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Impacts socio économiques des pistes rurales dans la region de l'Est du Burkina Fasso

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par Mamady DIANE
EIER - Master en Développement 2004
  

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5 Résultats et Analyse des impacts socio-économiques

Dans la conception du désenclavement telle que pensée par PrEst, un des principaux objectifs est l'amélioration des conditions de vie des populations rurales. Le présent chapitre est consacré à la présentation et à l'analyse des impacts socio-économiques découlant des informations obtenues sur le terrain. Au vu des résultats et afin de limiter au maximum les répétitions, nous avons choisi de regrouper plusieurs variables qui se caractérisent par de nombreuses similitudes. La santé et l'éducation seront traitées ensemble au moyen des mêmes indicateurs; il en va de même pour l'agriculture et l'élevage.

L'analyse s'articule selon 7 axes englobant les variables sociales - accès aux services sociaux, dynamique sociale, qualité de vie, mouvements de population et aide au développement - ainsi que les variables économiques: activités agro-pastorales et commerce. Les principaux résultats pour chacun des indicateurs seront rappelés en début de chaque partie sous forme de tableau. Le lecteur trouvera également en annexe les tableaux de synthèse plus détaillés pour chacun des villages.

L'ensemble des résultats apportés dans cette partie provient de triangulation et l'on peut estimer que la marge d'erreur est dès plus faible. Nous devons toutefois considérer certains résultats comme des tendances qui sont liées aux premiers mois de désenclavement et qui n'auront pas automatiquement un effet durable.

Notons également que certains résultats peuvent parfois refléter non pas la réalité mais la perception que les villageois entretiennent d'un certain indicateur15(*).

Le choix de ne pas faire plus recourt à une analyse comparative, notamment entre le village de Fonghin désenclavé il y a 5 ans et les deux autres villages désenclavés il y a seulement 8 mois, résulte de la nature de nos résultats. Ces derniers ne permettent pas de tirer des lignes évolutives pertinentes, chaque village ayant certaines particularités et étant influencés par des facteurs différents.

Voici un rappel qui permettra au lecteur de mieux identifier chacun des villages :

Villages retenus

Longueur de la piste en Km

Désenclavé depuis

Importance du désenclavement

Recours à la méthode HIMO

Tantiaka

9.2

8 mois

forte

Oui

Tambiga

4.2

8 mois

Moyenne à faible

Oui

Fonghin

12

5 ans

forte

Non

5.1 Services sociaux : éducation et santé

Les indicateurs

Tantiaka

Tambiga

Fonghin

Transport

Déplacements facilités, sûrs et rapides

Evacuation médicale facilitée

Déplacements facilités, sûrs et rapides

Qualité

Amélioration de la qualité de l'enseignement

Amélioration des soins médicaux

Amélioration de la

qualité de l'enseignement

Accès financier aux services

Augmentation de l'accès financier aux soins et aux produits pharmaceutiques de base

Facilité d'accès aux frais d'inscription à l'école et aux fournitures scolaires

Fréquentation des centres

Augmentation de 15% de l'effectif scolaire

Affluence doublée au centre de santé

Croissance de l'effectif scolaire: de 12 élèves en 2000 à 135 élèves en 2005

Prévention

Pas d'influence

Passage d'une à deux campagnes/an à cinq/an

Pas d'influence

Formation

Techniques de construction de piste, mais non exploitable pour l'heure

Technique culturale

5.1.1 Transport

La piste a un effet bénéfique sur les trois villages du point de vue sanitaire et médical, et ce tout spécialement pour Tantiaka et Fonghin qui ne sont pas équipés d'un centre médical. Le déplacement ou l'évacuation des malades est facilité, plus sûr et plus rapide. Même si le village dispose de son propre centre de santé, à l'instar de Tambiga, il profite ainsi de la piste.

Les villageois, dans leur ensemble et de façon générale, sont très conscients de l'utilité de la piste et citent souvent en premier lieu le déplacement vers les infrastructures médicales lorsqu'il leur est demandé ce que la piste a changé pour eux.

Pour le villageois de Tantiaka, les soins sont dispensés au CSPS départemental de Tibga à 7 km par la brousse. La piste n'a donc à première vue aucune influence sur ce type de déplacement puisque les villageois ont l'obligation de se rendre à Tibga. Il apparaît cependant que depuis l'aménagement de la piste, les cas les plus graves soient tout de même amenés vers Diapangou par la piste, le trajet étant plus rapide et plus aisé. De plus, le transfert vers l'hôpital de Fada est aussi plus rapide depuis Diapangou que depuis Tibga. La piste permet en outre l'accès aux véhicules d'évacuation (voitures, ambulances) qui auparavant n'y parvenaient pas, réduisant ainsi les difficultés d'acheminement vers les structures appropriées.

Les habitants du village de Fonghin doivent se rendre à Louargou qui est le centre de soins le plus proche (8 km). Ils empruntent la piste durant la saison pluvieuse et coupent à travers brousse au plus court lors de la saison sèche. Des ambulances ont déjà dû assurer des évacuations d'urgence.

Quant a Tambiga, son PSP se voit équipé d'une ambulance tractable (par moto) en 2000. Afin de permettre à cette ambulance de rejoindre Diabatou et la voie goudronée, les villageois avaient frayé un passage à travers brousse en enlevant les souches. L'évacuation des malades était toutefois difficile (voire impossible en cas de grosses pluies), risquée (secousses, renversement,...) et longue.

La réalisation de la piste permet dorénavant un déplacement facilité, plus sûr et plus rapide (1 heure en ambulance tractable). Les villageois en profitent fréquemment, 5 à 10 autorisations de transfert étant délivrées par mois.

De plus, l'achat de médicament est grandement facilité par la piste (approvisionnement plus fréquent et plus rapide en cas d'urgence). Les habitants de Fonghin, qui doivent parcourir plus de 30 km (Tibga) pour s'approvisionner en produits pharmaceutiques, en sont particulièrement reconnaissants.

Du point de vue de la scolarisation, l'aménagement de la piste n'a pas d'influence sur l'accès à l'école primaire pour les trois villages en terme de distance et de durée de déplacement puisque cette dernière se situe au centre du village.

Pour les élèves de Tantiaka et de Fonghin, et en ce qui concerne l'accès au cycle secondaire situé à Diapangou ou à Fada, on ne peut malheureusement observer de changements significatifs pour l'heure. L'année scolaire 2003-2004 n'ayant pas pu prodiguer l'enseignement jusqu'au niveau du CM2 par manque de personnel, aucun élève du village n'est scolarisé à Diapangou. Le déplacement pour les futurs élèves du secondaire de Tantiaka et de Fonghin sera incontestablement plus rapide et plus aisé.

Actuellement seuls deux enfants de Tambiga sont scolarisés à Nagré et un à Fada. Les futurs élèves du secondaire devront se rendre à Nagré qui se trouve à une distance de 7 km, soit près de 2 heures de marche. L'insécurité qui, selon les villageois, prévaut dans la région décourage les parents d'élèves à opter pour cette alternative (confusion des routes, vol, agression physique). La piste permettra à cette nouvelle volée de se rendre au secondaire rapidement et avec un sentiment de sécurité plus élevé.

5.1.2 Qualité

Notons également que la piste semble augmenter les mesures prises afin de gagner en qualité d'enseignement. Les visites pédagogiques qui portent un regard sur le travail des professeurs, rendues plus faciles par la piste, se sont multipliées dans les villages de Tantiaka (passage de 1 à 6 visites/an) et de Fonghin (2/an actuellement contre 1 tous les deux ans avant piste).

Du point de vue sanitaire, la piste semble encourager et justifier la transformation du PSP actuel de Tambiga en CSPS, sa fréquentation devenant plus importante.

5.1.3 Accès financier aux services et fréquentation des centres

Le nombre d'enfants de Fonghin qui fréquente le niveau primaire a augmenté considérablement deux ans après la construction de la piste. L'effectif des élèves y est passé de 20 en 2000 à 135 en 2005. Tantiaka note une augmentation de 15% du nombre d'élèves inscrits entre 2003 et 2005 et Tambiga doit refuser de nouveaux élèves par manque de place.

Cette forte augmentation du nombre d'élèves (la multiplication par 7 en 5 ans du nombre d'élèves de Fonghin) s'explique par la construction des bâtiments scolaires, par l'augmentation des moyens financiers des parents. Ces deux facteurs sont directement liés à la réalisation de la piste qui favorise la mise en place ou le développement d'un système éducatif efficace en facilitant les moyens techniques de construction des infrastructures (acheminement des matériaux de construction et d'équipement). Il apparaît également que les salaires HIMO perçus par les travailleurs aient été en partie investis pour la scolarisation de leurs enfants et dans la fréquentation des infrastructures sanitaires.

Un troisième facteur expliquant l'augmentation de la fréquentation scolaire peut être la prise de conscience de l'importance de la scolarisation des jeunes. Attribuer cette augmentation uniquement à la piste serait certes abusif, d'autres facteurs devant être pris en compte, mais l'on aurait tort de lui refuser sa part de responsabilité. La piste, symbole d'ouverture vers l'extérieur - cet extérieur où la réussite professionnelle semble tant liée à un niveau de scolarisation minimum - modifie certainement les mentalités et encourage la scolarisation des jeunes.

Ce ne sont pas que les bancs d'école qui plient sous le poids, mais également ceux des centres de santé. Selon nos interlocuteurs, nous pouvons noter une tendance à l'augmentation de la fréquentation des structures sanitaires.

L'augmentation sensible du nombre de patients (2 à 3/jour en 2003 ; 5 à 6/jour en 2004) du PSP de Tambiga peut être expliquée par trois facteurs :

Karim Lompo déclare avoir pu sauver sa femme d'une hémorragie grâce au salaire qu'il avait perçu lors de son travail sur la piste en 2004. Il a pu payer avec l'aide de sa famille les 80'000 FCFA nécessaires à la prise en charge de sa femme.

· Les salaires dégagés durant la construction permettent le financement des soins, alors plus difficile auparavant.

· Le nombre de villageois a augmenté

· Les six villages aux alentours de Tambiga qui ne disposent pas de PSP y viennent plus facilement, spécialement de nuit (patients de Diabatou), et plus fréquemment (en transit afin de profiter de la piste).

5.1.4 Prévention

La fréquence des campagnes de prévention/sensibilisation (organisées soit par les CSPS soit par l'hôpital de Fada et qui a trait à l'alimentation, à l'hygiène et aux soins des enfants) a augmenté uniquement pour le village de Tambiga : elle est passée d'une à deux campagnes par année entre 2000 et 2003 à 5 en 2004. Notons qu'il est étonnant que Fonghin, désenclavé depuis 5 ans, ne profite pas plus de ces campagnes. Il semblerait donc que la piste ne soit pas automatiquement synonyme d'augmentation de la fréquence des campagnes de prévention et de sensibilisation.

5.1.5 Formation

Il est probable que l'apprentissage informel - non institutionnalisé - et les échanges de savoir-faire se soient généralisés par l'interaction plus fréquente avec d'autres cercles sociaux et/ou un nombre plus important d'individus appartenant au même corps de métier. De plus, la formation aux techniques de la piste pour les villages de Tantiaka et de Tambiga semble avoir été bénéfique aux travailleurs qui envisagent la possibilité d'emploi sur d'autres pistes et par là même y entrevoient une source de revenu potentielle. Les villages ne dénombrent pas pour autant de cas de figure à ce stade du programme, c'est pourquoi cette information demeure une perspective.

La piste a donc de nombreux effets positifs sur les questions de santé et d'éducation. Les déplacements sont facilités, plus rapides et plus sûrs. Les évacuations médicales sont désormais possibles par tous les temps. La qualité de l'enseignement et des soins médicaux tend à augmenter, grâce à de nouveaux moyens et à une surveillance plus étroite. La fréquentation des centres augmente rapidement, notamment grâce à un nouvel accès financier. Le domaine de la santé et de l'éducation semble donc avoir tout à gagner du désenclavement.

Un effet pervers de la piste semble toutefois se dégager dans le domaine de la santé. Selon les dires de certains villageois de Fonghin, la piste jouerait le rôle d'un facteur de prolifération de certaines maladies telles que le VIH/SIDA. Les chiffres des centres de santé sont indisponibles, les dépistages n'étant pas une pratique courante, et la maladie sujette à un tel tabou qu'il est très difficile d'explorer plus en profondeur cette hypothèse. Elle ne doit toutefois pas être écartée pour autant.

* 15 Nous parlerons alors, par exemple, de sentiment de sécurité plutôt que de sécurité en tant que telle.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984