie Elkaïm

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    4. Etude comparative entre le roman et le film

    4.1 Le titre :

    Le titre de notre corpus « Chanson douce » est un titre thématique, vu qu'il ne fait pas référence au sujet, non pas à la forme. En fait, le titre du roman fait allusion à une comptine célèbre, une berceuse chantée à l'enfant par sa mère.

    En revanche, le titre nous apparaît représentatif d'un sentiment d'amour et de calme qui renvoient à une réalité terrible qui était racontée au-dedans de roman. L'auteure a choisi ce titre pour mieux dévoyer le lecteur face à cette famille, à première vue idyllique, qui va petit a petit basculer dans l'horreur, grâce à de nombreux flashbacks pour comprendre cette relation toxique entre les parents et la nourrice. En effet, Lucie Borleteau, la réalisatrice du film adapté « Chanson douce » garde le même nom du roman, pour la même raison.

    Il s'agit donc d'un titre antiphrastique vu la contradiction qui se manifeste depuis le titre poétique du roman qui fait contraste avec le contenu de l'histoire.

    4.2 Les personnages

     

    Nom

    Leurs rôles dans le roman

    Les personnages
    principaux

    Louise

    Une femme de cinquantaine

    d'année qui vit dans une
    angoisse et une solitude depuis

    son enfance, héroïne de
    l'histoire

    Myriam

    La mère qui veut bien faire est

    écartée entre plusieurs désirs :
    être une bonne maman et ne pas

    perdre son opportunité
    professionnelle

    Paul

    Le père de la famille et le mari
    de Myriam, un mari naïf de
    nationalité française ; il fait sa

    carrière dans la production

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    musicale.

    Mila et Adam

    Les petits enfants de Paul et Myriam : les deux victimes

     

    Nom

    Leurs rôles dans le roman

    Les personnages secondaires

    Wafaa

    nourrice figure du Maroc,

    sans papier, personnage

    « peu subtil mais très
    débrouillard ».

    Sylvie

    La mère de Paul, mari de Myriam

    Stéphanie

    La fille de louise

    Jacques

    Le mari de louise

    Emma

    Ami de Myriam

    Pascal

    Ancien camarade de

    Myriam et son prochain
    patron (avocat)

    Nina Dorval

    Capitane chargé de

    présenter le ministre public

    Les Rouvier

    La famille pour qui louise a travaillé pendant plusieurs année

    Hervé :

    Ami de Wafa un chauffeur livreur

    Youssef

    Le futur époux de Wafa

    Hector Rouvier

    Le fils de Rouvier

    Mme Gimbert

    La voisine de Myriam et Paul

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    L'inventaire des personnages nous permet de souligner la différence entre ceux du roman et du film. C'est l'initiative du scénariste qui se permet d'apporter des changements au niveau des personnages du récit initial, dans le but de satisfaire un besoin artistique et stylistique. Pour cela, certains personnages peuvent être mis de côté, de manière à laisser la place aux principaux autres personnages.

    Lucie Borleteau respecte scrupuleusement l'intrigue. Et le caractère des personnages, à commencer par Louise (Karine Viard), Col Claudine et collier de perles, Les personnages sont bien écrits, bien développés ; on se focalise sur cette nounou très étrange, aux pensées et aux réactions tout à fait surprenantes

    Ainsi, dans le film, on assiste à plusieurs modifications au niveau des personnages. Certains sont effacés, comme le mari de Louise Jacques, sa fille Stéphanie, Emma, l'amie de Myriam et son ancien camarade Pascal. Il y a également plusieurs amis du jeune couple qui sont ajoutés à ce film pendant la fête, ainsi que les nounous casting ou encore une boulangère...

    Nous verrons que les modifications effectuées dans les adaptations sont une façon pour certains réalisateurs de s'adapter au public qu'ils veulent toucher.

    L'important ici, c'est de rester fidèle au roman ; les personnages laissés de côté ne sont pas parmi les principaux. Ils ne portent pas préjudice à la fidélité au roman et à l'histoire.

    4.3 Le cadre spatio-temporel

    L'espace et le temps sont deux facteurs spécifiques pour situer le roman dans un endroit et une époque précise, Ainsi, ces deux catégories narratives sont complémentaires pour la construction d'un récit.

    Nous abordons cette partie de notre analyse du travail d'adaptation pour nous concentrer sur la manière dont les images du film actualisent l'espace et la temporalité donnés par le récit littéraire.

    Le temps :

    L'oeuvre peut s'inscrire d'une façon très précise dans une époque ; étudier le temps dans un roman conduit à évaluer des événements rapporté.

    Dans « chanson douce », la temporalité du récit est vague et non appuyée ; les seuls indices fournis ne nous permettent pas de se rendre compte du temps qui passe.

    En revanche, le narrateur raconte les événements sans forcément respecter l'ordre chronologique de l'histoire. Le déroulement des événements de notre histoire

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    présente une Anachronie par rétrospection (analepse ou « flash back ») qui consiste à raconter, après coup, un événement antérieur. Le récit s'ouvre sur l'infanticide, puis l'auteur fait un rembobinage et remonte dans le temps pour donner les causes de ce drame.

    L'espace :

    L'espace est perçu comme un signe qui produit un effet du réel, car chaque récit a un espace qui conduit son action ; dans ce point, nous identifierons les espaces de la quête, c'est-à-dire identifier les lieux parcourus par le personnage principal dans « chanson douce »

    Les choix effectués par l'auteur peuvent offrir de nombreux aspects. Il s'agit donc, du 10ème arrondissement de Paris, ce qui montre la situation financière et intellectuelle du couple. Ce sont des gens instruits moyens pas très riches. Ils essayent de monter l'échelle sociale.

    Une sensation d'oppression et de tragique se traduit sur grand écran par des espaces restreints et encombrés de plans sur des jouets abandonnés. Lucie Borleteau ne manque pas d'imagination pour enfermer ses personnages dans la tragédie. Que ce soit l'appartement étouffant des Massé, jugé « trop petit », ou le studio miséreux de Louise avec quelques rares sorties au parc ; les lieux mêmes de l'action sont propices à une angoisse que la romancière installe par la poésie et la cruauté de son style.

    La réalisatrice, quant à elle, a renforcée la fidélité de l'adaptation par la réalisation de son film dans les mêmes lieux décrits dans le roman, dans le but de laisser aux spectateurs de concrétiser les images et concepts véhiculées au fil de l'histoire du roman, afin de boucler l'imagination des scènes en les concrétisant par celles que fait défiler le film.

    4.4 Les thèmes

    Chanson douce, le roman comme le film véhiculent des thèmes primordialement humains.

    Les deux récits (récit écrit, récit filmique) développent quasiment les mêmes sujets, sur la maternité et l'aliénation domestique, l'infanticide ainsi que la différence sociale et culturelle

    Le scénario de ce drame angoissant s'attaque à un sujet tabou dans notre société : l'infanticide. Pour écrire son roman, Leïla Slimani s'était inspirée d'une terrible histoire vraie qui s'est déroulé en 2012 aux Etats-Unis pour décrypter les rapports de classes et le rapport complexe qu'entretient une mère avec la nounou de ses enfants.

    En fait, l'autrice y a vu de l'inspiration pour parler d'autre choses qu'un meurtre sanglant, elle a voulu s'intéresser à ces femmes qui s'occupent des enfants

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    des autres, à la charge mentale, à la solitude, à l'humiliation sociale que peuvent vivre ces personnes occupant un poste si difficile, mais tellement invisible.

    Chanson douce propose une allégorie assez lourde sur la lutte des classes modernes, et sur l'humiliation sociale que connaît une partie de la classe moyenne inferieure, incarnée par Louise. D'un côté, il y a ce couple parisien, bobo, qui se plaint que leurs deux enfants partagent la même chambre, dans leur joli quartier du onzième arrondissement. De l'autre côté, il y a Louise qui habite un studio dans une banlieue très lointaine ; aussi, les voyages quotidiens illustrent explicitement le déclassement de Louise.

    Chanson Douce (le livre et le film) parle de la domesticité, celle des employés de maison et celle des femmes. C'est sur cet aspect que le scénario, co-écrit avec Jérémie Elkaïm, insiste et nous attache à ses personnages

    En revanche, La notion de maternité est au centre, accompagnée par un sentiment de culpabilité toujours présent : la culpabilité d'une femme qui renonce à des moments précieux avec ses enfants pour pouvoir s'accomplir en tant que personne, qui se confronte à la culpabilité avouée à demi-mots d'une autre qui n'a pas pu ou su s'accomplir en tant que mère.

    Le récit de Leïla Slimani, en effet, démonte brillamment le mécanisme d'une impitoyable aliénation sociale, morale, sentimentale et psychique qui transforme une pauvre créature sans amour en machine à tuer.

    4.5 Les scènes

    Pour faire un passage du roman au film ? L'adaptation est le moyen le plus courant ; en fait, une transposition d'une oeuvre à la scène ou à l'écran donne une liberté au réalisateur à des changements, tout en essayant de garder les grandes lignes du roman.

    En effet, Lucie Borleteau a permis de modifier les scènes du roman ; nous remarquons qu'elle a gardé certaines scènes, tout en y appliquant des changements.

    La réalisatrice et son co-scénariste, Jérémie Elkaim, préfèrent narrer d'une manière linéaire ; ils n'ont gardé ni la construction, ni les éléments du passé qui servaient à éclairer le présent, et aussi sans montrer les corps des enfants a la fin du film ; tandis que l'autrice franco-marocaine ouvrait en effet son récit inspiré d'une histoire vraie, sur l'assassinat glaçant des deux enfants par la nounou et la découverte du crime par la mère, avant de raconter en analepse tout ce qui avait conduit à cela ; l'adaptation s'ouvre sur l'histoire de ses jeunes parents, et de Myriam, mère de deux enfants, épuisée mentalement qui souhaite reprendre son travail d'avocate. Le film se déroule d'une façon chronologique, faisant monter petit à petit la tension, en prenant le parti d'un suspense qui dévoile le récit jusqu'à la scène finale.

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    Le film est construit sur une succession d'entrées et de sorties du couple dans l'appartement parisien, de promenades dans le parc, ou d'embrassades plus que nuancées de la nounou vers les petits. La majeure partie de la narration donne à voir les scènes de complicité entre Louise et les deux enfants, qui alternent avec les remontrances des deux jeunes parents.

    Malgré une certaine répétition des scènes de vie quotidienne, elles apportent chacune cependant un degré de tension et de folie différent et donc permet la montée en puissance pour nous préparer à la conclusion.

    Nous remarquons aussi que tous les chapitres intercalés qui nous donnaient à voir des éléments de la vie de Louise par le prisme de personne l'ayant côtoyée de prés (sa fille, ses employeurs..) ont été supprimés ; ils ont occultés le passé de l'héroïne, qui est très fouillé dans le roman. Pour autant, on retrouve au détour d'une scène des références à ces chapitres supprimés, comme des échos du livre (la petite peluche ayant sans doute appartenu à Stéphanie par exemple).

    En revanche, les scènes rajoutées se greffent parfaitement dans l'atmosphère du récit de Leila Slimani, par exemple celle des poulpes. Une scène fait apparaître un poulpe impressionnant qui symbolise une bouffée délirante (qui n'est pas ainsi exprimée dans le livre, où il est dit que Louise est allée dans un hôpital psychiatrique). A noter qu'il s'agit d'un vrai poulpe, avec effets spéciaux, pour qu'il envahisse l'espace.

    Pour susciter une réelle empathie, l'héroïne s'offre plusieurs séquences d'anthologie (la tigresse, le lâcher-prise dans l'appartement déserté de ses patrons, le pipi au pot sous les yeux médusés des enfants) ; ce sont des scènes qui provoquent particulièrement le malaise chez les spectateurs, et qui montrent le comportement de Louise qui devient de plus en plus étrange. Le film peine à retranscrire à l'écran la crudité de certaines scènes, comme celle de la carcasse de poulet, détaillée dans le roman jusqu'à l'écoeurement

    Parmi les scènes ajoutées au film, il y a celle où Louise s'allongeait, nue, de face, dans un peignoir ouvert, ce qui explique que l'héroïne est aussi inquiétante dans cette déviance maniaque que dans ses désirs de femme.

    De ce qui précède, nous pouvons dire que la réalisatrice a ajouté ces détails pour montrer les attitudes maniaco-dépressives du personnage principal « Louise » qui est capable de donner un visage confiant à un monstre qui parait cacher son jeu.

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    Conclusion

    Dans l'étude du passage du roman « Chanson douce » de Leila Slimani au film de Lucie Borleteau, nous avons d'abord dû comprendre quelques notions concernant l'adaptation. Nous avons pu découvrir qu'il y avait différentes sortes d'adaptations. De l'adaptation fidèle à la parodie, en passant par l'adaptation libre et la transposition ; tout cela nous a laissé un large éventail de possibilités à étudier. Nous avons pu constater que la première étape pour un réalisateur est le choix de l'adaptation. Nous avons également pu constater que la fidélité est une question délicate et qu'elle réside plus dans la recherche d'authenticité et dans la délivrance d'un message bien particulier que dans le besoin de faire un film qui soit une copie conforme du roman.

    Lors de la mise en parallèle entre le roman et le film, nous avons appréhendé les différents points de transformation qu'a subi le roman au moment de son passage au cinéma, que ce soit sur la narration, les personnages, les évènements, ou l'espace-temps présent dans le long métrage, et nous avons constaté que le film Chanson douce est une transposition qui a subi des modifications, dont certaines transformations sont fidèles et d'autres ne le sont pas ; un fin travail de collaboration entre Lucie Borleteau et Jérémie Elkaim qui touche un degré de fidélité estimable, ce qui amène l'écrivaine à déclarer que le scénariste et la réalisatrice exprimaient en images, choix des personnages, mouvements... ce qu'elle voulait transmettre au public.

    Leila Slimani trouve que Lucie Borleteau a réussi très bien l'installation de l'inquiétude, le glissement de la chronique au thriller et que le personnage principal incarné par Karin Viard est extraordinaire car elle a fait transparaitre la folie grandissante dans son regard et dans son attitude, qui, parfois rejoint celle d'une enfant.

    Donc, nous avons confirmé qu'il y avait des détails dans l'histoire romanesque qui ont été maintenus, des détails qui ont été ajoutés, des points ont été supprimés et d'autres modifiés pour les raison suivantes : la réalisatrice a gardé certains évènements du roman dans le but de rester fidèle à l'auteur et au roman. Elle a sacrifié d'autres évènements, en modifiant, en ajoutant ou en supprimant, car d'un côté elle ne peut pas adapter tout le roman à l'écran en raison du facteur temps limité, et d'un autre côté elle adapte le roman selon sa propre vision du monde et selon ses motivations personnelles.

    En conclusion, nous pouvons dire que les différentes analyses faites ci-dessus nous ont permis de dégagé le rapport qu'il y a entre la littérature et le cinéma qui reste le passage d'un langage ver un autre. Néanmoins, à notre avis, cette analyse reste ouverte vers d'autres horizons d'étude, en s'intéressant au rapport de la littérature avec d'autres domaines artistiques et Chanson douce de Leila slimani peut

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    faire objet de cette étude, puisqu'il a été adapté dans d'autres disciplines artistiques telle que le théâtre par Pauline Bayle.

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    Références bibliographiques

    Corpus

    SLIMANI Leïla, Chanson douce, Paris, Edition Gallimard, Coll. « Folio », 2018.

    BORLETEAU, Lucie. Chanson Douce. France, 2019. Drame. 100 minutes

    Ouvrage :

    BARON Anne-Marie, Roman français du XIX siècle à l'écran. Problèmes de l'adaptation, Clermont Ferrand, éd. Presses universitaires Blaise Pascal, 2008.

    PLANA Muriel, Roman, théâtre, cinéma « adaptation, hybridations et dialogue des arts, Paris, Bréal, 2004.

    TCHEUYAP Alexie, De l'écrit à l'écran : les réécritures filmiques du roman africain francophone, Ottawa, Les Presses de l'Université d'Ottawa, Coll. « Transferts culturels », 2005.

    VANOYE Francis. L'adaptation littéraire au cinéma, Paris, Armand Colin, Coll. « Cinéma/Arts visuels », 2011.

    VANOYE Francis, Récit écrit/ Récit filmique, Paris, Nathan, 2003.

    Article :

    Angeles Sanchez Hernandez : L'adaptation cinématographique. Du mot à l'image dans Un long dimanche de fiançailles, disponible sur https://dialnet.uniriojaes/descarga/articulo/2554977.pdf.

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    A. S. « Le roman à l'écran : à quelles conditions ? », 1958, p. 8-11 sur https://www.erudit.org/fr/revues/sequences/1958-n15-sequences1158884/52206ac/

    Morency. A. L'adaptation de la littérature au cinéma. Horizons philosophiques, (1991), p.103-123. Sur https://www.erudit.org/fr/revues/hphi/1991-v1-n2-hphi3173/800874ar/

    LACAGNE, Valérie. L'histoire du cinéma français, (2003). Sur http://histoire-geographie.ac-dijon.fr/Cine/histcinefran.pdf

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    https://www.erudit.org/fr/revues/etudlitt/1980-v13-n1-etudlitt2212/500508ar/

    Tisseron Serge, DU LIVRE À L'ÉCRAN : L'INDISPENSABLE COMPLÉMENTARITÉ, (2014), p. 97-102. Sur https://www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2014-2-page-97.htm

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    MOMEGE, Lou. Chanson douce, un passage réussi de l'écrit à l'écran, (2019). Sur https://www.lefigaro.fr/cinema/chanson-douce-un-passage-reussi-de-l-ecrit-a-l-ecran-20191215

    Webographie

    - 1jour1actu

    https://www.1jour1actu.com/france/semaine-de-la-presse-a-lecole-quest-ce-quun-ab-fait-divers-bb

    - cinéma français

    http://www.cinemafrancais-fle.com

    - Cairn.info

    https://www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2014-2-page-97.htm

    - érudit : Un article de la revue Études littéraires https://doi.org/10.7202/500508ar

    - France info

    https://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/pourquoi-les-realisateurs-adaptent-des-faits-divers-au-cinema_588399.html

    - le figaro

    https://www.lefigaro.fr/cinema/chanson-douce-un-passage-reussi-de-l-ecrit-a-l-ecran-20191215

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    Annexes

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle