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L'accès aux loisirs des personnes surendettées remboursant un plan conventionnel de redressement

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par Tony Follin
 - diplôme d'état de conseiller en économie sociale et familiale 2007
  

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4.3/ L'accès aux loisirs

Dans un premier temps, nous pouvons nous demander si ces personnes ont le sentiment d'avoir la possibilité d'accéder aux loisirs ou si, au contraire, le forfait laissé par la Banque de France ne laisse pas la possibilité d'y accéder.

a) Les possibilités de loisirs

Tout d'abord, nous pouvons dire que la majorité des personnes interrogées se sentent exclues de l'accès aux loisirs :

v Mme A. : « je me sens obligée de me restreindre, mais bon, on n'a pas le choix. »

v Mme E. : « je ne sors jamais mais pourtant, les loisirs, c'est important pour être épanouie. »

Nous voyons ici que le loisir est important pour le bien-être de ces familles. D'après ces témoignages, nous pouvons en déduire que le reste à vivre laissé par la Banque de France n'est pas suffisant. Pourtant, toutes s'accordent à dire que l'accès aux loisirs est possible lorsque l'on rembourse un plan conventionnel de redressement.

v Mme E. : « avoir des loisirs, c'est possible mais pas souvent car on est restreint. Je préfère respecter le plan et voir après. C'est pas simple, il faut bien gérer. »

v Mme B. : « le loisir, même si c'est possible, on peut pas toujours se le permettre. C'est vraiment limité. »

v Mme A. : « les loisirs, c'est restreint, je ne connais même pas le prix du ciné. »

v Mr F. : « les loisirs, c'est possible mais pas tous les jours. C'est très restreint. »

Il semblerait que l'accès aux loisirs, même limité, est possible pour les familles remboursant un plan conventionnel de redressement.

Toutes les personnes parlent de restrictions des loisirs mais disent également qu'ils y accèdent. Cependant, la nature des loisirs est différente selon les personnes.

b) Quels loisirs ?

Il semblerait qu'avant le dépôt du dossier de surendettement, les personnes surendettées multipliaient les abonnements divers de loisirs :

v Mme B. : « avant le plan, j'avais canal +, un portable. »

v Mme A. : « avant j'étais abonnée à France Loisirs, Paris Normandie et j'avais un portable à forfait. »

v Mr et Mme D. : « ben avant, j'achetais mes magazines toutes les semaines. »

v Mr F. : « j'avais mon portable, Internet et canal sat. »

Aujourd'hui, toutes ces personnes possèdent un portable. Cet outil de communication semble être l'élément indispensable, contrairement aux autres abonnements :

v Mme B. : « je n'ai conservé que mon portable. »

v Mme A. : « aujourd'hui, je n'ai plus aucun abonnement sauf mon portable. »

v Mr et Mme D. : « aujourd'hui, j'ai tout résilié car c'est trop d'engagement, mais je récupère les vieux magazines pour ne pas dépenser. »

v Mr F. : « je n'ai gardé que mon portable. »

Nous pouvons donc en déduire que les familles ne conservent que les abonnements indispensables pour elles, comme le portable par exemple.

Le montant des loisirs dépend des familles et des budgets.

v Mr et Mme D. : « ça varie en fonction de nos dépenses mais on en a entre 50 et 100 euros par mois, pas plus. »

v Mme E. : « c'est surtout le resto mais c'est pas tous les jours ! Ca varie en fonction des mois et de nos envies mais je pense que ça dépasse les 50 euros. »

v Mr F. : « j'arrive à avoir des loisirs grâce à l'épicerie sociale car le budget alimentation est moins élevé que si je n'avais pas l'épicerie. Ce que je dépense pas dans la nourriture, je le dépense dans autre chose. »

v Mme A. : « c'est très limité. Je n'ai pas de budget précis pour les loisirs. J'en ai très rarement. »

v Mme B. : « j'en ai pour moins de 100 euros, moins de 50 euros même !  On a arrêté de fumer pour pouvoir dépenser dans autre chose. Fallait choisir.»

v Mme C. : « mes loisirs me coûtent entre 20 et 35 euros pas plus, et faut pas avoir un imprévu. »

Nous pouvons donc en déduire que les personnes bénéficiaires de l'aide alimentaire ont un budget loisirs beaucoup plus élevé que les autres. On voit bien ici que ces personnes accèdent aux loisirs, même si le budget ne permet pas de faire beaucoup d'extras.

Il semble intéressant de s'interroger ici sur l'accès aux vacances.

Aucune des personnes interrogées n'accède aux vacances ou n'a de projet vacances.

v Mme B. : « partir en vacances tout de suite, ce serait peut être possible mais si c'est pour dire aux enfants non fais pas ci fais pas ça, on bouge pas, on peut rien faire, c'est pas la peine, c'est encore plus frustrant. »

v Mme A. : « c'est déjà dur alors prévoir des sous pour les vacances, c'est pas possible. »

v Mme E. : « je n'ai pas de projet pour cet été. Les vacances, c'est ce qui me manquent le plus. »

v Mr et Mme D. : « on part pas en vacances et c'est ça le plus dur. En plus, pendant les vacances, non seulement on ne peut pas partir mais en plus, bouger, c'est mettre de l'essence et mettre de l'essence ça veut dire mettre de l'argent. »

v Mr F. : « depuis le plan, je ne suis pas parti en vacances ni en week-end. Même si j'aimerais bien, ça coûte de l'argent. »

Le budget est, semble-t-il, trop serré et ne permettrait pas aux personnes d'envisager un départ en vacances. Toutefois, d'après les différents éléments mis en avant précédemment, nous pouvons dire que ce sont les personnes qui se « refusent » les loisirs et les vacances. Face à cette auto-exclusion, et avec un budget serré, les familles se sentent exclues.

v Mme A. : « je me sens exclue car, par exemple, tout le monde parle d'Internet et moi, je ne l'ai pas. »

v Mr F. : « quand on a un dossier de surendettement, on est exclu des loisirs. »

v Mr et Mme D. : « oui, on se sent exclus quand même, on a plus accès aux loisirs comme avant et les vacances, n'en parlons pas. »

v Mme B. : « c'est plus pour ma fille que pour moi les loisirs. Je préfère me priver pour qu'elle soit intégrée. C'est à moi d'être exclue, pas à ma fille. »

v Mme E. : « je me sens exclue. J'aimerais être comme eux, en terrasse. »

c) Les loisirs pour les enfants

Les personnes ayant des enfants s'auto-excluent de l'accès aux loisirs pour permettre à leurs enfants d'y accéder.

v Mme B. : « j'essaie de faire plaisir à mes enfants(...) Même si je n'ai pas trop les moyens, je leur explique que ce mois-là, on peut pas, on n'a pas de sous, c'est dur (...) Il ne faut pas tout dire aux enfants. »

v Mme E. : « de temps en temps, je lui donne [à ma fille] un peu d'argent de poche mais ce n'est pas régulier (...) Je préfère me priver moi-même (...) Je veux éviter qu'elle se rende compte. C'est pas aux enfants de souffrir de la situation. »

d) Les projets des familles

J'ai cherché à savoir si le plan conventionnel de redressement permet aux familles de pouvoir faire des projets ou si au contraire, le plan les fragilise au point de ne plus être en capacité d'en faire.

v Mme A. : « des projets...oui mais pas tout de suite. »

v Mme B. : « après le plan, mon projet, c'est de partir en vacances. »

v Mme C. : « non, je n'en ai pas, je ne peux pas en faire des projets. Je me refuse d'en faire. Je vis comme une hermite, comme une veuve, car à cause du dossier, je ne peux pas retrouver quelqu'un. Comment lui annoncer : « au fait, j'ai un dossier de surendettement », et les sorties, ça ne peut pas être toujours le même qui paie. J'ai pas été élevée comme ça. »

v Mr et Mme D. : « non, je ne peux pas faire de projets. A pâques, il va faire beau mais je veux qu'il pleuve : les gens vont s'en aller trois jours en week-end et nous non, je ne peux pas faire ce genre de projets. »

v Mme E. : « j'aimerais partir 8 jours en vacances en Bretagne, mais il faudrait que je gagne au loto pour ça ! »

v Mr F. : « des projets ? Non, je ne peux pas. »

D'après ces constats, il semblerait que le plan ne permet pas aux personnes de faire des projets. Toutes les personnes interrogées n'ont mentionné que des projets loisirs, vacances. Aucune n'a émis de projets professionnel, immobilier ou autre. Il semblerait que ces personnes soient contraintes de ne pas faire de projets : « je ne peux pas ». Ainsi, le projet loisir ou vacances ne résulterait pas de leur volonté mais dépendrait de la Banque de France. Ces personnes laissent entendre que le dossier de surendettement, autrement dit la Banque de France, interdit de faire des projets.

L'ensemble des personnes interrogées ont reconnu avoir eu, à un moment donné, l'envie de ne plus respecter le plan, de ne plus rembourser les créanciers, pour pouvoir accéder aux loisirs et aux vacances. Ce désir est engendré par la frustration et le sentiment de ne plus pouvoir accéder aux loisirs.

v Mme B. : « j'ai pensé tout larguer car je me sens vraiment mal des fois. J'ai l'impression de ne plus rien pouvoir faire. Mais, je me dis : « comment je vais faire après ? » Et les conséquences...si c'est pour avoir du harcèlement après, c'est pas la peine, je ne supporterais pas. Mais en même temps, c'est tellement frustrant de voir tout le monde vivre et pas nous. »

v Mme C. : « j'ai déjà eu envie de tout laisser tomber mais je sais qu'il ne faut pas que je déraille. Des fois, je me dis bien : « tiens ce mois-ci tu paies pas les créanciers, ça te paie ta location », mais ça veut dire que quand tu rentres des vacances, c'est les lettres de relance, les menaces de saisies. C'est plus les conséquences qui me font peur, car péter les plombs, oui, ça m'arrive. Partir à l'aventure, j'aimerais bien. Maintenant, je pense aux conséquences avant d'agir alors qu'avant, j'agissais et après je pensais aux conséquences, car, je sais que tout ce harcèlement, c'est illégal en quelque sorte, mais ils profitent de la fragilité des gens. Je me suis enfermée dans mon truc. Ce qui me manque, c'est d'être en repos, et ne rien faire, parce que même bouger pour aller se promener à la plage, mais ça veut dire faire un plein d'essence. C'est dur de vivre au jour le jour, sans pouvoir se projeter dans l'avenir. A une époque, je me disais, t'as pas de sous, ton frigo est vide, alors prends un cachet et dors toute la journée. »

v Mme E. : « j'ai déjà eu envie de tout lâcher mais je n'ai pas envie de recommencer la galère. Faut faire avec, mais c'est vrai que c'est tentant. »

Il semblerait que les personnes soient tentées de ne plus honorer les remboursements pour s'octroyer des moments de « répit », de vacances. Cependant, la crainte des poursuites les en dissuadent. Le plan ferait donc prendre conscience des risques encourus en cas de non paiement.

Les personnes, de par cette frustration et ce sentiment d'exclusion de l'accès aux loisirs souffrent d'un manque de reconnaissance sociale. Elles s'efforcent de maintenir une certaine image sociale et continueraient de vouloir s'identifier à une classe sociale supérieure. Nous avons abordé ces différents thèmes dans la partie théorique de ce mémoire et nous allons tenter de comprendre comment ces personnes tentent de satisfaire ce besoin de reconnaissance sociale, ainsi que les stratégies d'identification sociale.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard