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Stratégie des acteurs lors de l'élaboration et de la mise en oeuvre de la Loi d'Orientation Agricole (LOA ) au Mali

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par Chantal Jacovetti
Supagro Montpellier institut des régions chaudes - Master acteur de développement rural 2010
  

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9.2 5 DECRETS SORTIS MAIS INSATISFAISANTS MALGRE DES ATELIERS ET LE RECOURS AU CONSULTANTS

Selon le dernier document récapitulatif de l'état d'avancement de la LOA, 5 décrets sont inscrits au Journal Officiel :

Décret N°08-177/P-RM du 27 mars 2008 fixant les modalités d'application de la Loi relative au contrôle de qualité des engrais. Sorti 1 mois avant le dernier CSA, il répond à des enjeux de désengagement de l'État et de corruption sur la production, l'importation ou la distribution des engrais.

Décret N°08-768/P-RM du 29 décembre 2008 fixant les modalités d'enregistrement et d'immatriculation des exploitations Agricoles familiales et des entreprises Agricoles. Il répond plutôt aux OP mais les Chambres d'Agriculture n'ont rien mis en route et les services de l'État sont embourbés dans la décentralisation.

Décret N°008-793/P-RM du 31 décembre 2008 fixant les modalités de création et d'enregistrement des organisations interprofessionnelles Agricoles. Il est lié aux enjeux de désengagement de l'État et des filières, notamment le coton.

Décret N°09-011/P-RM du 19 janvier 2009 fixant les attributions, la composition et les modalités de fonctionnement des Commissions Foncières Locales et Communales. Il répond à une demande forte du terrain mais toujours pas en application se confrontant aux problèmes de la décentralisation et l'absence de politique foncière.

Décret N°09-314/P-RM du 19 juin 2009 relatif à la qualité et à la labellisation des produits Agricoles. Il répond aux exigences de l'exportation.

D'abord, les décrets n'ont pas fait l'objet d'un choix concerté, car c'est sur proposition du SP qu'ils sont présentés au CEN. Puis les acteurs choisissent de s'y investir ou pas selon leur moyen, leur intérêt comme le déplore un des initiateurs de la LOA :

(( C'est le SP qui fait les propositions de décrets ce n'est pas la CNOP. Cette redéfinition de la structure chargée de mettre en oeuvre la LOA va a l'encontre de l'esprit qui avait présidé. Il n'y a plus une Cellule, une interface pour assurer cohérence, volonté politique et pluralisme des acteurs. »

(( Lors du CEN le SP présente les thématiques, puis chaque ministère choisit en fonction de son intérêt, ses capacités, son temps, ensuite la liste est validée au CSA, puis la CNOP dit sur lesquels elle veut travailler » renforce un membre du SP

Ces 5 décrets ont fait l'objet d'ateliers. A priori ils s'inscrivent encore dans la démarche de concertation. Mais il ne suffit pas d'organiser des ateliers pour que le résultat satisfasse les acteurs et plus particulièrement les paysans. Essayons de comprendre pourquoi ?

Le responsable de la FNJR élu CNOP relate :

(( Pour les 5 premiers décrets la CNOP avait encore des ressources financières pour inviter le gouvernement à venir dans nos ateliers à Sélingué. Mais il y a eu des incompréhensions sur la portée de ces ateliers de préparation...Effectivement la CNOP a participé aux textes, mais on doit se comprendre sur les textes de mise en oeuvre »

Je n'ai pas assisté a ces ateliers de préparations des 5 décrets sortis aujourd'hui. Ils se sont déroulés jusqu'en juin 2009. Ils étaient prévus et budgétisés, dans le cadre de la convention des concertations. Pourquoi se déroulent-ils 3 ans après le vote de la loi ? Il y avait du temps pour les préparer ! Les rendus des consultants engagés ne correspondaient pas aux attentes. Un membre du SP explique :

(( Ceux qui élaborent les textes ce sont des bureaux d'études. Par exemple par rapport au statut on a lancé l'étude auprès d'un bureau d'étude (me donne le rapport de ce BE) après une consultation restreinte, on a choisi le BE. On a payé 2 M puis on a fait un atelier de validation à Sélingué avec tous les acteurs. La première version du texte était très mauvaise, du copié-collé. Les premières réflexions se sont faites au SP pour avoir de la matière ; la dernière version est a l'AN »

La CNOP confirme :

«...puis on n'a pas eu de bons consultants, on leur disait que ce n'était pas ça qu'on leur demandait, ils nous ont piégés. On n'a pas d'infos réelles mais des états des lieux pas de réflexions, de pistes. On leur a même redit pendant les ateliers, ils n'ont rien voulu savoir !»

Cette situation amène aussi à une dé-crédibilisation de la CNOP. Un fonctionnaire du Ministère de l'Agriculture rapporte :

((Ils ont des problèmes avec les consultants, ça leur rapporte du financement mais pas de soutien concret
dans la rédaction des textes. Les consultants font de la littérature... Par exemple sur les décrets la CNOP
nous a envoyé des textes de consultants. Ils avaient engagé un consultant par texte pour avoir un document

de réflexion, puis ils se le sont appropriés, modifiés puis nous ont convoqué nous le ministère à Sélingué. La CNOP nous a soumis leurs projets de textes [des consultants ?J et après ils reviennent dessus. "

Si le travail final des consultants ne contente pas «Mais alors il ne fallait pas les payer et leur demander de présenter un autre rapport» demandais-je

(( Ils sont payés d'avance *2M FC4+. Un accord (( gagnant-gagnant ", je te paye de suite et tu me verses 10%. Avoir recours à des consultants fait parti aussi des schémas en vigueur, une façon aussi de se faire une cagnotte... 10% sont reversés au commanditaire, c'est courant, c'est comme ça "

Les ateliers pour écrire les décrets se sont avérés un lieu d'incompréhensions avec des documents de consultants inappropriés. La construction concertée de la phase élaboration semble évaporée. Il est facile d'imaginer que les objectifs de chacun étaient différents comme par exemple sortir des décrets coûte que coûte, sans s'occuper ou ne plus considérer prioritaires les préoccupations paysan-ne-s ou ne pas prendre en compte les difficultés d'application sur le terrain. L'administration (( avait repris les choses en main " et ((on n'avait pas le recul " dit la CNOP.

La demande est forte de remédier à ce problème du côté paysan, de reproduire le même processus qui avait réussi à l'élaboration, qui leur donnait de l'autonomie et des réflexions/propositions :

(( Nous devons prendre le temps entre chaque décret d'en discuter avec les paysans de toutes régions et les OP et encore dans les CER puis une deuxième phase avec le ministère, puis on s'assoit, article par article.".

Cette demande peut paraitre surréaliste. Mais la CNOP est confrontée pour la 1ère fois à cette phase institutionnelle et juridique. Sans expérience, avec des moyens financiers et humains faibles, une désorganisation au sein de la structure, cette demande peut correspondre à leurs yeux être le seul moyen d'argumenter leurs propositions. Une réflexion de fond devrait être menée à ce niveau là mais en même temps ils doivent répondre aux enjeux de la mise en oeuvre maintenant. La tâche est d'autant plus difficile que les liens avec les régions sont faibles.

D'une année sur l'autre, lors des CSA une feuille de route avec les futurs textes a travailler dans l'année a venir, est validée et disponible pour tous les acteurs. Pourquoi alors n'y a-t-il pas anticipation ? Comment sont diffusées les informations, à qui, par qui, comment ? Quel compte rendu des mandatés pour solliciter et motiver la base ? A ces interrogations le président de la CNOP répond :

(( Il est difficile d'anticiper car c'est compliqué, le processus est mal embrayé. Tout est morcelé entre les ministères, alors pourquoi se projeter s'il n'y a pas de retour ? C'est trop compliqué a suivre, on ne sait pas où en sont les textes ".

Du côté administration le bât blesse aussi. Les personnes compétentes et motivées ne sont plus là « au temps de l'élaboration je coordonnais une équipe d'experts du ministère, on avait des personnes ressources. » dit un représentant du Ministère de l'Agriculture. La FAO fait le même constat « Il y a au Mali un problème de compétences... les textes ne sont qu'entre les mains des juristes sortis de l'ENA. Il y a une faiblesse de l'encadrement étatique, tous les anciens sont partis créer leur bureau d'études » donc pour devenir consultants !

L'incapacité d'aborder les décrets pour porter une vision commune et réaliste dans la continuité de l'esprit des concertations, se traduit par la rédaction de textes dont le seul souci est qu'ils soient juridiquement et politiquement corrects, oubliant la voix paysanne. Les 3 décrets suivants vont éclairer certaines facettes de nouvelle situation.

9.2.1 Un décret interprofession sans présence obligatoire des paysans !

Le décret fixant les modalités de création et d'enregistrement des organisations interprofessionnelles agricoles N°O8-793/P-RM est sorti le 31 décembre 2008 conformément a l'article 174 de la LOA : « sont acteurs ou intervenants d'une filière Agricole tous les agents économiques organisés des segments de la production, de la conservation, de l'approvisionnement, des services a la production, de la transformation, du conditionnement, de la commercialisation et de la consommation. »

Ces acteurs peuvent se regrouper à leur initiative au sein d'interprofessions qui visent à :

Définir et favoriser des démarches contractuelles entre ses membres; contribuer à la gestion des marchés, par une meilleure adaptation des produits aux plans quantitatif et qualitatif et par leur promotion

Connaître l'offre et la demande par la collecte, le traitement et la diffusion de l'information sur le ou les produits de la filière

Renforcer les capacités des membres de l'interprofession pour garantir la qualité du ou des produits

Renforcer la sécurité alimentaire sanitaire, en particulier par la sécurité des aliments, la traçabilité des produits, dans l'intérêt des utilisateurs et des consommateurs

La transcription en décret se révèle discriminante pour les paysans sur plusieurs points dont 2 mis en exergue ici.

L'article 2 stipule en effet « que les organisations interprofessionnelles se constituent librement, avec un nombre minimum de 2 acteurs ~. Il faudra être conforme d'ici 2 ans pour créer son interprofession, soit fin 2010 (article 19). Il ne peut y avoir qu'une seule interprofession par produit. Le Ministère de l'Agriculture alerte en les interpellant fortement lors de l'atelier de concertation qu'il sera obligé d'accepter même ce cas de figure

«...et vous n'y serez pas, les gens n'ont pas compris la pertinence, les malins-malins oui, si les transporteurs et les commerçants créent une interprofession riz avant les paysans, on ne pourra pas refuser. J'encourage la CNOP, l'APCAM a réagir pour créer des interprofessions avec des paysans, le décret dit qu'il faut seulement 2 acteurs, il n'est pas précisé qu'il faut des paysans... ".

Le juriste du SP confirme :

(( Par exemple pour l'interprofession, la première réflexion était issue de l'AOPP. Ensuite le SP a fait des modifications puis c'est passé au secrétariat du gouvernement. Par exemple 2 acteurs c'est une question d'interprétation cela n'exclu pas les paysans mais c'est vrai qu'on aurait du spécifier. »

En interrogeant la CNOP sur cette aberration, la réponse est cinglante :

(( Celui de l'interprofession c'est un instrument de l'État, les OP n'étaient pas prêtes sauf le coton qui a mis sur pied la première interprofession. Ce décret c'est un massacre pour nous, nous nous y sommes pas vraiment impliqués, je ne sais pas qui nous représentait ! » et mise sur le fait que (( Les choses vont se corriger, car ce n'est pas opérationnel, ils vont s'en rendre compte. »

L'article 5 ouvre aussi la porte aux non-professionnels « la moitié au moins des représentants des exploitants Agricoles, des transformateurs et le cas échéant des commerçants et conservateurs au sein de l'assemblée de l'interprofession exercent personnellement une activité dans la production, la transformation, la commercialisation du produit ou du groupe de produits concernés». Ainsi presque la moitié des représentants peuvent être dans l'interprofession sans exercer aucune des activités répertoriées. Il est aussi précisé dans ce même article que « les Régions produisant ou commercialisant le produit ou le groupe de produits sont représentées en son sein »sans spécifier leur fonction exacte.

De plus a ce jour le décret validant le statut d'exploitant agricole n'est toujours pas opérationnel, ainsi officiellement il n'y a pas d'exploitants Agricoles statutairement parlant!

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore