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La victimisation du personnage féminin dans Walaandé, l'art de partager un mari et Munyal, les larmes de la patience de Djaili Amadou Amal


par Germaine DANGA MOUDA
Université de Maroua - Master2 2021
  

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Chapitre 3.Walaandé. L'art de partager un mari et Munyal. Les larmes de la patience : une écriture de la dérive

Les chapitres précédents ont permis de révéler que la femme dans l'univers culturel peul est assujettie par la société patriarcale qui limite sa liberté sur le plan social et culturel. Djaïli Amadou Amal avec une excellente connaissance de son milieu culturel traditionnel révèles les procédés et les moyens employés à des fins d'intimidation. Dans ses oeuvres à étudier, elle révèle le pouvoir de la société patriarcale dans un monde traditionnel africain. Elle montre qu'il y a une confrontation entre le monde masculin et féminin et c'est la raison pour laquelle la société patriarcale est présentée dans sa vie quotidienne mais aussi vue dans ses relations avec l'extérieur. Cet état de chose n'est pas sans conséquences sur la vie des femmes. Le présent chapitre s'attèle à monter les conséquences sur la vie des personnages féminins.

3.1. L'impact de la victimisation

Plusieurs paradigmes ont permis d'identifier le processus de victimisation des personnages féminins dans les romans de Djaïli Amadou Amal. Ces parangons permettent à l'homme, le mâle dominant, de maintenir la femme sous son attelage. La religion, les traditions et certaines pratiques y afférentes sont les outils usités pour maintenir en captivité la gent féminine. Ce processus, à la longue développent des conséquences qui impactent à la fois l'auteur et l'objet de la victimisation.

3.1.1 La dégénération de la famille

Il est vrai que la prise de décision de remariage est une affaire personnelle, mais dans la société traditionnelle africaine ce n'est pas le cas. Les parents, les proches, les amis peuvent intervenir d'une manière ou d'une autre. Il faut plaire à tout le monde et le deuxième mariage est parfois fait pour ce motif. Un fils peut prendre une deuxième femme pour contenter sa mère ou ses parents. Autrement dit la belle-famille exerce une influence sur la vie du couple. C'est le cas dans Walaandé. L'art de partager un mari, où la troisième épouse d'AlhadjiOumarou est la fille de l'imam du quartier. Il a pesé de tout son poids et de son influence auprès de sa communauté pour imposer sa fille à cet homme nanti. Ce qui n'a pas du tout été du goût des deux premières épouses qui jugent ce mariage opportuniste. Bien plus, elles estiment ce mariage inadmissible du moment où, la jeune mariée a le même âge que leur première fille et sont d'ailleurs amies (WAPM : 47). Ce qui a par conséquent contribué à dégrader les relations entre les deux jeunes collégiennes, qui doivent désormais assurer une relation de belle-mère.

La relation entre les épouses et les membres de la belle famille est toujours redoutable. De plus, gagner l'affection, le respect de la belle famille est une source de fierté entre les coépouses. Elles abondent de cadeaux pour se montrer aimable. Parallèlement, les époux se trouvent parfois obligés de soutenir des parents ou des proches de leurs femmes surtout ceux qui sont pauvres. Dans les deux oeuvres du corpus, les deux chefs de famille font cadeaux régulièrement à leurs beaux-parents. Ce qui non seulement permet de rallier ces derniers à la cause de leurs gendres, mais aussi de tout mettre en oeuvre pour que leurs filles restent dans leurs foyers conjugaux, malgré les souffrances qu'elles y endurent, afin de continuer à bénéficier des largesses de leurs beaux-fils.

Il est certes vrai que la religion et les lois traditionnelles définissent des règles de la polygamie. Elles indiquent qu'un polygame doit être juste avec ses femmes et qu'il doit les traiter équitablement. Toutefois, il lui arrive de léser ou d'abandonner définitivement son ancien ménage, son épouse et ses enfants au profit de sa nouvelle vie et la nouvelle épouse. Et la situation dégénère. À titre d'exemple, suite à la « trahison » de la part de son mari qui convole en justes noces après dix années de vie commune, sans partage, Aïssatou, ladada saaré, perd beaucoup de choses. Les sentiments les plus intimes d'union et d'affection deviennent pour elle des souvenirs plus qu'une réalité. AlhadjiOumarou songe un instant à la belle époque : « il se remémora son mariage avec Aïssatou. Elle était jolie. Si gracieuse dans ses pagnes, tenant en équilibre sa calebasse sur sa tête. Elle riait sans arrêt. Ils avaient vécu des années de bonheur avant qu'il ne devienne riche. » (WAPM : 68). Ce bonheur n'est plus qu'un souvenir lointain. Car, « quand il lui avait annoncé son remariage, elle était restée calme. Son visage n'avait pas trahi ce qu'elle en avait pensé. [...] Il en avait été impressionné et même honteux » (WAPM : 69). C'est à partir de cette déclaration de remariage qu'Aïssatou a perdu l'estime qu'elle avait pour son époux. Elle s'est complètement métamorphosée. Les égards dont Alhadji bénéficiait de la parte de cette dernière n'étaient plus au rendez-vous. Elle se contentait désormais de n'accomplir que ses devoirs conjugaux.

Il faut noter que cette situation où l'épouse perd toute affection, toute complicité avec l'époux après remariage est vécue par toutes les femmes du corpus. Alhadji note dans ce sens que même Djaïli, malgré sa jalousie qui frise l'obsession, a fini par se lasser de lui. Pour ce dernier, « le jour où j'ai épousé Nafissa, Djaïli aussi n'a plus été là. Elle, si plantureuse, si passionnée, me permis de découvrir de la lassitude sous ses colères. » (WAPM : 70).Il ne reste pour ces personnages qu'à évoquer les beaux souvenirs des jours de joie, de communication et de plaisir partagés avec son conjoint, les moments où ils vivaient, comblés de promesses et de bonheur. Ils comparent le temps passé avec le présent et ressentent de cruelles morsures de l'amertume. Ainsi les épouses sont livrées à l'insupportable solitude lorsque leurs maris prennent des secondes femmes et les abandonnent. Inversement, les époux ne reçoivent plus l'attention qui leur était dû. Le bouleversement du ménage, qui devient polygame, ne se limite pas à la vie sentimentale du couple. C'est un bouleversement global qui l'atteint de tous les côtés. Dans le cas de l'épouse abandonnée elle est obligée de jouer le rôle de mère et de père pour ses enfants. Elle a donc, plus des responsabilités et des tâches à accomplir. Grâce au travail, à la patience, à la volonté et au courage une femme comme Aïssatou peut réussir à surmonter toutes les difficultés. La situation d'un polygame qui garde toutes les épouses dans le même foyer n'est également pas admirable. Puisque ce n'est pas seulement la question d'ajouter à chaque fois une nouvelle femme, d'avoir de nouveaux enfants. Mais la question qui se pose, c'est celle du devenir du ménage. Le stress, les frustrations sentimentales, morales et psychologiques qu'on crée volontairement ou involontairement chez les siens.

Cette situation arrive à la dislocation de la famille. En effet, excédées par le comportement d'AlhadjiOumarou, qui est resté un incorrigible mâle dominant, ne prenant pas en compte les préoccupations de ses épouses, elles ont pris la décision de lui reprocher son comportement machiste. En réaction à cela, Alhadji répudie trois de ses épouses. Et la quatrième s'en ira d'elle-même : « toutes les quatre firent leurs bagages. » (WAPM : 142), rapporte le narrateur. Il faut dire que ces femmes sont excédées par la situation qu'elles vivent dans le foyer polygamique. Malgré le confort matériel qu'elles ont, cela n'a pas empêché qu'elles vivent une situation stressante. L'une des épouses, à la question de savoir pourquoi elle a demandé le divorce, elle répond : « juste parce que je le voulais vraiment. Ainsi, il n'y aura plus possibilité de réconciliation entre lui et moi. Même mon père n'y pourras rien. » (WAPM : 143). Elle est remarquable, cette fin malheureuse pour le foyer d'AlhadjiOumarou. Du jour au lendemain, d'homme marié à quatre femmes, qui passe à célibataire. Le narrateur rapporte que « la nouvelle fit le tour de la ville. Alhadjioumarou a répudié toutes ses épouses. Chacune a regagné sa famille. Dans la famille, il ne reste plus que les enfants et les domestiques » (WAPM : 144). Cette situation n'est pas sans conséquences pour Alhadji. Il regrette profondément son acte, bien qu'il ne l'admet pas ouvertement : « Alhadji, devant ses amis, faisait bonne figure, même si au fond de son coeur, il était triste à mourir. Il savait qu'elles avaient raison, mais ne pouvait décemment revenir en arrière et le reconnaître. » (WAPM : 144). La situation de victime de la femme a des conséquences sur la famille. Il ressort qu'elles touchent à la fois la vie au sein du foyer et les relations avec les belles familles. Il va sans dire que ce problème impacte psychologiquement les personnages impliqués.

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