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La problématique de l'eau dans les relations internationales: conflits ou coopérations


par Patient Germain Sewanou
UATM Gasa Formation - Master 2 2014
  

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CHAPITRE II : le droit international de l'eau : cadre d'une gestion efficiente et non conflictuelle de la ressource.

La toute première préoccupation des Etats en matière de gestion des cours d'eaux transfrontaliers étaient d'y réguler la circulation, la navigation. La ressource était considérée dans son aspect économique. Son aspect environnemental et social ne sera pris en compte qu'à partir des années 1980. En dépit de l'existence des commissions de bassins, les Etats ont trouvé nécessaire que soit mise sur place une règlementation commune en matière de gestion des eaux transfrontalières. En effet, à chaque organisme de bassin, correspond une norme de coopération définie par les Etats membres de ce bassin. Ce qui suppose donc l'existence d'une multiplicité d'accord en la matière. Et donc l'absence d'une vision mondiale de la gestion des ressources en eaux partagées.

Le droit international de l'eau vient donc proposer aux Etats un ensemble de principes afin d'engager et de favoriser la négociation en la matière. Ce droit énonce deux principes fondateurs très contraignants pour les Etats, à savoir l'obligation de ne pas causer de dommage important aux autres Etats et son corollaire, l'obligation de faire une utilisation raisonnable et équitable de la ressource partagée. Ces obligations ne sont en définitive que le prolongement du principe de bon voisinage et de celui de l'interdiction de l'abus du droit: l'exploitation d'une ressource est libre à condition de ne pas léser ni gêner les États voisins. Mais, il constitue aussi une atteinte à la souveraineté des Etats.

Dans la mise en pratique de ce droit et dans le besoin de disposer de la ressource en quantité suffisante, les Etats ont mis sur pieds le système de la GIRE (Gestion Intégrée des Ressources en Eau). Cette méthode consiste à impliquer dans la gestion de la ressource toute les composantes (sociales, environnementales, politiques). Mais la mise en oeuvre de la GIRE ne suffit pas à assurer aux Etats la disponibilité d'une ressource si indispensable à la société. D'où l'invention de procédés alternatifs de production de l'eau pour juguler la pénurie. De plus, quand bien même la ressource serait disponible, il urge de conscientiser les Etats voire les citoyens sur l'utilisation de la ressource pour éviter le gaspillage et la pollution.

Après une analyse succincte du droit international de l'eau (Section I), nous énumérerons quelques procédés pour une meilleure gouvernance des ressources en eaux (Section II).

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Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

La problématique de l'eau dans les Relations Internationales : conflits ou coopérations

SECTION I : Le droit international de l'eau

Comme toute règle de droit, le droit international de l'eau émane de la doctrine et de la jurisprudence internationale (Paragraphe I) et des conventions internationales (Paragraphe II). Dans ce cas-ci, il n'existe pas de pratiques anciennes reconnues par la communauté internationale. D'où l'absence de coutume internationale dans notre analyse.

PARAGRAPHE I: La doctrine internationale et La jurisprudence internationale

Nous aborderons premièrement la doctrine en la matière (A) puis en second lieu la jurisprudence internationale (B).

A) La doctrine internationale

Le premier principe est celui de la souveraineté territoriale absolue ou doctrine HARMON, selon lequel chaque Etat a tout droit sur le tronçon de fleuve qui traverse son territoire. Il a notamment été, invoqué par les Etats-Unis pour justifier leur mobilisation rapide et unilatérale des eaux du Colorado à partir de la fin du XIXe siècle, et surtout du début du XXe siècle. En 1895, le Mexique protesta officiellement, rappelant que les droits d'usage des agriculteurs mexicains en aval étaient beaucoup plus anciens que ceux des Américains. Afin de fournir une base juridique à la politique de mobilisation des eaux, le gouvernement américain conçut alors la doctrine Harmon, du nom du juge Judson Harmon, chargé d'élaborer la position officielle des Etats-Unis, et selon laquelle «le principe fondamental du droit international est la souveraineté absolue de chaque Etat, par opposition à tous les autres, sur son territoire. La juridiction de l'Etat sur son propre territoire est nécessairement exclusive et absolue. Ses seules limites sont celles qu'il s'impose lui-même»84.

L'Etat est donc libre d'employer l'eau qui se trouve sur son territoire comme bon lui semble : la ressource n'est pas du tout conçue comme commune. Cette doctrine de la souveraineté territoriale absolue sur le territoire et ses ressources est encore implicitement invoquée de nos jours notamment par la Turquie dans le litige qui l'oppose à la Syrie et à l'Irak sur le Tigre et l'Euphrate85.

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84Moussa Ellimane SALL « La gestion de l'eau et son impact sur le droit international », Université Gaston Berger, DEA, 2007, p 56. Disponible sur www.memoireonline.com.

85 LELANDAIS E. et VERNE J, « L'hydropolitique de la Turquie comme instrument stratégique de sa politique de puissance régionale », Dynamiques Internationales, No 2, Décembre 2009, p. 11

Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

La problématique de l'eau dans les Relations Internationales : conflits ou coopérations

Symétrique du principe de souveraineté territoriale absolue, celui d'intégrité territoriale absolue précise que chaque État doit permettre aux cours d'eau de poursuivre leur cours; ils ne peuvent en interrompre le flot, ni en augmenter ou en réduire le débit. Cette doctrine favorise, bien entendu, les Etats d'aval, qui sont investis d'un droit de surveillance des activités des pays d'amont sur le cours des fleuves. L'Egypte, notamment, se prévaut d'une telle doctrine, mais ce n'est pas là son principal argument. Sa situation à l'extrémité du Nil, autrement dit loin de ses sources, met le pays dans une position de dépendance totale à l'égard des pays en amont. Le gouvernement égyptien n'aurait donc que peu de recours si les autres gouvernements optaient pour des politiques hydrauliques qui pourraient avoir de graves conséquences sur le débit du Nil. Ce qui est en train d'arriver.

Une autre doctrine juridique, qui fait force de loi dans la plupart des Etats de l'Ouest américain sans avoir reçu de consécration internationale, fait valoir le droit de propriété du premier à avoir mis en valeur l'eau. La propriété ne dépendrait ainsi non pas de la position géographique, mais de la chronologie de la mise en valeur. L'usage doit être constant, et le droit de propriété peut être annulé s'il est prouvé que le propriétaire ne fait pas usage de l'eau. Ainsi, au Wyoming, toute source d'eau non mise à profit pendant 5 ans peut faire l'objet d'un recours en transfert de propriété86.

Cependant, cette doctrine est très contestée sur la scène internationale. L'Egypte a également et très largement développé la thèse de ses «droits historiques» sur les eaux du Nil, comme nous l'avions précisé supra.

B) La jurisprudence internationale

Le droit international de l'eau a été forgé par les doctrines et les accords, mais aussi la jurisprudence internationale.

L'article 38 des statuts de la Cour internationale de justice prévoit un dispositif de règlement des différends qui peut s'appliquer aux conflits hydrauliques. La mission de la Cour internationale de justice est : « de régler conformément au droit international les différends qui lui sont soumis » et elle applique à cet effet :

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Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

86 LASSERRE Fréderic et BRUN Alexandre « La gestion par bassin versant : un outil de résolution des conflits ? »; Lex Electronica; vol. 12 ; n°2 ; Automne 2007 ; P 9.

La problématique de l'eau dans les Relations Internationales : conflits ou coopérations

- « Les conventions internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles expressément reconnues par les États en litige ;

- La coutume internationale comme preuve d'une pratique générale, acceptée comme étant le droit ;

- les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées ;

- sous réserve de la disposition de l'article 59, les décisions judiciaires et la doctrine des juristes publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de détermination des règles de droit».

L'article 59 stipule que la décision de la Cour n'est obligatoire que pour les parties en litige et dans le cas qui a été décidé. En outre, «la présente disposition ne porte pas atteinte à la faculté pour la Cour, si les parties sont d'accord, de statuer ex aequo et bono»87, c'est-à-dire sur le fondement de l'équité.

L'absence d'une convention (en vigueur) dédiée à l'eau a cependant conduit la Cour à statuer essentiellement à partir du droit international coutumier, pour consacrer des principes généraux du droit. Les principes généraux sont conçus comme des références assez générales leur permettant d'être appliqués au cas par cas, en fonction des aspects hydrologiques, économiques ou sociaux d'une situation précise et en fonction aussi des caractéristiques hydrologiques et géologiques du bassin. Les principes fondateurs du droit international de l'eau et plus généralement du droit international de l'environnement ont été reconnus par diverses juridictions internationales, et en premier lieu par la Cour permanente de Justice internationale (ancêtre de la Cour internationale de justice) dans l'affaire relative à la rivière Oder88, opposant la Pologne à six Etats riverains. Il s'agit de la « communauté d'intérêts sur un fleuve [...] qui devient la base d'une communauté de droit dont les traits essentiels sont la parfaite égalité de tous les Etats riverains dans l'usage [...] du fleuve et l'exclusion de tout privilège d'un riverain quelconque par rapport aux autres»89.

Ces principes seront par la suite confirmés dans une sentence arbitrale rendue dans l'affaire dite de la Fonderie du Trail opposant les Etats-Unis et le Canada et dans la sentence de la Cour Internationale de Justice dans l'arbitrage

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87 Art 38 alinea 2 du Statut de la CIJ du 26 Juin 1945

88 CPJI, Juridiction internationale de la Commission internationale de l'Oder, arrêt n°16, 1929, série A n° 23

89 Ibidem, p 27.

Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

La problématique de l'eau dans les Relations Internationales : conflits ou coopérations

franco-espagnol de 1957 relatif au lac Lanoux90. La Cour internationale de Justice a plus récemment eu l'occasion de, confirmer ces principes en 1997 dans le cadre de l'affaire opposant la Hongrie à la Tchécoslovaquie relative au projet de barrage Gabcíkovo-Nagymaros91, et plus récemment en 2010 dans l'affaire dite «Usine de pâte à papier» opposant l'Uruguay à l'Argentine sur l'utilisation industrielle du fleuve Uruguay92. Dans ces deux arrêts, la Cour a renvoyé les Etats à respecter les principes d'information, de coopération et d'usage partagé, faisant ainsi une parfaite application du droit international de l'environnement.

Ainsi, dans le jugement qu'elle avait rendu en 1997 dans le cadre de l'affaire opposant la Hongrie à la Slovaquie, elle invitait les Etats parties à tenir compte des normes développées en matière de droit international de l'environnement au cours des dernières décennies, incluant la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement du 12 août 1992, qui fait référence a l'obligation de réaliser des études d'impact93.

Dans l'affaire «Usine de pâte à papier» l'Argentine, partie au différend, n'a aucunement été associée au projet de construction de l'usine, et n'a donc pu faire entendre son point de vue. Ainsi, dans son jugement de 2010, la Cour a rappelé que l'obligation de réaliser des études d'impact est incluse dans celle d'information et de notification qui incombe aux Etats sur le territoire desquels des projets sont prévus et qui risquent d'avoir une conséquence adverse sur un autre Etat. La Cour, par cet arrêt, confirmait le principe de la souveraineté territoriale limitée inclue dans la Déclaration de Stockholm sur l'environnement de 197294 (droit pour les Etats d'exploiter les ressources naturelles sur leur territoire sous réserve de ne pas causer de préjudice aux Etats voisins).

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