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L'accès aux loisirs des personnes surendettées remboursant un plan conventionnel de redressement

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par Tony Follin
 - diplôme d'état de conseiller en économie sociale et familiale 2007
  

Disponible en mode multipage

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INTRODUCTION

Force est de constater que l'endettement est devenu un véritable fait de société : plus d'un ménage sur deux a aujourd'hui recours aux crédits. En effet, nous vivons dans une société dite de « consommation » où les personnes sont sollicitées par différentes offres. L'obtention de prêt permet à certaines de réaliser des projets personnels ou familiaux, tout en gardant un équilibre budgétaire. D'autres, plus fragilisées, vont avoir un recours important aux crédits à la consommation, les entraînant parfois sur la voie du surendettement.

Le surendettement est donc devenu une question majeure. Au moment de la création du premier dispositif par la loi NEIERTZ en 1989, le nombre de ménages concernés était estimé à 200 000. A cette époque, le surendettement était souvent lié à un emprunt pour l'accession à la propriété (taux progressif conduisant à des remboursements trop élevés). Par la suite, de nouveaux facteurs ont accentué le recours aux emprunts tels que l'augmentation du chômage et le développement des séparations. Depuis, le chiffre du surendettement a constamment progressé, ce qui a justifié l'adoption de trois nouvelles lois en 1995, 1998 et 2003. A titre indicatif, la Banque de France comptait 184 812 dépôts de dossiers en 2006.

Une personne est considérée comme surendettée lorsqu'elle est dans « l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ». (cf. annexe 1)

Il existe deux types de surendettement :

* le surendettement dit « passif », est le résultat d'une réduction sensible des revenus ou d'un alourdissement des charges, pouvant être occasionné par un licenciement, une naissance, une séparation, une maladie, etc.

* le surendettement dit « actif », est la conséquence d'un recours volontaire à un nombre important de crédit (accumulation des emprunts, engagements financiers en surcharge...).

Le surendettement touche de plus en plus de ménages. J'ai été moi-même confronté à cette difficulté sur mon terrain de stage en BTS ESF. Je me suis aperçu qu'elle touchait toutes les catégories socioprofessionnelles et qu'elle pouvait être facteur d'exclusion sociale et économique.

Après avoir fait le constat que l'accompagnement par le conseiller en économie sociale et familiale se poursuivait au-delà de la mise en place du plan, je me suis posé la question suivante :

« Quelles sont les difficultés que rencontrent les personnes surendettées lorsqu'elles remboursent un plan conventionnel de redressement ? »

Face à cette interrogation, j'ai essayé de trouver des pistes de travail. Dans mes recherches sur ce sujet, les ouvrages que j'ai pu consulté m'ont apporté toutes les connaissances nécessaires sur le traitement des situations de surendettement, sur les causes possibles de celui-ci, mais également sur la législation relative au surendettement, ainsi que les moyens mis en place. Mais aucun n'abordait les conséquences du plan conventionnel de redressement.

C'est donc à des professionnels que je me suis adressé. Ces entretiens exploratoires m'ont permis de me rendre compte que le plan conventionnel de redressement avait des conséquences sur les familles concernées. Afin d'approfondir ce premier constat, j'ai orienté ma recherche exploratoire vers le public, dans le but de confirmer ou infirmer ce constat, et avoir plus de précisions. Le questionnaire m'a permis de comprendre que le mode de vie des familles, après la mise en place du plan conventionnel, était complètement modifié.

Toutes ces recherches m'ont apporté de nombreux paramètres et ont soulevé des questionnements concernant cet aspect assez peu étudié. Ces constats m'ont permis de comprendre que malgré l'accompagnement fait lors de la mise en place du plan conventionnel, et les bienfaits que celui-ci engendre, il est difficile pour ces personnes de pouvoir accéder à la société de consommation, et surtout aux loisirs. Paradoxalement, l'accès aux loisirs est un objectif national comme le mentionne la loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998. En effet, l'accès aux loisirs favorise l'épanouissement des individus. Alors pourquoi ces personnes ont des difficultés à accéder aux loisirs ?

Pour tenter d'apporter des éléments de réponse à cette question, je me suis attaché à comprendre comment le plan conventionnel est proposé. Nous pouvons d'ores et déjà dire que le plan conventionnel est déterminé selon la capacité de remboursement du débiteur après imputation des charges courantes et du forfait « alimentation, hygiène, et habillement », appelé « reste à vivre », laissé au débiteur par la Banque de France. Mais comment est déterminé ce « reste à vivre » ? Est-il facteur d'exclusion de l'accès aux loisirs pour les personnes remboursant un plan conventionnel de redressement ?

Cependant, chaque individu a un rapport à l'argent différent, l'utilisation du « reste à vivre » en sera donc différente. Peut-on dire alors que ce phénomène d'exclusion résulte d'une cause plus profonde propre à chaque individu ?

A l'issue de cette réflexion, nous pouvons émettre l'hypothèse suivante :

La culpabilité et la honte sont les causes principales de l'exclusion de l'accès aux loisirs des personnes surendettées, remboursant un plan conventionnel.

Ce problème peut être abordé sous plusieurs angles (sociologique, économique, juridique, psychologique, psychiatrique, psychosociologique...). Cependant, j'ai fait le choix de centrer ma recherche sur deux aspects : juridique et psychosociologique. En effet, je pense que, pour accompagner au mieux ces personnes, il est indispensable de connaître le cadre légal et la procédure de traitement du surendettement des particuliers. De même, toute personne est inscrite dans un environnement social, l'analyse psychosociologique permettra donc d'expliquer, en partie, son comportement vis-à-vis de la consommation.

Aussi, afin de vérifier si le « reste à vivre » peut être facteur d'exclusion de l'accès aux loisirs ou si ce sont les personnes qui s'excluent elles-mêmes, j'ai choisi d'orienter la première partie de ce mémoire vers une recherche théorique. Pour cela, j'ai tout d'abord travaillé sur les caractéristiques et la procédure de traitement du surendettement des particuliers. Ensuite, j'ai analysé comment le consommateur pouvait être influencé par son environnement lors de ses décisions d'achat. Enfin, j'ai étudié les concepts d'exclusion sociale, de consommation et la place des loisirs dans la société française.

Dans un second temps, je développerai l'enquête que j'ai menée auprès de travailleurs sociaux et de personnes en situation de surendettement, remboursant un plan conventionnel de redressement.

Enfin, j'aborderai la question du surendettement dans une perspective professionnelle. Que peut m'apporter cette réflexion en tant que futur professionnel ? Qu'ai-je appris du rôle du CESF ? Comment intervient-il auprès de ce public ? Comment me positionner face à cette problématique ? Je tenterais d'apporter des réponses à ce questionnement dans un troisième temps.

PARTIE I : PARTIE THEORIQUE

J'ai choisi de présenter, dans un premier chapitre, les caractéristiques des personnes surendettées et la procédure existante. Cela permet de cibler le public concerné par ma problématique et de connaître le dispositif instauré pour l'aider. Dans un second chapitre, il conviendra d'étudier les facteurs sociaux pouvant influencer le comportement d'achat des ménages. Enfin, face aux pressions de la société, certaines personnes fragilisées peuvent s'exclure de l'accès aux loisirs pendant le remboursement d'un plan conventionnel. Nous essaierons, dans un troisième chapitre, de comprendre comment et pourquoi ces personnes peuvent souffrir de ne pas accéder aux loisirs.

I/ Le surendettement : caractéristiques et procédure

1/ Les caractéristiques des personnes surendettées1(*)

La Banque de France a réalisé en 2001, une enquête typologique2(*), qui permet d'établir le profil sociologique des personnes surendettées et leur type d'endettement.

1.1/ Profil sociologique de la personne surendettée

a) Situation familiale

L'enquête indique qu'une grande majorité de débiteurs surendettés (58%) vit seul (célibataires, divorcés, séparés ou veufs). Cette catégorie est en forte augmentation depuis 1990, notamment en raison de la progression du nombre de personnes célibataires surendettées (multiplié par 3 en 10 ans). Sur le plan national, l'INSEE (institut national de la statistique et des études économiques)3(*) observe également une évolution des personnes seules. Elles représentent 46,4% en 2003.

Ensuite, l'enquête souligne que 57,5% des débiteurs surendettés ont au moins un enfant à charge. Cette proportion est sensiblement plus élevée que celle constatée dans la population française (43,10%). Cela suggère qu'il y a une part importante de familles monoparentales parmi les personnes surendettées.

b) Age

L'âge de la majorité des débiteurs surendettés est compris entre 35 et 55 ans. Pourtant, aucune évolution par rapport à 1990 n'est observée pour cette classe d'âge. La progression concerne essentiellement celle des plus de 55 ans, dont la part a augmenté de 6% depuis 10 ans. De même, les jeunes de moins de 25 ans sont plus nombreux à déposer un dossier en Banque de France : 5% en 2001 contre 1,2% en 1990.

c) Situation socioprofessionnelle

Les catégories socioprofessionnelles les plus touchées sont les employés et les ouvriers (55%), ce qui est sensiblement identique à la proportion constatée dans l'ensemble de la population française (53,5%). L'enquête fait également ressortir que 32% des déclarants sont chômeurs ou inactifs (10% au niveau national en 2005).

d) Ressources et patrimoines

Un nombre important de débiteurs a de faibles ressources. En effet, la tranche de revenus en dessous de 1500 euros concerne 72% de l'ensemble et 42% des dossiers ont des ressources inférieures ou égales au SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance). Par ailleurs, la part des débiteurs percevant le RMI (revenu minimum d'insertion) est faible (5% des dossiers), notamment parce qu'ils ont des difficultés à recourir aux crédits. Même si elles ne représentent qu'une faible part des dossiers, plus de 28% des personnes surendettées ont des revenus qu'atteignent 1500 euros et plus.

Concernant les ressources, elles résultent prioritairement du salaire (29%), de l'aide au logement (22%) et des allocations familiales (18%). La part des prestations sociales constitue à elle seule 40% des ressources déclarées. Cela laisse supposer l'existence de faibles revenus et la présence d'enfants à charge. Dans 57% des dossiers, les personnes ne disposent que d'un type de ressources et dans la moitié des cas, il s'agit du salaire.

De plus, ces débiteurs ont un faible patrimoine. En effet, 75% d'entre eux sont locataires (contre 40% dans la population française). Seuls 15% sont propriétaires ou en accession. Il est également constaté que 10% des personnes surendettées sont hébergées à titre gratuit. Elles seraient majoritairement composées de jeunes vivants chez leurs parents. Ceci peut donc être mis en relation avec l'augmentation de la tranche d'âge des moins de 25 ans parmi les personnes surendettées.

Enfin, peu de débiteurs disposent d'une épargne placée (seulement 8,2%).

1.2/ Le profil du surendettement

a) La nature du surendettement

L'enquête met en avant une évolution de la nature du surendettement. En effet, les situations de surendettement dit « passif » sont désormais de plus en plus nombreuses et concernent environ 64% des dossiers. Cela peut s'expliquer par la progression du chômage dans notre société (26,5% des personnes surendettées sont touchées), ainsi que par l'augmentation des séparations ou des divorces (16% des cas).

Le surendettement dit « actif » constitue 36% des dossiers. L'enquête de la Banque de France montre qu'en majorité, ces situations sont liées à un nombre important d'emprunts contractés (19% des cas) et à une mauvaise gestion budgétaire (7%). Plus de la moitié des situations de surendettement actif sont donc liées à un excès de crédit, sans qu'il y ait une modification des ressources.

Par ailleurs, il est constaté que dans 74% des dossiers déposés, l'endettement est mixte, c'est-à-dire composé à la fois de crédits et d'arriérés de charges courantes. 20% des dossiers ne sont constitués que d'emprunt. Cela suggère que l'endettement par le crédit est présent dans les situations de surendettement actif et passif, ce qui explique la faible part des dossiers constitués uniquement de charges courantes (à peine 6% des cas).

b) Les types de crédits

Les crédits les plus contractés par les personnes surendettées sont de type « revolving »4(*). Ce type de crédit est fortement représenté dans les dossiers Banque de France car près de 80% en comportent (dont 4 par dossier en moyenne). En second lieu, nous trouvons les prêts personnels présents dans 60% des dossiers. Notons que, dans 75% des cas, les débiteurs associent ces types de crédit.

Il semble également cohérent de faire le lien entre l'importance du nombre de débiteurs aux revenus modestes et le faible endettement immobilier (seulement 15%).

2/ Le dispositif du surendettement

2.1/ Notion de recevabilité de la demande

Le débiteur doit déposer un dossier de surendettement à la Banque de France. La première étape du traitement consiste en un examen de la recevabilité du débiteur, qui doit s'effectuer deux mois après le dépôt du dossier. La commission vérifie alors que le débiteur remplit bien les conditions prévues par la loi.

2.2/ Projet de plan et capacité de remboursement

Suite à la détermination du passif, la commission retient la capacité la plus favorable au débiteur afin qu'un projet de plan soit élaboré en fonction des dettes jugées prioritaires5(*) (crédits finançant l'acquisition d'une résidence principale par exemple). « Si jamais on trouve une capacité de remboursement beaucoup plus importante en fonction des charges réelles que celle déterminée par la quotité saisissable, on leur laissera à disposition la quotité saisissable. » [propos recueillis auprès du responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France]. Le débiteur est alors inscrit sur le Fichier national des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers (FICP)6(*) tout au long de la durée du plan. Un plan s'étale sur plusieurs années et peut même durer 10 ans dans certains cas. Le débiteur a un mois pour accepter ou refuser le plan. La signature de ce plan engage le débiteur à le respecter.

En cas d'échec de la mesure amiable7(*), le débiteur surendetté dispose d'un délai de 15 jours pour demander à la commission d'élaborer des mesures de recommandation8(*), qui seront homologuées après vérification par le juge de l'exécution.

2.3/ Le reste à vivre, forfait alimentation, hygiène, habillement

a) Mode de calcul

Le reste à vivre correspond à un forfait : le forfait « alimentation, hygiène, habillement ». Ce forfait est calculé selon le nombre de personnes au foyer et suivant le barème arrêté par la commission qui est régulièrement révisé chaque début d'année en fonction de l'inflation9(*). Son montant est déterminé à partir d'une typologique des dépenses moyennes des Français, « [...] à partir des données de l'INSEE sur la typologie des dépenses des consommateurs, avec des moyennes en tenant compte des niveaux de revenus. Cette étude approfondie de l'INSEE a été mit en parallèle avec une étude du CREDOC, qui lui détermine le seuil de pauvreté et à partir de là, [...] 3 propositions ont été faites. » [propos recueillis auprès du responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France].

Ainsi, le calcul du reste à vivre se situe entre un forfait assez confortable pour les débiteurs, ce qui garantit la réussite d'un plan conventionnel, et un forfait correspondant au seuil de pauvreté. Le barème retenu est l'entre deux.

De plus, la loi prévoit que le montant du forfait « alimentation, hygiène, habillement » appelé « reste à vivre », soit supérieur ou égal à la somme insaisissable des revenus.

Dans tous les cas, la Banque de France laisse toujours le plus intéressant pour les débiteurs. « [...] ce qui est saisissable, c'est notre capacité de remboursement. » [propos recueillis auprès du responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France].

b) Déterminants du montant du « reste à vivre »

Le montant du reste à vivre est déterminé en fonction de la composition familiale, c'est-à-dire du nombre de personnes au foyer.

Il doit être, dans tous les cas, au moins égal à ce que le débiteur toucherait au titre du RMI10(*). Le reste à vivre est calculé par application, à l'ensemble des ressources du débiteur, du barème de la quotité saisissable des rémunérations.

II/ Le consommateur sous influence

La domination économique de la société se traduit par une consommation croissante et une production de biens et de services de plus en plus importante11(*). Le terme « société de consommation » est apparu après la Seconde Guerre Mondiale, dans les années 50 et 60. Avec la reconstruction de la guerre, le pays a connu une forte croissance, entraînant une amélioration du niveau de vie des individus, ainsi qu'une consommation croissante. Ce dynamisme pouvait laisser croire que chacun allait améliorer sa situation, voire modifier son statut social.

ROCHEFORD12(*) a observé une seconde époque de la « société de consommation » dans les années 80, où il voit un changement dans l'état d'esprit du consommateur. Pour lui, les personnes privilégient désormais la mise en valeur de biens immatériels, symboliques pour faire valoir leur propre image auprès des autres. « ce furent les années frimes, les années du « produit kleenex », ou, dit autrement, les années de l'ostentatoire et de l'éphémère »13(*). Cette période peut être mise en relation avec la déréglementation du crédit en 1984, qui a stimulé la consommation. Actuellement, il indique que la consommation des individus pourrait être appelée « la consommation de rassurance ». Pour lui, leurs achats sont davantage orientés vers des objets porteurs de signe, leur permettant de se rassurer sur leur propre valeur.

Il semble donc intéressant d'analyser les différents moyens utilisés par la « société de consommation » pour essayer d'influencer les décisions d'achat de certaines personnes.

1/ Le rôle de la publicité dans les choix de consommation

1.1/ Historique

La naissance de la publicité14(*) est apparue dans la deuxième moitié du XIXème siècle, en raison du développement des moyens de communication de masse et de l'économie de marché. A l'origine, sa finalité était de rendre publique une offre de vente. Depuis les années 60, avec l'émergence de la « société de consommation » et la multiplication des offres, succède à l'idée de conditionner et de suggérer au public. Pour cela, la publicité utilise différentes stratégies de vente15(*).

1.2/ Les stratégies de vente

a) La stratégie persuasive

Par différentes techniques, la publicité tente de séduire le consommateur. Elle se cale à ses représentations, ses tendances, son mode de vie pour l'influencer dans ses choix et ainsi lui vendre certains produits4(*). Le discours publicitaire est construit à partir du comportement des consommateurs. Il utilise une stratégie persuasive, correspondant à une logique collective pour que l'individu puisse se reconnaître dans le discours, ainsi qu'à une logique individuelle pour que le message publicitaire s'aligne sur ses désirs.

b) La stratégie de différenciation et d'imitation

V. SACRISTE4(*) montre que la publicité a également une fonction sociale. En effet, par son mode de diffusion et ses techniques de communication (média/hors média), elle s'offre comme miroir de ce que doit être ou non l'individu. Elle lui permet de se situer par rapport aux autres, de les juger et ainsi de se comparer. Le discours publicitaire devient un miroir intime et collectif car il permet à l'individu de s'évaluer par rapport à autrui et de se situer dans la société. Il va lui permettre de se différencier de certains individus pour mieux ressembler, en apparence aux autres. Le message de la publicité va utiliser une stratégie de différenciation et d'imitation, permettant à l'individu de faire ses choix en fonction des autres et de se sentir reconnu par le groupe. La publicité va donc créer de nouveaux besoins aux consommateurs, leur donnant l'illusion d'exister socialement.

« Que le consommateur soit enivré par la publicité, prêt à acheter, à tout acheter, c'est l'une des caractéristiques de cette société de consommation. »16(*) (p. 3)

c) L'étude du comportement des consommateurs

ROCHEFORD17(*) explique que les publicitaires et les hommes de marketing s'appuient sur des approches psychologiques et sociologiques pour séduire les individus et créer des biens de consommation, correspondant à leurs désirs. Pour cela, ils prennent en considération l'influence du groupe pour conditionner les choix de chacun.

1.3/ Le discours publicitaire

Pour SACRISTE18(*), la publicité met en scène un discours optimiste, portant sur l'accès au bonheur par la consommation et sur la valorisation de certaines marques, signe de distinction. Ce discours incite les individus à faire leurs choix en fonction du groupe auquel ils appartiennent ou souhaiteraient appartenir. Ils vont être à la recherche du bonheur absolu, développé par la « société de consommation ». Les publicitaires et les professionnels du marketing sont là pour créer toujours davantage d'envies chez le consommateur19(*).

2/ La valeur symbolique de l'argent

L'argent a une place essentielle dans la « société de consommation ». Outre sa fonction monétaire, il est possible de lui attribuer une fonction symbolique (de la racine grecque « symbol » : signe de reconnaissance, rencontre, symptôme) (p. 12)20(*). En effet, la possession d'argent est pour beaucoup, le signe de valeur sociale et permet la réalisation des désirs.

2.1/ L'argent, facteurs d'aliénation et de libération

DE LA HOUGUE5(*) souligne que « l'origine profonde de la dépense ou de l'endettement correspondrait [...] à la fonction symbolique de l'argent. » (p. 12). Elle n'est pas seulement liée à sa fonction matérielle d'usage. Pour lui, l'argent est facteur de libération car l'Homme peut s'acheter ce qu'il souhaite. Il satisfait à ses besoins et peut se sentir épanoui. Mais, l'argent est également facteur d'aliénation car l'individu peut parfois être assujetti à certaines contraintes. Prenons l'exemple des crédits à la consommation. Ils permettent à certaines personnes de répondre à leurs désirs immédiats, mais en raison des taux d'intérêts, certaines n'arrivent plus à maîtriser leur endettement, ce qui les conduit quelquefois au surendettement. DE LA HOUGUE explique que cette aliénation peut être liée à leur ignorance et à leur manque de repères, s'expliquant par leur vulnérabilité.

2.2/ Les Hommes et l'argent

a) L'argent, une valeur absolue

La valeur symbolique donnée à l'argent montre qu'il fascine au point que les personnes en font une valeur absolue, une sorte de divinité. En effet, DE LA HOUGUE montre qu'il peut soulager leurs angoisses et permet d'obtenir un lien avec l'extérieur par le biais de l'échange. De plus, certains consommateurs rompent avec leur culpabilité et leur honte en le dépensant pour satisfaire à leur besoins, ou à ceux de leurs enfants. Ils peuvent également montrer leur réussite au sein du groupe. L'argent les séduit car il n'y a pas de limite à la richesse. En effet, le désir de l'Homme est infini et les nouvelles formes de monnaie lui donnent l'illusion d'avoir une capacité financière, lui permettant d'accéder au bonheur21(*).

b) L'argent de réussite sociale

Considérer l'argent comme symbole de réussite sociale amène les gens à vivre de manière superficielle. En effet, GALLOIS22(*) montre qu'ils mettent en avant un écran constitué de signes extérieurs de richesse pour entretenir l'apparence de l'aisance, de la réussite. Les sentiments, les émotions, les aspirations profondes sont reléguées au second plan, voire totalement réprimés. Ainsi, ils accepteront de manquer de l'essentiel, pourvu que l'image de la réussite sociale soit entretenue.

III/ Les facteurs d'auto-exclusion de l'accès aux loisirs

Chaque individu est en relation avec différents groupes sociaux (proches, familles, collègues, anonymes...) et va être pris dans un réseau d'influence, lui permettant de se comparer aux autres. Ainsi, les personnes qui refusent leur image sociale et leur place dans la société, vont essayer de se différencier de leur groupe d'appartenance. Influencées par la « société de consommation », certaines vont tenter de se distinguer par l'achat de biens dans un souci de reconnaissance sociale. D'où le sentiment de frustration ressenti par les personnes en situation de surendettement, remboursant un plan conventionnel de redressement.

Nous verrons tout d'abord la théorie de MASLOW, puis les concepts de l'objet-signe et de reconnaissance sociale, et enfin, la place des loisirs et des vacances dans la société française.

1/ La pyramide de MASLOW

Il est important de rappeler ici la théorie de A. H. MASLOW, psychologue américain, développée en 1943 dans Une théorie des motivations humaines pour comprendre la notion de reconnaissance sociale. Celui-ci distingue 5 niveaux successifs de besoins, déterminant le comportement de l'Homme et matérialisés par une pyramide. Ces différents besoins ne sont pas seulement de nature économique et ne concernent pas seulement la sphère de la consommation. Ils peuvent également aider à comprendre les comportements d'achat des individus.

Ø niveau 5 : - besoin de s'accomplir : volonté de l'individu de se réaliser. Lorsqu'il réussit à être et à ne plus paraître aux yeux des autres, il peut satisfaire à ce besoin en repoussant ses limites, mettre en oeuvre ses facultés personnelles, se perfectionner...

Ø niveau 4 : - besoin d'estime : besoin d'être conforté aux regards des autres, de se sentir considéré et aimé pour se respecter soi-même.

Ø niveau 3 : - besoin d'appartenance : désir d'appartenir à un groupe et d'y être intégré.

Ø niveau 2 : - besoin de sécurité : protection morale (logement, stabilité de l'emploi...).

Ø niveau 1 : - besoins physiologiques : la survie des individus (boire, manger, respirer).

Ces différents besoins apparaissent dans un ordre croissant selon leur importance : pour qu'un besoin soit ressenti, il faut que celui qui le précède soit satisfait.

D'après MASLOW, le besoin d'appartenance sociale et d'estime sont fondamentaux pour l'Homme. Il lui est indispensable de s'identifier à un groupe et d'y être reconnu. Cela peut expliquer le développement des crédits et des biens utilisés comme signe, permettant à l'individu de répondre aux besoins d'un nouveau supérieur.

L'obtention de crédit et l'achat de biens de consommation par certains débiteurs actifs pourraient donc correspondre aux besoins d'appartenance et d'estime correspondant à la pyramide de MASLOW. Ainsi, nous pouvons nous demander de quelle manière les personnes remboursant un plan conventionnel de redressement s'identifient à leur groupe de référence, et comment atteignent-elles la satisfaction du besoin d'appartenance sociale et d'estime ?

2/ L'objet-signe

2.1/ Le concept de BAUDRILLARD

BAUDRILLARD23(*) a développé le concept de l'objet-signe. Pour lui, le bien de consommation n'a pas seulement une fonction matérielle. Il peut également avoir une fonction sociale, qui permettrait la différenciation entre les individus. L'auteur explique qu' « une véritable théorie des objets et de la consommation se fondera non sur une théorie des besoins et de la signification » (p. 8). En effet, selon lui, les individus n'achètent pas des biens de consommation pour leur fonction et leur utilité, mais pour ce qu'ils représentent u x yeux des autres. La consommation de bien a donc une fonction sociale de prestige car l'objet permet de positionner les individus dans la hiérarchie sociale.

2.2/ L'objet, signe de distinction

Certains individus vont tenter d'acheter des biens pour montrer leur valeur sociale. Les objets de consommation vont ainsi leur permettre de se distinguer des personnes issues de la même classe sociale et de s'identifier au groupe auquel ils aimeraient appartenir (le groupe de référence)24(*). Ainsi, « ce qui est en jeu, c'est bien la personnalité, c'est-à-dire la qualité de la personne, qui s'affirme dans la capacité de s'approprier un objet de qualité » (pp. 319-320)25(*). L'individu va donc acquérir un nouveau confort matériel pour mettre en avant son appartenance sociale.

2.3/ Les biens « ostentatoires »

Pour BAUDRILLARD, l'objet de consommation va prendre une valeur symbolique et de prestige, qui va se vérifier par l'achat de biens « ostentatoires », destinés à être vus par les autres. HALBWACHS26(*) montrait que « c'est surtout les dépenses visibles, bien plus que des dépenses utiles et non ostensibles, et c'est du caractère non utile des dépenses publiques elles-mêmes qu'on tient surtout compte dans le classement des Hommes. » (p. 49)

La valeur d'usage est donc devenue un prétexte à la valeur échange, signe de l'objet.

2.4/ Les inégalités face à l'objet

BAUDRILLARD souligne les inégalités existantes autour de l'objet-signe. Selon lui, chaque consommateur se croit souverain et libre de ses choix de consommation, alors que « tous sont égaux devant les objets en tant que valeur d'usage, mais pas du tout devant les objets en tant que signes et différences, lesquels sont profondément hiérarchisés. » (pp. 129)27(*) En effet, certains individus souhaitent se distinguer par l'achat de biens, mais leur position sociale d'origine demeure un frein, l'utilisation des objets étant liée à celle-ci. BAUDRILLARD28(*) prend notamment l'exemple de la télévision, présente dans la quasi-totalité des ménages. Pour lui, sa fonction est différente selon la classe sociale de chacun : pour les classes moyennes, elle serait utilisée dans sa fonction d'objet, alors que dans les classes disposant d'un capital intellectuel plus important, elle serait un exercice culturel. La valeur de l'objet est donc différente selon l'appartenance sociale des individus et ce, malgré le discours prôné par la « société de consommation ».

Il est donc nécessaire d'analyser la place de l'objet-signe dans les décisions d'achat des individus pour comprendre le comportement des personnes remboursant un plan conventionnel de redressement. En effet, d'après cette théorie, il est possible de penser que celles-ci souffrent de ne plus pouvoir accéder à certains biens de loisirs achetés pour leur valeur de prestige, leur permettant d'être reconnus socialement.

3/ Le besoin de distinction

Comme nous avons pu le voir, les besoins d'appartenance et d'estime sont fondamentaux pour l'individu. Ainsi, si son groupe de référence29(*) lui renvoie une image négative et dévalorisante en raison de sa place dans la société, il peut se sentir déprécié socialement. Face à cette image minorative, les personnes les plus fragiles peuvent essayer de se différencier, en se présentant autrement de ce qu'elles sont réellement. En effet, elles vont se mobiliser pour restaurer leur image, en mettant en place une stratégie sociale de distinction. Ce besoin de distinction répond à un souci de reconnaissance sociale qui va s'obtenir par l'exhibition d'achats individuels.

3.1/ Définition du concept de reconnaissance sociale

La notion de reconnaissance sociale correspond à « un processus d'identification où chaque membre du groupe pose un regard sur l'autre membre. Il s'agit d'un système d'interactions, d'échanges qui impliquent l'intériorisation ou l'assimilation de normes, de modèles, de valeurs à partir de sa propre histoire, de son milieu familial et de sa trajectoire personnelle et professionnelle. »30(*) Elle s'enracine donc dans l'histoire personnelle, l'éducation et le vécu de l'individu. Cela peut expliquer pourquoi chacun ne ressent pas nécessairement le besoin de s'identifier à autrui, ainsi que l'influence du groupe et de la société sur les choix de consommation.

3.2/ La place des individus dans la société

Le besoin de reconnaissance sociale peut également être lié au discours de la société, prônant la valeur sociale de la richesse. Ainsi, les personnes, qui estiment avoir une place disqualifiante et non valorisée par la société, peuvent se sentir jugées et étiquetées par autrui en raison de leur position sociale. Elles vont alors essayer de se différencier en consommant des biens, permettant de montrer leur réussite sociale.

« Faute d'être, on se tourne vers l'avoir, que procure le paraître. » (pp. 75)31(*) Ce désir de paraître peut alors exprimer une volonté d'ascension et de réussite sociale.

3.3/ La théorie de BOURDIEU

a) Le jeu de la distinction

Il est indispensable de développer ici la théorie de BOURDIEU dans La Distinction32(*). Il explique que certains individus tentent de s'approprier des biens de consommation, destinés jusqu'alors à la classe dominante, afin de montrer leur valeur sociale. Ces différents achats ont pour finalité de mettre en avant leur qualité de propriétaire et ainsi de les différencier de leur groupe d'appartenance.

« Cette petite Bourgeoisie de consommateur qui entend s'approprier à crédit, c'est-à-dire avant l'heure, avant son heure, les attributs constitutifs du style de vie légitime, « résidence » aux noms à l'ancienne et studios à Merlin Plage, voiture de faux luxe et fausses vacances de luxe, est toute désignée pour jouer le rôle de courroie d'entraînement et pour faire dans la course de la consommation et de la concurrence, ceux dont elle entend à tout prix se distinguer. »33(*)

La « société de consommation » donne donc les moyens aux individus, notamment par les crédits, de se différencier et de s'approprier les biens de consommation, proposés en modèle par la classe dominante.

b) Le concept d' « habitus »34(*)

Pourtant, même si le jeu de la distinction n'est plus seulement réservé aux intellectuels et que chacun peut désormais acquérir des biens, signes de prestige social, BOURDIEU montre que les individus ne sont pas égaux. En effet, « la classe sociale n'est pas définie seulement par une position dans les rapports de production mais par l'habitus de classe qui est normalement associé à cette position. »35(*) Selon lui, « l'habitus » ne permet pas aux individus de s'approprier le style de vie de ceux issus d'une classe sociale supérieure. Chacun est effectivement, habité par des goûts et des choix liés à son environnement socioculturel et transmis par la famille (façon de parler, de se tenir, etc.). Ainsi, même si une personne désire appartenir à un autre groupe social que le sien, elle sera toujours marquée par la façon d'agir de celui-ci.

« Portés par un même habitus de classe, les agents agissent comme des musiciens qui improvisent sur un même thème, chacun jouant quelque chose de différent qui s'accorde pourtant harmonieusement avec ce que joue chacun des autres. »36(*) (p. 97)

Ainsi, certaines personnes remboursant un plan conventionnel de redressement peuvent envisager de ne pas respecter le plan afin de revaloriser leur image sociale, dépréciée par les autres membres de la société. Par l'achat de biens de consommation, elles peuvent vouloir essayer de se distinguer de leur groupe d'origine. Ceci leur permettrait de montrer leurs « nouvelle » appartenance sociale, signe de réussite et d'être reconnues par autrui. Le plan conventionnel de redressement, et plus particulièrement le forfait « alimentation, hygiène, habillement », constitue un frein à l'accès aux loisirs, et de ce fait à la satisfaction du besoin de reconnaissance sociale.

4/ La place des loisirs et des vacances dans la société française

4.1/ Définitions

Le « loisir » peut être considérer comme le temps pendant lequel on n'est astreint à aucune tâche. Le loisir regroupe également les activités diverses (sportives, culturelles, etc.) auxquelles on se livre pendant les moments de liberté.

La notion de « vacances » recouvre l'utilisation de deux termes : les congés et le tourisme. Les congés désignent les séquences libérées des occupations normales de travail.

Le tourisme est défini par l'INSEE par la phrase suivante : « Doit être considéré comme touriste toute personne en déplacement hors de sa résidence principale pour une durée d'au moins vingt quatre heures et inférieure à quatre mois, et pour l'un des motifs suivants : agrément, santé, missions, voyage d'affaires, voyage scolaire ».

4.2/ Démocratisation des loisirs et des vacances

Au XIXème siècle, sur le modèle britannique, des cures thermales sont apparues et développées en France. Fréquentées à cette période par les familles aristocratiques, les cures à vocation médicale, ont invité ces clients à se distraire par les plaisirs de la promenade, les jeux de hasard autorisés au casino... .

Progressivement, la villégiature balnéaire a abandonné ses traditions médicales et aristocratiques pour porter de plus en plus le signe de l'aisance bourgeoise.

C'est en 1936, sous le gouvernement de Léon Blum, que les congés payés, de douze jours ouvrables, ont été octroyés aux ouvriers et employés. Les lois sur les congés payés annuels et la réduction de la semaine à quarante heures ont entraîné le basculement irréversible des loisirs de la vie privée dans l'ordre public. Cependant, en l'absence d'une culture de loisirs, le nombre de départs réels en vacances des Français, en août 1936, a dépassé à peine celui des années précédentes. La majorité des salariés n'est pas parvenue à occuper et à penser le temps hors du travail.

Les syndicats et les associations se sont mobilisés pour organiser les congés des ouvriers et pour les mettre à la portée de leurs budgets. Créés le 22 février 1945, les comités d'entreprise (CE) ont joué un rôle déterminant dans l'histoire des loisirs.

Durant ces années de forte expansion, de nombreuses associations, de la loi 1901, ont proposé à leurs adhérents des loisirs économiques conçus en concertation avec les CE, les CAF ou les municipalités. Ce tourisme social a familiarisé avec les loisirs des salariés qui jusqu'ici en étaient privés. Ces associations ont opposé idéologiquement leur mission de service public à la loi du profit des agences commerciales.

Durant les « Trente glorieuses », les Français ont découvert les loisirs de la consommation et les vacances sont entrées dans les cycles de la mode. Les ouvriers ayant préféré, dans un premier temps, dépenser dans l'aménagement de leur logement, leur besoin de partir ne s'est ressenti qu'après 1960. En 1974, près de 50% des Français partaient en vacances d'où un mouvement qualifié de masse.

Aujourd'hui, le temps libre quotidien est en moyenne proche de sept heures37(*), soit une durée équivalente à celle du travail. L'effet de la réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires sur le temps de loisir est très important pour les actifs.

4.3/ L'évolution des loisirs dans les mentalités

Les Français ressentent une insatisfaction croissante par rapport au monde actuel et une angoisse à l'égard de son avenir. C'est sans doute pourquoi ils recherchent dans leurs loisirs des occasions de substituer le rêve à la réalité. Le temps libre permet de faire ce que l'on aime, ce qui n'est pas toujours possible dans le cadre de l'activité professionnelle. Le développement personnel constitue ainsi une motivation croissante à la fois pour les actifs et les inactifs. La pratique du sport s'inscrit dans cette démarche. L'objectif poursuivi n'est pas de réaliser des performances, mais de rester en forme, de vivre mieux et de vieillir moins vite.

La vocation des loisirs n'est pas seulement individuelle. Beaucoup sont porteurs de convivialité et de solidarité. Ainsi, le temps consacré à la famille et aux amis s'est accru avec la mise en place de la réduction du temps de travail.

La société judéo-chrétienne mettait en exergue l'obligation de chacun de « gagner sa vie à la sueur de son front » pour avoir droit ensuite au repos, forme première du loisir. L'individu se devait d'abord à sa famille, à son métier, à son pays, après quoi il pouvait penser à lui-même. Les générations les plus âgées sont encore marquées par cette notion de mérite, pour elles indissociable de celle de loisir. Mais les plus jeunes considèrent le loisir comme un droit fondamental. Plus encore, peut-être, que le droit au travail, puisqu'il concerne des aspirations plus profondes et personnelles. On peut d'ailleurs observer que le droit de s'amuser est beaucoup mieux respecté que celui de travailler, dans la mesure où plusieurs millions de Français ne disposent pas d'un emploi. Le loisir occupe aujourd'hui une place d'autant plus grande dans notre société puisqu'il a bénéficié, au cours des décennies passées, du très fort accroissement du temps libre et celui du pouvoir d'achat.

4.4/ Les aides financières

Aujourd'hui, les CAF ainsi que les comités d'entreprise peuvent aider les familles à accéder aux loisirs et aux vacances.

Le comité d'entreprise assure ou contrôle la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établies dans l'entreprise prioritairement au bénéfice des salariés et de leurs familles ou participe à cette gestion, quel qu'en soit le mode de financement. Cependant, le financement des activités sociales et culturelles par les employeurs n'est pas assuré pour tous les comités. Ainsi, même si il existe un CE dans l'entreprise des personnes remboursant un plan conventionnel, l'accès aux loisirs n'en est pas obligatoirement facilité.

En ce qui concerne le temps libre, quatre dispositifs principaux de financement aux institutions existent :

o Les contrats éducatifs locaux (CEL), dispositif contractuel entre l'Etat et les communes, qui vise à favoriser l'accès aux loisirs de proximité ;

o Le contrat loisirs, aujourd'hui, contrat temps libre. Un contrat d'une durée de trois ans renouvelable est signé entre les CAF et les communes pour des activités accessibles en priorité aux familles et aux jeunes les moins favorisés.

o Le contrat enfance, propose des activités extra-scolaires aux enfants de moins de 6 ans ;

o Le contrat jeunesse et sports, destiné à améliorer l'accès des jeunes aux équipements et activités de sport et de culture.

Toutes ces aides s'adressent aux familles les moins favorisées. Cependant, pour les salariés remboursant un plan conventionnel de redressement, ces aides ne leur sont pas accessibles.

Pour les vacances des familles, nous avons les chèques vacances qui sont des titres de paiement garantis qui permettent de régler de multiples prestations de loisirs sur le territoire national : hébergement, restauration, transports, activités culturelles et de loisirs. Les chèques vacances peuvent être distribués par les employeurs privés, les comités d'entreprise, les collectivités territoriales et la fonction publique. Les chèques vacances sont administrés par l'Agence Nationale des Chèques Vacances (ANCV).

Nous avons également les Bons vacances, accordés par les CAF pour les vacances. Ces aides sont délivrées à partir de critères liés au revenu des ménages.

Au niveau des loisirs, nous avons une offre diversifiée dans ce domaine. Nous allons présenter les prestations les plus significatives. Nous avons donc le contrat jeunes qui complète le contrat enfance, destiné aux enfants de moins de 6 ans propose des activités extra-scolaires.

Le programme ville vie vacances (VVV) vise à favoriser l'accès aux vacances des jeunes issus des quartiers difficiles.

Le ticket loisir est un remboursement ou une avance sur les dépenses de loisirs des familles qui touchent des prestations d'allocation familiale.

Le ticket sport permet l'ouverture pendant les vacances des installations sportives pour les enfants qui ne partent pas.

Le passeport loisirs jeunes est accordé dans certaines communes aux jeunes dont la famille bénéficie de bons vacances, pour une activité dans une association sportive ou culturelle.

5/ La loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998

La loi du 29 juillet 1998 est née de la volonté du gouvernement de prendre en compte l'exigence de solidarité exprimée par les concitoyens. Des mesures existent désormais destinées à garantir l'accès à l'emploi, aux soins, au logement, à la culture...mais aussi à prévenir toutes les formes d'exclusion, à mieux répondre à l'urgence sociale, à coordonner l'action de tous les intervenants.

Comme le mentionne l'article 140 de la loi du 29 juillet 1998, « l'égal accès de tous, tout au long de la vie, à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs, constitue un objectif national. Il permet de garantir l'exercice effectif de la citoyenneté ».38(*)

Pratiquer un sport, une activité artistique, fréquenter une bibliothèque, partir en vacances... autant de besoins qui, s'ils ne présentent pas a priori un caractère de première nécessité, doivent être satisfaits à l'égard de tous. Etre « bien dans sa peau », se détendre, s'ouvrir aux autres, c'est aussi un moyen de faire face à l'exclusion. L'accès aux loisirs et à la culture sont ainsi des droits importants favorisant l'épanouissement des individus, notamment les plus jeunes, et leur participation pleine et entière à la vie sociale. La loi du 29 juillet 1998 affirme le droit des plus démunis dans ce domaine, organise sa mise en oeuvre dans le cadre de programmes spécifiques et assure les moyens de son exercice.

PARTIE II : ENQUETE DE TERRAIN

I/ Méthodologie de l'enquête

1/ Préambule

Pour vérifier mon hypothèse, j'ai choisi de m'entretenir avec différents professionnels et avec le public concerné. Il m'a semblé opportun de rencontrer des travailleurs sociaux, composés d'assistants de service social (AS) et de conseillères en économie sociale et familiale (CESF), ainsi qu'une personne de la Banque de France. Ces différents acteurs sont de formations initiales diverses et interviennent auprès des personnes surendettées dans des secteurs variés. Ceci m'a permis de confronter leur point de vue, selon leurs missions et les caractéristiques du public qu'ils rencontrent, afin de comprendre comment ils accompagnent celui-ci. J'ai souhaité rencontrer des usagers dans le but de comprendre la manière d'utiliser le forfait « alimentation, hygiène, habillement » appelé reste à vivre. Ceci m'a également permis de vérifier si ces familles s'auto-excluent et pourquoi.

2/ L'enquête

2.1/ Phase exploratoire, de recherche

Dans mes recherches sur ce sujet, les ouvrages que j'ai pu consulter m'ont apporté toutes les connaissances nécessaires sur le traitement des situations de surendettement, sur les causes possibles de celui-ci, mais également la législation relative au surendettement, ainsi que les moyens mis en place. Mais peu abordaient les conséquences du plan conventionnel de redressement sur les personnes et de la façon de vivre avec le forfait, le « reste à vivre ». Je n'ai trouvé aucun ouvrage traitant des facteurs possibles d'exclusion de l'accès aux loisirs de ces personnes.

C'est donc à des professionnels que je me suis adressé. Ces entretiens exploratoires39(*) m'ont permis de me rendre compte que le plan conventionnel de redressement avait des conséquences sur les familles concernées. Afin d'approfondir ce premier constat, j'ai orienté ma recherche exploratoire vers le public, dans le but de confirmer ou infirmer ce constat. Le questionnaire40(*) m'a permis de comprendre que le mode de vie des familles, après la mise en place du plan conventionnel, était complètement modifié.

Toutes ces recherches m'ont apporté de nombreux paramètres et ont soulevé des questionnements concernant cet aspect assez peu étudié. Ces apports théoriques m'ont permis de comprendre que malgré l'accompagnement fait lors de la mise en place du plan conventionnel, et les bienfaits que ce plan engendre, il est difficile pour ces personnes d'accéder aux loisirs pour plusieurs raisons qui diffèrent selon les situations vécues.

Il me paraissait également judicieux d'évoquer le processus de mise en place de cette exclusion et d'étudier plusieurs concepts théoriques pour pouvoir comprendre ce qui pouvait entraver le mieux-être des personnes après la mise en place du plan mais également favoriser le sentiment d'exclusion de l'accès aux loisirs.

2.2/ Phase de vérification, d'analyse

a) L'échantillon

Au début de ma recherche, les entretiens exploratoires auprès de deux conseillères en économie sociale et familiale m'ont permis d'obtenir les coordonnées de différents professionnels intervenant auprès de personnes surendettées. Je les ai tout d'abord contactés par téléphone pour convenir d'une rencontre. Nos échanges se sont déroulés sur leur lieu de travail.

J'ai ainsi rencontré :

v Deux assistantes de service social, Mme M. et Mme N., employées par le Département.

v Six conseillères en ESF, intervenant dans des secteurs d'activités différents :

- une CESF intervenant dans un CCAS, nommée Mme G.

- deux CESF d'une antenne sociale de la CAF, nommées Mme H. et Mme I.

- une CESF d'une association, nommée Mme J.

- deux CESF, employées par le Département, et exerçant sur des territoires très étendus, nommées Mme K. et Mme L.

v Un responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France

En ce qui concerne le public, il m'était difficile de le rencontrer. Une conseillère en ESF m'a alors proposé de me mettre en relation avec les personnes qu'elle a en suivi, après les avoir sensibilisées à mon thème de recherche. Cette étape a été longue, près de trois mois. Certaines personnes ont ainsi accepté de répondre à mon enquête. La CESF m'a alors transmis leurs numéros de téléphone afin de convenir d'une rencontre. J'ai proposé aux personnes de les rencontrer dans les centres médico-sociaux, afin de favoriser leur mise en confiance. Ces lieux sont, pour elles, connus et neutres. En effet, les CMS m'ont semblé être les lieux les plus adaptés.

J'ai rencontré six personnes, avec la caractéristique commune de rembourser un plan conventionnel de redressement :

v Une personne veuve, sans emploi, nommée Mme A.

v Un couple avec enfants, exerçant une activité professionnelle, nommé Mr et Mme B.

v Une personne seule, avec enfants, exerçant une activité professionnelle, nommée Mme C.

v Un couple de retraités, bénéficiaire d'une aide alimentaire, nommé Mr et Mme D.

v Un couple avec enfants, sans emploi, bénéficiaire d'une aide alimentaire, nommé Mme E.

v Une personne seule, sans enfants, bénéficiaire d'une aide alimentaire, nommée Mr F.

Je me suis attaché à avoir un panel représentatif de la population des surendettées, défini dans la première partie. J'ai donc tenté d'avoir le point de vue de personnes seules avec et sans enfants, personnes retraitées, couple avec et sans enfants, et des personnes bénéficiaires d'une aide alimentaire. J'ai ainsi recueilli trois témoignages de personnes bénéficiaires d'une épicerie sociale et trois autres non bénéficiaires. La commune où résident ces dernières n'offre pas la possibilité de bénéficier de ce type d'aide. Ce n'est donc pas par choix ni par honte que celles-ci ne sont pas bénéficiaires d'une épicerie sociale.

Je me suis engagé à préserver l'anonymat de chacun. Je les nommerai donc par une lettre pour faciliter la lecture.

b) L'élaboration des outils

Mon enquête s'est appuyé sur deux grilles d'entretien41(*) dont les questions suivent une liste de thèmes.

Pour la grille destinée aux professionnels :

v La définition du surendettement actif et passif,

v Les facteurs d'exclusion de l'accès aux loisirs,

v L'accompagnement de ces personnes par les professionnels,

v Les actions possibles auprès de ce public.

Pour la grille destinée au public :

v Les impressions ressenties lors du dépôt du dossier et de la mise en place du plan conventionnel,

v Les représentations du forfait « alimentation, hygiène, habillement »,

v La manière de dépenser ce forfait,

v La place des loisirs et des vacances dans le fonctionnement familial,

v L'auto-exclusion.

Lors des échanges, j'ai utilisé le principe des entretiens semi-directifs. J'ai prévu des questions ouvertes pour laisser les professionnels et le public s'exprimer librement. En ce qui concerne le responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France, les questions relatives à l'exercice des travailleurs sociaux ne pouvaient être posées. J'ai donc dû apporter des ajustements à ma grille d'entretien.

Les entretiens ont duré entre trente minutes et deux heures. Cela peut notamment s'expliquer par la connaissance du sujet par les professionnels. Chacun d'entre eux s'est montré très disponible et agréable, ce qui a favorisé nos échanges. Les personnes rencontrées n'avaient connaissance que du thème de ma recherche car je n'ai pas voulu induire leurs réponses. J'ai par ailleurs été amené à poser des questions plus précises selon les réponses apportées par les professionnels.

Les entretiens avec le public ont duré, quant à eux, une heure et demi en moyenne. Les personnes ne connaissaient, eux aussi, que le thème de ma recherche pour ne pas les influencer dans leurs réponses. Avec leur autorisation, j'ai pu enregistrer nos entretiens, ce qui m'a permis d'être plus disponible dans l'échange et de rebondir sur certaines réponses.

c) Les difficultés rencontrées

Plusieurs complications sont apparues. Certains professionnels ont évoqué l'accès aux loisirs dès les premières questions, ce qui faisait l'objet des questions suivantes. Néanmoins, je n'ai pas réajusté ma grille d'entretien avec les professionnels suivants pour ne pas fausser les résultats.

Avec le public, ma première difficulté a résidé dans ma présentation lors du premier échange téléphonique. J'avais préparé et soigné ma présentation afin de mettre la personne en confiance. Cependant, lors du premier entretien téléphonique mené, ma présentation a été laborieuse : ma voix tremblait, était monotone. J'ai alors décidé d' « oublier » ma présentation et de contacter les autres personnes spontanément. Cette technique m'a permis d'être plus à l'aise.

Une personne est venue après trois rendez-vous manqués. Dans un premier temps, j'ai pensé que celle-ci avait renoncé à répondre à mon enquête, et ne savait pas comment me l'annoncer. Cependant, l'entretien a duré près de 2h30, ce qui montre qu'elle ne s'est pas obligée à venir me rencontrer. Il est possible que cette entrevue lui ait fait peur. A l'issue de l'entretien, j'ai compris pourquoi cette personne a, dans un premier temps, fui la rencontre. Je pense que ce n'était pas le thème de notre rencontre qui effrayait Madame, mais plutôt le fait que je sois un homme. En effet, lors de l'entretien, elle m'a fait part de la violence conjugale subie pendant plusieurs années, et depuis la séparation, de ses difficultés à entretenir toute relation avec un homme.

d) Méthodologie de l'analyse

Pour cette recherche, les professionnels et les personnes interrogés ont accepté que je retranscrive l'intégralité des entretiens. J'ai ainsi pu décortiquer les réponses apportées à mes questions. J'ai élaboré une grille d'analyse me permettant de reprendre leurs propos à chacune de mes questions, y compris lorsque des relances ont été nécessaires. Je suis donc parti du discours de chaque personne pour essayer de confronter les correspondances de discours et les particularités.

Par ailleurs, lors de la retranscription des entretiens, j'ai essayé de rester le plus objectif possible pour ne pas interpréter les points de vue des personnes rencontrées. Je tiens également à préciser que le nombre de personnes enregistrées est restreint, les conclusions de mon analyse sont donc à relativiser.

II/ Analyse thématique

Dans cette partie, je présenterai successivement les thèmes découlant de mon enquête.

1/ Le surendettement actif et passif

1.1/ Définition

a) Le surendettement passif

Le responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France reprend la définition de la loi :

v « Ce sont les personnes victimes d'accident de la vie, qui sont à un moment donné salariées et qui ont contracté plusieurs crédits mais qui pour autant étaient tout à fait aptes à y faire face et où il n'y avait aucun excès. Ou les gens, qui n'ont pas forcément de crédit et qui vont se retrouver dans une situation de non emploi. »

En règle générale, les professionnels interrogées considèrent que le surendettement passif est lié à une baisse des ressources, rendant difficile le règlement des charges :

v Mme M., AS : « le surendettement passif concerne les familles victimes d'un accident de la vie, comme un décès du conjoint par exemple ou un divorce. Les gens se retrouvent avec moins de ressources qu'ils n'avaient auparavant et ne peuvent plus régler leurs charges courantes. »

v Pour Mme K., CESF au Département, le surendettement passif « est lié à des revenus minimums qui font que les charges courantes ne peuvent être réglées. »

L'ensemble des professionnels semblent donc s'accorder sur la définition du surendettement passif. Pour eux, il est la conséquence d'une baisse des ressources en raison d'un accident de la vie. Ils estiment également qu'ils ne sont pas responsables de leur surendettement.

b) Le surendettement actif

L'ensemble des professionnels rencontrés définissent le surendettement actif comme un cumul de crédits :

v Mme M., AS : « Ce sont les familles multipliant les crédits, les familles qui se sentent bien ou qui existent lorsqu'elles consomment. »

v Mme K., CESF : « On a accumulé les dettes, les crédits pour différentes raisons. »

v Pour Mme H., CESF, ce surendettement est dû à « des problèmes de consommation pour des crédits voiture, équipement du logement. La grande facilité à acquérir des cartes de crédit permanent amènent les personnes a en avoir souvent plusieurs. Ils ne font pas toujours de gros achats mais ces cartes leur permettent d'augmenter leur train de vie. »

v Mme I., CESF : « On a affaire à des ménages qui ont un mode de vie en inadéquation avec leurs ressources. »

Pourtant, pour Mme L., CESF, la distinction entre actif et passif n'est pas si claire. Elle pense que nous ne pouvons pas parler d'une démarche volontaire : « je ne suis pas trop pour la notion de passif et d'actif, parce que les gens, même s'ils n'ont pas contracté de crédit, ils sont inscrits dans une société de consommation (...) Nous avons essayé, avec nos collègues AS, de décrypter plusieurs situations familiales et on a essayé de cadrer les gens dans l'actif ou le passif (...) C'était pas aussi net que ça, enfin vraiment, c'est pas aussi simple que ça. »

Pour illustrer le point de vue des travailleurs sociaux, il est intéressant d'analyser l'opinion du responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France sur cette question. Celui-ci distingue le surendettement « actif » du surendettement « organisé ». Pour lui, l'actif est « une personne qui se met en situation de surendettement, soit en prenant des crédits ou en vivant au-dessus de ses moyens. » Il explique que, dans ces situations, la notion de bonne foi est prise en compte en raison de la fragilité des personnes :

v « Les gens qui sont entrés dans ce processus, certes on peut leur reprocher en disant qu'ils ont été un peu légers, inconscients ou inconsistants, mais pour autant, ils ont peut-être cédé (...) Ca paraîtrait un peu aberrant d'évoquer la mauvaise foi et ne pas les prendre. »

Il est possible de faire le lien avec les réponses apportées précédemment. Le surendettement actif ne paraît donc pas être le résultat d'une démarche consciente, mais au contraire, d'un évènement, favorisant l'état d'endettement de certaines personnes.

Pour définir le surendettement volontaire, la Banque de France emploie la notion de surendettement « organisé », c'est-à-dire, que :

v « Les gens vont volontairement s'endetter, souscrire plusieurs crédits en se disant « je souscris à des taux à 18% » en voyant un très grand intérêt dans le dépôt du dossier où ils auront des taux très compétitifs. »

Dans ces cas, il indique que la notion de mauvaise foi est prise en compte.

Ainsi, contrairement au « passif », la définition du surendettement « actif » semble être controversée.

1.2/ Conséquences sur l'utilisation du « reste à vivre »

L'ensemble des professionnels s'accordent à dire que les personnes surendettées passivement ont plus de facilité à utiliser le reste à vivre laissé par la Banque de France :

v Mme M., AS : « Les personnes surendettées passivement, avant de déposer un dossier, n'avaient plus cette somme mensuelle disponible pour faire face à leurs besoins. (...) Dans le surendettement actif, les personnes doivent faire un travail de réflexion sur elles-mêmes, sur leurs modes de consommation. »

v Le responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France : « C'est clair que ceux qui avaient un fort train de vie ont beaucoup plus de mal à vivre avec le forfait, le reste à vivre, que les personnes surendettées passivement. C'est beaucoup plus difficile. Il faudra plus de temps pour s'y habituer et apprendre à le gérer. »

L'utilisation du reste à vivre serait donc différente selon l'origine du surendettement. Il apparaît important d'analyser les représentations du reste à vivre par les familles surendettées.

2/ Les représentations du « reste à vivre »

La majorité des personnes interrogées ont longuement réfléchi avant de répondre à ma question : « Que signifie le reste à vivre pour vous ? »

Pour elles, il existe un décalage entre la définition faite par la Banque de France et la réalité :

v Pour Mme B. : « Le reste à vivre, en principe, c'est alimentation, hygiène et habillement. Pour la Banque de France, c'est suffisant mais dans la réalité, c'est dur, c'est différent. En réalité, c'est plutôt alimentation et hygiène, et encore, il faut se limiter au minimum. »

v Mr et Mme D. : « Le reste à vivre, c'est ce qu'il nous reste quand on a tout payé. Ben c'est pas grand-chose, même si pour la Banque de France, c'est assez. »

v Mme A. : «  Je ne sais pas ce que ça signifie exactement car normalement, le reste à vivre, c'est un forfait qui doit nous permettre de subvenir à nos besoins, mais en réalité, c'est différent. J'ai eu des réparations de voiture, mais que voulez-vous que je fasse avec 200 euros par mois ? »

Pour certaines personnes, ce forfait est mal vécu :

v Mme A. : « Ce forfait représente beaucoup de restriction. Pour la Banque de France, on doit y arriver. C'est peut-être moi qui ne sais pas gérer. De toute façon, je n'avais qu'à ne pas faire de bêtises. »

v Mr et Mme D. : « Avec ce forfait imposé, car on nous l'impose, on a l'impression d'être des gosses ! On sait gérer notre budget vous savez, et , même si le dossier nous a aidé et surtout soulagé, on n'aurait pas réparti notre argent comme ça, car là, heureusement qu'on a l'épicerie sociale, sinon je me demande comment on ferait. »

Pour d'autres, la question est moins tranchée :

v Mme E. : « Pour moi, c'est quand même rassurant de savoir qu'il nous reste tant par mois mais si je n'avais pas accès à l'épicerie sociale, je serais pas bien dans mes baskets, car là, ça me permet de pouvoir faire plaisir à mes enfants, alors que sans cette aide, ce serait plus restreint. »

v Mme C. : « D'un côté, c'est rassurant mais c'est aussi source de restrictions, car ce n'est pas assez. Pour vivre comme il faut, du moins pour manger comme il faut, il me faudrait plus. »

v Mr F. : « Ben, c'est vrai que pour moi, c'est les deux. J'aime pas faire les comptes, donc c'est rassurant de savoir qu'il me reste la même somme d'argent chaque mois. Mais d'un autre côté, tous les mois c'est la même somme et je suis obligé de me restreindre. Je ne peux pas me dire, tiens ce mois-ci je fais ci, ou ça, parce que tout est compté et tous les mois c'est pareil. »

v Pour Mme B., il semblerait que bien que le reste à vivre soit rassurant, il est également néfaste : « Ben rassurant, je ne sais pas trop. C'est vrai qu'avec le plan, c'est très clair mais c'est dur quand même, on ne peut même pas partir en vacances. Ca fait 4 ans qu'on ne gère pas nous même et ça, c'est dur pour moi. (...) On avait un train de vie quand même élevé. C'est pour ça, le reste à vivre, on a eu beaucoup de mal, c'était horrible. »

Il semblerait donc que le fait d'avoir un budget préétabli soit rassurant pour ces personnes. Néanmoins, ce forfait est source de restrictions et peut infantiliser certaines personnes qui ont des difficultés à accepter qu'un budget leur soit imposé. De par cette proposition de budget, certaines personnes ont le sentiment de ne plus rien gérer, de ne plus gérer elles-mêmes leur budget.

Le témoignage de Mme B. confirme les propos du responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France. Il semblerait donc que les personnes surendettées activement, ayant eu un train de vie assez confortable, aient plus de difficultés à s'accommoder le « reste à vivre ».

Nous allons analyser les facteurs d'exclusion d'accès aux loisirs.

3/ Les facteurs d'exclusion de l'accès aux loisirs

Ces différents facteurs peuvent être facilitant ou limitant par rapport à l'accès aux loisirs.

3.1/ Les facteurs limitant

a) Une capacité d'épargne

La capacité d'épargne représente un atout majeur dans l'accès aux loisirs. L'enquête a révélé que 4 personnes sur 6 avaient réussi à se constituer une petite épargne. Cependant, seule une personne possède une épargne sans être bénéficiaire de l'épicerie sociale. Celle-ci est la seule à avoir déposé un dossier de surendettement suite à une baisse de ressources. Nous pouvons donc d'ores et déjà affirmer que l'aide alimentaire augmente les possibilités d'épargner.

Les raisons évoquées pour justifier l'absence d'une épargne sont identiques :

v Mme B. : «  Non, je ne peux pas, je n'ai pas assez d'argent. »

v Mme C. : « Non, pas du tout, par manque de moyens financiers. »

Cependant, il semblerait que les sommes épargnées ne soient pas consacrées aux loisirs :

v Mme A. : « Oui, j'essaie de mettre 15 euros par mois. Je veux qu'ils soient prélevés directement mais je ne veux pas y toucher, car si je commence à taper dedans, j'aurais du mal à les remettre. »

v Mr et Mme D. : « Ben on met de temps en temps. Ca varie en fonction de nos dépenses, mais souvent on essaie de mettre 30 euros. C'est une poire pour la soif. »

v Mme E. : « Je mets 30 euros tous les mois sur un livret. Je fais comme si je ne les avais pas. On ne sait jamais quelle galère il peut encore m'arriver. »

v Mr F. : « Je m'oblige à mettre au moins 20 euros. Comme ça, si j'ai des frais de voiture, je pourrais dormir tranquille. »

Nous pouvons voir ici que les sommes sont nettement supérieures pour les personnes bénéficiant d'une aide alimentaire. La crainte d'un imprévu est la raison principal de la constitution d'une épargne.

La capacité d'épargne est donc un facteur limitant l'accès aux loisirs. Même si elle est envisageable, elle reste néanmoins assez faible et ne permet pas aux personnes de la consacrer aux loisirs.

b) Le traumatisme causé par le dossier de surendettement

Les conséquences du dossier de surendettement sur les personnes est un thème récurrent lors de mes entretiens. Il est intéressant de constater l'ambivalence des réactions. En effet, toutes les personnes interrogées s'accordent à dire que le dépôt du dossier et la mise en place du plan conventionnel ont été un soulagement :

v Mme A. : « le dossier nous a soulagé. On n'y arrivait plus, on était coincé. Avec le dossier, il n'y avait plus de harcèlement donc moins de problèmes. »

v Mme C. : « oui, le dossier m'a soulagé. Je ne dormais plus, j'avais peur d'aller ouvrir la boîte aux lettres. J'étais harcelée (...) même la nuit (...) C'était pas facile de dire aux gens « j'ai besoin d'argent » (...) Dès le dépôt, je n'étais plus harcelée donc j'étais bien (...) Je peux dormir tranquille. »

Cependant, il semble que le dossier de surendettement soit traumatisant :

v Mr F. : « le dossier de surendettement est la pire chose qui pouvait m'arriver. Je suis marqué à vie et je souhaite à personne de vivre ça. »

v Mme B. : « j'ai très mal, très très mal vécu le dépôt du dossier. J'avais l'impression d'être traitée comme quelqu'un qui a commis un crime. »

v Mr et Mme D. : « le dépôt était très difficile car ça veut dire aussi qu'on n'a pas géré, qu'on est nul. Et vous savez, à notre âge, c'est difficile à encaisser. On a vraiment eu l'impression d'être des gosses et qu'on nous avait surpris en train de faire des bêtises. C'est vraiment humiliant. »

v Mme E. : « j'ai été rassurée, c'est sûr, mais vis-à-vis de mes enfants, c'est dur (...) C'est dur de se dire on dépose un dossier de surendettement, ça veut dire qu'on n'a pas su jouer notre rôle de père et de mère de famille. »

Le dossier de surendettement, de par son image négative, est un facteur limitant l'accès aux loisirs.

v Mme B. : « on a mal géré donc il faut assumer, c'est comme ça (...) Quand on a déposé un dossier, il faut se dire « restrictions, restrictions », il faut assumer. »

v Mr F. : « avec le dossier, on n'ose plus rien faire, ça nous refroidit ! »

v Mr et Mme D. : « avant le dossier, on a mangé le pain blanc, maintenant, on mange le pain noir. »

v Mme A. : « depuis que j'ai un dossier de surendettement, j'évite les sujets sur l'argent. J'écoute mais je ne participe pas. A quoi bon parler argent alors que j'en n'ai pas. Mais en même temps, je n'avais qu'à pas faire des crédits. Maintenant, les dépenses, c'est en stand-by. »

v Mme E. : « même si l'épicerie sociale me permet quand même de faire un peu plaisir à mes enfants, depuis le dossier de surendettement, j'ai du mal à me dire que j'ai le droit de dépenser. J'ai toujours l'impression que quand je dépense un peu, c'est mal car j'ai des dettes à rembourser, un dossier de surendettement sur le dos. »

v Mme C. : « si j'en suis là, c'est de ma faute (...) Je ne peux pas me permettre de dépenser 50 euros dans les sorties (...) C'est mes bêtises donc c'est normal. »

Après avoir évoqué les facteurs limitant l'accès aux loisirs, nous allons voir les facteurs facilitants.

3.2/ Les facteurs facilitant l'accès aux loisirs

a) Une gestion rigoureuse du budget

Il semblerait que le dossier de surendettement et surtout l'accompagnement proposé par les professionnels favorisent une gestion plus saine du budget. Comme le souligne Mme M., AS, « souvent le plan conventionnel donne un cadre à la famille. »

Même si, comme nous l'avons montré précédemment, certaines personnes interrogées estiment que le plan conventionnel les infantilisent, toutes s'accordent à dire que le budget est plus contrôlé, mieux géré.

v Mme B. : « je fais mes comptes maintenant, c'est très sérieux. »

v Mme A. : « même si c'est dur, avec le plan c'est quand même plus clair et du coup, on gère mieux car on n'a plus à jongler avec les créanciers. »

v Mr et Mme D. : « on a un cahier et on note tout même si il n'y a pas grand-chose à noter ! »

v Mme E. : « avec le plan, c'est plus clair. Le plus dur, c'est les charges qui varient tout le temps. Du coup, on calcule tout, tout le temps (...) Même si c'est dur, je fais plus souvent mes comptes qu'avant, je contrôle plus mon compte. »

v Mr F. : « depuis que j'ai un dossier de surendettement, j'ai appris à compter. »

v Mme C. : « je fais mes comptes (...) Je calcule tout, j'ai appris à compter (rires) (...) Il faut calculer. »

La gestion du budget est beaucoup plus rigoureuse. Celle-ci semble être un atout majeur dans l'accès aux loisirs.

b) Un rapport à la consommation qui change

Pour certains professionnels, le dossier de surendettement permet aux personnes de prendre conscience de la situation et les amène à un rapport à la consommation qui change.

v Mme L., CESF : «  en présentant leur dossier à la Banque de France, il y a une prise de conscience précise de la situation financière. »

v Mme K., CESF : « le dossier de surendettement permet, sur le long terme, d'amener un rapport différent à la consommation. On peut pointer les choix de consommation. Les familles vont avoir un regard différent sur les crédits, sur la consommation de manière générale. »

Ces remarques sont confirmées par les personnes interrogées :

v Mr F. : « les crédits, c'est fini ! »

v Mme E. : « je ne veux plus qu'on me parle de crédit. »

v Mr et Mme D. : « on est un peu dégouté de tout. Maintenant, on a vieilli, on a réfléchi et on a changé. »

v Mme A. : « après le plan, on va faire attention, on va redépenser, mais pas trop. Je vais être dur envers moi-même. Je ne veux pas retomber dans l'extrême. Ca m'a servi de leçon. Vaut mieux avoir des sous de côté. »

v Mme B. : « je dois jongler. Par exemple, aux soldes, j'ai diminué mon budget alimentation pour pouvoir m'acheter des choses. Maintenant, j'essaie de choper les bonnes affaires. »

v Mme C. : « il faut toujours trouver des moyens de payer moins cher (...) Si je veux m'habiller, oui je gratte ailleurs. »

Ces témoignages nous montrent bien que les personnes ont une vision négative des crédits à la consommation. Le rapport à la consommation est modifié, les personnes craignant de retomber dans la spirale du surendettement.

Cette modification du rapport à la consommation permet ainsi aux personnes d'être moins vulnérables face aux sollicitations permanentes de la société dite de « consommation ». Ce point constitue un facteur facilitant essentiel dans l'accès aux loisirs.

D'autres facteurs facilitant, facteurs externes, peuvent favoriser l'accès aux loisirs des familles : ce sont les aides financières.

3.3/ Reste à vivre : facteur d'exclusion ?

a) Alimentation, hygiène et habillement

Le responsable adjoint du service surendettement de la Banque de France reconnaît que « le reste à vivre ne laisse pas faire d'extras, on ne peut pas faire de folies ». Mais selon lui, « chacun est satisfait ». Il justifie le montant du reste à vivre en disant qu' « on ne peut pas dire aux créanciers, « voilà, les gens sont surendettés, ont des crédits, mais on va vous demander de faire des efforts parce qu'ils ne peuvent pas vous rembourser plus que ça. On a fait un bilan global, on a ça à disposition, vous êtes tant à vouloir récupérer votre argent, donc on va faire un prorata entre vous, on va réduire les taux d'intérêts ». On ne peut pas dire aux créanciers qu'on laisse aux débiteurs avoir canal +, avoir ceci, avoir cela, qu'ils partent en vacances. Nous ne pouvons pas dire ça, ça paraît logique. C'est vrai que le reste à vivre est un faible montant mais c'est une question de gestion de budget. »

Les travailleurs sociaux estiment que ces personnes sont confrontées à un budget tellement serré que la moindre dépense inattendue le déstabilise.

v Mme G., AS : « il serait intéressant de se pencher sur le reste à vivre que laisse la Banque de France à des familles qui sont déjà dans l'obligation de restreindre leur mode de vie et qui ne peuvent faire face aux imprévus. »

v Mme M., AS estime qu'il est « insuffisant, notamment par rapport aux loisirs et aux tentations permanentes de la société de consommation. »

v Mme K., CESF : « le reste à vivre, c'est alimentation, hygiène et habillement. C'est assez clair. Pour moi, il est insuffisant même si il a été augmenté, ce qui est déjà une très bonne chose. Et puis, l'appellation de ce forfait ne fait pas apparaître le terme loisir ou vacance ou argent de poche. Cette nomination signifierait donc que lorsqu'on est surendetté, on a droit à l'alimentation, l'hygiène et l'habillement, rien de plus. Pour moi, c'est assez révélateur. »

Le terme forfait « alimentation, hygiène, habillement » semblerait donc être un frein à l'accès aux loisirs et de ce fait, facteur d'exclusion. L'appellation de ce forfait exclurait d'elle-même de l'accès aux loisirs et aux vacances. Mais le point de vue des travailleurs sociaux rejoint-il celui des personnes surendettées ?

b) Montant suffisant pour les familles ?

L'ensemble des personnes interrogées estiment que le forfait « alimentation, hygiène, habillement » est insuffisant.

v Mme C. : « après les prélèvements, il ne me reste que très peu d'argent (...) Je ne fume pas, je ne bois pas, je ne sors pas. (rires) »

v Mme A. : « le loisir, avec le reste à vivre, on ne peut pas toujours se le permettre. C'est vraiment limité. »

v Mr F. : « ben, avec le forfait qu'on me laisse, j'ai du mal à joindre les deux bouts. C'est pas assez. »

v Mr et Mme D. : « on n'a pas de loisirs, c'es très très rare. »

v Mme E. : « depuis que je rembourse mon plan, c'est très rare que mes envies soient satisfaites. Il me reste pas assez d'argent. »

Ces témoignages nous montrent que pour ces personnes, le « reste à vivre » est insuffisant. Il apparaît nécessaire de comprendre les conséquences du dossier de surendettement, causes de leur auto-exclusion.

4/ L'auto-exclusion des familles

4.1/ Le sentiment de culpabilité et de honte

L'enquête a révélé que le sentiment de culpabilité et de honte est omniprésent chez l'ensemble des personnes interrogées. Cette culpabilité semble amener les familles vers l'auto-exclusion de l'accès aux loisirs.

v Mme A. : «  je me sens un peu coupable. »

v Mr et Mme D. : « on s'est dit : « pourquoi on a fait ça ? » »

v Mme E. : « c'est l'engrenage et on réalise après les conneries qu'on a fait. »

v Mme B. : « j'ai honte. Je ne suis pas très à l'aise quand même. »

v Mme C. semble être la plus culpabilisée : « c'est de ma faute (...) C'est moi la coupable (...) Comment j'ai pu être aussi stupide (...) J'ai honte (...) C'est de ma faute (...) C'est de ma faute si j'en suis là. »

La culpabilité et la honte semblent empêcher « l'autorisation » d'accéder aux loisirs. En effet, de par cette culpabilité omniprésente, les personnes ne s'autorisent plus les dépenses de loisirs, sans doute par crainte de ne pas être raisonnables. Ces personnes semblent vivre le plan conventionnel et la restriction comme une punition, une injustice.

v Mme A. : « fallait réfléchir avant et on a pas réfléchi donc on nous sert la ceinture. On s'en mord les doigts. »

v Mr F. : « j'ai fait la bêtise donc il faut que je répare les dégâts. »

v Mme B. : « j'avais l'impression d'être traitée comme quelqu'un qui a commis un crime. »

v Mr et Mme D. : « on se sent un peu exclu de la consommation et c'est dur de voir tout le monde partir en vacances mais on a mal géré donc il faut assumer, c'est comme ça. »

v Mme E. : « je ne ressens pas forcément un sentiment d'injustice car j'aurais pas dû faire de crédits. C'est de ma faute, pas celle des autres. Mais, des fois, j'en veux à la terre entière. En fait, je me sens exclue. J'aimerais être comme eux, en terrasse. »

v Mme C. : « c'est injuste, oui et non. Non parce que c'est de ma faute si j'en suis là, mais oui quand même parce que là, je vis sans vivre. C'est pas facile à expliquer. Je vis sans vivre parce que je survis. Y'a pleins de choses que je ne peux pas faire. »

4.2/ Une illusion, un enfermement dans le surendettement

a) Le surendettement, une situation tabou

Une grande majorité des personnes interrogées font en sorte de ne pas montrer qu'elles sont en situation de surendettement :

v Mme B. : « je n'ai pas prévenu ma famille et mes enfants, j'évite de leur en parler. Les amis et les collègues, c'est pareil. »

v Mme E. : « j'essaie de ne pas montrer que je suis surendettée même si je sais qu'on n'est pas les seuls (...) On a gardé tout à l'intérieur. »

v Mme A. : « personne n'est au courant. Juste ma mère mais on en parle jamais. Ca me stresse d'en parler. »

v Mme C. : « c'est pas facile de dire aux gens. Les gens disent « ah mais tu dis que tu es seule mais tu ne sors pas, on te propose des sorties, tu viens pas », mais j'ose pas dire que j'ai un dossier de surendettement. C'est pas facile à dire. »

Les personnes surendettées expriment leur volonté de ne pas révéler leur surendettement.

Nous pouvons souligner que, dans leurs réponses, elles n'expliquent pas pourquoi. Nous pouvons émettre l'hypothèse que la honte est la raison principale. En effet, cette honte, cette gêne, est évoquée par l'ensemble des personnes surendettées lors d'une question suivante.

b) La restriction des relations familiales, amicales et professionnelles

Même si les personnes surendettées ne souhaitent pas révéler leur surendettement, il leur est difficile de ne pas restreindre les relations familiales, amicales et professionnelles. Elles expliquent ces restrictions du fait d'un budget obéré.

v Mr F. : « je préfère dire que ce mois-ci, c'est un peu raide ou alors je trouve une excuse « j'ai oublié ma carte bleue » ou « je suis occupé aujourd'hui ». »

v Mme A. : « j'invite plus personne ou alors ils participent au repas. »

v Mme E. : « on ne sort jamais sauf le ciné quand c'est 3,5€ (...) Je m'oblige à être casanière pour ne pas avoir à dépenser. »

v Mr et Mme D. : « souvent, on n'a pas d'argent donc on répond que ça ne nous intéresse pas. »

v Mme C. : « je me force à restreindre mes relations familiales, amicales et professionnelles parce que je n'ai pas assez d'argent (...) Je mens parce que je peux pas dire que je ne peux pas. Je dis souvent que je garde mes petits enfants. C'est pas évident. »

Pour Mme B., il est indispensable de conserver les mêmes relations.

v « il ne faut pas restreindre les relations avec la famille et les amis. Il faut garder la tête haute. Il faut garder des liens. »

4.3/ L'accès aux loisirs

Dans un premier temps, nous pouvons nous demander si ces personnes ont le sentiment d'avoir la possibilité d'accéder aux loisirs ou si, au contraire, le forfait laissé par la Banque de France ne laisse pas la possibilité d'y accéder.

a) Les possibilités de loisirs

Tout d'abord, nous pouvons dire que la majorité des personnes interrogées se sentent exclues de l'accès aux loisirs :

v Mme A. : « je me sens obligée de me restreindre, mais bon, on n'a pas le choix. »

v Mme E. : « je ne sors jamais mais pourtant, les loisirs, c'est important pour être épanouie. »

Nous voyons ici que le loisir est important pour le bien-être de ces familles. D'après ces témoignages, nous pouvons en déduire que le reste à vivre laissé par la Banque de France n'est pas suffisant. Pourtant, toutes s'accordent à dire que l'accès aux loisirs est possible lorsque l'on rembourse un plan conventionnel de redressement.

v Mme E. : « avoir des loisirs, c'est possible mais pas souvent car on est restreint. Je préfère respecter le plan et voir après. C'est pas simple, il faut bien gérer. »

v Mme B. : « le loisir, même si c'est possible, on peut pas toujours se le permettre. C'est vraiment limité. »

v Mme A. : « les loisirs, c'est restreint, je ne connais même pas le prix du ciné. »

v Mr F. : « les loisirs, c'est possible mais pas tous les jours. C'est très restreint. »

Il semblerait que l'accès aux loisirs, même limité, est possible pour les familles remboursant un plan conventionnel de redressement.

Toutes les personnes parlent de restrictions des loisirs mais disent également qu'ils y accèdent. Cependant, la nature des loisirs est différente selon les personnes.

b) Quels loisirs ?

Il semblerait qu'avant le dépôt du dossier de surendettement, les personnes surendettées multipliaient les abonnements divers de loisirs :

v Mme B. : « avant le plan, j'avais canal +, un portable. »

v Mme A. : « avant j'étais abonnée à France Loisirs, Paris Normandie et j'avais un portable à forfait. »

v Mr et Mme D. : « ben avant, j'achetais mes magazines toutes les semaines. »

v Mr F. : « j'avais mon portable, Internet et canal sat. »

Aujourd'hui, toutes ces personnes possèdent un portable. Cet outil de communication semble être l'élément indispensable, contrairement aux autres abonnements :

v Mme B. : « je n'ai conservé que mon portable. »

v Mme A. : « aujourd'hui, je n'ai plus aucun abonnement sauf mon portable. »

v Mr et Mme D. : « aujourd'hui, j'ai tout résilié car c'est trop d'engagement, mais je récupère les vieux magazines pour ne pas dépenser. »

v Mr F. : « je n'ai gardé que mon portable. »

Nous pouvons donc en déduire que les familles ne conservent que les abonnements indispensables pour elles, comme le portable par exemple.

Le montant des loisirs dépend des familles et des budgets.

v Mr et Mme D. : « ça varie en fonction de nos dépenses mais on en a entre 50 et 100 euros par mois, pas plus. »

v Mme E. : « c'est surtout le resto mais c'est pas tous les jours ! Ca varie en fonction des mois et de nos envies mais je pense que ça dépasse les 50 euros. »

v Mr F. : « j'arrive à avoir des loisirs grâce à l'épicerie sociale car le budget alimentation est moins élevé que si je n'avais pas l'épicerie. Ce que je dépense pas dans la nourriture, je le dépense dans autre chose. »

v Mme A. : « c'est très limité. Je n'ai pas de budget précis pour les loisirs. J'en ai très rarement. »

v Mme B. : « j'en ai pour moins de 100 euros, moins de 50 euros même !  On a arrêté de fumer pour pouvoir dépenser dans autre chose. Fallait choisir.»

v Mme C. : « mes loisirs me coûtent entre 20 et 35 euros pas plus, et faut pas avoir un imprévu. »

Nous pouvons donc en déduire que les personnes bénéficiaires de l'aide alimentaire ont un budget loisirs beaucoup plus élevé que les autres. On voit bien ici que ces personnes accèdent aux loisirs, même si le budget ne permet pas de faire beaucoup d'extras.

Il semble intéressant de s'interroger ici sur l'accès aux vacances.

Aucune des personnes interrogées n'accède aux vacances ou n'a de projet vacances.

v Mme B. : « partir en vacances tout de suite, ce serait peut être possible mais si c'est pour dire aux enfants non fais pas ci fais pas ça, on bouge pas, on peut rien faire, c'est pas la peine, c'est encore plus frustrant. »

v Mme A. : « c'est déjà dur alors prévoir des sous pour les vacances, c'est pas possible. »

v Mme E. : « je n'ai pas de projet pour cet été. Les vacances, c'est ce qui me manquent le plus. »

v Mr et Mme D. : « on part pas en vacances et c'est ça le plus dur. En plus, pendant les vacances, non seulement on ne peut pas partir mais en plus, bouger, c'est mettre de l'essence et mettre de l'essence ça veut dire mettre de l'argent. »

v Mr F. : « depuis le plan, je ne suis pas parti en vacances ni en week-end. Même si j'aimerais bien, ça coûte de l'argent. »

Le budget est, semble-t-il, trop serré et ne permettrait pas aux personnes d'envisager un départ en vacances. Toutefois, d'après les différents éléments mis en avant précédemment, nous pouvons dire que ce sont les personnes qui se « refusent » les loisirs et les vacances. Face à cette auto-exclusion, et avec un budget serré, les familles se sentent exclues.

v Mme A. : « je me sens exclue car, par exemple, tout le monde parle d'Internet et moi, je ne l'ai pas. »

v Mr F. : « quand on a un dossier de surendettement, on est exclu des loisirs. »

v Mr et Mme D. : « oui, on se sent exclus quand même, on a plus accès aux loisirs comme avant et les vacances, n'en parlons pas. »

v Mme B. : « c'est plus pour ma fille que pour moi les loisirs. Je préfère me priver pour qu'elle soit intégrée. C'est à moi d'être exclue, pas à ma fille. »

v Mme E. : « je me sens exclue. J'aimerais être comme eux, en terrasse. »

c) Les loisirs pour les enfants

Les personnes ayant des enfants s'auto-excluent de l'accès aux loisirs pour permettre à leurs enfants d'y accéder.

v Mme B. : « j'essaie de faire plaisir à mes enfants(...) Même si je n'ai pas trop les moyens, je leur explique que ce mois-là, on peut pas, on n'a pas de sous, c'est dur (...) Il ne faut pas tout dire aux enfants. »

v Mme E. : « de temps en temps, je lui donne [à ma fille] un peu d'argent de poche mais ce n'est pas régulier (...) Je préfère me priver moi-même (...) Je veux éviter qu'elle se rende compte. C'est pas aux enfants de souffrir de la situation. »

d) Les projets des familles

J'ai cherché à savoir si le plan conventionnel de redressement permet aux familles de pouvoir faire des projets ou si au contraire, le plan les fragilise au point de ne plus être en capacité d'en faire.

v Mme A. : « des projets...oui mais pas tout de suite. »

v Mme B. : « après le plan, mon projet, c'est de partir en vacances. »

v Mme C. : « non, je n'en ai pas, je ne peux pas en faire des projets. Je me refuse d'en faire. Je vis comme une hermite, comme une veuve, car à cause du dossier, je ne peux pas retrouver quelqu'un. Comment lui annoncer : « au fait, j'ai un dossier de surendettement », et les sorties, ça ne peut pas être toujours le même qui paie. J'ai pas été élevée comme ça. »

v Mr et Mme D. : « non, je ne peux pas faire de projets. A pâques, il va faire beau mais je veux qu'il pleuve : les gens vont s'en aller trois jours en week-end et nous non, je ne peux pas faire ce genre de projets. »

v Mme E. : « j'aimerais partir 8 jours en vacances en Bretagne, mais il faudrait que je gagne au loto pour ça ! »

v Mr F. : « des projets ? Non, je ne peux pas. »

D'après ces constats, il semblerait que le plan ne permet pas aux personnes de faire des projets. Toutes les personnes interrogées n'ont mentionné que des projets loisirs, vacances. Aucune n'a émis de projets professionnel, immobilier ou autre. Il semblerait que ces personnes soient contraintes de ne pas faire de projets : « je ne peux pas ». Ainsi, le projet loisir ou vacances ne résulterait pas de leur volonté mais dépendrait de la Banque de France. Ces personnes laissent entendre que le dossier de surendettement, autrement dit la Banque de France, interdit de faire des projets.

L'ensemble des personnes interrogées ont reconnu avoir eu, à un moment donné, l'envie de ne plus respecter le plan, de ne plus rembourser les créanciers, pour pouvoir accéder aux loisirs et aux vacances. Ce désir est engendré par la frustration et le sentiment de ne plus pouvoir accéder aux loisirs.

v Mme B. : « j'ai pensé tout larguer car je me sens vraiment mal des fois. J'ai l'impression de ne plus rien pouvoir faire. Mais, je me dis : « comment je vais faire après ? » Et les conséquences...si c'est pour avoir du harcèlement après, c'est pas la peine, je ne supporterais pas. Mais en même temps, c'est tellement frustrant de voir tout le monde vivre et pas nous. »

v Mme C. : « j'ai déjà eu envie de tout laisser tomber mais je sais qu'il ne faut pas que je déraille. Des fois, je me dis bien : « tiens ce mois-ci tu paies pas les créanciers, ça te paie ta location », mais ça veut dire que quand tu rentres des vacances, c'est les lettres de relance, les menaces de saisies. C'est plus les conséquences qui me font peur, car péter les plombs, oui, ça m'arrive. Partir à l'aventure, j'aimerais bien. Maintenant, je pense aux conséquences avant d'agir alors qu'avant, j'agissais et après je pensais aux conséquences, car, je sais que tout ce harcèlement, c'est illégal en quelque sorte, mais ils profitent de la fragilité des gens. Je me suis enfermée dans mon truc. Ce qui me manque, c'est d'être en repos, et ne rien faire, parce que même bouger pour aller se promener à la plage, mais ça veut dire faire un plein d'essence. C'est dur de vivre au jour le jour, sans pouvoir se projeter dans l'avenir. A une époque, je me disais, t'as pas de sous, ton frigo est vide, alors prends un cachet et dors toute la journée. »

v Mme E. : « j'ai déjà eu envie de tout lâcher mais je n'ai pas envie de recommencer la galère. Faut faire avec, mais c'est vrai que c'est tentant. »

Il semblerait que les personnes soient tentées de ne plus honorer les remboursements pour s'octroyer des moments de « répit », de vacances. Cependant, la crainte des poursuites les en dissuadent. Le plan ferait donc prendre conscience des risques encourus en cas de non paiement.

Les personnes, de par cette frustration et ce sentiment d'exclusion de l'accès aux loisirs souffrent d'un manque de reconnaissance sociale. Elles s'efforcent de maintenir une certaine image sociale et continueraient de vouloir s'identifier à une classe sociale supérieure. Nous avons abordé ces différents thèmes dans la partie théorique de ce mémoire et nous allons tenter de comprendre comment ces personnes tentent de satisfaire ce besoin de reconnaissance sociale, ainsi que les stratégies d'identification sociale.

4.5/ Le besoin de reconnaissance sociale

Une majorité des personnes interrogées considèrent qu'elles ont consommé plusieurs biens et contracté différents crédits afin d'être reconnues socialement. Avec la mise en place du plan conventionnel de redressement, ce besoin est toujours présent mais la contraction des crédits ne leur permet plus de le satisfaire. Nous pouvons nous demander de quelle manière elles réagissent face au regard des autres, et quelle est leur place dans la société selon elles.

Certaines personnes sont sensibles aux jugements d'autrui. Elles veulent acquérir des biens pour faire croire qu'elles appartiennent à une autre classe sociale plus valorisante. La finalité recherchée est d'imiter et de se conformer aux autres.

v Mme A. : « de ne pas avoir de carnet de chèque, ça me gênerait, je me sentirais inférieure aux autres. »

v Mr et Mme D. : « voir les autres vivre comme ils vivent, ça nous met le moral à zéro parce que c'est dur de faire comme si on était pareil qu'eux mais sauf qu'en réalité, on a un dossier de surendettement. On trouve toujours de bonnes excuses pour ne pas montrer mais c'est pas toujours évident. »

v Mme E. : « avoir un carnet de chèque, ça me donne un statut, j'ai l'impression d'être comme tout le monde. »

v Mme B. : « j'ai ma fierté. Je leur dirais peut être un jour, quand tout sera fini, je ne sais pas, une fois qu'on aura fini le plan, pour montrer qu'on a galéré mais on réussi à s'en sortir. Sauf qu'en attendant, il ne faut rien laisser paraître de notre situation, c'est pas évident à expliquer mais c'est important pour moi. »

v Mme C. : « Le fait de ne pas avoir de carnet de chèque, c'était frustrant. A chaque fois, je disais « ah, j'ai oublié mon chéquier ». Je passais pour quelqu'un de tête en l'air, alors qu'en fait, j'avais honte de dire : « ben non, j'ai plus de carnet de chèque. » »

Toutefois, Mme C. explique clairement les raisons de son « silence » concernant son dossier de surendettement : « je fais beaucoup attention au regard des autres, c'est pour ça que je dis rien, parce que y'a des gens qui disent que j'ai la folie des grandeurs et que je sais pas gérer. Alors que c'est pas ça du tout. En fait, j'ai surtout peur que les gens me jugent (...) Moi, c'est parce que j'ai voulu profité de ma liberté retrouvée, j'ai voulu me remeubler (...) J'ai surtout voulu combler la solitude, le vide. (...) On s'est retrouvé en concurrence, mon ex et moi, vis-à-vis de ma fille car elle était enceinte à ce moment-là, et il lui faisait de beaux cadeaux, et moi, je voulais aussi montrer à ma fille que je l'aimais autant que son père sauf que moi j'avais pas les moyens. Je pense que j'ai voulu combler un manque affectif, la solitude et aussi prouver que j'aime par les cadeaux. »

Nous voyons ici que le regard des autres est très important. Les personnes peuvent avoir ce besoin de reconnaissance sociale et peuvent vouloir prouver leur amour par l'achat.

D'après ces propos, nous comprenons que certaines personnes surendettées activement veulent se distinguer de leur groupe d'origine et adopter le style de vie de celles issues d'une classe sociale supérieure pour être reconnues socialement. Par le manque de moyens financiers, elles n'ont pu acquérir des biens de consommation, leur permettant de se différencier de leur groupe de référence.

De même, ces témoignages soulignent le besoin de ces personnes d'être « comme tout le monde ».

III/ Retour à l'hypothèse

L'exclusion de l'accès aux loisirs des personnes remboursant un plan conventionnel de redressement est donc un sujet très vaste et la prise en charge de ces personnes est complexe et regroupe de nombreux paramètres.

Mon questionnement de départ était « quelles sont les difficultés que rencontrent les personnes surendettées lorsqu'elles remboursent un plan conventionnel de redressement ? ». Suite à mon enquête exploratoire, je suis arrivé à la problématique suivante : « le reste à vivre laissé par la Banque de France, appelé forfait alimentation, hygiène, habillement, est-il facteur d'exclusion de l'accès aux loisirs ou est-ce les personnes qui s'en excluent elles-mêmes ? ». Par la suite, j'ai émis l'hypothèse que la culpabilité et la honte pouvaient être les causes principales de l'exclusion de l'accès aux loisirs de ces personnes.

Pour me permettre de répondre à ma problématique et de confirmer ou infirmer mon hypothèse, je me suis documenté sur ce sujet mais j'ai également tenté d'avoir des données de terrain. Par ce biais, je souhaitais connaître les causes possibles de cette exclusion de l'accès aux loisirs.

A la suite de ceci, j'ai analysé les résultats obtenus et suis arrivé à la conclusion que l'exclusion de l'accès aux loisirs est dû au fait d'un reste à vivre limité, mais surtout du fait de la culpabilité et la honte des familles concernées. En effet, pour ces personnes, accéder aux loisirs semble indispensable pour leur bien-être mais elles se le refusent, comme une punition à leur surendettement. Pourtant, nous avons vu que pour elles, il était primordial d'être reconnues socialement. Il est donc important que les professionnels les aident pour leur permettre d'accéder aux loisirs sans culpabiliser, et ainsi pouvoir assouvir ce besoin de reconnaissance sociale autrement que par les crédits.

Le CESF, de par les spécificités de sa formation, a donc tout à fait sa place dans ce type d'accompagnement, et peut donc permettre à ces personnes d'accéder aux loisirs et de ce fait, accéder à un mieux-être.

PARTIE III : PERSPECTIVES PROFESSIONNELLES

Ce mémoire m'a permis de m'interroger sur la place du conseiller en économie sociale et familiale dans la problématique de l'accès aux loisirs des personnes remboursant un plan conventionnel de redressement. En effet, l'apport théorique et l'enquête réalisée auprès de différents professionnels et du public m'ont permis d'appréhender les facteurs d'exclusion de l'accès aux loisirs de ces personnes et de comprendre la nécessité d'un accompagnement social dans une perspective professionnelle. Je tiens également à préciser que certains éléments ont déjà été abordés par les conseillères en économie sociale et familiale interrogées dans la partie analyse.

I/ La question de l'exclusion de l'accès aux loisirs des personnes surendettées dans la pratique professionnelle du conseiller en économie sociale et familiale

Comme nous l'avons vu, cette exclusion est une question délicate car elle n'est pas nécessairement le résultat d'une restriction de budget. En général, les personnes n'ont pas conscience de leur auto-exclusion. Pour comprendre ces situations, le conseiller en économie sociale et familiale prend en compte, d'une part, l'origine du surendettement, ainsi que l'influence de l'environnement social et, d'autre part, la fragilité des familles.

La société actuelle met effectivement en oeuvre différents moyens pour influencer le consommateur (sollicitation de la publicité, offres multiples de crédit, déduction fiscale en cas d'obtention de prêts...). Il est donc difficile pour certaines personnes fragilisées de résister à ces diverses propositions. Cette fragilité peut être liée à un mal-être, en raison de leur situation de surendettement et de la place occupée dans la société. Pour compenser ce sentiment d'injustice et d'exclusion de l'accès aux loisirs, elles sont amenées à avoir des stratégies d'évitement. L'obtention aisée de crédit a permis à certaines, notamment celles surendettées activement, d'acheter plusieurs biens, destinés, entre autres, à montrer leur appartenance sociale. La consommation était devenue pour elles un moyen d'exister socialement et d'être reconnues par leurs pairs. De ce fait, il est important de considérer leur souffrance lors de la mise en place du plan conventionnel de redressement pour comprendre ce comportement d'auto-exclusion de l'accès aux loisirs.

Ces facteurs extrinsèques et intrinsèques apparaissent indissociables dans cette problématique. Il est donc difficile de considérer qu'elles sont responsables de leur situation.

II/ Diagnostic établit par le conseiller en économie sociale et familiale

Généralement, les personnes surendettées rencontrent le conseiller en économie sociale et familiale en dernier ressort, lorsqu'elles ont utilisé toutes les solutions existantes (rachat de prêt, multiplication de crédit à la consommation pour recouvrir un découvert bancaire ou pour assurer le paiement des mensualités d'autres crédits...). Ainsi leur capacité financière est souvent faible, voire inexistante.

Lors des premiers contacts, elles sont souvent épuisées psychologiquement et ne sont plus en mesure d'effectuer leurs démarches. Elles sont soumises aux pressions quotidiennes des sociétés de recouvrement de crédit et des huissiers, ce qui accroît leur anxiété. A ce stade, l'accompagnement par le conseiller en économie sociale et familiale s'avère indispensable.

La première demande revêt un caractère d'urgence (saisies bancaires, besoins alimentaires de première nécessité...). Le conseiller en ESF doit alors rencontrer plusieurs fois la famille avant d'évaluer s'il y a endettement ou surendettement.

Les premiers rendez-vous sont souvent longs, nécessitant une grande disponibilité de la part du professionnel.

Il essaie tout d'abord de déculpabiliser ces personnes, qui ont souvent une image très négative d'elles-mêmes. Il les rassure et a une écoute empathique très importante. Cet accompagnement peut leur permettre de s'exprimer sur le vécu de leur situation et leur histoire personnelle. Cette écoute doit être omniprésente et favoriser la formulation de leurs angoisses et de leur culpabilité, ceci afin qu'elles puissent se libérer de leur affliction. Dans le respect des personnes et par son écoute, le conseiller en économie sociale et familiale peut apaiser leur honte et leur douleur. La reformulation et le soutien seront nécessaires pour aider ces personnes à s'ouvrir, s'exprimer et parler librement. Pour cela, une relation de confiance doit s'établir dès les premiers contacts.

Lors de son diagnostic, il peut leur proposer, si la situation relève d'un endettement, un accompagnement éducatif budgétaire. Dans le cas d'un surendettement, il conseille le dépôt d'un dossier à la Banque de France. Si la famille adhère à cette proposition, le conseiller en ESF lui explique la procédure et travaille sur l'image du dossier, souvent considéré comme le résultat d'un échec personnel. Il est également amené à dédramatiser le dispositif du surendettement car les personnes sont souvent mal informées de ses conséquences (inscription au FICP par exemple, reste à vivre).

Notons que la majorité de ces personnes ont honte de leur situation et qu'il leur est parfois difficile de l'accepter. Ainsi, certaines peuvent refuser, dans un premier temps, le dépôt d'un dossier de surendettement. Il est donc important d'accepter leur choix et de les laisser cheminer à leur rythme. Pour qu'elles adhèrent à cette proposition, il faut qu'elles soient prêtes, ce qui peut quelquefois mettre un certain temps.

III/ L'accompagnement individuel

Dans un premier temps, un accompagnement individuel est nécessaire.

Lorsque la famille accepte le dépôt d'un dossier, elle n'est pas en mesure de le constituer seule. Le conseiller en ESF l'aide à le remplir et à préciser les dettes contractées. Cette phase permet généralement aux personnes de prendre conscience de leurs difficultés. Elles entrent alors dans le principe de réalité : le budget est posé et mis à plat. Il est nécessaire de contractualiser avec elles la mise en place du dossier pour qu'elles s'engagent à mettre tout en oeuvre pour améliorer leur situation (ne pas contracter à nouveau des crédits par exemple). Chaque membre du couple signe le dossier. Ceci permet de les responsabiliser et de leur faire comprendre la nécessité de réduire leur consommation. Si l'un des deux n'est pas prêt, une amélioration de la situation sera difficile à envisager.

Le conseiller en ESF est également amené à établir un travail en réseau avec différents partenaires (banques, Banque de France, sociétés de recouvrement, associations caritatives, service social...) afin de trouver des solutions adaptées pour améliorer la situation financière.

Ensuite, lorsque le dossier est déposé, une action éducative budgétaire est indispensable. Le suivi d'un plan de la Banque de France nécessite que les personnes renoncent à certaines dépenses et puissent gérer seules leurs ressources. Cet accompagnement leur permet d'apporter une aide sur le moyen et long terme. Pour qu'elles puissent apprendre (ou réapprendre) à gérer seules sans s'auto-exclure de l'accès aux loisirs, le conseiller en ESF les valorise et les encourage dans leurs démarches. Ceci permet qu'elles retrouvent une image positive d'elles-mêmes. Le professionnel tient compte de leurs capacités et de leurs compétences pour les mettre en valeur et soutenir tout changement intervenant dans la situation.

Son soutien est très important pour que les personnes puissent réapprendre à consommer. En effet, lorsqu'elles suivent un plan conventionnel de redressement, elles n'osent plus dépenser de peur de rechuter (peur de faire leurs courses seules, d'aller chez le coiffeur...). Elles pensent ne pas être capables de résister à la tentation et ne savent plus se projeter dans l'avenir. Il est donc important qu'elles se sentent épaulées pour qu'elles puissent reconsommer sereinement, et donc accéder aux loisirs.

De plus, pour que l'accompagnement réussisse, le conseiller en économie sociale et familiale les aide à comprendre les facteurs intrinsèques et extrinsèques, ayant motivé la multiplication des crédits, puis l'auto-exclusion de l'accès aux loisirs. Ainsi, les personnes surendettées, ayant consommé pour accéder à une reconnaissance sociale, doivent prendre conscience de ce besoin pour pouvoir changer de mode de vie. En expliquant leur fonctionnement et leurs relations à l'argent, ils pourront comprendre leur comportement d'achat. Le but est qu'ils amorcent un changement dans leur façon de consommer et puissent résister aux différentes sollicitations (de la société, de leurs enfants...).

L'aide du conseiller en économie sociale et familiale se fait alors dans le respect du mode de vie de chacun. Il ne prend pas en compte ses propres valeurs et son rapport à l'argent pour rendre efficace son accompagnement. Il est important que les personnes surendettées puissent rester actrices de leur situation. Pour cela, le conseiller en économie sociale et familiale chemine avec eux et respecte leur choix. Il peut différer certaines propositions lorsqu'elles ne sont pas prêtes à les entendre.

Enfin, lorsque le plan est mis en place, le conseiller en ESF peut suggérer, selon les situations, une orientation psychologique pour qu'il y ait une prise en charge complémentaire. Un suivi par un psychologue, voire un psychiatre peut être nécessaire pour que les personnes travaillent sur leur fonctionnement et leur histoire personnelle :

- A quoi correspondent leurs dépenses ?

- Quel rôle peut avoir le passé dans leurs décisions actuelles d'achat ?

- Que compense leur consommation ?

- Quels sont les facteurs d'auto-exclusion de l'accès aux loisirs ?

Il est nécessaire qu'elles trouvent des réponses à ces interrogations pour pouvoir s'autoriser à accéder aux loisirs, et ne pas « rechuter » pendant ou après le remboursement du plan conventionnel.

Soulignons que l'accompagnement individuel permet également d'évaluer la nécessité ou non de mettre en place une mesure de protection des majeurs ou une tutelle aux prestations sociales si un problème d'autonomie est rencontré dans la gestion du budget d'un ménage. Le conseiller en ESF peut le conseiller aux personnes. En cas de refus et si la famille est en danger, la mesure de protection sera demandée.

Enfin, l'efficacité de l'accompagnement des personnes surendettées implique l'utilisation des différents outils et un travail en réseau avec plusieurs partenaires. Cela m'a amené à réfléchir sur la notion du secret professionnel. En effet, le conseiller en ESF travaille avec des professionnels aux compétences diverses. Il doit donc évaluer ce qui peut être dit, ceci dans l'intérêt des personnes et avec leur accord.

Au-delà de la prise en charge individuelle, un accompagnement collectif est souvent nécessaire.

IV/ L'accompagnement collectif

Ce travail ne peut s'effectuer que dans un second temps, lorsque la situation financière s'est améliorée. L'action collective est un outil supplémentaire et complémentaire au suivi individuel et nécessite que les personnes soient prêtes à y participer. En début d'accompagnement, elles sont souvent incapables d'intégrer un groupe. Elles ont peur du regard des autres et ont honte de leur situation.

Nous avons constaté que l'une des origines de l'exclusion de l'accès aux loisirs peut être liée à un besoin de reconnaissance sociale des débiteurs. Il est donc fondamental qu'ils puissent restaurer des relations avec autrui pour renforcer leur intégration sociale et se sentir exister.

Le conseiller en ESF peut, grâce à un travail en réseau avec différents partenaires, développer des actions collectives de nature diverse auprès de ce public. Le travail en groupe pourra avoir un double impact : les personnes pourront, d'une part, constater qu'elles ne sont pas seules dans cette situation et, d'autres part, développer du lien social.

Le groupe va leur permettre de sortir de la honte et se sentir considérées par autrui. L'échange entre les différents participants peut leur faire prendre conscience de leur fonctionnement envers la consommation et réfléchir sur leur comportement d'achat.

Ce travail peut permettre d'éviter la mise en place de l'auto-exclusion de l'accès aux loisirs et de les valoriser. Cela peut être un réseau d'échange réciproque des savoirs, du théâtre, des groupes à thème ou encore un départ en vacances...

Ces actions peuvent être un moyen d'atténuer le besoin de reconnaissance sociale de certains débiteurs et se substituer à la consommation.

Notons que ces actions de groupe permettent aux familles surendettées de faire face à cette situation, quelqu'en soit les causes.

V/ La prévention

En amont, des actions de prévention peuvent être menées. Le conseiller en ESF peut envisager d'élaborer des groupes en collaboration avec d'autres partenaires avant une situation de surendettement.

La prévention primaire permet de prévenir des risques d'endettement. Différentes actions peuvent être mises en place (d'éducation, d'information...) auprès d'un public ciblé. Ce peut être par exemple une information auprès d'adolescents sur les notions de budget.

La prévention secondaire permet d'éviter le surendettement auprès de personnes avec un endettement important. Ce peut être des actions collectives ou individuelles (information sur les crédits à la consommation, le rôle des banques...).

Nous pouvons voir que le conseiller en ESF a un rôle capital dans la problématique du surendettement. Il dispose de différents outils pour aider les débiteurs, notamment ceux en quête de reconnaissance sociale, s'auto-excluant de l'accès aux loisirs. L'évaluation, l'orientation, l'accompagnement individuel et collectif, ainsi que les actions de prévention apparaissent comme complémentaires dans la résolution de ces situations.

CONCLUSION

L'exclusion de l'accès aux loisirs est donc la conséquence du sentiment de culpabilité et de honte principalement. Ces personnes sont souvent fragilisées, en grande souffrance tout au long du remboursement d'un plan conventionnel de redressement.

La loi NEIERTZ a été le premier texte réglementant le traitement du surendettement. Elle visait principalement le surendettement passif, mais n'a pas suffi pour aider les débiteurs. En effet, le surendettement n'est pas seulement lié à un problème budgétaire, il s'accompagne également de difficultés personnelles. Un accompagnement est essentiel pour les aider à résister aux tentations de la société, qui les incitent continuellement à emprunter et à consommer.

Le dépôt du dossier de surendettement est souvent le dernier recours des familles. L'image véhiculée par le dossier de surendettement est négative. Ce dossier va pourtant permettre à ces familles de retrouver un équilibre financier et personnel, mais il va également être vécu comme un traumatisme et va entraîner une dévalorisation de la personne. En effet, nous avons vu que le dossier de surendettement est souvent vécu comme un échec, comme une honte. Cette culpabilité va favoriser l'auto-exclusion de l'accès aux loisirs.

Le dossier de surendettement, bien qu'il soit un outil efficace, entraîne un paradoxe : d'une part, les personnes sont soulagées que leur situation financière puisse être améliorée et, d'autre part, le dispositif entraîne involontairement leur exclusion sociale et économique. Il est donc indispensable que ces personnes aient un relais pour être soutenues pendant la durée du plan. L'accompagnement du conseiller en économie sociale et familiale et d'un réseau de différents partenaires sont complémentaires. La mise en place d'actions individuelles et collectives vont permettre aux personnes de s'exprimer et de prendre conscience de leurs difficultés, ce qui peut les aider à ne pas s'exclure de l'accès aux loisirs.

Les personnes utilisent l'argent comme langage à une souffrance personnelle, montrant la difficulté à communiquer avec autrui. Comme nous avons pu le voir, la consommation est, pour certains débiteurs surendettés activement, un moyen d'accéder à une reconnaissance sociale. Leurs dépenses vont donner l'illusion passagère qu'ils sont différents de ceux qui ont position sociale similaire. Pourtant, le plan conventionnel de redressement ne leur permet plus d'acheter des biens mettant en avant un « paraître », ainsi leur souffrance ne s'apaise pas. Lorsqu'elles déposent un dossier de surendettement à la Banque de France, cette souffrance ne peut être résorbée. En réduisant leurs dépenses, elles vont se sentir exclues de la « société de consommation » et plus particulièrement des loisirs et des vacances, pendant plusieurs années. Alors comment envisager une réponse à ce besoin de reconnaissance sociale quand l'accès à la consommation leur est limité ?

Ce mémoire m'a permis d'appréhender la problématique de l'exclusion de l'accès aux loisirs et de développer une des explications possibles pour comprendre ce phénomène. Ce type d'exclusion est complexe et cache une véritable souffrance humaine. L'accompagnement du conseiller en économie sociale et familiale est alors indispensable pour que les personnes se sentent soutenues dans cette épreuve. Chaque cas est unique, son intervention sera donc différente selon les difficultés rencontrées.

Ce travail m'a apporté des connaissances juridiques et sociologiques, ainsi qu'une approche professionnelle. Par l'enquête de terrain, j'ai pu échanger sur le positionnement professionnel des acteurs rencontrés. Cela a donc été enrichissant et m'a aidé à me préparer à ma future pratique professionnelle.

* 1 cf. annexe 2 : « les caractéristiques des personnes surendettées »

* 2 www.banque-france.fr

* 3 www.insee.fr

* 4 cf. annexe 1 : « définitions »

* 5 le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, déposé le 15 septembre 2004, prévoit que le remboursement des créances locatives est prioritaire sur celui des crédits à la consommation. Ceci afin de sécuriser le règlement des loyers et des charges locatives pour inciter les bailleurs à louer leurs biens aux ménages les plus modestes.

* 6 cf. annexe 4 : « FICP »

* 7 cf. annexe 5 : « schéma de la phase amiable »

* 8 cf. annexe 6 : « schéma de la phase de recommandation »

* 9 cf. annexe 8 : « barème de la Banque de France »

* 10 cf. annexe 1 : « définitions »

* 11 cf. annexe 9 : « l'évolution de la société française depuis 1945 »

* 12 ROCHEFORD R. : La société des consommateurs ; Paris, édition Odile Jacob, 1995

* 13 ROCHEFORD R. : La société des consommateurs ; Paris, édition Odile Jacob, 1995, p.36

* 14 cf. annexe 1 : « définitions »

* 15 SACRISTE V. : « Communication publicitaire et consommation d'objet dans la société moderne » ; Cahiers internationaux de sociologie et liens sociaux, Paris, édition PUF, janv.-juin 2002 (pp. 123-150)

* 16 GARDAZ M. : le Surendettement des particuliers ; Paris, édition Anthropos, 1997

* 17 ROCHEFORD R. : La société des consommateurs ; Paris, édition Odile Jacob, 1995

* 18 SACRISTE V. : « Communication publicitaire et consommation d'objets dans la société moderne » ; Cahiers internationaux de sociologie et liens sociaux, Paris, édition PUF, janv.-juin 2002 (pp.123-150)

* 19 DAVIET E. ET LEVY-DAVILA M. : L'argent à tout prix; Paris, édition Flammarion, 2005

* 20 LA HOUGUE A. de : L'Homme et le Surendettement ; Paris, édition l'Harmattan, 2002

* 21 LA HOUGUE A. de : L'Homme et la Surendettement ; Paris, édition l'Harmattan, 2002

* 22 GALLOIS T. : Psychologie de l'argent ; Paris, édition J'ai lu Bien-être l'archipel, 2003

* 23 BAUDRILLARD J. : Pour une critique de l'économie politique de signe ; Paris, édition Gallimard, 1972

* 24 cf. annexe 1 : « définitions »

* 25 BOURDIEU P. : La Distinction, critique sociale du jugement ; Paris, les Editions de Minuit, 1979

* 26 HALBWACHS M. : Classe sociale et Morphologie ; Paris, les Editions de Minuit, 1972

* 27 BAUDRILLARD J. : La société de Consommation ; Paris, édition Denoël, Folio Essais, 1970

* 28 BAUDRILLARD J. : Pour une critique de l'économie politique de signe ; Paris, édition Gallimard, 1972

* 29 cf. annexe 1 : « définitions »

* 30 LESNE M., MINVIELLE Y. : Socialisation et formation ; Paris, édition païdeia, 1990

* 31 LA HOUGUE A. de : L'Homme et le Surendettement ; Paris, édition l'Harmattan, 2002

* 32 BOURDIEU P. : La Distinction, critique social du jugement ; Paris, les Editions de minuit, 1979

* 33 BOURDIEU P. : La Distinction, critique social du jugement ; Paris, les Editions de minuit, 1979, p. 422

* 34 cf. annexe 1 : « définitions »

* 35 BOURDIEU P. : La Distinction, critique social du jugement ; Paris, les Editions de minuit, 1979, p. 433

* 36 ACCARDO A. : Introduction à la sociologie, l'illusionnisme social, une lecture de BOURDIEU ; Bordeaux, édition Le Mascaret, 1991

* 37 MERMET G. : Francoscopie, Pour comprendre les Français 2005, Paris, édition Larousse, 2004

* 38 MINISTERE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE : Le programme et la loi de prévention et de lutte contre les exclusions ; sous direction de la communication, avril 1999

* 39 cf. annexe 10 : « grille d'entretien exploratoire avec les professionnels »

* 40 cf. annexe 11 : « questionnaire exploratoire auprès du public »

* 41 cf. annexes 12 et 13 : « grille d'entretien auprès des professionnels » et « grille d'entretien auprès du public »






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